Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, il est vrai que les parents veulent avant tout une solution de proximité, qui peut parfois se trouver de l’autre côté de la frontière… Je me rendrai la semaine prochaine dans votre département, et j’ai assisté récemment au comité de pilotage franco-wallon de ces établissements belges.

Nous avons triplé l’enveloppe destinée à éviter les départs contraints en Belgique. Pour autant, il y a une porosité entre la Belgique et la France, qui fonctionne dans les deux sens. Nous devons agir pour développer une réponse de proximité, mais la Belgique n’est pas la seule destination pour les personnes handicapées : malheureusement, des enfants vivent en Lozère ou dans le Lot-et-Garonne, loin du domicile de leurs parents. Notre devoir est de travailler à les ramener au plus près des familles, qui veulent par-dessus tout ne plus avoir à se déplacer pour voir leur enfant. C’est pourquoi nous consacrons 180 millions euros à la transformation de l’offre médico-sociale et triplons l’enveloppe destinée à éviter les départs forcés, dont le montant passe ainsi de 15 millions à 45 millions d’euros.

Cependant, la problématique majeure est celle du retour d’adultes qui, après avoir vécu vingt ans ou plus en Belgique, sont presque plus belges que français. Certains n’ont même plus de famille en France, et il est très difficile de les rapatrier. Pour être franche avec vous, nous n’avons pas trouvé la solution à ce jour, mais nous sommes totalement mobilisés pour prendre cette question à bras-le-corps : cela relève de l’un des cinq chantiers prioritaires annoncés lors du comité interministériel du handicap.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour la réplique.

M. Marc Laménie. C’est un réel problème, qui se pose malheureusement depuis de nombreuses années. Des choses ont été faites, mais c’est une œuvre de longue haleine qui impose de mobiliser toutes les forces vives. La coopération transfrontalière existe déjà au niveau de l’ARS ou de l’assurance maladie. Je vous remercie des avancées déjà obtenues et de ce que vous pourrez faire à l’avenir.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton.

Mme Nicole Duranton. Je tiens à féliciter notre collègue Philippe Mouiller et les membres du groupe de travail pour cet excellent rapport d’information.

Aujourd’hui, le contrôle par les pouvoirs publics de l’offre médico-sociale à destination des personnes handicapées relève de trois échelons territoriaux, dont les rôles sont parfois difficiles à distinguer pour les utilisateurs.

En premier lieu, l’État élabore un schéma pour les établissements ou services accueillant des catégories de personnes dont les besoins ne peuvent être appréciés qu’à ce niveau. La planification nationale prend la forme de grands plans pluriannuels, généralement annoncés par le chef de l’État dans le cadre triennal de la conférence nationale du handicap.

En deuxième lieu, le représentant de l’État dans la région, appuyé par les services de l’ARS, établit les schémas régionaux de l’offre médico-sociale relatifs aux établissements et services accueillant des personnes handicapées.

En troisième lieu intervient le conseil départemental. Ses compétences se sont réduites, à l’inverse de celles de l’État. En effet, détenteur d’une compétence générale en matière sociale depuis les lois de décentralisation, compétence qui a été confirmée par la loi du 27 janvier 2014, le département aurait dû naturellement prétendre à la coordination et à l’organisation de l’offre médico-sociale sur son territoire. Or, dans les faits, le conseil départemental n’a la main que sur les segments résiduels de l’offre, ceux qui n’entrent pas dans les compétences de l’État.

Voilà peu, Sébastien Lecornu, ancien président du conseil départemental de mon département et aujourd’hui ministre délégué chargé des collectivités territoriales, expliquait qu’il fallait développer le sur-mesure et non plus le prêt-à-porter, avec un « État maître tailleur » qui sache s’adapter aux territoires en partant de leurs attentes. Le schéma de l’offre médico-sociale du département est réellement complémentaire des schémas régionaux en matière de planification de l’offre. N’oublions pas que le département reste le premier à connaître les besoins exprimés et doit, à ce titre, être à l’origine de la décision de création de l’offre.

Prendrez-vous en compte, madame la secrétaire d’État, l’excellente proposition n° 5 du rapport de M. Mouiller, afin de rendre aux conseils départementaux un rôle décisif en matière de planification de l’offre médico-sociale ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Madame la sénatrice, il existe effectivement une stratification de compétences. Pour autant, chacun des acteurs peut apporter un regard spécifique.

Vous avez évoqué le rôle des départements et des régions ; nous avons parlé précédemment d’iniquités territoriales. Les ARS ont un rôle très important à jouer à cet égard, en termes de répartition des moyens. Il nous faut donc vraiment conserver leur apport spécifique, qui peut nous aider à construire le parcours vers la société inclusive, en décloisonnant sanitaire et médico-social. C’est indispensable pour les personnes handicapées, leur accès aux soins, leur parcours de santé, et tout simplement leur parcours de vie.

Pour autant, il nous manque encore souvent des acteurs, d’où l’intérêt de pouvoir travailler sur les territoires 100 % inclusifs. C’est tout l’objet du lancement de cette démarche. Il nous faut pouvoir sortir du seul schéma géographique. Sébastien Lecornu a raison, il faut partir d’un schéma territorial souple et agile, fixer un cadre général tout en définissant précisément les compétences de chacun. C’est tout l’enjeu des territoires inclusifs. Je serai le 13 novembre dans la Manche pour lancer ce processus avec votre collègue Philippe Bas et le département.

Nous avons besoin de l’implication de chaque acteur. Pour l’heure, il manque par exemple celle du rectorat, pour ce qui concerne l’inclusion scolaire, ou celle des bailleurs sociaux, s’agissant de l’habitat inclusif. C’est une démarche à géométrie variable selon les besoins, mais les maisons départementales des personnes handicapées jouent un rôle indispensable pour orchestrer, évaluer, organiser ce parcours. Nous avons allégé leurs tâches administratives pour qu’elles puissent se concentrer sur ce rôle.

Ces compétences doivent être précisées et organisées dans un cadre souple, pour laisser l’agilité des territoires s’exprimer, car à mon sens c’est avant tout des territoires que les solutions émergeront.

Conclusion du débat

Mme la présidente. Pour conclure le débat, la parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, permettez-moi de vous souhaiter bon vent pour vos engagements futurs !

Il me revient de prononcer quelques mots de conclusion au nom de la commission des affaires sociales, qui a demandé la tenue de ce débat.

Je souhaite avant toute chose remercier notre collègue et ami Philippe Mouiller du rapport qu’il a récemment publié ; j’espère qu’il inspirera les politiques publiques du handicap à venir.

Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, des réponses que vous avez apportées à nos collègues et de l’accueil que vous faites régulièrement au travail parlementaire. J’aime à souligner que sa publicité n’est souvent pas à la mesure de son utilité ! (Sourires.)

Concernant le secteur hospitalier, je n’ai jamais fait mystère de mon scepticisme quant à la tarification à l’activité, dont l’application peut parfois nuire gravement à la pertinence des soins prodigués.

Or j’ai souvenir que, au moment du lancement de sa réflexion, le groupe de travail sénatorial sur le financement de l’accompagnement du handicap s’est longuement interrogé sur l’avenir d’une réforme tarifaire des établissements et services médico-sociaux accueillant les personnes handicapées engagée par le Gouvernement en 2014, mais dont l’aboutissement n’est toujours pas connu avec certitude : je veux parler de la réforme SERAFIN-PH. Bien qu’elle soit éclipsée par l’actualité, qui a récemment surtout mis en valeur le chantier tarifaire de la prise en charge de la dépendance, cette réforme n’en est pas moins très attendue. Elle a pour objet, je le rappelle, d’extraire l’attribution des crédits versés par le financeur d’une stricte logique de reconduction des dotations historiques et d’enfin faire correspondre les besoins réels des personnes handicapées admises dans des structures d’accompagnement et l’allocation de l’argent public qui finance ces structures.

Je note avec inquiétude que cette réforme, que tout le monde s’accordait à dire bien engagée, montre quelques signes d’essoufflement et prend une tournure différente de celle qui avait été initialement annoncée.

Les conclusions de notre rapporteur ont effet mis en lumière que les besoins en matière de santé somatique et psychique des personnes handicapées faisaient certes l’objet d’un repérage et d’une nomenclature affinée, mais que leurs besoins socio-éducatifs beaucoup moins précisément retracés. Or, madame la secrétaire d’État, la tarification à l’acte médico-social – si vous me permettez d’utiliser ce raccourci – n’a justement rien à voir avec la tarification à l’acte médical, dont il semble pourtant qu’elle se rapproche dangereusement.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat. C’est tout à fait inexact !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Vous aurez l’occasion de revenir sur le sujet !

C’est tout l’enjeu de la société inclusive, dont il n’a cessé d’être question, que de démédicaliser l’accompagnement des personnes handicapées et de revaloriser fortement sa dimension humaine et sociale.

Je conviens que cette tâche est particulièrement ardue. Quantifier les besoins en santé a toujours été plus aisé que quantifier les besoins en suivi social. Cela n’en demeure pas moins, à mon sens, le principal enjeu du secteur pour l’avenir.

J’espère de tout cœur que le Gouvernement, qui a donné, madame la secrétaire d’État, un signal très fort en vous plaçant directement auprès du locataire de Matignon, sera au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

Mme la présidente. Nous en avons terminé avec le débat sur le financement de l’accompagnement médico-social des personnes handicapées.

5

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 6 novembre 2018, à quatorze heures trente et le soir :

Nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture après engagement de la procédure accélérée, relative à la lutte contre la manipulation de l’information (n° 30, 2018-2019) et nouvelle lecture de la proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture après engagement de la procédure accélérée, relative à la lutte contre la manipulation de l’information (n° 29, 2018-2019) ;

Rapport de Mme Catherine Morin-Desailly, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 75, 2018-2019) ;

Avis de M. Christophe-André Frassa, fait au nom de la commission des lois (n° 53, 2018-2019) ;

Rapport de M. Christophe-André Frassa, fait au nom de la commission des lois (n° 54, 2018-2019).

Projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (procédure accélérée) (n° 9, 2018-2019) ;

Rapport de M. Ladislas Poniatowski, fait au nom de la commission spéciale (n° 92, 2018-2019) ;

Texte de la commission (n° 93, 2018-2019).

Projet de loi portant suppression de surtranspositions de directives européennes en droit français (procédure accélérée) (texte de la commission, n° 10, 2018-2019) ;

Rapport de Mme Marta de Cidrac et M. Olivier Cadic, fait au nom de la commission spéciale (n° 96, 2018-2019) ;

Texte de la commission (n° 97, 2018-2019).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures trente.)

 

nomination des membres dune mission commune dinformation

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai dune heure prévu par larticle 8 du règlement, la liste des candidatures préalablement publiée est ratifiée.

Mission commune dinformation portant sur les politiques publiques de prévention, de détection, dorganisation des signalements et de répression des infractions sexuelles susceptibles dêtre commises par des personnes en contact avec des mineurs dans le cadre de lexercice de leur métier ou de leurs fonctions (28 membres)

Mmes Esther Benbassa, Annick Billon, Maryvonne Blondin, MM. Bernard Bonne, Max Brisson, François-Noël Buffet, Mmes Catherine Conconne, Catherine Deroche, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, M. André Gattolin, Mmes Marie-Pierre de la Gontrie, Véronique Guillotin, M. Olivier Henno, Mmes Corinne Imbert, Muriel Jourda, Françoise Laborde, Florence Lassarade, M. Martin Lévrier, Mmes Michelle Meunier, Marie Mercier, Brigitte Micouleau, M. Stéphane Piednoir, Mme Laurence Rossignol, MM. Michel Savin, Jean-Pierre Sueur, Mme Dominique Vérien et M. Dany Wattebled.

 

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD