M. Philippe Dallier. C’est kitsch !
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. C’est possible, après tout… Jacques Mézard me souffle qu’il préfère les boules avec de la neige qui tombe ! (Nouveaux sourires.) À chacun ses goûts !
M. Alain Richard. C’est générationnel !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Attention, cela figurera au compte rendu !
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Quatrième engagement, qui est essentiel, les plateformes s’engagent à donner davantage d’informations aux municipalités. C’est un souhait que les collectivités ont souvent réitéré.
Selon nous – je le dis ici, ainsi je n’y reviendrai pas lors de l’examen des amendements –, le débat porte non pas sur la durée de 120 jours, ce qui me conduira à donner un avis défavorable sur les propositions visant à passer à 90 jours ou 60 jours, mais sur les personnes qui utilisent leurs résidences secondaires uniquement pour les plateformes touristiques.
Si nous parvenons à régler ce problème, nous aurons fait une avancée significative en matière de fluidité du marché locatif.
Mme la présidente. L’amendement n° 427 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Garriaud-Maylam, M. Longuet, Mme Deromedi, MM. Milon, Bonhomme et Bascher, Mme Boulay-Espéronnier, MM. H. Leroy et Laménie et Mme Imbert, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Cet amendement, présenté sur l’initiative de Philippe Dominati et cosigné par plusieurs d’entre nous, vise à supprimer l’article 51.
Cet article vise à instaurer de lourdes amendes, jusqu’à 10 000 euros pour les particuliers et 50 000 euros par annonce pour les plateformes, pour les annonces de location de meublés de tourisme qui n’auraient pas de numéro d’enregistrement ou dépasseraient, pour les résidences principales, les 120 jours – vous avez évoqué cette durée, monsieur le secrétaire d’État – de location au cours d’une même année civile.
En proposant la suppression de cet article, nous voulons éviter que notre pays ne surréglemente par rapport à nos voisins européens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Mon cher collègue, vous proposez de supprimer l’article 51. Or la commission a considéré que cet article instaurait un cadre juridique clair, qui donne les moyens aux communes de réguler de façon efficace et crédible l’offre de meublés touristiques, là où il existe une tension sur le marché du logement.
L’article ménage un équilibre qui est satisfaisant, comme l’a souligné M. le secrétaire d’État. Les personnes ont la liberté pleine et entière de louer leurs biens en meublé de tourisme, mais, dans le même temps, cette pratique est encadrée, ce qui est très important, surtout là où elle peut entraîner des tensions supplémentaires sur le marché local du logement.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Laménie, l’amendement n° 427 rectifié est-il maintenu ?
M. Marc Laménie. Les amendements qui tendent à supprimer un article recueillent presque toujours un avis défavorable de la part, à la fois, du rapporteur et du Gouvernement…
Au vu des avis qui ont été donnés, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 427 rectifié est retiré.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 758 rectifié, présenté par MM. Chaize et Bizet, Mme Deromedi, MM. Gremillet et Bascher, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, Savary et Pierre, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
2° Le I devient le II et est ainsi rédigé :
« II.- Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé.
« Cette déclaration préalable n’est pas obligatoire lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, sauf dans l’hypothèse où le propriétaire du local à usage d’habitation, constituant sa résidence principale, utilise une plateforme numérique prêtant gratuitement son concours à la mise en location de meublés de tourisme. » ;
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. L’objet de cet amendement est de rétablir l’exemption d’obligation de déclaration préalable pour les propriétaires de résidences principales, à l’exception des loueurs utilisant une plateforme numérique non transactionnelle prêtant gratuitement son concours à la mise en location de locaux meublés.
Une telle disposition permettrait d’épargner aux hébergeurs consciencieux une contrainte administrative qui avait disparu. À ce stade, il apparaît en effet nécessaire d’éviter d’empiler de nouvelles dispositions sur les mesures existantes. La France est en train de devenir le pays le plus compliqué pour la location meublée, alors qu’elle souhaite demeurer le premier pays touristique et manque d’hébergements dans ce secteur.
Par ailleurs, une telle disposition contribuerait à encourager les loueurs à se détourner de l’économie grise, qui se développe dans le secteur de la location meublée, à la faveur du développement de la réglementation dans ce secteur.
En outre, l’obligation de déclaration préalable comme moyen de contrôle est inutile pour les villes. En effet, au 1er janvier 2019, les plateformes de location de vacances en ligne qui réalisent les transactions entre les hébergeurs et les touristes auront l’obligation de collecter automatiquement la taxe de séjour auprès de leurs utilisateurs sur tout le territoire pour la reverser aux communes et communautés de communes.
À cette date, la seule taxe de séjour qui leur échappera sera celle qui est liée aux transactions réalisées hors ligne sur les plateformes de mise en relation qui n’assurent pas de service de télépaiement. Il est donc nécessaire de cibler la surveillance sur ce type de plateformes.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 787 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 855 est présenté par MM. Bargeton et Théophile, Mme Rauscent et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
, dont le second alinéa est supprimé,
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 787.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Cet amendement vise à revenir sur une disposition adoptée en commission.
Aujourd’hui, sauf dans les zones très tendues, lorsqu’une personne veut utiliser son bien uniquement à des fins de location sur une plateforme collaborative, elle doit déclarer le changement d’usage pour en faire une résidence meublée touristique, uniquement s’il s’agit de sa résidence secondaire.
En commission, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez étendu cette obligation de déclaration aux résidences principales dans toutes les communes. Or, comme je l’indiquais, pour le Gouvernement, le combat doit porter non pas sur les résidences principales, mais sur les résidences secondaires.
Que chacun de nos concitoyens puisse louer sa résidence principale les jours où il est absent, pour, à la fois, gagner un peu d’argent et permettre à d’autres de visiter quelque endroit de notre beau pays, c’est finalement très bien. En revanche, cela devient un problème quand il s’agit des résidences secondaires, qui sortent alors du marché de la location.
Notre amendement vise à revenir sur la décision de la commission, qui, selon nous, n’aura pas d’incidence sur le problème qu’évoquait M. Laurent et que je confirme pleinement et qui, en même temps, alourdira les démarches de celles et ceux qui utilisent leur résidence principale pour gagner un peu d’argent et permettre à certains de se déplacer.
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour présenter l’amendement n° 855.
M. Frédéric Marchand. Je n’ai pas grand-chose à ajouter après les excellentes explications de M. le secrétaire d’État.
M. Denormandie l’a dit, on ne ferait qu’instaurer un obstacle supplémentaire à la location de courte durée au détriment de centaines de milliers de Français. Je suis persuadé que, dans cet hémicycle, nous connaissons tous des personnes qui plébiscitent cette pratique en raison du gain de pouvoir d’achat qu’elle peut représenter.
Par ailleurs, une telle mesure dénature l’accord équilibré, trouvé en juin dernier entre les plateformes et le Gouvernement, qui comporte des engagements concrets et précis du secteur destinés à répondre aux préoccupations légitimes des villes et des utilisateurs de ces plateformes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Ces trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune tendent tous à revenir sur un ajout de la commission.
Je le rappelle, cet ajout fait suite au rapport du groupe de travail mené par nos collègues Viviane Artigalas et Patricia Morhet-Richaud. Nous avons considéré que le rétablissement d’une déclaration préalable n’était pas une charge disproportionnée pour les loueurs. En effet, cette déclaration peut être utile, d’une part, pour mieux percevoir la taxe de séjour, notamment dans le cas de location via des plateformes non transactionnelles, et, d’autre part, pour permettre aux communes de mener une politique de qualité sur ce type d’hébergement.
L’amendement n° 758 rectifié est néanmoins intéressant, car il tend à maintenir la déclaration simple en mairie lorsque la location est effectuée au travers d’une plateforme non transactionnelle. Pour autant, comme il revient sur la position et l’ajout de la commission, l’avis de cette dernière est défavorable.
L’avis est encore plus défavorable sur les amendements identiques nos 787 et 855, qui tendent à supprimer sans nuance la disposition de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 758 rectifié ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, au travers de cet amendement, vous alourdissez les démarches en cas de location de la résidence principale.
J’y insiste, on a cru pendant des années que le combat devait porter sur la location des résidences principales, alors que si vous l’empêchiez demain, vous ne régleriez en rien le problème. Au contraire, c’est une bonne chose de pouvoir louer votre résidence principale quand vous n’y êtes pas, puisque, par définition, elle ne sert normalement à rien d’autre.
Si jamais, en revanche, vous achetez une résidence secondaire pour ne faire que de la location, cela pose un vrai problème.
J’espère que j’aurai su vous convaincre du bien-fondé de l’amendement du Gouvernement. En tout cas, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 758 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Dans le cadre du rapport que nous avons réalisé, nous avions proposé, et la commission a voulu bien voulu nous suivre, que toute location de meublé touristique en résidence principale ou résidence secondaire fasse l’objet d’une simple déclaration en mairie.
Ces amendements en discussion commune tendent à revenir sur cette mesure. Ce n’est pourtant pas grand-chose que de demander aux propriétaires de remplir un formulaire avant de mettre leur bien en location. Ce dispositif est, au contraire, utile pour les maires, qui pourront mieux connaître leur parc de meublés de tourisme, quand bien même celui-ci est mouvant, et ainsi mener une politique de qualité dans ce domaine.
Il ne s’agit nullement de lutter contre les meublés de tourisme, car je considère que leur développement est un atout pour l’attractivité touristique de notre pays – je l’ai déjà dit – et apporte une nouvelle offre aux touristes, toujours plus nombreux, qui viennent le visiter.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour explication de vote.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Pour compléter l’intervention de Viviane Artigalas, j’indique que nous avons travaillé sur la question de la déclaration simplifiée en mairie par le propriétaire avec Michel Raison, président du groupe de travail sur le tourisme, et bien sûr en commission. J’y insiste, ce n’est pas vraiment grand-chose.
Ce dispositif favorisera, par ailleurs, une meilleure perception de la taxe de séjour, car, si les plateformes transactionnelles sont obligées de la percevoir dès 2019, ce n’est pas le cas des plateformes non transactionnelles.
On entend dire que la législation en la matière est mouvante et trop lourde, mais quel a été l’objectif du législateur ces dernières années ? Faire en sorte que les revenus perçus soient fiscalisés, comme tous les autres ; faire en sorte que la taxe de séjour puisse être recouvrée ; faire en sorte d’éviter que des biens ne soient soustraits du marché locatif traditionnel ; et, ici, faire en sorte que le propriétaire ait conscience que louer son bien n’est pas un acte anodin et permettre aux maires d’être mieux outillés pour mener une politique touristique.
Sont-ce là des objectifs blâmables ? Des dispositions disproportionnées ? Il ne nous semble pas ! Il s’agit seulement de faire rentrer dans le droit commun des activités qui ont pu se développer à sa marge, et en aucun cas de lutter contre leur développement qui, je le répète, est nécessaire pour répondre aux attentes des touristes.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je veux tout d’abord rappeler, pour m’en réjouir, que c’est ici, au Sénat, que, pour la première fois il y a déjà un certain nombre d’années, nous avons mis, notamment à la commission des finances, tous les sujets liés à l’économie numérique sur la table.
Nous avons tout d’abord examiné ce qui touchait à la fiscalité – c’est bien normal à la commission des finances ! –, que ce soit la perception de la TVA sur le e-commerce, mais aussi la fiscalisation des revenus de complément. Nous nous sommes également interrogés sur les effets induits du développement de ces pratiques.
Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis que les choses aient évolué dans le bon sens, car je me souviens de ce que l’on entendait au début. Les plateformes – je ne citerai pas de nom – hurlaient à la mort en disant qu’on allait tuer leur modèle économique ; j’en ai entendu des vertes et des pas mûres, dans ce domaine ! D’autres plaidaient pour la plus grande libéralisation possible, aussi bien pour les plateformes que pour les propriétaires qui allaient louer leur bien.
Il a tout de même fallu un certain temps avant de se dire qu’il convenait d’imposer des règles. Je me réjouis que nous y soyons parvenus et que les plateformes aient aussi fini par entrer dans le jeu, parfois même en prenant les devants comme sur la taxe de séjour à Paris, considérant que si elles ne faisaient pas d’efforts, tout cela finirait probablement mal…
Cela dit, monsieur le secrétaire d’État, j’ai peut-être un point de désaccord avec vous. Sur la résidence principale, je suis d’accord, tant que celle-ci reste vraiment une résidence principale.
Sur le reste et sur les 120 jours, le problème vient, je le crois, de la massification du tourisme partout à travers le monde. Des touristes, il y en a de plus en plus, notamment dans les très grandes villes. On a des exemples en tête, comme celui de Venise, qui est en train de devenir un musée, où il n’y aura bientôt plus que des hôtels et des appartements en Airbnb, et plus aucun commerce. Ce risque est réel dans les plus grandes villes touristiques du monde. Je ne dis pas que Paris en est là, mais je pense qu’il faut sérieusement se poser la question.
Puisque je vous parlais précédemment de la Seine-Saint-Denis, j’ai été assez stupéfait de découvrir qu’Airbnb y fonctionnait bien aussi ! Nous ne sommes pas loin du Stade de France quand il y aura des grands événements sportifs… Bref, cela fonctionne !
Nous avons donc vraiment intérêt à légiférer et à réglementer ces questions, parce que, les effets de bord, nous les connaissons tous. Le bien est loué tellement cher à la journée qu’il rapporte plus en étant loué 120 jours par an qu’avec un bail classique de la loi de 1989 ou même qu’avec le bail mobilité que nous venons de créer. Le risque de voir échapper nombre de ces logements est réel.
Je suis pour un encadrement. Peut-être avons-nous trouvé le bon niveau, mais nous y reviendrons sans doute dans les années à venir, parce que le risque est très important.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. Je n’ai pas été convaincu par les propos de M. le secrétaire d’État, parce que les dispositions de l’amendement que j’ai présenté s’inscrivaient, au contraire, dans une logique de simplifications, notamment pour les résidences principales.
Toutefois, vu l’avis des deux camps (Sourires.), je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 758 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 787 et 855.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 226, présenté par M. P. Laurent, Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 13 et alinéa 30, première phrase
Remplacer les mots :
cent vingt
par les mots :
quatre-vingt-dix
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. J’imagine, par avance, la réponse de M. le secrétaire d’État, mais je veux tenter tout de même de défendre mon amendement.
Nous proposons donc de passer de 120 à 90 le nombre maximal de nuitées autorisées annuellement pour les propriétaires louant leur résidence comme meublé de tourisme via les plateformes de réservation, type Airbnb.
Ce seuil de 120 jours applicable aux communes ayant adopté le changement d’usage, soit les communes de plus de 200 000 habitants, découle directement de la définition de la résidence principale explicitée par l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989. Or cet article est antérieur à l’arrivée des plateformes collaboratives, phénomène qu’il n’a par conséquent pas anticipé. Son objet n’a jamais été de constituer un cadre de réglementation pour les locations saisonnières.
Il semble nécessaire à nos yeux de revoir le seuil des 120 jours, actuellement trop permissif au vu du contexte global, avec les phénomènes de forte ubérisation du marché immobilier, de concurrence déloyale auprès des hôteliers traditionnels et de tensions en matière de logement.
Abaisser le seuil à 90 jours permettra de limiter les conséquences néfastes des locations saisonnières sur les locations traditionnelles, mais aussi d’effectuer une harmonisation avec les visas touristiques de l’espace Schengen, qui sont d’une durée similaire.
J’ajoute qu’une limite de 90 jours n’est en aucun cas trop stricte. D’ailleurs, de nombreuses villes internationales ont adopté des mesures bien plus contraignantes, notamment à Amsterdam et San Francisco, où le nombre maximal de nuitées est de 60 jours par an.
À ce titre, parce que le problème est non pas français, mais international, le choix que fait la France a une implication sur la régulation internationale de ce phénomène. Nous ne pouvons pas ignorer que, avec 120 jours, nous sommes dans la fourchette haute des réglementations existant en Europe et en Amérique du Nord, notamment.
Nous proposons donc 90 jours. D’ailleurs, quelque 90 % des loueurs sont aujourd’hui en dessous des 120 jours par an. Le nombre de nuitées que nous proposons est adapté et vise principalement les multipropriétaires qui cherchent à se spécialiser de manière industrielle dans la location saisonnière.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État, il faut relativiser la question du seuil. Le seuil de 120 jours est aujourd’hui particulièrement respecté et respectable. Il vaut mieux observer l’ensemble des obligations qui sont applicables aux loueurs.
Mon cher collègue, vous avez fait référence à Londres, où la durée maximale est de 90 jours. Mais cette durée s’applique aussi bien aux résidences principales qu’aux résidences secondaires, sans qu’aucune autorisation soit nécessaire en deçà de ce seuil. À Paris, il n’est pas possible de louer sa résidence secondaire, ne serait-ce qu’une journée, sans autorisation de changement d’usage, donc sans compensation.
Le régime en vigueur est donc déjà particulièrement strict. Il nous a semblé disproportionné de devoir le renforcer, et probablement non conforme au droit européen. Nous avons préféré opter pour un système qui maintient un équilibre satisfaisant entre, d’une part, la location touristique et, d’autre part, la préservation du logement, surtout, comme le soulignait M. le secrétaire d’État, avec le renforcement des sanctions.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je veux insister sur les propos de Mme la rapporteur : la législation actuelle est telle que, sur le papier, il est impossible de louer une résidence secondaire à Paris.
Si vous le faites, ne serait-ce que pour une seule journée, dans la plupart des endroits, vous devez construire, réhabiliter ou transformer, par exemple des bureaux ou un local de commerce en logements, le même nombre de mètres carrés dans la capitale. C’est ce que prévoit la réglementation.
Il est donc normalement tout à fait impossible de louer une résidence secondaire à Paris. Dans les faits, comme vous l’avez rappelé, même si l’on n’a pas les chiffres exacts qui sont bien sûr impossibles à connaître, ce sont très certainement des milliers de logements qui enfreignent la règle.
Notre objectif, c’est d’attraper, si j’ose dire, ces logements-là, parce que ce sont eux qui posent un véritable problème et conduisent à une atrophie du stock de logements à la location. Ce sont eux que nous allons chercher. C’est la raison pour laquelle nous renforçons significativement les sanctions à leur égard. C’est aussi pour cela que nous nous sommes mis d’accord avec les plateformes sur des engagements contractuels que j’évoquais précédemment ; nous leur avons dit que, si elles voulaient que leur système perdure, il fallait parvenir à limiter l’effet de bord, pour reprendre l’expression de M. Dallier.
Encore une fois, cet effet de bord porte non pas sur les résidences principales, mais sur les résidences qui sortent du marché de la location. La résidence principale ne sort jamais du marché de la location.
Dernier point, vous avez évoqué la concordance avec la durée des visas Schengen. Aujourd’hui, on se rend compte que nombre de logements disponibles sur les plateformes sont loués par nos concitoyens eux-mêmes et non par des touristes étrangers. De nombreux touristes étrangers y ont recours, mais beaucoup de nos concitoyens en profitent aussi.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Cela a déjà été dit, mais il est important de rappeler que l’objectif de cette loi est bien de remettre des logements en location annuelle. Or baisser la durée à 90 jours ne conduira pas à cet effet.
Par ailleurs, un point n’a pas été abordé jusque-là : nous devons parvenir à un certain équilibre et à une stabilité de la législation. Ce seuil de 120 jours semble accepté maintenant par une grande majorité des acteurs de la location touristique, par les plateformes, mais aussi par les loueurs. Il faut en rester là, parce qu’il ne faut pas changer tout le temps la législation.
Le seuil de 120 jours est satisfaisant. Nous ne voterons pas cet amendement et soutiendrons le maintien de ce seuil.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Je veux formuler deux remarques.
Madame la rapporteur, vous avez fait allusion au droit européen. Ce dernier, nous devons aussi le créer nous-mêmes. En l’occurrence, c’est un sujet qui est devant nous, devant l’Europe. Il n’y a pas un droit européen qui nous tombe dessus !
La France doit être à la pointe des pays qui portent ce débat au plan européen avec les grandes villes qui sont concernées, les autres grandes villes françaises. Nous avons un devoir d’anticipation et de création du droit européen, nous ne sommes pas là pour faire comme s’il tombait du ciel.
Par ailleurs, on peut effectivement entendre l’argument qui consiste à dire que cette mesure ne remettra pas de logements sur le marché locatif. Mais, à mon sens, il faut un arsenal qui, d’emblée, soit très dissuasif. C’est la raison pour laquelle tous les amendements que je défendrai vont dans le sens du renforcement des sanctions.
Le signal doit être fort ! Nous discutons de manière parfois un peu naïve, comme si nous avions face à nous des personnes avec lesquelles nous allions pouvoir discuter facilement. Mais ces plateformes sont des multinationales, qui ont une force de développement importante.
D’ailleurs, le phénomène a été extrêmement rapide, et il peut encore s’étendre. Si nous n’envoyons pas un signal législatif fort, nous serons demain, à la faveur des événements internationaux qui vont se tenir en France par exemple, facilement débordés par la croissance de ce phénomène. Il nous faut donc un arsenal législatif dissuasif, et tout de suite ! Sinon nous allons rediscuter régulièrement du renforcement des mesures, parce que nous nous apercevrons que le dispositif développé par ces plateformes va beaucoup plus vite que notre capacité à y répondre.
Je plaide pour une réponse qui, d’emblée, soit très forte et très dissuasive.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je ne veux pas qu’il y ait de malentendu. Dans le projet de loi que nous avons proposé, nous avons fixé, dès le début, des sanctions sans commune mesure. Avant, il n’y avait pas de sanctions pour les plateformes ; maintenant, pour chaque annonce qui n’est pas conforme à la loi, les sanctions vont de 12 500 euros à 50 000 euros. Je peux vous assurer que le signal envoyé aux plateformes est très fort.
Parallèlement à cela, les engagements contractuels pris devant le Gouvernement que j’évoquais précédemment ont été pris non par une ou deux plateformes, mais par la Fédération des plateformes collaboratives. Cela n’a jamais été fait à travers le monde. Nous n’avons pas obtenu ce résultat facilement : il a fallu six ou sept mois de discussions franches et constructives, comme on dit, avec l’ensemble de ces plateformes.
Non seulement nous envoyons un signal, mais en plus la détermination du Gouvernement est totale. Je tenais à le souligner, pour que vous n’en doutiez pas.