M. le président. Le sous-amendement n° 1081 rectifié, présenté par MM. Capo-Canellas et Lafon, est ainsi libellé :
Amendement n° 519 rectifié, après l’avant-dernier alinéa
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … - Pour les communes membres de la métropole du Grand Paris, les obligations prévues à la présente section peuvent être transférées à l’établissement public territorial mentionné à l’article L. 5219-2 du code général des collectivités territoriales dont ces communes sont membres, dans les conditions et selon les modalités prévues au présent article.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Il s’agit de tenir compte de la réalité de l’intercommunalité en première couronne de l’Île-de-France.
Les établissements publics territoriaux, qui ont été créés par une loi de 2016, regroupent tous plus de 200 000 habitants en Île-de-France. Selon moi, plus que la métropole du Grand Paris, qui rassemble toute la première couronne et Paris, cet échelon me semble le plus pertinent pour appliquer le dispositif que propose Marc-Philippe Daubresse au nom de la commission des lois. Je rappelle que les établissements publics territoriaux disposent d’importantes prérogatives en matière de construction et d’aménagement.
M. le président. Madame le rapporteur, nous en arrivons au moment de vérité : la mise en application de votre engagement.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission des affaires économiques préfère l’expérimentation proposée par Marc-Philippe Daubresse au niveau de l’EPCI. Je demande donc le retrait de l’amendement n° 30 rectifié ; sinon l’avis sera défavorable.
Nous sollicitons également le retrait de l’amendement n° 269 rectifié ter, pour ne pas augmenter le type de logements sociaux devant être décomptés. À défaut, ce sera un avis défavorable.
Il ne nous a pas paru souhaitable de modifier le périmètre des communes concernées au-delà de l’uniformisation des seuils que nous avons prévus. L’avis est donc défavorable sur les amendements identiques nos 410 rectifié ter et 849 rectifié bis, ainsi que sur l’amendement n° 39 rectifié bis.
Au dispositif proposé par l’amendement n° 40 rectifié bis, nous préférons l’expérimentation proposée par Marc-Philippe Daubresse : retrait ou, à défaut, avis défavorable.
La commission n’a pas souhaité modifier les modalités de calcul de la population des communes servant de seuil pour l’application de la loi SRU : retrait ou, à défaut, avis défavorable sur l’amendement no 291 rectifié ter ainsi que sur les amendements identiques nos 292 rectifié quinquies et 524 rectifié bis. L’avis est le même pour l’amendement n° 680 rectifié bis.
La commission a accepté un amendement de Philippe Dallier prévoyant une modification du taux, mais elle n’a pas souhaité aller au-delà. Elle émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 247.
L’amendement n° 584 est contraire à la position de la commission : avis défavorable.
Sur l’amendement n° 440 rectifié, la commission émet également un avis défavorable. Elle ne souhaite pas modifier les taux.
La commission ne souhaite pas modifier la liste des logements décomptés : retrait ou, à défaut, avis défavorable sur les amendements nos 209, 285 rectifié et 286 rectifié.
La commission est défavorable à l’amendement n° 210.
Concernant l’amendement n° 35 rectifié ter, nous avons retenu le principe d’une expérimentation. L’avis sera donc défavorable.
La commission émet un avis très favorable sur l’amendement n° 519 rectifié, présenté par Marc-Philippe Daubresse. À titre personnel, je suis favorable au sous-amendement n° 1155 présenté par Mme Létard. Il n’a en effet pas pu être examiné par la commission des affaires économiques, puisqu’il a été déposé après sa réunion, même s’il en avait été question de manière informelle.
Enfin, la commission a émis un avis favorable sur le sous-amendement n° 1081 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’amendement n° 30 rectifié a pour objet de prévoir l’application du dispositif SRU au niveau des EPCI, et non de la commune. C’est un avis défavorable : ainsi rédigé, il ferait carrément sauter la loi SRU.
Sur l’amendement n° 269 rectifié ter, qui vise à exclure la population carcérale du recensement de la population, l’avis est défavorable. Je note d’ailleurs que, si nous additionnions l’ensemble des exemptions proposées par les différents amendements, il n’y aurait plus de loi SRU.
J’émets également un avis défavorable sur les amendements identiques nos 410 rectifié ter et 849 rectifié bis.
Sur l’amendement n° 39 rectifié bis, qui vise à restreindre le périmètre d’application du dispositif aux agglomérations de plus de 50 000 habitants comprenant un chef-lieu de 20 000 habitants et non plus de 15 000 habitants, c’est un avis défavorable. Il en va de même pour l’amendement n° 40 rectifié bis, pour les mêmes raisons.
Concernant l’amendement n° 291 rectifié ter, madame Lavarde, nous ne sommes pas favorables à l’inclusion du logement intermédiaire. L’avis est donc défavorable.
L’avis est défavorable sur les amendements identiques nos 292 rectifié quinquies et 524 rectifié bis, qui visent à exclure de la définition des résidences principales les logements intermédiaires dont le permis de construire est délivré à compter du 1er janvier 2019. L’amendement n° 680 rectifié bis visant le même objectif, j’y suis également défavorable.
L’amendement n° 247 vise à abaisser le taux de logements sociaux à 20 % pour les communes dont la totalité du territoire s’inscrit dans un périmètre de protection des abords de monuments historiques. J’ai entendu, monsieur le sénateur Schmitz, la difficulté particulière qui se pose à Versailles. Il est toutefois difficile de trouver une solution législative pour une commune, même si, pour être honnêtes, nous avons réfléchi à la question. Les solutions doivent être trouvées en travaillant avec les préfets.
L’amendement n° 584 tend à revenir au texte initial du Gouvernement. Nous y sommes donc favorables.
L’amendement n° 440 rectifié vise à réduire purement et simplement le taux de logement social de 25 % à 20 % dans les secteurs tendus et de 20 % à 15 % dans les secteurs moins tendus. Ce serait l’enterrement ou l’incinération de la loi SRU ! L’avis est défavorable.
L’amendement n° 209 vise lui aussi à revenir au texte initial du Gouvernement. Nous y sommes bien sûr favorables.
L’amendement n° 285 rectifié tend à intégrer à l’inventaire des logements sociaux SRU les places créées dans des maisons d’enfants à caractère social. Nous y sommes défavorables.
L’amendement n° 286 rectifié entend pour sa part comptabiliser les places en centres d’hébergement d’urgence dans l’inventaire SRU. Nous y sommes également défavorables.
Nous sommes en revanche favorables à l’amendement n° 210, lui aussi en harmonie avec la position initiale du Gouvernement.
En l’état, nous sollicitons le retrait de l’amendement n° 35 rectifié ter, défendu par M. Richard. Sinon, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° 519 rectifié, présenté par M. Daubresse, et le sous-amendement n° 1155, présenté par Mme Létard, sont très intéressants, mais ils méritent selon nous d’être retravaillés. En l’état, j’émets donc un avis défavorable. Il s’agit toutefois d’une piste intéressante, à condition évidemment de ne pas toucher au stock, ni au taux de 25 %. Des études doivent toutefois être menées pour étudier les conséquences exactes de cette mesure.
Prendre comme référence les EPT ne me paraît pas la bonne solution, monsieur Capo-Canellas. Je ne nourris pas d’obsession contre les EPT…
M. Philippe Dallier. Encore que… (Sourires.)
M. Alain Richard. Vous en parlez souvent ! (Nouveaux sourires.)
M. Jacques Mézard, ministre. Il m’arrive d’en parler, en effet. Je peux me tromper, mais je ne suis pas absolument convaincu que ce soit la création institutionnelle la plus pertinente.
M. Vincent Capo-Canellas. Mais les EPT existent !
M. Jacques Mézard, ministre. J’émets donc un avis défavorable sur le sous-amendement n° 1081 rectifié, mais je vous confirme l’ouverture d’une réflexion pour essayer de résoudre ces problèmes.
M. le président. Je vous rappelle, mes chers collègues, que vos explications de vote doivent porter sur l’amendement que je m’apprête à mettre aux voix, et non sur l’ensemble des amendements en discussion commune.
Je mets aux voix l’amendement n° 30 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote sur l’amendement n° 269 rectifié ter.
M. Jérôme Bascher. Je voterai l’ensemble des amendements proposés par mes collègues de la majorité sénatoriale, même si je me rallierai certainement, in fine, à la sage position de la commission des affaires économiques.
S’il y a autant d’amendements sur ce projet de loi, c’est bien qu’il n’est pas parfait et qu’il omet de nombreuses mesures pourtant très sociales. Quand on raisonne avec des stocks, des ratios, on oublie un nombre considérable d’éléments au numérateur comme au dénominateur.
Essayons d’avancer, de progresser, mais ce ne sera pas la révolution copernicienne que l’on était en droit d’attendre dans un nouveau monde. Il faudrait enfin prendre en compte les personnes hébergées, plutôt que le logement en lui-même. Certains amendements traiteront ultérieurement de ce sujet.
M. le président. Vous venez de prendre la parole sur l’ensemble des amendements, mon cher collègue. Cela ne correspond pas à la règle que je viens d’énoncer. Peut-être nous sommes-nous mal compris…
Je mets aux voix l’amendement n° 269 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 410 rectifié ter et 849 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote sur l’amendement n° 291 rectifié ter.
Mme Christine Lavarde. Je retire mes amendements nos 291 rectifié ter et 292 rectifié quinquies pour me rallier à l’amendement de M. Dallier, qui relève de la même philosophie : la continuité de l’offre de logements sur l’ensemble du territoire, pour l’ensemble de la population.
M. le président. Les amendements nos 291 rectifié ter et 292 rectifié quinquies sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 524 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l’amendement n° 680 rectifié bis.
M. Philippe Dallier. Je suis un peu embêté pour Christine Lavarde, car cet amendement était un amendement d’appel. Je ne vais donc pas le soumettre aux voix.
Je le redis, aucun maire sous le coup de l’article 55 ne fera de logement locatif intermédiaire, car cela les pénaliserait de tous les côtés : dans le nombre de logements sociaux à construire, dans les recettes de taxe foncière, etc. Pourtant, ces logements répondent à des besoins réels, dans tous les territoires.
La rédaction actuelle ne me semble pas opérante, et il y a là un vrai sujet à traiter. Toutefois, pour rester cohérent avec l’axe adopté par la commission, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 680 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 247.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote sur l’amendement n° 440 rectifié.
M. Alain Fouché. Tous ces amendements se ressemblent, certains étant plus stricts que d’autres. Lorsque nous avons débattu du projet de loi de Mme Duflot, il a bien été dit que l’application des obligations n’était pas automatique. Il faut tenir compte de plusieurs cas de figure : un maire dont le prédécesseur n’a rien fait pendant des années ne peut pas construire suffisamment de logements sociaux dans les délais impartis pour combler le retard ; certains maires ne le peuvent pas non plus pour des raisons techniques ou autres qui ont été expliquées par plusieurs collègues ; enfin, d’autres ne le veulent pas, pour des raisons purement électoralistes.
Les préfets ont pour mission de prendre en compte ces situations. Dans mon département, les préfets qui se sont succédé ont regardé comment les choses fonctionnaient commune par commune. Il ne doit pas y avoir d’automaticité, il me semble important qu’il y ait une certaine souplesse.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote sur l’amendement n° 285 rectifié.
M. Patrick Chaize. Je ne comprends pas la position de la commission et du Gouvernement… J’ai le sentiment que l’on ne veut ni faire bouger les choses ni les regarder de façon pragmatique.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Pas du tout !
M. Patrick Chaize. Très franchement, il n’y a rien de plus social que des maisons d’enfance à caractère social ! Ne pas les prendre en compte dans les ratios pose vraiment problème aux communes qui accueillent ce genre de structures et rencontrent par ailleurs des difficultés pour construire des logements.
M. le président. Monsieur Richard, l’amendement n° 35 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Alain Richard. J’ai bien entendu la position du ministre : le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement « pour l’instant »… Cela m’a conduit à m’interroger : à quel instant le Gouvernement pourrait-il devenir plus compréhensif ? (Sourires.) J’ai mieux compris en entendant le ministre commenter l’amendement de Marc-Philippe Daubresse…
Pour autant, je voudrais émettre deux réserves sur cet amendement, qui est en quelque sorte concurrent de celui que j’ai déposé.
Tout d’abord, dans la proposition de Marc-Philippe Daubresse, l’approbation du préfet est requise dès le début de la procédure, au moment de la fixation des objectifs, ce qui n’est pas dans l’esprit de la loi SRU. Une mise en commun communautaire doit se fonder sur des critères objectifs partagés, qui sont certes soumis à l’avis des conseils municipaux. Ajouter à ce stade l’approbation du préfet me paraît constituer un équilibre moins satisfaisant.
Ensuite, une faiblesse particulière explique l’application très limitée du dispositif initial prévu dans la loi SRU : le système de pénalités continue de s’appliquer, comme s’il n’y avait pas eu d’accord communautaire. Je n’ai pas l’impression que ce point soit traité par l’amendement de Marc-Philippe Daubresse.
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur pour avis de la commission des lois. Si !
M. Alain Richard. J’espère que, dans l’optique de la réunion de la commission mixte paritaire, le ministre voudra bien se pencher sur ces réserves : d’une part, il faut clarifier les conditions dans lesquelles la mise en commun communautaire peut se faire, sans déperdition de l’objectif ; d’autre part, la pénalité restante doit être répartie équitablement.
Dans cette attente, je retire l’amendement n° 35 rectifié ter, en espérant pouvoir participer à la suite de la concertation. (M. André Gattolin applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 35 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 1155.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1081 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote sur l’amendement n° 519 rectifié.
M. Xavier Iacovelli. La possibilité pour une intercommunalité de mutualiser les objectifs de réalisation de logements sociaux a déjà été expérimentée. Il s’agissait de reporter une partie des objectifs de rattrapage des communes soumises aux obligations de la loi SRU sur d’autres communes.
La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté a recadré les possibilités de recours à cette mutualisation : le programme local de l’habitat peut fixer, pour une seule période triennale, l’objectif de réalisation de logements locatifs sociaux, sans que cet objectif puisse être inférieur au tiers de l’objectif triennal.
Quelles sont les raisons de ce recadrage ? Le dispositif a été trop souvent détourné : les communes l’utilisaient pour diminuer leur objectif de production et éviter la carence, sans pour autant mettre en œuvre une démarche volontariste en vue de rattraper le retard.
Il faut également rappeler que seule une trentaine d’EPCI sur 211 dotés de la compétence logement et d’un PLH exécutoire utilisaient ce dispositif de mutualisation.
Par la décision rendue par la juridiction administrative de Cergy-Pontoise concernant la ville d’Asnières-sur-Seine, dont j’ai parlé la semaine dernière, les juges ont rejeté la demande du préfet, considérant que le programme attaqué, qui ne comportait pas de logements sociaux, se situait à proximité immédiate du secteur des Hauts d’Asnières, un quartier de la ville dont le pourcentage de logements sociaux reste voisin de 70 %. Je rappelle que la ville d’Asnières-sur-Seine est une ville carencée, pas déficitaire. Cette décision est absurde, l’objectif de réalisation de 25 % de logements sociaux est toujours valable. Un tel raisonnement par quartier n’est pas conforme à l’esprit de la loi, mais cet exemple est une bonne illustration des dérives possibles du système.
C’est pourquoi nous sommes défavorables à l’amendement n° 519 rectifié présenté par M. Daubresse au nom de la commission des lois.
Monsieur le ministre, votre ouverture à une négociation sur la base de cet amendement m’inquiète beaucoup. Notre groupe était plutôt favorable au sous-amendement de Mme Létard, qui en encadre un peu plus le dispositif, mais il y manque néanmoins l’interdiction, pour les villes carencées – je ne parle pas des villes déficitaires –, de développer de nouveaux projets immobiliers privés. Dès lors qu’il n’y a pas de foncier disponible pour faire du logement social, il n’y en a pas non plus pour construire des logements privés. (Mme Viviane Artigalas applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Comme l’a excellemment rappelé M. le ministre tout à l’heure, la loi SRU vise à mettre en place une stratégie de construction de logement social ; ce n’est pas une loi sur l’équilibre social des territoires. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Philippe Dallier. C’est les deux !
M. Ronan Dantec. Si la loi SRU ne débouche pas sur des stratégies de construction – je pense que Marie-Noëlle Lienemann sera d’accord avec moi sur ce point –, elle manque son objectif ! Une partie des amendements visant à fixer des exemptions diverses et variées ne s’inscrivent justement pas dans une logique de construction de logements sociaux.
Défendant régulièrement une approche intercommunale des problèmes, je trouve l’amendement n° 519 rectifié intéressant en ce qu’il vise à favoriser la réalisation de logements sociaux en instaurant une souplesse à l’échelle de l’intercommunalité. Cependant, le dispositif ne pourra pas fonctionner si l’on multiplie les exemptions, par exemple en relevant le seuil d’application de 1 500 à 3 500 habitants pour les communes d’Île-de-France : adopter l’amendement de M. Daubresse n’a de sens que s’il y a très peu d’exemptions.
Dans ces conditions, comment la commission conçoit-elle l’articulation entre la souplesse permise par une approche intercommunale et les exemptions qu’elle a acceptées par ailleurs ? S’il y a en même temps beaucoup d’exemptions et une souplesse à l’échelle intercommunale, nous manquerons l’objectif d’augmenter le nombre de logements sociaux.
Enfin, comme cela a été dit par un membre du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, il y a d’autres enjeux que le foncier et ils ne sont, pour l’heure, pas traités.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. Je voudrais évoquer la commission nationale de la loi SRU, présidée par Thierry Repentin et dont on parle très peu. Elle vise justement à identifier les cas très particuliers dans lesquels, pour telle ou telle raison, l’objectif fixé par la loi SRU n’est pas atteignable, du moins dans les délais impartis.
Cet amendement prévoit une mutualisation pour les communes qui comptent entre 15 % et 25 % de logements sociaux ; il aurait été intéressant d’intégrer aussi les communes dont les spécificités ont été reconnues par cette commission nationale.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. M. Dantec a raison : plus on accepte d’exemptions, plus on s’éloigne du respect des objectifs fixés par la loi.
Je comprends bien la volonté de prendre en compte l’échelle intercommunale, mais je ne vois pas comment éviter, avec ce qui nous est proposé, une forme d’apartheid territorial. Nous savons bien que, dans certaines intercommunalités, le logement social, tant public que privé, est concentré sur quelques communes, les autres s’accommodant fort bien de cette situation.
J’ai accepté les dérogations et les souplesses que la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté a ménagées pour tenir compte de la réalité du terrain et je ne suis nullement hostile à de nouvelles adaptations de détail si elles s’avèrent nécessaires, mais le passage à l’échelon intercommunal proposé est à haut risque au regard de l’enjeu de mixité sociale. Même à Paris, on constate une concentration de logements sociaux dans certains arrondissements et on a du mal à rééquilibrer les choses. Si ce dispositif est adopté, il ne faudra pas ensuite venir pleurer sur l’émergence du communautarisme !
Combien de maires, de toutes couleurs politiques, y compris de mon propre parti, m’ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire, parce qu’il n’y avait pas de foncier disponible ? Or en me promenant dans leur commune, je voyais des panneaux annonçant des opérations de construction privées !
M. Xavier Iacovelli. Absolument !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pour ces opérations-là, on trouvait du foncier ! Les maires en question invoquaient alors le prix du foncier, mais c’est justement quand le foncier est cher qu’il faut de la péréquation.
Par ailleurs, beaucoup de communes refusent de préempter alors qu’elles pourraient très bien le faire en vue d’un conventionnement avec l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH ou au bénéfice d’un bailleur social. Hormis certaines situations extrêmement circonscrites, l’impossibilité est souvent plus théorique que réelle !
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Je ferai trois observations rapides.
Tout d’abord, il me semble que l’amendement n° 519 rectifié permet d’ajuster le dispositif de la loi SRU sans en dénaturer le sens ni les objectifs, dans une recherche d’équilibre entre ces derniers et les réalités de terrain que chacun connaît.
Ensuite, j’ai entendu tout à l’heure M. le ministre dire qu’un dialogue était possible entre la Haute Assemblée et le Gouvernement autour de cet amendement. Je m’en félicite et je souhaite que l’Assemblée nationale s’inscrive dans cette volonté de dialogue. Prendre en compte la réalité intercommunale a du sens. Cela constitue un axe de travail très intéressant. J’espère en tout cas que le Gouvernement ira jusqu’au bout.
Enfin, Alain Richard a présenté tout à l’heure une autre façon d’aborder les choses, en faisant au dispositif exposé par Marc-Philippe Daubresse le reproche d’une certaine complexité. En fait, l’amendement de la commission des lois va peut-être moins loin que celui d’Alain Richard : il représente une solution prudente et sage, à laquelle il me semble que le Sénat peut se rallier.
Un clin d’œil pour finir, monsieur le ministre : nous aurons d’autres occasions de débattre des établissements publics territoriaux, les EPT, et si vous êtes alors d’accord pour les solder, je crois que vous trouverez ici un certain nombre de bonnes volontés ! (M. Philippe Dallier renchérit.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je trouve moi aussi que l’amendement de Marc-Philippe Daubresse va dans le bon sens.
Madame Lienemann, le dispositif, tel qu’il est rédigé, prévoit l’accord des maires de l’intercommunalité. (M. Alain Richard approuve.) Par conséquent, pour répartir l’objectif, encore faut-il que les maires des communes qui ne sont pas soumises à l’article 55 de la loi SRU acceptent que soit décomptée une partie des logements qu’ils construisent.
Vous craignez que le dispositif de l’amendement ne pousse à la création de ghettos de pauvres, mais quel maire d’une commune déjà confrontée à des difficultés accepterait de continuer à construire des logements sociaux en grande quantité uniquement pour faire plaisir aux autres communes de l’intercommunalité ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous verrons bien !
M. Philippe Dallier. Pour ma part, je veux faire confiance aux élus locaux. Tous les maires essayent de penser leur territoire de manière intelligente. S’ils peuvent travailler à l’échelon de l’intercommunalité pour résoudre des problèmes qui ne peuvent pas l’être autrement, eh bien tant mieux ! C’est ce que cet amendement permet.
Je ne partage pas vos craintes, madame Lienemann. Cet amendement est intéressant, parce qu’il apporte une souplesse, qui plus est sous la forme d’une expérimentation, avec l’accord du préfet. Marc-Philippe Daubresse a donc mis les formes pour que M. le ministre se sente à l’aise pour faire évoluer son avis…
Pour l’heure, adoptons cet amendement. De toute façon, je ne doute pas que nous y reviendrons en 2025 et ensuite !
M. Xavier Iacovelli et Mme Marie-Noëlle Lienemann. Avant !
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Mme Valérie Létard. Mon sous-amendement n° 1155 vise précisément à écarter le risque évoqué par Mme Lienemann : l’intercommunalité ne pourra exercer de « gentilles » pressions sur les communes comptant déjà plus de 35 % de logements sociaux pour qu’elles acceptent d’en construire d’autres.
Ce dispositif pragmatique et de bon sens apporte de la souplesse et permettra d’avancer sans prendre de risque, puisqu’il s’agit d’une expérimentation.