M. Jean-Marie Morisset. Cet amendement concerne la réalisation d’aires de stationnement, non pas dans les résidences services – le Gouvernement donnera donc peut-être un avis de sagesse, au regard des arguments avancés tout à l’heure… –, mais dans les établissements sociaux et médico-sociaux.
Ces établissements ne sont pas des logements, mais des hébergements répondant notamment au code de l’action sociale et des familles, et ils n’hébergent que très peu de personnes en capacité de disposer d’un véhicule motorisé, en raison soit de leur santé soit de leur capacité à se déplacer.
Si, dans certains cas, ils peuvent comprendre autant de personnels y intervenant que de places d’hébergement, c’est assez rare. Ils se situent en général dans une fourchette de 1 salarié pour 10 à 50 personnes hébergées en fonction du lieu d’hébergement – pensez, par exemple, aux résidences pour les jeunes, aux centres pour les migrants, aux centres éducatifs pour mineurs placés par l’autorité judiciaire, aux maisons de retraite ou aux centres d’accueil.
C’est pourquoi cet amendement prévoit que le règlement du plan local d’urbanisme n’impose pas la réalisation d’aires de stationnement lors de la construction ou de l’extension des établissements sociaux ou médico-sociaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. L’avis est défavorable. L’objectif est le même que pour l’amendement de M. Gremillet. Or il n’y a pas lieu de prévoir des dispenses générales. En outre, comme l’a rappelé Alain Richard, le règlement d’un PLU peut déjà dispenser ces établissements des obligations liées à la création de places de stationnement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’avis est également défavorable. Comme pour l’amendement n° 867 rectifié bis qui concernait le même sujet, prendre une telle mesure ne serait pas une bonne décision.
M. le président. Monsieur Morisset, l’amendement n° 338 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Morisset. Non, je vais le retirer, monsieur le président, mais je voudrais tout de même rappeler qu’il n’est pas facile d’établir ou de modifier un PLU dans les zones rurales. En outre, la compétence a souvent été transférée aux intercommunalités, qui se mettent juste en place, si bien que plusieurs années seront nécessaires pour régler ce problème. Enfin, ceux qui élaborent les PLU ne pensent pas toujours à viser les établissements médico-sociaux dans le règlement au sujet des places de stationnement.
Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 338 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 400 rectifié quinquies, présenté par MM. Decool, Guerriau, Lagourgue et Chasseing, Mme Mélot, MM. A. Marc et Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam, MM. L. Hervé, Moga et Grand, Mmes Malet et N. Delattre, M. Revet, Mmes F. Gerbaud et Bories et MM. Fouché et Bignon, est ainsi libellé :
Après l’article 18 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du I de l’article L. 111-5-2 du code de la construction et de l’habitation est complété par les mots : « à l’exception des résidences services seniors ».
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à supprimer l’obligation faite aux résidences seniors de construire des locaux pour le stationnement des vélos, peu utilisés par les résidents et qui représentent un coût supplémentaire de construction. Cette mesure permettrait de diminuer le coût du logement pour les résidents et de faciliter ainsi l’accès de ces résidences aux personnes âgées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. L’avis est défavorable pour les mêmes raisons que précédemment. Il n’y a pas de raison de créer une dispense spécifique pour les résidences seniors.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’utilisation d’un vélo est bénéfique pour les personnes âgées et je vous rappelle qu’il existe maintenant des vélos électriques… (Sourires sur différentes travées.) L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Nous devons tenir compte du contexte : une personne qui quitte son logement pour aller en résidence seniors – c’est à peu près tout ce qu’a apporté la loi de 2016 – a des troubles plus souvent moteurs que cognitifs. (Protestations sur plusieurs travées.) C’est ce que l’on constate sur le terrain !
L’amendement de Daniel Gremillet allait dans le même sens. Dans ces résidences, très peu de personnes ont une voiture. C’est d’ailleurs pour cela que ces résidences doivent être situées en centre-bourg. Les troubles moteurs des résidents sont suffisamment faibles pour qu’ils puissent encore faire leurs courses et se promener. En outre, les centres-bourgs sont plus animés.
Les places de stationnement sont nécessaires, mais en nombre égal à celui des logements. Malheureusement, monsieur le ministre, les personnes qui vont en résidence seniors sont très peu nombreuses à pouvoir faire du vélo !
M. le président. Madame Mélot, l’amendement n° 400 rectifié quinquies est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 400 rectifié quinquies est retiré.
Article 18
I. – L’article L. 111-7-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« Art. L. 111-7-1. – Des décrets en Conseil d’État, pris après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, fixent les modalités relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées prévue à l’article L. 111-7 que doivent respecter les bâtiments ou parties de bâtiments nouveaux. Ils précisent, en particulier :
« 1° Les modalités particulières applicables à la construction de bâtiments d’habitation collectifs ainsi que les conditions dans lesquelles, en fonction des caractéristiques de ces bâtiments, trente pour cent de leurs logements, et au moins deux logements lorsque le bâtiment comprend moins de dix logements, sont accessibles tandis que les autres logements sont évolutifs.
« La conception des logements évolutifs doit permettre la redistribution des volumes pour garantir l’accessibilité et faciliter l’adaptabilité ultérieure de l’unité de vie, à l’issue de travaux simples. Est considéré comme étant évolutif tout logement dans les bâtiments d’habitation collectifs répondant aux caractéristiques suivantes :
« a) Une personne en situation de handicap doit pouvoir accéder au logement, se rendre par un cheminement accessible dans le séjour et le cabinet d’aisance, dont les aménagements et les équipements doivent être accessibles, et en ressortir ;
« b) La mise en accessibilité partielle ou totale du logement est réalisable ultérieurement par des travaux simples ;
« 2° Les modalités particulières applicables à la construction de maisons individuelles ;
« 3° Les modalités particulières applicables à la construction de logements vendus en l’état futur d’achèvement et faisant l’objet de travaux modificatifs de l’acquéreur ;
« 4° Les modalités particulières applicables à la construction de logements locatifs sociaux édifiés et gérés par les organismes et les sociétés mentionnés aux articles L. 365-2, L. 411-2 et L. 481-1, ainsi que les modalités selon lesquelles ces organismes et sociétés garantissent la mise en accessibilité de ces logements en vue de leur occupation par des personnes handicapées, notamment les modalités techniques de réalisation des travaux de réversibilité, à la charge financière des bailleurs, et leur exécution dans un délai raisonnable ;
« 5° Les modalités particulières applicables à la construction de logements destinés à l’occupation temporaire ou saisonnière dont la gestion et l’entretien sont organisés et assurés de façon permanente, ainsi que les exigences relatives aux prestations que ces logements doivent fournir aux personnes handicapées. Ces mesures sont soumises à l’accord du représentant de l’État dans le département, après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité. »
I bis (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 111-8-3-2 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « au troisième alinéa » sont remplacés par la référence : « au 5° ».
I ter (nouveau). – Au deuxième alinéa de l’article L. 441 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « parc social », sont insérés les mots : « , en facilitant l’accès des personnes handicapées à des logements adaptés ».
I quater (nouveau). – À la seconde phrase du deuxième alinéa du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « logement décent », sont insérés les mots : « ou d’un logement adapté au handicap d’un de ses occupants ».
II. – (Non modifié) Dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’application des mesures prévues au 1° de l’article L. 111-7-1 du code de la construction et de l’habitation.
III. – (Non modifié) À la quatrième phrase du f de l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « deux ».
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, sur l’article.
Mme Michelle Gréaume. Tout ou presque aura été dit par mes collègues en discussion générale. Vous l’aurez compris, nous avons entendu la colère des associations représentant les personnes en situation de handicap, qui qualifient cette mesure de grave régression. Nous partageons avec elles cette indignation légitime.
Vous me direz, ce n’est pas le premier recul en la matière, mais quand même !
Monsieur le ministre, vous touchez à un totem, celui de la société inclusive, celui de l’ambition pour notre société de ne pas laisser sur le bord du chemin une partie de la population. Vous touchez à l’exigence de solidarité.
Je ne suis pas sûre que le compromis trouvé en commission saura convaincre. Il reste pour nous inacceptable.
La dernière enquête de l’INSEE est claire. Seuls 40 % des 350 000 appartements et maisons individuelles, tous statuts d’occupation confondus, construits chaque année entre 2006 et 2014 répondent aux règles d’accessibilité et d’adaptabilité fixées par la loi Handicap de 2005 et l’ordonnance du 26 septembre 2014. C’est extrêmement peu.
Ce n’est donc le moment ni de renoncer, sous couvert d’économies, à ce principe fort d’accessibilité ni de renforcer les inégalités.
Une fois de plus, le Gouvernement nous fait la démonstration qu’il se montre dur avec les faibles et faible avec les forts. J’entends déjà les cris de joie des promoteurs à l’idée de faire quelques mesquines économies sur le dos des personnes en situation de handicap. Ce sont encore quelques mètres carrés en moins pour les habitations : jamais, en effet, vous ne nous ferez croire que les quelques mètres carrés grappillés dans les entrées et les salles de bains seront ventilés ailleurs.
Bref, c’est une décision de grand argentier, mais sûrement pas une mesure d’élu ou de responsable politique à l’écoute, attentif et soucieux des difficultés de nos concitoyens.
Vous appliquez la double peine pour ces personnes qui cumuleront handicap et difficultés d’accès au logement.
J’ajoute que cette situation est aussi en parfaite contradiction avec les ambitions de la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement, qui visait à répondre à la perte d’autonomie progressive des personnes âgées.
Nous défendrons pour notre part l’esprit et la lettre de la loi de 2005. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Cécile Cukierman. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.
M. Maurice Antiste. L’alinéa 3 de l’article 18 prévoit un quota de 30 % de logements neufs accessibles d’emblée, contrairement au texte initial, qui prévoyait un seuil de 10 %. Cette mesure va malgré tout à l’encontre des besoins quantitatifs et qualitatifs des personnes handicapées et âgées ; elle constitue une grave régression sociale.
On passerait ainsi de 100 % de logements neufs accessibles, comme le prévoyait la loi Handicap de 2005, à la notion floue et indéfinie de « 100 % de logements évolutifs », autrement dit de logements susceptibles d’être adaptés pour accueillir une personne handicapée. Mais quid du coût des modifications ? Quid du locataire qui n’aura plus la capacité de modifier son logement, voire de recevoir et d’accueillir des personnes handicapées ?
Le Conseil national consultatif des personnes handicapées, le CNCPH, la Confédération nationale du logement et l’Association nationale pour l’intégration des personnes handicapées moteur, l’ANPIHM, ont publiquement dénoncé cette « très forte réduction des normes d’accessibilité dans la construction de logements neufs », et un collectif de treize organisations représentatives des personnes en situation de handicap et de la lutte contre l’exclusion a fait part de sa parfaite incompréhension face à ces mesures « en incohérence totale avec les autres politiques publiques engagées par le Gouvernement, ainsi qu’avec le vieillissement de la population ».
Il est important de souligner que le quota proposé dans ce texte ne porte pas sur 100 % des logements nouveaux, mais sur 100 % des logements nouveaux réputés accessibles via les parties communes, c’est-à-dire, notamment, ceux qui sont desservis par un ascenseur ou situés en rez-de-chaussée.
Selon les calculs de l’ANPIHM, sur les 45 000 logements HLM construits chaque année, seuls 23 000 peuvent accueillir une personne en fauteuil roulant ; avec l’application du quota de 30 %, ce chiffre tomberait à 6 900, et il serait de 2 300 pour un quota de 10 %. Il n’y aurait donc plus qu’un appartement HLM accessible supplémentaire par tranche de 32 000 habitants. Il ne s’agit là que des seuls logements sociaux ; dans le secteur privé, le constat sera bien pire.
Je considère que l’instauration d’une politique de quotas conduira à la réduction drastique d’une offre déjà très insuffisante de logements immédiatement habitables sans travaux, d’où la nécessité d’une suppression de l’article 18.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. L’article 18 du présent projet de loi revient sur les lois relatives au logement de 1975 et de 2005, qui avaient consacré le principe de l’accessibilité universalisée de la cité. Il marque ainsi un retour aux politiques de quotas de logements adaptés qui avaient été développées – vous le savez, monsieur le ministre – dans les années 1960 et qui ont pourtant connu un échec flagrant.
Un quota de 30 % plongera les personnes handicapées dans la précarité sociale et compromettra leur accès au logement. Cela les contraindra à revoir leurs critères au rabais afin de pouvoir se loger, ou à choisir leurs relations sociales selon des critères d’accessibilité. Un tel quota répond à une logique de profit à court terme qui ne prend en compte ni le vieillissement croissant de la population ni le souhait des personnes âgées de se maintenir le plus longtemps possible à domicile.
Ce texte de régression sociale contredit les objectifs d’autres politiques publiques engagées par le Gouvernement, notamment le développement de l’habitat inclusif et de l’hospitalisation à domicile, ainsi que l’élévation du handicap au rang de priorité du quinquennat en 2017.
De plus, il viole les engagements internationaux auxquels la France a souscrit, notamment l’article 19 de la convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU, ainsi que la résolution du Conseil de l’Europe du 15 février 2001, selon laquelle « la conception universelle et l’accessibilité ont un rôle de premier plan à jouer dans la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».
Cet article 18 met tout simplement en place une revendication de longue date du lobby du bâtiment et, en particulier, de la Fédération française du bâtiment, qui réclamait mot pour mot une telle mesure dès 2013. Il est le reflet du désengagement de l’État face aux questions sociales. Il vise en effet, purement et simplement, à diminuer les coûts de construction au bénéfice des propriétaires, et ce bien que les coûts induits par les fluctuations des marges commerciales – problème auquel le Gouvernement, pour des raisons purement libérales, ne souhaite pas s’attaquer – soient supérieurs à ceux qu’engendrent les obligations d’accessibilité.
Les profils des détracteurs et des défenseurs de ce texte de loi en sont la preuve ultime : d’un côté, on trouve les organisations représentant les personnes en situation de handicap, notamment la FNATH, ou Association des accidentés de la vie, et l’Union sociale pour l’habitat ; de l’autre, les lobbies du bâtiment, fervents défenseurs de leur porte-monnaie.
Avec cet article 18, monsieur le ministre, vous avez choisi votre côté !
M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, sur l’article.
M. Antoine Karam. Alors que nous abordons le chapitre V de ce projet de loi, consacré à la simplification de l’acte de construire, j’aimerais attirer votre attention, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur les enjeux de cette simplification outre-mer.
Vous n’ignorez pas que le secteur de la construction est crucial pour le bien-être économique et social de nos territoires, où nous sommes confrontés à d’immenses besoins en logements et aménagements structurants, ainsi qu’à des défis colossaux résultant de contraintes multiples : surcoûts liés à l’éloignement et à l’étroitesse des marchés locaux, exiguïté du foncier disponible, climats particulièrement corrosifs et exposition accentuée aux risques naturels.
À ces nombreuses contraintes viennent s’ajouter le poids des normes et leur fréquente inadaptation aux réalités ultramarines.
C’est pourquoi la délégation sénatoriale aux outre-mer a choisi, en 2017, de se plonger dans la nébuleuse normative pour aboutir à une trentaine de propositions visant à faire cesser les anomalies paralysantes et autres situations ubuesques, mais également à valoriser les ressources locales et les démarches innovantes.
À ce titre, je défendrai plusieurs amendements, inspirés de nos travaux, tendant à mieux prendre en compte les spécificités ultramarines dans la production des normes et à mieux mesurer les surcoûts d’assurances.
En effet, c’est en desserrant l’étau normatif que nous parviendrons outre-mer à simplifier l’acte de construire.
Alors, je vous demanderai, mes chers collègues, de considérer que, derrière chaque amendement que je présente, il n’est jamais question de précisions superflues, mais d’une réelle volonté de changement : les normes produites doivent prendre en compte les latitudes sous lesquelles elles s’exercent !
Enfin, permettez-moi un dernier mot pour regretter que la commission ait jugé irrecevable, au titre de l’article 45 de la Constitution, un amendement que j’avais déposé. Son objet était d’expérimenter, à Mayotte et en Guyane, une simplification des constructions scolaires, en permettant aux communes de déroger à certaines règles en vigueur en matière de marchés publics.
Là encore, il ne s’agissait pas de déroger pour déroger, mais de répondre à une réalité : en raison de procédures souvent longues et coûteuses, les élus sont aujourd’hui dans l’incapacité d’anticiper les effectifs. Le résultat est le suivant : à chaque rentrée scolaire, ce sont les enfants sans solution de scolarisation qui paient le prix fort et qui se retrouvent, comme toujours, sur le bord de la route !
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.
M. Didier Guillaume. Dans ce débat, il nous faut faire attention. Hier s’opposaient partisans et opposants des architectes des Bâtiments de France ; alors, ne nous retrouvons pas ce matin à opposer ceux qui défendraient les handicapés et ceux qui voudraient les exclure ! Je vous assure, mes chers collègues, que si l’on s’y prend ainsi, cela n’honorera pas le Sénat.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. Didier Guillaume. La plus grande et belle loi qui ait été faite sur le handicap, celle de 2005, est le fruit de l’initiative de Jacques Chirac, qui en avait fait une grande cause nationale. (Mme la présidente de la commission des affaires économiques applaudit.) Cette loi a permis la prise en compte du handicap au niveau national et l’adoption de mesures exceptionnelles, qui ont coûté excessivement cher aux départements. J’étais à l’époque président de conseil général, et je n’ai jamais critiqué ces mesures, parce qu’il faut à certains moments accepter de dépenser de l’argent pour construire une société inclusive.
Cela dit, une société inclusive n’est pas l’inverse d’une société pragmatique. C’est la raison pour laquelle, au vu de toutes ces contraintes, le précédent gouvernement et, notamment, Mme Ségolène Neuville sont revenus sur un certain nombre de mesures à la demande de l’Association des maires de France, de l’Association des maires des petites villes de France et de l’Association des maires ruraux de France. On pouvait en effet aisément constater que les dates fixées pour la mise en accessibilité des logements, des mairies et des services publics étaient intenables et n’étaient absolument pas finançables. Il ne s’agit pas de donner de l’argent aux plus riches ou aux promoteurs, mais de permettre aux collectivités locales et à nos offices d’HLM de s’en sortir.
Le groupe auquel j’appartenais alors avait soutenu les agendas d’accessibilité programmée mis en œuvre par Mme Neuville. Nous voulions aller encore plus loin, mais c’était irréaliste.
Aujourd’hui, pour ma part – j’aurai l’occasion de le redire lors de l’examen des amendements à cet article –, je soutiens tout à fait la position du Gouvernement. Je ne saurais dire quelle version de cet article sortira de nos travaux, entre celle de la commission et celle du Gouvernement, même si j’ai ma petite idée, mais il s’agit en tout cas d’une bonne mesure.
Combien de maires nous expliquent qu’il est impossible de construire une rampe d’accès à la mairie dans une commune de vingt habitants ! Combien de présidents de petits offices nous font valoir que, lorsqu’une commune de 2 000 habitants fait construire six logements, il est impossible de les rendre tous accessibles !
Alors, il faut du pragmatisme ! Le Gouvernement et, maintenant, la commission proposent ceci : tous les logements doivent pouvoir être rendus accessibles à très court terme, si besoin est, mais contentons-nous pour l’instant de faire en sorte que les personnes handicapées ou à mobilité réduite puissent accéder à un quota de 10 %, ou 30 % – je ne sais quelle version l’emportera – de logements ; si demain plus de besoins apparaissent, nous irons plus loin.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article.
M. Philippe Mouiller. À l’occasion de l’examen de l’article 18, je souhaite intervenir pour vous faire part de mon étonnement concernant le choix du Gouvernement de mettre en place un quota de 10 % de logements accessibles dans les bâtiments d’habitation collectifs neufs.
Ce positionnement est incohérent avec la volonté annoncée du Gouvernement de modifier l’offre médico-sociale et de tendre vers une société plus inclusive, ce qui demande, de fait, un nombre de logements plus important.
Ce quota de 10 %, qui ne concerne que les logements accessibles par ascenseur ou situés en rez-de-chaussée, est en deçà des besoins de la population touchée par le handicap, dont la proportion est estimée à 15 %. Rappelons que plus de 20 % des Français auront plus de soixante-cinq ans en 2025. L’accessibilité concerne également les personnes en perte d’autonomie. De plus, cette disposition est contraire au principe d’accessibilité universelle, principe général repris par tous les gouvernements.
De nombreuses questions restent en suspens, monsieur le ministre. Quelle est la définition d’un logement évolutif ? Quel est le délai raisonnable pour adapter un logement ? Qui finance les travaux de mise en accessibilité ? Je souhaiterais vous entendre sur ces points.
Je tiens à saluer le travail de la commission des affaires économiques et de Mme le rapporteur, qui ont fait évoluer le texte en proposant deux mesures visant, l’une, à augmenter le nombre de logements qui devront être accessibles, dans les bâtiments d’habitation collectifs neufs, en portant le taux à 30 %, et l’autre, importante, à modifier les critères prioritaires d’accès au logement en faveur des personnes handicapées, de façon à ce que les logements accessibles soient bien destinés aux personnes qui en ont besoin. Ces deux mesures parallèles sont essentielles.
J’espère que cette solution de compromis, quoiqu’imparfaite au regard du principe d’accessibilité universelle, permettra tout de même de mieux répondre aux besoins des personnes en situation de handicap qui, rappelons-le, disposent souvent de revenus modestes et vivent parfois dans un isolement social intolérable.
M. le président. La parole est à M. François Patriat, sur l’article.
M. François Patriat. J’entends bien les craintes qui ont été évoquées ici ; les médias s’en sont fait l’écho. J’y vois de l’incompréhension et une inquiétude peut-être légitime ; néanmoins, la caricature et les faux problèmes ne peuvent pas être retenus.
Quant à nous, notre rôle, en soutien au Gouvernement, est d’entendre ces craintes et d’y répondre. Le projet du Gouvernement, c’est l’évolutivité. Vous venez de poser la question de la définition du logement évolutif, mes chers collègues ; le Gouvernement saura y répondre.
Nous proposons simplement de passer de la taille unique à la taille sur mesure en fonction des besoins. Notre objectif – une proportion de 10 % de logements accessibles – consiste à garantir à toutes les personnes à mobilité réduite qu’elles pourront toujours trouver un logement ; mon collègue Richard Yung reviendra dans quelques instants sur le choix des 10 %. Tout le monde n’a pas le même degré de handicap ni le même besoin de mobilité. Certaines personnes sont en fauteuil roulant ; d’autres n’ont pas le même degré d’exigence.
Nous allons en même temps favoriser l’accès quotidien à tous les autres logements en rendant obligatoire leur évolutivité. L’objectif de 100 % de logements évolutifs signifie des logements à 100 % accessibles en très grande partie, à savoir pour les pièces de vie et les toilettes. Le reste du logement pourra quant à lui être rendu totalement accessible par des travaux simples, rapides et à bas coût ; cela permettra de répondre aux situations de handicap, mais aussi de perte d’autonomie ou de vieillissement.
En conséquence, quand un nombre plus élevé de personnes à mobilité réduite demandera un logement accessible dans un même ensemble immobilier, le 100 % évolutif obligera les promoteurs à adapter leurs logements.
Plusieurs amendements ont été déposés qui ont pour objet les seuils et les quotas. Pourquoi le Gouvernement et nous-mêmes proposons 10 % et non pas 8 % ou 12 % ? Le logement n’est pas une science exacte et nous avons raisonné ainsi : si l’on applique cette proportion au parc de logement existant en France, soit 34 millions de logements, un quota de 10 % correspondrait environ à 3,5 millions de logements accessibles ; pour 850 000 personnes à mobilité réduite, cela nous semble raisonnable. Le principe du 100 % évolutif fournit quant à lui une réponse pragmatique facilement applicable. Nous vous remercions, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir déposé ces amendements de rétablissement ; nous les soutenons, évidemment, parce que la philosophie de ce texte, à la fois ambitieuse et réaliste, nous convient.