M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je salue la sagesse du Gouvernement sur la présente proposition rédactionnelle, qui me semble tout à fait bonne.
En revanche, je ne partage pas du tout l’argumentation des auteurs des amendements. S’il est nécessaire de faire évoluer le texte, c’est bien parce que l’on a constaté sur le terrain qu’il y avait de très nombreuses difficultés d’appréciation de la loi Littoral. Or on ne peut à chaque fois s’en remettre aux décisions des tribunaux.
La définition des hameaux et des agglomérations n’étant pas la même sur tous les territoires, une approche différenciée est nécessaire. Il me semble de bon sens que ces définitions relèvent des SCOT, car ces documents sont partagés par l’ensemble des élus. Cela permettra d’avoir une approche globale pertinente et de prendre en compte la réalité des besoins.
S’il est vrai que certains territoires littoraux voient leur population augmenter, ce n’est pas le cas de tous, monsieur le ministre, et certains secteurs littoraux sont en grande difficulté.
Notre volonté n’est pas d’urbaniser la bande littorale, mais de permettre à nos concitoyens d’habiter dans l’espace rétrolittoral et que des opérations d’aménagement, fussent-elles collectives, puissent y être menées, ce qui n’est actuellement pas possible.
J’en appelle au bon sens de notre assemblée : nous devons prendre en compte la réalité des problèmes vécus par les élus des communes littorales et faire évoluer la loi Littoral de façon extrêmement modeste, comme cela est proposé, sans pour autant en remettre en cause l’esprit.
En tant qu’ancien maire d’une commune littorale, je partage avec l’ensemble des élus littoraux la volonté de protéger le littoral, de préserver son attractivité et de ne pas le gâcher. (MM. Jacques Le Nay, Sébastien Meurant et Yves Bouloux applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. Je voudrais juste rappeler à M. le ministre, mais nous avons eu l’occasion d’en parler, que le problème n’est pas seulement breton, il concerne l’ensemble du littoral et également les lacs de montagne. Si les Bretons y sont particulièrement sensibilisés, c’est parce que le littoral breton est très important et présente une configuration de l’habitat un peu particulière, nous y reviendrons tout à l’heure lors de la discussion d’autres amendements.
Il reste que de réelles difficultés d’application de cette jurisprudence se posent sur l’ensemble du territoire français, depuis les Hauts-de-France jusqu’au Pays basque en passant par la côte méditerranéenne – bien que l’un des départements de la Méditerranée soit tellement urbanisé que le problème ne s’y pose plus.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 149 et 739 rectifié quinquies.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 296 rectifié bis, présenté par Mmes Morhet-Richaud et Garriaud-Maylam, M. Bonhomme, Mme Bories et MM. Brisson, Gremillet et Priou, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Mme Patricia Morhet-Richaud. L’application de la loi Littoral, notamment dans les territoires de montagne – où je rappelle qu’elle s’applique aux lacs de montagne de plus de 1 000 hectares – conduit à de grandes difficultés de développement pour ces territoires relevant à la fois de la loi Montagne et de la loi Littoral.
Aux termes de la loi Littoral, les seules possibilités d’extension doivent se faire soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement. La définition d’une agglomération, d’un village ou d’un hameau est explicitée dans l’instruction du 7 décembre 2015.
Or dans ces territoires spécifiques, même ce qui existe est contraint puisqu’on ne permet pas à certaines urbanisations de s’étendre.
Par ailleurs, la constructibilité en continuité n’est ni toujours possible, du fait par exemple des risques naturels, ni toujours souhaitable, car elle pourrait compromettre la préservation des paysages naturels ou bâtis, ou de l’environnement, dans le cas notamment des zones humides.
De plus, la constructibilité en continuité n’est pas une garantie de protection des paysages et de l’environnement.
La seule possibilité qui nous était offerte pour déroger à la constructibilité en continuité était la création d’un hameau nouveau intégré à l’environnement. Supprimer la possibilité de créer un tel hameau est la garantie certaine de figer un territoire, sur le plan tant résidentiel qu’économique, et plus précisément touristique, qui est un enjeu majeur des territoires de montagne.
Conserver la possibilité de créer un hameau nouveau, c’est garder une chance d’évolution et de développement face à une réglementation déjà très contraignante, afin de trouver un équilibre dans le développement des territoires de montagne.
Cet amendement vise donc à supprimer l’alinéa 5.
M. le président. L’amendement n° 691 rectifié bis, présenté par Mmes Morhet-Richaud et Deromedi, MM. Pellevat et Rapin, Mme Garriaud-Maylam, MM. Priou, Bonhomme, Savin et Mandelli, Mme Bories, MM. Genest, H. Leroy et Revet et Mmes Imbert et Lanfranchi Dorgal, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le a du 2° du I ne s’applique pas aux projets déjà engagés par les maîtres d’ouvrage sur les territoires soumis à la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral ou à la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Il s’agit d’un amendement de repli visant à éviter de sanctionner les projets déjà engagés dans des communes relevant à la fois de la loi Montagne et de la loi Littoral.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Ma chère collègue, le projet de loi remplace la notion de hameau aux contours jurisprudentiels flous par la notion de secteur déjà urbanisé dont les contours seront définis par les documents locaux d’urbanisme de manière territorialisée.
L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° 296 rectifié bis.
En revanche, bien que l’entrée en vigueur du présent projet de loi ne remette pas en cause les projets déjà autorisés, dans l’attente de la traduction dans les documents locaux d’urbanisme des nouvelles dispositions l’adoption de l’amendement n° 691 rectifié bis permettra de sécuriser les projets en cours d’autorisation.
L’avis est donc favorable.
M. Jacques Genest. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’amendement n° 296 rectifié bis vise à revenir sur la suppression du hameau nouveau intégré à l’environnement qui est introduit par l’article 12 quinquies.
En l’état actuel du droit, l’extension de l’urbanisation se réalise sur le littoral soit en continuité de village ou d’agglomération, c’est-à-dire en continuité de secteurs présentant un nombre et une densité significative de constructions, soit dans un hameau nouveau intégré à l’environnement.
Or il n’existe pas de définition claire du hameau nouveau intégré à l’environnement. En l’absence de remontée de terrain significative à ce sujet, il nous est apparu opportun, sur la base de l’évolution du texte sur les dents creuses, de supprimer cette notion.
L’avis est donc défavorable.
L’amendement de repli n° 691 rectifié bis vise à introduire des mesures transitoires permettant d’atténuer les effets de la suppression du hameau susvisé sur les projets en cours.
Dans la version actuelle de l’article 12 quinquies, la suppression du hameau nouveau intégré à l’environnement, ou HNIE, est d’application immédiate et non rétroactive, si bien que les projets qui ont déjà fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme resteront autorisés.
L’objectif visé par votre amendement est donc intégralement satisfait.
Je rappelle par ailleurs que le projet de loi dont nous débattons permet une urbanisation nouvelle des dents creuses et c’est pourquoi il écarte la constitution de hameaux nouveaux intégrés à l’environnement.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour explication de vote.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Je retire l’amendement n° 296 rectifié bis, et bien que j’aie entendu vos arguments, monsieur le ministre, je souhaite que l’amendement n° 691 rectifié bis soit soumis au vote. (Très bien ! sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 296 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote sur l’amendement n° 691 rectifié bis.
M. Michel Vaspart. Je suis très réservé sur ce que vous venez de dire, monsieur le ministre.
Un hameau intégré à l’environnement est un hameau au milieu de rien. Il n’est donc pas vrai qu’il se définit par rapport à une urbanisation préexistante.
Il est du reste excessivement compliqué de construire un tel hameau. J’ai réussi à le faire dans ma commune au bout de neuf ans – je dis bien de neuf ans – de procédure.
Quoi qu’il en soit, une dent creuse se définit par rapport à une urbanisation déjà existante, contrairement au HNIE qui est un nouveau village construit au milieu d’un espace dédié à cet effet.
Afin de sécuriser les procédures qui ont déjà été lancées par un certain nombre de communes, je soutiens l’amendement n° 691 rectifié bis de ma collègue Patricia Morhet-Richaud.
M. le président. L’amendement n° 553, présenté par M. Daunis, Mmes Tocqueville et Guillemot, MM. Iacovelli et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Nelly Tocqueville.
Mme Nelly Tocqueville. Le projet de loi tel qu’adopté par l’Assemblée nationale permet aux schémas de cohérence territoriale d’identifier les secteurs où il sera possible de construire dans les dents creuses.
Il est précisé que ces secteurs se distinguent des espaces d’urbanisation diffuse par leur densité et leur caractère structuré.
La commission des affaires économiques a complété l’identification de ces secteurs par les notions de densité de l’urbanisation, de continuité, de structuration par des voies de circulation et des réseaux d’accès aux services publics de distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et de collecte de déchets, et de présence d’équipements ou de lieux collectifs. Le texte adopté précise que cette liste n’est pas exclusive.
Toutefois, contrairement à l’effet recherché de sécurité juridique, cette liste nous paraît être source de difficultés d’interprétation.
Le présent amendement vise donc à supprimer cet ajout.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Nous pensons au contraire que la mention de critères tels que la densité ou la desserte permet d’harmoniser la façon dont les espaces déjà urbanisés seront définis par les PLU et par les SCOT, et ce dans un esprit de cohérence territoriale de l’application de la loi Littoral.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’article 12 quinquies formalise la possibilité d’édifier des constructions ou des installations dans des secteurs qui sont déjà structurés et qui comportent de nombreuses constructions, mais qui ne sont pas assimilables à un village.
Dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, cet article prévoyait d’inscrire au niveau législatif deux critères minimaux – densité et structuration – pour définir les secteurs intermédiaires, et de renvoyer au SCOT le soin de préciser ces critères en fonction des particularités locales de chaque territoire. La commission des affaires économiques du Sénat a précisé cette rédaction en explicitant le critère de structuration, avec l’existence des voies de circulation et de réseaux de distribution.
Comme je l’ai dit précédemment, nous sommes très attentifs au respect des principes de la loi Littoral, et nous considérons qu’il est important, afin d’éviter toute dérive, de conserver ces deux critères de niveau législatif.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Comme vous l’aurez compris, nous ne souhaitons pas prendre le risque, au travers de la liste établie, de créer une nouvelle instabilité juridique alors même que nous essayons de consolider les choses.
Toutefois, monsieur le ministre, puisque votre réponse est consignée dans nos débats, que vous nous dites que ce point est utilement clarifié et que vous vous engagez éventuellement à ce que la liste puisse être complétée par voie de circulaire si un problème d’interprétation apparaissait, nous sommes rassurés, et je retire donc l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 553 est retiré.
L’amendement n° 270, présenté par M. Cabanel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Sur les littoraux languedociens ayant fait l’objet d’opérations d’assainissement et de mise en accessibilité au cours du vingtième siècle à des fins d’installation d’habitats balnéaires, d’équipements touristiques ou de constructions nécessaires aux activités agricoles ou propres à l’économie de ces espaces artificialisés, les constructions équivalentes dans l’espace proche du rivage dans les secteurs déjà urbanisés sont autorisées pour relocaliser les biens touchés par l’érosion littorale.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à créer une dérogation aux dispositions prévues par le présent article pour le littoral languedocien.
Il s’agit d’éviter des situations absurdes dans les espaces proches du rivage dont certains secteurs sont déjà urbanisés, et d’y autoriser la relocalisation d’aménagements touchés par le recul du trait de côte lié à l’érosion.
La côte languedocienne présente une spécificité au regard des enjeux de fond de la loi Littoral. Dans les années soixante, elle a été aménagée sur deux cents kilomètres par l’État – c’est la mission Racine –, afin d’accueillir des activités balnéaires et nautiques destinées, non seulement à compenser les crises viticoles et le faible dynamisme industriel, mais aussi à freiner la saturation touristique de la Côte d’Azur et à accueillir de nouvelles populations.
Cette initiative est toujours citée comme exemple d’aménagement du territoire réussi, puisqu’elle a permis la mise en valeur efficace d’espaces naturels peu attractifs et a rendu la mer accessible aux bénéficiaires d’un tourisme de masse planifié, au plus grand profit des touristes eux-mêmes et des activités économiques qu’ils ont contribué à développer.
L’érosion et le recul du trait de côte rendent nécessaire l’actualisation des emplacements des aménagements réalisés en repositionnant ceux-ci dans des espaces correspondant à leur vocation, c’est-à-dire des secteurs déjà urbanisés situés dans des espaces proches du rivage, qui peuvent s’étendre jusqu’à un ou deux kilomètres à l’intérieur des terres.
L’adoption du présent amendement permettrait de concilier les objectifs de préservation figurant dans la loi Littoral avec les objectifs d’accessibilité, qui ont créé la valeur économique et écologique des espaces languedociens. En même temps, cet amendement a pour objet de préciser que les nouveaux aménagements doivent être équivalents à ceux qu’ils remplacent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. J’entends votre argumentation, votre plaidoirie en faveur des espaces proches du rivage languedocien, mon cher collègue, mais une dérogation propre à chacune des spécificités de notre pays entraînerait le dévoiement de la loi.
La dérogation que vous proposez est trop spécifique et trop peu encadrée. J’en suis désolée, mais la commission est défavorable à votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Je comprends votre intérêt, monsieur le sénateur Cabanel, pour les littoraux languedociens, même si le fait de viser ces littoraux en tant que tels peut prêter à interprétation sur le plan juridique.
Au-delà de cette remarque, votre amendement tend à assouplir la loi Littoral, afin de permettre la relocalisation dans les espaces proches du rivage d’activités et de biens des littoraux languedociens touchés par le recul du trait de côte.
Or, en l’état actuel du droit, l’extension de l’urbanisation sur le littoral doit être réalisée en continuité des villages et agglomérations. Le retrait du trait de côte – le Sénat connaît bien la question pour avoir récemment voté, presque unanimement, un texte sur le sujet – est un phénomène naturel qui peut être anticipé. Il doit être appréhendé par les collectivités locales chargées de l’aménagement du territoire, dans le cadre d’une réflexion globale qui associe espaces rétrolittoraux et interface terre-mer.
Il serait donc tout à fait contradictoire que la gestion du recul du trait de côte puisse systématiquement échapper au principe d’aménagement applicable sur le littoral qui invite, au contraire, à concevoir un aménagement en profondeur et à privilégier, à la proximité immédiate de l’eau, les activités et les biens traditionnels et résilients face à la mer.
Comme je le rappelais, la question du trait de côte fait actuellement l’objet de plusieurs textes en discussion au Parlement, lesquels doivent permettre aux territoires de gérer le recul de ce trait de côte et la relocalisation des activités dans de bonnes conditions.
Le Gouvernement vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi il y sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Cette question est extrêmement importante et – cela semble assez évident – ne peut pas être traitée au détour d’un simple amendement.
À l’occasion de la première année du plan Climat, le ministre Nicolas Hulot a annoncé l’adoption du premier plan national d’adaptation au changement climatique, ou PNACC. J’ai moi-même l’honneur de présider la commission spécialisée du CNTE, le Conseil national de la transition écologique, qui a préparé le PNACC 2, parvenant à dégager un consensus de l’ensemble des acteurs, ceux qui sont impliqués dans la protection de l’environnement, mais aussi les acteurs économiques et les collectivités territoriales.
C’est pourquoi je peux vous assurer que cette question du trait de côte sera bien plus importante dans les prochaines années que celle des dents creuses. On le sait : la mer va monter, même assez vite. Il faut se préparer à la renaturation d’un certain nombre de territoires.
Deux logiques vont s’opposer : soit on continue de reculer le trait de côte de quelques centaines de mètres tous les dix ans, répondant ainsi à l’enjeu au cas par cas, soit, à un moment donné, on se projette enfin dans cinquante ou soixante ans et on recule d’un bond.
Ce point sera absolument central. Il affectera l’économie touristique d’un certain nombre de territoires, le littoral languedocien notamment. Il va falloir travailler collectivement sur ce sujet, et ne pas laisser uniquement les élus des territoires concernés le faire. Sur un tel enjeu, c’est bien la représentation nationale qui doit s’impliquer, parce que l’impact économique du recul du trait de côte nécessitera que l’on recoure à la solidarité nationale.
J’appelle vraiment à une réflexion approfondie sur cette question. Jean Bizet avait formulé des propositions, notamment en matière de péréquation financière. (M. Jean Bizet opine.) Mon collègue et moi-même ne sommes pas toujours d’accord, mais je pense qu’il a raison sur ce dossier et qu’il faut effectivement faire appel à la solidarité nationale.
Très honnêtement, on ne peut évidemment pas adopter cet amendement, surtout qu’il va plutôt dans le sens d’une solution par petits pas qui ne fonctionnera pas.
Il va falloir se mettre sérieusement autour de la table. Nous disposons de quelques années, mais il faut définir une véritable stratégie, qui passera par l’abandon d’un certain nombre de territoires que la mer va reconquérir progressivement. Il sera assez douloureux de l’accepter, mais c’est inéluctable au vu du changement climatique.
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 270 est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. J’ai bien entendu les arguments qui ont été développés, notamment par Mme la rapporteur.
Vous avez compris, mes chers collègues, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel, qui se voulait un peu provocateur dans la mesure où, en réalité, je partage les propos de mon collègue Ronan Dantec.
Pourquoi ai-je cité la côte languedocienne, moi qui suis élu du département de l’Hérault ? C’est parce que c’est dans ce département, ainsi que dans celui des Pyrénées-Orientales, que l’on trouve l’hôtellerie de plein air la plus dense de France. En termes économiques, ce secteur pèse sur le département : cette hôtellerie y représente plus de 8 millions de nuitées, 43 000 emplois et 295 millions d’euros d’investissement chaque année.
Le recul du trait de côte est effectivement un réel problème auquel, comme l’a dit Ronan Dantec, il faut bien sûr réfléchir.
Cela étant, je retire mon amendement. (Mme Nelly Tocqueville applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 270 est retiré.
L’amendement n° 456 rectifié, présenté par M. Husson, Mme Deromedi, MM. D. Laurent et Rapin, Mmes Lassarade et Garriaud-Maylam et M. Bonhomme, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. Dans le cadre de l’évolution des dispositions littorales prévues par le présent projet de loi, la possibilité offerte au plan d’aménagement et de développement durable de la Corse, le PADDUC, de se substituer au schéma de cohérence territoriale, le SCOT, en l’absence de celui-ci, pour gérer la définition des secteurs déjà urbanisés – je pense notamment aux hameaux –, pose un problème d’échelle. En effet, la définition des secteurs déjà urbanisés est un travail fin, dont le niveau de détail ne relève pas d’un document d’échelon régional.
Je le rappelle, un SCOT est l’outil de conception et de mise en œuvre d’une planification stratégique intercommunale, à l’échelle d’un large bassin de vie ou d’une aire urbaine, dans le cadre d’un projet d’aménagement et de développement durables.
Le présent amendement vise à supprimer la faculté offerte au PADDUC de se substituer au SCOT pour déterminer les critères d’identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés, dans lesquels les constructions et installations peuvent être autorisées dans les secteurs littoraux, en dehors de la bande des cent mètres, les espaces proches du rivage et les rives des plans d’eau intérieurs, qui sont mentionnés à l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme.
En résumé, quand il n’y a pas de SCOT, le principe retenu est celui de l’urbanisation limitée. Avec cet amendement, nous voulons respecter cet esprit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
La Corse n’est pas bien couverte par les SCOT puisque, à ce jour, une seule intercommunalité dispose d’un tel schéma. Pourtant, une grande partie du territoire corse est soumise à la loi Littoral.
Pour ne pas bloquer le comblement des dents creuses en Corse, le PADDUC, qui couvre toute la collectivité, doit pouvoir remplir ce rôle de manière transitoire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires. Nous avons longuement débattu de ce sujet à l’Assemblée nationale.
La question fondamentale est de savoir comment les dispositions que nous allons adopter dans le cadre de ce projet de loi peuvent également s’appliquer en Corse.
Vous savez que la situation corse est particulière : le PADDUC a été annulé et de nombreux SCOT n’ont toujours pas été mis en place sur ce territoire. Les dispositions prises dans la loi ne pouvaient dès lors pas entrer en vigueur.
Par ailleurs, le PADDUC est un élément de planification, qui, dans certains cas, équivaut à un SCOT, y compris en matière de planification, d’urbanisation et pour certaines mesures d’application de la loi Littoral. Dans ces conditions, la solution qui nous est apparue la plus pragmatique consiste à renvoyer au PADDUC.
C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. J’entends les arguments qui viennent d’être présentés, mais je me méfie de l’état transitoire qu’a évoqué Mme la rapporteur. En forçant à peine le trait, cet état risque d’être durable puisque, pour l’instant, il n’existe qu’un seul SCOT en Corse, ce qui ne me paraît pas être la meilleure des situations.
Monsieur le secrétaire d’État, vous vous réfugiez derrière le pragmatisme – vous avez employé ce terme à trois ou quatre reprises. Mais le pragmatisme, ce n’est pas la loi !
Il faut fixer très rapidement des bornes, parce que la loi doit être la même sur tout le territoire, en Corse comme sur le continent. Les règles doivent s’appliquer partout de manière uniforme.
J’entends ce que vous dites, mais, honnêtement, vos propos ne me satisfont pas. Cela étant, je retire mon amendement, tout en souhaitant qu’un travail de fond soit conduit parce que, je le répète, tout le territoire national doit être couvert par des SCOT. On peut prendre les paris : avant un certain temps, je crains que cet état transitoire ne devienne un état de fait, ce qui n’est pas satisfaisant au regard de la loi !
M. le président. L’amendement n° 456 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 12 quinquies, modifié.
(L’article 12 quinquies est adopté.)
Article additionnel après l’article 12 quinquies
M. le président. L’amendement n° 268 rectifié ter, présenté par MM. Vial, Danesi, B. Fournier et Milon, Mmes Garriaud-Maylam et Berthet, M. Brisson, Mme Imbert, M. Lefèvre, Mmes Deromedi et Deroche, MM. Poniatowski, Bascher, Pellevat et Savary, Mme Bonfanti-Dossat et M. Revet, est ainsi libellé :
Après l’article 12 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 121-8 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’une commune est soumise à la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral et à la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, les dispositions du présent article ne s’appliquent pas lorsqu’elles auraient pour effet de restreindre les possibilités d’urbanisation résultant des dispositions de l’article L. 122-5. Les constructions et installations autorisées en application du présent alinéa sont soumises à l’accord du représentant de l’État dans le département et à l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. »
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.