M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.
M. Yves Daudigny. Le conseil en évolution professionnelle, le CEP, créé par la loi du 5 mars 2014, à la suite de l’accord national interprofessionnel de 2013, est un dispositif d’accompagnement gratuit proposé à toute personne souhaitant faire le point sur sa situation professionnelle et établir un projet d’évolution professionnelle. Il est dispensé par cinq organismes : Pôle emploi, l’APEC, les missions locales, Cap emploi et les OPACIF, qui ont vocation à disparaître dans le cadre de ce projet de loi.
L’article 3 a pour ambition de renforcer le CEP. Au vu de l’utilisation réduite de celui-ci et même s’il est monté en charge ces dernières années, ce renforcement est nécessaire. Les deux principales critiques portent sur son déficit de notoriété et son positionnement complexe dans le paysage institutionnel.
La réforme proposée présente, à nos yeux, deux points positifs, car elle vise à étendre les missions qui sont confiées au CEP. Tout d’abord, au-delà de la formalisation et de la mise en œuvre du projet de la personne, le CEP identifiera désormais les compétences de la personne accompagnée. Ensuite, on peut être satisfait du fait que le CEP soit également étendu aux transitions professionnelles.
En revanche, nous sommes en opposition sur deux autres points.
Première critique, la sortie du CEP du giron du service public régional de l’orientation, le SPRO, témoigne de nouveau de la logique de déterritorialisation de la formation professionnelle et d’une recentralisation à l’échelon national, et ce alors même que la formation professionnelle est au cœur des compétences des régions. Pour cette raison, nous soutenons la décision de la commission des affaires sociales de réintégrer le CEP dans le cadre du SPRO.
La seconde critique porte sur les appels d’offres que mettra en œuvre France compétences pour désigner les acteurs privés au plan régional qui pourront être opérateurs du CEP pour les salariés. Cette désignation à l’échelon national écarte les régions de ce choix, alors qu’elles sont évidemment à même de connaître les besoins propres à leur territoire. Sur ce point, nous soutenons également la commission des affaires sociales dans sa volonté de laisser aux régions le choix de l’opérateur régional.
Enfin, le projet de loi a le mérite de clarifier, à l’article 17, le financement du CEP. C’est une bonne mesure. Toutefois, même s’il n’est pas encore complètement fixé, le montant envisagé – 250 millions d’euros – pose la question de la réalité de la mise en œuvre du dispositif.
M. le président. L’amendement n° 205, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Au premier abord, cet article a l’air évidemment formidable : garantir à toutes et à tous un droit à l’accompagnement tout au long de la vie. Pour un peu, on se prendrait à rêver d’un service public d’accompagnement des carrières, sauf que, le diable se cachant dans les détails, le texte prévoit surtout une ouverture à la concurrence du conseil en évolution professionnelle jusqu’ici organisé par des structures constituant le service public de l’emploi, au premier rang desquelles l’APEC et les missions locales.
L’article 3 ouvre ces prestations aux acteurs privés. C’est finalement assez logique, puisque depuis des années, le budget dédié aux structures assurant le conseil en évolution professionnelle est à la baisse : pour cette année, on parle de 270 millions d’euros pour un 1,5 million d’actifs. Et encore, ce budget ne devrait pas être rapporté au nombre de bénéficiaires, mais à celui des personnes qui pourraient y prétendre, soit presque 30 millions…
On assiste, dans ce domaine comme dans d’autres, à une double dynamique menant à une privatisation : d’un côté, on assèche le service public et on le fait dérailler ; de l’autre, on commence par rendre possible la présence des acteurs privés jusqu’à ce que ces derniers s’imposent face au service public.
Madame la ministre, vous avez dit devant nos collègues de l’Assemblée nationale que votre seul souci était que « le CEP achève de prendre son envol, et qu’un conseil de qualité soit délivré à un maximum d’individus ».
Je suis très heureuse de constater que nous partageons une ambition commune. Néanmoins, je ne réussis pas à voir comment vous pouvez atteindre votre objectif, en détruisant le service public du conseil.
Cela me paraît d’autant plus compliqué, si l’on organise une mise en concurrence. En effet, celle-ci implique que les appels d’offres vont, comme trop fréquemment, ne s’intéresser qu’au prix. Certes, on peut discuter de l’appréciation trop souvent restrictive de la notion de mieux-disant, mais le constat montre que le prix est toujours le critère central des appels d’offres !
De fait, la mise en concurrence ne peut qu’entraîner une baisse de la qualité, quand le conseil est fourni dans le cadre d’une course à la rentabilité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Fournier, rapporteur. L’article 3 vise à renforcer le conseil en évolution professionnelle. La commission y est favorable et a d’ailleurs adopté des amendements tendant à améliorer la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Elle émet donc logiquement un avis défavorable sur la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Sans surprise, l’avis du Gouvernement est défavorable, mais je souhaite profiter de l’occasion qui m’est donnée pour préciser un certain nombre de choses sur ce dossier.
Le CEP a connu une forte progression depuis sa création : le nombre de bénéficiaires s’est élevé à 1,5 million de personnes en 2016, soit une augmentation de 100 % par rapport à 2015.
Cependant, cette phase d’accompagnement a profité, à hauteur de 90 %, à des personnes en recherche d’emploi. On peut donc dire que le dispositif a bien pris son envol pour les demandeurs d’emploi, mais pas pour les salariés. L’offre qui est à la disposition des salariés, des artisans, des travailleurs indépendants ou des autoentrepreneurs reste très insuffisante, faute de financements et de bonne organisation.
Dans un contexte de transformation des métiers, notamment en raison des évolutions technologiques, il me semble – je crois que nous partageons tous cet objectif – que les salariés doivent bénéficier davantage d’un conseil et d’un accompagnement dans leur trajectoire et leur mobilité professionnelles.
On ne peut par conséquent que se satisfaire du fait que les partenaires sociaux se soient emparés de ce sujet, en adoptant, dans le cadre du dernier accord national interprofessionnel – celui du 22 février 2018 –, de nouvelles modalités de financement du CEP. Ainsi, une part de la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance financera bien, demain, les opérateurs retenus dans le cadre de la procédure d’appel d’offres qui sera mise en place par France compétences et pour laquelle l’État, les régions et les partenaires sociaux définiront un cahier des charges.
Madame Apourceau-Poly, vous formulez l’hypothèse que seuls des organismes privés seront retenus dans le cadre de cette procédure. Or le marché sera ouvert à tout type de prestataires, qu’ils soient publics ou privés, et la concurrence permettra une montée en gamme et la prise en compte de l’innovation, ce qui est important.
Par ailleurs, une couverture territoriale avec un maillage fin est prévue, car, si certains bénéficiaires peuvent se satisfaire d’un conseil par téléphone ou en ligne, d’autres souhaitent évidemment disposer d’un contact physique.
Cette nécessité de maillage territorial aboutira probablement à la mise en place de coopérations entre des organismes divers. L’allotissement territorial du marché, réalisé sur la base du cahier des charges exigeant dont je vous parlais, permettra justement de retenir des organismes variés, privés ou publics, au plus près des besoins des territoires.
Les conditions sont donc réunies pour que le CEP bénéficie aussi aux salariés du secteur privé.
En ce qui concerne les demandeurs d’emploi, il n’y a pas de changement, par conséquent aucune raison de procéder par appel d’offres : Pôle emploi, l’APEC et les missions locales resteront dispensateurs du CEP.
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié ter, présenté par MM. Panunzi, Perrin, Raison, Lefèvre, Sido, Brisson et Kern, Mme Loisier, M. Moga, Mmes Deromedi, Delmont-Koropoulis et Garriaud-Maylam et MM. Pierre, Dallier, B. Fournier, Duplomb et Rapin, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce conseil est mis en œuvre dans le cadre du service public régional de l’orientation mentionné à l’article L. 6111-3.
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. L’article 3 du projet de loi sort le conseil en évolution professionnelle du périmètre du service public régional de l’orientation, et confie de fait son organisation à l’État au travers d’une procédure nationale pilotée par le futur établissement public administratif France compétences.
Il procède donc à une recentralisation du dispositif du CEP et, en corollaire, à un affaiblissement du SPRO, au moment même où la volonté du Gouvernement est de confier toute l’orientation professionnelle aux régions.
Ce choix revient également sur un engagement du 9 février dernier du Premier ministre, qui annonçait la mise en place de cahiers des charges régionaux. Il ne paraît ni opportun ni cohérent, car le CEP doit faire partie intégrante du SPRO. Aussi, le présent amendement tend à réinsérer le CEP au sein du SPRO.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Fournier, rapporteur. La précision que cet amendement vise à apporter figure déjà dans le texte de la commission, à l’alinéa 5. C’est pourquoi je vous propose de retirer cet amendement, mon cher collègue. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. Max Brisson. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié ter est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 355 rectifié, présenté par M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il accompagne les salariés ou demandeurs d’emploi reconnus en situation de handicap au titre des articles L. 5213-1 à L. 5213-3 et atteints d’une maladie chronique évolutive inscrite dans la liste des affections de longue durée 30 de l’assurance maladie, dans le cadre de leur projet de transition professionnelle, de leur maintien dans l’emploi et de leur recherche d’emploi.
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Le conseil en évolution professionnelle est conçu pour les publics les plus fragiles et les plus exposés à la précarité, à la désinsertion professionnelle et au chômage.
Dans une logique de justice sociale redistributive, le CEP doit être étendu aux personnes en situation de handicap dans le cadre de leur projet de maintien dans l’emploi ou de transition professionnelle. Ces personnes peuvent en effet avoir des besoins spécifiques en la matière et il convient qu’elles puissent être accompagnées par des opérateurs formés à la spécificité de leurs parcours.
M. le président. L’amendement n° 616, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il accompagne les salariés ou demandeurs d’emploi reconnus en situation de handicap au titre des articles L. 5213-1 à L. 5213-3 et atteints d’une maladie chronique évolutive inscrite dans la liste des affections de longue durée 30 de l’assurance maladie, dans le cadre de leur projet de transition professionnelle, de leur maintien dans l’emploi et de leur recherche d’emploi.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. La finalité principale du CEP est d’accompagner les publics les plus fragiles et les plus exposés à la précarité, afin de prévenir la désinsertion professionnelle et le chômage.
La situation de l’emploi des travailleurs handicapés se dégrade régulièrement, avec une augmentation du nombre de chômeurs et une hausse des licenciements pour inaptitude. Ainsi, plus de 500 000 travailleurs handicapés sont au chômage et plus de 100 000 personnes sont licenciées pour inaptitude.
Dans ce contexte, les associations demandent un meilleur encadrement et une meilleure prévention, et il est logique, dans un esprit de justice sociale redistributive, que le CEP soit étendu aux personnes en situation de handicap dans le cadre de leur projet de maintien dans l’emploi ou de transition professionnelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Fournier, rapporteur. Les auteurs de ces amendements souhaitent que les personnes en situation de handicap bénéficient du CEP. C’est bien évidemment déjà le cas. La loi prévoit d’ailleurs que les membres du réseau Cap emploi soient des prestataires du CEP, habilités de droit. Ces amendements sont donc satisfaits.
De plus, si les personnes handicapées constituent un public prioritaire, il ne me semble pas pertinent de les mentionner explicitement, au risque d’oublier d’autres publics, comme les personnes peu qualifiées.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements, qui sont satisfaits par le droit en vigueur.
Les personnes en situation de handicap, comme tous les salariés et demandeurs d’emploi, ont naturellement droit au CEP. Tout à l’heure, je citais les opérateurs habilités de droit – Pôle emploi, l’APEC et les missions locales –, mais j’ai omis de citer Cap emploi, qui l’est également.
Il n’y a pas de raison d’ajouter spécifiquement les personnes en situation de handicap, ce qui pourrait laisser penser a contrario qu’elles auraient aujourd’hui moins de droits que les autres. Or un opérateur spécialisé, Cap emploi, est certifié de droit pour accompagner ces personnes dans leur évolution professionnelle.
Telles sont les raisons pour lesquelles ces amendements sont, à mon sens, satisfaits.
M. le président. Madame Féret, l’amendement n° 355 rectifié est-il maintenu ?
Mme Corinne Féret. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Schillinger, l’amendement n° 616 est-il maintenu ?
Mme Patricia Schillinger. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 616 est retiré.
L’amendement n° 357, présenté par M. Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après la deuxième occurrence du mot :
cadres
insérer les mots :
, par les organismes mentionnés à l’article L. 6332-1 qui assuraient, en application du dernier alinéa du présent article, dans sa rédaction applicable au 31 décembre 2018, le conseil en évolution professionnelle
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Actuellement, certains OPCA, les organismes paritaires collecteurs agréés, tels que le FAFSEA, le Fonds national d’assurance formation des salariés des exploitations et entreprises agricoles, entre autres organismes, bénéficient également d’un agrément en qualité d’OPACIF, et, à ce titre, sont des opérateurs de conseil en évolution professionnelle depuis le 1er janvier 2015.
Ces agréments ont été fondés sur la capacité de ces opérateurs à accompagner des publics spécifiques de secteurs relevant des organisations reconnues multiprofessionnelles pour ce qui concerne des problématiques liées à l’emploi et à la formation propres à ces publics.
Depuis plus de trois ans, ces opérateurs ont développé une réelle expertise dans l’accompagnement des salariés de leurs entreprises adhérentes et disposent désormais d’équipes aguerries et d’outils performants pour appuyer les démarches des bénéficiaires de CEP.
Afin de tenir compte de ces spécificités, pour que cette capacité d’accompagnement difficilement transférable ne soit pas perdue, et conformément à la volonté affichée par le Gouvernement de renforcer le déploiement du CEP sur l’ensemble du territoire, au plus près des besoins des bénéficiaires, il paraît nécessaire de maintenir les habilitations précédemment délivrées pour bénéficier d’un nombre plus important d’opérateurs du CEP.
Par conséquent, il est proposé d’ajouter ces organismes à la liste des institutions, organismes et opérateurs appelés à assurer le CEP.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Fournier, rapporteur. Le projet de loi supprime les organismes collecteurs agréés, les sommes qu’ils collectent ayant, à l’avenir, vocation à être recouvrées par les URSSAF.
Cet amendement vise à maintenir la capacité des anciens OPACIF à assurer le CEP. La commission est au contraire en phase avec le souhait du Gouvernement de contraindre les opérateurs de CEP à dynamiser leurs offres en faisant jouer la concurrence. Il reviendra ainsi à la région de désigner, sur la base d’un cahier des charges national, un opérateur compétent pour l’ensemble des actifs occupés du secteur privé.
Par ailleurs, dans la mesure où le CEP doit permettre aux actifs de changer, le cas échéant, de métier ou de secteur, il n’est pas pertinent qu’il soit exercé par des acteurs sectoriels.
L’amendement n° 723, de la commission, tend à prévoir une période de transition pendant laquelle les OPACIF pourront continuer à exercer le rôle de CEP. Au-delà, ils seront appelés à réorienter leur mission d’opérateur de compétences, et je ne doute pas qu’ils sauront mettre à profit les compétences qu’ils ont développées à ce titre.
L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 421, présenté par M. Tourenne, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après les mots :
l’Association pour l’emploi des cadres
insérer les mots :
, par les Fonds de gestion des congés individuels de formation (FONGECIF)
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Il s’agit de reconnaître au réseau des FONGECIF une compétence de droit commun pour délivrer le CEP, au même titre que Pôle emploi, Cap emploi, les missions locales et l’APEC, comme cela était le cas dans le texte actuel sur le CEP, une étude menée par la DARES, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, reconnaissant la pertinence de l’action des FONGECIF sur le conseil en évolution professionnelle, notamment auprès des publics les plus fragiles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Fournier, rapporteur. Cet amendement pose un problème non seulement de forme, mais également de fond.
Sur la forme, les FONGECIF, qui ne sont d’ailleurs pas mentionnés sous cette appellation dans la partie législative du code du travail, n’existeront plus du fait de l’intégration du congé individuel de formation, le CIF, dans le CPF.
Sur le fond, comme je l’ai dit au sujet de l’amendement précédent, la commission est favorable au resserrement des opérateurs du CEP proposé par le Gouvernement. Je rappelle que les FONGECIF demeureront opérateurs de CEP jusqu’à la fin de l’année 2019 et que leur expertise a ensuite vocation à être reprise par des commissions paritaires interprofessionnelles régionales.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 645, présenté par M. Lévrier, Mme Schillinger, MM. Rambaud, Patriat, Amiel, Bargeton, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Remplacer les mots :
les opérateurs régionaux désignés par la région, après concertation au sein du bureau du comité régional de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles mentionné à l’article L. 6123-3 et dans le respect du cahier des charges mentionné à l’alinéa précédent
par les mots :
les opérateurs financés par l’institution mentionnée à l’article L. 6123-5
II. – Alinéa 14
Supprimer les mots :
par les régions
et le mot :
régional
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. La montée en gamme de l’accompagnement des salariés dans leurs projets d’évolution professionnelle constitue une priorité nationale. Les partenaires sociaux nationaux interprofessionnels, signataires de l’ANI du 22 février dernier, doivent être impliqués dans la construction du cahier des charges et l’attribution des marchés, au même titre que l’État et les régions. Aussi, France compétences, institution nationale à gouvernance quadripartite, gagne à assumer cette compétence.
Le présent amendement vise donc à rétablir la possibilité que, pour chaque région, un opérateur du CEP soit sélectionné par appel d’offres de France compétences. Est ainsi supprimée la mention introduite par la commission des affaires sociales du Sénat tendant à permettre que des opérateurs régionaux soient désignés par le conseil régional, après simple concertation du CREFOP, le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle.
M. le président. L’amendement n° 422, présenté par M. Tourenne, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer les mots :
les opérateurs régionaux désignés par la région
par les mots :
les commissions paritaires interprofessionnelles prévues à l’article L. 6323-17-6
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Je retire cet amendement, monsieur le président, car il n’a plus d’objet.
M. le président. L’amendement n° 422 est retiré.
L’amendement n° 37 rectifié quater, présenté par MM. Vial, Danesi, Joyandet, Paccaud, Revet, Cambon, Babary et Carle et Mme Deroche, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. – Jusqu’au 31 décembre 2019, dans l’attente de la mise en place des opérateurs permettant la mise en œuvre du 4° de l’article L. 6123-5 du code du travail par France compétences, les commissions paritaires interprofessionnelles régionales mentionnées à l’article L. 6323-17-6 du même code et les organismes paritaires agréés en application de l’article L. 6333-2 dudit code délivrent le conseil en évolution professionnelle défini à l’article L. 6111-6 du même code accessible notamment aux salariés mentionnés à l’article L. 5422-1-1 du même code.
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Cet amendement a pour objet de permettre aux OPACIF hors champ de délivrer le conseil en évolution professionnelle durant la période transitoire pour éviter un goulot d’étranglement dans les FONGECIF.
M. le président. L’amendement n° 723, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, M. Mouiller et Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Remplacer les mots :
à l’article L. 6331-1 du code du travail, dans sa
par les mots :
aux articles L. 6333-1 et L. 6333-2 du code du travail dans leur
La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion.
Mme Catherine Fournier, rapporteur. Par le biais de l’amendement n° 723, il s’agit d’élargir aux OPACIF nationaux la mission transitoire de délivrance du CEP confiée également aux FONGECIF.
Cela étant, le Gouvernement souhaite qu’un opérateur régional soit désigné dans chaque région par France compétences. Il a semblé à la commission qu’il était au contraire pertinent que cet opérateur régional soit désigné par chaque région, et non à l’échelon national. France compétences, qui a cette dimension nationale, n’aura, en effet, pas une connaissance fine des besoins et du tissu économique régional. Les régions ont la compétence « développement économique » et ont déjà beaucoup travaillé sur la formation et l’apprentissage. De plus, si la décentralisation a un sens, il convient de laisser à la région la possibilité de désigner l’opérateur du CEP compétent sur son territoire.
Le Gouvernement indique que les régions se sont emparées de la possibilité qui leur était déjà offerte. Néanmoins, la désignation d’un opérateur paraissait moins nécessaire, voire redondante, tant que les FONGECIF étaient des opérateurs de droit. Leur disparition conduira les régions à s’investir davantage pour la désignation d’un tel opérateur. La commission est donc défavorable à l’amendement n° 645, qui vise à revenir au texte initial.
L’amendement n° 37 rectifié quater a pour objet de confier l’exercice du CEP à titre transitoire aux CPIR. Or, si l’opérateur régional prévu par l’article 3 ne sera pas désigné immédiatement, les CPIR ne seront pas non plus en place dès le 1er janvier prochain. Je vous demande donc, ma chère collègue, de retirer cet amendement au profit de celui de la commission, qui tend à maintenir cette mission transitoire aux FONGECIF actuels, tout en l’élargissant aux OPACIF, comme je viens de vous le proposer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je suis favorable à l’amendement n° 723.
Le conseil en évolution professionnelle pour les salariés est actuellement assuré par les FONGECIF, à l’échelon régional, pour les salariés du champ interprofessionnel, et par les OPACIF, au plan national, pour les autres salariés. Ces OPACIF sont intégrés dans les OPCA qui recouvrent le champ professionnel concerné. Si le texte actuel du projet de loi prévoit que la mise en œuvre du CEP peut être assurée de façon transitoire en 2019 par les FONGECIF, devenus commissions paritaires interprofessionnelles régionales, il ne mentionne pas ces structures nationales. Cet amendement est donc utile, puisqu’il élargit la mission transitoire à ces OPACIF.
En conséquence, je sollicite le retrait de l’amendement n° 37 rectifié quater au profit de l’amendement n° 723, qui règle le problème de la période transitoire.
J’émets par ailleurs un avis favorable sur l’amendement n° 645, à la différence de la commission, et je veux en expliquer les raisons. Dans le contexte de mutation actuel, les partenaires sociaux ont souhaité, dans l’accord national interprofessionnel du 22 février 2018, que l’appel d’offres concernant le CEP des salariés soit mené au plan national, tout en prenant en compte les spécificités régionales apportées par les régions, qui sont membres de France Compétences, et ce pour deux raisons.
La première raison, c’est que, depuis 2014, les régions pouvaient le faire, mais ne l’ont pas fait. Il risque donc d’y avoir du retard dans la mise en œuvre du dispositif, les régions n’ayant jamais pris en main cette compétence.
La seconde raison, plus de fond et de prospective, tient à ce que le problème de la mobilité interrégionale, notamment sur les départements proches, se pose tous les jours. Le fait de pouvoir disposer de cette gamme de réseaux, parfois locaux, parfois interrégionaux, permettra d’avoir un appel d’offres national, avec des contenus territorialisés.
Je le répète, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 645, qui est tout à fait cohérent avec l’accord national interprofessionnel précité, puisqu’il tient compte de l’inaction des régions en la matière depuis quatre ans.