M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.
M. Joël Guerriau. Madame la secrétaire d’État, vous avez exposé les raisons qui expliquent les changements survenus en matière de cartes sécurisées.
Pour autant, je ne partage pas votre point de vue sur la question des délais. On a l’impression de se retrouver dans le cas d’une manifestation, où les chiffres des manifestants diffèrent fortement de ceux qui sont invoqués par les partisans du Gouvernement !
La réalité est autre : j’ai reçu trop de témoignages de personnes faisant état de ces questions de délais. D’ailleurs, le renouvellement des cartes n’a pas été annoncé et s’est produit sans que les intéressés ne le sachent, ce qui les a parfois placés dans des situations compliquées.
Quand vous avez une amende, vous pouvez toujours la contester. Mais lorsqu’il s’agit d’une voiture enlevée sur un lieu de stationnement, une personne handicapée est particulièrement gênée, puisque le mal est fait. D’où la nécessité d’examiner avec attention cette situation, pour éviter que les personnes en situation de handicap ne soient pénalisées par ce changement de carte qui, vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État, est tout à fait justifié dans son principe.
gestion des demandes de visas par des sociétés privées
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 348, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d’État, à l’origine de ma question, il y a les fins de non-recevoir récurrentes du consulat de France à Casablanca aux demandes de visa de Mme Gracia Fuamba, demeurant régulièrement au Maroc, visas qui lui sont nécessaires pour rejoindre en France son compagnon, français et père de l’enfant qui vit actuellement avec elle.
Constatant que ces demandes ont été instruites par une société privée pour le compte du consulat général, qu’il n’a été opposé auxdites demandes aucune raison sérieuse, constatant l’impossibilité de joindre cette entreprise et l’impossibilité d’obtenir des réponses autres que routinières de notre consul général à Casablanca, je me suis résolu à vous poser en direct les deux questions suivantes : qu’est-ce qui s’oppose à la venue de Mme Fuamba en France avec son enfant ? Est-il d’usage, au Quai d’Orsay, qu’un haut fonctionnaire se moque aussi ouvertement d’un élu de la République ?
M. Loïc Hervé. Cela arrive souvent…
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur Pierre-Yves Collombat, vous évoquez un nom, une personne, un dossier, une situation. Je découvre d’ailleurs ce nom aujourd’hui, puisque vous aviez à l’origine rédigé votre question de façon plus générale. Quoi qu’il en soit, j’aurai à cœur d’examiner avec attention cette situation particulière.
Votre question me donne l’occasion de faire un point d’ensemble sur le processus de traitement des demandes de visas, qui est le véritable enjeu ici. Rappelons-le, il n’existe pas de délégation de la prérogative régalienne à des opérateurs privés.
Certes, des prestataires extérieurs sont chargés de prendre des rendez-vous et de collecter un certain nombre de pièces pour instruire les demandes. Mais ce sont bien des agents du Quai d’Orsay qui se concentrent sur le travail aboutissant, au final, à dire oui ou non à une demande de visa, en fonction de nos règles législatives et réglementaires. Encore une fois, seul un agent de l’État peut statuer sur un tel dossier.
Les externalisations sont strictement encadrées par un code communautaire des visas, qui est commun à de nombreux partenaires Schengen. À vrai dire, le dispositif issu de cette répartition des tâches, avec le mot final qui revient à l’administration dans l’exercice de cette mission régalienne, a permis d’absorber la hausse constante de demandes.
Rendez-vous compte, monsieur le sénateur, ces demandes ont doublé en dix ans ! Il était donc important de concentrer les effectifs du ministère sur le cœur de métier.
Je vous donnerai quelques chiffres. Il y a dix ans, 2 millions de demandes de visa étaient gérées par 800 équivalents temps plein. Aujourd’hui, nous en gérons 4 millions avec 951 équivalents temps plein. Vous le voyez, ce dispositif a permis d’absorber un nombre particulièrement important de demandes.
Pour prendre l’exemple du consulat de Casablanca, sachez qu’il délivre à lui seul plus de 100 000 visas par an. C’est dire s’il s’agit là d’organisations particulièrement importantes. Quoi qu’il en soit, je me pencherai attentivement sur la situation particulière que vous avez évoquée, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour répondre à M. le secrétaire d’État.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d’État, je n’aurais pas posé la question de cette façon si je n’avais pas fait l’objet d’une demande des services, pour que je fasse savoir de qui il s’agissait. J’avais donc l’espoir que vous étiez au courant et que l’on allait me répondre sur le problème précis de cette personne… Me voilà déçu !
Je veux simplement attirer votre attention sur un point : les motifs de refus qui m’ont été opposés sont parfaitement faux, voire ridicules, comme celui selon lequel l’enfant de deux ans n’aurait pas manifesté clairement son souhait de venir en France avec sa mère. C’est parfaitement stupide !
Il s’agit, et je l’ai dit au consul général, d’une famille parfaitement intégrée : la mère de cette personne est mariée avec un Français ; la fille de celle-ci est française, et le couple a un fils qui est brigadier-chef de gendarmerie. Parmi les exemples d’intégration, c’en est un bon !
S’agissant maintenant du fond de l’affaire, une certaine sous-traitance des demandes peut se comprendre, mais c’est là tout de même, me semble-t-il, une prérogative régalienne de l’État.
M. Pierre-Yves Collombat. Le minimum voudrait qu’un examen soit porté après coup sur le travail effectué.
Or, si j’en juge par les réponses qui m’ont été faites, aucun contrôle n’est effectué. Je m’attendais à ce que l’on me donne des raisons ; ce ne fut pas le cas. Quant à la façon fort cavalière de me répondre – « Circulez, il n’y a strictement rien à voir » –,…
M. Loïc Hervé. Ça…
M. Pierre-Yves Collombat. … il paraît que c’est une habitude au sein des services du Quai d’Orsay. Souffrez que je ne m’y fasse pas !
accueil touristique de montagne et utilisation de l’eau
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, auteur de la question n° 326, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
M. Patrick Chaize. Monsieur le président, madame la ministre, je voudrais attirer votre attention sur la réglementation en vigueur en ce qui concerne l’utilisation des eaux provenant d’une source ou d’un captage réalisé en sous-sol, par les établissements de montagne accueillant des touristes.
Appréhendé sous ses angles économiques et sociaux, l’essor touristique a un impact fort en termes de développement. En s’incorporant au sein d’activités telles que l’artisanat et l’agriculture, le tourisme de montagne favorise en effet l’économie locale.
Conformément aux dispositions du code de la santé publique, les établissements qui accueillent des touristes doivent respecter des principes en matière de qualité des eaux destinées à la consommation humaine.
Toutefois, s’agissant spécifiquement des sites touristiques de montagne où les propriétaires d’auberges ou de gîtes utilisent l’eau prélevée dans le milieu naturel, il est constaté que l’application de la réglementation en vigueur varie d’un département à l’autre, ce qui ne va pas sans poser des difficultés à certains d’entre eux dans l’exercice de leur activité.
Dans ce contexte, je souhaiterais connaître la doctrine en la matière et les cas dérogatoires possibles.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur Patrick Chaize, je vous prie tout d’abord d’excuser Mme la ministre des solidarités et de la santé, qui ne peut être présente ce matin et qui m’a priée de la remplacer.
Vous avez appelé son attention sur la situation des accueils touristiques de montagne vis-à-vis du contrôle sanitaire des eaux. Vous l’avez rappelé, ces structures contribuent à l’essor touristique et économique des territoires de montagne que nos concitoyens, comme les visiteurs, redécouvrent, à juste titre, avec plaisir.
L’article L.1321-1 du code de la santé publique dispose : « Toute personne qui offre au public de l’eau en vue de l’alimentation humaine, à titre onéreux ou à titre gratuit et sous quelque forme que ce soit, y compris la glace alimentaire, est tenue de s’assurer que cette eau est propre à la consommation. »
Dans la mesure où les auberges et les gîtes de montagne sont des établissements recevant du public, ils sont soumis à la réglementation générale précitée.
Dans certains cas, ils peuvent ne pas être raccordés au réseau public de distribution d’eau potable et utiliser leur ressource en eau privée, sous réserve de plusieurs conditions : ils doivent tout d’abord disposer d’une autorisation préfectorale, puis respecter les exigences de qualité et se soumettre au contrôle sanitaire assuré par les agences régionales de santé.
Les seules exemptions à ces dispositions concernent l’utilisation d’eau en vue de la consommation à l’usage d’une famille et ne concernent en aucun cas les activités touristiques. L’application de ces règles n’a pas vocation à varier d’un département à l’autre.
Aussi, à la suite de votre sollicitation, les agences régionales de santé seront alertées sur ces disparités que vous indiquez.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour répondre à Mme la ministre.
M. Patrick Chaize. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse et de l’attention que vous portez à cette question, en donnant aux agences régionales de santé des directives en la matière.
Dans mon département, l’Ain, plusieurs cas ont montré que l’on ne pouvait plus s’adonner au tourisme de montagne, car le raccordement au réseau d’eau potable ne peut être réalisé pour des raisons de distance et de coût. Cela va jusqu’à l’interdiction de l’utilisation de l’eau pour la cuisine ou la vaisselle ! En conséquence, tous les établissements de tourisme de montagne ferment, ce qui est catastrophique, dans la mesure où, vous l’avez souligné vous aussi, cette économie est importante pour nos territoires et notre économie.
Je vous remercie de le rappeler avec insistance, afin que nous puissions continuer à accueillir des touristes dans de bonnes conditions.
enseignement de l’économie
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, auteur de la question n° 242, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. Franck Montaugé. Madame la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, j’attire votre attention sur le mode de recrutement actuel des professeurs et des directeurs de recherche dans le domaine de l’économie.
Actuellement, le mode de recrutement marginalise les économistes qui ne s’inscrivent pas dans le cadre de la pensée économique dominante, encore dite « orthodoxe » ou mainstream.
Il y a là un sujet d’importance, parce que la tradition hétérodoxe française en économie est riche en diversité et a toujours participé au rayonnement international de la France. Certains de ses représentants avaient anticipé la crise financière de 2007-2008.
Les deux rapports de missions rendus en 2001 et 2014 préconisent que l’enseignement soit « incarné dans les faits, les politiques, l’histoire et les débats de société » et qu’il soit « proposé aux étudiants de premier cycle une formation pluridisciplinaire, avec spécialisation progressive, et plus tournée vers la compréhension des faits et des institutions économiques ».
Aujourd’hui, ce défaut de pluralisme se traduit aussi par une concentration des flux financiers vers les universités et les laboratoires approfondissant la pensée dominante, ce qui renforce également les inégalités territoriales.
Pour toutes ces raisons, de nombreux universitaires, notamment au sein de l’Association française d’économie politique, l’AFEP, proposent la création d’une nouvelle section, qui serait intitulée « économie, société et territoire », du Conseil national des universités, afin de valoriser les perspectives pluridisciplinaires et institutionnalistes dans l’enseignement de l’économie.
Ces économistes proposent également de créer une nouvelle section, « économie et sociétés », au sein du Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, pour favoriser le pluralisme et la pluridisciplinarité de la recherche en économie. Sachant qu’un projet de décret dans ce sens a été élaboré, j’aimerais savoir, madame la ministre, quelles suites vous comptez donner à cette démarche.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur Montaugé, la recherche en économie, qu’il s’agisse de micro-économie ou de macro-économie, a vocation à confronter les théories aux faits pour faire progresser la connaissance. À cette fin, tous les paradigmes de la discipline doivent pouvoir se confronter sur le terrain scientifique, et cela sans intervention politique. Une fois ce constat établi, vous conviendrez que la notion d’orthodoxie a peu de sens.
À cet égard, la recherche française en économie est dynamique, et cela est reconnu à l’échelle internationale. Je rappelle que Jean Tirole a reçu le prix de la Banque royale de Suède en mémoire d’Alfred Nobel en 2014, soit l’équivalent du prix Nobel en économie.
Sur le fond, la recherche économique actuelle s’illustre en France et dans son cadre institutionnel actuel par une ouverture croissante à l’interdisciplinarité, notamment aux apports des sciences humaines et sociales. Ce qui est vrai des sciences humaines l’est également des sciences exactes, le lien entre l’économie, les sciences cognitives ou les mathématiques n’étant plus à prouver.
Dans ces conditions, la création d’une nouvelle section, qui serait dédiée à l’économie « hétérodoxe » au sein du CNU ou du CNRS, n’aurait aucune plus-value. Il faut veiller à ce que le pluralisme devienne la règle, ce qui ne fera pas en séparant les tenants des différentes doctrines.
Permettez-moi de rappeler également qu’il existe à l’heure actuelle plus d’une trentaine de sections du CNU dédiées aux sciences humaines et sociales. C’est également le cas au CNRS, qui comporte plusieurs sections. Là encore, il s’agit non pas de cristalliser telle ou telle théorie par rapport à telle autre, mais bien de garantir à chacun de pouvoir exercer son métier de scientifique, qui est de confronter les faits aux théories, afin de faire progresser la connaissance.
C’est dans ce sens que Pierre-Cyrille Hautcoeur, directeur d’études en économie à l’École des hautes études en sciences sociales, l’EHESS, a remis en 2014 à Geneviève Fioraso un rapport relatif à l’enseignement de l’économie en France, rapport qui émettait déjà un avis négatif sur cette proposition. Cet avis a été confirmé par Jean Tirole, qui a eu l’occasion de s’exprimer publiquement sur ce sujet.
S’agissant de l’ouverture pluridisciplinaire du premier cycle universitaire en économie, cette filière bénéficiera comme les autres de la mise en œuvre de l’enseignement modulaire et capitalisable dans les conditions prévues par la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, mais aussi par le projet du nouvel arrêté de licence en cours de rédaction.
Ce nouveau cadre légal et réglementaire permettra à tous les étudiants en économie d’enrichir leur formation au contact d’autres disciplines.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour répondre à Mme la ministre.
M. Franck Montaugé. Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre, mais je ne partage presque aucun des arguments que vous avez développés ; j’y vois même des contradictions.
Vous citez M. Jean Tirole, éminent économiste ayant fait briller dans sa discipline les couleurs de la France. Celui-ci s’inscrit dans une démarche d’économistes tout à fait respectables, mais qui relève de la pensée dominante en la matière.
On a plus que jamais besoin, y compris pour notre démocratie, de pluralisme en matière de recherche et d’enseignement. Or le chemin que vous proposez n’est pas de nature à nous doter de tous les moyens nécessaires pour avancer sur cette question.
L’économie ne trouve pas en elle-même ses justifications. Comme d’autres, je pense que c’est la politique qui préside aux choix de société. Évidemment, l’économie a ses règles, ses paradigmes, comme vous l’avez dit, mais, encore une fois, la diversité et le pluralisme des expressions sont de nature à nous faire progresser.
L’organisation de nos sociétés, en particulier leur politique économique, ne passera pas par un seul chemin. C’est tout l’enjeu de la reconnaissance de ce courant dit « hétérodoxe » dont nous avons besoin. Je le dis d’ailleurs sans porter de jugement de valeur sur les paradigmes et les principes que ses tenants mettent en avant.
Cette reconnaissance est essentielle pour la vitalité de nos démocraties, et pas seulement la nôtre, puisque cette question s’inscrit dans un vaste espace, européen et mondial.
situation du groupement hospitalier du Havre
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 319, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Agnès Canayer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur la situation tendue du groupe hospitalier du Havre, plus particulièrement de l’hôpital Pierre-Janet, qui en est l’hôpital psychiatrique.
Depuis le 16 juin dernier, les agents de l’hôpital psychiatrique Pierre Janet sont en grève pour dénoncer l’absence de moyens suffisants pour prendre en charge les malades. Ce mouvement, initialement circonscrit aux urgences, s’est étendu à tout le pôle psychiatrie et santé mentale du groupe hospitalier.
La situation critique dans laquelle se trouve l’établissement depuis plusieurs années conduit toutes les catégories de personnels soignants à tirer la sonnette d’alarme. En effet, le manque récurrent de personnel et l’absence d’investissements suffisants ne permettent plus d’accueillir les patients dans des conditions acceptables. Les urgences de nuit sont saturées, pour atteindre aujourd’hui un taux de 116 % de remplissage depuis plus d’une dizaine d’années.
Depuis 2016, le plan Psychiatrie et santé mentale, doté de 15 millions d’euros pour les cinq prochaines années, prévoit la réhabilitation des trois pavillons : Boréal, Alizé et Caravelle. Douze équivalents temps pleins ont été recrutés en 2017 et d’autres recrutements sont en cours. Malgré ces efforts, la situation demeure trop tendue et insuffisante pour que le service fonctionne normalement. De trop nombreux patients sont hospitalisés sur des matelas posés à même le sol, faute de lits en nombre suffisant.
L’ARS a été sollicitée pour un accompagnement financier et des moyens matériels supplémentaires, sans réponse à ce jour. De plus, la demande de visite sur place de la directrice de l’ARS pour constater de visu la situation est à l’heure actuelle toujours repoussée.
Madame la ministre, comme à Saint-Étienne-du-Rouvray, les personnels au Havre sont à bout. Ils peuvent difficilement travailler et prendre soin des patients dans les conditions actuelles. À la veille de l’été, ils attendent des mesures concrètes, fermes et immédiates.
Quels engagements pouvez-vous prendre pour les soulager et garantir un accueil et un suivi des patients de qualité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame Agnès Canayer, permettez-moi de nouveau d’excuser l’absence de Mme la ministre des solidarités et de la santé, qui m’a demandé de la remplacer devant vous.
Comme de nombreux établissements de santé, le service d’accueil des urgences du groupe hospitalier du Havre connaît une augmentation croissante du nombre des passages aux urgences. La direction de l’établissement a décidé d’augmenter le personnel, avec un poste d’infirmier d’accueil et d’orientation.
Par ailleurs, pour tenir compte des épisodes d’afflux saisonniers liés aux épidémies hivernales, l’agence régionale de santé accorde un financement spécifique depuis 2016 à l’établissement pour permettre des renforts temporaires durant la période hivernale, apport à hauteur de 500 000 euros en 2017.
Parallèlement, l’agence régionale de santé travaille avec les représentants des médecins libéraux et les établissements pour renforcer la démographie médicale en Normandie, déploie dans ce cadre des pôles de santé libéraux et ambulatoires et s’engage dans la mise en œuvre de communautés professionnelles territoriales de santé, qui ont notamment vocation à permettre d’améliorer la réponse aux demandes de soins non programmés en journée et, ainsi, de limiter l’impact sur les services d’urgence.
Le groupe hospitalier du Havre a également engagé des coopérations renforcées avec l’offre de soins de ville au sein du SAMU, avec une expérimentation de régulation diurne portée par l’Association médicale des urgences havraises.
Enfin, un nouveau cahier des charges de la permanence des soins ambulatoires sera adopté par la directrice générale de l’agence régionale de santé de Normandie dans les prochaines semaines. Élaboré en concertation avec les professionnels et établissements de santé, ce cahier des charges renforcera les moyens médicaux consacrés à la régulation téléphonique.
S’agissant de la psychiatrie, la direction de l’établissement a défini un plan d’action pour attirer et fidéliser des médecins psychiatres, repenser le rôle et la place des psychologues et des infirmiers, améliorer les conditions de travail des personnels et fluidifier les parcours des patients.
Vous l’avez rappelé, le groupement hospitalier du Havre a aussi élaboré un ambitieux projet de restructuration immobilière des activités de psychiatrie. Toutes ces mesures visent à améliorer le fonctionnement de cet établissement.
Le groupement hospitalier du Havre est néanmoins confronté à un mouvement de grève engagé par les organisations syndicales depuis plusieurs semaines. Il est essentiel que le dialogue social reprenne au sein de l’établissement sur le fondement de toutes les améliorations que je viens de mentionner.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour répondre à Mme la ministre.
Mme Agnès Canayer. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Depuis plus de dix ans, le groupe hospitalier du Havre subit, de manière récurrente, une situation tendue – la chambre régionale des comptes a relevé ces difficultés dès son rapport de 2007. Ces tensions se sont propagées au service de psychiatrie, qui, aujourd’hui, est véritablement en état d’ébullition : les personnels campent sur le toit de l’établissement depuis plusieurs jours !
À l’origine, le mouvement était circonscrit aux infirmiers psychiatriques. Désormais, il concerne tous les personnels soignants, y compris les médecins, qui atteignent le stade de la saturation.
Or, face à ces difficultés, l’agence régionale de santé, l’ARS, n’apporte aucune réponse. Sa directrice refuse de venir sur place pour constater l’étendue des problèmes et pour engager le dialogue.
Aujourd’hui, nous sommes face à un dialogue de sourds, qui cristallise les positions des uns et des autres. Une main tendue et un effort de la part de l’ARS seraient de bon augure pour trouver une solution rapide à cette situation, certes très conflictuelle, mais tout à fait compréhensible.
ajustements au projet de loi portant évolution du logement
M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, auteur de la question n° 343, adressée à M. le ministre de la cohésion des territoires.
M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question a trait au projet de loi sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, ou projet de loi ÉLAN, dont la Haute Assemblée débattra dans quelques jours. Elle porte plus spécifiquement sur la réforme de l’urbanisme, dont on parle moins, parce que, par bien des aspects, elle se révèle très technique.
Certes, il faut souligner les réelles avancées accomplies par ce texte, par exemple pour la lutte contre les recours abusifs ou contre les marchands de sommeil. Toutefois, il est regrettable que ce projet de loi ne fasse pas davantage confiance aux élus locaux de nos territoires, à qui l’on va demander de construire plus, plus vite et moins cher ; dans le même temps, les bailleurs sociaux disposeront de moins de moyens pour le faire.
Surtout, les maires seront de plus en plus contraints par des prescriptions, notamment en matière environnementale, qui aboutissent à une raréfaction du foncier et à un allongement des délais dû à la complexité croissante que subit l’élaboration des documents d’urbanisme. Ces derniers sont soumis à de lourdes procédures de concertation et à des enquêtes publiques répétées.
Que comptez-vous faire pour résoudre cette contradiction ? Au-delà des procédures de simplification applicables aux zones d’aménagement concerté, les ZAC, lesquelles vont dans le bon sens, entendez-vous simplifier les documents d’urbanisme, notamment pour ce qui concerne les compatibilités entre les schémas de cohérence territoriale, les SCOT, et les plans locaux d’urbanisme intercommunaux, les PLUI, qui imposent souvent des élaborations très chaotiques ?
À ce titre, j’ai déposé deux amendements, qui seront examinés cette semaine en commission et, quelques jours plus tard, dans cet hémicycle.
Le premier amendement vise à limiter les règles de compatibilité entre les différents documents d’urbanisme aux seuls documents stratégiques des SCOT et des PLU, à savoir – excusez ces termes barbares ! –, pour le SCOT, le document d’orientation et d’objectifs, ou DOO, et, pour le PLUI, le projet d’aménagement et de développement durable, ou PADD, ainsi que les orientations d’aménagement et de programmation transversales sectorielles.
Le but est de raccourcir les délais de réalisation de ces documents et de donner davantage de souplesse aux maires en matière réglementaire.
Dans le même esprit, le second amendement tend à remettre au goût du jour les plans de secteur déjà prévus par la loi, mais peu usités.
Pour respecter la diversité des contextes locaux, en particulier dans les agglomérations comprenant à la fois des zones rurales, rurbaines et urbaines, je propose que l’on puisse adapter le mécanisme des plans sectoriels : ainsi, il serait possible de distinguer des zones de cohérence homogènes et, dès lors, de créer des plans de secteur permettant de mieux prendre en considération la diversité de nos territoires.
Ces plans de secteurs définiraient les conditions d’aménagement de chaque zone, en garantissant la prise en compte des qualités architecturales, urbaines et paysagères des espaces dans la continuité desquels s’inscrivent ces zones.
Monsieur le ministre, ma question est donc simple : qu’avez-vous prévu en ce sens ?