M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 174 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 326 |
Contre | 14 |
Le projet de loi est adopté définitivement. (Applaudissements sur toutes les travées, à l’exception de celles du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (projet n° 525, texte de la commission n° 571, rapport n° 570, tomes I et II, avis n° 563).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, à l’article 10.
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS TENDANT À L’AMÉLIORATION DE L’ÉQUILIBRE DES RELATIONS COMMERCIALES DANS LE SECTEUR AGRICOLE ET ALIMENTAIRE
Article 10
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour modifier le titre IV du livre IV du code de commerce afin :
1° De réorganiser ce titre et clarifier ses dispositions, notamment en supprimant les dispositions devenues sans objet et en renvoyant le cas échéant à d’autres codes ;
2° De clarifier les règles de facturation, en les harmonisant avec les dispositions du code général des impôts, et modifier en conséquence les sanctions relatives aux manquements à ces règles ;
3° De préciser les dispositions relatives aux conditions générales de vente, en imposant notamment la formalisation par écrit, par le distributeur, des motifs de son refus d’acceptation de celles-ci, et mettre en cohérence les dispositions relatives aux produits agricoles et alimentaires, notamment en ce qui concerne les références applicables aux critères et modalités de détermination des prix, avec les dispositions du code rural et de la pêche maritime ;
4° De simplifier et préciser les dispositions relatives aux conventions mentionnées aux articles L. 441-7 et L. 441-7-1 du code de commerce, et notamment :
a) Pour les conventions conclues entre les fournisseurs et les distributeurs ou les prestataires de service ainsi qu’entre les fournisseurs et les grossistes, le régime des avenants à ces conventions ;
b) Pour les conventions conclues entre les fournisseurs et les distributeurs ou les prestataires de services, la prise en compte des obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties afin de déterminer le prix ainsi que la définition du plan d’affaires et du chiffre d’affaires prévisionnel ;
5° De simplifier et préciser les définitions des pratiques mentionnées à l’article L. 442-6, en ce qui concerne notamment la rupture brutale des relations commerciales, les voies d’action en justice et les dispositions relatives aux sanctions civiles ;
6° De modifier les dispositions de l’article L. 442-9 pour élargir l’interdiction de céder à un prix abusivement bas aux produits agricoles et aux denrées alimentaires, tout en supprimant l’exigence tenant à l’existence d’une situation de crise conjoncturelle, et préciser notamment les modalités de prise en compte d’indicateurs de coûts de production en agriculture.
II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour mettre en cohérence les dispositions de tous codes avec celles prises par voie d’ordonnance en application du I.
III. – (Non modifié) Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance prévue par le présent article.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l’article.
Mme Cécile Cukierman. Comment ne pas regretter, une fois encore, que le Gouvernement veuille, sur des sujets aussi importants, avoir recours à des ordonnances, que, de fait, la représentation nationale ne peut pas modifier en amont, comme l’a démontré le rejet de nos amendements sur l’article 8 par le vote, hier soir, de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité ? Ainsi, même lorsque, face à la contrainte, nous acceptons de discuter le contenu des ordonnances, c’est une fin de non-recevoir qui nous est opposée.
Derrière cet article, nous comprenons très bien que vous souhaitez laisser à Bercy tout le loisir de réécrire le droit de la concurrence, alors qu’il a toujours été de la compétence du Parlement. Ce droit est constitué de règles élaborées depuis vingt ans par des apports législatifs successifs sur la transparence, les pratiques restrictives de concurrence et autres pratiques prohibées et, particulièrement, sur les relations entre la grande distribution et les producteurs.
Même si la température ne s’y prête pas en cette saison, nous pouvons quand même frissonner à l’idée de voir certains d’entre vous se réjouir de dispositions qui visent à améliorer les relations entre fournisseurs et distributeurs. Mieux encore, nous pourrions nous dire qu’il y a finalement beaucoup de naïveté à faire reposer ce texte uniquement sur une vision morale des relations. À croire que le monde du commerce, tel que vous le décrivez, ressemble à un paradis. Non, le monde du commerce, ce n’est pas toujours le printemps, bien au contraire !
Légiférons sur des règles beaucoup plus strictes – nous nous y sommes employés hier avec une série d’amendements sur les précédents articles du titre Ier –, avec des mécanismes contraignants, sinon, nous le savons, les plus forts l’emporteront et les producteurs seront une fois de plus écrasés.
Respectant nos principes et en toute cohérence avec nos interventions, nous n’avons déposé aucun amendement sur l’article 10. Nous vous proposerons un amendement tendant à modifier le code de commerce dans un article additionnel après l’article 10, afin de renforcer le contrôle des centrales d’achat. En l’état, bien évidemment, nous ne voterons pas l’article 10.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 708 rectifié, présenté par MM. Guillaume, Artano et A. Bertrand, Mmes M. Carrère et Costes, MM. Gabouty et Gold, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall, n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 583 rectifié est présenté par MM. Bérit-Débat, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, M. Joël Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 684 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme Costes, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Après les mots :
conditions générales de vente
insérer les mots :
, et notamment l’opposabilité de leur date d’entrée en vigueur
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 583 rectifié.
M. Claude Bérit-Débat. Le principe de liberté des prix et de la concurrence est consacré par le droit français. Il postule que tout producteur doit pouvoir proposer la vente de ses produits selon ses propres conditions générales de vente, les CGV, comprenant ses conditions tarifaires.
Documents établis unilatéralement par le fournisseur, les conditions générales de vente et le tarif sont la propriété du fournisseur. Or, dans la majorité des cas, le tarif fournisseur, socle unique de la négociation commerciale, n’est pas appliqué. Demandes de conditions générales de vente dérogatoires, reports d’application du tarif annuel, voire refus d’appliquer le tarif de l’année en cours sont des pratiques aussi courantes que problématiques.
L’objectif d’une négociation commerciale équilibrée, basée sur des CGV et un tarif annuel producteur, déjà réaffirmé par la loi de modernisation de l’économie, est toujours, à l’heure actuelle, largement bafoué. Or cette revendication est une demande forte des organisations de producteurs. La négociation doit porter sur le prix convenu, résultant de la négociation commerciale, et non pas sur le tarif de départ. Afin de mettre un terme au blocage des négociations, donnant lieu au report des tarifs antérieurs et, de ce fait, à la multiplication des litiges de factures, il convient de réaffirmer que la date d’entrée en vigueur du tarif n’est pas négociable et s’applique de plein droit.
En vertu du présent amendement, l’ordonnance de réécriture du titre IV du livre IV du code de commerce devra donc reprendre ces éléments, notamment l’opposabilité des CGV dès leur acte d’entrée en vigueur. Il s’agit là d’une mesure d’équité, que je vous invite à approuver en votant cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 684 rectifié.
M. Franck Menonville. Il s’agit d’affirmer que la date d’entrée en vigueur du tarif n’est pas négociable et qu’elle s’applique de plein droit.
La précision apportée par l’amendement permettra de fluidifier les relations commerciales et de réduire les litiges fatalement provoqués par des commandes réglées sur une base de tarif antérieure.
M. le président. L’amendement n° 287 rectifié, présenté par M. Bizet, Mme Berthet, MM. Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam et MM. Guené, D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Perrin, Priou, Rapin, Revet, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
son refus d’acceptation de
par les mots :
toute demande de dérogation à
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. L’article 10 prévoit désormais que l’ordonnance de réécriture du titre IV du livre IV du code de commerce devra comprendre des dispositions imposant au distributeur de formaliser par écrit les motifs de son refus d’acceptation des conditions générales de vente.
Cette nouvelle obligation à la charge du distributeur pourrait faire croire que celui-ci peut écarter l’intégralité des conditions générales de vente du fournisseur. Or la commission d’examen des pratiques commerciales et la Cour de cassation considèrent que le refus en bloc des conditions générales de vente constitue un comportement abusif.
Le présent amendement vise ainsi à préciser que l’ordonnance de réécriture du titre IV du livre IV du code de commerce devra comprendre des dispositions imposant au distributeur de formaliser par écrit les motifs de toute demande de dérogation aux conditions générales de vente comprenant les tarifs.
M. le président. L’amendement n° 288 rectifié, présenté par MM. Bizet, Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam et MM. Guené, D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Priou, Rapin, Revet, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après les mots :
plan d’affaires
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, du chiffre d’affaires et du volume prévisionnels ;
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Afin de mettre fin à la destruction de valeur entre tous les maillons de la chaîne alimentaire, les États généraux de l’alimentation ont acté la nécessité d’encadrer, en valeur et en volume, l’ensemble des avantages financiers accordés à l’occasion d’opérations promotionnelles.
Le présent amendement vise à ce que la convention unique conclue entre fournisseur et distributeur prévoie, en plus de l’indication du chiffre d’affaires prévisionnel, le volume annuel prévisionnel. Cette précision renforcera la sécurité juridique des parties en leur permettant de mesurer au mieux les promotions envisageables et de respecter le plafond en volume ainsi prédéfini.
M. le président. L’amendement n° 728, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer le mot :
six
par le mot :
neuf
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Avec cet amendement, nous proposons d’étendre le délai d’habilitation relatif à la mise en cohérence des dispositions de tous les codes avec le présent article de six à neuf mois. Nous disposons en effet d’un délai de six mois pour modifier par voie d’ordonnance les dispositions du titre IV du livre IV du code de commerce. Il est donc préférable de disposer d’un délai complémentaire de trois mois pour que, une fois les modifications apportées, nous puissions analyser dans les autres codes les dispositions concernées et les harmoniser s’il en est besoin.
Il est également important de prévoir un décalage entre le délai prévu au II de l’article 10, qui est fixé pour harmoniser dans d’autres codes les dispositions prises en vertu du I de ce même article. Le Conseil d’État préconise de manière générale des délais différents lorsqu’un texte prévoit plusieurs habilitations.
Je vous invite donc à voter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques. Nous nous accordons tous sur le fait que les négociations commerciales, en particulier celles qui se déroulent en France – les choses sont un peu différentes dans les autres pays européens –, sont relativement détestables. Lorsque le fournisseur arrive avec ses conditions générales de vente, il s’entend souvent dire par le distributeur, sans la moindre explication : « Cette année, c’est moins 3 % ! »
Cela étant, je ne vois pas comment les amendements identiques nos 583 rectifié et 684 rectifié pourraient régler ce problème. Je le rappelle, en commission, un amendement a été adopté visant à obliger le distributeur qui n’accepte pas certaines clauses des conditions générales de vente à en donner une explication écrite, ce dont il s’affranchissait jusque-là. Nous suivons ainsi l’esprit du texte sur « le prix en cascade ». En effet, il ne sert à rien de se décarcasser pour faire un bon contrat entre l’agriculteur et son premier acheteur si, par la suite, on ne peut rien imposer au distributeur.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements pour cause de soupçon d’inefficacité de la mesure.
L’alinéa 4 de cet article a été réécrit par la commission afin que le distributeur soit obligé d’expliquer les refus des conditions générales de vente. Ce qui était en cause, c’était non le refus de la totalité des conditions générales de vente, ce qui constitue, en effet, une pratique abusive au regard du code de commerce, mais bien le refus de certaines clauses des conditions générales de vente. En évoquant les « demandes de dérogation », l’amendement n° 287 rectifié, dont je remercie les auteurs, lève toute ambiguïté sur ce point. L’avis est donc favorable.
Il est prévu, par l’amendement n° 288 rectifié, d’inclure dans la convention unique le volume annuel des produits. Il me semble qu’il n’est peut-être pas nécessaire de réglementer à l’excès les points qui doivent figurer dans la convention unique, la mention du plan d’affaires, comme du chiffre d’affaires prévisionnel, constituant déjà une avancée suffisante. L’avis est donc défavorable.
J’en termine avec l’amendement n° 728 du Gouvernement. En termes de sécurité juridique, il ne nous paraît pas souhaitable que la mise en cohérence des autres codes avec les modifications apportées n’intervienne pas corrélativement avec ces dernières. Cette phrase est, certes, un peu compliquée, mais je voulais être sûr que vous ne la compreniez pas et que vous acceptiez mon avis défavorable, monsieur le ministre. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement les amendements identiques nos 583 rectifié et 684 rectifié ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les amendements nos 583 rectifié et 684 rectifié visent à préciser que les conditions générales de vente sont opposables dès leur date d’entrée en vigueur. Or les conditions générales de vente, y compris le tarif du fournisseur, constituent le socle unique de la négociation commerciale et restent sujettes à négociation commerciale avec le distributeur. Une telle rédaction impliquerait la possibilité pour le fournisseur de remettre en cause le prix convenu entre les parties, même en cours d’année. Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable.
La précision contenue dans l’amendement n° 288 rectifié n’est pas nécessaire, dès lors que les références au plan d’affaires et au chiffre d’affaires prévisionnel suffisent à la mesure relative à l’encadrement des promotions en valeur et en volume, telle que l’envisage le Gouvernement.
L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 287 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Je ne crois pas que l’article 10 et les amendements déposés permettront de corriger les pratiques particulières de la grande distribution lors de la négociation commerciale.
Il faut quand même le savoir, les trois centrales d’achat qui restent en France ont la capacité de tordre le bras à tous les fournisseurs. Elles sont organisées de telle sorte que tous ceux qui passent sous leurs fourches caudines sont lessivés après chaque négociation.
Concernant l’amendement du Gouvernement, mais peut-être que je ne comprends pas bien les choses, il est totalement paradoxal : on nous explique sans cesse qu’il faut légiférer par ordonnance pour gagner du temps et, là, on nous propose d’allonger le délai de six à neuf mois !
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Voilà qu’apparaît un nouveau motif de refus de nos amendements : le soupçon d’inefficacité. Monsieur le rapporteur, vous faites preuve d’une imagination débordante. Pour autant, le mot « soupçon » n’est pas très bien choisi, même si je comprends que c’est un clin d’œil.
M. Michel Raison, rapporteur. C’était de l’humour !
M. Claude Bérit-Débat. J’en prends acte, mais je ne peux pas me contenter de cette réponse.
J’ai entendu les interrogations de M. Duplomb sur l’article 10, mais notre rôle est d’améliorer le texte qui nous est proposé. En l’occurrence, le fait de rappeler ce qu’est le droit français en matière commerciale me semble être une bonne chose pour remédier à un oubli fréquent.
Cela a été dit, les trois grandes centrales d’achat font n’importe quoi. Ce rappel me paraissait donc d’autant plus intéressant qu’il se dégageait une ligne commune de défense sur les produits de la Nouvelle-Aquitaine et ses vins emblématiques.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur. Monsieur Duplomb, je vous l’accorde, le Parlement a fait, année après année, des lois – au moins une dizaine – pour essayer de corriger les déséquilibres dans les relations entre la grande distribution et ses fournisseurs. Cela a commencé avec la loi Galland, qui était la plus dure. On ne peut donc pas en vouloir au gouvernement ou au parlement actuels de ne pas trouver la baguette magique pour que cela se passe parfaitement bien. Cet article tente d’améliorer la situation.
Quand le volet moral l’emporte sur l’aspect législatif, il nous est difficile de régler complètement le problème. Ce qu’il faut espérer, c’est que la morale s’améliore un peu au fil du temps. Une amélioration difficile à imaginer quand il ne reste plus que quatre centrales d’achat qui font régner une guerre des prix. À quoi bon d’ailleurs parler de partage de valeur puisqu’il n’y a plus rien à partager, la valeur disparaissant tout au long de la chaîne pour être détruite à la fin du processus ?
Je vous encourage à voter l’article 10, qui, à défaut de résoudre à 100 % le problème, contient quand même des avancées. Je pense, en particulier, aux mesures adoptées par la commission sur les conditions générales de vente.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Si nous demandons trois mois supplémentaires, c’est pour mettre en cohérence les dispositions d’autres codes avec les modifications apportées au code de commerce.
La problématique de la concentration des centrales d’achat, nous l’avons bien présente à l’esprit. Nous sommes conscients qu’elle a pu contribuer à considérablement accroître la pression sur le revenu des agriculteurs et, au-delà, sur le revenu des entreprises.
Nous le savons, il existe en France quatre grandes centrales d’achat. Dans certains pays d’Europe, elles ne sont que deux à faire la pluie et le beau temps. Il arrive même, dans un cas particulier, que l’une des deux centrales d’achat soit implantée dans un pays voisin. Cela bloque complètement la possibilité de travailler sur la question du revenu des producteurs.
Avec la contractualisation, la répartition de la valeur entre le producteur, le transformateur et le distributeur, nous essayons aussi de limiter l’impact de la grande distribution. C’est également ce que nous essayons de faire avec le SRP et l’encadrement des promotions.
Parce que nous sommes sensibles à cette problématique, nous avons cherché, avec le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, à aboutir à un texte qui permette de mieux contrôler le phénomène de regroupement à l’achat et de pouvoir le contrôler a posteriori. C’était une proposition du groupe UDI, Agir et Indépendants, car c’est un sujet sur lequel M. Charles de Courson a beaucoup travaillé. C’est une première étape dans ce que nous devons faire pour veiller à ce que la concentration des centrales d’achat ne vienne pas obérer notre ambition exprimée dans d’autres parties du texte, à savoir améliorer le revenu agricole.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Cet article n’est pas neutre, on en a l’expérience, comme vous-même, monsieur le ministre, qui avez géré en 2017 une situation de crise qui nous a amenés à un nivellement par le bas. Ça risque d’être la même chose avec le texte qui nous est proposé.
Vous nous parlez en permanence de « montée en gamme » et vous nous dites que l’objectif est d’améliorer le revenu des agriculteurs. Or – vous pouvez vérifier mon propos – que s’est-il passé en 2017 ? Qu’est-il arrivé à l’entreprise qui avait décidé – pour diverses raisons, peut-être parce qu’elle n’avait pas attendu le vote de la loi pour monter en gamme ou parce qu’elle avait cru le slogan du moment – de payer le produit plus cher que le prix du marché ? Une fois arrivée devant la grande distribution, elle n’a pu bénéficier d’aucune hausse. Au contraire ! La grande distribution lui a expliqué qu’elle pouvait baisser les prix, puisqu’elle avait déjà payé le lait ou la viande plus cher que ses concurrents !
Le grand danger auquel nous expose cette loi, c’est qu’on va donner des raisons supplémentaires de procéder à un nivellement par le bas.
Je vais soutenir notre rapporteur, notamment en votant l’amendement sur lequel il a donné un avis favorable. On ne prétend pas avoir inventé la poudre, on s’est contenté d’améliorer les choses !
M. Michel Raison, rapporteur. C’est bien ce que j’ai dit !
M. Daniel Gremillet. Tentons d’y croire, mais, à titre personnel, je ne suis pas vraiment certain que ce que nous sommes en train d’écrire dans la loi soit une réponse « durable » – pour reprendre un terme que vous avez souvent employé, monsieur le ministre. Je ne suis pas sûr que cela soit si durable que ça pour l’économie agricole !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 583 rectifié et 684 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 727, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… De modifier les dispositions du code de commerce relatives aux dates d’envoi des conditions générales de ventes et aux dates de signature de ces conventions ;
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet excellent amendement (Sourires.) vise à prévoir une adaptation des dispositions encadrant le calendrier des négociations commerciales.
La date limite de signature de la convention écrite annuelle ou pluriannuelle est actuellement fixée au 1er mars. Cette date, il faut le dire, ne fait pas l’unanimité au sein des organisations professionnelles représentatives des fournisseurs et des distributeurs. Ce sujet mérite donc une concertation plus poussée avec les acteurs économiques.
Nous souhaitons prévoir la possibilité de modifier le calendrier des négociations commerciales, dans le respect de la concertation qui sera menée auprès des professionnels pour que les conditions dans lesquelles se déroulent les négociations commerciales annuelles soient mieux adaptées aux réalités et contraintes des acteurs économiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?