M. Claude Bérit-Débat. On en fait parfois !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. … mais avec du législatif ! Je soutiens donc la position de la commission, même si je me fais battre, car c’est mon rôle de rappeler cela.
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Je comprends nos collègues qui parlent au nom de leur terroir, de leur région. Chacun est attaché à sa région viticole et entend l’interprofession… Il n’en reste pas moins que je ne comprends pas la philosophie de ces amendements.
Nous sommes ici pour défendre les producteurs, dans le cadre d’un rééquilibrage des prix et d’une contractualisation bien comprise. Si l’on commence à rallonger les délais, au bout de 60 jours, parce que l’interprofession le souhaite, alors on pourra aussi payer les viticulteurs au terme d’un an !
Quel est l’intérêt d’allonger fortement les délais de paiement parce que des cavistes et des négociants l’auraient demandé ? Je soutiens la position du Gouvernement, car je ne suis pas d’accord avec cette philosophie.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 230 rectifié, 311 rectifié bis, 369 rectifié bis et 416 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5, et l’amendement n° 252 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° 69, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 632-2-2 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 632-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 632-2-… – Les organisations interprofessionnelles reconnues organisent chaque année, pour chaque production agricole, une conférence de filière rassemblant les producteurs, les transformateurs et les distributeurs, y compris les organisations non membres des organisations interprofessionnelles. L’ensemble des syndicats agricoles sont conviés à y participer.
« Cette conférence fait état de l’évolution des coûts de production et des revenus agricoles pour chaque bassin et type de production ainsi que des perspectives d’évolution des marchés agricoles.
« Elle peut également déterminer un ou plusieurs indices publics de prix des produits agricoles ou alimentaires mentionnés à l’article L. 441-8 du code de commerce. »
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement fait écho à la proposition de loi déposée en 2015 par notre collègue député André Chassaigne.
Nous avions déjà fait le constat, à l’époque, de l’inefficacité des négociations ponctuelles intervenant en période de baisse importante des prix d’achat, le plus souvent sur l’initiative du ministre chargé de l’agriculture.
Aujourd’hui, le monde agricole partage très largement l’idée selon laquelle il est nécessaire de mettre en place de véritables outils d’intervention sur la fixation des prix d’achat des productions agricoles, avec l’objectif de couvrir a minima les coûts de production constatés et de garantir un revenu décent qui assure la pérennité des exploitations agricoles.
C’est pourquoi nous souhaitons, conformément à l’objectif affiché par le Gouvernement, revaloriser le rôle des interprofessions en leur donnant un véritable levier d’action pour agir en matière de prix dans les relations commerciales au sein de chaque filière. Cette forme de régulation interne aux interprofessions permettrait d’amortir les excès auxquels les fluctuations de prix sur les marchés mondiaux et les stratégies de la distribution donnent lieu régulièrement.
Le renforcement du cadre de la contractualisation prévu par le présent projet de loi ne peut s’exonérer de la nécessité d’une concertation globale et annuelle sur la situation des prix et des revenus des agriculteurs dans chaque filière.
Aussi, nous proposons la mise en place d’une conférence annuelle de filière, regroupant l’ensemble des acteurs des différentes filières : producteurs et organisations agricoles, transformateurs et distributeurs, en élargissant le champ de la représentativité syndicale agricole.
Cette conférence ferait état de l’évolution des coûts de production en fonction des bassins de production et des revenus des producteurs de chaque filière agricole, ainsi que des perspectives d’évolution des marchés agricoles, et pourrait également déterminer un ou plusieurs indices publics de prix des produits agricoles ou alimentaires.
Pour plus de force et d’efficacité, il pourrait aussi y avoir des conférences agricoles région par région, pour apporter des solutions via un dialogue interne.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Ce type de conférence annuelle existe déjà sous l’égide de FranceAgriMer, mais celle-ci n’est pas vouée à fixer des indices de prix, car ce n’en est pas le lieu.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La loi Sapin II prévoit déjà la réunion des filières. Nous avons souhaité, après les États généraux de l’alimentation, et après que les filières nous ont adressé leurs plans d’action, les réunir de façon régulière, au moins une fois par an, en application de cette loi. Nous le ferons à la rentrée, juste avant l’ouverture de la période des négociations commerciales.
Cet amendement étant satisfait, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 69.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5 bis
L’article L. 553-5 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les organisations de producteurs ou les associations d’organisations de producteurs reconnues qui concentrent l’offre et mettent sur le marché les produits de leurs membres, qu’il y ait ou non transfert de propriété des produits agricoles concernés, peuvent bénéficier des conditions de la dérogation prévue au paragraphe 1 bis de l’article 152 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil et procéder, à cette fin, à des échanges d’informations stratégiques entre producteurs d’une même organisation de producteurs ou d’une même association d’organisations de producteurs. »
M. le président. L’amendement n° 350 rectifié, présenté par MM. Bizet, Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam et MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Priou, Rapin, Revet, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Cet amendement vise à supprimer un article qui permet uniquement aux organisations de producteurs commerciales de procéder à des échanges d’informations stratégiques entre producteurs d’une même organisation de producteurs, une OP, voire d’une même association d’organisations de producteurs, une AOP.
Cela fait référence à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne rendu dans l’affaire du cartel des endiviers. Cet arrêt n’a pas véritablement tranché la question en ce sens, en réservant cette possibilité aux OP ou aux AOP commerciales, excluant de fait les OP ou les AOP non commerciales.
Cette possibilité étant d’application directe, sa traduction dans la loi s’avère donc inutile. L’amendement, en supprimant cet article, vise à lever toute ambiguïté. Ce sujet est quelque peu particulier, puisque l’autorité de la concurrence, au niveau européen et, plus encore, au niveau national, y est assez sensible. Or la politique de la concurrence est une compétence exclusive de l’Union. Je crois donc que cette clarification mérite d’être apportée, car ce n’est pas la peine d’en rajouter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. L’article que propose de supprimer Jean Bizet par le biais de son amendement n’a pas d’utilité particulière. De plus, dans le cas présent, le droit européen est applicable directement. La commission donne donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je m’en remets à la sagesse du Sénat. Je suis également d’avis que la portée de l’arrêt « endives », qui est intervenu antérieurement au changement de la réglementation européenne, est plus large que celle de l’article sur lequel nous sommes en train de travailler.
Je rejoins la position du président Jean Bizet : l’article 5 bis ne reprend pas les conclusions de cet arrêt. Il est vrai que ce sujet n’est pas simple, et nous devons prendre le temps de le traiter dans le cadre des lignes directrices que le Gouvernement établira pour accompagner l’avis de l’Autorité de la concurrence paru en mai dernier.
L’article 5 bis pourrait cependant faire croire, à tort, qu’aucun échange d’informations n’est possible au sein d’une OP qui ne négocie pas les contrats au nom de ses membres.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Je m’étonne de votre amendement, monsieur le président Bizet. En effet, des OP m’ont fait savoir qu’elles étaient favorables à la disposition que vous voulez supprimer.
Je n’arrive pas à comprendre ! Les OP sont demandeuses. J’ai notamment accompagné une OP importante dans le secteur du lait, qui avait souhaité justement pouvoir faire ce que prévoit l’article.
Je voterai contre cet amendement.
M. le président. En conséquence, l’article 5 bis est supprimé.
Article additionnel après l’article 5 bis
M. le président. L’amendement n° 420 rectifié, présenté par Mme Gatel, M. Le Nay, Mme Billon, M. Louault, Mme Joissains et MM. Janssens, Moga, Capo-Canellas et de Legge, est ainsi libellé :
Après l’article 5 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l’article L. 631-24-4 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, est complété par les mots : « , à l’exception d’une cession organisée entre producteurs d’une même organisation de producteurs ».
La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. La loi Sapin II a mis fin à tout procédé de cession à titre onéreux de référence laitière, afin d’éviter des dérives liées à la vente de gré à gré entre producteurs.
Si on en comprend bien l’esprit, il faut toutefois admettre que, par la même occasion, ce dispositif a mis fin à des systèmes vertueux, qui étaient coconstruits de manière responsable entre des producteurs et des laiteries.
Ainsi, depuis la fin des quotas et avant la loi Sapin II, certaines organisations regroupant des producteurs et des laiteries se sont mises en place pour exercer une gestion commune, ce qui a permis de satisfaire les producteurs tout en évitant la spéculation.
La laiterie connaît en effet les volumes à céder et les jeunes à installer, et elle peut, en commun avec les producteurs, définir des règles très transparentes de redistribution et des prix de cession économiquement viables, avec une grille d’évaluation permettant de définir l’ordre de priorité, et donc de redistribution des lots, et utilisant des critères comme l’âge de l’exploitant et le volume par associé.
Or ce système, qui a été mis en place depuis la fin des quotas laitiers et reconnu responsable et vertueux, est interdit, alors qu’il permet de conforter les exploitations, d’optimiser les moyens de production et d’éviter les spéculations.
Je ne doute pas, monsieur le rapporteur, dans la grande sagesse et le pragmatisme que chacun vous connaît, que vous apprécierez à sa juste valeur cette demande.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Ma chère collègue, je vous remercie pour vos compliments sur ma sagesse, mais vous savez qu’un sénateur sage, c’est quasiment un pléonasme ! (Sourires.) Nous sommes tous empreints d’une grande sagesse…
L’avis d’un rapporteur n’est pas forcément lié qu’à sa sagesse, il tient aussi à son appréciation du sujet. Or celui-ci me fait penser à la mise en place des quotas laitiers, quand on parlait de la commercialisation de ces quotas.
La loi Sapin II, qui n’est pas très ancienne, a prévu la non-commercialisation de ce type de contrat pour sept ans. Peut-être qu’on n’est pas obligé, chaque fois qu’on vote une loi, de détricoter celle que nos collègues ont faite l’année d’avant !
Ma sagesse me conduit à ne pas détricoter la loi qui a été votée ici et m’impose de vous donner, avec une grande tristesse, un avis défavorable. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, au regret de vous décevoir également, j’émettrai un avis défavorable. En effet, le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur les dispositions de la loi Sapin II, qui a été votée il y a peu de temps, en 2016. L’article 1er prévoit la répartition des quantités à livrer entre les producteurs qui sont membres de l’organisation ou les producteurs représentés par l’association et les modalités de cession des contrats, qui doivent être négociées avec l’acheteur.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Nous avons déjà discuté de ce sujet, qui n’est pas ancien. Un débat très important s’est tenu ici, à la demande notamment des producteurs.
Je vous rappelle un grand principe : le premier argent gagné est celui qu’on ne dépense pas inutilement. Dans le cas que nous évoquons, nous avons aujourd’hui les capacités, grâce au texte voté dans la loi Sapin II, de gérer au niveau d’un bassin, localement, les volumes qui ne sont plus produits par les agriculteurs qui partent à la retraite et par les producteurs qui sont en décroissance, en les attribuant à des jeunes sans dépenser un seul centime.
Le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui a pour objectif de redonner de la compétitivité et, surtout, du revenu aux agriculteurs. Évitons que ceux-ci ne soient obligés de débourser de l’argent pour pouvoir faire évoluer leur exploitation et satisfaire le besoin nécessaire de croissance.
Votre demande peut être complètement satisfaite, et peut même être organisée. Nous sommes en train de travailler sur le fait que les producteurs puissent, à travers leurs OP, prendre leur destin en main. Il n’y a aucune difficulté pour que, collectivement, ces producteurs puissent gérer l’ensemble des parts de marché dont ils disposent avec les entreprises.
N’oublions pas qu’aujourd’hui il y a non plus des quotas, mais des contrats, et que les discussions se font non plus avec l’administration, mais avec le monde économique, le marché.
Je partage complètement l’objectif de cet amendement, mais on peut déjà l’atteindre aujourd’hui en permettant que ce soit à titre gracieux pour les bénéficiaires. Encore une fois, c’est ainsi que l’on permettra à nos agriculteurs de mieux vivre dans nos territoires et d’avoir une amélioration importante de leurs revenus.
Pour conclure mon propos, regardons ce qui se passe autour de nous ! Les pays de l’Union européenne qui avaient opté pour un système de vente de contrats l’ont tous abandonné avant la France. S’ils l’ont fait, c’est qu’ils avaient de bonnes raisons ! Il serait tout de même dommageable pour la compétitivité de l’agriculture française que nos agriculteurs soient obligés de débourser de l’argent, alors que les autres producteurs ont fait le choix de la sagesse en gérant les volumes par rapport aux marchés.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Je suis du même avis : il n’est pas possible de prévoir en France la vente des contrats ou des anciens quotas. En effet, notre pays a toujours conduit une politique cohérente de répartition de l’agriculture sur la totalité des territoires. À partir du moment où l’on rendra commercialisables les volumes de production marchands, les producteurs des lieux où les conditions sont les plus favorables auront toujours plus de moyens pour acheter dans les lieux qui sont moins favorisés.
Cela signifie en clair qu’on organisera le déshabillage de secteurs entiers de notre territoire pour en favoriser d’autres ! Moi qui suis non seulement mutualiste et favorable à une coopération solidaire, mais aussi passionné par cette agriculture française qui a le mérite de couvrir la totalité des territoires français, je pense qu’on ne peut pas entrer dans cette logique qui reviendrait à vendre notre âme au diable !
M. Jean-François Husson. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. J’ai demandé à prendre la parole au moment où, dans la dernière phrase de son intervention, Daniel Gremillet a dit ce que je voulais dire.
Il est vrai que la France a fait le choix dans les années quatre-vingt, au moment où les quotas laitiers ont été institués, de ne pas les rendre marchands. Il serait dommage, maintenant que les quotas n’existent officiellement plus, de faire dépenser aux agriculteurs de l’argent, alors qu’ils n’en ont pas à foison…
Alors que nous sommes soucieux à propos du budget de la politique agricole commune qui sera institué dans le futur cadre financier pluriannuel, ce n’est pas la peine d’ajouter des charges supplémentaires aux agriculteurs. Surtout, et je le dis à Mme Gatel, ceux-ci seront satisfaits par le biais des laiteries au travers des OP, certes peut-être pas aussi rapidement, mais ils le seront indirectement. Ne les incitons pas à dépenser de l’argent ! J’ai eu des débats animés avec différentes OP sur ce sujet. Pour moi, l’affaire doit être classée en ce sens.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. J’entends très bien les propos de mes collègues, mais je déplore – permettez-moi de le dire – leurs regrets. Il ne faut pas se tromper sur mon propos. Comme beaucoup d’entre nous ici, je suis élue d’un territoire agricole, qui est le premier département laitier de France. Je porte ici la voix de producteurs de mon territoire qui ont une laiterie assez remarquable, car elle favorise l’installation de jeunes agriculteurs et pratique un prix du lait inégalé par ailleurs. Cela explique qu’il n’y ait jamais de mouvements d’agriculteurs devant cette laiterie, qui est vraiment écoresponsable et socialement responsable.
Il s’agit donc d’une demande locale. La pratique qui avait cours avait sa vertu. J’entends ce que disent mes collègues, mais je rappelle que mon amendement visait à limiter le dispositif à une cession organisée entre producteurs d’une même OP.
Je sais qu’il faut lutter contre la spéculation, mais en même temps je regrette que les défauts d’un grand nombre nuisent à la vertu de certains. Le ministre des affaires étrangères a bien rappelé hier au Président de la République qu’il arrivait aussi aux Bretons d’être extrêmement vertueux. C’est un exemple de vertu qui m’amène ici à défendre les producteurs de chez moi.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 420 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5 ter
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 524 rectifié ter, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « agricole », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des associations ou des organisations de producteurs, » ;
2° Au dixième alinéa, après le mot : « professionnelles », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des organisations de producteurs ou des associations d’organisations de producteurs, ».
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à rétablir l’article 5 ter, supprimé en commission par le rapporteur.
Cet article visait initialement à s’assurer de la représentation des OP et des AOP les plus représentatives au sein des interprofessions, conformément à une recommandation du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, dans son rapport sur les interprofessions de mars 2017. Introduit à l’Assemblée nationale, il avait été réécrit par le Gouvernement qui, de ce fait, lui avait apporté son soutien.
Il s’inscrivait dans la lignée de la loi d’avenir pour l’agriculture de 2014, qui instaure une présomption de représentativité des organismes professionnels de la production, lorsque des organisations syndicales d’exploitants agricoles représentant au moins 70 % des voix aux élections des chambres d’agriculture participent à l’organisation interprofessionnelle.
Cet article 5 ter a été supprimé par le rapporteur de la commission des affaires économiques au motif qu’il était satisfait par le droit en vigueur. Nous estimons toutefois qu’il est parfois nécessaire de préciser davantage la loi pour s’assurer que son esprit soit bien préservé.
De plus, si le droit en vigueur satisfait notre amendement, mais que, pour autant, son intégration au texte répond à une attente du monde agricole, nous ne voyons pas pourquoi nous nous priverions de son adoption.
M. le président. L’amendement n° 674 rectifié, présenté par MM. Guillaume, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « agricole », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des associations ou des organisations de producteurs » ;
2° Au dixième alinéa, après le mot : « professionnelles », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des associations ou des organisations de producteurs, ».
La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. L’Assemblée nationale avait inséré l’article 5 ter dans le projet de loi présenté par le ministre. La commission des affaires économiques du Sénat l’a supprimé.
Cet article permettait aux organisations de producteurs d’intégrer les organisations interprofessionnelles agricoles. J’entends que cette mesure est déjà comprise dans le droit en vigueur. Alors j’aimerais que l’on me dise où je peux la trouver, car – et je ne veux mettre personne en cause – nous avons examiné la question avec mes collègues et nous pensons que cette disposition ne figure pas dans le droit en vigueur. Elle mérite donc d’être précisée. On le voit bien, par exemple, avec Interfel ou Interbev, les associations interprofessionnelles pour les fruits et légumes, d’une part, et pour le bétail et les viandes, d’autre part, au sein desquelles les OP ont un rôle déterminant.
En outre, le dernier rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux sur les interprofessions recommande, « lorsqu’elles existent, [de] veiller à ce que les OP soient représentées de manière appropriée dans les organisations interprofessionnelles ».
J’ajouterai que la base légale des OP a été confortée depuis 2013 par le droit européen.
Enfin, compte tenu de la combinaison des dispositions de l’article 1er, qui inverse la responsabilité de proposer un contrat, et de l’article 5, qui étend les missions des organisations interprofessionnelles à la définition d’indicateurs, nous pensons qu’il est logique d’encourager la présence des OP au sein des interprofessions.
Il ne me semble donc pas évident que cela soit prévu dans le droit en vigueur. Je sais qu’il ne faut pas faire de loi bavarde, mais rétablir l’article 5 ter reviendrait à faire une loi non pas bavarde, mais efficace, une loi de sécurité mettant en avant les OP, comme – je le pense – nous le souhaitons tous.
M. le président. L’amendement n° 719, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « agricole », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des organisations de producteurs ou des associations d’organisations de producteurs, » ;
2° Au dixième alinéa, après le mot : « professionnelles », sont insérés les mots : « , y compris les groupements constitués par des organisations de producteurs ou des associations d’organisations de producteurs, ».
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’article 5 ter, tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale, qui prévoit que les OP et les AOP peuvent être membres des interprofessions.
Cette précision ne porte pas atteinte à la liberté d’association des interprofessions. Dans les filières qui ont intégré des OP au sein de leur interprofession – les fruits, les légumes frais et la viande bovine –, la mesure s’avère être plutôt positive et débouche même sur des accords gagnant-gagnant, avec la volonté de renforcer le regroupement de l’offre et l’objectif de développer une contractualisation équilibrée.
Grâce à cet article, les OP pourront participer aux réflexions des interprofessions sur les indicateurs. Je vous invite à voter cet amendement et j’émets donc un avis défavorable sur les deux autres amendements.
M. Didier Guillaume. Vous devriez demander le retrait plutôt que de donner un avis défavorable : nous sommes d’accord avec vous !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. On est d’accord, le droit n’est pas une science exacte, mais il lui arrive tout de même d’être précis parfois ! Là, on ne doit pas en faire tout à fait la même lecture…
Il est évident que, sur le fond, les OP et les AOP doivent être présentes au sein des interprofessions, puisqu’elles sont les maillons essentiels de la structuration de l’offre de production agricole.
Tout en partageant ce point de vue, pourquoi la commission a-t-elle supprimé cet article ? Pour un motif simple : l’article rappelait ce qui était déjà possible. Lisez les deux premières phrases de l’article L. 632-1 du code rural !
Monsieur le ministre, je suis surpris par votre position, car vous venez de nous dire que les groupements constitués sur leur initiative par les OP représentant la production agricole peuvent déjà relever de groupements d’OP et d’AOP. C’est d’ailleurs, comme vous l’avez rappelé, le cas pour la filière des fruits et légumes frais et celle de la viande bovine.
Oui, nous souhaitons que la loi soit mieux appliquée, mais répéter une disposition qui est déjà inscrite dans le texte, cela m’inquiète quelque peu.
Je vous remercie donc d’avoir fait la démonstration qu’il fallait bien supprimer cet article !