M. Fabien Gay. Madame la ministre, nous voilà, avec cet amendement tendant à la suppression de la transformation des trois EPIC, ou établissements publics à caractère industriel et commercial, en sociétés anonymes, à l’épisode 3 du débat sur le changement de statut.
Comme je vous le disais hier soir, une question me taraude. Un certain nombre d’entre nous vous ont interrogée sur les raisons réelles de cette modification. Je suis désolé, je n’ai pas compris pourquoi, politiquement, vous souhaitiez ce changement.
Le quatrième paquet ferroviaire adopté par l’Union européenne n’en fait pas une condition de l’ouverture à la concurrence, à laquelle, du reste, nous nous opposerons.
Les usagers ne le demandent pas davantage. Je le répète, ils demandent que les trains arrivent à l’heure et que des investissements soient réalisés en faveur des trains, notamment des trains du quotidien.
Ce n’est pas non plus une revendication des cheminots, très massivement opposés à cette modification.
Je ne connais qu’une personne qui y est favorable : c’est Guillaume Pepy, qui, déjà en 2014, lors de la précédente réforme, défendait la solution de la société anonyme. Il avait échoué, puisque la formule des trois EPIC l’avait emporté.
Madame la ministre, nous vous avons donné de nombreux exemples de transformations en société anonyme qui avaient été assorties d’une privatisation partielle. Nous avons notamment évoqué l’exemple d’Engie.
Vous n’avez pas répondu à notre interrogation.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Fabien Gay. Dès lors, permettez-nous de douter, surtout quand on connaît la politique libérale que vous menez depuis un an. Pis, vous libéralisez un certain nombre de secteurs du service public. Nous discuterons bientôt de la formation professionnelle ou de l’apprentissage, que vous allez livrer aux appétits du privé.
J’y insiste, pourquoi voulez-vous transformer les trois EPIC en sociétés anonymes, si ce n’est pour préparer la privatisation ?
Tant que nous n’y aurons pas obtenu de réponse, nous vous reposerons cette question.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 232.
M. Olivier Jacquin. Notre amendement présente une nuance par rapport au précédent.
Nous sommes favorables au rattachement de Gares & Connexions à SNCF Réseau.
Mme la ministre nous a expliqué qu’il fallait, en parfaite continuité avec le travail effectué en 2014, fluidifier le fonctionnement de l’entreprise SNCF. On ne peut pas dissocier totalement le train du rail qui le porte. Le même principe vaut pour les organisations.
En ce sens, nous proposons de revenir au statut d’EPIC. Nous pensons, comme nos amis du groupe CRCE, que la transformation des EPIC en sociétés anonymes n’apportera pas grand-chose de plus, à part, peut-être, juridiquement, un meilleur contrôle par la holding de tête sur les deux sociétés filiales. Mais, sur le fond, en termes de coût global pour nos concitoyens, notamment compte tenu du recours à l’emprunt, la solution proposée n’est pas très favorable.
Madame la ministre, au vu des décisions politiques prises depuis quelques mois et des intentions de vente d’autres entreprises publiques, nous présumons qu’une libéralisation pourrait intervenir après-demain, au travers d’une nouvelle loi.
De ce point de vue, le statut actuel d’EPIC nous semble bien meilleur pour préserver le domaine public et donner un nouvel élan à cette grande et belle entreprise de notre République.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 232.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 250 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’amendement n° 69.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, voici l’épisode 4 !
Je reviens toujours à la question qui me taraude, mais je vais aller plus loin.
Si la transformation en société anonyme a lieu, nous nous doutons bien que la question de la dette va suivre.
Vous nous annoncez que vous reprendrez celle-ci en partie, mais pas totalement. Toutefois, vous savez très bien que le nouveau statut de société anonyme va dégrader la note de la dette ! Nous en avons parlé hier soir. D’ailleurs, vous ne nous avez pas contredits sur ce point. La note passera de AA- à BB- et les taux d’intérêt, jusque-là gagés sur l’EPIC, donc sur l’État, augmenteront. Je laisse mon collègue Pascal Savoldelli, qui est un spécialiste des questions de dette, s’exprimer sur ce sujet.
Tôt ou tard, vous nous direz qu’il n’y a plus d’argent, que l’on ne peut plus investir… Les solutions, on les connaît : accoler la SNCF à une entreprise privée pour permettre l’investissement, comme cela a été fait avec GDF ; demander des gains de productivité aux cheminots et cheminotes et à l’ensemble des salariés de la SNCF ; réduire les coûts, c’est-à-dire licencier, ce qui sera d’autant plus facile que vous allez vous attaquer au statut des cheminots. Nous commençons déjà à voir ce scénario se dessiner, et nous pourrions bien le voir aboutir avant la fin de l’année 2022.
Est-ce bien cela que vous préparez ? Est-ce bien là votre volonté politique ? J’aimerais que vous répondiez à cette question précise. Or, madame la ministre, vous ne répondez à aucun des arguments que nous avons énumérés depuis le début des débats.
Après cet épisode 4, la série peut être encore longue ! Les bons films ont toujours plusieurs épisodes… Cependant, tout a une fin, et il faudra bien que vous répondiez à un moment ou à un autre.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, le sujet est sérieux ! Vous ne pouvez pas présenter notre action de manière aussi contraire à la réalité.
Nous sommes en train de reprendre 35 milliards d’euros de dette. C’est historique ! Voilà des années que les gouvernements successifs balayaient ce sujet sous le tapis. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.)
Nous sommes en train d’investir plus que cela n’a jamais été fait dans le transport ferroviaire. Nous avons prévu toutes les garanties dans le projet de loi pour préserver le caractère public de la SNCF.
Par conséquent, je vous pose la question : pourquoi faire circuler des contre-vérités de nature à inquiéter les cheminots au moment où le Gouvernement envoie un message de confiance dans le transport ferroviaire, dans la SNCF et aux cheminots ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’amendement n° 71.
M. Guillaume Gontard. Je ne sais à quel épisode nous en sommes, mais je constate, madame la ministre, que nous n’avons toujours pas obtenu de réponse, parce que vous avez répondu à côté.
En revanche, dans votre intervention, vous avez indiqué qu’il était historique que l’État reprenne 35 milliards d’euros de dette, et que celle-ci était le sujet numéro un.
Si cette question est si importante, si c’est le cœur de la réforme, pourquoi l’annonce de la reprise de la dette n’a-t-elle été faite que vendredi dernier ? Il y a de quoi étonner ! Les annonces n’ont pas manqué – sur le statut du cheminot, sur le passage au statut de société anonyme…. –, mais, de la reprise de la dette, vous n’avez parlé à aucun moment. Ce sujet n’est arrivé que dernièrement.
S’il s’agissait du sujet numéro un, je suis un peu surpris que le Premier ministre n’en ait fait l’annonce que vendredi dernier.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, vous parlez de contre-vérités, mais vous assénez un certain nombre d’arguments sans avancer aucune preuve.
Les arguments que nous mettons en avant depuis le début de nos débats sont sérieux et dépassent largement le cas de la France. Nous avons évoqué ce qui se passe en Allemagne, en Angleterre, en Italie, en Espagne, où l’on retrouve toujours le même scénario : au bout du bout, on privatise et on dégrade le service public, et la dette n’est qu’un prétexte.
Mme Laurence Cohen. Vous dites que l’on n’a jamais autant investi. Pour avoir longtemps siégé au STIF, le syndicat des transports d’Île-de-France, je sais que le sous-investissement a été une réalité.
Aujourd’hui, l’État se doit d’investir, non seulement dans le matériel roulant, mais aussi dans l’entretien des voies. Et les passagers connaissent une situation terriblement dégradée du fait du désengagement de l’État.
Madame la ministre, vous ne faites pas une bonne action : vous faites votre devoir ! Il vous appartient de revaloriser un service public, pour le bien commun. Cet effort doit porter non seulement sur les grandes lignes, mais aussi sur les lignes que l’on qualifie de « petites » – à titre personnel, je n’aime pas cette terminologie, et je crois savoir que vous non plus ; au moins, nous sommes d’accord sur un point. Il s’agit de desservir nos territoires.
Quand on porte une réforme, il faut l’assumer et aller jusqu’au bout de sa logique. Votre logique, c’est casser le service public et dégrader l’offre de transport. (M. François Patriat s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. On ne peut que se féliciter que le Gouvernement décide de prendre à son compte une partie de la dette, à hauteur de 35 milliards d’euros, en deux fois.
Comme l’a dit hier mon collègue Olivier Jacquin, la situation était la même quand nous nous sommes emparés du dossier de la SNCF, que vous connaissiez très bien, madame la ministre. Notre déficit budgétaire s’élevait à plus de 5 % du PIB. Il est aujourd’hui ramené, en partie grâce aux efforts du gouvernement précédent, à moins de 3 % de la richesse nationale, ce qui permet de reprendre de la dette sans dégrader les comptes de l’État.
Soyons clairs : nous souscrivons à cette reprise de dette, même s’il faudra que vous nous donniez quelques précisions sur ses conditions.
En effet, sans vouloir verser dans la polémique politicienne, j’ai à l’esprit un certain nombre d’exemples que les syndicats étrangers nous ont rapportés. Ainsi, même en Allemagne, la dette est repartie, alors qu’elle avait été complètement reprise par l’État.
Nous sommes d’accord pour que l’on règle ainsi une partie du problème. Cependant, je tenais, au nom du groupe socialiste et républicain, à rétablir cette vérité.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Madame la ministre, arrêtez de laisser croire que ce sont les sénatrices et les sénateurs de mon groupe et de ma famille politique qui inquiéteraient les cheminots ! Les plus grands experts de la SNCF, ce sont les cheminots eux-mêmes, et personne d’autre !
En outre, les cheminots connaissent votre stratégie, la stratégie des libéraux, dont vous faites partie.
Des expériences consistant à investir pour privatiser ensuite ont déjà été menées dans notre pays. Pensons aux autoroutes, ou encore à ADP.
Ne doutons ni de l’intelligence des cheminots ni de leurs capacités de réflexion. C’est leur connaissance des réalités qui les fait craindre pour l’avenir de leur entreprise.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Madame la ministre, voici l’épisode 5… (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Puisque nous ne parvenons pas à nous mettre d’accord, je vais prendre un exemple très concret.
Comme un certain nombre de mes collègues du groupe CRCE, je suis un usager quotidien du RER B, que je prends à la gare du Blanc-Mesnil. Éliane Assassi, la présidente de mon groupe, le prend à Drancy. Pierre Ouzoulias le prend au sud de Paris – il faut dire que c’est un privilégié… (Exclamations sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
Plus sérieusement, le RER B fonctionne très mal,…
M. Fabien Gay. … et cela ne date pas d’aujourd’hui. Tous les matins, quand je le prends, je m’interroge : la transformation des trois EPIC en sociétés anonymes va-t-elle, oui ou non, améliorer le quotidien des usagers du RER B ?
Sur les quais, personne n’en parle. En revanche, comme je l’ai constaté encore ce matin, un certain nombre d’usagers estiment qu’il faut investir. En effet, il faut investir 300 millions d’euros dans le matériel roulant, pour éviter notamment les pannes fréquentes de caténaires. Beaucoup évoquent le doublement du tunnel de Châtelet, qui, on le sait, coûte 3 milliards d’euros.
Il faut également investir pour la réalisation de la ceinture entre Mitry-Claye et l’aéroport Charles-de-Gaulle.
Dans la partie sud, il faudrait rehausser les ponts pour permettre la circulation de RER à double étage.
Bref, les besoins d’investissement sont importants.
Je vous repose la question, madame la ministre : la transformation des trois EPIC en sociétés anonymes va-t-elle régler notre problème ? Non ! Il y a donc autre chose derrière.
Vous pouvez toujours affirmer que nous jouons avec le feu. Je vous le répète une nouvelle fois, les cheminots et les cheminotes n’ont pas besoin de nous pour être inquiets. Certainement pas ! Avec un taux de participation de 60 %, 95 % des cheminots et cheminotes ont voté non à votre réforme. Vous voyez bien qu’il y a un problème.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je veux d’abord vous adresser un petit clin d’œil, chers collègues du groupe Les Républicains.
Au début de nos débats, nous avons échangé sur nos interprétations respectives des dispositions du règlement du Sénat relatives à la question préalable.
Ce soir, je constate que vous faites du scrutin public un usage particulier : il s’agit non pas de trancher telle ou telle question, mais de suppléer à un manque quantitatif de participation sur cette grande réforme que vous applaudissez souvent. Vous avez utilisé le scrutin public parce que vous n’étiez pas majoritaires dans cet hémicycle.
Venons-en au sujet, et essayons d’avancer sur la question de la dette, madame la ministre.
Vous qui connaissez très bien ce dossier, vous savez que celle-ci est composée d’emprunts obligataires privés et publics, aux taux d’intérêt fixes, allant de 0 à 4 %, pour 90 % d’entre eux. Par ailleurs, 15 milliards d’euros de cette dette ont été contractés en devises étrangères, 5 milliards d’euros en livres sterling et 2 milliards d’euros en francs suisses. Un tiers des emprunts a été contracté en obligations privées, quand deux tiers l’ont été en obligations publiques, pour un peu plus de 3 milliards d’euros par an
SNCF Réseau a eu recours au programme des NEU CP, emprunts à court terme remboursables entre 1 et 365 jours, souscrits auprès de la Banque de France, mais aussi des banques centrales d’autres nations. Les intérêts de ces prêts sont négatifs : moins 0,66 % pour SNCF Réseau ; moins 0,78 % pour SNCF Mobilités.
SNCF Réseau, en 2017, a emprunté 1,7 milliard d’euros à taux négatif pour son financement, permettant un engagement à hauteur de 9 milliards d’euros, et recourt aux emprunts obligataires que sont les greens bonds, emprunts écologiques publics dont le taux est inférieur aux taux du marché et à durée allongée.
Madame la ministre, nous voulons vous poser une question très simple, mais susceptible d’intéresser l’ensemble des parlementaires, par-delà les différences de sensibilités, car il s’agit tout de même des deniers de l’État.
Personne ici n’a critiqué votre décision de reprendre la dette, au niveau que vous avez annoncé. Au reste, il n’y a pas lieu de le faire. Cependant, comment seront faits les arbitrages ? Allez-vous rembourser la dette ancienne, aux taux d’intérêt élevés, ou privilégier la dette récente, contractée à un faible taux ? Allez-vous reprendre la dette en devises étrangères ?
La réponse est importante, car la somme en jeu est considérable. (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue. Vous avez dépassé votre temps de parole de trente secondes.
M. Pascal Savoldelli. Nous avons le droit d’obtenir une réponse à cette question !
M. le président. Mes chers collègues, il reste encore quelque 250 amendements à examiner ! Par conséquent, j’invite chacun à ne pas dépasser son temps de parole.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je ne reviendrai pas sur les propos de mon collègue Claude Bérit-Débat, qui a expliqué en quoi le remboursement de la dette était salutaire et pourquoi il pouvait intervenir maintenant.
Ma réflexion est complémentaire.
Il est essentiel de désendetter l’entreprise ferroviaire.
Aucun système ferroviaire au monde n’est rentable seul, tant le monopole ouvert qu’il constitue nécessite de capitaux et de concours publics.
Il serait extrêmement intéressant de reproduire l’exercice qui figure dans le rapport de Jean-Cyril Spinetta pour déterminer les conditions de la rentabilité dans l’hypothèse où chaque investissement donnerait lieu à un financement public à hauteur des deux tiers. On pourrait ensuite jouer sur le prix du billet des voyageurs pour tenter d’amortir la dette, dans une perspective éventuelle de retour à l’équilibre financier.
Tant qu’on n’aura pas trouvé un mécanisme clair et durable, il est fort possible que l’on ait à faire face à un nouvel endettement. Je l’ai dit hier dans le cadre de la discussion générale, le désendettement est plus que positif, mais il faut un mécanisme complémentaire qui discrimine positivement le ferroviaire au regard des modes de transport qui ne paient pas leur infrastructure. Je vous le rappelle, le prix d’un billet de train comprend le coût des rails. Mais quand on achète un billet de bus ou d’avion, on ne paie pas l’infrastructure.
M. Olivier Jacquin. Par ailleurs, pourquoi la reprise de la dette intervient-elle maintenant ? Madame la ministre, j’ai eu l’occasion de discuter avec vos prédécesseurs, MM. Cuvillier et Vidalies, qui ont respectivement mené la réforme de 2014 et les discussions sur le quatrième paquet ferroviaire, des raisons pour lesquelles la dette n’avait pas été remboursée plus tôt. Vous connaissez leur explication.
M. Olivier Jacquin. De nombreuses études ont été conduites sur le coût du financement de la dette, dans le cadre d’un désendettement de SNCF Réseau lié à un changement de statut, à savoir une transformation en société anonyme, afin de ramener l’entreprise à un endettement « soutenable ». Le surcoût de financement lié au changement de statut est évalué à 0,5 % environ.
Madame la ministre, nous avons besoin d’un document écrit répondant aux questions pertinentes qui se posent concernant la dette de la SNCF.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Olivier Jacquin. Il s’agit notamment de déterminer un protocole d’accord et un contrat de performance, et de justifier le report à 2020 et 2022, qui ne fera que creuser encore plus l’endettement actuel de SNCF Réseau.
M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.
M. Michel Dagbert. Madame la ministre, vous le savez, nous ne sommes pas partisans de l’immobilisme. Nous sommes donc favorables aux évolutions et aux réformes d’une structure aussi importante pour la mobilité de nos concitoyens.
Je ne reviendrai pas sur la question de la dette. En effet, comme l’a dit Ronan Dantec la nuit dernière, j’ai le sentiment que nous devons parler non pas de la dette de la SNCF, mais plutôt de la dette de chacune et chacun de nous. Ainsi, un certain nombre de choix industriels ont été faits, qu’il ne s’agit pas de remettre en cause aujourd’hui, tant les élus étaient nombreux dans l’ensemble des territoires à vouloir que ceux-ci soient desservis par le TGV. Force est de le constater, l’ensemble du réseau a souffert et s’est dégradé durant cette période.
Madame la ministre, je vous écoute avec beaucoup d’intérêt et d’attention. Pour autant, vous n’avez pas réussi, ni la nuit dernière ni ce jour, à me convaincre de la pertinence et de l’intérêt du passage en société anonyme. Je considère que l’ensemble de la réforme que vous portez pourrait aller à son terme, sans changement de statut de l’EPIC en SA, ce sujet constituant aujourd’hui un point de blocage.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote sur l’amendement n° 3 rectifié octies.
M. Ronan Dantec. J’avoue avoir été un peu surpris par la réponse apportée par Mme la ministre hier soir.
Édouard Philippe a déclaré le 4 avril dernier : « Le projet de loi constitutionnelle inscrira l’impératif de lutte contre le changement climatique à l’article 34, qui définit le domaine de la loi. »
À partir du moment où l’on considère que le climat est tellement essentiel qu’il doit figurer dans la Constitution, est-il cohérent de ne pas inscrire une telle notion dans un texte relatif à la SNCF, au vu de l’importance de l’enjeu sur la mobilité et les émissions de gaz à effet de serre ? Très honnêtement, je ne le crois pas.
Je vous ai entendu affirmer, madame la ministre, que cette notion figurait déjà dans le texte. J’ai relu ce dernier, et je n’y ai trouvé aucune référence. Certes, une demande de rapport sur le climat figurait à la fin du projet de loi transmis par l’Assemblée nationale. Toutefois, dans la mesure où le Sénat est allergique aux rapports, l’article en question a été supprimé. À ma connaissance – mais j’ai pu mal lire –, il n’y a strictement aucune référence au climat dans ce texte, bien qu’il s’agisse d’un enjeu absolument essentiel, dont la SNCF est un acteur central.
Les signataires des amendements portant sur cette question siègent sur presque toutes les travées de cet hémicycle, l’amendement n° 3 rectifié octies, dont les premiers signataires sont MM. Malhuret et Fouché, étant sans doute le plus consensuel.
Je le rappelle, la définition du développement durable, qui remonte au rapport Brundtland de 1987, n’est pas celle du climat. Le premier accord sur le climat, le protocole de Kyoto, est intervenu dix ans plus tard. Quant à la première convention relative aux changements climatiques, elle remonte à 1992.
Il s’agit non pas de rendre la loi bavarde, mais de prendre en compte un enjeu majeur. Dans le cadre de cette notion, la SNCF devra énoncer, en tant que grand service public, les modalités de sa participation à la lutte contre le dérèglement climatique.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.
M. Frédéric Marchand. Cet amendement et les deux suivants tombent bien, puisque démarre aujourd’hui la Semaine européenne du développement durable. À l’intérieur du texte, les mots ont leur importance. Nul dans cette enceinte ne niera l’importance des questions de développement durable, de transition écologique et de réchauffement climatique.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons en faveur du présent amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Mon groupe soutient l’argumentation de notre collègue Ronan Dantec. Nous sommes face à trois amendements qui se recoupent en partie. Sans doute serait-il souhaitable d’adopter celui que l’on pourrait qualifier de plus petit dénominateur commun.
Franchement, madame la ministre, le rejet de cet amendement n’irait pas dans le sens de l’accord de Paris sur le climat. Je le rappelle, 88 % des marchandises sont transportées par la route, et seulement 10 % par le train et 2 % par voie fluviale.
J’ai fait un petit calcul sur la pollution. Le train, c’est 12 kilos équivalents CO2 – c’est le potentiel de réchauffement global d’un gaz à effet de serre –, l’autocar, 58, la voiture, 171.
Dans notre hémicycle, les élus sont nombreux à demander que le climat soit pris en compte. Le rôle du rapporteur, me semble-t-il, est de rechercher un consensus, dans la mesure où, sur le sujet des émissions de gaz à effet de serre, nous sommes tous d’accord.
Enfin, mes chers collègues, il y a là également un enjeu de santé publique. Une grande ambition pour un projet ferroviaire ne peut pas aller à l’encontre des enjeux dans ce domaine.
Acceptez donc cet amendement, en faisant preuve de responsabilité et de raison.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. La part modale du ferroviaire dans le transport de marchandises étant passé de 10,6 % à 9,6 %, nous demandons une véritable stratégie de promotion des modes de transport verts.
Il s’agit simplement d’insérer dans le texte les mots « lutte contre le réchauffement climatique ». Je suis d’ailleurs surpris que la commission et le Gouvernement aient émis un avis défavorable sur cet amendement, puisque nous y avons travaillé en liaison avec le cabinet de Mme la ministre.
En outre, il est cosigné par des membres des groupes Les Républicains, du RDSE, Union centriste, La République en marche et Les Indépendants – République et Territoires, soit par une très grande majorité des élus de notre assemblée.
Je maintiens donc cet amendement, pour lequel j’ai demandé un scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Si le groupe socialiste et républicain n’a pas consigné cet amendement, il le votera, car il semble aller dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. La nécessité d’introduire une notion climatique dans ce texte est évidente.
Vous appelez à la discussion et au rassemblement ; or tel est à présent le cas ! La SNCF doit évoluer. Je rappelle que l’Allemagne achète 14 locomotives à hydrogène à l’entreprise Alstom. La question climatique est donc au cœur du développement de l’entreprise.
Je ne vois pas comment nous pourrions rejeter cet amendement.