M. André Gattolin, vice-président de la commission des affaires européennes. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jérôme Bascher. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, monsieur le vice-président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, ce projet de loi vise à ratifier l’ordonnance adoptée le 9 août 2017 pour transposer en droit français la directive du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite « DSP 2 », en urgence – deux ans et demi montrent une urgence tout à fait relative.
Les directives DSP 1 et DSP 2 visent à supprimer le monopole bancaire dans les services de paiement, la seconde tenant compte des évolutions technologiques intervenues depuis 2007.
Permettez-moi une première remarque : pour que tous profitent du progrès technologique, encore faut-il être parfaitement connecté en 4G ou en 5G et en très haut débit.
Or, comme l’a fait remarquer mardi dernier, lors des questions d’actualité au Gouvernement, notre collègue le président Patrick Chaize, sur ce point, le Gouvernement semble avoir beaucoup reculé, notamment pour les populations les plus isolées. Je ne parle pas pour mon département, qui sera le premier fibré d’Europe à la fin de l’année 2019 – Édouard Courtial et moi-même avons travaillé en ce sens.
Ma seconde remarque porte sur le temps qu’il faut pour légiférer sur les sujets technologiques.
On voit bien que la loi issue des directives européennes, depuis la négociation de celles-ci jusqu’à l’examen parlementaire des textes de transposition – pensez au temps que nous avons passé, mes chers collègues, à transposer, jusqu’à très tard, hier soir, la directive européenne relative à la protection des données personnelles –, est beaucoup trop lente par rapport aux évolutions technologiques. Il est donc important de trouver des moyens rapides de légiférer sur de tels sujets, quitte à passer, parfois, par la voie réglementaire, qui, je le dis clairement, peut paraître plus adaptée.
J’en reviens au texte, qui doit faire avancer nos fintech et protéger nos banques, mais avant tout nos concitoyens. À ce sujet, permettez-moi de dire que, si c’est bien de penser aux fintech, qui incarnent l’avenir, la nouvelle économie du nouveau monde, je crois aussi, pour ce qui me concerne, aux banques, aux concitoyens et aux consommateurs de l’ancien monde. Et je rappelle que, dans la querelle des anciens et des modernes, ce sont les anciens qui, in fine, ont gagné… (Sourires.)
L’essor des nouvelles technologies a favorisé l’émergence de nouveaux acteurs, tant pour l’initiation de paiement que pour l’information sur les comptes. Ces nouveaux acteurs permettent aux utilisateurs d’accéder aux données de l’ensemble de leurs comptes et produits bancaires et, surtout, d’initier des ordres de paiement, y compris sur les moyens d’épargne. Cela permet aussi aux fintech, comme l’ont dit très bien précédemment un certain nombre de mes collègues, d’avoir accès à nos données. L’évolution leur est donc également favorable.
L’Union européenne a encadré ces nouvelles pratiques dès 2007, en permettant aux nouveaux acteurs de trouver leur place aux côtés des acteurs bancaires traditionnels, en particulier en allégeant les contraintes qui pèsent sur eux, les nouveaux services n’impliquant pas de détenir de fonds. Cependant, comme il s’agit d’argent, il faut bien qu’il y ait, à un moment, un tiers de confiance.
La directive « DSP 2 » actualise aussi la directive dite « monnaie électronique » de 2009, qui répondait à la même logique.
Toutefois, s’il faut stimuler la concurrence, je rappelle qu’il faut protéger le consommateur, notamment des risques d’escroquerie. La commission des finances a elle aussi insisté sur ce point. Le nombre d’utilisateurs de ces nouveaux services a connu une croissance rapide, voire exponentielle – c’est la norme en matière de nouvelles technologies ! Comme l’a rappelé notre rapporteur, 4 millions de consommateurs ont déjà eu recours à un agrégateur de comptes et 2,5 millions ont déjà fait appel à un initiateur de paiement. Ce n’est pas rien ! Ce n’est plus un sujet médiocre aujourd’hui. C’est de nos fintech, de notre système bancaire, mais avant tout de l’argent des Français qu’il s’agit.
Ainsi, la directive permet de mettre en place des mesures de proportionnalité pour les acteurs réalisant de petits volumes de transaction et, en ce sens, de diminuer, de 150 à 50 euros, les seuils de franchise qui s’appliquent aux consommateurs subissant un préjudice.
Concernant la protection des consommateurs, elle offre la possibilité de mettre en œuvre un certain nombre de mesures de sauvegarde, que nous voulons renforcer.
Je pense évidemment à la possibilité, pour les autorités de supervision, de faire appel à une autre autorité de supervision de l’Union européenne, mais aussi de suspendre l’agrément de fintech qui, dans un autre pays, agiraient dans des conditions peu conformes à l’intérêt des consommateurs. C’est le minimum !
La directive que nous transposons élève, en outre, les standards de sécurité pour les transactions.
Une obligation d’authentification forte pour les paiements en ligne est ainsi prévue, par exemple en étendant la demande d’indication d’un code reçu par SMS pour valider un paiement en ligne. Cependant, il ne faut pas se mentir : cette solution est un minimum, qui ne répond pas aux risques d’escroquerie, de vol de téléphone portable, voire d’enlèvement. Ceux qui lisent la presse internationale auront en effet appris qu’aujourd’hui, en Ukraine notamment, des rançons ont été exigées en bitcoins à partir du téléphone des personnes enlevées par des procédés extrêmement violents.
Les agrégateurs de comptes et initiateurs de paiement ont l’obligation de communiquer avec le gestionnaire de compte par le biais d’un canal de communication sécurisé et standardisé, afin de préserver la confidentialité des données bancaires et d’obtenir un agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR.
Afin de faire face à d’éventuelles fraudes, une assurance doit être également souscrite par le prestataire, permettant de rembourser la banque si la responsabilité du prestataire est engagée.
Un article a été introduit par nos collègues de l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, afin de permettre et d’encadrer les opérations de « cashback » – pour ma part, j’appelle cela « retrait d’argent liquide », mais peut-être dois-je progresser dans ma maîtrise de la langue française… Il s’agit de la possibilité pour un consommateur venant acheter un bien d’obtenir des espèces au moment où il fait son achat, par exemple dans un tabac ou une station-service.
Cette possibilité vise notamment à pallier la disparition des agences bancaires et des distributeurs dans les zones rurales. De fait, madame la secrétaire d’État, l’éloignement permanent, les fermetures de postes ou de services de l’État dans le monde rural l’y rendent très utile !
En revanche, je m’inquiète de la possibilité d’ouvrir cette possibilité en ville. On ne voit pas l’intérêt du cashback à Paris, Marseille ou Lyon, pour citer les grandes métropoles dont vous êtes friands, où l’on trouve des distributeurs à tous les coins de rue ! Je crains surtout que cela ne donne lieu à du blanchiment d’argent ou à la circulation de fausse monnaie. Je le dis très clairement.
Se pose aussi, de manière importante, la question de la sécurité des commerçants qui vont proposer le cashback. Madame la secrétaire d’État, vous le savez bien : aujourd’hui, en France, on ne braque plus les banques, qui ne détiennent plus d’argent liquide. On braque les stations-service ou les bars-tabac ! Telle est la réalité. Il ne faudrait pas inciter au développement de la délinquance ni la faire arriver dans la ruralité, qui n’a pas besoin de cela.
Certes, vous allez, par voie réglementaire, limiter le montant maximal pouvant être distribué. C’est souhaitable. Ce service reposera, en outre, sur la base du volontariat et ne pourra évidemment pas être imposé à un commerçant.
Enfin, l’Assemblée nationale a adopté, toujours sur proposition du Gouvernement – je tiens à le souligner –, un amendement tendant à ce qu’un décret définisse des modalités transitoires de communication entre les prestataires de services de paiement et les gestionnaires de compte, dans l’attente de l’entrée en vigueur, en septembre 2019, des normes techniques de réglementation définissant les modalités de communication standardisée au niveau européen. On voit donc que le Gouvernement incite parfois les assemblées à prendre des mesures transitoires, lorsque l’Union européenne les a oubliées. Tel était le sens de l’amendement de M. le rapporteur, adopté à l’unanimité des membres de la commission des finances : protéger le consommateur, dans l’attente d’une décision de l’Union européenne.
Vous le voyez, madame la secrétaire d’État, sur ce point, la logique du Sénat ne diffère pas de celle de l’Assemblée nationale ni même de celle du Gouvernement. Je ne comprends donc pas votre revirement sur l’amendement de M. le rapporteur.
Enfin, pour sécuriser la relation entre le consommateur, la banque et le tiers agrégateur, la directive prévoit une authentification obligatoire de l’agrégateur ou de l’initiateur de paiement.
Elle prévoit également que l’accès au compte de paiement devra se faire à travers une interface plus sécurisée que l’interface client, à savoir le recours à la technologie dite « de l’API », ou « interface de programmation applicative », pour être parfaitement technique. Cela dit, comme l’a rappelé mon collègue il y a quelques instants, la loi, c’est de la technique, mais aussi de la politique…
La Commission européenne a pris beaucoup de retard dans l’élaboration de la norme technique réglementaire devant préciser le fonctionnement de ces API. La directive prévoit une entrée en vigueur de ces dernières à l’été 2019 seulement.
C’est la raison pour laquelle l’Assemblée nationale a souhaité que les dispositifs relatifs à la sécurité entrent en vigueur le plus tôt possible, afin de sécuriser ces données. D’ailleurs, tel est exactement le sens de l’amendement de M. le rapporteur général.
Dans l’attente d’une solution européenne, la commission des finances a souhaité garantir la possibilité, pour l’utilisateur, d’obtenir un remboursement auprès du prestataire tiers en cas de fraude, via la mise en place d’une obligation d’assurance complémentaire pour les comptes non couverts par la directive.
La directive ne concerne, en effet, que les comptes de paiement. Or les nouveaux acteurs reconnus par la directive permettent aujourd’hui aux utilisateurs de passer des ordres et d’agréger les données concernant l’ensemble de leurs comptes et produits d’épargne. Les sommes en jeu sont considérables, car les personnes qui possèdent plusieurs comptes en banque ont généralement aussi un peu, voire beaucoup d’épargne. Cela ne concernera pas les personnes modestes, qui ont déjà de grandes difficultés à ouvrir un compte en banque. Lorsqu’il y a beaucoup d’argent, il est nécessaire d’être prudent. Il serait dommage que le progrès mène à la ruine.
Dans ce contexte, pour la commission, s’il n’apparaît pas souhaitable d’étendre les dispositions de la directive à l’ensemble des comptes et produits d’épargne, ce chantier devant être mené au niveau européen, la question de la responsabilité en cas de fraude ne peut être laissée longtemps sans réponse.
Notre groupe soutient cette initiative de M. le rapporteur général et de la commission des finances, qui a préparé cette transposition avec beaucoup de sérieux, en écoutant toutes les parties, madame la secrétaire d’État, et pas seulement celles que l’on veut bien entendre. Je tiens à le souligner, en tant que sénateur récemment élu.
Pour le reste, le texte ne pose pas de difficultés.
Le groupe Les Républicains votera ce projet de loi de ratification, tel qu’il a été modifié par notre commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour le groupe La République En Marche.
M. François Patriat. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, monsieur le vice-président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, je reviendrai sur l’ensemble des arguments que j’ai entendus ce matin, mais je tiens à dire dès à présent que, pour notre part, nous soutenons, bien entendu, ce texte.
Nous examinons aujourd’hui le projet de loi de ratification d’une ordonnance d’apparence technique, laquelle transpose la directive dite « DSP 2 », relative aux services de paiement dans le marché intérieur.
Ce texte est nécessaire, en premier lieu, parce qu’il régule une activité encore mal encadrée et qui correspond à une demande sociale.
Le premier apport de la directive est, en effet, de reconnaître de nouveaux acteurs qui interviennent entre les banques et leurs clients, qui rendent de nouveaux services et qui facilitent les paiements. Il s’agit des agrégateurs de comptes, utiles pour les particuliers que nous sommes comme pour les entreprises, auxquels ils offrent un accès pédagogique à leurs informations financières. Le client de ces services a ainsi une vision consolidée de ses comptes sur une seule interface.
Il s’agit aussi des initiateurs de paiement, dont l’activité d’intermédiaire doit permettre de fluidifier la réalisation des virements. Ce service est très développé en Allemagne, où le paiement en ligne par carte est moins naturel.
En reconnaissant ces activités, madame la secrétaire d’État, la directive renforce les garanties pour les usagers : elle impose une couverture par une assurance de responsabilité civile professionnelle, mais elle durcit aussi les conditions d’agrément et de supervision des établissements de paiement. Les pouvoirs des superviseurs, comme l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, en France, sont élargis.
La directive renforce également la supervision transfrontalière des établissements de paiement : elle prévoit un mécanisme d’échange d’informations entre les autorités de supervision et accroît les échanges dans le cadre de la surveillance des établissements de paiement. Elle permet ainsi de lutter contre le risque de forum shopping.
Enfin, elle élève les standards de sécurité pour les transactions, notamment en généralisant l’authentification forte, système qui combine plusieurs facteurs d’authentification, pour les transactions en ligne.
Au total, la directive accompagne une évolution sociale et technologique, réglemente un secteur qui se développe et harmonise la réglementation.
Nous pouvons nous enorgueillir que la France fasse le choix d’une transposition rapide pour se positionner en leader sur le marché des agrégateurs.
Au reste, cette transposition rapide se fait sans surtransposition, comme l’ont noté tant la commission des affaires européennes que la commission des finances.
Dans une économie de services où l’activité est facilement délocalisable, l’amendement de la commission des finances sur l’utilisation fraudeuse des données non couvertes par la directive montre le besoin d’une couverture uniforme par des règles européennes.
Je salue la disposition, ajoutée dans le projet de loi par un amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale, qui prévoit l’accompagnement du cashback.
Ce service, qui existe, par exemple, au Canada, en Allemagne ou au Royaume-Uni, permet aux commerçants de rendre du liquide aux clients qui ont payé par carte.
Pour les commerçants, le cashback présente un double avantage : c’est un nouveau service à offrir, ainsi qu’un moyen de gérer plus efficacement leurs encours en caisse. C’est aussi un avantage pour les consommateurs, notamment pour accéder aux espèces dans les lieux trop éloignés des guichets. On sait que le mouvement de suppression des guichets physiques par les banques dans nos territoires est réel !
Certains évoqueront la transposition d’un texte « technique ». À la vérité, il s’agit de ceux qui accusent toujours l’Europe d’être une structure bureaucratique sans âme pour mieux la décrédibiliser… Ils auraient dit la même chose de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, en 1951, alors qu’il s’agissait des conditions de la paix en Europe, une question rien de moins que politique.
Mme Éliane Assassi. Comparaison n’est pas raison !
M. François Patriat. Mon avis est que cette directive est politique.
Elle est politique, parce qu’elle complète l’édifice qu’est le marché intérieur.
Elle est politique, parce qu’elle donne des garanties aux citoyens européens.
Elle est politique, parce qu’elle harmonise des réglementations dans un secteur en plein essor.
Soyons réalistes : beaucoup des critiques adressées à l’Union européenne, sur la concurrence fiscale par exemple, viennent d’un manque d’harmonisation des réglementations au niveau européen qui est le fait non de l’Union européenne en tant qu’entité abstraite, mais des États membres. La taxation des GAFA en est un exemple concret. À cet égard, l’initiative prise par M. le ministre Bruno Le Maire est particulièrement importante.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes parfois un peu seuls dans cette assemblée, même si, aujourd’hui, nous le serons un peu moins. Quoi qu’il en soit, nous sommes fiers d’appartenir à un mouvement politique qui n’accuse pas l’Europe de tous les maux et qui demande plus d’Europe.
Nous soutiendrons le Gouvernement sur ce texte. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du parlement européen et du conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur
Article 1er
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur est ratifiée.
Mme la présidente. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.
Article 1er bis
(Non modifié)
Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code monétaire et financier est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Fourniture d’espèces dans le cadre d’une opération de paiement
« Art. L. 112-14. – I. – Les commerçants mentionnés à l’article L. 121-1 du code de commerce peuvent fournir des espèces à l’utilisateur de services de paiement dans le cadre d’une opération de paiement pour l’achat de biens ou de services.
« II. – Ce service ne peut être fourni qu’à la demande de l’utilisateur de services de paiement agissant à des fins non professionnelles formulée juste avant l’exécution d’une opération de paiement pour l’achat de biens ou de services et dans des conditions conformes à l’article L. 112-1 du code de la consommation.
« Les paiements par chèque ou réalisés par le biais de titres-papiers, d’instruments spéciaux de paiement au sens de l’article L. 521-3-2 du présent code ou de titres spéciaux de paiement dématérialisés au sens de l’article L. 525-4 ne peuvent donner lieu à fourniture d’espèces.
« III. – Afin d’assurer la qualité de la circulation fiduciaire et de limiter les risques de blanchiment et de financement du terrorisme, un décret précise les modalités de fourniture du service mentionné au I. Il détermine :
« 1° Le montant minimal de l’opération de paiement d’achat de biens ou de services dans le cadre de laquelle des espèces sont fournies ;
« 2° Le montant maximal en numéraire pouvant être décaissé dans ce cadre.
« IV. – La Banque de France peut, en cas de menace pour la qualité de la circulation fiduciaire ou d’événement exceptionnel ayant pour conséquence d’entraver de manière significative l’approvisionnement de billets en euros, et après avoir informé le ministre chargé de l’économie, autoriser temporairement un plafond supérieur ou inférieur à celui mentionné au 2° du III et ajuster la liste des instruments de paiement figurant au second alinéa du II. Le ministre chargé de l’économie peut à tout moment mettre fin à ce régime temporaire. » – (Adopté.)
Article 1er ter A (nouveau)
Après l’article L. 522-7-1 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 522-7-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 522-7-2. – I. – Nonobstant toute clause contraire, les prestataires de services de paiement qui fournissent le service mentionné au 7° ou au 8° du II de l’article L. 314-1 et qui, à la demande de l’utilisateur, initient un ordre ou lui permettent d’accéder aux données concernant ses comptes sur livret, ses comptes à terme, ses comptes-titres, ses comptes sur lesquels sont inscrits des titres, avoirs ou dépôts au titre des produits d’épargne mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre II, ses crédits mentionnés au titre Ier du livre III du code de la consommation ou ses bons, contrats de capitalisation ou placements de même nature souscrits auprès d’entreprises d’assurance peuvent voir leur responsabilité engagée à l’égard de l’utilisateur en cas d’opération non autorisée, d’accès non autorisé ou frauduleux à ces données ou d’utilisation non autorisée ou frauduleuse de ces données qui leur est imputable.
« II. – Les établissements de paiement, les établissements de monnaie électronique et les prestataires de services d’information sur les comptes mentionnés au I doivent disposer d’une assurance de responsabilité civile professionnelle ou d’une autre garantie comparable les couvrant contre l’engagement de leur responsabilité et être en mesure de justifier à tout moment de leur situation au regard de cette obligation.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de cette obligation, les critères permettant de déterminer le montant minimal de l’assurance de responsabilité civile professionnelle ainsi que les délais dans lesquels l’indemnisation doit intervenir.
« III. – Les prestataires et établissements mentionnés au II doivent être immatriculés sur un registre unique, qui est librement accessible au public et tenu par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’immatriculation sur ce registre et détermine les modalités de la tenue de ce dernier ainsi que les informations qui doivent être rendues publiques. »
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Le Gouvernement a déposé un amendement de suppression de cet article 1er ter A que la commission des finances a adopté à l’unanimité, comme cela a été rappelé au cours de la discussion générale.
Ce nouvel article introduit une obligation d’assurance pour les initiateurs de paiement et les agrégateurs agissant sur les comptes autres que de paiement et donc non couverts par la DSP 2.
Cet amendement vise à protéger le consommateur. Nous rejoignons bien évidemment la préoccupation de la commission des finances, tout en partageant le souhait de soutenir le développement des fintech.
Le dépôt de cet amendement de suppression reflète la perplexité et les nombreuses questions qu’a soulevées l’examen de cette proposition de nouvel article.
Nous n’avons pas eu le temps d’évaluer l’impact de cette disposition assez innovante, voire très innovante, car elle impose une obligation d’assurance sur un service non réglementé. Il s’agit d’un dispositif encore inédit, à notre connaissance.
Surtout, le caractère imparfait de la protection proposée nous a gênés : certains agrégateurs ne seraient pas couverts, en particulier ceux qui décideraient de ne pas accéder aux comptes de paiement et donc de ne pas demander d’agrément. Ils pourraient alors proposer une agrégation sur tous les autres comptes, sans obligation d’assurance.
De même, les acteurs qui choisiraient de se faire agréer dans un autre État membre que la France sur les comptes de paiement pourraient, assez paradoxalement, nous semble-t-il, agréger des comptes d’épargne en France sans obligation d’assurance.
Techniquement, la sécurisation des comptes de paiement est moindre que dans la solution retenue par le Gouvernement de recourir à la protection forte d’une API.
Tous ces éléments nous ont rendus perplexes. Nous reconnaissons la complexité du sujet et nous n’avons pu, en quelques jours, trouver de solution.
Par ailleurs, et comme certains d’entre vous l’ont souligné, le Gouvernement est réticent à tout élément de surtransposition qui créerait un décalage avec nos partenaires européens. Or il s’agit bien ici d’une surtransposition.
La proposition du Gouvernement vise simplement à accélérer la mise en place des API, normes définies techniquement dans un cadre européen. À l’inverse, la solution technique retenue par votre commission des finances n’a pas été coordonnée au niveau européen.
Nous souhaitons engager une mission de réflexion permettant d’associer les acteurs de façon très précise et technique afin de formuler des propositions à porter auprès de la Commission européenne. Cette mission pourra, le cas échéant, recommander toute mesure transitoire pertinente à adopter au niveau national.
J’insiste sur la complexité du sujet, sur la nécessité d’analyser les impacts industriels que pourraient engendrer l’intervention de ces nouveaux acteurs et le développement de nouveaux modèles économiques dans les segments de l’épargne et sur le fait que cet effort de sécurisation va au-delà du secteur bancaire – les compagnies d’assurance et les gestionnaires d’actifs sont également susceptibles d’être concernés par un dispositif de sécurisation plus large que celui des seuls comptes de paiement.
Il importe donc de mener une mission à la fois technique et industrielle précise.
Cela étant, j’entends les arguments qui viennent d’être présentés. Encore une fois, je souhaitais faire part de la perplexité et des interrogations que ce nouvel article a suscitées.
Je comprends que vous considériez que le temps de la négociation européenne n’est pas compatible avec celui, plus rapide, de l’avancée des usages qu’offre la technologie.
À défaut de partager votre enthousiasme pour la solution technique suggérée, je rejoins votre souci de sécurisation des consommateurs. Aussi, à ce stade de la procédure parlementaire, le Gouvernement retire son amendement de suppression.
M. Jérôme Bascher. Très bien !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je remercie Mme la secrétaire d’État d’avoir retiré son amendement. Je partage quasiment tout ce qui vient d’être dit. Encore une fois, la solution proposée est perfectible.
D’après les informations dont nous disposons, la commission mixte paritaire ne devrait se tenir qu’en juin, ce qui nous laisse le temps de travailler à l’amélioration du dispositif que nous avons d’ores et déjà analysé et qui, selon nous, fonctionne.
Les acteurs français ne seront pas les seuls concernés, madame la secrétaire d’État. Une disposition d’ordre public peut s’appliquer à tous les prestataires qui interviennent en France. Nous nous en sommes assurés auprès de la Commission.
L’obligation d’assurance peut s’appliquer y compris à des activités non réglementées. Le code des assurances prévoit que même pour les véhicules volés il y a une obligation d’assurance, donc même pour des activités illégales. En l’occurrence, il ne s’agit pas d’une activité illégale. Mais ce n’est pas parce qu’une activité n’est pas réglementée que l’on ne peut pas prévoir une obligation d’assurance.
Il existe sans doute d’autres voies. Les Britanniques, par exemple, sont allés plus loin en agrégeant agrégateurs de comptes et agrégateurs de placements.
Si nous avions choisi cette dernière voie, j’aurais compris que vous parliez de surtransposition. En l’espèce, nous sommes à côté de la directive dont les auteurs ont peut-être eu le tort de ne pas voir que la frontière entre agrégateurs de comptes pour le paiement et agrégateurs de comptes d’épargne n’est plus pertinente aujourd’hui.
Cela étant, je vous remercie de partager l’idée selon laquelle on ne peut attendre une nouvelle directive qui interviendra dans un délai que l’on ne peut évaluer aujourd’hui. Le Gouvernement et l’ensemble des sénateurs, tous groupes politiques confondus, ont pour seul souci la protection du consommateur. Il est important de lui offrir un minimum de garanties. Le retrait de cet amendement nous laisse le temps de travailler à une meilleure solution d’ici à la CMP.
Les montants en jeu sont sans commune mesure avec les agrégateurs de paiement. Les soldes de comptes courants ne sont pas toujours très élevés, alors que ceux des comptes d’épargne peuvent être beaucoup plus importants. On pourrait se retrouver, demain, avec des utilisateurs purement et simplement ruinés.
La responsabilité du législateur et celle du Gouvernement est d’assurer un minimum de sécurité à ces utilisateurs, alors que l’ensemble des pare-feu, comme nous le rappelle l’actualité, n’offre pas une garantie suffisante aujourd’hui.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, d’avoir retiré cet amendement. Sachez que la commission des finances est tout à fait disposée à continuer de travailler sur ce sujet important.