M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 0232, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Catherine Troendlé, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, c’est avec plaisir que je présente cette question en remplacement de ma collègue Christine Bonfanti-Dossat, car elle porte sur un sujet qui m’est très cher. Elle concerne la situation des services d’incendie et de secours, les SDIS. Vous ne l’ignorez pas, leurs missions opérationnelles ne cessent d’augmenter : une augmentation de 3,7 % de leurs interventions entre 2015 et 2016, pour atteindre 12 000 interventions par jour, soit une intervention toutes les sept secondes.
Vous ne l’ignorez pas davantage, leur professionnalisme et leur humanité ont permis de bâtir avec les Français une relation de confiance sincère et durable. L’engagement des « soldats du feu » est parmi les plus appréciés de nos concitoyens. Les sapeurs-pompiers continuent de l’assumer avec honneur, bien que le nombre d’agressions dont ils sont victimes augmente – de 17 % en 2016.
Et pourtant, monsieur le secrétaire d’État, la qualité des interventions qu’ils assument – et dont le nombre augmente –, dans un contexte de plus en plus difficile, ne leur épargne pas de fortes tensions budgétaires, liées notamment à la dégradation de la situation financière des conseils départementaux. En 2016, le budget global des SDIS connaît une baisse de 1,4 % par rapport à 2015, pour atteindre 4,8 milliards d’euros.
Cette dégradation est appelée à s’amplifier, étant donné que la majorité du parc matériel des SDIS est constituée de véhicules roulants alimentés en carburant diesel et que les augmentations des taxes prévues en 2018 et 2019 sont de nature à impacter fortement ces budgets déjà contraints.
Or certaines professions – les entreprises de collecte de lait, les taxis ou les transporteurs routiers, par exemple – bénéficient de mesures fiscales avantageuses comme l’exonération ou le remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE.
Les SDIS, lorsqu’ils effectuent des missions opérationnelles d’urgence, pourraient également être exonérés de cette taxe.
En effet, ces équipes, composées à 80 % de sapeurs-pompiers volontaires, font preuve d’un engagement citoyen exemplaire, et demeurent bien souvent le dernier service public de proximité, notamment en milieu rural.
Monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous prêt à faire un geste fort en exonérant les SDIS de la TICPE ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame la sénatrice Catherine Troendlé, vous souhaitez, compte tenu de l’augmentation programmée des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, TICPE, applicables aux carburants, que les services d’incendie et de secours, les SDIS, puissent bénéficier d’une exonération de cette taxe pour leurs missions opérationnelles d’urgence étant donné le contexte budgétaire contraint qui est le leur.
Sans méconnaître la qualité exceptionnelle des interventions réalisées par les SDIS, dont les membres sont, pour la plupart, des volontaires – vous l’avez souligné à juste titre –, il n’est pas possible pour le Gouvernement de réserver une suite favorable à votre demande d’exonération.
Vous le savez, le droit européen encadre strictement les possibilités d’exonération de la taxe sur les carburants. Les services d’incendie et de secours ne font pas partie de la liste limitative des possibilités d’exonération arrêtée par le droit communautaire.
Par ailleurs, sur un autre plan, l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue par les lois de finances a pour objet d’affecter, par la hausse du prix des carburants, les consommations de l’ensemble des composantes de la société, y compris les forces armées, les forces de l’ordre, les services publics et les administrations.
Il ne serait donc pas conforme au droit communautaire de réserver une suite favorable à votre demande.
Le Gouvernement est engagé auprès des SDIS, auprès des sapeurs-pompiers, et le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a eu l’occasion, au cours des derniers mois, de prendre plusieurs initiatives pour, à la fois, faciliter leur vie, alléger les charges qui pèsent sur eux et participer au renouvellement du matériel – je pense notamment au matériel de lutte contre l’incendie, avec la commande récente de six Canadair.
Il y a un engagement fort, sans faille, du Gouvernement en faveur des SDIS, mais cet engagement ne peut pas aller à l’encontre du droit communautaire qui s’impose en matière d’exonération des taxes sur les carburants.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé.
Mme Catherine Troendlé. Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse est brutale. Vous me parlez de droit communautaire, mais tous les droits, quels qu’ils soient, peuvent évoluer ! Il suffit pour cela d’une volonté gouvernementale, conjuguée, si nécessaire, avec celle d’autres pays ; si, vraiment, on veut faire avancer le droit communautaire, on peut le faire – on a pu le faire sur d’autres sujets. L’opérationnalité des SDIS est assujettie, de toute façon, à ces nombreux déplacements.
Je veux également vous rappeler, monsieur le secrétaire d’État, que les SDIS suppléent aujourd’hui aux nombreuses carences des services de santé – désertification médicale, SAMU qui n’ont plus les moyens d’intervenir comme il se doit. Pour la santé, le dernier rempart du service public de proximité, ce sont les sapeurs-pompiers.
Vous avez indiqué, il y a quelques instants, qu’il y a de fortes implications budgétaires. Les Canadair, c’est très bien, tout le monde en convient, mais aujourd’hui nous parlons d’un impact financier quotidien pour tous les SDIS. Je tiens à rappeler que ce sont les collectivités qui contribuent de façon très importante au fonctionnement des SDIS, au regard de l’implication de l’État, qui est tout de même moindre.
Je pense que le sujet n’est pas clos, monsieur le secrétaire d’État ; je reprendrai contact avec vous, si vous me le permettez. Je pense qu’il faut absolument faire évoluer le droit communautaire en la matière, et nous pourrions le faire ensemble.
M. le président. Je remercie M. le secrétaire d’État de sa présence et de ses réponses.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trois, est reprise à onze heures cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
projet de réforme de la carte judiciaire dans les départements de la savoie et de la haute-savoie
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 0171, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Loïc Hervé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de réforme de la carte judiciaire soulève de vives inquiétudes dans tout le pays – de nombreux collègues partagent, je crois, cette inquiétude –, et particulièrement dans les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie.
Si vous affirmez régulièrement, madame la ministre, que votre projet ne supprimera aucune juridiction, les élus locaux, de même que les magistrats, les fonctionnaires et les professions juridiques, s’inquiètent vivement du sort qui sera réservé à la cour d’appel de Chambéry, destinée à fusionner avec celles de Grenoble et de Lyon.
La même inquiétude existe quant au destin de trois de nos tribunaux de grande instance, ceux d’Albertville, de Bonneville et de Thonon-les-Bains. Leur dévitalisation en matière d’activité judiciaire laisse craindre leur suppression à terme, alors que la justice y est aujourd’hui rendue rapidement.
Pacta sunt servanda : ma plaidoirie ne serait pas complète si j’oubliais le droit international public et le traité de Turin, texte qui a donné un certain nombre de garanties à la Savoie au moment où elle devint française. On pourrait considérer cela comme de l’archéologie juridique ; il n’en est rien, et je vous renvoie aux excellents travaux du barreau de Chambéry sur ce point. Les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie sont toujours restés, depuis 1860, des territoires frontaliers et des territoires de montagne.
Cela dit, nos départements sont identifiés pour leur dynamisme démographique et économique, en périphérie des métropoles de Lyon, de Grenoble, voire de Genève. Dans ces conditions, un délitement du service public de la justice serait fort préjudiciable à un territoire puissant. Ce serait nier ses besoins, désavouer la performance et l’expertise des juridictions existantes, et négliger les difficultés de déplacement au regard de transports en commun insuffisants et de conditions climatiques et géographiques si spécifiques à la montagne.
Au moment où la survie des territoires intermédiaires et ruraux, en particulier des petites villes, est en jeu, la concentration de toute l’activité dans les seules métropoles constitue la négation même du droit du justiciable à voir traiter son dossier par un magistrat localement compétent et connaisseur des réalités de la vie d’un territoire dans lequel il vit lui-même.
Madame la ministre, envisagez-vous de reconsidérer les schémas d’organisation des juridictions, en discernant les spécificités de chaque territoire, c’est-à-dire en appréciant, entre autres, les distances, les perspectives de développement et les manques de moyens ? Quelles informations rassurantes êtes-vous en mesure de nous apporter ? Comment, dans une telle réforme, comptez-vous associer les élus locaux et les parlementaires au devenir d’un service public aussi essentiel que celui de la justice dans les territoires, a fortiori quand ceux-ci se situent en dehors des principales métropoles du pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Martine Berthet, MM. Jean-Pierre Vial et Mathieu Darnaud applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous le savez, le Gouvernement a lancé, au mois d’octobre dernier, une large réflexion sur cinq grands chantiers thématiques qui doivent être considérés comme une réforme globale. Ces chantiers portent sur la procédure civile, la procédure pénale, l’efficacité des peines, la numérisation et l’adaptation territoriale de notre réseau de juridictions. Les rapports relatifs à ces cinq chantiers m’ont été remis le 15 janvier dernier ; ils constituent des propositions.
Sur le fondement de ces propositions, j’ai engagé toute une série de concertations avec les organisations représentatives des magistrats, des barreaux, des autres professions du droit, et des élus locaux et nationaux – ce matin encore, je recevais le président de l’Association des régions de France.
Le rapport concernant l’adaptation du réseau des juridictions a été rédigé, vous le savez, par MM. Raimbourg et Houillon. Il conclut à la nécessité de repenser l’architecture de ce réseau pour la moderniser, dans l’intérêt premier de nos concitoyens et des justiciables, que nous n’oublions jamais. En effet – ce ne sont pas que des mots –, ce sont bien les justiciables qui sont au cœur de notre réforme.
La réflexion actuellement menée autour de l’organisation territoriale vise ainsi à satisfaire les intérêts essentiels des justiciables, auxquels on doit garantir un accès à la justice qui soit simple – ce qui veut dire qu’il y aura de puissantes réformes pour garantir la simplicité de l’accès à la justice –, transparent, rapide et direct. Sur la base de ces principes, des évolutions opérationnelles sont envisagées qui devront impérativement concilier l’exigence de proximité, l’efficience des juridictions et, dans certains cas, la spécialisation.
Cette volonté d’évolution du réseau judiciaire, je le répète, ne se traduira en aucun cas par la réduction des effectifs – ce sera même le contraire – ni par la fermeture de sites judiciaires. Je m’étonne ainsi que vous puissiez évoquer la fusion de la cour d’appel de Chambéry avec celles de Grenoble et de Lyon ; il n’est aucunement question de cela.
Le succès de la réforme judiciaire sera conditionné à son ancrage dans la réalité de nos territoires, ce qui se traduira nécessairement par la poursuite des concertations actuellement menées et, bien entendu, par la prise en compte des singularités de chacun de ces territoires.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. Je vous remercie, madame la ministre, de ces réponses. J’entends les différents éléments que vous nous apportez.
Néanmoins, notre vigilance ne faiblira pas sur ce sujet. Nous sommes attachés, en pays de Savoie, à une justice très présente dans les territoires – ce sont des territoires, je l’évoquais tout à l’heure, qui sont compliqués.
Mes collègues sénateurs Martine Berthet, Jean-Pierre Vial, Cyril Pellevat, Jean-Claude Carle et moi-même serions demandeurs d’une audience (Mme le garde des sceaux opine.), pour poursuivre la concertation que vous avez appelée de vos vœux et, visiblement, enclenchée, afin de vous présenter les arguments permettant d’adapter votre réforme dans nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Martine Berthet, MM. Jean-Pierre Vial et Mathieu Darnaud applaudissent également.)
réinstallation d’un tribunal de commerce à dreux
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, auteur de la question n° 0199, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Chantal Deseyne. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, et porte sur le tribunal de commerce de Dreux, supprimé depuis janvier 2009.
Madame la ministre, les chantiers de la justice, que vous avez lancés le 5 octobre dernier, traduisent la volonté du Gouvernement de transformer la justice de notre pays. Au travers de ces chantiers, notamment de celui qui est consacré à l’adaptation de l’organisation territoriale du réseau des juridictions, on envisage de modifier la carte judiciaire, afin de faciliter l’accès des justiciables aux juridictions.
Les justiciables du tribunal de commerce résidant dans le nord de l’arrondissement de Dreux – Anet, Saint-Lubin-des-Joncherets – doivent parcourir 150 kilomètres pour se rendre au tribunal ou au greffe, à Chartres. Or le tribunal d’instance et le conseil de prud’hommes sont toujours en activité à Dreux, dans le palais de justice. Le greffe de Chartres pourrait ainsi réinstaller sans problème un greffe à Dreux. Cette réouverture faciliterait la prévention des défaillances des entreprises de l’arrondissement le plus industriel du département, du fait de sa proximité avec la région parisienne.
Madame la ministre, je souhaite savoir si vous envisagez de prendre en compte ces considérations et de réinstaller un tribunal de commerce à Dreux.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Merci de votre question, madame la sénatrice Chantal Deseyne. Je ne reprendrai pas le préambule, que j’ai développé précédemment, sur la réflexion qui nous a conduits à envisager une réforme profonde de l’organisation judiciaire.
Simplement, en ce qui concerne l’organisation territoriale des juridictions, je vous rappelle que, à ce stade, celle-ci n’intègre pas de réflexion sur les tribunaux de commerce. Il a d’ailleurs été relevé par MM. Raimbourg et Houillon, qui ont rédigé le rapport sur l’adaptation du réseau des juridictions, que les juridictions commerciales ont des problématiques spécifiques qui supposent une réflexion dédiée.
Je pense également que le cadre de la réforme étudiée actuellement pour les juridictions de première instance de droit commun, qui vise, je le répète, des objectifs de proximité, de spécialisation et de simplification, ne peut pas, en l’état en tout cas, englober ces juridictions spécialisées.
La rationalisation de la carte des juridictions commerciales, entamée en 1999 et poursuivie, vous l’avez dit, en 2005 et en 2008, s’est appuyée sur des critères objectifs : l’activité réduite de la juridiction, ainsi que l’exigence d’une compétence spécifique et d’une pratique suffisante liée à la spécificité et à la technicité de la matière que traitent les tribunaux de commerce.
Pour ce qui concerne précisément le tribunal de commerce de Dreux, ont été pris en compte l’ensemble de ces éléments, auxquels se sont ajoutées des considérations liées à la localisation des chambres de commerce et d’industrie et des barreaux, aux distances, au réseau routier, puisque vous évoquiez ces sujets, et également au nombre de juridictions dans le département au regard des circonscriptions comparables.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il n’est pas envisagé, à ce stade, de rouvrir le tribunal de commerce de Dreux.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Je vous remercie, madame le garde des sceaux, de votre réponse, même si elle ne me satisfait pas complètement.
J’entends bien que les juridictions commerciales ne sont pas concernées par la réforme en cours, j’entends aussi votre volonté de rationalisation, mais je pense tout de même que l’on pourrait reconsidérer les tribunaux de commerce. En effet, le temps des chefs d’entreprise est précieux et, au regard de la physionomie des territoires, les expédier à l’autre bout du département n’est pas raisonnable.
M. le président. Je remercie Mme la garde des sceaux de sa présence et de ses réponses.
raccordement ferroviaire de l’aéroport de vatry
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 0195, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, que je salue.
Mme Françoise Férat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le développement de l’activité de fret et de transport de passagers de l’aéroport de Paris-Vatry, dans le département de la Marne, notamment au travers de sa desserte ferroviaire.
J’associe très naturellement mon collègue René-Paul Savary, qui a longtemps porté le dossier de cette plateforme lors de sa présidence du conseil départemental, jusqu’en octobre dernier ; je sais qu’il est toujours passionné par la question.
Il y a quelques semaines, le Gouvernement a pris la décision d’abandonner la construction d’un nouvel aéroport sur le site de Notre-Dame-des-Landes. J’estime que cette décision est une motivation pour relancer le soutien au développement des activités de l’aéroport Paris-Vatry, situé à moins de deux heures de Paris, dernière plateforme construite en France.
À cet égard, l’ambition de l’État pourrait être d’améliorer la desserte ferroviaire actuelle de l’aéroport par un raccordement aux réseaux TER et TGV existants, ainsi que le contrat de plan État-région 2007-2013 en avait retenu le principe. Nous sommes aujourd’hui en 2018, et cette option n’a toujours pas été mise en application. L’État partage cette vision depuis 2013 ; mettons-la conjointement en œuvre désormais.
En effet, en facilitant le transport des personnes et des marchandises, cette infrastructure représenterait un atout majeur de désengorgement des aéroports parisiens et d’attractivité économique pour les logisticiens qui ont aujourd’hui transféré leurs activités sur des aéroports étrangers. Il s’agit, grâce à cet investissement, de rapatrier de l’activité économique en France. En 2017, ce sont 110 000 passagers et 18 000 tonnes de marchandises qui ont transité à Vatry. La Marne est au carrefour de l’Europe, à deux pas du Benelux, de la Suisse et de l’Allemagne, et elle a toutes les capacités de se développer.
Dernièrement, la direction de la sécurité de l’aviation civile nord-est a acté la certification aux normes européennes de sécurité ; l’équipement marnais est « au top », et il le restera longtemps !
Le conseil départemental de la Marne, notamment par l’intermédiaire de son nouveau président Christian Bruyen, est prêt à une étroite collaboration avec les services de l’État et avec les collectivités territoriales partenaires pour concrétiser cette réalisation.
Madame la ministre, je vous demande quelles sont les intentions du Gouvernement dans ce dossier, et comment vous entendez mener ce développement avec les collectivités et les gestionnaires de cet équipement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la sénatrice Françoise Férat, je veux tout d’abord vous assurer que j’ai bien conscience des enjeux forts d’attractivité pour la Marne et pour la région Grand Est que représente l’aéroport de Paris-Vatry. Cet aéroport étant principalement dédié au fret aérien, je conçois également votre volonté de voir cette infrastructure bien connectée aux réseaux ferrés.
C’est la raison pour laquelle l’État s’est engagé, vous l’avez rappelé, dès 2007 au côté de la région Champagne-Ardenne, lors de la signature du contrat de plan État-région précédent, en mobilisant 3 millions d’euros afin d’examiner les conditions de desserte ferroviaire de l’aéroport, en utilisant la ligne actuelle dédiée au fret entre Châlons-en-Champagne et Troyes.
Par ailleurs, le conseil régional de Champagne-Ardenne a commandé en 2009 une étude visant à estimer les besoins de desserte de l’aéroport Paris-Vatry et à évaluer les aménagements nécessaires. Compte tenu de l’ampleur des investissements à prévoir pour accueillir des TER et des TGV, les conclusions des études ont clairement mis en avant l’opportunité de faire circuler des navettes par autocars vers la gare de Châlons-en-Champagne, d’une part, et vers Disneyland, d’autre part.
Vous le savez, ma volonté est de redonner la priorité aux transports du quotidien, tout en veillant à prioriser les financements. Il est en effet indispensable de mettre en adéquation les projets et les ressources disponibles. Le projet de loi d’orientation des mobilités, notamment dans son volet de programmation des infrastructures, que je présenterai prochainement, sera l’occasion de redéfinir le périmètre et les moyens d’intervention de l’État.
En effet, le système actuel montre ses limites au regard des impasses et des besoins de financement identifiés sur nos infrastructures ; il est donc nécessaire de dégager collectivement de nouvelles solutions innovantes et pertinentes, de nature à répondre aux enjeux économiques et sociaux des territoires.
C’est à cette aune que les enjeux de desserte ferroviaire de Paris-Vatry, dont je mesure et reconnais l’importance, pourront être examinés.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Madame la ministre, vos propos ne sont pas du tout de nature à me rassurer.
Je veux insister sur la qualité de cet équipement ; vous l’avez souligné, mais permettez-moi d’y revenir. C’est un dossier qui a été mis en œuvre dans des conditions exceptionnelles. Nous sommes sur une ancienne base de l’OTAN, avec 7 habitants au kilomètre carré, et toutes les habitations de proximité ont été traitées du point de vue acoustique. Nous n’avons pas eu un seul contentieux avec la profession – il y aurait des leçons à tirer sur la méthode, si vous me permettez cette expression –, nous avons obtenu l’adhésion des collectivités partenaires du conseil départemental de la Marne ; cela veut dire que, demain, lorsque nous aurons à entreprendre cette liaison ferroviaire, elles seront toujours à nos côtés, c’est essentiel.
On parle de montants importants, je l’entends bien, mais cela ne me semblait pas de nature à bloquer ce dossier.
Aujourd’hui, nous avons, sur ce site, plus de 700 emplois, et d’autres entreprises souhaitent s’y implanter. Mais, évidemment, le blocage concernant la ligne ferroviaire suffit à freiner ces demandes d’implantation dans un secteur où, vous l’avez compris, l’activité est essentielle – il y a, je le répète, 7 habitants au kilomètre carré. Et je ne reviens pas sur l’obtention, voilà quelques semaines, du label de conformité aux normes européennes…
En outre, permettez-moi d’insister sur cette liaison ferroviaire. Nous avons entendu que, pour remédier à l’abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes, des passagers seraient orientés vers Paris. De grâce, essayons aussi de mailler ce territoire ! Vous avez là un équipement qui peut le permettre.
Par ailleurs, il ne s’agit pas de Châlons-en-Champagne et de Disneyland, madame la ministre, pardonnez-moi, cela va au-delà ! On parle d’implantation européenne, d’activités qui s’implantent à l’étranger ; allons au-delà de cette vision très réductrice.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Françoise Férat. Je reviens sur l’engagement du contrat de plan ; de grâce, essayons de le mettre en œuvre, d’autant que vous ne serez pas seule, vous aurez les collectivités à vos côtés. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Mathieu Darnaud applaudit également.)
avenir de la rn 147
M. le président. La parole est à M. Yves Bouloux, auteur de la question n° 0205, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
M. Yves Bouloux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, qu’ils soient routiers ou ferroviaires, les axes de communication sont des vecteurs de développement ; ils sont le système sanguin du pays et, malheureusement, certains territoires souffrent d’une embolie persistante…
Les contrats de plan État-région ont été conçus pour répondre à ce type d’enjeu et pour permettre ainsi l’émergence d’une vision stratégique partagée de développement, traduite par la mise en œuvre de projets structurants.
Il en va ainsi du contrat de plan État-région Nouvelle-Aquitaine de 2015-2020. La route nationale 147, axe parmi les plus accidentogènes de France, a été retenue, avec une forte contribution financière, d’ailleurs, des départements de la Vienne et de la Haute-Vienne.
Néanmoins, contrairement aux attentes des usagers et aux promesses initiales, le prolongement d’un tronçon à deux fois deux voies a été abandonné au profit du contournement à deux fois une voie de la commune de Lussac-les-Châteaux.
Certes, cela décongestionnera, surtout l’été, cet agréable bourg assujetti à des trains de camions toujours plus nombreux, mais ce parti pris est bien loin d’être à la hauteur des enjeux.
L’axe dont je vous parle, madame la ministre, vous le connaissez bien, pour avoir été, à Poitiers, une préfète de région de grande qualité, permettez-moi de le dire. Poitiers n’est plus aujourd’hui capitale régionale, pas plus que sa voisine Limoges, et ces deux villes, malgré les quelques compensations d’usage, sont très fragilisées. La liaison entre elles est indigne, et il est invraisemblable et inacceptable qu’elle ne soit pas traitée, comme tant d’autres, à deux fois deux voies.
J’ajoute que cet axe transversal a une vocation évidente pour le trajet Nantes-Méditerranée, et, en complément des deux départements cités, les Deux-Sèvres souhaitent s’y associer avec la volonté de constituer le chaînon manquant Bressuire-Poitiers-Limoges.
Madame la ministre, je ne m’étendrai pas sur des chiffres que vous connaissez mieux que moi, mais qui parlent plus que tout, avec la croissance inexorable de la circulation de poids lourds et l’effroyable mortalité de la route nationale 147.
Le Président de la République a annoncé un grand programme d’investissement. L’infrastructure dont je vous parle depuis quelques minutes mériterait assurément de bénéficier d’une toute petite part de cette manne, pour enclencher enfin un véritable plan pour cette route qui, d’un cauchemar, pourrait devenir un vecteur de développement.
Il y va de la sécurité des usagers, de l’aménagement du territoire, de la croissance économique, tant pour conforter les pôles urbains que pour redonner vie aux secteurs les plus difficiles de l’hyper-ruralité.