Mme Martine Berthet. Madame la secrétaire d’État, les élus des territoires de montagne sont en colère. Ils ne peuvent plus se contenter de promesses. Le « fait montagnard » ne doit plus être le parent pauvre des administrations publiques de l’État. Il est temps qu’il soit pris en compte, car de graves menaces pèsent aujourd’hui sur les finances de ces collectivités, ainsi que sur l’équilibre économique précaire de nos stations et de nos vallées.
En effet, au regard des critères et des modes de calcul actuels du prélèvement au titre du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, les territoires ruraux sont pénalisés. Alors que le mode de calcul devait gommer les différences territoriales, il les accentue au contraire. Il donne, via le coefficient logarithmique de population, un avantage indéniable aux territoires urbains, qui ont notamment profité des fusions d’EPCI encouragées par la loi.
Les territoires de montagne, eux, subissent une double peine puisque la constitution d’EPCI élargis demeure très compliquée du fait du contexte géophysique et que le dispositif du FPIC ne tient absolument pas compte de la dimension « charges » – autres que les charges sociales – des collectivités.
Il a été prouvé à de nombreuses occasions que l’altitude et le contexte montagnard alourdissent de 20 % à 30 % leurs charges de fonctionnement classiques. De même, il est démontré que leur effort sur les budgets de fonctionnement n’est pas compensé par la prise en compte de la population DGF, un seul habitant étant comptabilisé par résidence secondaire.
Les territoires touristiques de montagne subissent quant à eux une triple peine. Ils sont contraints par le mode de calcul discriminant du potentiel financier agrégé, calculé sur des recettes dont une part importante doit être réinvestie dans l’outil économique, représenté par l’industrie touristique de montagne, elle-même basée sur l’opérateur qu’est la commune.
Il serait judicieux d’intégrer un critère d’équilibre afin de compenser les effets négatifs de la prime à la population sur les territoires ruraux. Cet ajout se ferait de manière modeste et permettrait de rééquilibrer le rural face à l’urbain, sans remettre en cause l’incitation au regroupement des collectivités.
Autre solution alternative, cette adaptation pourrait se concevoir en multipliant la population DGF par deux en zone de montagne.
Que comptez-vous faire à ce sujet, madame la secrétaire d’État ? Il y va de la survie de nos territoires de montagne, de nos collectivités, de leurs habitants, de leurs emplois et de leur identité.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Martine Berthet, la situation des territoires touristiques de montagne que vous mentionnez est bien souvent hétérogène et l’analyse de la répartition en 2017 du FPIC a permis de confirmer l’efficacité péréquatrice du Fonds sur ces collectivités de montagne.
Les communes touristiques de montagne bénéficient de ressources supplémentaires, qui sont prises en compte dans les indicateurs financiers, tandis que les communes rurales de montagne, notamment celles qui sont classées en zone de revitalisation rurale, sont souvent plus pauvres.
Une analyse des indicateurs financiers agrégés des ensembles intercommunaux de montagne permet d’apprécier leur situation globalement. Avec un revenu moyen par habitant de 13 574,09 euros, contre une moyenne nationale de 14 304 euros, et un potentiel financier agrégé moyen par habitant de 597,14 euros, contre une moyenne nationale de 617,61 euros, les territoires de montagne se situent en dessous de la moyenne nationale.
Il convient toutefois de rappeler que le seuil d’éligibilité au prélèvement au titre du FPIC est fixé à 90 % du potentiel financier agrégé moyen par habitant, qui était de 555,85 euros en 2017. Autrement dit, la mesure de leur richesse par le biais des indicateurs financiers propres au FPIC justifie leur éligibilité au prélèvement.
Par ailleurs, une analyse de la répartition nationale 2017 permet de confirmer les effets péréquateurs du FPIC sur ces territoires, qui sont effectivement contributeurs, mais également bénéficiaires.
Le reversement moyen des ensembles intercommunaux de montagne, au nombre de 316, est de 21,56 euros par habitant, soit légèrement moins que la moyenne, qui est de 23,45 euros. Cependant, leur prélèvement moyen par habitant, de 23,22 euros, est quant à lui inférieur au prélèvement moyen par habitant effectué à l’échelon national, qui est de 24,48 euros.
Ensuite, une analyse de la répartition interne de droit commun du FPIC permet d’illustrer une diversité de situations bien prise en compte dans les modalités de calcul du Fonds.
Les communes de montagne touristiques, plus riches, sont contributrices nettes à hauteur de 22 millions d’euros, pour un montant moyen par habitant de 17,48 euros en 2017. Toutefois, les communes de montagne classées en zone de revitalisation rurale, les ZRR, ont été bénéficiaires nettes à hauteur de 7,27 millions d’euros, soit 3,52 euros par habitant. Les communes de montagne touristiques riches contribuent ainsi davantage à la péréquation, tandis que les communes de montagne classées en ZRR sont, quant à elles, davantage bénéficiaires au titre du FPIC.
Il convient également de rappeler que le prélèvement moyen par habitant des communes de montagne touristiques est très élevé, 28,78 euros, montant qui confirme ainsi l’importance des ressources de ces collectivités, qui ne sont pas représentatives de l’ensemble des communes de montagne.
Dès lors, instaurer une mesure qui favoriserait à titre dérogatoire les territoires de montagne, notamment en majorant artificiellement la population DGF en zone de montagne ou en ajoutant aux modalités de répartition du Fonds, déjà complexes, un critère d’équilibre, serait injustifié dans le sens où, objectivement, la répartition du FPIC ne les défavorise pas.
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet.
Mme Martine Berthet. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État.
Si les communes touristiques de montagne produisent effectivement de nombreuses recettes, elles ont également de nombreux frais de fonctionnement. Elles doivent surtout réaliser de nombreux investissements pour maintenir leur outil économique en bon état. Il serait dommage que, à force de tirer sur la corde, elle finisse par casser, au regard du nombre d’emplois créés et des recettes de TVA considérables que génèrent ces communes chaque année, dans le cadre de leur activité touristique. Ainsi, pour la seule vallée de la Tarentaise, en Savoie, ce sont 600 millions d’euros qui sont ensuite reversés à l’échelon national.
situation des greffiers des tribunaux de commerce
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, auteur de la question n° 0177, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Vincent Delahaye. Madame la secrétaire d’État, j’attire aujourd’hui votre attention sur la situation des greffiers des tribunaux de commerce.
Il y a maintenant plus de deux ans, le Président de la République, alors ministre de l’économie, décidait de s’intéresser à la réforme des professions réglementées, dont celle de greffier de tribunal de commerce.
À cette occasion, il avait été établi que ces greffiers étaient rémunérés en moyenne plus de 30 000 euros net par mois et que la profession se caractérisait par une certaine endogamie : sept familles détenaient plus de 15 % des offices du pays, selon un rapport de l’Inspection générale des finances remis en mars 2013.
Afin de réduire cette rémunération difficilement justifiable eu égard aux responsabilités de ces greffiers et conditionnant des tarifs élevés pour les justiciables, la loi du 6 août 2015, dite « loi Macron », a prévu une baisse de 5 % des tarifs et une gratuité d’accès aux données de la plateforme Infogreffe. Mais rien n’a été fait pour faire disparaître ou, à tout le moins, réduire le droit de présentation au profit de la libre installation, comme cela fut le cas pour les notaires.
Au vu de ces éléments, pouvez-vous nous indiquer, madame la secrétaire d’État, quel est le résultat de la mise en œuvre de la loi Macron pour ces greffiers ?
Pour réduire davantage les revenus injustifiés de ces greffiers, ne pourrait-on pas faire baisser encore un peu plus le prix des services proposés par les tribunaux de commerce ?
Enfin, ne pensez-vous pas qu’il serait opportun de remettre l’ouvrage sur le métier afin d’accroître la concurrence par la libre installation, dans un secteur où les situations monopolistiques et népotiques ne trouvent aucune justification ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le président Delahaye, la réforme des professions du droit prévue dans la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a profondément modernisé l’activité des greffiers des tribunaux de commerce, leurs tarifs, ainsi que l’accès à cette profession.
Les tarifs des greffiers des tribunaux de commerce, à l’instar des tarifs des autres professions juridiques, sont désormais définis sur la base d’une approche économique, c’est-à-dire orientés vers les coûts, ce qui a entraîné, dès le mois de février 2016, une baisse globale de 5 % de ces tarifs.
Ces derniers doivent être révisés tous les deux ans et feront donc tout prochainement l’objet d’un nouvel arrêté conjoint des ministres de la justice et de l’économie, qui prévoira une nouvelle baisse substantielle des tarifs en ligne avec les recommandations de l’Inspection générale des finances.
Ces orientations seront définies à partir d’une analyse des données financières de la profession s’appuyant sur une expertise très approfondie réalisée par la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et partagée avec le ministère de la justice.
J’en viens aux conditions d’accès à la profession. Lorsqu’il a souhaité moderniser les conditions d’accès à cette profession au travers de la loi de 2015, le législateur a estimé à juste titre que la liberté d’installation n’était pas une réponse appropriée dans le cas des greffiers de tribunal de commerce. En effet la localisation géographique des offices de ces greffiers est, par définition, la résultante de la carte judiciaire. Cela est incompatible avec une libre installation.
En revanche, le législateur a estimé nécessaire de rendre plus méritocratique l’accès à la profession de greffier de tribunal de commerce. C’est la raison pour laquelle l’article 61 de la loi du 6 août 2015 a habilité le Gouvernement à moderniser par ordonnance le recrutement de ces greffiers, en prévoyant l’instauration d’un concours, conformément à la recommandation d’une mission présidée par le député Richard Ferrand.
Cette ordonnance a été publiée le 29 janvier 2016, et les modalités du concours des greffiers de tribunaux de commerce ont été précisées par voie réglementaire.
La titularisation dans un office de greffier de tribunal de commerce est, en toute hypothèse, conditionnée à la réussite à ce concours.
En particulier, lorsque l’office est cédé par son titulaire dans le cadre de l’exercice du droit de présentation, seul le lauréat du concours le mieux classé parmi ceux qui s’engagent à s’acquitter de l’indemnité demandée peut être présenté par ce titulaire.
Le premier concours d’accès à la profession de greffier de tribunal de commerce sera ouvert en 2018.
En outre, lors des consultations dans le cadre du plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, le PACTE, les différents acteurs ont largement soutenu une série de propositions de simplification des formalités imposées aux entreprises. Parmi celles-ci figure la fusion des registres, qui pose la question de la modernisation de la fonction des teneurs de registre, dont le greffier de tribunal de commerce pour le registre du commerce et des sociétés.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Merci, madame la secrétaire d’État, de ces précisions, qui m’avaient échappé.
Je conviens que le concours est sans doute la bonne réponse, contrairement à la libre installation. Nous attendons ces concours et la suite qui y sera donnée.
S’agissant des rémunérations et des tarifs, puisque les rémunérations dépendent des tarifs, je serai ravi de connaître les conséquences de la baisse de 5 % sur les tarifs et sur les rémunérations de ces greffiers. J’attendrai, avant de prendre position sur le fond, de connaître les propositions qui seront faites cette année sur ce sujet, lequel préoccupe, selon moi à juste titre, certains de nos concitoyens.
utilisation de l’eusko par la ville de bayonne
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 0182, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Max Brisson. Ma question porte sur les difficultés que rencontrent les collectivités territoriales pour utiliser les monnaies locales complémentaires, en particulier la ville de Bayonne, qui souhaite avoir recours à l’eusko.
Première monnaie locale créée en France, l’eusko est aujourd’hui véhiculé par 3 000 particuliers et 650 entreprises au Pays basque. L’eusko est ainsi la deuxième monnaie locale d’Europe.
La loi de 2014 relative à l’économie sociale et solidaire encourage le développement de ces monnaies locales complémentaires, car elles permettent d’ancrer dans les territoires les revenus générés par les acteurs économiques locaux.
Au Pays basque, qui compte 85 % de très petites entreprises, le recours à l’eusko est non pas un effet de style, mais bel et bien un levier de développement. Consciente des opportunités offertes par cette monnaie, la ville de Bayonne a souhaité s’inscrire dans cette démarche.
Or le représentant de l’État dans le département, estimant que la délibération prise par la ville pour recevoir et effectuer des paiements en eusko était contraire à la loi, l’a déférée devant le tribunal administratif, lequel a jugé en référé qu’il n’y avait pas lieu de statuer.
Pour le préfet, si le décret du 7 novembre 2012 prévoit que tout moyen de paiement mentionné dans le code monétaire et financier peut servir aux dépenses publiques, en revanche l’arrêté du 24 décembre 2012, pris en application du décret, ne cite pas les monnaies locales complémentaires.
Or, depuis, la loi du 31 juillet 2014 a donné une base légale à ces monnaies.
Vous comprenez donc qu’il y a là une contradiction : d’une part, il est énoncé que toutes les monnaies peuvent servir aux dépenses publiques ; d’autre part, on refuse l’application de cette disposition malgré l’apport de la loi de 2014, en arguant d’un arrêté de 2012.
Madame la secrétaire d’État, plus de 50 collectivités territoriales participent à cette action citoyenne et au moins une dizaine de projets sont actuellement à l’étude.
Lille, Nantes, Toulouse, Grenoble, Strasbourg, ou encore, prochainement, Paris, pour ne citer que les communes les plus importantes, souhaitent également utiliser des monnaies locales.
Madame la secrétaire d’État, je vous interroge sur la nécessité pour l’administration de mettre ses pratiques en cohérence avec la dernière loi en faisant prévaloir le décret du 7 novembre 2012 et l’article 16 de la loi Hamon de 2014 en complément de l’arrêté du 24 décembre 2012, ce qui permettrait de lever la contradiction qui justifie ma question.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Max Brisson, vous mentionnez la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. Ce texte a favorisé l’émergence des monnaies locales complémentaires en reconnaissant leur statut, tout en soumettant leurs émetteurs aux règles applicables aux établissements de crédit ou aux établissements de paiement et établissements de monnaie électronique. Ainsi, les émetteurs de monnaie locale sont supervisés.
Cette loi ne va cependant pas jusqu’à autoriser les collectivités territoriales à effectuer des paiements en titres de monnaie locale complémentaire.
Il convient de mon point de vue d’être prudent quant à une telle proposition, susceptible de remettre en cause l’égalité devant les services publics nationaux. Elle pourrait induire des complexités et des coûts significatifs pour les services publics, car elle nécessiterait la mise en place d’une double comptabilité et pourrait comporter des risques pour les investissements publics qui seraient réalisés dans des monnaies potentiellement volatiles.
Plus généralement, si ces monnaies peuvent être un moyen de renforcer les communautés locales, il convient de ne pas oublier qu’elles présentent aussi un certain nombre de risques de repli de l’activité sur le territoire, de perte de confiance dans la monnaie centralisée, de distorsion de concurrence et de perte de pouvoir d’achat pour les consommateurs.
En tout état de cause, il n’appartient pas au Gouvernement de se substituer au jugement qui pourrait être rendu par la juridiction administrative sur cette question.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Madame la secrétaire d’État, je regrette que vous n’ayez pas profité de ma question pour apporter une clarification, nécessaire selon moi, à propos d’un mouvement qui va prendre de l’ampleur.
Vous laissez le soin à la justice de décider, et je crains que cela ne laisse la porte ouverte à des interprétations très différentes.
Nous avions là une belle occasion de montrer l’attachement du Gouvernement à la diversité des territoires et sa volonté de promouvoir une économie circulaire, solidaire et sociale, conformément à l’objectif qu’il avait lui-même affiché.
démarchage téléphonique
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 0194, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Olivier Cigolotti. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la faible efficacité des mesures mises en œuvre afin de lutter contre le démarchage téléphonique.
Dans mon département, la Haute-Loire, je suis régulièrement saisi de cette problématique.
En effet, alors que le dispositif Bloctel, issu de la loi relative à la consommation, est censé lutter contre le démarchage téléphonique, neuf Français sur dix se disent excédés par l’inefficacité de celui-ci. Les démarchages se poursuivent malgré l’inscription sur cette liste Bloctel.
Il convient de rappeler qu’il est normalement interdit à un professionnel, sous peine d’amende, de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique et avec lesquels il n’a pas de relations contractuelles en cours.
Les secteurs ayant recours à ce type de démarchage sont aussi ceux que l’on retrouve le plus souvent dans les litiges de consommation – travaux de rénovation énergétique, fourniture ou abonnement énergétique…
Aujourd’hui, les consommateurs reçoivent en moyenne plus de quatre appels téléphoniques de ce type par semaine.
À l’appui de ce chiffre, force est de constater que les dispositifs existants sont d’une efficacité trop limitée contre le phénomène.
Ce même constat a déjà été évoqué dans ma question écrite datant du 16 février 2017. La réponse à ma question, publiée au Journal officiel du 11 mai 2017, mentionnait alors qu’il fallait laisser du temps au récent dispositif mis en place pour produire son plein effet, avant de décider, éventuellement, d’une révision de la législation et de prévoir des sanctions plus élevées ou d’instituer un indicatif permettant de reconnaître les démarcheurs téléphoniques.
Les opérations de contrôle engagées par les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, à l’encontre des professionnels qui continuent de démarcher des consommateurs inscrits sur la liste d’opposition Bloctel restent peu nombreuses et peu efficaces, puisque ces derniers subissent encore ce démarchage.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser si le Gouvernement entend réviser le dispositif actuel pour limiter le démarchage téléphonique, notamment en ce qui concerne l’éventualité d’une augmentation des amendes pour les opérateurs récalcitrants, d’une intensification des contrôles sur le respect du dispositif Bloctel, ou encore de la mise en place d’un indicatif spécifique permettant aux consommateurs de reconnaître facilement ce type de démarchage avant de décrocher leur téléphone.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Olivier Cigolotti, c’est dans le souci de protéger les consommateurs d’un démarchage téléphonique intempestif et intrusif que l’article L. 223-1 du code de la consommation, issu de l’article 9 de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, interdit à un professionnel de démarcher par téléphone des consommateurs inscrits sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique.
Plutôt qu’interdire le démarchage, le législateur avait choisi d’instituer une liste d’opposition, à charge pour les entreprises de s’assurer, avant toute prospection, de l’absence de numéros de téléphone inscrits sur cette liste.
Ce dispositif a été mis en place en juin 2016, après qu’a été confiée à la société Opposetel, par voie de délégation de service public, sa gestion.
Depuis le mois de juillet 2016, il est de la responsabilité des entreprises qui ont recours à ce mode de prospection commerciale de s’assurer que leurs fichiers clients ne contiennent pas de numéros de téléphone inscrits sur le registre Bloctel. Pour cela, elles doivent faire retirer par le gestionnaire de ce site les numéros de téléphone qui y sont inscrits.
Dès le premier jour d’entrée en vigueur du dispositif, 1 million de consommateurs s’étaient inscrits pour atteindre 3,5 millions aujourd’hui. Le dispositif Bloctel répond donc à une attente forte des Français.
Même si ses résultats ne sont pas encore satisfaisants pour l’ensemble des inscrits, sur l’année 2017, en moyenne, chaque numéro de téléphone inscrit sur le registre Bloctel a été retiré plus de six fois par semaine des listes de prospection téléphonique. Ce dispositif a donc probablement évité de nombreux appels, même si ceux-ci restent encore trop nombreux pour les consommateurs, qui ont cru longtemps que le dispositif était technique et ferait cesser automatiquement les appels.
Si ce dernier n’apporte pas aujourd’hui une réponse parfaite aux demandes légitimes des consommateurs, c’est qu’un nombre trop grand d’entreprises n’y a pas adhéré et continue de démarcher en toute illégalité : seules 800 entreprises ont adhéré au dispositif Bloctel, ce qui semble très en deçà du nombre de professionnels tenus d’y recourir.
Une telle situation appelle une double réponse : une réponse préventive, tout d’abord, pour inciter les entreprises à adhérer – plusieurs campagnes de mailing à grande échelle ont été lancées et des rencontres avec les différents secteurs d’activité organisées ; une réponse répressive, ensuite – la DGCCRF a diligenté à cet effet de nombreuses enquêtes, afin de sanctionner les entreprises contrevenantes.
Il convient de rappeler que, entre juillet 2016 et janvier 2018, la traçabilité des numéros appelants via les réclamations enregistrées sur le site a déjà permis de sanctionner 134 entreprises contrevenantes, pour certaines d’entre elles à hauteur du plafond légal de l’amende, soit 75 000 euros.
Toutefois, les actions de contrôle de la DGCCRF sont complexifiées par certaines techniques mises en place par des entreprises peu scrupuleuses. Un travail étroit et intensif a donc été instauré avec les opérateurs téléphoniques et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, pour permettre de faciliter l’identification des entreprises à l’origine des appels.
Enfin, il convient également de rappeler que plus de la moitié des appels dénoncés par les consommateurs relèvent de la fraude aux numéros surtaxés, sujet distinct sur lequel la DGCCRF est également fortement mobilisée.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti.
M. Olivier Cigolotti. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Vous avez parfaitement identifié les problèmes posés par le dispositif Bloctel, auquel 1 % seulement des entreprises adhèrent, ce qui est très insuffisant.
Nos concitoyens s’agacent d’être régulièrement harcelés. Beaucoup d’entre eux pensaient qu’il s’agissait d’un dispositif technique qui bloquerait systématiquement les appels liés au démarchage téléphonique.
Les services de la DGCCRF doivent aujourd’hui insister sur l’obligation pour les entreprises de s’inscrire à ce dispositif.
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.)