M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Monsieur le secrétaire d’État, je prends bonne note de votre réponse. Ma collègue Pascale Gruny pose une question de bon sens. Je vous rappelle que le département de l’Aisne a l’une des densités médicales les plus faibles de France, et l’écart se creuse un peu plus chaque année : en 2016, pendant que 172 médecins s’installaient dans les Alpes-Maritimes, seuls 24 arrivaient dans l’Aisne. Il n’y a jamais eu autant de médecins en France, mais jamais ils n’ont été aussi mal répartis. D’où l’urgence d’agir.
aide financière de l’état au centre hospitalier universitaire de marseille
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, auteur de la question n° 0155, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Mireille Jouve. Monsieur le secrétaire d’État, alors que la paralysie financière menace, le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers vient, le 31 janvier dernier, de déclarer éligible le plan de modernisation présenté par la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, l’AP-HM.
Ce plan portera sur 300 millions d’euros d’investissement, dont une grande partie à la charge de l’État.
Si je me félicite de cette aide, je m’inquiète des contreparties actuellement évoquées. En effet, ce refinancement pourrait être conditionné à d’importantes suppressions de postes, estimées entre 800 et 1 000, qui concerneraient, pour moitié, des personnels soignants.
Pourtant, dans de multiples unités, les personnels se trouvent en tension maximale. Pour mémoire, 223 suppressions d’emplois ont déjà été actées dans le contrat de retour à l’équilibre financier présenté en 2015 par l’AP-HM.
Je souhaite donc interpeller le Gouvernement sur les conséquences et les effets pervers que pourrait engendrer une restructuration trop rapide et trop brutale des effectifs de l’AP-HM.
J’évoquerai notamment l’absentéisme, qui grève le budget et trouve aujourd’hui sa justification, au-delà des « mauvaises habitudes » de certains agents, dans l’épuisement de la plupart des équipes soignantes. Ce phénomène pourrait s’en trouver fortement amplifié.
Je comprends l’importance d’une évolution du modèle de fonctionnement actuel de l’AP-HM, qui a largement montré ses limites. Toutefois, le Gouvernement est-il prêt à envisager une réévaluation progressive, en concertation avec les représentants des personnels et du corps médical, et au gré des étapes de la restructuration qui va s’engager, du niveau des réductions de postes qui vont accompagner ces mutations ?
Il me semble indispensable que les investissements requis pour permettre à l’AP-HM d’accueillir les malades dans des conditions décentes et aux personnels de travailler dans une atmosphère normale interviennent avant que des ajustements d’effectifs ne se fassent.
Sans cela, comme l’ont relevé de nombreux praticiens de l’AP-HM, ce plan de modernisation ne pourra pas être pleinement opérant.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Mireille Jouve, permettez-moi de porter la réponse du Gouvernement et de la ministre de la santé à votre question bien éloignée de mon périmètre ministériel. Mais je vais tenter d’être le plus précis possible.
Le projet de modernisation de l’AP-HM a été déclaré éligible par le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers, le COPERMO. Cela signifie que les grands objectifs de ce projet et ses principes d’élaboration sont en phase avec ce que nous attendons d’une grande opération d’investissement hospitalier.
Cette éligibilité est une étape importante, vous l’avez dit, mais elle reste une première étape. Il faudra encore obtenir une validation définitive du COPERMO avant de pouvoir lancer le projet et annoncer une aide financière nationale.
La validation définitive implique, notamment, que le projet de modernisation de l’AP-HM passe avec succès l’étape de la contre-expertise indépendante, menée sous l’égide du Secrétariat général pour l’investissement.
La ministre Agnès Buzyn souhaite évidemment un plein succès à ce projet, convaincue qu’il constitue un véritable levier de transformation pour placer l’AP-HM dans une dynamique forte de progrès, au service des patients de Marseille et de tout le département des Bouches-du-Rhône.
C’est une occasion à ne pas manquer. Et c’est pourquoi l’ensemble des professionnels de l’AP-HM doivent se mobiliser, dès à présent, pour satisfaire les recommandations émises par le COPERMO. L’objectif est double : renforcer la cohérence du projet médical de répartition des activités entre les différents sites hospitaliers ; faire contribuer ce projet au redressement financier.
L’exigence que nous avons pour ce projet d’investissement hospitalier majeur tient non pas seulement au soutien financier qu’apportera l’État, mais aussi et surtout à l’ambition partagée de hisser le futur outil de travail de l’AP-HM au meilleur niveau de qualité et de performance.
La ministre Agnès Buzyn a toute confiance dans les capacités des équipes de l’AP-HM à poursuivre la dynamique engagée, en concertation avec les représentants des personnels et du corps médical, pour mener le projet jusqu’à une décision finale favorable et faire la démonstration que le CHU de Marseille est capable de s’engager sur la voie du redressement.
Dans cette perspective, l’appui de tous les partenaires de l’AP-HM sera nécessaire, en particulier celui des collectivités territoriales, qui ont déjà fait part de leur grande attention à ce dossier stratégique pour l’avenir de Marseille, et dont la ministre Agnès Buzyn rencontrera prochainement les représentants.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de ces précisions. Je sais en effet que Mme la ministre est très active sur ce dossier et a organisé une rencontre la semaine prochaine.
conséquences de la perte de la compétence eau-assainissement dans l’aude
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, auteur de la question n° 0179, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Mme Gisèle Jourda. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les conséquences de la perte de la compétence eau-assainissement pour des communes et des communautés de communes de l’Aude et de son transfert aux intercommunalités.
Application des articles 64 et 66 de la loi NOTRe, ce sujet a fait l’objet d’une proposition de loi de nos collègues Les Républicains, adoptée unanimement par le Sénat le 23 février 2017, voilà presque un an. Renvoyée en commission par nos homologues députés, elle y a connu, disons-le, et de façon positive, une sorte de clonage puisque c’est désormais une proposition de loi de députés La République En Marche, à l’intitulé identique et au contenu quasi similaire, qui a été adoptée par l’Assemblée nationale le 30 janvier dernier.
Examinons, madame la secrétaire d’État, la problématique et les enjeux.
Par la loi NOTRe, la commune perdra obligatoirement, le 1er janvier 2020, la maîtrise de ce bien naturel qu’est l’eau de source qui naît sur son territoire, alimente la population et participe fortement au développement de l’économie locale.
Une telle application de la loi se heurte aux pratiques et coutumes locales. C’est ainsi que la commune de Saint-Just-et-le-Bézu, toute petite commune de l’Aude, perdra cette compétence au profit de la communauté de communes des Pyrénées audoises, tout comme la commune de Gincla, également concernée.
Symétriquement, l’intercommunalité ne dispose pas toujours du personnel qualifié et ne peut se permettre des dépenses nouvelles, dans un contexte de dépenses publiques contraint. Elle risque donc de mettre en fermage ce bien et le coût, plus important, se répercutera sur le budget des collectivités et sur celui des usagers, avec une hausse du prix de l’eau très importante pour certaines petites communes. C’est le cas de la communauté de communes de la Montagne noire, qui se trouverait fragilisée financièrement par l’acquisition de cette compétence et ne pourrait l’exercer dans des conditions cohérentes.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les deux propositions de loi que je viens de vous citer démontrent bien la volonté des parlementaires à trouver un aménagement. Elles donnent en effet la possibilité aux communes de s’opposer au transfert des compétences eau et assainissement avant le 1er juillet 2019, de sorte que ces compétences puissent demeurer de leur ressort.
Le Gouvernement compte-t-il, madame la secrétaire d’État, inscrire très rapidement ce texte à l’ordre du jour de la Haute Assemblée ou alors va-t-il faire en sorte que les dispositions portées par ces deux propositions de loi successives disparaissent dans les affres de la navette parlementaire ? Les élus, surtout les élus ruraux, attendent un engagement fort de sa part. (Mme Patricia Morhet-Richaud ainsi que MM. Daniel Gremillet et Olivier Cigolotti applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Gisèle Jourda, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Jacqueline Gourault, qui n’a pu être présente ce matin.
Vous l’avez dit, la loi NOTRe attribue à titre obligatoire aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération les compétences « eau » et « assainissement ».
Le législateur a souhaité accorder aux collectivités et établissements publics concernés un délai raisonnable, leur permettant d’organiser au mieux l’exercice de ces nouvelles compétences. Ainsi, pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération, les compétences « eau » et « assainissement » demeurent optionnelles jusqu’au 1er janvier 2020.
Toutefois, le Sénat a adopté, le 23 février 2017, comme vous l’avez rappelé, une proposition de loi pour le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d’agglomération. Le Gouvernement est à l’écoute de cette préoccupation. Le Premier ministre a confié à Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, le soin de conduire un travail de concertation approfondi pour identifier les difficultés liées à la mise en œuvre du transfert obligatoire de ces compétences.
De ce travail a émergé un accord, traduit dans la proposition de loi déposée le 21 décembre 2017 et adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 31 janvier 2018.
Ce texte donne tout d’abord la possibilité aux communes de s’opposer au transfert des compétences « eau » et « assainissement » avant le 1er juillet 2019, si un certain nombre d’entre elles s’expriment en ce sens, de sorte que ces compétences puissent demeurer de leur ressort.
Cette possibilité est ouverte aux communes membres de communautés de communes qui n’exercent pas déjà l’une ou l’autre de ces deux compétences, à titre optionnel ou facultatif. S’il en est fait usage, le transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » à la communauté de communes concernée est alors reporté au 1er janvier 2026, sans que les communes puissent de nouveau s’y opposer. En outre, si, après le 1er janvier 2020, une communauté de communes n’exerce pas les compétences relatives à l’eau et à l’assainissement, l’organe délibérant de la communauté de communes peut, à tout moment, se prononcer sur l’exercice de ces compétences par la communauté, mais les communes membres garderont la possibilité de s’y opposer en faisant jouer la minorité de blocage.
Vous formulez le vœu, madame la sénatrice, que ce texte soit rapidement présenté à la Haute Assemblée. Le Gouvernement aura à cœur d’aller en ce sens puisque la concertation visant à dégager une bonne solution a été menée avec une grande efficacité.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.
Mme Gisèle Jourda. Merci, madame la secrétaire d’État. Nous savons parfaitement dans cet hémicycle que Mme Gourault est très sensible à cette problématique, mais nous serons extrêmement vigilants sur le dispositif que vous nous avez présenté, car il suscite des interrogations. Nous en discuterons lors de l’examen du texte.
Nous aurons à cœur de défendre le texte tel qu’il résultait des travaux du Sénat, car il prévoyait des aménagements. Nous ne pouvons pas reculer. Les petites communes doivent pouvoir garder la maîtrise de la gestion de leur eau lorsqu’elles le souhaitent, des communautés de communes ou d’agglomération ne disposant pas des moyens leur permettant d’exercer la compétence.
engorgement des services de l’état civil des communes sièges d’un tribunal d’instance
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, auteur de la question n° 0160, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Daniel Gremillet. Depuis le 2 novembre 2017, les officiers d’état civil des communes sièges d’un tribunal d’instance assurent la gestion obligatoire des pactes civils de solidarité, ou PACS, conclus par les habitants des communes du ressort du tribunal. Il s’agit notamment pour ces communes d’enregistrer les modifications et les dissolutions des PACS dont la conclusion a fait l’objet d’un enregistrement par les tribunaux d’instance avant le 1er novembre 2017.
À titre d’exemple, la commune d’Épinal, chef-lieu du département des Vosges, enregistre environ 345 dissolutions par an et 120 à 180 nouvelles déclarations de PACS. Cette nouvelle charge, qui, selon la jurisprudence du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel, est incluse dans la dotation globale de fonctionnement « pour le service rendu aux résidents de la commune », ne peut donner lieu a priori à une compensation financière.
Cependant, il se trouve qu’une partie des dossiers concerne des habitants d’autres communes dès lors qu’elles se situent dans le ressort du tribunal de grande instance. En conséquence, il me semble que le Gouvernement devrait pouvoir envisager la mise en place non d’une compensation financière, mais d’une indemnisation spécifique. À titre d’exemple, à Épinal, le coût du transfert de la gestion des PACS s’est élevé la première année à 65 329 euros.
Par ailleurs, depuis le 1er mars 2017, en application du plan Préfectures nouvelle génération et du décret autorisant la création d’un traitement de données à caractère personnel relatif aux passeports et aux cartes nationales d’identité, l’instruction des demandes de cartes nationales d’identité peut uniquement se faire au sein des mairies disposant de dispositifs de recueil des données biométriques actuellement utilisés pour les demandes de passeport.
En conséquence, les communes dotées du dispositif doivent gérer un flux de demandes important. En 2017, 3 150 cartes nationales d’identité et 2 600 passeports ont été délivrés à Épinal, pour un montant global de 101 119 euros. Selon les projections de la commune, avec 35 000 euros de compensation, le reste à charge de la commune serait de 66 119 euros. Cette nouvelle prise en charge grève largement le budget des communes.
Pour toutes ces raisons, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour soulager financièrement les communes face au surcroît d’activité lié au traitement des demandes de cartes nationales d’identité et des PACS.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Daniel Gremillet, je vous répondrai au nom de Jacqueline Gourault.
La modernisation du service public peut s’appuyer sur un redéploiement de certaines compétences exercées par l’État vers les communes, pour une plus grande efficacité et plus de proximité. Les deux réformes que vous évoquez, celle des cartes nationales d’identité et celle du pacte civil de solidarité, en sont une parfaite illustration, même si aucune réforme de l’État ne peut se faire sans un dialogue nourri, continu et sincère entre l’État et les collectivités territoriales.
Concernant la réforme des cartes nationales d’identité qui se déploie depuis 2015, le ministère de l’intérieur a engagé une refonte sans précédent des modalités d’instruction de ces titres, avec un triple objectif : simplifier les démarches des usagers, sécuriser la procédure et renforcer la lutte contre la fraude. Pour produire pleinement ses effets, cette dématérialisation impose une limitation du nombre de communes équipées en dispositifs de recueil.
Cette mission ne constitue pas une mission nouvelle que l’État aurait transférée au bloc communal. C’est une mission exercée par les maires depuis des décennies en leur qualité d’agents de l’État.
Cependant, les craintes des maires sont prises en considération. Les échanges avec l’Association des maires de France ont permis d’aboutir à des engagements fermes du Gouvernement, en ce qui concerne notamment les modalités financières de la réforme.
C’est ainsi que l’État a décidé de renforcer son accompagnement financier en faveur des communes équipées d’un dispositif de recueil. La multiplication par deux, de 18 millions à 40 millions d’euros, de la dotation pour les titres sécurisés en 2018 permettra notamment de revaloriser son montant forfaitaire, lequel sera porté à 8 580 euros par équipement et à 12 130 euros lorsque l’activité du dispositif atteint 1 875 titres par an.
J’ajoute que, en sus des 280 stations supplémentaires déjà installées en 2017, ce sont 250 dispositifs de recueil de plus qui sont actuellement en cours de déploiement pour soulager l’activité des communes les plus sollicitées.
Enfin, vous m’interrogez sur la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, qui a organisé un transfert de nouvelles compétences aux officiers d’état civil en matière de changement de prénom et d’enregistrement des PACS.
La question de la compensation financière a été tranchée, le 17 novembre 2016, par le Conseil constitutionnel, qui confirme que la compensation ne peut intervenir qu’en cas de transfert de compétences, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence, au sens juridique du terme, puisque le PACS est une mission exercée au nom de l’État.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Madame la secrétaire d’État, l’objectif du Gouvernement est de décharger la justice des missions ne nécessitant pas de magistrats, sans toutefois octroyer de moyens supplémentaires aux communes. On peut certes saluer la volonté gouvernementale de recentrer la charge des tribunaux sur des missions purement juridictionnelles.
Cependant, il semblerait que vous n’ayez pas mesuré aujourd’hui l’impact de ces mesures. En effet, les communes manquent de moyens humains et se voient contraintes d’investir dans des locaux pour les aménager. Vous proposez de multiplier par deux le niveau de leur accompagnement. Or, si l’on veut permettre une réelle prise en charge, c’est par trois qu’il faudrait le multiplier.
Cette question s’inscrit dans un contexte global d’éloignement du citoyen des services publics et de diminution de leur présence, notamment dans les territoires ruraux. La fiscalité y pénalise en effet directement les déplacements. Faute de transports collectifs, c’est le véhicule personnel qui doit être utilisé.
L’ensemble de cette réforme est largement supporté par les territoires, essentiellement par le contribuable local. C’est véritablement dommageable à la politique de solidarité et d’aménagement du territoire de notre pays.
situation du logement social
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 0191, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de la cohésion des territoires.
M. Daniel Chasseing. Ma question porte sur la situation du logement social.
Le dispositif prévu à l’article 52 de la loi de finances pour 2018 réintroduit dans l’article 126 une baisse concomitante des aides personnalisées au logement, les APL, et des loyers. Même si elle doit s’étaler sur trois ans – 800 millions d’euros en 2018, 1,2 milliard d’euros en 2019, 1,5 milliard d’euros en 2020 –, l’annonce de cette baisse a suscité des craintes de la part des bailleurs sociaux, non seulement pour leur situation financière, mais encore pour leur politique d’investissements, qu’il s’agisse de la construction de logements neufs ou de la rénovation de logements existants.
Vous me pardonnerez de prendre l’exemple de mon département, la Corrèze : les bailleurs sociaux estiment que leur manque à gagner s’élèverait à environ 4 millions d’euros : celui de Corrèze Habitat serait de 1 million d’euros, celui de Brive Habitat de 2 millions d’euros, celui de la COPROD de 600 000 euros, celui de l’Office public de l’habitat d’Égletons de 300 000 euros. Un tel montant est important pour une zone sociogéographique difficile.
Pour compenser le manque à gagner qui résultera de la diminution progressive des APL, le Gouvernement a décidé de moduler plus fortement la cotisation prélevée par la Caisse de garantie du logement locatif social assise sur les ventes de logement afin de financer un fonds de péréquation. Par ailleurs, il a décidé d’augmenter temporairement la TVA applicable aux opérations de construction et de rénovation des logements sociaux.
Cela sera-t-il suffisant pour qu’il n’y ait pas de perdants, comme l’a déclaré le Président de la République ? Je pense naturellement aux ménages disposant de revenus modestes, en particulier à ceux qui souhaitent accéder à la propriété.
Aussi, je vous serais reconnaissant, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer si ces mesures pourront éviter de mettre en difficulté les populations les plus fragiles tout en permettant la poursuite de la construction et de la rénovation des logements sociaux dont la France et les territoires ruraux ont besoin. D’autres mesures sont-elles prévues dans les mois qui viennent, en complément de celles qui ont déjà été annoncées ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Daniel Chasseing, je vous prie de bien vouloir excuser Julien Denormandie, qui ne peut être présent aujourd’hui. Je vous répondrai donc en son nom.
Le Gouvernement a lancé une réforme ambitieuse du secteur du logement social afin de le consolider et de le renforcer par des réformes structurelles.
Cette réforme est fondée sur quatre piliers : l’évolution du mode de financement du secteur, la réorganisation du tissu des opérateurs de logement social, la mise en place de mesures en faveur de l’accession sociale à la propriété et la définition progressive d’une nouvelle politique des loyers.
La première étape a consisté en l’adoption de la loi de finances pour 2018, et plus particulièrement de son article 126. Il prévoit une baisse, sur trois ans, des loyers des ménages modestes du parc social, grâce à la mise en place d’une réduction de loyer de solidarité. Il prévoit également, adossée à cette réduction de loyer de solidarité, une baisse de la dépense publique des aides personnalisées au logement.
À la suite des discussions entre le Gouvernement et les représentants du secteur, cette baisse des aides personnalisées au logement sera mise en œuvre progressivement. Elle sera ainsi limitée à 800 millions d’euros en 2018 et en 2019 pour atteindre 1,5 milliard d’euros en 2020. Cette progressivité est rendue possible par une hausse du taux de 5,5 % à 10 % de la TVA applicable aux opérations de construction et de réhabilitation de logements locatifs sociaux, mesure également prévue dans la loi de finances pour 2018.
La réduction de loyer de solidarité, la RLS, sera lissée sur l’ensemble du parc de logements sociaux, hors logements en outre-mer, logements foyers et logements appartenant à des organismes de maîtrise d’ouvrage d’insertion, non concernés par la RLS. Ce lissage permettra ainsi à l’ensemble des organismes de contribuer de manière équilibrée.
En particulier, l’accueil de ménages bénéficiant des aides personnalisées au logement ne sera en aucun cas pénalisant pour les bailleurs. Par ailleurs, une péréquation renforcée, via la Caisse de garantie du logement locatif social, est aussi instaurée pour aider les organismes les plus fragiles et faciliter la restructuration du secteur.
En Corrèze, sept organismes sont actifs, dont quatre uniquement, ou presque uniquement, dans ce département. Ils devront réaliser une réduction de loyer de solidarité pour les bénéficiaires de l’aide personnalisée au logement. La contribution globale des organismes de logement social de la Corrèze sera proportionnellement la même que celle qui est consentie à l’échelon national.
Afin d’accompagner financièrement le secteur, plusieurs mesures de soutien à l’exploitation et à l’investissement sont également prévues dès 2018.
Ces mesures prévoient notamment une stabilisation du taux du livret A sur deux ans à 0,75 % ; un allongement de la maturité des prêts consentis par la Caisse des dépôts et consignations aux bailleurs, dont l’appel à manifestation d’intérêt sera lancé dès le 15 février prochain ; la mise en place par la Caisse des dépôts et consignations d’une enveloppe de remise actuarielle de 330 millions d’euros fléchée vers le soutien à la démolition et vers la renégociation de dette ; la mise en place de 2 milliards d’euros supplémentaires de prêts de haut de bilan bonifiés par Action Logement fléchés vers le soutien à l’investissement, dont la souscription sera lancée dès avril ;…
M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. … la mise en place d’une enveloppe de 4 milliards d’euros de prêts à taux fixe pour accompagner la restructuration du secteur et l’investissement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, et des mesures que vous venez d’annoncer. Elles sont attendues, notamment dans les départements ruraux, où les locataires et les offices sont très fragiles. Ces derniers doivent être confortés afin de leur permettre de poursuivre les investissements nécessaires dans le logement, y compris dans les communes rurales et dans les territoires difficiles. Il s’agit d’y maintenir la vie et la mobilité, mais aussi de faire en sorte que les loyers des locataires à faibles revenus n’augmentent pas.
finances des territoires touristiques de montagne
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteur de la question n° 0156, transmise à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.