Sommaire

Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann

Secrétaires :

Mme Annie Guillemot, M. Dominique de Legge.

1. Procès-verbal

2. Élections de sénateurs

3. Communication relative à une commission mixte paritaire

4. Ordonnance créant l’établissement public Paris La Défense. – Adoption définitive des conclusions d’une commission mixte paritaire

Discussion générale :

M. Philippe Bas, président de la commission des lois, en remplacement de M. Mathieu Darnaud, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires

M. Julien Bargeton

M. Pierre Ouzoulias

M. Hervé Marseille

M. Xavier Iacovelli

M. Jérôme Bignon

M. Jacques Mézard, ministre

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire.

Suspension et reprise de la séance

5. Fin de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures. – Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi

Discussion générale :

M. Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission des affaires économiques

M. Fabien Gay

Mme Françoise Férat

M. Roland Courteau

M. Jérôme Bignon

M. Joël Labbé

M. Frédéric Marchand

M. Jean-Marc Boyer

M. Pierre Cuypers

M. Nicolas Hulot, ministre d’État

Clôture de la discussion générale

Question préalable

Motion n° 1 de la commission.Mme Élisabeth Lamure, rapporteur ; M. Roland Courteau ; M. Nicolas Hulot, ministre d’État ; M. Ronan Dantec ; M. Jérôme Bignon ; Mme Sophie Primas ; M. Fabien Gay ; M. Frédéric Marchand ; Mme Angèle Préville. – Adoption, par scrutin public n° 47, de la motion entraînant le rejet du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance

6. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

7. Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations. – Adoption en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale :

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois

Mme Françoise Gatel

M. Éric Kerrouche

M. Jérôme Bignon

Mme Maryse Carrère

M. Arnaud de Belenet

M. Pierre-Yves Collombat

Clôture de la discussion générale.

Article 1er

Amendement n° 28 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 40 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 34 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 21 rectifié ter de Mme Pascale Bories. – Retrait.

Amendement n° 7 rectifié de M. René Danesi. – Retrait.

Amendement n° 15 rectifié de M. René Danesi. – Rejet.

Amendement n° 18 rectifié ter de M. Daniel Laurent. – Retrait.

Amendement n° 41 du Gouvernement. – Rejet.

Amendements identiques nos 25 rectifié bis de M. André Reichardt et 26 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 19 rectifié quater de M. Daniel Laurent. – Retrait.

Amendement n° 20 rectifié quater de M. Daniel Laurent. – Retrait.

Amendement n° 2 rectifié de M. Jérôme Bignon. – Retrait.

Amendement n° 10 rectifié bis de M. René Danesi. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Mme la présidente

Articles additionnels après l’article 1er

Amendement n° 8 rectifié de M. René Danesi. – Retrait.

Amendement n° 9 rectifié de M. René Danesi. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 1er bis

Amendement n° 35 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 3 rectifié bis de M. Jérôme Bignon. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 1er bis

Amendement n° 16 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Non soutenu.

Article 2

M. Stéphane Artano

Amendement n° 22 rectifié bis de M. François Patriat. – Retrait.

Amendement n° 33 de M. Stéphane Artano. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 3

Amendement n° 36 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 42 du Gouvernement. – Rejet.

Amendements identiques nos 24 rectifié bis de M. Guy-Dominique Kennel et 27 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 4

Amendement n° 37 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 43 du Gouvernement. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 5 – Adoption.

Article additionnel après l’article 5

Amendements identiques nos 23 de M. François Patriat et 38 de M. Pierre-Yves Collombat. – Retrait de l’amendement n° 23 ; rectification de l’amendement n° 38.

Amendement n° 38 rectifié de M. Pierre-Yves Collombat. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 6

Amendement n° 4 rectifié de M. Jérôme Bignon. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 6

Amendement n° 17 rectifié ter de M. Daniel Laurent. – Retrait.

Article 7 (suppression maintenue)

Article 8 (supprimé)

Article 9 (nouveau)

Amendement n° 44 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 39 de M. Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Adoption de l’article.

Vote sur l’ensemble

M. Pierre-Yves Collombat

M. Jérôme Bignon

Mme Françoise Gatel

Mme Jacqueline Gourault, ministre

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

8. Ordre du jour

Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

compte rendu intégral

Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Annie Guillemot,

M. Dominique de Legge.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Élections de sénateurs

Mme la présidente. En application de l’article 32 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, une communication de laquelle il résulte que, à la suite des opérations électorales du dimanche 17 décembre 2017, M. Yves Bouloux a été proclamé sénateur de la Vienne, Mme Évelyne Perrot a été proclamée sénatrice de l’Aube et Mme Dominique Verien, sénatrice de l’Yonne.

Le mandat de nos collègues a débuté ce lundi 18 décembre à zéro heure.

3

Communication relative à une commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le second projet de loi de finances rectificative pour 2017 n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.

4

 
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Discussion générale (suite)

Ordonnance créant l’établissement public Paris La Défense

Adoption définitive des conclusions d’une commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense (texte de la commission n° 145, rapport n° 144).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le président de la commission.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 2

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale, en remplacement de M. Mathieu Darnaud, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ne nous y trompons pas : c’est un vrai texte de décentralisation que nous examinons, après l’accord survenu en commission mixte paritaire, la semaine dernière. Il s’agit de la ratification de l’ordonnance du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense, qui a été contestée devant le Conseil d’État.

Comme chacun le sait, alors qu’il y avait deux établissements – un établissement de gestion et un établissement d’aménagement –, il n’y en aura désormais plus qu’un seul, l’établissement public Paris La Défense. Je le disais, c’est un vrai texte de décentralisation, parce que cet établissement public sera dominé par les représentants du département des Hauts-de-Seine.

La Défense est le premier quartier d’affaires d’Europe. Il était donc important de concentrer les responsabilités dans un seul établissement public, pour que de nouvelles étapes de son développement puissent être franchies, notamment au moment où la Grande-Bretagne se retire de l’Union européenne, ce qui peut être l’occasion de créer de nouvelles opportunités pour la place de Paris.

L’ordonnance que nous devons ratifier aujourd’hui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2018. Son contenu a été amélioré au cours de la navette et en commission mixte paritaire. Je tiens à rendre hommage à notre collègue Mathieu Darnaud, qui a fourni un travail considérable, mais aussi à Isabelle Florennes, rapporteur de ce texte pour l’Assemblée nationale.

Sur l’initiative du Sénat, la propriété des parkings a été octroyée à cet établissement public, ce qui lui permettra de disposer de ressources pour l’exercice de ses missions. Sur l’initiative cette fois de l’Assemblée nationale, les compétences de l’établissement public en matière de sécurité des biens et des personnes ont été élargies, notamment avec la mise en place d’un système de vidéoprotection, ainsi qu’en matière de circulation routière et de propreté des voies et espaces publics, pour mieux répondre aux attentes des usagers, particuliers comme entreprises.

Un accord a été trouvé en commission mixte paritaire pour, selon le souhait du Sénat, permettre à l’établissement public de créer des filiales ou de participer à des sociétés publiques locales dans le cadre de sa mission de promotion du site de la Défense et pour lui donner des moyens d’attirer de nouvelles entreprises et de nouveaux investisseurs. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose d’adopter les conclusions de la commission mixte paritaire sur ce projet de loi de ratification de l’ordonnance du 3 mai 2017. (M. Julien Bargeton applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les sénateurs, nous revenons devant la Haute Assemblée après une commission mixte paritaire conclusive. Je veux à mon tour saluer le travail des deux rapporteurs, Mathieu Darnaud pour le Sénat et Isabelle Florennes pour l’Assemblée nationale, qui ont œuvré ensemble pour parvenir à cette solution consensuelle.

À la suite d’une ordonnance signée le 3 mai 2017 par le précédent gouvernement, quelques jours avant l’élection présidentielle, nous avons repris ce dossier qui avait été déjà très largement engagé sous le quinquennat précédent.

Comme vient de le relever à juste titre le président de la commission des lois, il s’agit d’une opération de simplification et de regroupement de deux entités, l’EPADESA et DEFACTO, pour donner plus d’efficacité au développement du quartier d’affaires Paris La Défense, qui est aujourd’hui le plus important d’Europe. En outre, dans le contexte du Brexit, nous avons tous – Nation, République, acteurs – la volonté de conforter encore davantage ce quartier d’affaires.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Oui !

M. Jacques Mézard, ministre. Le sujet est important. L’expérience de ces dernières années a révélé des difficultés récurrentes en matière de gestion de Paris La Défense – la question des dalles et des parkings a notamment été souvent à l’ordre du jour. Il s’agit à la fois d’avoir une meilleure visibilité et, dans un processus que le président de la commission des lois a qualifié de « décentralisation »,…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Oui !

M. Jacques Mézard, ministre. … de permettre aux collectivités locales d’assurer la responsabilité pleine et entière de la gestion et du développement de ce quartier d’affaires.

Bien sûr, l’État gardera un œil sur ce dossier, mais un œil bienveillant.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Tant mieux !

M. Jacques Mézard, ministre. Il est en effet justifié que l’État puisse le suivre, même si, et c’est sa caractéristique essentielle, le dossier est remis entre les mains du conseil départemental des Hauts-de-Seine, des communes qui sont directement concernées par ce projet et du conseil régional.

J’ai également entendu – mais il m’eût d’ailleurs été impossible de ne pas les entendre ! – les inquiétudes de certaines communes directement impactées qui craignent précisément de ne plus être suffisamment entendues sur des dossiers qui relèvent de leur territoire. Je ne doute d’ailleurs pas, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’un d’entre vous relaiera ces inquiétudes dans un instant.

Je tiens à rappeler que, de toute manière, l’État veillera à l’équilibre général et que, dans le cadre d’une opération d’intérêt national, le rôle du préfet est déterminant, notamment en matière d’autorisations d’urbanisme. Par conséquent, tous doivent pouvoir considérer que les intérêts de chacun seront préservés.

Je me réjouis que les deux assemblées aient pu parvenir à un texte consensuel, ce que méritait le sujet, au regard de son importance.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions essentielles auxquelles nous sommes parvenus, dans un souci commun de faire avancer ce dossier qui a souvent généré beaucoup trop de complexité. Un certain nombre de difficultés justifiaient que l’on élabore une gouvernance spécifique, en particulier les questions d’entretien, de surveillance à l’intérieur du périmètre et aussi de développement.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement, par ma voix, indique son accord sur les conclusions de la commission mixte paritaire en invitant la Haute Assemblée à voter en faveur du texte issu de ses travaux. (MM. le président de la commission des lois et Julien Bargeton applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton.

M. Julien Bargeton. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, saluons ensemble la qualité du travail parlementaire qui a été ici réalisé, dans la clarification des périmètres d’intervention du nouvel établissement public Paris La Défense, dans la prise en compte des difficultés liées à l’insuffisance des investissements au cours des dernières années et dans le tracé des lignes de démarcation mettant au clair les responsabilités de l’État aménageur et des collectivités territoriales gestionnaires. Quand on veut se mettre d’accord, on peut !

Aussi bien au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, tous ont reconnu la nécessité de regrouper dans une structure décentralisée les deux établissements chargés de l’aménagement et de la gestion de La Défense, afin de constituer un pilotage unifié du quartier d’affaires propre à pérenniser son activité et son attractivité. Ce postulat a fondé la nécessité d’une coopération territoriale approfondie, laissant une latitude appréciable aux collectivités concernées pour assurer, demain, les modalités pratiques de gouvernance du nouvel établissement. Leur capacité à moderniser et à sécuriser le quartier historique, à rénover ses accès et à l’ouvrir sur les territoires environnants constituera leur combat prioritaire.

Nous apprécierons les résultats du nouveau dispositif essentiellement à la lumière de la réussite de cette mission, d’autant que, cette fois, une stratégie de développement pluriannuel a été élaborée. C’est un plan d’investissement, financé à hauteur de 360 millions d’euros au moins, sur dix ans, par les collectivités territoriales qui viendra désormais épauler la gestion coopérative de ce territoire d’intérêt national.

À cet égard, la volonté du législateur est doublement satisfaite : par l’intégration de nouveaux instruments nécessaires au développement de cette place financière, mais aussi par le respect du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales dans l’esprit de la décentralisation. Nous ne pouvons pas sans cesse réclamer davantage de décentralisation et la contester lorsqu’elle advient.

Quant aux dispositions qui pouvaient potentiellement créer des points de blocage – je pense notamment à la définition des périmètres d’intervention, modifiables par décret, ou à la possibilité de créer des filiales et d’acquérir des participations dans des sociétés publiques locales –, elles ont fait l’objet d’un accord entre nos deux assemblées.

En définitive, c’est un texte de consensus, ce consensus qui a pu être dégagé en commission mixte paritaire, notamment grâce à l’esprit constructif de notre rapporteur, Mathieu Darnaud, que nous ne manquons pas féliciter pour l’important travail qu’il a abattu.

C’est cet esprit qui est à l’origine de la modification de l’article 3 du projet de loi, afin de donner la possibilité à l’établissement public Paris La Défense, dans un cadre bien défini et sous certaines conditions, de recourir à des filiales pour engager une politique d’attractivité sur ce territoire.

Par conséquent, chers collègues, c’est animés du souhait que nous partageons tous de répondre aux fortes attentes exprimées par nos territoires, malgré certaines divergences qui ne manqueront pas d’être évoquées lors de ce débat, que les sénateurs du groupe La République En Marche souhaitent que le texte qui nous est soumis soit adopté et l’ordonnance ratifiée.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons a pour objet de ratifier une ordonnance prise par le Président de la République François Hollande le 3 mai 2017.

Déposé le 10 mai 2017 sur le bureau du Sénat, soit quatre jours avant la fin de la mandature présidentielle, il a pour conséquence de décentraliser totalement la gestion du quartier d’affaires de La Défense et procède à la fusion de l’établissement chargé de la gestion de son cœur historique et de l’établissement chargé de son aménagement et de celui d’une zone plus vaste, composée notamment du site d’opérations d’intérêt national Seine-Arche, couvrant un tiers du territoire de la commune de Nanterre.

Cette gestion unique met fin à une pluralité d’intervenants que le Gouvernement a jugé préjudiciable au bon fonctionnement du quartier d’affaires et de l’aménagement de sa périphérie, lors du comité interministériel du Grand Paris, qui s’est tenu le 15 octobre 2015. L’objectif du Gouvernement, tel qu’il l’avait exposé au mois de mai 2016, était de confier la responsabilité principale de son pilotage et de son financement aux collectivités locales. Reprenant les conclusions d’un rapport rendu par les préfets de l’Île-de-France et des Hauts-de-Seine, ce texte avait pour ambition de « réinventer le modèle de la Défense pour rassembler tous les acteurs ».

Mes chers collègues, le texte soumis à notre approbation s’éloigne considérablement de cette première intention. En effet, le conseil départemental des Hauts-de-Seine disposera seul de la majorité des sièges du conseil d’administration du nouvel établissement public. Sans même attendre la promulgation de ce projet de loi, le conseil départemental a désigné ses neuf membres, qui appartiennent uniquement à son exécutif.

Cette gouvernance confiée exclusivement au conseil départemental des Hauts-de-Seine pose plusieurs problèmes, d’ordre juridique, politique et économique.

Le nouvel établissement disposera de droits exclusifs sur les 160 hectares du quartier d’affaires historique. Or il reçoit aussi les attributions exercées par l’EPADESA, l’établissement public d’aménagement de La Défense Seine Arche, dans un vaste territoire de 400 hectares se trouvant essentiellement sur la commune de Nanterre. Vous l’avez souligné, monsieur le ministre, le présent texte ne définit pas les formes de la collaboration qui devra nécessairement se mettre en place entre le département des Hauts-de-Seine et la commune de Nanterre pour gérer un espace représentant pourtant un tiers de sa superficie totale.

En droit, dans la rédaction actuelle du texte, tout se passe comme si la commune de Nanterre était subordonnée à une autre collectivité territoriale sur son propre territoire. Autrement dit, l’État a transféré ses prérogatives régaliennes à une seule collectivité, aux dépens d’une autre. Cette exclusivité nous semble discutable. À tout le moins, il eût été de bonne politique d’encadrer la relation de ces deux collectivités par des règles juridiques claires.

Sur un autre plan, à l’échelle régionale et nationale, le quartier d’affaires de La Défense, au quatrième rang mondial par son importance, est considéré comme le « fer de lance de l’attractivité de la région-capitale ».

La sortie probable du Royaume-Uni de l’Union européenne confère au quartier d’affaires une importance supplémentaire et impose de s’interroger sur sa capacité à accueillir de nouvelles activités. Cette réflexion est l’un des volets qui animent un débat plus général sur l’organisation de la métropole urbaine parisienne, sa gouvernance et son développement économique.

Le Président de la République devrait annoncer prochainement ses propositions sur ce dossier. Il est donc surprenant que, sans attendre la clôture de ce débat, le présent texte ait fait le choix de confier au seul département des Hauts-de-Seine la gestion d’un quartier d’affaires dont tout le monde convient qu’il joue un rôle décisif dans le fait métropolitain.

Par ailleurs, on peut se demander, cum grano salis, ce qu’il adviendrait de ce texte dans le cas d’une disparition des départements de la petite couronne ou de la fusion des Hauts-de-Seine et des Yvelines, sur laquelle le Gouvernement aura très prochainement à donner un avis.

M. Philippe Dallier. C’est un leurre !

M. Pierre Ouzoulias. De façon plus générale, un examen comparatif des situations mondiales montre que les solutions adoptées pour la gestion des grands quartiers d’affaires reposent plutôt sur la coopération des collectivités principalement engagées dans la gestion du fait métropolitain. Dans de nombreux espaces métropolitains, ce rôle de coordination incombe plutôt aux entités régionales.

Mme la présidente. Il faut conclure mon cher collègue.

M. Pierre Ouzoulias. Je conclus, madame la présidente.

On peut légitimement se demander si le département est le bon échelon pour assumer toutes les obligations qu’impose une telle responsabilité.

Nous ne comprenons pas l’empressement à sceller le destin de ce quartier d’affaires, alors qu’un débat est en cours. Il est parfois urgent d’attendre. En l’occurrence, il aurait été plus juste de mieux équilibrer les pouvoirs des différentes collectivités. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Marseille.

M. Hervé Marseille. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, tout commence en 1956, quand l’architecte Bernard Zerfhuss conçoit le Centre national des industries et des techniques, dont la vocation reste encore hypothétique, mais dont l’acronyme, CNIT, restera lors de l’inauguration par le général de Gaulle, au mois de septembre 1958. Au même moment était créé l’établissement public pour l’aménagement de La Défense, l’EPAD ; La Défense tire son nom de l’action du 19e régiment de marche qui, en 1870, résista à l’avancée prussienne venant de Rueil-Malmaison.

C’était avant.

En 1982, après donc, le président François Mitterrand lance le projet de l’Arche de la fraternité, nom oublié par l’usage et remplacé par celui de « Grande Arche », un monument que vous pouvez toujours voir depuis la place de l’Étoile, dans cette belle et grande perspective. (M. Pierre Ouzoulias sexclame.)

Aujourd’hui, soixante ans après, La Défense est le quatrième quartier d’affaires mondial et le premier quartier d’affaires européen, avec un bassin d’emploi de un million et demi de personnes. Il s’agit donc d’un dossier extrêmement important.

Pendant soixante ans, sous tous les gouvernements, l’État aménageur n’a pas fait son devoir. Les infrastructures en attestent : les quatorze tunnels qui passent sous le site ne sont pas aux normes de la directive européenne de 2004, la dalle est très fragilisée, le sous-sol est une friche non aménagée, comportant des espaces abandonnés et squattés, les conduites de fluides ne sont pas toutes identifiées, la desserte automobile est un labyrinthe inorganisé et instable, l’accès en sous-sol des tours est parfois décourageant. Je vous conseille de prévoir plusieurs jours pour retrouver un bureau à La Défense, tant l’accès est compliqué… (Sourires.)

Il fallait donc décentraliser.

Le succès de la commission mixte paritaire est une bonne nouvelle, beaucoup l’ont rappelé, pour l’attractivité de la région-capitale et de la métropole. Avec le Brexit, il est en effet important que la place de Paris puisse demeurer une référence.

Bien sûr, La Défense attire : 250 000 mètres carrés sont disponibles et 250 000 mètres carrés sont en construction – des tours pour des grandes sociétés telles que Saint-Gobain ou Total. D’autres grands groupes financiers européens, qui pourraient s’installer dans d’autres capitales économiques – Francfort, Londres, Berlin –, choisissent Paris. Or, ce qui est bon pour La Défense est aussi bon pour la région et bon pour notre pays, et pas seulement pour le site lui-même.

C’est également une bonne nouvelle pour la décentralisation. Dans ce dossier, l’État a montré qu’il pouvait être un bon initiateur, avoir une bonne vision, aménager et construire. Reste que l’État est un piètre gestionnaire et un piètre développeur. Aujourd’hui, en confiant la gestion aux collectivités locales – on dira qu’elles ont beaucoup reçu et qu’elles peuvent un peu donner –, des investissements sont attendus. Le levier donné au conseil départemental des Hauts-de-Seine avec les autres collectivités qui l’entourent permettra ces investissements et la rénovation nécessaire. En effet, La Défense n’est pas seulement un lieu de travail et d’emploi ; il va falloir transformer ce site pour que l’on y trouve des loisirs, de la culture, du logement, de l’aménagement, pour, en d’autres termes, en faire un lieu de vie qui attire à l’extérieur. À mon sens, les collectivités pourront le faire.

J’ai entendu les préoccupations de mon collègue Pierre Ouzoulias s’agissant de Nanterre. Je suis convaincu que les collectivités territoriales concernées sauront s’entendre, elles sont au sein de la même intercommunalité. Au demeurant, quand il a fallu construire la U ARENA et le nouveau siège du conseil départemental, la ville de Nanterre a su trouver le chemin du conseil départemental et faire naître un accord. Par conséquent, je ne doute pas que, demain, d’autres discussions pourront avoir lieu avec l’ensemble des collectivités.

Pour toutes ces raisons, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec satisfaction que le groupe Union Centriste votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli.

M. Xavier Iacovelli. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui amenés à nous prononcer sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense. Nous parlons ici du premier centre d’affaires européen, La Défense représentant en effet 150 000 emplois et 3,2 millions de mètres carrés de bureaux.

À l’aube du Brexit, La Défense doit faire l’objet d’une réforme en profondeur, d’autant plus que, depuis quelques années, nous faisons face à des difficultés liées à la répartition complexe des compétences des deux établissements. La gouvernance bicéphale, confiée, d’un côté, à un établissement aménageur, l’EPADESA, et, de l’autre, à un établissement gestionnaire, DEFACTO, est à bout de souffle, et le bon fonctionnement de La Défense en est affaibli.

Cette réforme doit lui permettre à la fois d’être innovante et de consolider son rang de premier centre d’affaires européen. Soyons clairs, l’enjeu du premier centre d’affaires européen n’est pas seulement départemental : il est métropolitain, régional, national ! Reste que nous ne pouvons pas sacrifier sur l’autel de l’efficacité toute notion de démocratie et de concertation. Pour garantir la mise en œuvre d’une réforme ambitieuse, nous devons ainsi prendre le temps de la réflexion et associer tous les acteurs concernés, au premier rang desquels les communes.

Or, à la lecture du projet que nous sommes appelés à voter, on constate une remise en cause complète de la démocratie dans ce que deviendra l’établissement public Paris La Défense. Nous exprimons plusieurs désaccords avec le texte qui nous est aujourd’hui soumis. Nous avions d’ailleurs déposé deux amendements lors de la réunion de la commission mixte paritaire, mais, bien sûr, ils ont été rejetés.

Le premier point de désaccord porte sur l’article 4, relatif à la composition du conseil d’administration. Il nous semble en effet primordial que le pluralisme soit respecté. Or, sur les dix-sept membres du conseil d’administration, neuf sont issus du conseil départemental et nous nous étonnons que pas même un siège ne soit attribué à l’opposition. Ce n’est pas acceptable.

Le second point de désaccord est encore plus important et porte sur l’article 2, qui donne à l’établissement public Paris La Défense la possibilité d’intervenir en dehors de son périmètre historique d’intervention.

Contrairement à ce qu’avait annoncé le précédent gouvernement dans un communiqué de presse du 27 mai 2016, l’établissement public n’aura pas l’obligation de passer des conventions d’aménagement avec les communes concernées. Je cite le communiqué : « Au-delà de ce périmètre, l’établissement disposera d’une compétence non exclusive d’aménagement et de gestion, définie par voie de conventions, notamment afin de garantir la poursuite par le nouvel établissement des opérations déjà engagées par l’EPADESA ».

Or le texte que nous sommes appelés à voter prévoit le contraire. Il n’impose pas d’obligation de conventionner entre l’établissement public Paris La Défense et les communes, mais prévoit simplement un avis consultatif des acteurs concernés, et on connaît le sort de ces avis…

Je tiens à rappeler que le périmètre non exclusif de la gouvernance de l’établissement Paris La Défense concerne un tiers du territoire de la ville de Nanterre. Dès lors, pourquoi ne pas revenir à l’ambition initiale, à savoir une obligation de convention entre l’établissement public et la commune ?

Mes chers collèges, nombre d’entre vous ont été responsables d’exécutifs locaux. Qui est à même de se rendre compte de la réalité de nos territoires mieux que notre chambre ? Tel est d’ailleurs le rôle que la Constitution nous confère. Nous demandons simplement que la ville ait son mot à dire sur son territoire.

Notre collègue Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, l’a d’ailleurs parfaitement rappelé sur Public Sénat : « Au Sénat, nous considérons que les communes restent la cellule de base de la démocratie. »

Dès lors, comment accepter qu’un établissement public puisse contrôler un tiers d’une commune sans même être obligé de passer des conventions avec elle ? Quel maire accepterait une telle situation ?

Mes chers collègues, le Président de la République avait annoncé lors de la campagne présidentielle une réforme territoriale d’envergure. Il avait indiqué : « Nous supprimerons au moins un quart des départements, là où ils peuvent être rapprochés de l’une de nos grandes métropoles. […] En concertation avec les élus, nous simplifierons l’administration territoriale en confiant aux services des métropoles les compétences des conseils départementaux où elles se situent. »

Or nous allons voter un texte qui confie la gestion du premier pôle financier non pas à la métropole, mais au département, contrairement à la vision exposée par le Président de la République lors de la campagne présidentielle !

Par ailleurs, nous allons voter un texte dans la précipitation – à cet égard, je rappelle que la Cour des comptes a estimé que la décentralisation du quartier se faisait de manière trop rapide –, alors que la réforme territoriale qui pourrait intervenir dans les mois à venir serait susceptible de conduire à la suppression du département à qui on vient de confier la compétence de l’établissement public !

Si les départements étaient supprimés, monsieur le ministre, quelle entité serait alors chargée de la gestion de cet établissement public ?

M. Philippe Dallier. La métropole ! (Sourires.)

M. Xavier Iacovelli. Les communes ? La région Île-de-France ? La métropole du Grand Paris ? L’État ? La confusion est totale à deux ou trois mois de cette réforme territoriale.

Après la naissance de la métropole du Grand Paris, quel sera l’avenir de nos départements ? Quelle sera la gouvernance de l’établissement public Paris La Défense ? Ne devrions-nous pas attendre afin d’avoir une vision à long terme ?

À quoi servira une métropole, en l’occurrence celle du Grand Paris, si elle n’a pas la compétence pour gérer le plus grand quartier d’affaires de France et d’Europe ? Quelle logique aura donc conduit à sa création ?

Enfin, permettez-moi de rappeler, comme l’a fait M. le rapporteur, que le Conseil d’État, saisi par le comité d’entreprise de l’EPADESA sur un éventuel vice substantiel lié à la non-consultation des communes concernées, se prononcera sur cette question aujourd’hui même, lundi 18 décembre 2017.

Allons-nous barrer la route au juge administratif suprême ? Allons-nous le priver de ses fonctions consultative et juridictionnelle, au prétexte d’aller vite ?

Mes chers collègues, la création d’un établissement public de cette envergure ne peut se faire dans la précipitation et sans réelle concertation.

Aussi, compte tenu du blocage de la majorité à l’Assemblée nationale et de l’absence de clarification de la part du Gouvernement, le groupe socialiste et républicain s’opposera à la ratification de l’ordonnance et vous appelle à faire de même. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, l’article 55 de la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain a habilité le Gouvernement à créer, par ordonnance, un établissement public unique se substituant aux deux établissements préexistants, DEFACTO et l’EPADESA, compétent à la fois pour l’aménagement, la gestion et la promotion du quartier d’affaires de La Défense. Jusqu’à présent, aménagement et gestion du patrimoine étaient répartis au sein de deux entités distinctes, ce qui, semble-t-il, n’a pas toujours été facile à gérer.

Nous saluons l’unification de ces compétences entre les mains d’un seul acteur, car elle devrait favoriser la cohérence des actions menées.

Ce pilotage unifié et un financement plus solide du quartier d’affaires ont été pensés à l’origine en vue de « pérenniser son attractivité ». Dans le contexte du Brexit et de la compétition européenne pour attirer les entreprises et les talents, il s’agit non plus seulement de pérenniser l’attractivité de La Défense, mais bien de retrouver la vision offensive qui a permis, en soixante ans, l’émergence du premier centre d’affaires européen. C’est toujours avec émerveillement que je me promène à La Défense. Je me suis rendu ce matin de bonne heure au ministère de l’environnement, le quartier grouillait déjà d’activité. La Défense est un endroit absolument magique d’un point de vue urbanistique, qu’il convient non seulement de pérenniser, mais également de développer.

Cette vision n’est réalisable que si l’ensemble des acteurs concernés se mobilisent en faveur de la réussite de cet établissement, dans un contexte, je l’ai dit, très concurrentiel. Nous saluons ainsi la place plus importante accordée par ce texte aux collectivités, même si cela est contesté par certains, et la liberté accrue des acteurs locaux.

En effet, l’administration du futur établissement sera assurée par un conseil d’administration de dix-sept membres, dont quinze représenteront les collectivités territoriales et leurs groupements : le département des Hauts-de-Seine, certes en tête, les communes de Courbevoie, de Nanterre et de Puteaux, la ville de Paris, le conseil régional d’Île-de-France et la métropole du Grand Paris, soit une véritable diversité, ce qui n’était pas le cas dans le montage précédent.

Nous espérons que cette représentation accrue des collectivités s’accompagnera également d’une meilleure coordination avec l’État, ce qui n’a pas toujours été le cas dans le passé, loin de là. Il faut mettre un terme à des désaccords qui ont pu être sources de fragilité et de lenteur, notamment en termes d’entretien et de gestion du site, afin que la nouvelle gouvernance soit l’ébauche d’une véritable « équipe de France », soudée autour de la promotion de l’excellence à la française.

Les questions soulevées par ce texte portaient surtout sur le périmètre d’intervention du futur établissement et sur le rôle conservé par l’État.

Sur le premier sujet, les périmètres ont été simplifiés et mieux définis par l’action conjointe des deux assemblées, le Sénat et l’Assemblée nationale, action qu’on peut d’ailleurs saluer. Nous nous réjouissons que la contribution du Sénat permette souvent de faire aboutir les commissions mixtes paritaires. À cet égard, nous saluons le rôle non négligeable qu’ont joué le rapport et le travail en commission mixte paritaire de notre collègue Mathieu Darnaud.

Au lieu des trois périmètres initialement proposés, qui soulevaient de réelles interrogations, la commission mixte paritaire a retenu deux périmètres distincts, l’un exclusif en matière d’aménagement et de gestion portant sur le quartier historique de La Défense, l’autre partagé pour l’aménagement du territoire Seine-Arche. Des compétences nécessaires à la bonne gestion ont également été accordées au nouvel établissement, comme la vidéoprotection et, sous réserve de l’accord des maires concernés – ils restent bien dans la boucle –, des pouvoirs de police en matière de propreté de la voirie et de gestion des déchets.

Nous saluons également le consensus qui a pu être trouvé sur la possibilité ouverte au futur établissement public de procéder, sous certaines conditions, à la création de filiales.

En ce qui concerne le rôle joué par l’État, les débats sur les pouvoirs du préfet de région ont parfois illustré le malaise qui demeure souvent, dans notre pays, pas seulement à La Défense, en matière de coordination entre les différents acteurs concernés.

Pour notre part, nous estimons que l’État a toute sa place dans la gouvernance du futur établissement public, compte tenu de son rôle, qui est certes local, mais également régional et, évidemment, national. L’État doit pouvoir s’opposer aux décisions qui porteraient manifestement atteinte aux intérêts nationaux, en particulier à ses intérêts patrimoniaux, ou au bon fonctionnement des services publics.

Néanmoins, nous pensons que la nouvelle rédaction de ce texte est plus équilibrée dans ce domaine et plus respectueuse des compétences conférées au nouvel établissement.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera bien entendu en faveur de cette dernière version du texte, telle qu’elle résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie l’ensemble des intervenants de leurs observations.

Je répondrai d’abord à l’intervenant du groupe CRCE que j’ai bien entendu les observations qu’il a formulées, lesquelles s’inscrivent dans le droit fil de celles de la commune de Nanterre. Je lui redis que l’État continuera d’être attentif à la préservation des équilibres.

Je dirai ensuite au groupe socialiste et républicain que je comprends mal – ou trop bien ! – les observations qui viennent d’être faites. Qui est allé vite dans cette affaire ? Il me semble qu’il ne s’est rien passé pendant quatre ans, puis qu’on a assisté à une accélération soudaine au cours de l’année 2017, laquelle a commencé par la loi relative au statut de Paris en février, s’est poursuivie avec l’ordonnance du 3 mai 2017, transmise au Sénat de la République le 10 mai. Si ce n’est pas de l’accélération de dernière minute, qu’est-ce que c’est ?

J’ajoute qu’il est clairement indiqué dans l’ordonnance, telle qu’elle a été écrite le 3 mai : « Paris La Défense est administré par un conseil d’administration composé majoritairement de représentants du département des Hauts-de-Seine. En outre, sont représentées les communes de Courbevoie, Nanterre, Paris et Puteaux, ainsi que la région d’Île-de-France et la métropole du Grand Paris. » Il n’appartient pas au législateur de préciser le nombre de membres de la majorité et de l’opposition qui représenteront le conseil départemental au sein de ce conseil d’administration. Cela me paraîtrait d’ailleurs difficilement compatible avec les principes constitutionnels.

Pour ma part, je pense que l’équilibre qui a été prévu est raisonnable. L’État, en ayant veillé à ce que son représentant puisse demander une nouvelle délibération, démontre qu’il entend que l’intérêt national soit préservé.

Telles sont les précisions que je tenais à apporter pour que les choses soient tout à fait claires.

Enfin, je ne pense pas que ce soit une bonne solution de ne rien faire en attendant le développement des opérations du Grand Paris. Nous avons vécu suffisamment d’expériences de ce type pendant plusieurs années pour ne pas refaire les mêmes choses.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte, en ne retenant que les éventuels amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public paris la défense.

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Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 3

Article 2

I. – Le chapitre VIII du titre II du livre III du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense, est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 328-2 est ainsi modifié :

a) Les mots : « les opérations d’intérêt national mentionnées aux 2° et » sont remplacés par les mots : « l’opération d’intérêt national mentionnée au » ;

b) Les mots : « Courbevoie, La Garenne-Colombes, Nanterre et Puteaux » sont remplacés par les mots : « La Garenne-Colombes et Nanterre » ;

c) À la fin, les mots : « avis de ces communes » sont remplacés par les mots : « concertation avec ces communes et le département des Hauts-de-Seine et avis de ces derniers » ;

2° L’article L. 328-3 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « Paris La Défense », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « exerce la mission prévue à l’article L. 328-2 à titre exclusif sur un périmètre couvrant une partie des communes de Courbevoie et Puteaux, délimité par décret en Conseil d’État pris après concertation avec ces communes et le département des Hauts-de-Seine et avis de ces derniers. Sur ce même périmètre, Paris La Défense exerce également, à titre exclusif, la mission de gestion des ouvrages et espaces publics ainsi que des services d’intérêt général. » ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Cette gestion comprend :

« 1° L’exploitation, l’entretien et la maintenance des ouvrages et espaces publics et des services d’intérêt général, y compris leur remise en état ou leur renouvellement ;

« 2° L’animation et la promotion du site dont le périmètre est mentionné au premier alinéa du présent article, en vue notamment de favoriser son rayonnement international auprès des acteurs économiques ;

« 3° La préservation de la sécurité des personnes et des biens. À cette fin, Paris La Défense peut, dans les conditions fixées au chapitre III du titre II et au titre V du livre II du code de la sécurité intérieure, acquérir, installer et entretenir des dispositifs de vidéoprotection. » ;

c) Le troisième alinéa est complété par les mots : « du présent code » ;

3° L’article L. 328-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 328-4. – I. – Dans le cadre de la mission mentionnée à la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 328-3, le président du conseil d’administration de Paris La Défense exerce, en lieu et place des maires des communes concernées, sur le territoire mentionné au même premier alinéa :

« 1° Le pouvoir de réglementation en matière d’arrêt ou de stationnement des véhicules ou de certaines catégories d’entre eux, ainsi que de desserte des immeubles riverains, par dérogation au 2° de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales. Sans préjudice de la compétence générale des officiers et des agents de police judiciaire, les agents de l’établissement public Paris La Défense, agréés à cette fin par le procureur de la République, ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions aux dispositions concernant l’arrêt ou le stationnement des véhicules ;

« 2° Par dérogation à l’article L. 2212-2 du même code, en tant qu’il concerne la propreté des voies et espaces publics, le pouvoir de réglementation dans cette matière. Les agents de l’établissement public Paris La Défense, habilités et assermentés dans les conditions prévues à l’article L. 1312-1 du code de la santé publique, peuvent constater par procès-verbal les contraventions aux dispositions des règlements sanitaires relatives à la propreté des voies et espaces publics.

« Lorsque le président du conseil d’administration mentionné au premier alinéa du présent I prend un arrêté de police dans les cas prévus aux 1° et 2° du même I, il le transmet pour information aux maires des communes concernées dans les meilleurs délais.

« II. – Dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle les pouvoirs mentionnés aux 1° et 2° du I ont été transférés au président du conseil d’administration, un ou plusieurs maires peuvent s’opposer au transfert de chacun de ces pouvoirs. À cette fin, ils notifient leur opposition au président. Il est alors mis fin à ce transfert pour les communes dont les maires ont notifié leur opposition.

« Si un ou plusieurs maires des communes concernées se sont opposés au transfert de leurs pouvoirs de police, le président du conseil d’administration peut renoncer, dans chacun des domaines mentionnés aux mêmes 1° et 2°, à ce que les pouvoirs de police des maires des communes qui n’ont pas notifié leur opposition en application du premier alinéa du présent II lui soient transférés de plein droit. Il notifie sa renonciation à chacun des maires de ces dernières communes dans un délai de six mois à compter de la réception de la première notification d’opposition. Dans ce cas, le transfert des pouvoirs de police prend fin à compter de cette notification. » ;

3° bis L’article L. 328-10 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « aux missions mentionnées à » sont remplacés par les mots : « à la mission mentionnée à la seconde phrase du premier alinéa de » ;

b) À la première phrase du II, les mots : « des compétences mentionnées à » sont remplacés par les mots : « de la mission mentionnée à la seconde phrase du premier alinéa de » ;

4° L’article L. 328-16 est ainsi rédigé :

« Art. L. 328-16. – Pour l’application du premier alinéa des articles L. 328-2 et L. 328-3, l’avis des collectivités territoriales consultées est réputé favorable s’il n’est pas émis dans un délai de trois mois. Pour l’application du deuxième alinéa de l’article L. 328-5, l’avis de l’établissement public territorial et du conseil municipal des communes concernées est réputé favorable s’il n’a pas été rendu dans un délai de trois mois à compter de la réception par l’établissement public ou par la commune du projet d’autorisation du ministre chargé de l’urbanisme. »

II. – Après le 13° de l’article L. 130-4 du code de la route, il est inséré un 14° ainsi rédigé :

« 14° Les agents de l’établissement public Paris La Défense, dans les conditions prévues à l’article L. 328-4 du code de l’urbanisme. »

Article 2
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 4

Article 3

L’article L. 328–6 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense, est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve que leur objet concourt directement à la réalisation de ses missions et sous réserve des compétences dévolues à d’autres personnes publiques, Paris La Défense est habilité à :

« 1° Créer des filiales et acquérir ou céder des participations dans des sociétés publiques locales pour l’exercice de sa mission mentionnée au 2° de l’article L. 328-3 ;

« 2° Acquérir ou céder des participations dans des sociétés publiques locales d’aménagement définies à l’article L. 327-1 pour l’exercice de sa mission mentionnée à l’article L. 328-2. » ;

2° (nouveau) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« L’un au moins des représentants des communes au conseil d’administration de Paris La Défense sur le territoire desquelles une telle filiale ou société exerce son activité est membre du conseil d’administration ou de surveillance de cette filiale ou de cette société. » ;

3° (nouveau) À la fin du dernier alinéa, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux deuxième et troisième alinéas ».

Article 3
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 5

Article 4

L’article L. 328-8 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense, est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Des représentants du personnel de l’établissement peuvent assister au conseil d’administration avec voix consultative. » ;

2° À la seconde phrase du premier alinéa du II, après le mot : « défaut », sont insérés les mots : « de signature de ladite convention ».

Article 4
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 5 bis (début)

Article 5

(Supprimé)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
Article 5 bis (fin)

Article 5 bis

Le second alinéa de l’article L. 328-12 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense, est complété par une phrase ainsi rédigée : « La nouvelle délibération est prise à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés comprenant les représentants d’au moins deux des collectivités territoriales et de leurs groupements mentionnés au premier alinéa du I de l’article L. 328-8. »

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Mme la présidente. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures quarante, est reprise à quinze heures cinquante.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 5 bis (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-717 du 3 mai 2017 portant création de l'établissement public Paris La Défense
 

5

 
Dossier législatif : projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement
Discussion générale (suite)

Fin de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures

Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, après engagement de la procédure accélérée, mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement (projet n° 124, résultat des travaux de la commission n° 157, rapport n° 156).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre d’État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement
Question préalable (début)

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà quelques jours, le 12 décembre, lors du fameux One Planet Summit, la Banque mondiale, cela ne vous aura pas échappé, a annoncé qu’elle mettait fin au financement de la production d’hydrocarbures dès 2019. Je serai sincère : je pense qu’une telle décision n’aurait même pas été envisageable il y a encore quelque temps sans l’accord de Paris et sans notre détermination commune à mettre en œuvre cet accord indispensable pour protéger notre climat, ou plutôt, car l’expression est un peu faible, pour essayer de protéger tout ce qui est essentiel à nos yeux.

Je me souviens que, lors des débats en première lecture du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures, certains d’entre vous m’avaient interrogé sur notre capacité à entraîner d’autres États vers la fin de l’exportation et de l’exploitation des hydrocarbures. La question était en fait : à quoi sert-il, sur un sujet universel, de faire les choses tout seuls ? Certains avaient légitimement émis des doutes, pensant que ce projet de loi nous privait de marges de manœuvre et que nous étions isolés dans notre démarche.

La décision de la Banque mondiale montre que, dans ce domaine, et probablement dans d’autres, lorsque la France montre la voie, elle est souvent écoutée, elle est suivie, comme cela a été le cas lorsque j’ai pris la décision de mettre fin à la vente des véhicules thermiques d’ici à 2040. Depuis, je ne compte plus le nombre d’États ou de grandes agglomérations s’étant fixé les mêmes objectifs, dans des délais d’ailleurs beaucoup plus courts. Cette décision montre également que la cohérence paie et que, aujourd’hui, l’immense majorité des acteurs s’engage inexorablement vers la sortie des énergies fossiles.

Lors du même sommet, auquel je remercie certains d’entre vous d’avoir participé, nous avons aussi lancé la coalition vers la neutralité carbone. Cette coalition regroupe seize pays et trente-deux villes, qui s’engagent à publier le plus rapidement possible, étape après étape, une trajectoire vers la neutralité carbone à l’horizon de la moitié du XXIe siècle. Ces pays, ces villes, dont la liste continue de croître chaque jour, disent simplement que, autour de 2050, ils auront ramené leurs émissions au niveau le plus bas possible et participé à restaurer les écosystèmes afin que le bilan de leurs émissions soit au pire neutre, au mieux négatif. Très concrètement, cela signifie que ces territoires, ces États s’engagent d’une manière déterminée et irréversible vers la sortie des énergies fossiles.

Les énergies fossiles, pardonnez-moi de le rappeler, sont en effet incompatibles avec notre objectif climatique de maintenir le réchauffement de la planète le plus possible en dessous de 2°C. Je sais qu’ici, et ailleurs, personne ne conteste cet objectif.

Cela signifie, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ne sommes pas seuls dans cette démarche et que notre ambition et notre détermination sont partagées. Chacun n’emprunte peut-être pas les mêmes chemins, les mêmes outils, les mêmes modalités, mais nous sommes tous déterminés à laisser les énergies fossiles derrière nous. C’était, je crois, l’une de vos principales objections à l’adoption de ce texte, qui pose une interdiction immédiate de délivrer de nouveaux permis d’exploitation des hydrocarbures sur le territoire national et des limites au renouvellement des concessions déjà acquises.

Non seulement nous ne sommes pas seuls, mais en plus nous avons contribué à créer une dynamique qui ne cesse de s’amplifier. De plus en plus d’acteurs s’engagent en effet pour réduire la consommation de pétrole, de gaz et de charbon, en raison à la fois de leurs conséquences sur notre climat, de leur contribution importante à la détérioration de la qualité de l’air et de leurs effets sanitaires.

Lors de la COP23, la France a rejoint la coalition pour la sortie du charbon, qui rassemble aujourd’hui plus de cinquante acteurs : des États, des villes, des entreprises et des investisseurs qui se désengagent du charbon. En France, EDF et ENGIE ont tout récemment rejoint ce groupe d’acteurs.

En parallèle, de nombreuses villes, comme Paris, Los Angeles, Mexico ou Londres, mais aussi Quito et Cape Town, se sont engagées dans une déclaration à développer des zones « zéro émission » et à ne plus acheter que des bus à zéro émission à partir de 2025.

Qu’on le veuille ou non, la fin des énergies fossiles est en train de s’écrire sous nos yeux.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement revient devant vous parce que, à l’issue de la première lecture, il n’a malheureusement pas été possible, en commission mixte paritaire, de trouver un équilibre entre votre version du texte et celle de l’Assemblée nationale.

Mme Françoise Férat. C’est le moins que l’on puisse dire !

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat. Le 13 décembre 2017, la commission des affaires économiques du Sénat a décidé de déposer une motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi. Malgré les très nombreux apports du Sénat, que je salue ici, notamment sur les parties du texte concernant le stockage du gaz, la commission a en effet considéré que le texte voté par l’Assemblée nationale était trop différent des positions exprimées dans cet hémicycle.

Le texte qui vous est aujourd’hui soumis est donc celui qui a été adopté à l’Assemblée nationale. Cette situation fait très clairement apparaître deux visions très contrastées.

La première assume le choix fait par le Gouvernement d’engager une transformation irréversible de notre modèle énergétique pour retrouver une forme de souveraineté dans ce domaine.

La seconde, que vous avez défendue, mesdames, messieurs les sénateurs, conteste cette approche. Si elle était adoptée, elle introduirait de nombreuses exonérations dans le projet du Gouvernement, s’agissant notamment – nous en avons maintes fois discuté – de l’outre-mer, de la recherche, des usages non énergétiques des hydrocarbures, ou encore, et surtout, des permis déjà déposés, mais non encore instruits.

De mon point de vue, les amendements adoptés au Sénat portaient atteinte à la cohérence du texte, à son ambition et au souhait du Gouvernement d’introduire dans notre droit les principales conséquences de l’accord de Paris, ainsi que les responsabilités qui en découlaient.

Comme l’a déclaré le Président de la République lors du sommet du 12 décembre, gardons à l’esprit que, en l’état, nous sommes en train de perdre la bataille climatique. Dès lors, nous avons le choix entre céder à une forme de résignation ou de fatalisme en continuant à laisser faire les choses et renoncer aux hésitations et aux tergiversations.

C’est pourquoi, à l’occasion de cette nouvelle lecture en séance publique, je vous invite à poursuivre sereinement nos échanges, à débattre des ultimes améliorations que nous pourrions apporter à ce texte.

Nous le faisons sous le regard de nos concitoyens. Je sais que le Parlement a toujours fait preuve de responsabilité sur les questions environnementales. Un certain nombre de lois ont été votées dans une forme de magnifique consensus. C’est ainsi sous votre impulsion qu’a été adoptée la loi Jacob sur l’interdiction des gaz de schiste. C’est aussi sous votre regard qu’ont progressé les grandes étapes législatives de la protection de la planète. Je pense à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ou encore à la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Je sais que vous portez cette exigence pour vos territoires et pour notre pays, démarche que je salue.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite une nouvelle fois à poursuivre nos échanges, pour faire entrer l’accord de Paris dans notre droit et pour écrire ensemble une nouvelle page de la lutte contre le changement climatique. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, alors que la position du Sénat a souvent été caricaturée, ce que je regrette vivement, car c’est très injuste, je tiens à redire l’état d’esprit dans lequel nous avions choisi d’aborder ce texte en première lecture.

Dès lors que nous ne partageons pas l’approche du Gouvernement consistant à interdire une production nationale très résiduelle plutôt que d’agir résolument sur la consommation, nous aurions pu, en effet, nous opposer frontalement et rejeter d’emblée le projet de loi qui nous était soumis.

Au lieu de cela, et parce que l’enjeu climatique exige, au-delà des slogans et des symboles, une action collective efficace et déterminée, notre commission a dès l’origine cherché à améliorer le texte pour lutter véritablement contre le réchauffement planétaire. Le Gouvernement nous disait vouloir interdire la production d’hydrocarbures non pas pour elle-même, mais en raison de son effet sur le climat : nous l’avons donc pris au mot en confrontant les solutions proposées aux réalités du terrain.

Car pour être irréversible, comme vous le souhaitez, monsieur le ministre d’État, l’évolution de notre modèle productif suppose d’être acceptable à la fois sur le plan économique et social. Au Sénat, nous n’oublions pas qu’un développement durable doit impérativement reposer sur trois piliers : l’environnement, le social et l’économie ; et c’est bien cet équilibre que nous avions visé en première lecture. Nos détracteurs nous ont opposé qu’à prévoir trop de dérogations, quand bien même celles-ci seraient strictement encadrées et justifiées, nous aurions dénaturé le texte et affaibli la portée du signal politique. Il me semble au contraire qu’en préférant le symbole à l’efficacité, en rejetant par principe toutes nos propositions, le Gouvernement et sa majorité se sont enfermés dans une approche dogmatique qui manquera sa cible, en n’ayant aucun effet sur nos émissions de gaz à effet de serre.

D’ailleurs, nous contestons à ce gouvernement et à cette majorité le monopole de la lutte contre le changement climatique. Oui, le Sénat est plus que jamais déterminé à agir pour le climat. Oui, nous continuerons, pour cette raison, à défendre très concrètement la place du nucléaire dans le mix électrique, à plaider pour une tarification forte du carbone, à soutenir le déploiement des énergies renouvelables au meilleur coût pour la collectivité, ou à faciliter le développement maîtrisé de l’autoconsommation.

Non, il n’y aurait pas d’un côté les vertueux, adeptes d’un « nouveau monde », et de l’autre les rétrogrades enfermés, pour citer le rapporteur de l’Assemblée nationale, dans « une vision défensive et passéiste de la transition écologique pour notre pays et notre tissu industriel ».

Non, le Sénat n’a pas amendé le projet de loi parce que les sénateurs auraient « manifesté une incompréhension préoccupante des objectifs comme de la portée [du] texte ». En d’autres termes, dans l’esprit du Gouvernement et de sa majorité, il était impossible pour le Sénat d’adhérer à l’objectif tout en proposant une autre marche à suivre, sauf à ce que nous ayons tout simplement mal compris…

En l’état, ce projet de loi n’aura d’autre effet que de mettre fin au « produire en France », en dégradant à la fois notre balance commerciale et notre bilan carbone, et dans l’espoir d’un improbable signal envoyé au monde.

À l’opposé d’une telle approche, le Sénat a défendu une autre vision, pragmatique et ambitieuse, qui développe nos filières industrielles, tout en accompagnant leur mutation pour réduire nos émissions. C’était le sens, en particulier, des dérogations que nous avions créées ou étendues en faveur des hydrocarbures à usage non énergétique, des productions connexes ou de la recherche. C’est ce même pragmatisme qui nous avait conduits à autoriser les régions d’outre-mer à exercer la compétence qui leur est théoriquement dévolue pour exploiter les ressources présentes au large de leurs côtes, et contribuer ainsi à leur développement économique et social. C’est enfin pour faire respecter la parole de l’État que nous avions souhaité un traitement moins brutal des demandes en cours d’instruction, et pour assurer un profit minimal aux exploitants que nous avions amendé l’encadrement du droit de suite.

Aucun de ces apports majeurs n’a survécu en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale qui, à quelques modifications rédactionnelles ou exceptions près sur des sujets secondaires, a rétabli le texte issu de ses travaux en première lecture sur le volet « hydrocarbures ».

M. Ronan Dantec. Elle a bien fait !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Seul changement notable par rapport à cette version, l’adoption d’une définition nouvelle des techniques dites « non conventionnelles » posera sans doute des difficultés d’interprétation qui pourraient remettre en cause des méthodes autorisées jusqu’à présent.

Au-delà des hydrocarbures, le projet de loi comportait une série de dispositions plus techniques sur lesquelles une grande partie, voire la quasi-totalité, des apports du Sénat a en revanche été conservée, notamment pour réformer le stockage souterrain de gaz naturel, conforter le régime d’indemnisation des producteurs d’énergies marines renouvelables en cas d’indisponibilité du raccordement, mieux encadrer la notion nouvelle de réseaux intérieurs, protéger les filières française et européenne de biocarburants contre la concurrence déloyale de produits importés, permettre aux communes de déployer des stations de recharge en gaz ou en hydrogène, réformer les sanctions applicables en cas de non-respect de l’obligation de pavillon français ou assouplir les obligations d’économies d’énergie des distributeurs de fioul domestique.

Sur cet autre volet, je regretterai simplement le rétablissement de l’obligation de double distribution dans chaque station-service qui mettrait à la vente de nouveaux biocarburants, obligation que n’exige pas le droit européen et qui fragilisera encore un secteur de la distribution de carburants déjà sinistré. J’ajoute que l’introduction, à ce stade de la navette, d’une disposition nouvelle pour réduire les coûts de raccordement des méthaniseurs aux réseaux de transport est certes bienvenue sur le fond, mais méconnaît certainement la « règle de l’entonnoir »…

Au sortir de la nouvelle lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale, le bilan apparaît donc très contrasté : sur le volet le plus politique du texte, c’est-à-dire sur les hydrocarbures, les députés n’auront fait droit à aucun de nos arguments.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. À l’opposé, sur les parties plus techniques, l’essentiel de nos apports aura été préservé, signe que la qualité de nos travaux, au moins sur ce plan, aura été reconnue.

Mais dès lors que le Gouvernement et sa majorité jugent les fondements de leur texte « incontestables », il n’y a plus de place pour le dialogue entre nos deux assemblées, et rien n’indique qu’un nouvel examen des articles nous permettrait de progresser sur la voie d’un improbable compromis, ce qui justifie pleinement l’adoption d’une motion tendant à opposer la question préalable.

À ceux qui, parmi vous, regrettent qu’une telle procédure écourte nos débats, je rappellerai que, malgré des délais très contraints, la première lecture avait été l’occasion d’un travail de fond qui avait permis, aux uns et aux autres, de faire valoir leurs positions, ainsi qu’en témoignent les très nombreux amendements présentés ou adoptés.

S’il en était encore besoin, nos échanges de la semaine dernière en commission ont confirmé que les points de désaccord se sont cristallisés et qu’il sera difficile, sinon impossible, de faire encore évoluer le texte.

Lors de cette réunion de commission, certains d’entre vous ont aussi fait part de leurs regrets de ne pouvoir parvenir à un consensus sur des sujets aussi primordiaux.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Je fais mienne cette déception et je le dis d’autant plus que, sans trahir de secret, nous étions prêts à faire un certain nombre de concessions, y compris sur des sujets qui nous tenaient particulièrement à cœur, pour parvenir à un accord en commission mixte paritaire. Cependant, malgré la qualité du dialogue noué avec les rapporteurs de l’Assemblée nationale, ces tentatives de conciliation n’auront trouvé, auprès de ces derniers ou du cabinet du ministre, aucun écho favorable. Il n’y avait donc aucun espace de négociation, sauf à renier la totalité de nos positions, et nous n’avons par conséquent plus d’autre choix que de rejeter l’ensemble du projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous terminons l’examen de ce projet de loi permettant la fin de l’exploitation des hydrocarbures sur le sol national, dans lequel nous nous sommes investis positivement, tant le symbole nous semblait important.

Malheureusement, si le texte venant de l’Assemblée nationale comportait certaines failles, nos travaux les ont accentuées, réduisant quasi à néant les ambitions de ce projet de loi en laissant bien trop de place aux intérêts partisans et financiers des industriels pétroliers et gaziers, qui vont à l’encontre de l’intérêt général et environnemental.

Bien naturellement, les députés ont rétabli leur texte, avec quelques évolutions notables et favorables, notamment la définition de la fracturation qui permet concrètement, à notre sens, que soit interdite l’exploitation des gaz et hydrocarbures de roche.

Aujourd’hui, la nouvelle lecture va être courte, puisqu’une motion est déposée. Nous ne partageons ni cette démarche qui prive le Sénat de ses prérogatives ni les attendus qui nous semblent en décalage absolu avec l’urgence environnementale.

Que dire de ce projet de loi en fin de parcours ? Si nous adhérons au symbole, nous aurions aimé qu’il aille plus loin, et ce de plusieurs manières.

Tout d’abord, en plaçant à plus brève échéance la fin des permis de recherche et concession. L’horizon 2040 nous semble bien lointain au regard de l’urgence climatique.

Ensuite, parce que le droit de suite est maintenu, alors qu’il porte atteinte à la capacité de la puissance publique de maîtriser son mix énergétique et de définir sa politique minière.

En outre, l’introduction de la notion de l’équilibre économique est une épine dans le principe même de l’arrêt de l’exploitation et de la recherche.

Enfin, parce que ce texte n’envisage l’économie des énergies fossiles que sous le prisme de l’exploitation. Il fait l’impasse sur la définition d’une stratégie nationale en matière d’importation, et ne fixe aucune règle nouvelle sur le financement, y compris public, des activités d’exploitation des hydrocarbures à l’étranger.

Or nous savons que ces questions sont importantes. Dans ce contexte, nous ne pouvons pas passer sous silence l’Accord économique et commercial global, ou CETA, et ses conditions d’application désastreuses. Ainsi, 75 % des compagnies minières mondiales sont enregistrées au Canada, avec les avantages juridiques et fiscaux qui vont avec. En vertu de cet accord, la France ne pourra plus s’opposer à l’importation de sables bitumineux du Canada. Pour ne prendre que quelques exemples, cet accord entraînera une hausse des échanges entraînant à son tour une hausse des émissions de gaz à effet de serre, et mettra à mal le principe de précaution.

Je ne pense pas que, malgré tous les garde-fous et le plan d’action mis en place, le CETA soit climato-compatible ; je souhaiterais d’ailleurs que vous nous fassiez part de votre position, monsieur le ministre d’État, plus précisément que ne l’a fait votre secrétaire d’État lors du débat sur la COP23 la semaine dernière.

Nous continuons donc, je le répète, de défendre l’idée d’un référendum, pour donner la parole au peuple sur cet accord qui va à l’encontre de l’objectif de ce projet de loi.

Par ailleurs, le rapport d’Attac a également mis en lumière l’aide apportée par les banques nationales et les institutions financières publiques aux projets concernant les énergies fossiles. Ainsi, les banques françaises ont investi 844 millions d’euros dans les énergies fossiles depuis 2015, alors même que les énergies renouvelables ont vu leur financement baisser de 23 % au niveau mondial. La loi de finances pour 2018 continue une politique fiscale avantageuse de niches pour les énergies fossiles, qui coûteront la bagatelle de 7 milliards d’euros au budget national !

Nous ne pouvons plus continuer ainsi à manier le double discours, comme encore récemment lors du One Planet Summit.

Derrière les promesses de décarbonation de l’économie, la réalité est tout autre. Après trois années de stagnation, les émissions humaines de dioxyde de carbone sont reparties à la hausse en 2017. C’est le constat des travaux publiés, le 13 novembre dernier, par 15 000 scientifiques de 184 pays. Cette tribune enjoint aux responsables politiques que nous sommes de tout mettre en œuvre pour « freiner la destruction de l’environnement » et éviter que ne s’aggrave l’épuisement des ressources que l’humanité tire de la planète. Le point de non-retour est presque atteint.

Monsieur le ministre d’État, au-delà des symboles, la transition énergétique et écologique doit donc s’incarner. Plus un euro ne doit financer les énergies fossiles !

Par ailleurs, pour engager ce changement de paradigme, les transformations doivent être accompagnées et préparées. Le changement climatique, s’il est réfléchi et préparé, ne menace pas les emplois, comme je l’ai entendu, mais permet au contraire d’en créer. Ainsi, la plateforme emplois-climat indique qu’un million d’emplois seraient créés si nous investissions dans la transition énergétique.

Il faut veiller à ce que les salariés des filières menacées aient le temps et les moyens de se reconvertir, mais il faut aussi préparer l’avenir, c’est-à-dire la protection de notre planète, de la biodiversité, qui est la condition même de la vie.

Nous prônons, vous le savez, un pôle public de l’énergie, dégagé des impératifs de rentabilité et du marché, afin que notre pays se donne démocratiquement les outils pour favoriser les coopérations et la montée en puissance des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Ce pôle aurait pour mission de garantir pour toutes et tous un droit à l’énergie dans des conditions économiquement acceptables.

Il est clair qu’aujourd’hui aucune énergie renouvelable n’est en capacité de répondre aux besoins de la consommation nationale. Pour autant, la question du produire mieux et plus et, en même temps, du consommer moins est donc centrale, tout comme celle de l’indépendance énergétique.

Pour conclure, toutes ces questions doivent être débattues au sein de ce pôle public, qui devra avoir les moyens de mener cette politique audacieuse. Pour cela deux solutions : les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités en investissant massivement, et les bénéfices des entreprises du secteur doivent être fléchés vers les investissements en faveur de la transition écologique et énergétique. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous abordons à nouveau ce projet de loi qui est l’une des premières mises en œuvre de l’accord de Paris sur le climat, affichant les ambitions de la France et des cosignataires de réussir la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique, ambitions que je partage.

Puisque la COP21 qui a entériné ce traité international a eu lieu en France, puisque la France s’est toujours montrée à l’avant-garde des défis planétaires et universels, il est légitime que la France soit l’un des premiers pays à se montrer exemplaire.

Je souhaite vous le réaffirmer clairement, monsieur le ministre d’État : le groupe Union Centriste partage les objectifs environnementaux et de lutte contre le réchauffement climatique. Nous serons présents pour soutenir la politique énergétique de la France visant à réduire la consommation des énergies fossiles, qui permettra, entre autres, de contenir l’augmentation de la température en deçà de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et à tendre vers un objectif de 1,5°C.

Nous saluons les efforts que le Gouvernement entend mener dans les énergies renouvelables, qui seront utiles pour décarboner l’économie et la production énergétique. L’annonce de l’augmentation de 1 gigawatt des appels d’offres solaires par l’État et, surtout, le plan dévoilé par EDF visant à développer 30 gigawatts de solaire photovoltaïque entre 2020 et 2035 inscrivent la France dans ses ambitions de transition énergétique. Toutefois, monsieur le ministre d’État, il faudra être beaucoup plus offensif dans la réduction de la consommation.

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat. C’est sûr !

Mme Françoise Férat. J’espère que l’État affiche la même volonté dans l’éolien, la géothermie, la méthanisation et dans le contenu de ses futurs contrats de transition écologique et solidaire à destination des territoires. Je connais des communes de mon département qui sont intéressées pour déployer ces énergies.

Vous voyez que nous pouvons avoir les mêmes ambitions, bien que nous n’ayons pas le même diagnostic ni surtout les mêmes méthodes.

En parlant de méthode, j’aimerais évoquer le déroulement de la commission mixte paritaire sur ce texte, qui fut ubuesque, si je puis dire, car il n’avait même pas le mérite d’être drôle. Je commence à avoir une certaine expérience et j’ai participé à quelques commissions mixtes paritaires dans ma vie parlementaire. Certaines étaient rudes, les convictions s’affrontaient et les débats rapprochaient les points de vue. Ainsi, bien souvent, les députés et les sénateurs arrivaient à un accord, parfois largement, parfois a minima, mais les uns reconnaissaient les arguments et les expériences des autres.

Or ce n’est pas ce que nous avons vécu le 21 novembre dernier !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Absolument !

Mme Françoise Férat. Les nouveaux députés qui, paraît-il, s’inspirent de nouvelles méthodes de management et de démocratie participative, avec une volonté de bienveillance, ont dû oublier leur guide et leur manuel au Palais-Bourbon !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Nous sommes d’accord !

Mme Françoise Férat. J’en profite pour saluer le travail de notre rapporteur, Élisabeth Lamure, qui avait apporté pour la majorité sénatoriale des ajustements sans détricoter le texte. Je suis certaine que d’autres mesures auraient pu être conservées par l’Assemblée nationale, dans un souci d’équilibre afin de lutter contre le dérèglement climatique.

Seulement, monsieur le ministre d’État, je vous le redis en nouvelle lecture, la France ne doit pas être la seule. Vous estimez que cet engagement permettra à la France d’avoir une autorité pour « peut-être » convaincre d’autres partenaires de faire de même. Le groupe Union Centriste le souhaite sincèrement, et je me félicite que vous ayez évoqué tout à l’heure l’engagement d’autres partenaires.

Seulement, autant des alternatives existent pour l’automobile – électricité, hydrogène, biogaz… –, autant je pense sincèrement qu’en 2040, malgré nos investissements en matière de transition énergétique, malgré le développement des énergies renouvelables – solaire, éolien, méthanisation… –, nous ne serons pas totalement sortis de l’ère des hydrocarbures. Nous en utiliserons beaucoup moins, mais nous en utiliserons encore ! Il est des secteurs où les palliatifs n’ont pas encore été trouvés. En aviation, par exemple, il n’y a pas d’alternative au kérosène.

En 2040, il est donc vraisemblable que nous continuions à utiliser des hydrocarbures, les techniques évoluant, mais pas aussi vite que nous l’imaginons.

La question qui me fait douter de la pleine efficacité de ce projet de loi est celle-ci : pourquoi importer des hydrocarbures, car nous y serons contraints, qui ont un impact carbone beaucoup plus fort que les hydrocarbures nationaux ?

Ce projet de loi a pour objectif principal d’arrêter la recherche et l’exploitation des hydrocarbures en France, pas d’arrêter leur consommation. Vous ne proposez pas la fin des énergies fossiles, mais la fin du « produire en France » !

Sur un plan environnemental, le pétrole produit en France permet d’éviter l’émission de 100 000 tonnes de CO2 du fait de l’absence de transport. De plus, en se privant de la production nationale, la France favorisera plus encore l’importation de pétrole étranger pour lequel nous ne connaissons pas les conditions environnementales et sociétales d’extraction. En France, nous bénéficions d’un arsenal de normes et de contraintes permettant de protéger la biodiversité ou les sols.

Il sera d’ailleurs intéressant de faire le bilan pour le climat, monsieur le ministre d’État. Nous consommerons toujours des hydrocarbures ; nous en consommerons véritablement moins, mais absolument importés !

Bref, vous maintenez malgré tout le cap de 2040. Les impacts se feront peut-être sentir au plan écologique, mais ils se feront assurément sentir au détriment des territoires !

Ces concessions structurent des bassins de vie de nos départements. Il ne faut pas oublier que ces exploitations engendrent des revenus financiers importants pour les collectivités. Dans la Marne, nous avons des idées, mais aussi un peu de pétrole, et les ressources de la redevance communale et départementale des mines représentent 1,8 million d’euros. On pourrait additionner ainsi l’ensemble des départements impactés par cette législation !

En outre, ces installations sont de véritables écosystèmes industriels qui bien souvent se situent dans des zones déjà touchées par la crise économique ou éloignées des zones d’emplois dynamiques, qui drainent des centaines d’emplois directs et indirects.

C’est pourquoi, monsieur le ministre d’État, il faut étudier la possibilité de créer un fonds permettant d’accompagner économiquement les territoires pénalisés par la fermeture de sites liée à la fin de l’exploitation des hydrocarbures. Ces fermetures peuvent avoir des conséquences économiques et sociales graves. Ne pouvant créer ce fonds par voie d’amendement, je propose la remise d’un rapport dans un délai assez bref, afin de rassurer l’ensemble des acteurs – élus, entreprises et salariés – touchés sur le terrain.

Convaincue que notre pays devra toujours importer des hydrocarbures pour poursuivre ses activités, je propose que ce fonds soit utilement alimenté par une taxation des importations d’hydrocarbures. Ainsi, il pourrait être créé une forme de cercle vertueux entre ces importations et la revitalisation des territoires. C’est un point important pour le développement économique dans le monde rural qui a finalement été assez peu débattu.

Je vous remercie, monsieur le ministre d’État, d’être attentif à l’avenir de nos territoires et à la solidarité pour la transformation de ceux-ci. Le dispositif que je propose répond à ces objectifs et à notre ambition partagée.

J’insiste enfin : le groupe Union Centriste considère la transition énergétique et écologique comme un besoin vital, crucial. Je ne sais pas si ce texte sera utile, mais ce qui est certain, c’est que personne ne détient seul la vérité : les députés de la majorité présidentielle devraient le prendre en compte ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Mme le rapporteur applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, il est dommage, en effet, que la commission mixte paritaire ait échoué.

Voilà un texte qui aurait mérité autre chose que la procédure accélérée qui est imposée au Parlement. Voilà un texte qui aurait également mérité plus de volonté - de part et d’autre - dans l’objectif de parvenir à un consensus, par plus d’échange, plus de dialogue et plus de désir d’aboutir à un texte coconstruit entre députés et sénateurs.

Il est en effet des textes comme celui-ci qui devraient susciter l’« union sacrée », vu les conséquences du changement climatique déjà à l’œuvre et la grande urgence d’agir, le temps jouant contre nous. Nous devrions unanimement cesser de douter, de tergiverser et de reporter certaines décisions. Nous devrions plutôt unir nos forces dans cette lutte contre le chamboulement climatique. Force est de constater que ce n’est pas encore le cas, vu l’état des discussions, sur ce texte notamment.

Or faut-il insister, encore et encore, quitte à se répéter, sur la vulnérabilité des sociétés humaines devant les forces de la nature lorsque ces sociétés sont construites dans le déni de l’environnement ? Faut-il rappeler que nous risquons de perdre cette bataille contre le changement climatique ? Faut-il rappeler toujours et encore qu’il est urgent de passer d’une société fondée sur une consommation abondante d’énergies fossiles à une société plus sobre et écologiquement plus responsable ?

C’est tout l’enjeu de la transition énergétique. C’est tout l’enjeu de la COP21 et de l’accord de Paris. C’est tout l’enjeu du présent texte, qui vise à envoyer un signal fort au monde entier, comme la France a su en envoyer dans son histoire, en faisant de notre pays le premier pays au monde à laisser les hydrocarbures dans le sous-sol.

Ce texte s’inscrit donc dans un mouvement engagé ces dernières années. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 est aujourd’hui un exemple en Europe. Elle a engagé une dynamique et libéré les énergies sur les territoires. Les ruptures dans nos comportements se confirment, certes trop lentement encore. L’État, les collectivités territoriales, l’économie sociale et solidaire se mettent en mouvement. Le verdissement de l’économie française est certain, même si les résultats sont encore contrastés.

Avec ce projet de loi, tel que modifié en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale, la France s’engage résolument dans un développement post-pétrolier, réellement durable, en commençant par se libérer des énergies fossiles : une brique de plus en matière de lutte contre le chamboulement climatique ou, dit autrement, une impulsion supplémentaire sur un mouvement engagé depuis quelques années et qui se doit de devenir irréversible.

Cela dit, je voudrais insister sur les quatre corollaires qui doivent impérativement découler de la mise en œuvre de ce projet de loi.

Premièrement, l’indispensable et urgente modification de nos comportements et de nos modes de consommation, ce qui implique une véritable transformation culturelle en ce domaine.

Deuxièmement, la réduction de nos consommations d’énergies fossiles.

Troisièmement, le développement des énergies renouvelables, encore entravées par certains blocages administratifs et par des processus décisionnels complexes.

Quatrièmement, enfin, un investissement massif dans la recherche et la formation ; l’objectif étant de construire un nouveau modèle économique nous permettant d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.

La loi de transition énergétique de 2015 et le texte que vous nous présentez, monsieur le ministre d’État, constituent les premières briques de l’édifice à construire. Or certaines des modifications introduites par le Sénat en première lecture nous paraissent de nature à compromettre l’irréversibilité des mesures permettant de lutter contre le changement climatique en vidant de son sens l’essentiel du projet de loi.

Ce fut un mauvais signal donné par la majorité sénatoriale, qui expliqua que le groupe socialiste et républicain ait pu voter contre ce texte. Certes, le Sénat avait apporté un certain nombre de compléments utiles sur des dispositions techniques, notamment aux articles 5 ter, 5 bis A, à l’article 4 relatif au stockage du gaz ou encore à l’article 11 sur les certificats d’économie d’énergie pour les petites entreprises de fioul, mesure chère à Martial Bourquin et à Angèle Préville, ici présents.

Mais, hélas, tout aussi objectivement, on ne pouvait que déplorer le détricotage qui eut lieu avec la multiplication des dérogations, des exceptions ou des assouplissements !

M. Ronan Dantec. Absolument !

M. Roland Courteau. Le terme « dérogation » était devenu le maître mot du texte élaboré par la majorité sénatoriale. Ces dérogations faisaient perdre tout son sens à ce texte en le dénaturant et en en brouillant le signal. Je ne les cite pas, chacun ici les connaît, mais elles furent autant de contresens regrettables, qui m’ont fait dire une fois de plus que le signal donné par le Sénat n’était pas bon du tout.

Le groupe société et républicain a donc fait connaître son désaccord avec la majorité sénatoriale. Pourtant, très sincèrement, j’avais un temps espéré qu’il pourrait y avoir un consensus national concernant la transition énergétique et la sortie des énergies fossiles,…

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Nous aussi !

M. Roland Courteau. … donc que nous pourrions aboutir à un compromis en matière de lutte contre le changement climatique.

Je pensais naïvement qu’après la Charte de l’environnement inscrivant le principe de précaution dans la Constitution sous Chirac, après le Grenelle de l’environnement sous Sarkozy, après la loi de transition énergétique de 2015, le succès de la COP21 et de l’accord de Paris sous Hollande, nous pouvions forger, sous Macron, ici, au Sénat, une majorité d’idées en faveur de la sortie des énergies fossiles. C’était une erreur ! Certes, sur les principes, tout le monde est d’accord, mais sur les principes seulement.

Or, face au dérèglement climatique, il n’est plus question d’attendre, de reporter, d’hésiter, de tergiverser, car le temps joue contre nous. Je pensais que seul Donald Trump ne l’avait pas compris. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. C’est excessif !

Mme Sophie Primas. Il ne faut pas exagérer !

M. Roland Courteau. Bref, nous soutenons le présent texte issu de l’Assemblée nationale, car notre ligne doit être claire et dépourvue d’ambiguïté.

Ce texte est loin de se réduire à un symbole. D’ailleurs, s’il n’avait été que symbolique, comme certains l’affirment, et s’il n’avait été qu’une coquille vide, comme d’autres l’ont laissé entendre, pourquoi la majorité sénatoriale l’aurait-elle vidé de sa portée et de son sens en de nombreux points ?

Gardons-nous d’oublier, mes chers collègues, que l’objectif de l’accord de Paris est bien de sortir des énergies fossiles. Ce texte prévoit d’organiser cette sortie de manière progressive, en douceur, sur deux décennies, mais fermement et de manière irréversible.

Ce texte doit être effectivement le symbole d’une France qui tient ses engagements dans son combat contre le dérèglement climatique, qui reste à l’avant-garde en ce domaine, et donc en situation d’entraîner d’autres pays dans la seule voie qui vaille, celle de la neutralité carbone.

Bref, nous approuvons le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale et nous soutenons votre action en ce domaine, monsieur le ministre d’État.

Il est vraiment dommage que la commission des affaires économiques ait proposé d’évacuer ce texte au travers de la question préalable, nous empêchant ainsi de le retravailler et de nous donner une chance, aussi petite soit-elle, d’aboutir, par une majorité d’idées, à un texte consensuel.

Franchement, au lendemain du sommet sur le climat qui a eu lieu sur l’île Seguin, et auquel j’ai assisté,…

Mme Sophie Primas. Vous en avez de la chance !

M. Roland Courteau. … tenter d’aboutir à un consensus ici au Sénat n’aurait pas manqué de panache ni d’utilité !

Mais, qui sait, peut-être n’est-il pas encore trop tard… Il est toujours permis de rêver ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, l’échec de la commission mixte paritaire nous conduit à nous exprimer une seconde fois sur ce projet de loi mettant fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures.

C’est une malheureuse occasion dont notre assemblée doit se saisir pour tenter d’enrichir ce texte essentiel pour l’avenir de la France et de la planète.

La réforme de notre politique énergétique est en effet un acte fort de notre politique environnementale. Le Gouvernement veut s’engager en ce sens et il recueille en conséquence tous nos encouragements.

L’urgence à agir fait l’unanimité parmi la communauté scientifique. Je pense encore à l’appel des 15 000 experts mondiaux à la une du journal Le Monde voilà quelques jours. Cela a été dit à plusieurs reprises en première lecture : notre planète se meurt… La dernière fois que la Terre a connu de telles teneurs en CO2, c’était il y a 3 ou 5 millions d’années. Des efforts ont été entrepris depuis plusieurs années, mais les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont évidemment insuffisants pour tenir le cap de la limitation de l’augmentation des températures d’ici à 2100.

Face à ce constat terrible, les velléités de certains dirigeants étrangers freinent l’engagement international à lutter contre le changement climatique. L’ombre de l’échec du protocole de Kyoto plane sur l’accord de Paris. L’agrégat des engagements internationaux nous inscrit aujourd’hui dans une trajectoire d’élévation de la température de 3,5°C à 4°C d’ici à 2100.

En outre, l’annonce du président Trump résonne encore comme un coup de semonce terrible dans le ciel des relations internationales.

Pour autant, nous ne pouvons pas nous résoudre à baisser les bras. Tout au contraire, cet isolationnisme américain, qui n’est pas aussi total qu’on le croit – Dieu soit loué ! –, doit nous conduire à porter internationalement le flambeau du développement durable.

Le président Chirac avait été l’un des premiers à le dire au début des années deux mille, à Johannesburg, faisant de la France un acteur primordial de la protection de l’environnement. Il nous revient de nous saisir de cet héritage et de mener l’engagement international à préserver la planète.

Le Président de la République veut, avec vous, monsieur le ministre d’État, faire de la France un chef de file de la lutte contre le changement climatique. Nous éprouvons une grande fierté à soutenir cet engagement. Tel était l’objectif de sa déclaration de l’été dernier : Make our planet great again !

Oui, faisons de cette planète un endroit meilleur. Ce projet de loi est la première pierre de cet édifice. Le Président l’a posée. À nous, parlementaires, d’y apposer le ciment nécessaire pour renforcer cette structure et en faire une fondation durable de notre politique environnementale.

Permettez-moi, à cette occasion, de glisser quelques mots sur l’indispensable transversalité de nos politiques.

Il est nécessaire que le souci de l’environnement intègre toutes nos politiques publiques. Je sais que vous partagez ce point de vue, monsieur le ministre d’État, et j’espère que vous aurez l’occasion, dans les mois qui viennent, d’échanger avec vos collègues ministres à Bercy pour que le projet de budget pour 2019 intègre le respect des objectifs du développement durable dans les bleus budgétaires de l’administration. Il ne doit pas y avoir, d’un côté, les objectifs du développement durable et, de l’autre, le budget. Il doit y avoir une perméabilité entre les deux et nous devons disposer d’indicateurs pour pouvoir le vérifier.

Quel sens y aurait-il à obtenir un résultat en 2030 et à mener par ailleurs une politique budgétaire opposée aux engagements que nous avons pris à l’ONU ?

À l’Assemblée nationale, nos collègues députés ont pointé du doigt les dérogations multiples qui affaiblissaient, voire annihilaient l’esprit de ce texte. Notre groupe s’était abstenu en première lecture, regrettant en effet l’ajout d’une liste interminable de dispositions dérogatoires.

Nous savons ici que le travail des deux chambres consiste à améliorer de façon coopérative les textes, en proposant, à tour de rôle, des ajouts ambitieux pour parvenir à un texte adoptable et responsable. Cela n’a pas été le cas, et nous le regrettons.

De manière générale, notre groupe veut cesser d’opposer écologie et économie.

Le ministre de la transition écologique et énergétique que vous êtes l’a rappelé à l’occasion de l’ouverture du One Planet Summit, la semaine dernière : ces deux mots ont la même racine grecque, oikos, le foyer. Ce qui est bon pour notre planète est bon pour notre économie !

Si les engagements que nous prenons aujourd’hui nous paraissent coûteux, voire douloureux pour certains, ils représentent un investissement pour l’avenir, à l’horizon 2040. Il faut donc préparer notre société aux enjeux économiques de demain, en adoptant les contours de cette révolution de l’énergie.

Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, nous aurions aimé reprendre le débat avec le souci d’accompagner ce puissant et symbolique message de la France pour concrétiser l’accord de Paris. Il ne s’agissait pas de résoudre tous les problèmes, mais d’envoyer un message au monde. Vous ne voulez manifestement pas l’envoyer, mes chers collègues.

Écoutons les générations qui viennent, ne nous résignons pas à défendre la vieille économie et admettons que le monde change ! Ce n’est pas une insulte, mes chers collègues, c’est un conseil d’ami, un appel vibrant et profond d’une personne convaincue que des changements sont à l’œuvre.

Ne passons pas à côté de cette opportunité. Notre pays a été si souvent à l’avant-garde de positions fortes en matière de libertés, de droits de l’homme ou d’égalité que nous serions bien inspirés aujourd’hui de reprendre notre bâton de pèlerin pour prendre la tête du débat sur la transition énergétique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, je reprendrai la conclusion de notre collègue Jérôme Bignon : le monde change et va changer de façon accélérée. C’est une nécessité que nous devons considérer positivement.

Aujourd’hui, nous examinons en nouvelle lecture le projet de loi visant à mettre fin à la recherche d’hydrocarbures sur le territoire national après 2040. Enfin un texte qui se préoccupe du moyen et du long terme, alors que nous sommes trop souvent, ici comme dans d’autres instances, prisonniers du court-termisme !

Nous avons largement débattu de ce projet de loi en première lecture, notamment de sa portée « symbolique », puisque 1 % seulement des hydrocarbures consommés en France sont extraits sur le territoire.

Cette loi prend toutefois son véritable sens si on la considère comme le point de départ d’une véritable transition énergétique.

Il faut abandonner les énergies fossiles, décarboner notre économie, investir massivement dans les énergies renouvelables et dans les économies d’énergie, opérer la transition agricole, rémunérer les services écosystémiques et climatiques, mettre en œuvre le « 4 pour 1 000 »…

Nous devons aussi progresser sur les agrocarburants, afin que le changement d’affectation des sols, y compris indirect, soit pris en compte dans l’évaluation du bilan environnemental. Nous devons absolument laisser 80 % des réserves d’hydrocarbures dans le sous-sol si nous voulons avoir une chance d’éviter la catastrophe climatique.

La France doit montrer l’exemple et doit en être fière. Nous pouvons être leaders dans la lutte contre le bouleversement climatique. Ne laissons pas passer cette opportunité !

Si le Sénat, en première lecture, a contribué à enrichir ce texte en consolidant des mécanismes essentiels pour la transition, dans le même temps, la majorité de notre assemblée a vidé de sa substance le principe de l’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures en 2040, en prévoyant des exceptions trop larges qui permettent à tous les exploitants de poursuivre l’extraction, notamment à travers le renforcement du droit de suite, inscrit dans le code minier, mais aussi avec la possibilité offerte aux exploitants de gisements de demander des dérogations allant au-delà de 2040 afin d’assurer « une rémunération normale des capitaux immobilisés compte tenu des risques inhérents à ces activités ». C’est l’un des éléments de dérégulation incompréhensibles issus des discussions au Sénat.

L’Assemblée nationale est évidemment revenue à un texte légèrement plus ambitieux, sans être dogmatique.

Cela a conduit la majorité de la commission des affaires économiques à adopter une motion préalable qui nous privera certainement de l’examen du texte dans le détail, ce que nous regrettons vivement !

Ce projet de loi est le premier marqueur de la politique de transition que vous avez voulue, monsieur le ministre d’État. Bien au-delà du symbole, c’est un signal fort adressé à la suite de sommets mondiaux de plus en plus alarmistes quant à notre capacité à réagir.

C’est aussi un texte qui donne sa vraie place au politique face aux intérêts économiques et financiers. La majorité sénatoriale a remanié le texte à la grande satisfaction des industriels du secteur pétrolier et gazier. La question de l’urgence climatique se pose pourtant comme une priorité essentielle : tout récemment, le climatologue Jean Jouzel a affirmé qu’il ne nous restait que trois ans pour inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre et espérer rester en dessous de la barre des 2°C.

Nous aurons des positions bien plus fortes encore à prendre dans un avenir proche. J’espère vivement que la majorité de la Haute Assemblée fera, elle aussi, sa transition, car nous savons qu’elle se soucie tout autant que nous de l’avenir des générations futures. Nous souhaitons que le Sénat joue pleinement son rôle d’assemblée de sages.

Jean Jouzel fait partie de ces scientifiques éclairés qui quittent leurs études pour essayer de faire bouger les choses. Avec Pierre Larrouturou, il a lancé un appel à la signature d’un pacte finance-climat européen pour diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre en Europe, mais aussi dégonfler la bulle financière et créer plus de 5 millions d’emplois à l’échelle européenne, pour éviter que l’humanité ne se dirige sans réagir vers un chaos climatique.

Je conclurai en vous citant, monsieur le ministre d’État. La semaine dernière, vous avez déclaré : « Nous avons été capables de trouver 1 000 milliards d’euros pour sauver les banques, nous devons faire preuve d’autant d’audace pour sauver le climat et l’humanité ! » (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe La République En Marche.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Marchand.

M. Frédéric Marchand. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la rapporteur, bon nombre de parlementaires, toutes formations politiques confondues, ont participé il y a quelques jours au One Planet Summit, dans une démarche d’adhésion totale.

L’une des tables rondes organisées avait pour titre : « Renforcer les politiques publiques pour la transition écologique et solidaire. » Chacun convient en effet que les gouvernements doivent jouer le rôle de garant des objectifs de l’accord de Paris.

Si la mobilisation de tous est nécessaire pour atteindre nos objectifs, les politiques publiques doivent accompagner et envoyer des signaux forts pour que l’ensemble des acteurs puissent transformer leurs modes de production et de consommation vers des solutions bas carbone.

À la lumière des impacts déjà ressentis du dérèglement climatique, il est indispensable de renforcer la résilience et l’adaptation pour protéger encore davantage les citoyens des événements climatiques extrêmes.

Les politiques publiques doivent intégrer l’horizon de long terme en fixant, par exemple, des objectifs de neutralité carbone. Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, leur donner un prix est indispensable.

Enfin, la résilience et la capacité de nos infrastructures à faire face aux chocs liés au dérèglement climatique doivent être au cœur des préoccupations.

À ce titre, le gouvernement français s’est pleinement saisi du sujet et accélère la transition énergétique pour faire de l’accord de Paris une réalité pour tous les Français.

Oui, le changement climatique nous impose de nous rassembler, au-delà de toutes les barrières politiques, culturelles et sociales, pour faire face à cet enjeu. Nous nous devons de sceller cette cause commune, car le changement climatique ne connaît ni frontières ni clivages politiques, et nous n’avons plus que quelques années pour inverser la tendance.

Nous avons encore les moyens d’éviter le pire, mais cela demande une action résolue, car nous entrons dans une phase décisive. La réponse doit être à la hauteur des enjeux.

C’est dans cette optique qu’en novembre dernier, nous avons examiné un projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement.

Je ne reviens pas sur les diverses mesures contenues dans ce projet de loi, qui ont donné lieu, dans notre assemblée, à moult débats en commission et en séance publique, permettant de mesurer les fractures qui n’ont rien d’hydraulique entre les uns et les autres, sur un sujet qui aurait sans doute mérité mieux que certains des arguments que nous avons pu entendre et qui donnaient parfois l’impression que nous étions revenus à l’époque de la révolution industrielle.

Premier pays à traduire cet engagement dans une loi, la France peut se donner ainsi les moyens de sortir de manière irréversible de la production d’énergies fossiles. Fidèle à sa vocation universaliste, elle souhaite inciter les autres pays signataires de l’accord de Paris sur le climat à intensifier l’effort de lutte contre le réchauffement climatique.

Si notre assemblée a apporté des améliorations d’ordre technique qui ont été préservées, il est profondément regrettable que la majorité sénatoriale ait dénaturé ce projet de loi en adoptant une position pour le moins anachronique.

Alors que nous venons de vivre, la semaine dernière, quatre jours dédiés au climat avec comme point d’orgue le One Planet Summit, qui vise à verdir la finance et à accélérer la mobilisation des moyens financiers publics et privés, alors que les progressistes du monde entier se sont réunis à Paris, je déplore que la majorité de notre assemblée ait soutenu une vision passéiste et rétrograde de ce que doit être la transition énergétique.

Pourtant, le projet que vous avez présenté, monsieur le ministre d’État, est responsable, équilibré et porte l’ambition d’un texte fort, symbolique, engageant pour la France en matière de lutte contre le dérèglement climatique, tout en veillant à préserver nos territoires, nos entreprises et les sites industriels concernés et à les inscrire dans une vision d’avenir de la transition écologique et solidaire.

Réunie le 21 novembre dernier, la commission mixte paritaire a échoué à trouver un terrain d’entente et je rejoins mes collègues députés qui ont indiqué que « les sénateurs ont manifesté une incompréhension préoccupante des objectifs comme de la portée du texte ».

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. C’est excessif !

M. Frédéric Marchand. Sur un sujet qui concerne l’avenir de nos enfants et qui devrait être dénué de position idéologique, alors même qu’en 2002, au sommet de la Terre de Johannesburg, le président Jacques Chirac lançait une alerte climatique au monde en déclarant : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », la majorité sénatoriale a choisi de fermer les yeux. (Mme Sophie Primas proteste.)

C’est une attitude dommageable, pour ne pas dire plus.

Arguer que le Sénat a défendu « une vision différente, à la fois pragmatique et ambitieuse, qui entend permettre le développement, chaque fois que c’est possible, de nos filières industrielles tout en accompagnant leur mutation pour réduire nos émissions » est un non-sens.

Vous entendre, madame la rapporteur, nous dire que « ce projet n’aura d’autre effet que de mettre fin au “produire en France” au prix d’une dégradation de notre balance commerciale et dans l’espoir d’un improbable signal envoyé au monde » est une aberration à nulle autre pareille. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. C’est la vérité, malheureusement !

M. Frédéric Marchand. Au lendemain de ce formidable sommet pour la planète, c’est une aberration politique qui montre à quel point notre assemblée peut être rétrograde et à rebours des défis de notre temps.

Cette aberration donne un signe on ne peut plus mauvais à l’opinion française, mais aussi au-delà, sur la façon dont le Sénat entrevoit l’avenir de la planète et des générations futures.

Oui, la portée de ce texte est d’abord et avant tout symbolique, mais chacun sait que l’on construit l’histoire avec des symboles. « Là où il y a une volonté, il y a un chemin », disait Lénine (Exclamations ironiques.), pourtant peu connu pour son tropisme sur la préservation de notre écosystème.

M. Fabien Gay. Il n’était pas le seul !

Mme Sophie Primas. Les bras m’en tombent !

M. Frédéric Marchand. De volonté, la majorité sénatoriale n’en a point. Quant au chemin, il reste celui des énergies fossiles et du statu quo, ce qui est un non-sens historique, une faute qui engage notre responsabilité collective et dont nous serons comptables, mes chers collègues.

Monsieur le ministre d’État, vous avez récemment déclaré : « Les énergies fossiles appartiennent au modèle énergétique et économique du passé. Elles ne sont plus la solution, elles sont le problème. Les politiques publiques ne doivent leur donner aucune perspective. »

Le groupe La République En Marche partage pleinement cette ambition et, pour cette seule raison, nous soutenons ce texte et voterons contre la question préalable !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Boyer.

M. Jean-Marc Boyer. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, le projet de loi mettant fin à la recherche et à l’exploitation d’hydrocarbures que nous examinons en nouvelle lecture aujourd’hui n’est pas très éloigné du texte qui nous a été soumis en première lecture.

À la suite de l’échec de la commission mixte paritaire, l’Assemblée nationale a en effet rétabli, à quelques mots près, la rédaction issue de ses travaux sur le volet « hydrocarbures », qui constitue le cœur de ce projet de loi.

Les députés n’ont pas tenu compte de nos critiques et des propositions que nous avions faites. Nous regrettons notamment qu’ils soient revenus sur une disposition introduite sur l’initiative de la commission des affaires économiques et de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, qui visait à sanctuariser les activités de recherche publique sur les hydrocarbures. À notre sens, l’arrêt progressif de la production d’hydrocarbures ne doit pas conduire à cesser toute recherche dans notre sous-sol. Continuer à investir dans la recherche et la connaissance de notre sous-sol est essentiel. Il nous paraissait nécessaire que cela soit inscrit clairement dans la loi.

De même, la disposition que nous avions adoptée pour garantir aux entreprises la possibilité de poursuivre leurs activités après 2040 afin de rentabiliser leurs investissements de prospection et d’exploitation, tout en dégageant un profit raisonnable, n’a pas été retenue par l’Assemblée nationale.

Nous relevons cependant que, sur les autres parties du texte, plus consensuelles, les députés ont conservé la plupart des apports techniques du Sénat. Nous pensons en particulier à l’extension de l’indemnisation des producteurs d’énergie éolienne maritime par le gestionnaire de réseau en cas d’avaries ou de dysfonctionnements, ou aux dispositions relatives à la qualité de l’air, sur lesquelles la commission de l’aménagement du territoire s’était saisie pour avis.

Ces apports ne suffisent cependant pas à rendre possible l’adoption de ce projet de loi en l’état. Les lacunes du texte que nous avions dénoncées lors de l’examen en première lecture demeurent entières.

Comme Élisabeth Lamure et moi-même l’avons rappelé à plusieurs reprises, nous ne nous opposons pas à l’objectif fixé par le Gouvernement de réduction de notre dépendance aux énergies fossiles. Mais tel n’est pas l’objet de ce texte, qui n’aura aucun effet sur notre consommation d’hydrocarbures, et donc sur nos émissions de CO2. Il ne répond aucunement aux objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre que notre pays s’est fixés dans le cadre de l’accord de Paris. Nous attendions plus du Gouvernement pour son premier texte en matière d’environnement et d’énergie !

Les mesures que contient ce projet de loi auraient dû être examinées dans le cadre d’un débat plus large sur la politique de transition énergétique à mener et sur l’évolution de notre mix énergétique à moyen et long terme. Elles auraient dû par conséquent s’accompagner de mesures relatives au développement des énergies renouvelables ou à la réduction de la consommation énergétique des particuliers et des entreprises pour former un « tout » cohérent.

Nous regrettons qu’en matière de transition énergétique, des débats aient lieu de manière fragmentée, avec des annonces qui se succèdent sur la rénovation thermique des bâtiments, sur la hausse de la fiscalité carbone ou encore sur le report de l’objectif de baisse de la part du nucléaire dans la production électrique à 50 %, sans que l’on dispose d’une vision globale sur la politique énergétique menée.

Or la clé d’une transition énergétique réussie, c’est un cap politique clair, une réglementation simple et lisible et des financements ambitieux.

Nous attendons donc du Gouvernement qu’il publie rapidement une nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie et qu’il prenne les mesures législatives, réglementaires et financières nécessaires pour favoriser la transition de notre modèle énergétique.

Nous pensons en particulier aux mesures à prendre pour faciliter la création de parcs solaires et éoliens terrestres et maritimes, qui pâtissent aujourd’hui de délais beaucoup trop longs de mise en œuvre.

De même, nous regrettons que l’interdiction de la production d’hydrocarbures n’ait pas été assortie d’une réflexion sur la qualité de nos importations d’hydrocarbures et sur la possibilité de différencier les hydrocarbures importés en fonction de leur bilan carbone sur l’ensemble de leur cycle de vie.

Avant de mettre fin à une production nationale d’hydrocarbures plus « propres » que les hydrocarbures importés, il aurait fallu se donner les moyens de substituer aux énergies fossiles des énergies moins carbonées.

Préparé et adopté dans la précipitation, ce projet de loi n’a pas laissé suffisamment de temps aux acteurs concernés pour mener à bien toute cette réflexion.

Bien sûr, le monde change ; nous le savons. Mais ne nous faites pas de procès d’intention et arrêtez de nous donner des leçons : nous partageons tous les mêmes objectifs, mais nous envisageons des voies différentes pour les atteindre.

Monsieur le ministre d’État, il n’y a pas, d’un côté, les gentils, vertueux et éclairés que vous seriez et, de l’autre, les méchants, irresponsables et pollueurs que nous serions.

Votre vision symbolique et notre vision réaliste auraient pu se retrouver, mais ce ne fut pas le cas en commission mixte paritaire face à l’intransigeance des députés incarnant le prétendu « nouveau monde ».

À notre sens, il s’agit avant tout d’un texte qui n’est pas à la hauteur des ambitions qu’il affiche. C’est pourquoi je voterai en faveur de l’adoption de la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cuypers.

M. Pierre Cuypers. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, essayons de tirer certains enseignements de la discussion qui nous réunit aujourd’hui à propos du projet de loi relatif à la fin de la recherche des hydrocarbures, sur fond de COP21 et, plus près de nous, de COP23.

Chacun s’accorde à reconnaître que les énergies fossiles doivent être abandonnées et qu’elles doivent sortir autant que faire se peut de notre vie au quotidien.

Ce texte a pour ambition de donner une crédibilité à notre pays sur la scène internationale en matière de lutte contre le changement climatique, l’effet de serre et les conséquences dramatiques des particules en termes de santé publique.

L’objectif du Gouvernement, que nous partageons, est la neutralité carbone à l’horizon 2050. Si toutes les tendances politiques s’accordent sur cette ambition, les moyens sont contestés, comme viennent de le rappeler nos excellents collègues rapporteurs Élisabeth Lamure et Jean-Marc Boyer.

Ainsi, les positions du Sénat et de l’Assemblée nationale sont très divergentes, en particulier sur la possibilité d’accorder des permis pour la recherche d’hydrocarbures.

Je regrette vraiment l’échec malheureux de la commission mixte paritaire du 21 novembre, mais, dans le même temps, je me réjouis que l’Assemblée nationale et le Sénat aient conservé une disposition introduite par la Haute Assemblée, fruit d’un amendement que j’avais déposé avec plusieurs de mes collègues du groupe Les Républicains. Cette disposition a été adoptée conforme.

Le projet de loi aura au moins permis d’évoquer l’avenir des biocarburants.

Je salue la position du Gouvernement, qui a enfin suivi le Sénat dans sa sagesse en maintenant un amendement à l’article 6 concernant le contrôle de la qualité environnementale des biocarburants.

Le Sénat a en effet alerté sur la concurrence déloyale que représentent, pour les filières de production européennes, les biocarburants importés de certains pays comme l’Argentine ou l’Indonésie, dont les exigences sont moindres.

La disposition proposée ne modifie pas les règles applicables pour les biocarburants européens dans des installations mises en service sur le territoire de l’Union européenne : le relèvement du seuil de niveau minimum de réduction des gaz à effet de serre reste déterminé par une mise en service avant ou à compter du 5 octobre 2015.

En revanche, elle recule cette date d’effet au 1er janvier 2008 pour les installations situées dans des pays tiers. Il est prévu que cette différence, applicable dès l’adoption de la loi, disparaisse le 30 juin 2019, le temps que le recours déposé par les producteurs européens via une plainte antidumping auprès de l’Union européenne règle ce dossier.

Cette disposition antidumping protège les filières françaises et européennes contre l’afflux massif de biocarburants, qui seraient moins contrôlés et seraient, en outre, subventionnés par ces mêmes pays. Dont acte !

J’en viens maintenant aux dispositions que j’avais souhaité introduire dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et le projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Elles concernent le superéthanol et visent à encourager les entreprises à remplacer leurs véhicules fonctionnant avec des énergies fossiles – du diesel à 90 % – par d’autres utilisant des énergies renouvelables.

L’amendement que j’ai présenté, avec plusieurs de mes collègues, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2017 propose d’octroyer l’exonération de la taxe sur les véhicules des sociétés, la TVS, pendant une période de douze trimestres aux véhicules roulant au superéthanol E85, dont les émissions après abattement de 40 % sont inférieures ou égales à 75 grammes de CO2 par kilomètre.

Monsieur le ministre d’État, il est grand temps, il est même urgent d’appliquer au superéthanol les mêmes avantages fiscaux que ceux accordés au gaz de pétrole liquéfié, le GPL, et au gaz naturel pour véhicules, le GNV, les trois carburants étant alternatifs.

Or, pour l’heure, le Gouvernement a décidé d’exonérer de TVS les seuls véhicules hybrides électriques et superéthanol, alors qu’il est urgent d’appliquer cette disposition à tous les véhicules hybrides dits flex fuel de la même manière que pour le GPL ou le GNV.

Le Gouvernement ne tient pas compte de ces arguments pourtant majeurs. La situation actuelle est parfaitement subjective et contraire aux engagements pris par la France en matière de réduction de CO2 et de particules.

Monsieur le ministre d’État, on peut légitimement s’interroger. Pourquoi le Gouvernement souhaite-t-il développer l’usage des carburants vertueux, sans s’en donner les moyens ? Est-ce un vœu pieux ? Dans les faits, les évolutions sont quasi inexistantes.

Vendredi dernier, le Gouvernement s’est prononcé contre une exonération des flottes de véhicules d’entreprise, alors que le coût de cette mesure au titre du budget pour 2018 aurait été faible par rapport au bénéfice et au retour attendus.

Monsieur le ministre d’État, est-ce trop cher payé pour le cheminement vers l’utilisation des biocarburants et l’indépendance énergétique dont nous avons tant besoin ? Est-ce trop cher payé pour les emplois créés et maintenus et, finalement, pour le développement économique de notre pays ? Nous attendons vos réponses. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat. Madame la présidente, permettez-moi de répondre aux différents orateurs.

Certains estiment que la cohérence du Gouvernement n’est pas parfaite, j’en prends acte. Mon souci est justement de mettre de la cohérence dans toutes les politiques publiques, mais même si je suis déjà en poste depuis sept mois, les choses ne se font pas de manière aussi spontanée… En tout cas, cette cohérence est absolument indispensable.

Il est vrai qu’il existe des incohérences à l’échelle de nos propres politiques, mais c’est aussi le cas lorsque l’on continue, encore aujourd’hui, d’allouer l’équivalent de 320 milliards de dollars pour soutenir les énergies fossiles, qui par ailleurs représentent plusieurs milliers de milliards de dollars en externalités négatives.

J’essaie, à mon niveau, d’agir sur tous les fronts et, quand la Banque mondiale annonce, à Paris, qu’à compter de 2019, elle n’investira plus dans les énergies fossiles, c’est une avancée – je ne dis pas que nous pouvons nous l’attribuer, mais cette annonce fait tout de même partie des succès diplomatiques de la France.

De même, la décision de fonds souverains, ainsi que celle de nos propres opérateurs – la banque publique d’investissement Bpifrance, l’Agence française de développement et bien d’autres… –, de décarboner leurs portefeuilles et leurs investissements fait partie de cette cohérence.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Nous sommes d’accord !

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat. Vous le voyez, cette cohérence se met progressivement en place.

Je ne fais pas de procès d’intention, parce que je prends acte des diverses positions et je me réjouis de la volonté commune, volonté qui n’était pas nécessairement évidente il y a encore quelques années. Vous avez dit, madame la rapporteur, que nous avions une attitude dogmatique. Or, je suis persuadé que le dogmatisme ne conduit nulle part.

Il est vrai que j’aurais aimé une union sacrée sur ce texte, mais j’ai compris que nos points de vue n’étaient pas conciliables sur ses modalités : encore une fois, je ne fais aucun procès d’intention, mais nos convictions divergent sur le chemin à prendre.

Certes, ce projet de loi n’est pas l’alpha et l’oméga de la transition climatique et énergétique, il va falloir lui greffer beaucoup d’autres instruments – certains sont déjà présents, d’autres vont venir –, mais il n’est pas uniquement symbolique, car il donne un signal de cohérence. Il faut bien reconnaître que, pour la programmation de la fin des énergies fossiles, nous ne pouvons légalement intervenir que sur notre propre territoire.

Il nous faut donc donner ce signal, mais il va falloir, dans le même temps, réduire nos importations et notre consommation, développer les énergies renouvelables et lever tous les verrous qui freinent leur développement.

Est-il honnêtement possible d’affirmer qu’en 2040, nous nous passerons complètement des énergies fossiles ? Je suis évidemment beaucoup plus prudent. Peut-être irons-nous plus vite grâce à un saut technologique ? Ce sera peut-être un peu après, mais l’important est de se mettre en marche – n’y voyez aucune allusion particulière… (Sourires sur différentes travées.) – d’une manière totalement irréversible.

J’admets éprouver une certaine tristesse devant l’absence d’accord entre nous ; la volonté était là, mais, visiblement, l’interprétation et la perception des événements n’étaient pas les mêmes. J’espère que nous pourrons, malgré cela, continuer à travailler ensemble sur tous ces objectifs.

Il peut y avoir des incohérences, mais rien ne doit nous empêcher de travailler d’arrache-pied en faveur d’une directive européenne permettant de différencier les carburants importés selon leur qualité. Le CETA n’est pas encore ratifié et nous disposons de quelques mois pour avancer sur ce sujet.

En tout cas, ce projet de loi est, à mon sens, un premier pas extrêmement important.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement
Question préalable (fin)

Mme la présidente. Je suis saisie, par Mme Lamure, au nom de la commission, d’une motion n° 1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement (n° 124).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme le rapporteur, pour la motion.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Madame la présidente, je me suis exprimée, lors de la discussion générale, sur les raisons pour lesquelles nous avons déposé cette motion. Je ne vois guère d’intérêt à la redondance, j’en reste aux arguments que j’ai exprimés il y a un instant.

Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, contre la motion.

M. Roland Courteau. Dommage ! Il est vraiment dommage que le Sénat n’apporte pas plus de choses sur ce texte et qu’un sujet d’une telle importance soit évacué par le biais d’une motion tendant à opposer la question préalable.

C’est d’autant plus regrettable que la France, au lendemain du sommet de Paris sur le climat, a le devoir de se montrer exemplaire.

Bien évidemment, le groupe socialiste et républicain votera contre cette motion, mais, une fois de plus, je regrette qu’en dépit de toutes les argumentations possibles sur les dangers de notre modèle actuel, la commission des affaires économiques ait pu persister dans la remise en cause des points essentiels du texte, alors que les sirènes de l’urgence climatique se font de plus en plus stridentes et que les phénomènes climatiques sèment, partout dans le monde, inquiétude et désolation.

Pourtant, j’imagine que chacun, ici, sent bien que le temps joue contre nous, que l’urgence d’agir se fait de plus en plus pressante et que nous ne pouvons plus indéfiniment reporter sur les générations futures les difficiles décisions à prendre.

Le groupe socialiste et républicain regrette l’échec de la commission mixte paritaire. Depuis le début, ce projet de loi aurait mérité davantage de volonté, de part et d’autre, d’aboutir à un consensus, c’est-à-dire aussi bien du côté des députés que de celui des sénateurs.

Nous aurions souhaité davantage de volonté pour coconstruire le texte et rapprocher les positions entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Encore une fois, c’est dommage !

J’ai reconnu, lors de la discussion générale, que le Sénat, en première lecture, avait apporté un certain nombre de compléments utiles sur des dispositions techniques importantes.

Mais j’ai également déploré un certain détricotage du texte de la part de la majorité sénatoriale avec la multiplication de dérogations et exceptions vidant de leur sens des dispositions majeures et dénaturant donc l’essentiel du projet de loi.

Je l’ai déjà dit, le signal envoyé par la majorité sénatoriale n’est pas bon du tout pour la crédibilité internationale de la France.

Mes chers collègues, c’est un mauvais signal pour les acteurs économiques, qui ont besoin de clarté et de visibilité pour innover, et pour la société tout entière.

Très franchement, je pense, en ce qui concerne notre séance d’aujourd’hui, que le Sénat, plutôt que de tenter d’évacuer ce texte par le biais d’une motion, aurait pu faire œuvre utile, en essayant de rapprocher les points de vue, d’améliorer certaines dispositions et d’en corriger d’autres. Le Sénat aurait donc dû retravailler le texte et imprimer sa marque par une ligne claire et dépourvue d’ambiguïté. Était-ce vraiment impossible à faire ?

M. Roland Courteau. Cela nous semblait pourtant valoir la peine d’essayer !

Quant à nous, notre position est claire et nous sommes quelques-uns, ici même, à la partager : nous voulons que la France s’engage clairement dans la sortie des énergies fossiles et dans un développement économique post-pétrole, réellement durable, conformément à l’objectif de l’accord de Paris sur le climat.

M. Jean-Marc Boyer. Nous aussi !

M. Roland Courteau. Pour cela, il faut que cette sortie soit irréversible et sans dérogation ou exception.

Pour nous, il s’agit – et nous vous soutenons bien volontiers, monsieur le ministre d’État, dans votre action – d’atteindre le plus rapidement possible la neutralité carbone, en bornant ainsi le réchauffement climatique en dessous de 2°C.

Nous persistons donc à dire que ce projet de loi doit être un texte de rupture, qui en finisse avec un certain laisser-faire consistant à reporter les décisions difficiles à plus tard, de préférence sur les générations futures !

Il n’est tout de même pas si difficile de reconnaître que notre modèle actuel n’est plus durable et que la trajectoire qui en résulte n’est plus soutenable, dès lors qu’elle conduit chaque jour un peu plus à l’échec – cela est désormais bien connu !

Non seulement nous voulons que ce projet de loi conserve toute son ambition, mais nous persistons à dire qu’il doit aussi être responsable, non seulement en donnant – comme c’est le cas – de la visibilité aux entreprises et territoires impactés, mais également en les accompagnant fermement dans les mutations des filières en transition. Sachez que, sur ce point, il faudra, monsieur le ministre d’État, être très réactif et entreprenant !

Bref, nous sommes convaincus que, face à l’urgence climatique, écologique et sociale, nous devons, ici et maintenant, nous engager en faveur d’une économie fondée sur un autre modèle, plus durable, plus juste et porteur de croissance et d’emplois. Cela passe notamment par l’adoption de ce projet de loi, auquel d’autres instruments devront être greffés, et par les quatre corollaires que j’ai cités tout à l’heure.

Le choix est clair et doit se faire sans délai : soit nous continuons de subir, soit nous anticipons. Ce choix, nous l’avons fait : nous voulons anticiper.

À chacun de prendre ses responsabilités ! Nous prenons les nôtres en repoussant cette motion, dont la signification réelle est de contester ce projet de loi d’avant-garde dans ses objectifs essentiels. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche. – MM. Ronan Dantec et Joël Labbé applaudissent également.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Nicolas Hulot, ministre dÉtat. Madame la rapporteur, la motion que vous avez déposée et qui tend à opposer la question préalable résume bien les différences d’état d’esprit. Vous l’évoquez d’ailleurs vous-même, puisque vous soulignez que la commission des affaires économiques, comme la Haute Assemblée, ne semble pas adhérer aux objectifs du Gouvernement.

En fait, je crois que vous adhérez à ces objectifs, mais pas aux moyens choisis par le Gouvernement dans ce projet de loi pour y parvenir. Je ne peux évidemment que le regretter.

J’ai la conviction profonde que la lutte contre le changement climatique doit nous rassembler au-delà de ces divergences.

Les modalités de mise en œuvre des mesures décidées dans ce texte sont progressives et il faut avoir confiance dans le fait que, la contrainte étant dorénavant pleinement identifiée, des solutions et alternatives qui ne sont pas encore dans notre logiciel vont apparaître.

La menace universelle que nous encourons doit ignorer les clivages habituels et les choses commencent à bouger de ce point de vue. Vous le savez, je le dis souvent, nous gagnerons cette bataille ensemble ou nous la perdrons ensemble ; personne ne pourra tirer son épingle du jeu et je sais que je n’ai pas besoin de vous convaincre à ce sujet.

Je ne vais pas revenir sur l’ensemble des arguments que j’ai opposés à nombre d’amendements débattus et parfois adoptés au Sénat. Franchement, ces amendements vidaient le texte d’une grande partie de sa force.

Dans le même temps, certains estiment que ce texte ne va pas encore assez loin ; il est vrai que nous avons voulu rester dans un cadre constitutionnel et ne pas revenir sur les droits acquis, mais le débat perdure.

Je souhaite être le plus objectif possible et je veux saluer les efforts du Sénat pour améliorer le texte, notamment sur un sujet important : le stockage du gaz.

Cependant, sur l’objet même du texte, nos positions sont trop éloignées, je le dis avec respect, car j’aurais aimé vous convaincre que ce texte ne vise en aucun cas à pénaliser notre économie, mais plutôt à la libérer de son addiction aux énergies fossiles.

J’aurais aimé vous convaincre que le Gouvernement n’est en rien opposé à la recherche et à la connaissance de notre sous-sol – nous aurons d’ailleurs l’occasion d’en reparler, lorsque nous débattrons, en principe l’an prochain, du code minier. Pour autant, il ne faut pas poursuivre des chimères et faire croire que les entreprises qui feraient de la recherche ne souhaiteraient pas, ensuite, exploiter.

J’aurais aimé vous convaincre que la cohérence et l’exemplarité produisent des résultats et nous donnent une crédibilité et une capacité d’entraînement.

Je n’ai pas réussi à vous convaincre et je regrette le choix de déposer cette motion – je le dis franchement –, d’autant que le Sénat est souvent une source bienvenue d’intelligence et de sagesse. Il connaît parfaitement les questions minières et, plus largement, d’environnement, comme vous l’avez vous-même démontré, madame la rapporteur.

L’Assemblée nationale s’est d’ailleurs appuyée sur les rapports du Sénat, qu’il s’agisse du stockage du gaz, de la qualité des biocarburants ou encore des stations de gaz ou d’hydrogène.

La transition écologique et solidaire que je défends, avec d’autres, a besoin de mutualiser toutes ces intelligences. C’est pourquoi je regrette franchement le dépôt de cette motion, qui cache, vous le dites vous-même, une vraie divergence de fond.

Je ne rejette pas, bien au contraire, votre appel au dialogue, car il est indispensable pour construire les prochaines étapes. Nous sommes au début d’un très long processus : si nous construisons ensemble cette grande mutation, vous verrez qu’elle apportera beaucoup plus de bénéfices que de contrariétés ; a contrario, elle nous apportera de lourdes contrariétés, si à un moment ou à un autre, nous ne nous retrouvons pas sur l’essentiel.

En tout cas, j’espère que, malgré votre opposition, nous pourrons continuer à travailler ensemble pour que notre pays prenne la main dans une Europe qui doute un peu, vacille parfois, mais que nous devons emmener dans la transition écologique d’une manière déterminée, progressive, irréversible, car c’est elle qui permettra, en développant les technologies existantes et celles en gestation, de créer de nombreux emplois dans les filières renouvelables et de moderniser en profondeur notre économie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Le groupe du RDSE votera naturellement contre cette motion, à la fois pour une raison de principe – une telle motion revient à ne pas participer à l’écriture du projet de loi –, mais aussi de fond.

Le débat que nous avons eu en première lecture – je le dis sincèrement – a souvent été malheureux. Au-delà des aspects techniques qui ont été abordés, certains propos – peu il est vrai – relevaient du climatoscepticisme, d’autres – malheureusement nombreux – étaient teintés de « climatofatalisme » ou de « climatoégoïsme ».

Je crois que, sur ce texte, le Sénat n’a pas joué son rôle, alors même qu’il existe une tradition française d’universalisme et une volonté de notre pays, depuis une vingtaine d’années, d’être leader sur la scène internationale en matière environnementale. Je pense bien sûr aux positions des présidents qui se sont succédé : Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande – avec la COP21 – et, aujourd’hui, Emmanuel Macron – avec le sommet qui a eu lieu la semaine dernière.

Au lieu de soutenir cette volonté affichée de la France à l’échelle internationale, le Sénat en vient à disparaître des radars, à tel point que le président Macron, qui a évoqué le présent projet de loi à Bonn lors de la réunion de la COP23, n’a mentionné que l’Assemblée nationale, faisant ainsi passer le Sénat par pertes et profits…

Mme Catherine Procaccia. Il nous oublie toujours, quoi qu’on fasse !

M. Ronan Dantec. Il est vrai que le Sénat avait détricoté le texte.

De fait, la question du signal donné par la France à la communauté internationale n’a pas été comprise, alors même que, dans un monde secoué par les crises, la première réaction est de se concentrer sur son seul territoire. Or aucun de ces territoires ne tiendra seul sans réponse internationale commune.

Le Sénat a donc adopté une position déséquilibrée à tout point de vue.

Néanmoins, je retiens un cri d’alerte, monsieur le ministre d’État : la place des territoires. Malheureusement, l’Assemblée nationale a refusé une nouvelle fois la dotation additionnelle destinée à accompagner tous les territoires sur les questions climatiques, et pas uniquement quelques territoires qualifiés d’excellence. Le Sénat avait pourtant approuvé cette dotation à la quasi-unanimité.

Au vu du débat que nous avons eu ici et des craintes, légitimes, qui se sont exprimées sur quelques territoires, je pense que nous devrons nous interroger à nouveau sur ce sujet. Il nous faut être, tout à la fois, ambitieux sur la scène internationale et solidaires avec l’ensemble des territoires français. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Joël Labbé applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

M. Jérôme Bignon. Je suis certain que nous sommes tous parfaitement sincères – c’est l’une des qualités de ceux qui s’expriment dans cette enceinte…

Pourtant, devant l’enjeu, notre incompréhension sur l’essentiel et notre incapacité à la dépasser me plongent, comme M. le ministre d’État, dans une forme de tristesse.

Je ne parviens pas à comprendre que nous puissions croire qu’il existe une « planète B », pour reprendre une expression utilisée récemment par le Premier ministre.

C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera contre la motion tendant à opposer la question préalable, en formant le vœu que le temps de nous retrouver advienne le plus rapidement possible. Tel est le sens de notre vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche. – MM. Ronan Dantec et Joëlle Labbé applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Le climat est une affaire tellement sérieuse qu’il faudrait moins de grandiloquence et plus d’efficacité. Je le dis davantage pour mes collègues que pour vous, monsieur le ministre d’État, car chacun connaît votre engagement sur les questions qui nous occupent.

Je voterai la question préalable, mais je veux dire que la discussion au Sénat a permis à ce texte d’être plus opérationnel.

Bien sûr, nous n’avons pas trouvé de position commune sur la recherche et l’exploitation des hydrocarbures, mais nous avons introduit de nouvelles dispositions, souvent pragmatiques et techniques, qui sont efficaces dès maintenant pour les territoires.

En cela, le Sénat a amélioré le texte, preuve en est que nous ne goûtons que très peu les effets de communication, mais que nous partageons avec vous, monsieur le ministre d’État, l’objectif ultime, celui de la protection de notre planète et de l’engagement pour le climat.

Je passe sur certains propos, parfois blessants, mais je veux surtout dire à Joël Labbé que nous avons effectivement trouvé 1 000 milliards pour sauver les banques et que c’était une bonne nouvelle pour le climat, car nous avons besoin d’investir très lourdement, de payer nos chercheurs, de développer de nouvelles technologies et énergies et d’être plus performants et imaginatifs. Pour cela, nous avons besoin d’argent !

La Banque mondiale vient d’annoncer, il y a quelques jours, qu’elle n’allait plus investir dans les hydrocarbures. C’est une victoire, une bonne nouvelle pour tout le monde. Nous n’avions donc sûrement pas besoin de ce projet de loi symbolique, puisque les banques et les milieux de la finance ont anticipé sur son adoption…

Moi aussi, je regrette de ne pas avoir trouvé de position commune, mais je ne comprends pas, monsieur le ministre d’État, l’urgence de ce texte. Peut-être aurions-nous pu trouver un accord lors d’une deuxième lecture ?

Je regrette aussi le mur auquel nous nous sommes heurtés. Nous avons travaillé ensemble et essayé, cher Roland Courteau, de faire œuvre commune. Je dois dire ma tristesse de ne jamais avoir vu nos arguments considérés ou simplement écoutés.

Je regrette que ce texte ait été présenté sans vision d’ensemble. Dans le cadre d’une politique plus globale, qui arrivera peut-être ensuite, monsieur le ministre d’État, vous auriez certainement recueilli davantage d’approbation.

En conclusion, je veux vous dire, monsieur le ministre d’État, que nous serons à vos côtés. Certains collègues – je pense à Mme Férat ou à M. Cuypers – ont présenté des propositions et nous serons présents pour vous aider dans votre lutte pour le climat, qui constitue un bien commun et dont dépend notre avenir. Ces questions ne sont ni de droite ni de gauche, elles se posent de la même manière sur toutes les travées de cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera contre cette motion. Tous les arguments ont déjà été échangés.

Ce projet de loi montre qu’il existe encore une gauche et une droite dans ce pays et dans cet hémicycle ! Personnellement, je ne regrette pas nos débats, les arguments ont été échangés et nous ne sommes pas d’accord. Je tiens d’ailleurs à saluer l’important travail réalisé, dans un temps contraint, par la rapporteur.

Mais au fond, nous n’étions pas d’accord sur les trois premiers articles et nous n’arriverons pas à trouver une position commune. Tout le monde parle de l’urgence environnementale, mais nous considérons – et nous ne sommes pas nécessairement majoritaires à gauche – que 2040 est déjà une date tardive.

Certains estiment, ce qu’on peut entendre, qu’il y a trop d’inconnues et qu’il faut se laisser du temps. Il est vrai que les énergies renouvelables ne peuvent pas fournir seules, aujourd’hui, l’électricité nécessaire à notre consommation, mais si nous mobilisons massivement l’argent public et privé au profit des investissements nécessaires, nous ne subirons plus la transition écologique.

En tant que nouveau sénateur, je souhaite ajouter un point à propos de la motion qui nous est soumise. Sans esprit polémique, je constate que la droite est physiquement minoritaire dans l’hémicycle à cet instant, mais que grâce à la magie du scrutin public, la motion va être adoptée. Cette situation pour le moins bizarre doit nous faire réfléchir, en particulier dans le cadre des travaux qui sont actuellement menés pour réformer nos institutions.

En conclusion, nous devons être bien conscients que les questions de long terme ont absolument besoin de débats. Ne nous en privons pas et tenons-en plutôt plus que moins ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.

M. Frédéric Marchand. Bien évidemment, le groupe La République En Marche ne votera pas cette motion. Sans vouloir être plus long, je vous invite, mes chers collègues, à méditer cette phrase d’un glorieux sénateur qui a contribué à l’histoire de notre pays, Édouard Herriot : « La persévérance dans une idée juste en amène le succès tôt ou tard. » (M. Joël Labbé applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Pour que tout le monde puisse réfléchir et décider en toute connaissance de cause, je crois que nous devons nous atteler à la question des connaissances et des savoirs. Je suis professeur de physique-chimie et il me semble par exemple important, quand on discute de sujets comme celui des énergies, que chacun comprenne ce qu’est une combustion.

La culture scientifique est indispensable pour que nos concitoyens soient à même de prendre des décisions sur des enjeux de société, qu’ils soient liés à l’économie ou à l’environnement.

Alors, certes, il y a urgence, mais je plaide pour que chacun soit en mesure de faire un choix. Or c’est toute la difficulté : sur ces sujets, tout le monde n’a pas les connaissances suffisantes pour faire un choix. C’est pourquoi j’appelle au développement de la culture scientifique, qui est largement déficitaire actuellement dans notre pays.

Nous sommes devant des enjeux vitaux : c’est non pas la vie de la planète – elle sera toujours là –, mais la vie des êtres humains qui est en jeu ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 47 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l’adoption 192
Contre 145

Le Sénat a adopté.

En conséquence, le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement est rejeté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Question préalable (début)
Dossier législatif : projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement
 

6

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur la proposition de loi relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

7

 
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations
Article 1er

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations

Adoption en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (proposition n° 123, texte de la commission n° 164, rapport n° 163).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des lois, la proposition de loi en discussion aujourd’hui s’inscrit dans la continuité d’un travail législatif qui a considérablement occupé le Parlement ces dernières années – tous les sénateurs, que je salue, ici présents le savent –, celui de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités.

Ce chantier a, pour ainsi dire, occupé le Parlement de manière quasi continue durant la précédente législature, accompagnant les mutations très profondes de l’organisation, des ressources et des missions des collectivités locales : mutations institutionnelles, évidemment, chacun le sait, avec la création des grandes régions, la naissance de métropoles, l’émergence de communes nouvelles, l’affirmation de collectivités à statut particulier, telles que la métropole de Lyon, la Ville de Paris ou la collectivité de Corse, la rationalisation de la carte intercommunale ; mutations également des compétences exercées par les différents niveaux de collectivités. La simplification de la répartition des compétences a été de pair avec la révision de nos architectures institutionnelles. Pas un territoire n’a été exempt de ces évolutions. Tous ont été et sont encore concernés par cette question de la distribution des compétences entre les différents niveaux de collectivités.

Comme beaucoup de membres du Gouvernement, j’ai multiplié les consultations avec les élus. Nous avons entendu les demandes des uns et des autres – parfois contradictoires, d’ailleurs –, à savoir la stabilité, et nous en avons mesuré la portée. Il en résulte un constat très fort : l’équilibre qui a été trouvé par le Parlement doit maintenant s’appliquer.

Cette demande, le Gouvernement l’a entendue, comprise et faite sienne. Voilà les raisons pour lesquelles, comme le Président de la République l’a confirmé au congrès des maires le 23 novembre dernier, il n’y aura pas de nouvelle grande transformation institutionnelle pour les collectivités territoriales.

Stabilité et continuité n’excluent cependant pas de procéder à des améliorations. Mettre en œuvre la loi n’interdit pas non plus de l’accompagner, non seulement pour l’expliquer, mais aussi pour en corriger les imperfections, en résoudre les difficultés d’application.

Le Gouvernement s’est donc engagé à accueillir favorablement de telles initiatives et à mettre à l’étude les améliorations qui paraîtraient possibles dans la répartition des compétences entre collectivités, après avoir pris le temps de la concertation. À la demande du Premier ministre, j’ai d’ailleurs été mandatée pour organiser ces concertations et en tirer, au nom du Gouvernement, les conclusions utiles.

Avant d’évoquer la présente proposition de loi, qui concerne la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, je voudrais revenir sur le deuxième domaine où des travaux ont été engagés, celui de l’eau et de l’assainissement.

Comme vous le savez, une initiative parlementaire va se concrétiser dès le début de l’année 2018. Comme vous le savez également, j’ai animé un groupe de travail composé de huit députés et de huit sénateurs. Ce groupe a procédé à de nombreuses auditions et examiné la nature des difficultés posées par la loi NOTRe, telle qu’elle existe actuellement. Je réunirai de nouveau ce groupe cette semaine pour examiner comment nos conclusions, qui sont unanimes, peuvent être transcrites dans un texte de loi.

M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas vraiment notre sujet !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ai dit qu’avant d’évoquer la présente proposition de loi j’abordais un autre sujet. Il concerne aussi l’eau et l’assainissement.

Cette initiative procédera à deux modifications très importantes, qui ont d’ailleurs été discutées et rediscutées à Cahors.

Premièrement, nous introduirons une clause de sauvegarde des libertés communales, c’est-à-dire une faculté, pour une minorité de communes, de s’opposer au transfert de ces compétences à l’intercommunalité. Cette faculté sera ouverte pour le mandat en cours et pour le suivant.

Deuxièmement, nous reviendrons sur les dispositions de la loi NOTRe qui avaient pour effet de procéder, trop fortement et de manière trop automatique, à la dissolution de syndicats de plein droit, en généralisant le principe de représentation-substitution des communes par les intercommunalités, y compris lorsque les syndicats regroupent deux EPCI seulement.

Voilà ce que nous proposerons. Vous le voyez, nous n’avons pas hésité à rouvrir le débat de manière constructive pour trouver une solution qui satisfasse tout le monde, comme l’a indiqué le Premier ministre à Cahors. Je m’étais engagée à ce que ces travaux se fassent. Ils se font ! C’était un engagement du Gouvernement, confirmé par le Président de la République et décliné dans la Conférence nationale des territoires.

J’en viens maintenant au texte inscrit à l’ordre du jour, monsieur Collombat.

La logique de la GEMAPI est une logique forte et solidaire, mais il nous est remonté des difficultés d’application du terrain.

La création de la compétence GEMAPI par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, via l’adoption d’un amendement déposé par d’éminents sénateurs, dévolue aux intercommunalités à fiscalité propre à compter du 1er janvier 2018, était une réponse à un constat simple : la gestion des cours d’eau et celle du risque d’inondation sont intimement liées. Telle est la raison pour laquelle le législateur a souhaité réunir dans une même compétence ces deux aspects.

En outre, les risques d’inondation, comme les effets d’une dégradation des milieux aquatiques, ne connaissent pas de frontières. Ils menacent tous les territoires riverains des fleuves et cours d’eau, ceux situés en aval étant souvent plus exposés que ceux à l’amont. Voilà pourquoi le législateur a choisi d’organiser la solidarité territoriale en ces domaines, en confiant aux intercommunalités le soin d’exercer cette compétence. Il est évidemment question, en matière de GEMAPI, de solidarité entre les territoires.

Comme je l’ai dit, la logique de la GEMAPI est donc une logique forte et de solidarité, mais sa mise en œuvre s’est heurtée à quelques difficultés.

Nos fleuves, rivières et ruisseaux ne sont pas toujours entretenus comme il le faudrait.

De plus, la gestion des digues est assurément une compétence dispersée et pas toujours bien exercée. Ici, des digues appartiennent à des associations de propriétaires fragiles, qui n’assurent pas bien leurs obligations d’entretien. Ailleurs, la propriété d’ouvrages anciens n’est pas bien définie. Là-bas, les collectivités n’ont pas su s’entendre et s’organiser pour mettre en place un système d’endiguement approprié. En d’autres endroits, l’État n’a pas toujours été un propriétaire prévoyant et diligent.

Enfin, le législateur de 2014 n’a sans doute pas suffisamment pris le temps d’examiner ce qui pouvait déjà exister dans les territoires, avant même que la compétence GEMAPI ne voie le jour. En effet, il est des territoires où des initiatives s’étaient structurées, parfois depuis longtemps, pour assurer l’entretien mutualisé des cours d’eau, au contraire d’autres territoires, où rien ne s’était fait.

Dans des territoires très exposés à de violents risques d’inondations – je pense, par exemple, aux épisodes cévenols dans le Sud-Est –, des collectivités avaient pris des initiatives pour éviter que l’inertie ne cause, chaque année ou presque, des morts. Par ailleurs, à la suite de crises majeures de submersion marine, certaines collectivités s’étaient engagées dans des travaux ambitieux et au long cours, pour mieux protéger habitations et activités humaines. Or l’uniformité prévue par la loi MAPTAM avait pour effet d’empêcher ce type d’initiative, obligeant même à les déconstruire, dès lors qu’étaient concernées des collectivités autres que communales. C’était, chacun le sait et le mesure, une véritable difficulté pour ces territoires.

Nous avons donc souhaité revisiter la compétence GEMAPI à l’aune de la philosophie de la Conférence nationale des territoires. Cette philosophie est simple, et le Premier ministre l’a parfaitement exprimée en ouvrant les discussions lors de la première réunion de la Conférence nationale des territoires au Sénat, le 17 juillet dernier : « En termes de compétences, nous voulons à la fois permettre aux libertés locales de s’exprimer, tout en conservant l’idée d’une stabilité globale du dispositif. »

« Stabilité globale du dispositif », car il n’est pas question de remettre en chantier les équilibres qui viennent d’être trouvés. Je peux ainsi vous confirmer que le Gouvernement ne reviendra pas sur les grandes caractéristiques de la GEMAPI. Nous assumons cette part d’héritage, qui vient de la législature précédente, et nous mettrons cette réforme en œuvre.

Les intercommunalités exerceront donc la compétence GEMAPI à compter du 1er janvier 2018, une compétence qu’elles pourront, si elles le souhaitent, transférer à des syndicats d’un genre particulier : les EPTB et les EPAGE. Elles bénéficieront par ailleurs d’une nouvelle ressource fiscale pour leur permettre d’exercer cette compétence.

Mais cette stabilité doit être assortie de conditions de mise en œuvre de la loi qui permettent aux libertés locales de s’exprimer pleinement. Il apparaît en effet, dans le domaine de la GEMAPI, que la loi a conduit à certaines difficultés, parce que les règles qu’elle définit s’accommodent mal de la réalité et de la très grande diversité de nos territoires.

Le Gouvernement a donc soutenu les propositions des députés visant à permettre aux départements, notamment littoraux, de continuer à porter les stratégies et politiques qu’ils ont su mettre au point, à étendre aux régions qui exerçaient des attributions dans ce domaine et souhaitent continuer – certaines se sont manifestées, et nous avons, là aussi, souhaité les entendre – cette faculté – car il s’agit bien d’une faculté et non d’une obligation – et à affirmer clairement un principe de sécabilité des différentes composantes de la compétence GEMAPI, qui seul garantit aux collectivités territoriales leur libre organisation dans l’exercice de cette compétence.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi va donc très loin dans la confiance accordée aux collectivités territoriales : elle leur donne toute latitude pour s’organiser.

La dernière évolution d’importance concerne la création, nécessaire, d’un régime de responsabilité adapté aux transferts d’ouvrages aux intercommunalités. Des réponses devaient en effet être apportées à l’inquiétude des élus, qui se voient transférer des ouvrages et craignaient d’être immédiatement tenus responsables de leurs imperfections, de leurs fragilités, voire de leurs défaillances. Grâce à cette proposition de loi, une réponse claire et opérationnelle pourra être inscrite dans la loi, le temps que les décisions soient prises en matière de stratégie d’endiguement.

Je voudrais, pour conclure, insister encore sur le signal très positif que constitue cette proposition de loi, à laquelle le Gouvernement est dans son ensemble très favorable. Ce texte matérialise en effet notre souhait d’adapter la loi, lorsque cela est nécessaire, pour permettre aux libertés locales de s’exprimer et pour tenir compte des initiatives prises par les collectivités territoriales et qui fonctionnent déjà, comme celles prises par les départements. Il vient concrétiser les premiers engagements pris dans le cadre de la Conférence nationale des territoires et confirme que cet état d’esprit n’est pas que de façade : les engagements pris ont été tenus, et l’ont été rapidement.

Je salue le travail législatif à la fois rapide et efficace qui a permis de susciter cette proposition de loi, ainsi que le vote des députés, qui, unanimes sur tous les bancs, ont approuvé le texte qui vous est soumis cet après-midi. Je sais combien le Sénat est sensible à ces préoccupations. Je pense que cette proposition de loi répond à nombre d’entre elles en matière de GEMAPI. J’espère donc que vous suivrez la voie tracée par l’Assemblée nationale…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Jamais ! (Sourires.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … et que vous permettrez que la loi évolue, dans le sens d’une amélioration et d’une prise en compte des difficultés qu’elle pouvait poser pour nombre de collectivités territoriales. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai parfaitement entendu la philosophie du Gouvernement : il ne veut pas d’un nouveau big-bang territorial. Nous pouvons largement y souscrire, d’autant que c’était l’une de nos affirmations. Pour autant, force est de constater que nombre de textes ont besoin d’être à tout le moins explicités, peut-être même précisés, parce que c’est une demande des élus de nos territoires. Celui-ci n’y échappe pas.

Je commencerai par remercier notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui a beaucoup travaillé sur ce texte. À l’évidence, ces questions, celles liées à la GEMA, la gestion des milieux aquatiques, comme celles liées au fameux PI, la prévention des inondations, nécessitaient nombre de clarifications, à commencer par celle de l’attribution du chef de filat. C’est la question centrale, et nous y reviendrons lors de l’examen des amendements, qui portent essentiellement sur ce sujet.

J’ai malgré tout un regret à formuler, un regret relativement collectif et qui est davantage un enseignement qu’il nous faut tirer de cette proposition de loi et de la façon dont elle nous est parvenue, à quelque quinze jours de la prise de compétence des établissements publics de coopération intercommunale en matière de GEMAPI. Il a été difficile pour la commission des lois, et plus généralement pour le Sénat, d’expertiser le travail d’amendement réalisé à l’Assemblée nationale, ce qui nous a parfois un peu heurtés en ne nous permettant pas de formuler certaines propositions, de les rendre cohérentes et, surtout, de faire en sorte qu’elles répondent aux problématiques qui se posent actuellement. Par exemple, la commission a souhaité poser avec force la question du ruissellement, mais s’est heurtée au peu de temps que nous avions pour trouver une solution – même si nous vous ferons clairement des propositions – sur cette question majeure pour nombre de territoires, notamment du quart sud-est, comme mon propre département, l’Ardèche.

Par ailleurs, nous touchons du doigt une problématique majeure, dont il a été beaucoup question lors de la Conférence nationale des territoires, à laquelle, madame la ministre, vous avez fait référence : la différenciation territoriale.

À cet égard, si je continue de penser que cette proposition de loi est pertinente et répond à la problématique du chef de filat en prenant en compte la réalité des besoins, les perceptions des élus, comme nous l’ont confirmé les nombreuses auditions que nous avons tenues, sont largement différentes selon qu’ils sont du littoral, d’une région fluviale ou d’un territoire de montagne.

C’est, je crois, un sujet majeur, qu’il faut savoir prendre en compte, dans tous les sens : en écoutant les élus des territoires qui peuvent rencontrer des difficultés dans ce domaine comme dans d’autres – Mme la ministre a évoqué l’eau et l’assainissement, où se posent des problématiques à peu près communes – et en réaffirmant la philosophie de ce texte, qui consiste à désigner un référent, en l’occurrence l’intercommunalité, qui puisse faire œuvre utile en assumant le chef de filat sur ces sujets.

Forts de ces constatations, nous avons essayé de porter un regard attentif sur les propositions qui ont été faites sur ce texte issu de l’Assemblée nationale, en nous efforçant d’y apporter quelques corrections.

Ainsi, nous avons complété l’article 1er de la proposition de loi, qui permet aux départements et aux régions de poursuivre leur action en matière de GEMAPI au-delà du 1er janvier 2020, en autorisant les régions à financer des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par le bloc communal.

De plus, la commission des lois a souhaité prendre en compte le cas des communes isolées, avec lesquelles les départements ou les régions devront passer contrat ; je sais que c’est un sujet sur lequel nous avons une lecture un peu différente.

L’Assemblée nationale a entendu assouplir les modalités de transfert et de délégation de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte, en prévoyant notamment la sécabilité interne des quatre missions constitutives de cette compétence, aux articles 1er, 3 et 4. Si la commission des lois a émis de fortes réserves sur ce point, elle en a pour autant admis le principe, tout en clarifiant la rédaction proposée. Encore une fois, nous avons voulu veiller à ce que le portage de la compétence ne soit pas dilué.

La commission a également maintenu la faculté dont disposent actuellement les EPCI à fiscalité propre de transférer leurs compétences à un syndicat sur une partie seulement de leur territoire, ou à plusieurs syndicats sur des parties distinctes de leur territoire, dans l’ensemble du champ de la politique de l’eau, et pas seulement en matière de GEMAPI.

Par ailleurs, elle a précisé et complété le régime de responsabilité limitée des gestionnaires d’ouvrages de protection contre les inondations prévu à l’article 1er, au cas où un sinistre surviendrait pendant la période transitoire entre le moment de leur mise à disposition et celui de leur autorisation par le préfet. Elle a notamment étendu le bénéfice de ce régime de responsabilité limitée à l’ensemble des ouvrages de protection, et non aux seules digues, qui seraient mis à disposition du bloc communal par toute personne publique, et non par les seuls départements et régions.

La commission des lois s’est également penchée sur la prévention des inondations et la maîtrise des eaux de ruissellement. Observant que de nombreuses et graves inondations étaient dues au ruissellement des eaux plutôt qu’à la crue d’un cours d’eau ou à une submersion, elle s’est interrogée sur l’opportunité d’élargir le périmètre de la compétence GEMAPI à la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, ainsi qu’à la lutte contre l’érosion des sols. Pour l’heure, elle a souhaité autoriser l’affectation à de tels projets de tout ou partie du produit de la taxe GEMAPI. Nous vous ferons des propositions par voie d’amendement en vue d’intégrer cette compétence à moyen terme.

Moyennant ces modifications qui enrichissent le texte, la commission des lois a adopté cette proposition de loi.

Pour conclure, je me permettrai de rappeler le regret que j’ai formulé en préambule : l’examen par trop tardif de ce texte n’a pas permis à la Haute Assemblée d’en avoir une lecture exhaustive et, surtout, d’en reformuler certaines dispositions. Nous avons déjà évoqué ces sujets, notamment lors de la Conférence nationale des territoires, au cours de laquelle nous nous sommes collectivement interrogés sur la nécessité d’anticiper ce type de sujets : parce que, à l’évidence, les législateurs que nous sommes sont observés par les élus de l’ensemble des territoires.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. C’est vrai !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Nous avons l’ardente obligation, à défaut de provoquer un nouveau big-bang territorial, d’être au rendez-vous de leurs attentes en ce qui concerne la clarification de certains textes, pour les adapter aux différentes problématiques territoriales. Je forme donc à nouveau le vœu que, dans l’esprit des engagements pris jeudi dernier par le Premier ministre, nous puissions réellement prendre en compte les aspirations des acteurs des collectivités territoriales – et même, pourquoi pas, écouter la voix du Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel.

Mme Françoise Gatel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, des enjeux de sécurité et de santé considérables ont conduit le législateur à mettre fin à l’émiettement existant dans la gouvernance de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations. C’est ainsi que, en 2014, la loi MAPTAM a confié aux EPCI à fiscalité propre l’exercice de la compétence GEMAPI à compter du 1er janvier 2016. Cette loi avait pour ambition, simplement, de mieux structurer la maîtrise d’ouvrage à l’échelle nationale et de rationaliser l’organisation territoriale, marquée par l’enchevêtrement et la dispersion des pouvoirs locaux.

Cette mesure fut à l’époque sans aucun doute trop hâtivement votée, sans aucune étude d’impact préalable sur les conséquences considérables qu’elle engendrerait. Aussi, sous la pression des élus locaux, la loi NOTRe a-t-elle repoussé de deux ans, au 1er janvier 2018, l’entrée en vigueur de la GEMAPI, faisant ainsi la preuve de l’imperfection de la loi de 2014.

Aujourd’hui, force est de constater que, à quelques jours de son transfert programmé au bloc local, la compétence a bien du mal à se déployer sur le terrain : à ce jour, seulement 15 % environ des EPCI, en tout cas moins de 20 %, ont pris cette compétence. Comment pourrait-il en être autrement au regard des bouleversements techniques et administratifs que ce transfert entraîne, mais aussi des responsabilités afférentes, très importantes, et de son coût financier ?

Face aux inquiétudes légitimes et aux obstacles réels rencontrés sur le terrain, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi vient très utilement répondre aux interrogations pratiques des élus locaux en clarifiant certains points et, en même temps, en assouplissant le dispositif. Ainsi, elle réaffirme le rôle des départements et des régions et précise le cadre de responsabilité des élus, même si nombre d’interrogations subsistent sur la capacité des maires à répondre de leur pouvoir de police. Elle assouplit aussi les modalités de transfert et de délégation de la compétence en élargissant la concertation entre les acteurs. Toutefois, certains élus regrettent qu’elle ne permette pas une discussion globale, appréhendant des missions connexes telles que les compétences « eau et assainissement », traitées dans le cadre d’une proposition de loi sénatoriale qui, bien que votée à la quasi-unanimité de notre assemblée, n’a pas été reprise à l’Assemblée nationale.

Je salue, madame la ministre, votre volonté et celle du Gouvernement de trouver une issue positive à cette impasse. Vous le savez, nous serons très attentifs à vos propositions.

Pour autant, la présente proposition de loi, améliorée par l’excellent travail de notre rapporteur,…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. C’est bien vrai !

Mme Françoise Gatel. … est indispensable pour adapter le transfert GEMAPI au vu de l’urgence. J’en salue l’esprit, qui fait confiance à l’intelligence territoriale pour définir l’échelon compétent par rapport aux particularités de chacun de nos territoires. Il est évident que, dans un territoire de montagne et un territoire côtier, les missions GEMAPI ne recouvrent ni les mêmes réalités ni la même ampleur. De fait, comme vous l’avez souligné, madame la ministre, l’échelon de compétence pertinent varie nécessairement.

Toutefois, il nous semble que, comme trop souvent, ce texte relatif à des transferts aux collectivités territoriales souffre de l’absence de traitement des moyens financiers nécessaires. En effet, cette réforme, louable, comporte un manque : son financement. (M. Pierre-Yves Collombat sexclame.) Concrètement, elle plonge les élus locaux dans un dilemme : créer un nouvel impôt local en imposant à leurs administrés une taxe GEMAPI ou prélever une partie de leur budget déjà fort contraint. Rappelons, qui plus est, que cette taxe est assise en partie sur la taxe d’habitation, qui a vocation à disparaître…

Si j’ai bien compris ce que vous avez dit devant l’Assemblée nationale, madame la ministre, vous avez rassuré les élus sur ce sujet en précisant que le dégrèvement s’appliquerait à l’ensemble de la taxe d’habitation, GEMAPI comprise, pendant trois ans. Mais nous pouvons nous interroger sur ce qui se passera à l’issue de ce délai.

L’inquiétude des élus locaux est quelque peu aggravée par la baisse substantielle du budget des agences de l’eau, alors que celles-ci accompagnent les collectivités territoriales dans la prise de compétence GEMAPI et soutiennent leurs actions par le biais de la réalisation d’études et de travaux.

Enfin, madame la ministre, je voudrais soulever ici une question qui me paraît essentielle. L’État ne peut pas se décharger sur les collectivités territoriales de sa responsabilité sur des problématiques nationales ; je pense en particulier à la question des digues domaniales, dont la gestion relève principalement de l’intérêt national. Ce transfert placera les intercommunalités dans des situations intenables eu égard au coût considérable qu’elles auront à supporter par rapport aux moyens dont elles disposent, mais aussi aux conséquences parfois tragiques des inondations.

Certes, le texte prévoit un rapport sur les effets du transfert de la compétence GEMAPI aux EPCI sur la gestion des fleuves. Mais il eût sans doute été plus constructif et cohérent de légiférer en disposant préalablement des résultats de ce rapport. Aussi ai-je déposé un amendement visant à maintenir d’ores et déjà la responsabilité de l’État en ce qui concerne les digues domaniales, au titre de sa compétence régalienne en matière de sécurité des biens et des personnes.

Il semblerait que cet amendement soit irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution, car il créerait une charge publique supplémentaire. Je l’entends, mais, à ce stade, si l’échéance du désengagement de l’État en 2024 est confirmée, il y aura bien, à ce moment-là, transfert aux collectivités territoriales d’une nouvelle charge, considérable, sans compensation, ce qui fera peser sur elles une charge financière supplémentaire vraisemblablement tout à fait insupportable, notamment pour les communes et les autres collectivités territoriales du littoral.

À quelques jours de la nouvelle année et du temps des vœux, permettez-moi, madame la ministre, de souhaiter que le Parlement puisse un jour disposer du temps nécessaire à l’élaboration de lois pertinentes et opérantes, afin d’assurer aux collectivités territoriales la sagesse de la loi, la stabilité des dispositions législatives et la capacité à réaliser les obligations que la loi leur confie.

Ces vœux n’empêcheront pas le groupe Union Centriste de voter cette proposition de loi, qui va dans le bon sens en corrigeant, rassurant et assouplissant – ce pour quoi nous vous sachons gré. La proposition de loi fait ainsi écho de manière positive à la demande faite par les élus au Président de la République et au Gouvernement de tenir compte de l’intelligence territoriale et de la diversité des territoires. (M. le président de la commission des lois, ainsi que MM. Arnaud de Belenet et Jean-Marc Boyer applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, sur l’initiative de notre collègue Pierre-Yves Collombat, qu’il y a lieu de saluer, l’article 56 de la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 a attribué au bloc communal une nouvelle compétence, relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations, poétiquement appelée compétence GEMAPI. Cette initiative est venue répondre au besoin de gestion intégrée d’une compétence, à la suite de la multiplication des phénomènes d’inondations, notamment dans le Var, à Vaison-la-Romaine, dans l’Aude ou en Bretagne, et de phénomènes extraordinaires, comme la tempête Xynthia, qui ont causé non seulement des pertes humaines, mais également des désastres économiques considérables. Rien que pour les catastrophes survenues dans le Var en 2010 et 2011, on a déploré vingt-sept morts, près de 2 milliards d’euros de dégâts matériels et 35 000 sinistrés, ainsi que 2 000 entreprises et de nombreuses exploitations agricoles touchées.

Lors des débats de la loi MAPTAM, il avait été indiqué que ces catastrophes naturelles provoquaient en moyenne plus de 1 milliard d’euros de dégâts en France. Or nous savons bien que de tels phénomènes sont malheureusement appelés à se reproduire, avec le réchauffement climatique et la poussée de l’urbanisation, en particulier sur les territoires littoraux où la densité de construction était, en 2010, quatre fois supérieure à la moyenne nationale. Le Centre européen de prévention du risque d’inondation estime à 4 milliards d’euros le coût annuel moyen des dommages qui résulteront des inondations côtières en France à la fin du siècle en cours et à 12 milliards d’euros celui qui résultera des inondations fluviales.

Au regard de ces enjeux majeurs, il paraissait indispensable de définir une compétence ciblée en matière de protection contre les inondations ; une compétence qui permette, d’une part, de clarifier et de coordonner des niveaux de responsabilités jusque-là éclatées – sur 9 000 kilomètres de digues, on dénombre plus de 1 000 gestionnaires différents – et, d’autre part, d’associer deux compétences en une pour une vision plus stratégique des politiques publiques de protection des personnes et des biens, de préservation de la qualité de l’environnement et de maîtrise de l’urbanisation. De fait, avec la loi MAPTAM, l’EPCI à fiscalité propre devient l’acteur incontournable dans la démarche de prévention des risques d’inondation et de submersion, en cohérence avec les actions d’aménagement qu’il mène par ailleurs, comme le PLUI et le SCOT.

Pour autant, comme il a déjà été souligné, cette compétence demeure techniquement complexe, et de nombreuses interrogations et inquiétudes émanent des élus locaux. Elles révèlent la difficulté à organiser une structuration institutionnelle adéquate dans les délais réglementaires. En effet, en septembre 2017, dans le cadre d’un sondage réalisé par l’Assemblée des communautés de France, plus de 50 % des présidents de communauté et métropole ont déclaré souhaiter que cette compétence soit clarifiée et ses échéances de mise en place revues.

À la veille de l’inscription de la compétence GEMAPI dans les statuts des intercommunalités, la proposition de loi soumise à notre examen offre donc des clarifications et des assouplissements nécessaires, mais pas anodins, sans que les problèmes centraux soient pour autant complètement résolus. En effet, dans des délais proches de l’urgence, la proposition de loi présente des dispositions qui rassurent les élus locaux et répondent à des problèmes opérationnels.

Les principales mesures ont déjà été exposées par les orateurs précédents, en particulier par le rapporteur : la possibilité pour les départements et les régions de pérenniser leur engagement, qui était, je crois, une demande essentielle des élus locaux ; l’extension de l’assistance technique des départements à la prévention du risque d’inondation au titre de la solidarité et de l’aménagement du territoire, ce qui démontre, de manière plus générale, l’importance de la collectivité départementale en la matière ; l’assouplissement des modalités de transfert ou de délégation de la part des communes ou des EPCI aux syndicats mixtes de droit commun, aux EPTB et aux EPAGE, notamment en termes de sécabilité interne, externe et géographique. Cet assouplissement donnera plus de libertés aux territoires pour définir l’organisation institutionnelle qu’ils jugeront la plus adéquate. Il convient néanmoins de prévenir un émiettement de la compétence, qui nuirait à la cohérence des actions conduites et à l’identification d’un opérateur responsable.

Enfin, d’autres mesures, comme la possibilité pour un syndicat mixte ouvert d’adhérer à un autre syndicat mixte ouvert, représentent, selon nous, des avancées. C’est le cas aussi de la clarification du régime des responsabilités, qui demeure néanmoins imparfaite. L’extension, dans le texte de la commission, de l’affectation de la taxe GEMAPI aux actions de ruissellement est une autre avancée, qui nous paraît également nécessaire.

Sur ce dernier point, l’introduction de cette nouvelle disposition met en exergue l’incomplétude de la loi, notamment sur le financement de la compétence et l’articulation de celle-ci avec l’ensemble des compétences relevant du cycle de l’eau.

Restent des insuffisances auxquelles il faudra répondre ultérieurement. En effet, au-delà de l’intérêt de cette proposition de loi, et quand bien même elle s’attelle au plus urgent, plusieurs problèmes demeurent, dont certains sont assez fondamentaux.

Je pense au traitement des grands corridors fluviaux et des problématiques spécifiques des territoires littoraux, qui ne relèvent pas d’une logique de bassin-versant, comme le risque de submersion marine et la lutte contre l’érosion du trait de côte. Je pense aussi à l’articulation avec les compétences « eau et assainissement ». Nous savons en effet que les eaux de ruissellement et l’érosion des sols ont un impact sur les risques d’inondation.

De même, la responsabilité des gestionnaires d’ouvrages est encore traitée de manière imparfaite, qui plus est dans un contexte où les missions d’appui technique n’ont manifestement pas mené à terme tous leurs travaux.

Quant au financement de la GEMAPI, il ne fait l’objet que d’un rapport du Gouvernement au Parlement, ce qui n’engage pas à grand-chose… Par ailleurs, le financement en investissement peut parfois être entravé par la limitation des dépenses de fonctionnement des membres des syndicats mixtes, alors qu’il y va de la sécurité des territoires.

À ce sujet, nous restons convaincus que le financement proposé n’est pas à la hauteur des enjeux de vulnérabilité des populations évoqués dans mon propos introductif, quand bien même les dispositifs de financement tels que le fonds Barnier perdurent. Une remise à plat du financement du cycle de l’eau s’avère nécessaire pour évoluer vers des logiques de bassin et des solidarités territoriales amont-aval, d’autant plus compte tenu des fortes contraintes financières qui pèsent sur les collectivités territoriales et leurs partenaires, comme les agences de l’eau.

À titre indicatif, le Centre européen de prévention du risque d’inondation observe que les travaux réalisés aujourd’hui par les collectivités engagées dans des programmes de travaux, comme les programmes d’action pour la prévention des inondations ou ceux réalisés dans le cadre du plan Submersions rapides, coûtent un peu plus de 1 million d’euros par kilomètre pour ce qui concerne le confortement d’ouvrage, voire 1,7 million d’euros par kilomètre pour l’augmentation du niveau de protection des digues. On recense aujourd’hui 9 000 kilomètres de digues en France métropolitaine.

Pour ce qui concerne l’EPCI que je présidais encore il y a quelques semaines – une intercommunalité qui comprend quarante kilomètres de littoral et trois bassins versants –, le montant approximatif des investissements dédiés à la compétence GEMAPI oscillerait entre 45 millions et 70 millions d’euros, en sachant que la capacité totale d’investissement de cet EPCI s’élève à 25 millions d’euros en moyenne par an. C’est dire l’importance de la compétence GEMAPI.

Malgré ces insuffisances, nous ne souhaitons pas remettre en question l’adoption de cette proposition de loi, car elle permet de répondre pour partie aux interrogations et aux inquiétudes légitimes des élus locaux, sur les épaules desquels repose cette importante responsabilité. Parce que nous souhaitons que la mise en œuvre de cette compétence se fasse dans des conditions plus sereines et plus durables pour les territoires, nous voterons en faveur de ce texte tout en regrettant, comme d’autres, le délai de réflexion laissé au législateur qui, pour le coup, ne favorise pas – c’est un euphémisme ! – la tranquillité des échanges et ne permet pas d’aborder l’ensemble des problèmes soulevés localement, alors que le risque d’inondation constitue un risque majeur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, discuter de la compétence de nos collectivités territoriales en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations n’est pas un sujet anodin. Cette problématique porte en effet de lourds enjeux : des enjeux financiers, comme cela vient d’être rappelé, des enjeux environnementaux, des enjeux en termes de gouvernance et, plus largement, des enjeux de cohérence pour nos territoires. La loi MAPTAM de 2014, puis la loi NOTRe de 2015 ont en effet profondément redessiné le périmètre d’action de nos collectivités, sans toujours penser à l’ensemble de leurs conséquences.

En proposant d’aménager dans le temps le transfert de la compétence GEMAPI aux EPCI, nos collègues de l’Assemblée nationale ont fait un geste envers nos territoires. Il convient de le souligner et d’en saluer les initiateurs. La date butoir avait déjà été modifiée une première fois, afin de favoriser la continuité de l’exercice des missions jusqu’en 2020. Cette nouvelle proposition de loi nous permet d’envisager l’après-2020 pour des territoires qui souhaiteraient continuer à exercer de telles missions.

C’est le cas des conseils départementaux. Nombre d’entre eux ont d’ailleurs sollicité leurs parlementaires pour faire connaître leur désir de continuer à s’impliquer dans l’exercice des missions liées à la compétence GEMAPI. N’oublions pas que les départements sont historiquement engagés dans la prévention des inondations et des risques de submersion marine. Dieu sait que mon département, la Somme, a été concerné, tant par la submersion marine au début des années 1990 que par les inondations à la fin du siècle dernier, phénomène certainement lié à une crue de nappes perchées, ce qui n’était pas banal et difficile à déterminer.

En réaménageant le calendrier de mise en œuvre de la compétence GEMAPI, cette proposition de loi prête donc l’oreille aux sollicitations des élus de terrain.

Dans son article 1er, la proposition de loi prévoit la mise en place d’un régime dérogatoire concernant la responsabilité des établissements chargés des structures transférées. Il s’agit d’une mesure de bon sens. Comment imaginer l’inverse ? Il faut que la responsabilité de l’entretien soit progressivement transférée, afin que le rôle de chacun soit clairement identifié. Je crois que cette approche fait l’unanimité.

Sur ce point, nous tenons d’ailleurs à saluer le travail réalisé par nos collègues de la commission des lois,…

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Merci !

M. Jérôme Bignon. … qui ont contribué à moduler ce régime dérogatoire en faisant le choix réfléchi de déposer des amendements, afin de prendre en compte les communes isolées et d’inclure les barrages dans la définition des ouvrages et, plus largement, tous les ouvrages de protection contre les inondations. Je ne doute pas que ces mesures rencontreront l’assentiment du Sénat.

À l’article 2, les auteurs de la proposition de loi se sont ensuite penchés sur le problème central de la délégation de compétence GEMAPI et les conséquences financières de son transfert. Les députés ont timidement proposé la remise d’un rapport au Parlement. Il s’agit certes d’une première étape – il faut le reconnaître –, mais chacun sait aussi ce qu’il advient des rapports ! Il faudra sans doute des décisions plus ambitieuses pour parvenir véritablement à résoudre ce problème. Cela aurait pu être l’objet de cette proposition de loi. Nous regrettons ce manque d’ambition !

Lors des débats en commission, nous avions demandé que les principaux gestionnaires de fleuves, de zones côtières, de digues domaniales et de zones de montagne soient associés à cette concertation. M. le rapporteur et nos collègues de la commission des lois n’ont pas souhaité retenir cette approche. Je crois que le concours de l’ensemble des acteurs du cycle de l’eau est pourtant nécessaire pour résoudre cette problématique fondamentale du financement des missions en matière de GEMAPI. Nous ne pouvons pas faire l’impasse sur ce sujet.

Les articles 3 et 4 introduisent un principe de sécabilité interne et externe de la compétence GEMAPI. Cette mesure technique est un nouvel outil à la disposition des collectivités territoriales pour transférer tout ou partie de cette compétence à des établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux, les EPAGE, ou à des établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB. La faculté de transférer ces missions consacre de fait le principe de la responsabilité confiée au plus compétent. J’approuve bien entendu les ajustements opérés par la commission des lois.

Enfin, le nouvel article 9, introduit par nos collègues de la commission des lois, s’attaque à la question de l’affectation de la taxe GEMAPI. Il est proposé qu’elle contribue à financer les actions de maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, ainsi que les actions de lutte contre l’érosion des sols. Il s’agit d’une approche large, qui a le mérite de couvrir l’ensemble du sujet, mais il ne faut pas que cet élargissement pertinent affaiblisse les moyens confiés à l’exercice des missions GEMAPI.

Le groupe Les Indépendants, s’il partage très largement les préoccupations de notre collègue Kerrouche sur les nombreux sujets restés sans réponse ni perspective, votera en faveur de ce texte qui va dans le bon sens. Comme l’a souligné à juste titre notre collègue Gatel, cette proposition de loi a au moins le mérite de rassurer les élus locaux. (M. le président de la commission des lois, M. Arnaud de Belenet et Mme Françoise Gatel applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 1991, un auteur écrivait dans son ouvrage intitulé États dâme que « ce qui est facile n’a pas de saveur ».

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. C’est vrai !

Mme Maryse Carrère. Aussi, le transfert de la compétence de la GEMAPI vient s’ajouter à une mise en œuvre particulièrement « savoureuse », au sens de la déclaration de l’auteur que je viens d’évoquer – je veux parler de Nicolas Hulot –, des lois MAPTAM et NOTRe.

Les collectivités territoriales ont déjà été lourdement impactées par ces réformes complexes, dont la compréhension et la concrétisation sur le terrain n’ont pas été chose aisée. Soumises à un rythme effréné de réaménagement de leur fonctionnement et d’absorption des nouvelles compétences, très peu d’intercommunalités ont pu correctement anticiper la prise en charge de la compétence GEMAPI sur le plan opérationnel.

Cette proposition de loi apporte bien des avancées sur lesquelles je reviendrai. Mais était-il raisonnable de se hâter à quelques jours de la date butoir ? Au pire, cela donne une mauvaise loi, au mieux, une loi a minima. C’était d’ailleurs peut-être l’objectif !

Avant d’évoquer le contenu du texte, je pourrais parler des domaines qu’il escamote. Les questions du trait de côte et de l’érosion marine en sont absentes, ou présentes très marginalement dans une demande de rapport à l’article 2. Il n’est pas non plus question du financement de la compétence GEMAPI. Quid de la taxe quand la taxe d’habitation disparaîtra ? Pas un mot n’est dit des problématiques liées à l’application du texte dans les territoires ultramarins. Quant au risque d’inondation fluviale, il n’est pas non plus abordé dans cette proposition de loi. Les crues de la Seine et de ses affluents en juin 2016 doivent cependant nous interpeller, car nous savons que ces épisodes ont vocation à se reproduire.

Nous l’avons bien compris, ce texte vise à procéder aux derniers ajustements de la GEMAPI. Cette question de la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations est survenue dans le débat public en raison de la violence d’une crue qui a entraîné une prise de conscience.

Il faut mettre fin à un modèle où les compétences sont éclatées et les responsabilités sont diluées. S’il était nécessaire que la compétence GEMAPI soit enfin assumée de façon cohérente, le transfert de charges, lui, pour les collectivités locales n’est pas anodin et effraie les élus locaux. L’une des avancées indéniables de la loi MAPTAM fut de donner un cadre et de définir un chef de file – les intercommunalités –, même si nous ne pouvons que regretter le manque de cohérence de ce cadre avec les périmètres hydrographiques des bassins versants, une rivière ne connaissant pas les limites administratives des communautés de communes. La loi NOTRe, quant à elle, a permis de repousser l’échéance au 1er janvier 2018. Nous y sommes !

Permettez-moi de vous faire part de mon expérience d’élue locale dont la collectivité a anticipé le transfert de la compétence GEMAPI au 1er janvier 2017. C’est après deux épisodes violents de crues torrentielles en octobre 2012 et juin 2013 que les élus de mon territoire se sont retroussé les manches pour prendre en charge la reconstruction avec des moyens totalement inadaptés, et ce malgré les accompagnements financiers importants de l’État. Aujourd’hui, demeure un reste à charge important, qui ne peut être absorbé à l’échelle de nos communes et syndicats.

La violence de ces événements tragiques nous a tout d’abord poussés à gérer la crise, puis l’immédiate après-crise avec l’urgence de la reconstruction. Nous avons ensuite entamé collectivement une réflexion d’ampleur sur la gestion de notre environnement et les moyens de mieux prévenir ces crues, ainsi que sur la nécessaire mutualisation des moyens et la meilleure façon d’introduire davantage de solidarité entre l’amont et l’aval.

Cette réflexion a abouti à la transformation de notre PETR en un syndicat de bassin. Ce dernier dispose désormais de capacités d’action nettement renforcées, tant sur le plan financier qu’en termes d’ingénierie. Il fonctionne sur les bases d’une gouvernance partagée. Cette organisation a permis de mener à bien un nouveau contrat de rivière et un programme d’actions de prévention contre les inondations, un PAPI. Elle a également contribué à assurer une solidarité financière équitable entre amont et aval. Financièrement, c’est près de 1,2 million d’euros financés en partie par la taxe GEMAPI, d’ores et déjà instaurée, que nous avons prévu de consacrer à cent kilomètres de cours d’eau sur un territoire couvrant quatre-vingt-sept communes représentant 35 000 habitants.

Je mesure cependant l’inquiétude des élus, qui peuvent avoir le vertige : plus de 9 000 kilomètres linéaires de digues parsèment nos territoires, et ce même si nous savons que la responsabilité de la collectivité gestionnaire est limitée et encadrée. Ils sont également inquiets, parce qu’ils sont occupés à digérer la réforme de l’intercommunalité, qu’ils doivent composer avec des finances contraintes et qu’ils savent le coût des ouvrages concourant à la GEMAPI.

Quel objectif cherche à atteindre cette proposition de loi ? Apporter quelques souplesses, lever certains blocages : nous y souscrivons ! Nous y souscrivons notamment lorsque cela permet aux départements et aux régions, responsables aujourd’hui de la GEMAPI, de continuer à exercer ces missions après 2020 en lien avec les EPCI.

Nous nous retrouvons également dans les précisions bienvenues apportées au régime de responsabilité limitée des gestionnaires d’ouvrages, notamment pour la période transitoire, qui s’ouvrira dans quelques jours. Celles-ci sont de nature à rassurer. Il en va de même de l’exception temporaire de l’interdiction d’adhésion d’un syndicat mixte à un autre syndicat mixte exerçant une compétence GEMAPI.

Nous sommes également attendus sur les modalités de transfert et de délégation de tout ou partie de la compétence GEMAPI, cette fameuse sécabilité interne inscrite à l’article 3. En la matière, la souplesse accordée ne devra pas aboutir à un retour en arrière sous la forme d’un éclatement des compétences et des responsabilités.

Pour finir, madame la ministre, je tiens à vous remercier pour les précisions que vous avez apportées sur la compétence en matière d’eau et d’assainissement, lesquelles permettront, j’en suis certaine, de rassurer les élus de nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet.

M. Arnaud de Belenet. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, cher Mathieu Darnaud, mes chers collègues, corriger les lois NOTRe et MAPTAM sans renoncer à la volonté de réforme, corriger sans bouleverser à nouveau l’organisation des territoires suppose d’entendre les collectivités territoriales et de respecter les principes de notre République décentralisée, ainsi que l’intelligence territoriale. Ces principes animent le Gouvernement et les auteurs du texte soumis à notre examen, ce que je salue ici avec force.

Au-delà de la seule question de l’échéance ou de son report, les domaines de l’eau et de l’assainissement font l’objet d’un groupe de travail qui, autour de la ministre, permettra, je l’espère, d’aboutir bien vite à l’assouplissement attendu. La cohérence de la Conférence nationale des territoires contribuera certainement à organiser le financement de la GEMAPI, enjeu qui ne saurait constituer un écueil en commission mixte paritaire.

Pour aujourd’hui, nous soutiendrons la proposition de loi qui nous est soumise pour redéfinir la répartition de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations et, ainsi, une approche plus globale et nécessaire.

Sans doute, ce texte nous oblige-t-il à nous hâter. Mais le rat de La Fontaine ne s’est-il pas lui aussi hâté avec « patience et longueur de temps » pour finalement libérer le lion de ses filets ? Mes chers collègues, sans redondance trop longue avec les propos déjà tenus par les orateurs qui m’ont précédé, vous me permettrez de revenir sur trois points.

Le premier concerne le transfert obligatoire de la GEMAPI aux EPCI au 1er janvier prochain et, de manière exclusive, au 1er janvier 2020, question qui pose évidemment des difficultés auxquelles le texte répond. Départements et régions pourront désormais poursuivre leur action en matière de GEMAPI au-delà du 1er janvier 2020. C’est parfait ! Ce texte prend mieux en considération les collectivités locales exerçant tout ou partie de la compétence en les laissant évoluer dans un cadre d’action souple à l’heure où celle-ci n’est exercée que par 15 % des EPCI. Nous renouvelons notre confiance aux collectivités : elles disposeront en l’espèce des moyens de contrôler réellement les financements consentis et les modes d’exercice des compétences transférées.

Par ailleurs, les modalités de transfert et de délégation de la compétence à un syndicat mixte sont assouplies avec notamment la « sécabilité » des quatre missions constitutives de cette compétence. Sont ainsi privilégiées des réponses différenciées et opérationnelles aux problèmes rencontrés par nos territoires. Il faut s’en féliciter !

Enfin, la commission des lois a maintenu la faculté pour les EPCI à fiscalité propre de transférer tout ou partie des missions à un ou plusieurs syndicats mixtes. Il s’agit également d’une bonne chose.

Le deuxième point que je souhaite évoquer, c’est la question de la responsabilité de l’EPCI, qui n’a pas été éclipsée. Les communes et EPCI à fiscalité propre compétents deviendront bientôt gestionnaires de digues et autres ouvrages concourant à la prévention des inondations appartenant à d’autres personnes publiques. Ils bénéficieront du régime de responsabilité limitée prévu par le code de l’environnement. Cependant, pour prendre en compte l’incertitude qui subsistait quant à l’application de ce régime dérogatoire au cours de la période transitoire, il a été prévu que la responsabilité dudit gestionnaire ne pourrait être engagée en raison des dommages que l’ouvrage n’aurait pas permis de prévenir, sauf à ce qu’ils soient dus à un défaut d’entretien par le gestionnaire.

Troisième et dernier point, ce texte traite de la question de l’élargissement du périmètre de la compétence GEMAPI à la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, ainsi qu’à la lutte contre l’érosion des sols. Je rejoins sur le fond le rapporteur : de nombreuses inondations sont dues au ruissellement plutôt qu’à la crue d’un cours d’eau. Une commune française sur trois est inondable, en partie ou en totalité. En Seine-et-Marne, mon département, ce ne sont pas moins de 4 400 kilomètres de rivières susceptibles de se transformer en rampes de lancement pour d’éventuelles submersions.

Devant ce constat et l’ampleur des risques, notre groupe a déposé un amendement d’appel : dans l’attente de la proposition de loi qui articulera le dispositif actuel avec la nouvelle organisation des compétences en matière d’eau et d’assainissement, nous devons pouvoir débattre de l’opportunité d’effectuer une répartition des compétences qui serait de nature à indexer nos dispositifs artificiels sur les étapes, cette fois-ci naturelles, du grand cycle de l’eau.

Le groupe La République En Marche n’a aucun regret, car ce texte représente une étape positive. Nous sommes sur le bon chemin. C’est pourquoi nous renvoyons à des étapes ultérieures les enjeux certes importants que sont le financement de la GEMAPI ou encore d’autres sujets, en particulier le troisième point que je viens d’évoquer. (M. le président de la commission des lois applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce que l’on a pris l’habitude d’appeler improprement la loi GEMAPI pour « gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations » s’est voulu la réponse à un constat : celui de la nécessité pour notre pays, qui manque d’une politique globale de prévention de l’inondation sur l’ensemble du territoire, à l’exception des plans Grands Fleuves, de se contenter d’un assemblage mal coordonné de dispositifs sectoriels, financés trop souvent de manière aléatoire et parfois en concurrence.

Relativement développé au-dessus de la Loire, le dispositif se limitait au sud, pourtant exposé aux redoutables aléas climatiques « cévenols », à quelques initiatives locales. Le législateur a bien sûr intégré cet aspect des choses dans sa loi MAPTAM, contrairement à ce que j’ai pu entendre.

Deux raisons essentielles expliquaient la situation : l’absence d’une gouvernance clairement identifiée de la compétence « prévention de l’inondation » et l’absence de financement pérenne d’une politique de prévention. C’est à ces deux lacunes que la loi a voulu répondre.

Pour ce faire, elle a tout d’abord prévu un financement pérenne de la politique de prévention par une taxe affectée, même si tout le monde n’est visiblement pas encore au courant, de même que certains ne semblent pas au courant que l’assiette de cette taxe est beaucoup plus large que celle de la taxe d’habitation. Ma foi…

La loi a ensuite attribué la compétence GEMAPI aux EPCI à fiscalité propre, premier échelon territorial de proximité de taille suffisante pour agir et désormais présents sur l’ensemble du territoire national. Mais tenant compte du fait que l’échelon pertinent de l’action était le bassin-versant, qui incluait souvent plusieurs EPCI – la loi n’a donc pas non plus oublié cette réalité –, la loi a prévu la possibilité de déléguer à un établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau, un EPAGE, la mise en œuvre de la compétence. Dans les grands bassins hydrographiques, il a été décidé que des EPTB assureraient la coordination entre les EPAGE. En outre, en tant que syndicats mixtes, départements et régions pouvaient en être membres.

Il est donc faux de prétendre, comme le fait l’exposé des motifs de la présente proposition de loi, que la loi a « confié à titre exclusif » aux EPCI à fiscalité propre la prévention de l’inondation, laissant entendre par là que tous les anciens acteurs en étaient exclus. Les articles prévoyant que départements et régions et, d’une façon générale, tous les acteurs actuels de la prévention des inondations peuvent « continuer » à exercer cette mission me semblent donc sans objet. Sauf si on entend par là que ces collectivités continueront à agir seules dans leur coin et non dans le nouveau cadre des EPAGE !

Vu la complexité du problème, vu la diversité des domaines et des paramètres à prendre en compte, une gouvernance unique et clairement définie est pourtant la première condition de l’efficacité. Remettre cela en cause, comme le fait la proposition de loi sous prétexte qu’existent déjà des syndicats, des EPTB, des départements ou des régions en charge d’une partie seulement de la compétence, constituerait une évidente régression. Cela n’a rien à voir avec le respect des libertés locales ou la confiance faite aux collectivités de s’organiser.

Voilà l’origine du lobbying mené pour que rien ne change dès la discussion de la loi. Si vous voulez des détails, mes chers collègues, je vous en donnerai ! La présente proposition de loi est le dernier épisode de cette offensive. Rien d’étonnant que ce soit « une demande forte exprimée par plusieurs collectivités territoriales », pour reprendre l’exposé des motifs et comme cela a été amplement rappelé ici même. Jusqu’ici, le résultat s’est limité à un report de la mise en œuvre de la loi de 2016 à 2018. L’échéance échue, sous prétexte d’une insuffisante préparation, on nous propose rien moins que de supprimer l’un de ses apports essentiels : une gouvernance clairement identifiée en charge de la prévention et de protection contre les inondations, dans sa globalité.

Est-ce à dire, pour autant, que le texte issu de la loi MAPTAM serait intouchable ? Certainement pas ! C’est ce que montre l’article 9, introduit par notre commission, qui vise à inclure le ruissellement dans le champ de la GEMAPI. Il s’agit d’une question essentielle pour les zones urbaines – ne dit-on pas que « la ville inonde la ville » ? – et pour le sud du pays. S’y opposer pour d’obscures raisons politico-juridiques, c’est clairement condamner à l’échec toute politique de prévention des inondations dans de nombreuses villes et la moitié du pays.

Si j’ai déposé un amendement au texte de la commission, c’est seulement parce que, dans sa rédaction actuelle, il me paraît rompre l’unité de la gouvernance en matière de prévention de l’inondation. Je l’ai déjà amplement indiqué.

Pour conclure, je me contenterai de rappeler que, contrairement à ce que pourraient laisser supposer le jour et l’heure d’examen d’un texte aussi lourd de conséquences, la procédure expéditive utilisée, les effectifs clairsemés que je vois dans l’hémicycle, la présentation qu’a faite Mme la ministre de cette proposition de loi devenue un simple texte de répartition des compétences, nous ne traitons pas d’une question anodine, mais de vies humaines et de dégâts considérables. En 2010, nous avons comptabilisé soixante-dix-huit morts et deux disparus entre les victimes de la tempête Xynthia et des inondations varoises ; en 2011, six morts ; en 2012, deux morts ; en 2014, dix morts ; en 2015, vingt morts en région parisienne ; en 2016, cinq morts !

Outre le coût humain, la facture est énorme. En moyenne, ces dernières années, elle s’élève à près de 1 milliard d’euros par an, la moitié seulement étant indemnisée au titre des catastrophes naturelles. En attendant mieux, un rapport de l’OCDE estime que la prochaine grande inondation de l’Île-de-France coûtera 40 milliards d’euros. Ces dix dernières années, 50 % des communes françaises ont été affectées par les inondations : il s’agit bien d’un problème général !

À part ça, l’urgent est de neutraliser les quelques outils innovants fournis par la loi GEMAPI. La République est peut-être en marche, mais, en l’espèce, c’est à reculons ! Et puisque j’aperçois notre collègue Didier Guillaume sur ces travées, je vous rappellerai ce qu’il nous a dit lors de l’examen de la loi : « Chacun prendra ses responsabilités » !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations
Articles additionnels après l’article 1er

Article 1er

I. – Le I de l’article 59 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi modifiée :

a) Au début, les mots : « Les conseils généraux, les conseils régionaux, leurs groupements ou les autres personnes morales de droit public » sont remplacés par les mots : « Les départements, les régions ou leurs groupements » ;

a bis) Après le mot : « assurent », sont insérés les mots : « au 1er janvier 2018 » ;

b) Les mots : « , à la date de publication de la présente loi » sont remplacés par les mots : « ou à une commune qui n’est pas membre d’un tel établissement public » ;

2° Après la même première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Par dérogation à la première phrase du présent I, les départements et les régions qui assurent l’une de ces missions à la date du 1er janvier 2018 peuvent, s’ils le souhaitent, en poursuivre l’exercice au-delà du 1er janvier 2020, sous réserve de conclure une convention avec chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre concerné. Cette convention, conclue pour une durée de cinq ans, détermine notamment les missions exercées respectivement par le département ou la région, d’une part, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, d’autre part, leurs modalités de financement et la coordination de leurs actions. »

II. – Le II de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales est ainsi rétabli :

« II. – La région peut contribuer au financement des projets mentionnés aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par une commune, un établissement public de coopération intercommunale ou un syndicat mixte constitué en application de l’article L. 5711-1 du présent code. »

III. – (Supprimé)

IV . – L’article L. 562-8-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’une commune ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre s’est vu mettre à disposition un ouvrage en application de l’article L. 566-12-1, si un sinistre survient avant l’expiration du délai maximal fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au troisième alinéa du présent article, à l’échéance duquel l’ouvrage n’est plus constitutif d’une digue au sens du I de l’article L. 566-12-1 ou est réputé ne pas contribuer à la prévention des inondations et submersions, la responsabilité du gestionnaire de l’ouvrage ne peut être engagée à raison des dommages que celui-ci n’a pas permis de prévenir, dès lors que ces dommages ne sont pas imputables à un défaut d’entretien de l’ouvrage par le gestionnaire au cours de la période considérée. »

Mme la présidente. Je suis saisie de douze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 28, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Les mots : « à la date de publication de la présente loi » sont supprimés ;

II. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Après les mots : « à fiscalité propre », sont insérés les mots : « ou à une commune qui n’est pas membre d’un tel établissement public » ;

La parole est à M. le rapporteur.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Il s’agit de corriger une erreur matérielle.

Mme la présidente. L’amendement n° 40, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Les mots : « à la date de publication de la présente loi » sont supprimés.

II. – Alinéa 6

1° Première phrase

Supprimer les mots :

commune ou

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

le département ou la région, d’une part, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, d’autre part,

par les mots :

le département, la région et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés,

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’article 1er dans sa rédaction résultant de la première lecture à l’Assemblée nationale.

Le I de l’article 1er prévoyait la conclusion de conventions entre les EPCI, les départements et les régions qui souhaitent poursuivent leurs interventions au titre de la GEMAPI au-delà de 2020. Il n’est en effet ni opportun ni juridiquement utile d’étendre cette disposition aux communes dans la mesure où les EPCI à fiscalité propre seront seuls compétents en matière de GEMAPI à compter du 1er janvier 2018. Une telle démarche irait à l’encontre du principe d’exclusivité de la compétence.

J’ai bien entendu que vous souhaitiez vous assurer du fait que les communes isolées qui ne sont pas membres d’un EPCI à fiscalité propre ne soient pas exclues de la possibilité de conventionner avec le département ou la région. Je souhaite vous rassurer sur ce point, puisque le droit en vigueur prévoit explicitement la situation. Le V de l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales dispose en effet que, « sur le territoire des îles maritimes composées d’une seule commune, les schémas départementaux de coopération intercommunale ne sont pas dans l’obligation de prévoir la couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ». Les communes concernées disposent donc de compétences relevant du bloc communal et pourront conclure des conventions avec le département ou la région sans que la loi ait à le prévoir expressément.

La situation des communes isolées ou insulaires étant ainsi traitée, je vous propose de supprimer la mention qui est faite de la « commune » au I de l’article 1er.

Mme la présidente. L’amendement n° 34, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Alinéas 6 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je serai bref, ayant déjà développé l’argumentaire.

La complexité du sujet rend nécessaire une coordination des actions de l’ensemble des intervenants en matière de protection et de prévention contre les inondations. Je le répète, si on ne désigne pas un responsable unique dans ce domaine, lequel pourrait par ailleurs tout à fait s’associer avec d’autres collectivités, on vide la loi GEMAPI de son principal intérêt. On en reviendrait ainsi aux initiatives locales. Ce n’est pas que je sois contre les initiatives locales, mais, en matière d’inondations, on a vu à quoi ça mène : un chapelet de morts tous les ans ou tous les deux ans ! Veut-on vraiment rompre avec cette situation ou pas ? Si on ne le veut pas, qu’on le dise !

Mme la présidente. L’amendement n° 21 rectifié ter, présenté par Mmes Bories et Lopez, MM. Grand, Bonhomme et Babary, Mmes Deromedi et Gruny, M. D. Laurent, Mme Lamure, M. Lefèvre, Mmes Puissat et Lanfranchi Dorgal et MM. de Nicolaÿ et Paccaud, est ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Après l’année :

2018

insérer les mots :

, soit directement, soit par leur contribution en tant que membre d’un syndicat mixte ouvert ou toutes autres formes de groupements,

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Les syndicats ouverts interdépartementaux et interrégionaux ont démontré toute leur utilité, en portant d’importants investissements d’intérêt général. C’est le cas, dans la région de notre collègue Pascale Bories que je représente ce soir, du Syndicat mixte interrégional d’aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer, qui gère, depuis 2003, les ouvrages de protection contre les crues du fleuve et met en œuvre le plan Rhône. C’est également le cas, sur mon territoire, de l’EPTB Charente.

La législation issue des lois MAPTAM et NOTRe ne permettra plus aux conseils régionaux et aux conseils départementaux, à partir du 1er janvier 2020, d’exercer tout ou partie de la nouvelle compétence GEMAPI, en particulier d’effectuer les opérations de protection contre les inondations relatives aux grands fleuves.

Pour pérenniser les syndicats précédemment évoqués, il faut permettre aux départements et aux régions, qui, jusqu’à la prise de la compétence GEMAPI par les EPCI, étaient impliqués, de poursuivre leur action dans ce domaine, notamment au bénéfice des syndicats mixtes ouverts dont ils sont membres.

Tel est l’objet du présent amendement : sans modifier l’esprit de la proposition de loi, il tend simplement à préciser les formes de participation des départements et des régions.

Mme la présidente. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Danesi, Brisson, Lefèvre, de Legge, Vogel et Morisset, Mme Puissat, M. D. Laurent, Mmes Lamure, Berthet, Chauvin et L. Darcos, MM. Paccaud, Pierre, Savin et Pointereau, Mme Bories, M. Dallier, Mme Deromedi, MM. Laménie, Longuet, Milon, Mouiller et Paul et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La convention peut notamment prévoir, dans les conditions qu’elle détermine, un reversement d’une partie de la taxe mentionnée à l’article 1530 bis du code général des impôts au profit du département ou de la région.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

… – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. Cet amendement, qui vient compléter l’alinéa 6 de l’article 1er de la proposition de loi, tend à prévoir la possibilité, dans le cadre de la convention obligatoire, d’instaurer un reversement volontaire par l’EPCI à fiscalité propre ayant perçu la taxe GEMAPI d’une partie de cette taxe, soit au conseil départemental, soit au conseil régional, soit aux deux.

La logique d’affectation de la taxe est respectée, car seules les missions GEMAPI pourront être financées par son produit.

Toutefois, en autorisant un reversement aux départements et aux régions, la loi reconnaît la logique de solidarité au niveau supra-communautaire et permet à cette solidarité de s’exercer à une échelle adaptée, par exemple celle du bassin-versant. En effet, les recettes fiscales ne sont pas forcément là où les besoins d’investissement sont les plus importants.

En conséquence, chaque convention sera amenée à préciser si le financement des missions retenues s’appuie, en tout ou partie, sur la taxe spéciale GEMAPI ou uniquement sur le budget général des collectivités signataires.

Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. Danesi, Vogel, Brisson, Lefèvre, de Legge, Chaize, Courtial et Morisset, Mme Puissat, M. D. Laurent, Mmes Lamure, Berthet, Chauvin et L. Darcos, MM. Paccaud, Pierre, Savin et Dallier, Mme Deromedi, MM. Laménie, Longuet, Milon, Mouiller, Paul et Pointereau et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Lorsque l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou la commune a transféré tout ou partie de sa compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations à un syndicat mixte, ce dernier est partie à la convention pour l’exercice des missions qui lui ont été transférées.

La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. Cet amendement a pour objet de prévoir l’intervention, à la convention obligatoire, des syndicats mixtes auxquels les EPCI auront transféré tout ou partie de leur compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. En effet, de nombreux EPCI ont transféré ou vont transférer tout ou partie des missions GEMAPI à des syndicats mixtes de droit commun ou à des établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau, ou EPAGE. Lorsqu’un tel transfert de compétence est opéré, il est impératif que le syndicat mixte compétent soit aussi signataire de la convention obligatoire à intervenir entre les parties prenantes, notamment les départements et régions qui poursuivront leur mission GEMAPI au-delà du 1er janvier 2020.

Le présent amendement vise donc à régler expressément ce cas de figure, en prévoyant l’intervention obligatoire à la convention du syndicat mixte bénéficiaire d’un transfert de compétence GEMAPI de la part d’un EPCI.

Mme la présidente. L’amendement n° 18 rectifié ter, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert, Bories, Lassarade et Lamure, MM. Morisset, Babary, Brisson, Lefèvre, Paul et Pierre, Mme Deromedi et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Lorsque l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a transféré tout ou partie des missions mentionnées au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement à un syndicat intercommunal ou à un syndicat mixte en application de l’article L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales, ce syndicat est partie prenante à la convention pour l’exercice des missions qui lui ont été transférées.

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Comme cela vient d’être précisé, l’article 3 de la présente proposition de loi tend à autoriser un EPCI à fiscalité propre à transférer tout ou partie des missions liées à l’exercice de la compétence GEMAPI à un syndicat de communes ou un syndicat mixte.

Les syndicats mixtes du secteur de l’eau se sont étonnés d’apprendre qu’ils pourraient être exclus de la convention que le département ou la région aura l’obligation de conclure, en application des dispositions prévues à cet article 1er. Cette exclusion leur paraît contestable dès lors qu’ils comptent parmi leurs adhérents des EPCI à fiscalité propre prévoyant déjà de leur transférer l’exercice de certaines missions attachées à la compétence GEMAPI.

J’ai donc souhaité déposer cet amendement, proche de l’amendement n° 15 rectifié que notre collègue René Danesi vient de présenter, et que j’ai également cosigné, afin de pouvoir, au moins, obtenir des précisions sur les raisons de cette exclusion. Celle-ci, j’y insiste, est difficilement justifiable, dès lors qu’il est précisément envisagé, pour la mise en œuvre de cette compétence GEMAPI, de s’appuyer sur les syndicats mixtes reconnus comme établissements publics territoriaux de bassin ou établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau.

Mme la présidente. L’amendement n° 41, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 7 à 9

Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :

II. - Le II du même article 59 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales, et pour une période courant jusqu’au 1er janvier 2020, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut, y compris par une délibération prise avant le 1er janvier 2018, déléguer par convention, en totalité ou partiellement, l’une des missions mentionnées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement à un syndicat mixte constitué en application des articles L. 5711-1 et L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales. »

III - Après le IV dudit article 59, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« IV bis. - Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre qui n’assure pas les missions mentionnées au I du présent article peut décider, par délibération prise avant le 1er janvier 2018, de transférer l’ensemble de ces missions ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement, à un syndicat de communes ou à un syndicat mixte, sur tout ou partie de son territoire, ou à plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes de son territoire.

« La délibération mentionnée au premier alinéa du présent IV bis prend effet à la date effective du transfert de compétence au syndicat. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. La modification proposée dans le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat contribuerait à revenir sur les équilibres, encore récents, établis dans le cadre de la loi NOTRe, ce qui dépasse très largement l’objet de la présente proposition de loi, centrée sur les modalités d’exercice de la compétence GEMAPI. Il s’agit, ici, de traiter de mesures revêtant un caractère transitoire, à savoir la permission octroyée à un EPCI à fiscalité propre, jusqu’au 1er janvier 2020 seulement, de déroger aux dispositions de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales, en autorisant l’intercommunalité à déléguer tout ou partie des missions attachées à la compétence GEMAPI à des syndicats mixtes de droit commun.

Je vous propose de rétablir le II de l’article 1er, tel que voté par l’Assemblée nationale, cette rédaction permettant de conserver les objectifs que nous partageons tous, sur le fond, sans toucher au droit des collectivités locales dans sa portée générale. Il apparaît en effet préférable d’insérer les dispositions concernées au sein de l’article 59 de la loi MAPTAM, qui traite d’autres mesures transitoires, plutôt que de les inscrire dans le code général des collectivités territoriales, alors même qu’elles ont un caractère transitoire.

Le Gouvernement souhaite aussi rétablir le III de cet article 1er, qui prévoit la possibilité pour les EPCI à fiscalité propre de délibérer pour transférer tout ou partie de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte avant la date effective du transfert de compétence, soit avant le 1er janvier 2018.

En 2015, le législateur avait pris soin de supprimer la disposition permettant aux régions de contribuer au financement des opérations d’intérêt régional des départements, des communes ou de leurs groupements. Réintroduire des dispositions conférant une faculté de financement encore plus large serait contraire aux objectifs de rationalisation et de diminution des financements croisés.

Il n’est donc pas souhaitable, dans un souci de clarification de la répartition des compétences entre les différents échelons des collectivités locales, d’étendre aux régions les dispositions de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, qui est un article de portée générale, et ce même si la disposition envisagée concerne la seule compétence GEMAPI.

Il convient également de rappeler que les dispositions introduites à l’article 1er de la présente proposition de loi permettent d’ores et déjà à l’ensemble des régions de poursuivre leur intervention en matière de GEMAPI, ce qui justifie d’autant moins le recours à une modification de cet article L. 1111-10.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 25 rectifié bis est présenté par MM. Reichardt, Husson, Daubresse, Brisson, de Nicolaÿ et J.M. Boyer, Mme Bories, MM. Kennel, Mouiller, Savary, Paul, Bazin, Chatillon, Mayet et Raison, Mme Troendlé et MM. Milon, Lefèvre et Gremillet.

L’amendement n° 26 rectifié est présenté par M. Kern, Mme Vermeillet, MM. Laugier et Médevielle, Mmes Loisier et Billon, M. Delahaye, Mme de la Provôté, MM. Détraigne, Longeot et Canevet et Mme Gatel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. – La région peut contribuer au financement des projets mentionnés aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, pour lesquels elle ne serait pas elle-même maître d’ouvrage. »

La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié bis.

M. Jean-Marc Boyer. À la suite de l’adoption, en commission des lois, d’un amendement du rapporteur au Sénat, la rédaction de l’article 1er a été modifiée.

La nouvelle rédaction paraît trop restrictive sur la question du financement de la GEMAPI par les régions. Ces dernières pourraient la financer uniquement pour les maîtrises d’ouvrage assurées par une commune, un EPCI ou un syndicat mixte fermé. Or, actuellement, la région Grand Est, tout comme d’autres régions de France – PACA, notamment –, finance via ses dispositifs « Eaux et milieux aquatiques » de nombreuses structures, notamment des associations et des syndicats mixtes dits « ouverts ».

Par cet amendement, il est donc proposé une formulation plus large, afin que les modalités actuelles de financement de cette compétence puissent perdurer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour présenter l’amendement n° 26 rectifié.

Mme Françoise Gatel. Il est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 19 rectifié quater, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert, Bories, Lassarade et Lamure, MM. Morisset, Babary, Brisson, Lefèvre, Paul et Pierre, Mme Deromedi et MM. Mayet et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Remplacer les mots :

La région peut

par les mots :

Le département ou la région peuvent

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Sur l’initiative de Mathieu Darnaud, son rapporteur, la commission des lois a adopté un amendement tendant à permettre à la région de verser des contributions financières aux projets mis en œuvre pour l’exercice de la compétence GEMAPI et sous la maîtrise d’ouvrage d’une commune, d’un EPCI à fiscalité propre ou d’un syndicat mixte.

Le présent amendement a pour objet d’étendre cette possibilité aux départements, ce qui semble cohérent compte tenu de l’implication de ce niveau de collectivité territoriale dans l’exercice de la compétence GEMAPI, pouvant revêtir différentes formes : la possibilité, prévue à l’article 1er, de continuer à exercer directement certaines missions relevant de cette compétence, une assistance technique aux collectivités concernées ou encore une contribution financière à la réalisation de certains projets.

S’agissant de cette dernière possibilité, il me semble opportun de mentionner clairement que les projets relevant de la compétence GEMAPI sont susceptibles de recevoir des aides du département, la rédaction de l’alinéa 1er de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales apparaissant à cet égard insuffisamment précise. En effet, seuls les communes et les groupements sont mentionnés, ce qui exclut de fait les syndicats mixtes.

Il s’ensuit concrètement que le préfet, comme on l’a déjà vu dans d’autres domaines, pourrait considérer comme illégale une subvention versée par le département à un syndicat mixte compétent pour exercer certaines missions relevant de la compétence GEMAPI.

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié quater, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert, Bories, Lassarade et Lamure, MM. Morisset, Babary, Brisson, Lefèvre, Paul et Pierre, Mme Deromedi et MM. Mayet et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après la référence :

de l’article L. 5711-1

insérer les mots :

ou à l’article L. 5721-2

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Via un amendement du rapporteur adopté en commission, la région s’est vu octroyer la possibilité de participer financièrement à des projets mis en œuvre dans le cadre de la GEMAPI et réalisés sous la maîtrise d’ouvrage des autorités compétentes. Parmi celles-ci, figurent les syndicats mixtes, mais uniquement dans le cas où il s’agit de syndicats mixtes fermés.

Les syndicats mixtes ouverts seront exclus de fait du dispositif et ne pourront donc pas bénéficier de ces aides, alors que de nombreux établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau ou d’établissements publics territoriaux de bassin auront précisément un statut de syndicat mixte ouvert. Comment justifier une telle exclusion ?

En l’absence de modifications, la région ne pourra pas financer un syndicat mixte ouvert comptant, notamment, un département parmi ses membres.

Le présent amendement a donc pour objet d’étendre la possibilité de recevoir des aides financières de la région aux syndicats mixtes ouverts.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 40, la commission a une lecture divergente de celle du Gouvernement. Comme il l’a fait à l’Assemblée nationale, celui-ci nous demande de supprimer, à l’article 1er de la proposition de loi, toute référence aux communes qui ne sont pas membres d’un EPCI à fiscalité propre. Je tiens ici à rappeler qu’il en existe dix à l’heure actuelle, dont quatre sont dispensées par la loi, de manière permanente, d’adhérer à un EPCI à fiscalité propre.

Sans mauvais jeu de mots, il ne nous semble pas couler de source qu’une commune dispensée d’adhérer à un EPCI à fiscalité propre puisse, de ce seul fait, être habilitée par la loi à conclure une convention dont, selon cette même loi, seul un EPCI peut être partie prenante, aux côtés des départements et des régions.

Pour nous en tenir à la seule compétence GEMAPI, je rappelle que les articles L. 566-12-1 et L. 566-12-2 du code de l’environnement et l’article 1530 bis du code général des impôts, qui ont un caractère permanent, font tous référence aux communes ou EPCI compétents en la matière. Il en va de même des paragraphes II, III et IV de l’article 59 de la loi MAPTAM, dans lesquels viendraient s’insérer les dispositions prévues à l’article 1er de la présente proposition de loi.

Enfin, la commission des lois ne veut pas insulter l’avenir. Il n’est pas impossible que d’autres communes soient à l’avenir dispensées d’adhérer à un EPCI, des communes nouvelles que le législateur jugerait aptes à assumer elles-mêmes les compétences normalement dévolues à l’intercommunalité des communes de la métropole du Grand Paris, dont on annonce le démantèlement.

Ce sera donc un avis défavorable sur l’amendement n° 40.

Le point soulevé par Pierre-Yves Collombat dans son amendement n° 34 – je l’ai évoqué, d’une certaine manière, lors de la discussion générale – reprend un débat que nous avons eu assez longuement en commission des lois. Si nous épousons la position défendue par notre collègue, qui réaffirme la nécessité d’une gouvernance claire, nous avons néanmoins entendu l’ensemble des associations d’élus, qui demandent avec insistance à pouvoir poursuivre leur action relative à la compétence GEMAPI au-delà de 2020. Nous proposons de leur faire confiance, tout en appuyant la nécessité de ne pas perdre en clarté au niveau de l’exercice de la compétence.

Il faudra certainement revenir sur le sujet. Dans l’esprit, cet amendement visait à fixer une date butoir ; nous décidons de faire confiance aux différentes collectivités, mais encore une fois, c’est en souhaitant que la gouvernance ne soit pas trop mise à mal par cette proposition de loi. Ce sera donc un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 21 rectifié ter – le premier d’une série d’amendements qui vont dans le même sens – tend à préciser que les régions qui, au 1er janvier 2018, sont en capacité d’exercer des missions relevant de la GEMAPI par le biais d’une participation à un syndicat mixte ouvert ou à un autre groupement peuvent poursuivre leur action au-delà de 2020.

Il me semble – mais je m’interroge encore sur ce point – que cet amendement est entièrement satisfait par l’article 1er. J’imagine que c’est ce que le Gouvernement nous confirmera.

L’amendement n° 7 rectifié a été rejeté par la commission, qui ne souhaite pas que les EPCI à fiscalité propre puissent reverser une partie du produit de la taxe GEMAPI au département ou à la région. Il s’agit là pleinement d’un sujet de gouvernance : on peut difficilement revendiquer le portage de la compétence par les intercommunalités et admettre une réversion au département ou à la région. Ce sera donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

L’amendement n° 15 rectifié vise à prévoir qu’un syndicat mixte auquel a été transféré l’exercice de la compétence GEMAPI est partie à la convention conclue entre le département ou la région et l’EPCI compétent.

Cette proposition nous semble superflue, puisque les départements et les régions pourront de fait adhérer à de tels syndicats mixtes. En outre, il est préférable que cette convention, qui touche à la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités, soit conclue avec le titulaire de la compétence GEMAPI, à savoir la commune ou l’EPCI, même si l’exercice de cette compétence a été transféré ou délégué à un syndicat. Ce sera donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

L’amendement n° 18 rectifié ter de notre collègue Laurent est proche du précédent. Il vise également à ce qu’un syndicat mixte auquel a été transféré l’exercice de la compétence GEMAPI soit partie à la convention conclue entre le département ou la région et l’EPCI compétent. À nouveau, la proposition apparaît superflue, les départements et régions étant aptes à adhérer à de tels syndicats mixtes. Ce sera donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

Avec l’amendement n° 41, le Gouvernement nous demande de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale. Vous ne serez pas surprise, madame la ministre, d’apprendre que nous préférons celle de la commission des lois.

Le II qu’il est proposé de rétablir autoriserait un EPCI, à titre transitoire, et jusqu’au 1er janvier 2020, à déléguer tout ou partie de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte. Il entretient une certaine confusion avec les dispositions de l’article 4, qui offrirait cette possibilité de manière permanente en cas de délégation à un EPAGE ou un à EPTB.

On rétablirait également un IV bis à l’article 59 de la loi MAPTAM, prévoyant qu’un EPCI pourrait transférer ou déléguer sa compétence à un syndicat mixte, y compris par une délibération prise avant le 1er janvier 2018. Cela n’aurait pas grand sens, étant donné que la présente proposition de loi n’entrera en vigueur, au mieux, que dans les derniers jours de 2017. Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler l’article 2 du code civil : « La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. »

La commission des lois a observé que les délibérations prises par les EPCI, antérieurement au transfert vers ces structures de la compétence GEMAPI, aux fins de transférer ou déléguer cette compétence avaient peu de chance d’être annulées, compte tenu de la jurisprudence conciliante du Conseil d’État au sujet des actes pris par anticipation. Néanmoins, puisque la volonté du Gouvernement et de l’Assemblée nationale est d’écarter tout risque d’annulation, la seule solution disponible est de valider expressément par la loi ces délibérations, dans les formes admises pour les lois de validation. C’est ce que fait la commission à l’article 3.

Ce sera donc un avis défavorable sur l’amendement n° 41.

Les amendements identiques nos 25 rectifié bis et 26 rectifié tendent à autoriser la région à contribuer au financement des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par un syndicat mixte ouvert.

Tout comme certains amendements précédents, ils nous apparaissent superflus puisqu’une région peut tout à fait adhérer à un tel syndicat, auquel cas elle devra lui verser une contribution financière annuelle. Ce sera donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

L’amendement n° 19 rectifié quater, qui traite du financement de la compétence GEMAPI par les départements, est redondant avec le I de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, autorisant les départements à contribuer au financement de tous les projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements.

Un syndicat mixte fermé constitué uniquement d’EPCI et, éventuellement, de communes doit être considéré comme un groupement de communes au sens de cet article. Quant au syndicat mixte ouvert, les départements, comme nous venons de le signaler pour les régions, peuvent tout à fait y adhérer. Ce sera donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

Enfin, l’amendement n° 20 rectifié quater est également superflu. Une région peut adhérer à un tel syndicat, auquel cas elle devra lui verser une contribution financière annuelle. Ce sera donc, à nouveau, une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je commencerai peut-être par dire quelques mots sur la question des compétences et, bien sûr, rappeler que cette proposition de loi ne touche pas aux responsabilités des EPCI. Ces derniers gardent les compétences.

Vous indiquez, monsieur Collombat, que sans évolution de la loi, les départements et les régions n’auraient plus eu la possibilité de participer et adhérer aux syndicats assurant la compétence GEMAPI à l’issue de la période transitoire, c’est-à-dire 2020.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est la loi !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Concrètement, cela signifie : plus de maîtrise d’ouvrage et plus de financement des opérations en cours.

M. Pierre-Yves Collombat. Je n’ai pas dit ça !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je n’ai pas dit que vous l’aviez dit ; je vous apporte simplement une précision.

Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 28 de la commission. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’expliquer en présentant l’amendement n° 40, celui-ci intègre la suppression des mots « à la date de publication » prévue au I de l’amendement n° 28. En outre, la rédaction proposée pour intégrer les communes au dispositif conventionnel organisant l’exercice de la compétence GEMAPI est trop large. Elle ne vise pas les seules communes insulaires, mais englobe toutes les communes. Cette mesure constituerait même une charge pour les EPCI, puisque les conventions seraient suspendues au bon vouloir de chaque commune.

Avec l’amendement n° 34, monsieur Collombat, vous proposez, en une seule et même disposition, de supprimer la possibilité donnée aux départements et aux régions d’agir dans le domaine de la GEMAPI au-delà du 1er janvier 2020, de supprimer la possibilité donnée aux régions de contribuer au financement des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements et, enfin, de supprimer le régime de responsabilité aménagée pour les EPCI dans le cas de la gestion des digues et des autres ouvrages de protection.

Le Gouvernement ne peut vous rejoindre que sur votre souhait de ne pas étendre aux régions les dispositions issues de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales. Il a d’ailleurs déposé un amendement en ce sens. Il ne peut en revanche suivre la proposition de suppression des souplesses que les députés ont adoptées, avec l’accord du Gouvernement, pour faciliter l’exercice de la compétence GEMAPI. Il en est ainsi de la possibilité donnée aux départements et aux régions d’agir dans le domaine de la GEMAPI au-delà du 1er janvier 2020. Certaines de ces collectivités, parfois engagées de longue date dans la prévention des inondations, pourraient ainsi venir en soutien aux actions des intercommunalités.

Il en va de même de la disposition relative à la responsabilité des EPCI. Vous proposez de la supprimer, alors qu’il nous paraît au contraire essentiel à la réussite de ce transfert de compétences d’encadrer du mieux possible la responsabilité des acteurs locaux, dans un souci de sécurité juridique.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.

Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 21 rectifié ter, qui tend à introduire une précision à l’article 1er de la proposition de loi, afin que les départements et les régions exerçant l’une des missions rattachées à la compétence GEMAPI puissent en poursuivre l’exercice au-delà du 1er janvier 2020. La disposition étant déjà prévue, il est inutile de l’ajouter ici.

Dans votre amendement n° 7 rectifié, monsieur Danesi, vous proposez d’autoriser les EPCI à fiscalité propre, dans le cadre de la convention prévue à l’article 1er de la proposition de loi, à reverser une partie du produit de la taxe GEMAPI au profit des départements et des régions. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette mesure.

La poursuite volontaire de l’intervention, d’ores et déjà en cours, des départements et des régions au titre de la GEMAPI est permise, mais cela ne remet pas en cause le fait que l’échelon intercommunal devienne, à partir du 1er janvier 2018, le seul titulaire de la compétence à titre obligatoire. Ainsi les EPCI à fiscalité propre doivent être les seuls habilités à instituer une taxe destinée à financer une de leurs compétences obligatoires et à déterminer l’usage qu’ils souhaitent en faire, par exemple pour financer des ouvrages.

L’amendement n° 15 rectifié, toujours de M. René Danesi, tend à prévoir que les syndicats mixtes auxquels les EPCI auraient transféré la compétence GEMAPI soient également signataires de la convention conclue avec les départements et les régions. Le Gouvernement, qui n’est pas défavorable à cette disposition, s’en remettra à la sagesse du Sénat.

Le Gouvernement émet également un avis de sagesse sur l’amendement n° 18 rectifié ter.

Les amendements nos 25 rectifié bis et 26 rectifié tendent à élargir aux régions les dispositions de l’article L.1111-10 du code général des collectivités territoriales, qui réserve à ce jour aux seuls départements la faculté de contribuer au financement de projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements. Même si la disposition ne concerne que la GEMAPI, le Gouvernement n’est pas favorable à l’idée d’étendre aux régions cette faculté.

Le Gouvernement a le souci de maintenir la clarification de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales voulue par le Parlement en 2015. Il ne paraît donc pas opportun d’y revenir aujourd’hui.

En outre, une telle modification contribuerait à remettre en cause les équilibres encore récents dégagés à l’occasion de l’adoption de la loi NOTRe. À l’époque, le législateur avait précisément pris soin de supprimer la disposition permettant aux régions de financer des opérations conduites par les départements, les communes et leurs groupements. Réintroduire aujourd’hui des dispositions conférant une faculté de financement encore plus large serait contraire aux objectifs de rationalisation.

L’amendement n° 19 rectifié quater tend à introduire une modification au sein de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, afin de prévoir explicitement que les départements puissent contribuer au financement des projets mis en œuvre dans le cadre de l’exercice de la compétence GEMAPI, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par une commune, un EPCI et un syndicat mixte fermé.

Le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, car il est satisfait par la rédaction actuelle des dispositions de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales, qui permet déjà aux départements de contribuer au financement de ces projets.

La rédaction de l’amendement n° 20 rectifié quater aurait pour effet de permettre aux régions de financer tout syndicat au-delà de la GEMAPI. Nous ne souhaitons pas revenir sur cette rationalisation opérée par la loi. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je voudrais lever toute ambiguïté : il n’est pas question d’interdire aux départements et aux régions d’apporter leur contribution à la lutte contre l’inondation. Le problème porte sur les modalités. Est-ce que chacun continue sa politique dans son coin ? Est-ce que le département et la région apportent l’un et l’autre une contribution financière ? Ou est-ce que l’un et l’autre participent en tant que membre de l’entité, par exemple de l’établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau, l’EPAGE, qui est chargée de la compétence et en assure l’unité d’exécution ? Les articles tels qu’ils sont rédigés permettent à chacun de continuer ses petits trucs dans son coin.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 40 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 34.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 21 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Daniel Laurent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 21 rectifié ter est retiré.

Monsieur Danesi, l’amendement n° 7 rectifié est-il maintenu ?

M. René Danesi. Non, je le retire, madame la présidente, et je présenterai tout à l’heure un amendement de repli.

Mme la présidente. L’amendement n° 7 rectifié est retiré.

Et que faites-vous de l’amendement n° 15 rectifié, mon cher collègue ?

M. René Danesi. Je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 18 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Daniel Laurent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 18 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Boyer, l’amendement n° 25 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Marc Boyer. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 25 rectifié bis est retiré.

Qu’en est-il de l’amendement n° 26 rectifié, madame Gatel ?

Mme Françoise Gatel. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 26 rectifié est retiré.

Monsieur Laurent, l’amendement n° 19 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Daniel Laurent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 19 rectifié quater est retiré.

Et que décidez-vous au sujet de l’amendement n° 20 rectifié quater ?

M. Daniel Laurent. Je le retire également, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié quater est retiré.

L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Bignon et Wattebled, Mme Jouve, M. Dantec et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – L’article 59 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les missions définies aux 3° , 4° , 6° , 7° , 9° , 10° , 11° et 12° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement sont d’intérêt général. À ce titre, les collectivités territoriales et leurs groupements programment et planifient dans un délai de cinq ans à compter du 1er janvier 2018 l’ensemble de ces missions. »

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Si la création de la compétence GEMAPI est une avancée essentielle dans l’organisation des compétences liées au grand cycle de l’eau, il est nécessaire de s’assurer que toutes les missions du grand cycle de l’eau sont mises en œuvre pour atteindre les objectifs notamment de la directive-cadre sur l’eau, de la directive inondation et de la directive-cadre stratégie pour le milieu marin, et une gestion intégrée de l’eau au cœur de l’aménagement et du développement durable des territoires.

Cet amendement vise donc à programmer et à planifier, dans un délai de cinq ans, l’exercice de ces nouvelles missions, pour assurer une vision à moyen terme et une cohérence globale des actions prévues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je comprends le sens de cet amendement dont nous avons débattu au sein de la commission des lois. Pour autant, il suscite trois motifs de rejet.

Tout d’abord, les collectivités territoriales et leurs groupements, et notamment les EPCI à fiscalité propre, auront déjà fort à faire au cours des prochaines années pour assumer leurs nouvelles compétences en matière de GEMAPI. L’adoption de cet amendement risquerait de créer une lourdeur supplémentaire.

En outre, plusieurs autres missions mentionnées à l’article L. 211-7 du code de l’environnement feront nécessairement l’objet d’une réflexion dans le cadre de la GEMAPI : l’exploitation des ouvrages hydrauliques existants, la maîtrise des eaux de ruissellement, la lutte contre la pollution des eaux. L’amendement semble donc de faible portée.

Enfin, cette proposition de loi a pour objet de faciliter l’exercice de la compétence GEMAPI et non de traiter de l’ensemble de la politique de l’eau.

Pour toutes ces raisons, la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet amendement instaure des contraintes nouvelles qui ne nous semblent pas utiles. Le Gouvernement y est donc également défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Bignon, l’amendement n° 2 rectifié est-il maintenu ?

M. Jérôme Bignon. Non, madame la présidente. Je souligne néanmoins qu’il s’agit d’obligations européennes : attention aux poursuites pour manquement, car, avec une telle position, elles ne seront pas respectées.

Je retire l’amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié est retiré.

L’amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Danesi, Vogel, Babary, Brisson, Lefèvre, de Legge, Chaize, Courtial, D. Laurent et Morisset, Mme Puissat, M. Kennel, Mmes Bories, Lamure, Berthet, Chauvin et L. Darcos, MM. Paccaud, Pierre, Savin et Dallier, Mmes N. Delattre et Deromedi et MM. Laménie, Longuet, Milon, Mouiller, Paul et Pointereau, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Après le troisième alinéa du II de l’article L. 566-12-1 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au troisième alinéa, lorsque l’ouvrage ou l’infrastructure mis à disposition, de par son existence même ou son mauvais état d’entretien, est de nature à provoquer ou aggraver les dommages subis suite à l’action naturelle des eaux, la convention précise les modalités selon lesquelles le propriétaire ou le gestionnaire participe aux travaux nécessaires pour remédier à cette situation. À défaut d’accord, l’ouvrage n’est pas mis à disposition. »

La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. L’article L. 566-12-1 du code de l’environnement prévoit la mise à disposition de l’EPCI compétent pour la défense contre les inondations et contre la mer, des ouvrages ou infrastructures qui appartiennent à une personne morale de droit public, ouvrages qui n’ont pas pour vocation exclusive la prévention des inondations ou des submersions, mais sont de nature à contribuer à cette prévention, eu égard à leur localisation et à leurs caractéristiques.

Cet amendement se veut donc protecteur des intérêts des EPCI sur lesquels pèseront toutes les responsabilités en matière de protection des populations via les systèmes d’endiguement. Certes, un régime de responsabilité limitée a été introduit par la présente proposition de loi durant la période transitoire. Mais ce mécanisme de responsabilité limitée, même s’il constitue une avancée appréciable, reste néanmoins insuffisant selon les spécialistes.

En effet, l’EPCI peut se voir mettre à disposition un ouvrage de nature à contribuer à la prévention des inondations, qui n’aura pas fait l’objet d’un entretien suffisant ou de travaux de remise en état au préalable. Or, à défaut de contraindre le propriétaire à exécuter les travaux nécessaires ou à prévoir une participation de sa part, la charge complète de la mise aux normes de ces ouvrages pèsera sur le seul EPCI.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Sur cet amendement, nous aimerions connaître l’avis éclairé du Gouvernement.

Nous avons rejeté cet amendement en commission. Rappelons que le principe selon lequel les ouvrages concourant à la prévention des inondations sont mis à la disposition des communes ou des EPCI compétents n’a pas pour effet, en lui-même, de faire peser sur les communes ou EPCI le poids de la remise en état des ouvrages lorsque ceux-ci ont été mal entretenus ou lorsqu’ils ne sont plus conformes à la réglementation.

La commune, ou plus généralement l’EPCI, sera maître de décider quels ouvrages il entend faire autoriser par l’État. Les ouvrages autorisés devront être entretenus et, éventuellement, réaménagés conformément aux prescriptions de l’arrêté d’autorisation par leur gestionnaire, c’est-à-dire par l’EPCI – ou, en pratique, par un syndicat mixte auquel il aura transféré ou délégué cette charge. Les dépenses d’aménagement, d’entretien et de surveillance incomberont donc à l’EPCI.

En revanche, les ouvrages non autorisés ne seront plus considérés comme des digues ou des ouvrages concourant à la prévention des inondations. L’EPCI n’en sera donc plus gestionnaire. Il appartiendra à leur propriétaire de les « neutraliser », c’est-à-dire de les araser ou d’y percer une brèche, pour qu’ils n’entravent pas l’écoulement des eaux.

En cas de dommages, le propriétaire sera seul responsable, conformément aux règles du code civil.

C’est pourquoi la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable, sauf si Mme la ministre vient nous donner une lecture contraire à celle-ci.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Nous faisons une lecture identique de cet amendement, en nous appuyant sur les mêmes arguments.

En effet, cet amendement vise des ouvrages qui ne sont pas des digues et dont l’état d’entretien correspond à l’usage qui en est normalement fait, et pas spécifiquement à un objectif de prévention des inondations.

Le principe, instauré par la loi MAPTAM au moment de la création de GEMAPI, des mises à disposition au profit des EPCI exerçant leur compétence, des infrastructures pouvant contribuer à la mission de prévention des inondations – par exemple un remblai ferroviaire – est celui de l’absence de coût pour le propriétaire de l’infrastructure, par exemple la SNCF.

La logique de ce principe est qu’il n’incombe pas aux propriétaires d’infrastructures d’exercer les missions de protection contre les inondations. Par ailleurs, s’agissant du supposé mauvais état des infrastructures qui seraient mises à disposition, il convient de rappeler deux points essentiels.

En premier lieu, le bon état à atteindre pour assurer la fonction d’infrastructure n’est pas forcément le même que pour assurer une fonction très spécifique de protection contre les inondations.

En second lieu, l’EPCI à fiscalité propre reste libre de déterminer le niveau de la protection qu’il entend offrir aux territoires. Ainsi, dans le cas où un ouvrage serait repris en gestion dans un état initial qui ne satisferait pas l’EPCI, celui-ci pourrait néanmoins l’inclure dans un système d’endiguement après en avoir expertisé les caractéristiques. Dans ce cas, le niveau de protection sur lequel l’EPCI engagera sa responsabilité au sens de l’article L. 562-8-1 du code de l’environnement sera déterminé en tenant compte de l’état initial des ouvrages. L’EPCI pourra par la suite engager librement et à son rythme les travaux d’amélioration aux fins d’offrir à la population un niveau de protection supérieur.

Il convient par ailleurs de rappeler que ces travaux d’amélioration, s’ils sont effectués dans le cadre d’un plan d’action de protection des inondations, peuvent bénéficier d’un financement de la part du fonds Barnier, et que la mise à disposition ne peut avoir lieu que dans le cadre d’une convention, donc d’un accord.

Cet amendement aurait donc un effet contre-productif, car il reviendrait en pratique à abandonner de nombreuses mises à disposition qui sont pourtant indispensables.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Danesi, l’amendement n° 10 rectifié bis est-il maintenu ?

M. René Danesi. Compte tenu de ces explications très détaillées, je retire mon amendement, madame la présidente.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 10 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(Larticle 1er est adopté.)

Mme la présidente. Madame la ministre, mes chers collègues, il est vingt heures. Compte tenu du rythme de nos travaux et du nombre d’amendements qu’il nous reste à examiner, je vous propose de prolonger quelque peu notre séance pour achever l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Article 1er
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Article 1er bis (Texte non modifié par la commission)

Articles additionnels après l’article 1er

Mme la présidente. L’amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Danesi, Brisson, Morisset, Lefèvre, de Legge, Chaize, Courtial et Vogel, Mme Puissat, M. D. Laurent, Mmes Lamure, Berthet, Chauvin et L. Darcos, MM. Paccaud, Pierre et Savin, Mme Bories, M. Dallier, Mmes N. Delattre et Deromedi et MM. Laménie, Longuet, Mouiller, Milon, Paul et Pointereau, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa du II de l’article 1530 bis du code général des impôts, après le mot : « exercice », sont insérés les mots : « par les communes, par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui se substituent à leurs communes membres en la matière ou par le département ou la région ».

La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 7 rectifié, que j’ai retiré tout à l’heure : il vise plus modestement à prévenir des actions contentieuses.

En effet, son objet est de permettre à un EPCI qui perçoit la taxe GEMAPI d’utiliser une partie du produit de cette taxe pour financer des investissements à réaliser sous maîtrise d’ouvrage départementale ou régionale en matière de GEMAPI.

L’intérêt de cet amendement est de sécuriser l’utilisation qui peut être faite du produit de cette taxe par les EPCI. En effet, sans la base légale proposée par cet amendement, les EPCI ne pourront pas, sans risque contentieux, financer par des subventions des actions GEMAPI menées sous maîtrise d’ouvrage départementale ou régionale.

En résumé, il s’agit de sécuriser des accords financiers que les conventions vont inévitablement prévoir si elles coopèrent à l’échelle d’un bassin-versant, voire tout au long d’une rivière principale. En effet, dans ce domaine, les oppositions aux travaux prévus sont nombreuses. Et quand les opposants à un projet sont à court d’arguments techniques, ils cherchent inévitablement des arguments juridiques et financiers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement est la suite logique des précédents et a été rejeté en commission pour les mêmes raisons. La commission en sollicite donc le rejet ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet le même avis, puisque les départements participent facultativement à cette compétence. Cette disposition est donc inutile en l’espèce.

Mme la présidente. Monsieur Danesi, l’amendement n° 8 rectifié est-il maintenu ?

M. René Danesi. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 8 rectifié est retiré.

L’amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Danesi, Morisset, Brisson, Lefèvre, de Legge, Chaize, Courtial et Vogel, Mme Puissat, M. D. Laurent, Mmes Bruguière, Lamure, Berthet, Chauvin et L. Darcos, MM. Paccaud, Pierre et Savin, Mme Bories, M. Dallier, Mmes N. Delattre et Deromedi et MM. Laménie, Longuet, Milon, Mouiller, Paul et Pointereau, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le 2° de l’article L. 331-3 du code de l’urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les dépenses liées à l’exercice de l’une ou plusieurs des missions mentionnées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement. »

II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. René Danesi.

M. René Danesi. L’article 1er de la présente proposition de loi permet aux départements et aux régions assurant une ou plusieurs des missions attachées à la compétence GEMAPI de poursuivre leurs engagements en la matière au-delà du 1er janvier 2020.

Cet amendement vise, à l’heure où certains départements connaissent des difficultés à affecter leur part de taxe d’aménagement, à permettre expressément à ceux qui le souhaiteraient, sans faire naître d’obligation en la matière ni de charge supplémentaire, d’utiliser une partie de celle-ci pour financer des dépenses en matière de GEMAPI.

À l’heure actuelle, certaines dépenses en matière de milieux aquatiques peuvent déjà être financées par la taxe d’aménagement. Il n’en va pas de même pour les dépenses relatives à la protection contre les inondations ou les coulées d’eaux boueuses après orage. Or ce sont les opérations les plus coûteuses et les plus nécessaires à la protection des populations qui émargent sur cette mission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement prévoit d’inclure les dépenses liées à l’exercice de missions relevant de la GEMAPI parmi celles auxquelles peut être affecté le produit de la taxe d’aménagement perçue par les départements.

L’idée est intéressante. Néanmoins, cette proposition de loi n’a pas pour objet d’étendre le domaine d’intervention des départements et des régions dans le domaine de la GEMAPI, mais de permettre à ceux qui le souhaitent de continuer à œuvrer dans ce domaine au-delà du 1er janvier 2020. Aujourd’hui, les dépenses des départements en la matière sont financées par leur budget général.

La commission a sollicité le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable. À titre personnel, j’émets un avis de sagesse.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. En nous fondant sur le même raisonnement que pour l’amendement précédent, nous émettons un avis défavorable, d’autant que la taxe d’aménagement départementale sert aujourd’hui au financement des espaces naturels sensibles ou des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement, les CAUE. Élargir le champ d’affectation de cette taxe pourrait mettre en difficulté les autres politiques. Pour une meilleure clarification, il faut en rester à notre proposition.

Mme la présidente. Monsieur Danesi, l’amendement n° 9 rectifié est-il maintenu ?

M. René Danesi. Je m’en remets à la sagesse de notre auguste assemblée ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 9 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.

Articles additionnels après l’article 1er
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Article additionnel après l’article 1er bis

Article 1er bis

(Non modifié)

Après le I ter de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, il est inséré un I quater ainsi rédigé :

« I quater. – Par dérogation à la règle selon laquelle un syndicat mixte ouvert mentionné à l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales ne peut adhérer à un autre syndicat mixte ouvert, un tel syndicat exerçant l’une des missions mentionnées aux 1°, 2°, 5° et 8° du I du présent article peut, jusqu’au 31 décembre 2019, au titre de ces compétences et avec l’accord du préfet coordonnateur de bassin, adhérer à un autre syndicat mixte ouvert. À compter du 1er janvier 2020, cette possibilité est réservée aux établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau mentionnés au II de l’article L. 213-12 du présent code qui souhaitent adhérer à des établissements publics territoriaux de bassin mentionnés au I du même article L. 213-12. »

Mme la présidente. L’amendement n° 35, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après le I ter de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, il est inséré un I quater ainsi rédigé :

« I quater. – Par dérogation à la règle selon laquelle un syndicat mixte ouvert mentionné à l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales ne peut adhérer à un autre syndicat mixte ouvert, un tel syndicat exerçant l’une des missions mentionnées aux 1°, 2°, 4°, 5° et 8° du I du présent article peut, au titre de ces compétences et avec l’accord du préfet coordonnateur de bassin, adhérer à un autre syndicat mixte ouvert.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je l’ai défendu par anticipation, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. J’y avais répondu par anticipation ! (Sourires.)

Mme la présidente. Plus exactement ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Bignon et Wattebled, Mme Jouve, M. Dantec et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« … - Les projets d’aménagement d’intérêt commun identifiés au L. 213-12 du présent code et rendus nécessaires pour une bonne gestion hydrographique devront faire l’objet d’une programmation dans un délai de cinq ans à compter du 1er janvier 2018. »

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Si la compétence GEMAPI permet d’assurer la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations sur tout le territoire national, elle ne permet pas d’assurer, aussi bizarre que cela puisse paraître, la cohérence des actions à l’échelle adaptée du bassin-versant de manière homogène – et Dieu sait si celui-ci est essentiel en matière d’écoulement des eaux – ni d’assurer l’exercice de certaines missions en subsidiarité à l’échelle adaptée hydrographique.

Cet amendement vise donc à demander aux collectivités territoriales d’identifier les actions d’intérêt commun à l’échelle hydrographique qui nécessitent une implication à une échelle supra-administrative, souvent interdépartementale ou interrégionale, qui seront portées dans le cadre d’un ou de plusieurs projets d’aménagement d’intérêt commun, mis en œuvre par un établissement public territorial de bassin, ou EPTB, s’il en existe un.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Notre position est identique à celle que j’ai exposée sur l’amendement n° 2 rectifié. Je comprends le bien-fondé de cet amendement, mais il nous semble un peu trop prescriptif. Pour ces raisons, la commission en sollicite le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis pour les mêmes raisons, liées aux contraintes nouvelles.

Mme la présidente. Monsieur Bignon, l’amendement n° 3 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jérôme Bignon. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er bis.

(Larticle 1er bis est adopté.)

Article 1er bis (Texte non modifié par la commission)
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Article 2 (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel après l’article 1er bis

Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Montaugé et Iacovelli, Mmes Artigalas, Blondin et Bonnefoy, M. Daudigny, Mme Espagnac, M. Fichet, Mme Jasmin, MM. Lalande et Manable, Mmes Monier et Perol-Dumont et M. Roux, n’est pas soutenu.

Article additionnel après l’article 1er bis
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Article 3

Article 2

(Non modifié)

Dans un délai de six mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation des conséquences, pour la gestion des fleuves, des zones côtières et des digues domaniales ainsi que dans les zones de montagne, du transfert de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en vertu de l’article 56 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Ce rapport présente un bilan de la protection du territoire national contre les risques d’inondations fluviales et de submersion marine et étudie notamment les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Artano, sur l’article.

M. Stéphane Artano. Je souhaite attirer l’attention de la Haute Assemblée sur les conséquences du transfert de la GEMAPI au bloc communal, dans les territoires ultramarins, et plus particulièrement à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Dans l’archipel, il n’y a que deux communes, et l’intercommunalité ne trouve pas à s’appliquer quand il s’agit de mettre en commun des moyens entre deux îles.

Au-delà des modifications qui font l’objet de cette proposition de loi, je formule une question simple : qui assurera l’exercice de la compétence GEMAPI, obligatoire à Saint-Pierre-et-Miquelon ?

Ce territoire est exposé aux aléas météo-marins et subit à la fois les impacts des dépressions subarctiques et des cyclones remontant la côte nord-américaine.

Si je mets de côté la gestion des milieux aquatiques terrestres, les territoires ultramarins tels que Saint-Pierre-et-Miquelon ne pourront pas faire face aux coûts insurmontables de protection et d’entretien de leur littoral. Ils ne disposent en effet pas de moyens suffisants, qu’ils soient financiers, humains ou matériels.

Ces petites communes ne peuvent gérer seules les enjeux du réchauffement climatique. C’est pourquoi l’État doit continuer à exercer une compétence générale en la matière.

Tel était le sens de deux amendements que j’avais déposés, mais qui ont été jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la constitution. La question qu’ils soulèvent est pourtant cruciale.

Prenons l’exemple de l’île de Miquelon-Langlade, qui compte 500 habitants. Aujourd’hui, par laxisme, l’État n’intervient pas et laisse les assauts de la mer entrer au sud du village et menacer des habitations. Demain, la mairie devra-t-elle assumer ce désengagement préjudiciable de l’État ? C’est inacceptable.

De plus, l’article 1530 bis du code général des impôts relatif à la taxe GEMAPI ne sera pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, car c’est la collectivité territoriale qui est compétente en matière fiscale.

Preuve que cette question est complexe : Mme le maire de Miquelon-Langlade a écrit, mi-septembre, au Gouvernement sur la base des arguments que je viens de développer. À ce jour, elle n’a pu avoir les éclaircissements nécessaires que son courrier appelait. Je me fais donc son relais, dans cet hémicycle : Mme la ministre, pouvez-vous apporter des éléments de réponse à ces élus et, à travers eux, aux habitants de Saint-Pierre-et Miquelon ?

Mme la présidente. L’amendement n° 22 rectifié bis, présenté par MM. Patriat, de Belenet et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Première phrase

Après le mot :

côtières

insérer les mots :

, des territoires ruraux non urbanisés

La parole est à M. Arnaud de Belenet.

M. Arnaud de Belenet. Il s’agit d’ajouter un élément au rapport d’évaluation demandé par cet article, qui ne vise pas spécifiquement les territoires ruraux et ne les exclut pas non plus.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La précision proposée dans le présent amendement est intéressante, bien que je me demande à quoi renvoie exactement la notion de « territoires ruraux non urbanisés » – peut-être des déserts… (Sourires.)

La deuxième phrase de l’article 2 précise que ce rapport présente « un bilan de la protection du territoire national contre les risques d’inondations fluviales et de submersion marine et étudie notamment les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion ».

La formulation suffisamment large permet d’englober les territoires ruraux pas ou peu urbanisés.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. À condition qu’on la comprenne !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Certes, monsieur le président.

En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Sagesse !

Mme la présidente. Monsieur de Belenet, l’amendement n° 22 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Arnaud de Belenet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 22 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 33, présenté par M. Artano, Mmes Costes et M. Carrère et MM. Castelli, Guérini et Vall, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Ce rapport présente également un bilan de l’application dans les territoires ultramarins du transfert de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en vertu de l’article 56 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

La parole est à M. Stéphane Artano.

M. Stéphane Artano. Madame le ministre, je vous ai déjà parlé de quelques particularités de l’archipel dont je suis l’élu. Je ne vais donc pas y revenir.

Tout d’abord, le présent texte couronne le principe de subsidiarité, en vertu duquel il convient de réserver uniquement à l’échelon supérieur ce que l’échelon intérieur ne pourrait effectuer que de manière moins efficace. Se pose, dès lors, la question suivante : quel est l’échelon le plus pertinent pour exercer la compétence GEMAPI dans les outre-mer ?

De plus, si l’article 40 de la Constitution a été opposé aux autres amendements que nous avons déposés, qu’en est-il de l’article 72-2 de la Constitution, en vertu duquel « tout transfert de compétence entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » ?

Il y a quelques instants, je parlais de laxisme à propos du village de Miquelon. Si l’État ne dépense pas aujourd’hui, comment pourrait-il assurer des transferts demain ?

À défaut de voir résoudre, outre-mer, les problématiques soulevées par cette proposition de loi, je souhaite que cette dernière permette de ne pas les occulter, de ne pas les oublier. D’aucuns pourraient objecter qu’avec l’article 2 l’on prévoit déjà de dresser, à travers le rapport à venir, « un bilan d’action de protection du territoire national », lequel inclut les outre-mer. À ce titre, j’anticipe une éventuelle remarque de M. le rapporteur.

Néanmoins, la non-prise en compte, dans la législation – je pense notamment à la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM, et à la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRE – des spécificités de ces espaces me pousse à formuler la proposition suivante : que ces particularités figurent explicitement dans la demande de rapport demandée au Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cher collègue, tout d’abord, je reprends vos précédents propos : à mon tour, je demande à Mme Gourault de demander à sa collègue ministre des outre-mer d’apporter un éclaircissement quant à l’application de la compétence GEMAPI à Saint-Pierre-et-Miquelon : nous n’avons pas encore reçu de réponse à ce propos.

Par ailleurs, l’extension du périmètre du rapport, que vous proposez à travers le présent amendement, paraît bienvenue. Toutefois, une disposition relative au dépôt, par le Gouvernement, d’un rapport au Parlement, ne présente pas de portée normative : il me semble donc qu’un engagement de Mme la ministre permettrait de prendre en compte la problématique ultramarine dans ledit rapport.

Aussi, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations
Article 4

Article 3

I. – L’article L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « de gestion de l’eau et des cours d’eau, » sont supprimés ;

2° Après le même deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« « Pour l’exercice des missions mentionnées au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou un établissement public territorial peut transférer à un syndicat de communes ou à un syndicat mixte l’ensemble des missions relevant de cette compétence, définie au I bis du même article L. 211-7, ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement. Par dérogation au premier alinéa, ce transfert total ou partiel peut être réalisé au profit d’un syndicat de communes ou d’un syndicat mixte sur tout ou partie du territoire de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de l’établissement public territorial ou au profit de plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes du territoire de l’établissement.

« En matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou un établissement public territorial peut déléguer à un syndicat mixte mentionné à l’article L. 213-12 du code de l’environnement l’ensemble des missions relevant de cette compétence, définie au I bis de l’article L. 211-7 du même code, ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement. Cette délégation totale ou partielle peut être réalisée au profit d’un tel syndicat mixte sur tout ou partie du territoire de l’établissement public ou au profit de plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes de ce territoire. Une telle délégation obéit aux modalités prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales. »

II (nouveau). – Jusqu’au 1er janvier 2020, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou un établissement public territorial compétent en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations peut déléguer à tout syndicat de communes ou syndicat mixte l’ensemble des missions relevant de cette compétence ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement. Cette délégation totale ou partielle peut être réalisée au profit d’un syndicat mixte sur tout ou partie du territoire de l’établissement public ou au profit de plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes de ce territoire. Une telle délégation obéit aux modalités prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales.

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les délibérations prises en ce sens par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et les établissements publics territoriaux avant la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont validées, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de ce que l’établissement public n’exerçait pas, à la date de la délibération, la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Toutefois, ces délibérations ne prennent effet qu’à la date où l’établissement public devient compétent.

Lorsque le syndicat délégataire n’est pas l’un des syndicats mixtes mentionnés à l’article L. 213-12 du code de l’environnement, la délégation ne vaut que jusqu’au 1er janvier 2020.

III (nouveau). – Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les délibérations prises par les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et les établissements publics territoriaux avant la date d’entrée en vigueur de la présente loi, aux fins de transférer à un ou plusieurs syndicats de communes ou syndicats mixtes l’ensemble des missions relevant de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement, sont validées, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de ce que l’établissement public n’exerçait pas cette compétence à la date de la délibération. Toutefois, ces délibérations ne prennent effet qu’à la date où l’établissement public devient compétent.

Mme la présidente. L’amendement n° 36, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Pour les raisons que j’ai précédemment exposées, la commission est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 42, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après le deuxième alinéa de l’article L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou un établissement public territorial peut transférer à un syndicat de communes ou à un syndicat mixte l’ensemble des missions relevant de cette compétence, définie au I bis de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement. Ce transfert total ou partiel peut être réalisé au profit d’un syndicat de communes ou d’un syndicat mixte sur tout ou partie du territoire de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de l’établissement public territorial ou au profit de plusieurs syndicats situés chacun sur des parties distinctes du territoire de l’établissement. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Certes, le Sénat n’a pas adopté les deux premiers amendements que j’ai présentés. Toutefois, je tiens à présenter le présent amendement, afin d’exposer dans sa globalité la position du Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de revenir sur la rédaction de l’article 3 du présent texte.

En effet, il n’est pas souhaitable de déplacer dans le code général des collectivités territoriales des dispositions visant spécifiquement les modalités d’exercice de la compétence GEMAPI par des établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau, les EPAGE, ou des établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB.

Ces deux types de structures spécifiques, constituées sous forme de syndicats mixtes ouverts, font l’objet d’une définition précise à l’article L. 213-12 du code de l’environnement. Il convient de maintenir rassemblées au sein de ce même article l’ensemble des dispositions s’y rapportant spécifiquement.

En effet, dans sa version actuelle, le présent article aboutirait à proposer deux rédactions différentes et incohérentes relatives aux EPAGE et aux EPTB, entre le code de l’environnement et le code général des collectivités territoriales.

En outre, ce choix rendrait les textes difficilement lisibles pour les acteurs appelés à les mettre en application. En résulterait, potentiellement, une insécurité juridique. La rédaction proposée à travers le présent amendement permet d’éviter cet écueil.

Par ailleurs, il convient de supprimer la référence faite aux missions mentionnées au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, dans la mesure où cette mention aurait pour effet d’élargir le principe d’une sécabilité interne à l’ensemble des missions relatives à la gestion de l’eau. Une telle disposition ne correspondrait pas au but visé par le législateur lors du dépôt de cette proposition de loi. Elle ne permettrait pas non plus de répondre aux réelles difficultés de mise en œuvre rencontrées sur le terrain.

Par son I, le présent amendement tend à remédier aux problèmes susceptibles d’être soulevés par la suppression des termes « de gestion de l’eau et des cours d’eau » à l’alinéa précédent. Nous proposons de garder ces termes, afin de ne pas réduire la possibilité de sécabilité pour les missions relevant des thématiques qui ne sont pas du ressort de la GEMAPI.

Quant aux dispositions des alinéas 5 à 9, elles ont le même but que les II et III de l’article 1er du texte de la proposition de loi issu de la première lecture à l’Assemblée nationale, que le Gouvernement a proposé de rétablir par le biais d’un autre amendement.

Ces mesures offrent une double possibilité aux EPCI à fiscalité propre : d’une part, celle de déléguer tout ou partie de la compétence GEMAPI à des syndicats mixtes de droit commun ; et, d’autre part, celle de délibérer pour transférer tout ou partie de cette compétence à des syndicats mixtes de droit commun, avant d’en être titulaires, avant le 1er janvier 2018.

Compte tenu de leur caractère transitoire, ces dispositions n’ont pas lieu d’être codifiées au sein du code général des collectivités territoriales. On pourrait ainsi les réunir aux dispositions transitoires figurant à l’article 59 de la loi MAPTAM afin de faciliter la lisibilité des textes pour les acteurs concernés.

M. Pierre-Yves Collombat. Justement, ce n’est pas très lisible, tout cela…

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Enfin, le Gouvernement souscrit à la nécessité de permettre une sécabilité géographique par délégation aux EPAGE et EPTB. Je relève que cette sécabilité géographique est déjà autorisée par transfert aux EPAGE et EPTB. Cette disposition est du reste reprise dans l’amendement que le Gouvernement a déposé au titre de l’article 4.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Le Gouvernement demande au Sénat de rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale. Il justifie par trois arguments le présent amendement, qui tend à tirer un trait sur la rédaction élaborée par la commission des lois.

Premièrement, selon le Gouvernement, il serait inopportun d’insérer dans le CGCT les dispositions relatives au transfert et à la délégation de la compétence GEMAPI à un EPAGE ou un EPTB, au motif que ces dispositions dérogent au droit commun.

Toutefois, le Gouvernement nous propose de maintenir dans le CGCT des dispositions tout aussi dérogatoires, pour ce qui concerne le transfert de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte de droit commun, avec une sécabilité géographique et fonctionnelle.

Au contraire, et par cohérence, la commission a jugé préférable de regrouper au sein d’un même code toutes les règles relatives au transfert et à la délégation de la compétence GEMAPI, quel qu’en soit le bénéficiaire. C’est une question de lisibilité du droit : nous voulons éviter que les élus locaux n’aient à jongler avec les deux codes et la loi MAPTAM pour connaître le droit applicable. Au demeurant, la solution proposée par la commission permet d’éviter les redondances ou, pis encore, les contradictions d’un texte à l’autre.

Deuxièmement, le Gouvernement nous reproche d’avoir étendu à l’ensemble des missions relevant de la politique de l’eau les possibilités de transfert partiel de compétences, au lieu de les circonscrire à la seule GEMAPI. Mais le texte de l’Assemblée nationale opérait un recul par rapport au droit existant : en vertu des dispositions en vigueur, dans le domaine de la gestion de l’eau, un EPCI peut d’ores et déjà transférer ses compétences à un syndicat sur une partie seulement de son territoire, ou à plusieurs syndicats sur des parties distinctes de son territoire.

La rédaction choisie par la commission va un peu au-delà du droit en vigueur : elle ouvre la voie, en cas de transfert, à la sécabilité interne de toutes les missions relevant de la politique de l’eau.

Je vois mal pourquoi cette sécabilité interne serait bienvenue en matière de GEMAPI et malvenue dans les autres domaines de la politique de l’eau, d’autant que les différentes missions énumérées au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement sont extrêmement poreuses : nous en reparlerons à propos du ruissellement.

Troisièmement et enfin, le Gouvernement nous reproche de codifier des dispositions transitoires : or il n’en est rien ! Madame la ministre, je vous invite à relire attentivement l’article 3. Ses deuxième et troisième paragraphes ne sont pas destinés à être codifiés.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 42.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 24 rectifié bis est présenté par MM. Kennel, Reichardt, Savary, Raison et Perrin, Mme Deromedi, MM. Pierre, J.M. Boyer et Brisson, Mme Bories et MM. Dufaut, Chatillon et Paul.

L’amendement n° 27 rectifié est présenté par M. Kern, Mme Vermeillet, MM. Laugier et Médevielle, Mmes Loisier et Billon, M. Delahaye, Mme de la Provôté, MM. Détraigne, Longeot et Canevet et Mme Gatel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

À compter du 1er janvier 2020, il n’est plus possible d’adhérer à un syndicat mixte qui ne relèverait pas de l’article L. 213-12 du code de l’environnement.

La parole est à M. Guy-Dominique Kennel, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié bis.

M. Guy-Dominique Kennel. M. le rapporteur m’a fait savoir que cet amendement était satisfait. Je souhaiterais simplement savoir en quoi il l’est ! Dès lors, je serai prêt à le retirer. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour présenter l’amendement n° 27 rectifié.

Mme Françoise Gatel. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 27 rectifié est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 24 rectifié bis ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Monsieur Kennel, je vais m’efforcer de vous rassurer ! Je ne voudrais pas que vous soyez pris de remords à l’idée d’avoir retiré votre amendement et que, de ce fait, vous passiez une mauvaise nuit… (Sourires.)

La rédaction élaborée par la commission n’est sans doute pas parfaite. Mais je dois vous avouer que le présent amendement nous a laissés perplexes.

La notion de délégation, employée dans cette proposition de loi, est parfaitement claire. Elle répond à la définition figurant à l’article L. 1 111-8 du code général des collectivités territoriales, à cette seule différence que, en matière de GEMAPI, un EPCI serait autorisé à déléguer ses compétences.

À l’inverse, cet amendement tend à introduire, au sujet des délégations, un paragraphe relatif à la notion d’adhésion. Or cette dernière convient plutôt aux transferts de compétences. En tout état de cause, elle entretient une certaine confusion.

Cet amendement est présenté comme rédactionnel, alors qu’il vise à modifier le fond du droit.

À l’instar de l’Assemblée nationale, la commission a souhaité que la délégation de tout ou partie de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte de droit commun, c’est-à-dire un EPAGE ou un EPTB, ne soit possible que pour une période courant jusqu’au 1er janvier 2020. Or, avec cet amendement, les délégations votées avant 2020 continueraient d’être valables passé cette date.

Enfin, contrairement à ce qui est indiqué dans l’objet de cet amendement, il ne s’agit pas de la possibilité, pour un syndicat mixte, d’adhérer à un autre syndicat mixte ; il s’agit de la délégation de ses compétences par un EPCI ou un syndicat mixte.

Mon cher collègue, je vous le confirme, la rédaction retenue par la commission satisfait votre souhait.

M. François Bonhomme. Merci, monsieur le rapporteur !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur Kennel, nous aussi, nous avons déjà évoqué cette question ensemble : je vous le confirme à mon tour, votre amendement est satisfait.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous voilà rassurés ! (Sourires.)

Mme la présidente. Monsieur Kennel, l’amendement n° 24 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Guy-Dominique Kennel. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 24 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 est adopté.)

Article 3
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Article 5

Article 4

Au V de l’article L. 213-12 du code de l’environnement, les mots : « conclue dans les conditions prévues à l’article L. 1111-8 » sont remplacés par les mots : « opérés dans les conditions prévues à l’article L. 5211-61 ».

Mme la présidente. L’amendement n° 37, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. L’amendement est défendu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 43, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après le mot : « respectifs, », la fin du V de l’article L. 213-12 du code de l’environnement est ainsi rédigée : « l’ensemble des missions relevant de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, définie au I bis de l’article L. 211-7, ou certaines d’entre elles, en totalité ou partiellement. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 43 est retiré.

Je mets aux voix l’article 4.

(Larticle 4 est adopté.)

Article 4
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Article additionnel après l'article 5

Article 5

(Non modifié)

Au 12° du I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, les mots : « le domaine » sont remplacés par les mots : « les domaines de la prévention du risque d’inondation ainsi que ». – (Adopté.)

Article 5
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Article additionnel après l'article 5

Article additionnel après l’article 5

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 23 est présenté par M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche.

L’amendement n° 38 est présenté par M. Collombat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au I bis de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, après la référence : « 2° » est insérée la référence : « , 4° ».

La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour présenter l’amendement n° 23.

M. Arnaud de Belenet. À travers cet amendement d’appel, nous revenons sur plusieurs enjeux que nous avons soulevés au cours de la discussion générale : la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, la lutte contre l’érosion et l’extension éventuelle de la compétence GEMAPI à ces sujets.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l’amendement n° 38.

M. Pierre-Yves Collombat. Mes chers collègues, je ne peux pas ne pas revenir sur ce problème, qui est absolument essentiel. J’ai d’ailleurs été très ému de constater que, sur cette question, mon collègue François Patriat et moi-même avions les mêmes vues. (Sourires.)

Il s’agit de fonder le financement de la lutte contre le ruissellement sur la taxe GEMAPI. Cette disposition figurait dans la proposition de loi initiale, mais elle a mystérieusement disparu…

J’insiste : cette question est capitale. Elle concerne au bas mot 50 % des inondations ; elle concerne massivement les zones urbaines – à ce titre, je rappelle la maxime selon laquelle « la ville inonde la ville » – ; et elle concerne très largement le sud de la France.

Dans beaucoup d’endroits, des pluies torrentielles s’abattent, puis se déversent dans des talwegs, qui ne sont absolument pas des rivières, même pas des ruisseaux : en dehors de ces épisodes, ils ne voient presque jamais d’eau. Ce sont ces pluies qui provoquent des inondations.

Il faut en avoir conscience : si l’on refuse de trancher enfin clairement cette question, en l’inscrivant, comme nous le proposons, parmi les points mentionnés à l’article L. 211-7-1 du code de l’environnement, on passera à côté d’un enjeu qui, loin d’être annexe, est absolument essentiel !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je l’ai dit lors de la discussion générale : je souscris totalement aux propos que vient de tenir Pierre-Yves Collombat, ainsi qu’aux motivations de l’amendement de M. Patriat.

En commission des lois, nous avons débattu assez longuement du sujet du ruissellement. Ce constat vient d’être rappelé : c’est une anomalie du présent texte de ne pas prendre en compte cette question.

Pierre-Yves Collombat a fait référence aux régions situées au sud de notre pays. Pour ma part, je viens d’un département, l’Ardèche, qui est particulièrement exposé à cette problématique : sur le fond, je ne peux donc qu’adhérer à ce qui vient d’être dit.

En revanche – cette précision rejoint, elle aussi, ce que j’ai dit en préambule –, j’observe que cette proposition de loi doit prendre effet d’ici une quinzaine de jours. Il serait bon que nous n’ayons pas, à l’avenir, à examiner un texte comme celui-là dans de telles conditions : convenons-en, ce n’est pas une situation idéale…

Cela étant, compte tenu des échéances qui s’imposent, les mesures proposées à travers ces deux amendements pourraient paraître complexes à mettre en œuvre, au 1er janvier prochain, dans nombre de territoires.

Aussi, nous nous sommes efforcés d’émettre une proposition de substitution. Nous proposons tout simplement de rectifier les amendements de MM. Collombat et Patriat pour prévoir une entrée en vigueur de ces dispositions, non pas au 1er janvier 2018, mais au 1er janvier 2020.

En procédant de cette manière, le présent texte traitera bien de la question du ruissellement ; et celles et ceux qui, au sein des EPCI, sont concernés par cet enjeu auront deux années pour mettre en œuvre ces dispositions.

Telle est la proposition que je formule au nom de la commission des lois. J’insiste : sur le fond, les mesures proposées par le biais de ces deux amendements sont totalement indispensables.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement rejoint les auteurs de ces deux amendements pour considérer qu’il y a un lien entre, d’une part, la mission de maîtrise des eaux pluviales et du ruissellement et, d’autre part, le régime de GEMAPI.

Pour autant, c’est le lien entre la gestion des eaux pluviales et l’assainissement que le Gouvernement entend maintenir. À nos yeux, il n’est pas souhaitable d’étendre le champ de la compétence GEMAPI au-delà des quatre items mentionnés au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement.

Les missions liées à la maîtrise des eaux pluviales et du ruissellement doivent donc, selon le Gouvernement, rester partagées entre les différents échelons de collectivités territoriales.

En effet, et conformément à la jurisprudence du Conseil d’État, la gestion des eaux pluviales urbaines relève de la compétence d’assainissement. Elle suppose que les réseaux soient bien proportionnés.

Il n’est pas judicieux de renvoyer à la compétence GEMAPI, et potentiellement à la taxe GEMAPI, les investissements liés à un éventuel sous-dimensionnement des équipements de gestion des eaux pluviales.

En revanche, les équipements structurants permettant de faire face aux risques d’inondations consécutives de pluies d’intensité exceptionnelle relèvent bien de la compétence GEMAPI, au titre des items 1 et 5 de l’article L. 211-7 du code de l’environnement. Ces équipements peuvent donc être financés par le produit de la taxe GEMAPI.

En outre, mesdames, messieurs les sénateurs, comme M. le rapporteur vient de le rappeler, vous admettrez qu’il est difficile de changer la donne alors que la date de transfert est si proche.

Mme la présidente. Monsieur de Belenet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?

M. Arnaud de Belenet. La question posée à travers l’amendement qu’il m’incombait de présenter a reçu une réponse très claire de la part de Mme la ministre.

Le but était bien d’obtenir une réponse explicite, et j’imagine que l’auteur de cet amendement en sera satisfait.

Cela étant, à tout seigneur tout honneur : eu égard à l’ancienneté dont bénéficie M. Collombat au sein de la Haute Assemblée, je retire le présent amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 23 est retiré.

Monsieur Collombat, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens indiqué par M. le rapporteur ?

M. Pierre-Yves Collombat. Tout d’abord, je salue la courtoisie dont fait preuve M. de Belenet.

Bien sûr, je suis prêt à modifier mon amendement en ce sens. Toutefois, madame la ministre, votre argumentation ne me convainc pas. Qui fait la loi ? Le Conseil d’État, ou bien nous ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je n’ai fait que rappeler un avis !

M. Pierre-Yves Collombat. Concrètement, pourquoi la question se pose-t-elle ? Parce que, jusqu’à présent, les préfets ont systématiquement refusé de financer au titre de la GEMAPI les travaux relatifs à la maîtrise du ruissellement !

Vous nous rappelez que les eaux pluviales peuvent être traitées avec les eaux usées. Soit ! Mais, sauf exception, les réseaux en question doivent désormais être séparés.

M. Pierre-Yves Collombat. J’insiste : un certain nombre de travaux sont nécessaires si l’on veut lutter contre les inondations.

Je n’en ai pas le temps ce soir, mais je pourrais détailler comment le problème du ruissellement a été évacué de la proposition de loi initiale : c’est toute une saga ! Je ne m’étendrai pas sur ce sujet.

Cela étant, c’est véritablement faire œuvre d’utilité publique que de prévoir clairement ce type de financement en l’inscrivant dans la définition de la compétence.

Article additionnel après l'article 5
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Article 6

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 38 rectifié, présenté par M. Collombat et ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au I bis de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, après la référence : « 2° » est insérée la référence : « , 4° ».

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Monsieur le sénateur, les préfets ne pouvaient pas refuser de recourir à la taxe GEMAPI, pour la simple et bonne raison qu’elle n’existe pas encore !

M. Pierre-Yves Collombat. On a quand même déjà commencé à en parler !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Alors, vous évoquez les intentions : ce dispositif sera mis en place au 1er janvier prochain.

M. Pierre-Yves Collombat. Mais le problème des grands travaux ne date pas d’hier !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je tenais quand même à apporter cette précision.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 38 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 5.

Article additionnel après l'article 5
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Article additionnel après l'article 6

Article 6

L’article L. 3232-1-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « aquatiques », sont insérés les mots : « , de la prévention des inondations » ;

2° Au troisième alinéa, après le mot : « aquatiques », sont insérés les mots : « et de la prévention des inondations ».

Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Bignon et Wattebled, Mme Jouve, M. Dantec et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - L’exercice de la compétence d’assistance technique sur le domaine de la prévention des risques d’inondation du département se fait prioritairement dans le cadre d’une délégation de ladite compétence au syndicat mixte d’établissement public territorial de bassin s’il existe sur tout ou partie de son territoire, ou à plusieurs syndicats mixtes d’établissements publics territoriaux de bassin s’ils existent sur des parties distinctes de son territoire.

La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Le présent amendement vise à assurer la cohérence entre cette proposition de loi et l’article L. 566-10 du code de l’environnement pour ce qui concerne les missions des EPTB.

Il convient à cet égard de « mettre en cohérence les actions des collectivités ».

Concrètement, il s’agit là d’un amendement de précision rédactionnelle.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ah non !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je reste quelque peu réservé quant au caractère rédactionnel de cet amendement, que nous avons rejeté en commission.

L’article 6, tel qu’il résulte des travaux menés par l’Assemblée nationale et par notre commission des lois, élargit à la prévention des inondations le champ de l’assistance technique que les départements sont tenus d’offrir aux communes et aux EPCI ruraux. L’assemblée des départements de France, l’ADF, dont nous avons auditionné les représentants, y est favorable.

Il est vrai que l’article L. 566-10 du code de l’environnement confie par ailleurs aux EPTB un rôle de coordination des actions des collectivités territoriales, d’animation, d’information et de conseil dans ce domaine.

Toutefois, les services d’assistance technique de l’eau des départements ont une expertise complémentaire à faire valoir dans le domaine : il est utile qu’ils puissent la mettre à disposition des communes et des EPCI qui la solliciteraient. Laissons aux élus municipaux et intercommunaux le choix entre les prestations payantes de conseil et d’assistance susceptibles de leur être offertes par les départements et par les EPTB.

Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Monsieur Bignon, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?

M. Jérôme Bignon. Décidément, je n’obtiens guère de succès avec mes amendements… (Sourires.) Je reviendrai sur ces questions lors des explications de vote.

Pour l’heure, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 6.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
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Article 7

Article additionnel après l’article 6

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié ter, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert et Lassarade, MM. Morisset, Brisson et Babary, Mmes Lamure et Bories, MM. Lefèvre, Paul et Pierre, Mme Deromedi et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un 35° ainsi rédigé :

« 35°

« Crédit d’impôt pour dépenses d’associations syndicales autorisées

« Art. 200 – I. – À compter de l’imposition des revenus de 2017, il est institué un crédit d’impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B assujettis à la taxe relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations et à une redevance à une association syndicale autorisée dont l’objet contribue à la gestion des milieux aquatiques ou à la prévention des inondations.

« II. – Le crédit d’impôt est égal à la redevance payée à l’association syndicale autorisée l’année précédant la déclaration sans pouvoir dépasser le montant de la taxe relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations payée la même année. »

II. – Le montant de la taxe relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations collecté par l’État pour le compte de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est restitué à ce dernier après déduction du montant du total des crédits d’impôt accordés par le présent article aux membres d’associations syndicales autorisées sur le territoire de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

III. – Les I et II ne sont applicables qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. En instaurant la taxe GEMAPI, et en prévoyant de l’appliquer de manière homogène, on a créé une situation d’inégalité devant l’impôt.

Je pense notamment aux propriétaires des territoires de marais membres d’une association syndicale autorisée, ou ASA. Même s’ils sont soumis à la taxe GEMAPI, ces propriétaires continueront à verser leur redevance à l’ASA dont ils relèvent. Or, dans le même temps, un contribuable non membre de l’ASA ne sera imposé qu’à la taxe GEMAPI.

Le présent amendement tend à corriger cette inégalité en créant un crédit d’impôt égal à la redevance payée à l’ASA l’année précédant la déclaration. Ce crédit d’impôt ne dépasserait pas le montant de la taxe GEMAPI acquittée la même année.

Mes chers collègues, permettez-moi de vous apporter les précisions suivantes.

La Charente-Maritime, dont je suis l’élu, compte plus de 100 000 hectares de marais. Au total, un cinquième de la surface du département est ainsi couvert par des associations syndicales de propriétaires de marais.

Il s’agit là d’acteurs incontournables des politiques de l’eau dans les marais. Sans eux, notre économie, nos paysages et notre environnement seraient profondément altérés.

Aujourd’hui, une partie des missions assumées par les ASA relèvent pleinement de la GEMAPI. Il ne paraît pas équitable d’infliger une double taxation aux propriétaires regroupés au sein des ASA. Rappelons-le, au titre de la taxe syndicale, ces derniers acquittent déjà une contribution de 12 à 45 euros, par hectare et par an, pour entretenir les marais et garantir le bon état des milieux aquatiques.

Je l’admets, le dispositif que nous proposons est un peu complexe. Il s’agit là d’un amendement d’appel visant à recueillir la réponse du Gouvernement sur un sujet qui, dans mon département, est évoqué à chaque assemblée de propriétaires.

Madame le ministre, au regard de votre réponse, je suis prêt à retirer cet amendement pour travailler ce sujet plus avant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Permettez-moi au préalable de faire deux observations.

Premièrement, tel qu’il est rédigé, l’amendement ne mentionne pas qu’il s’agit des ASA des marais : cela figure dans l’exposé des motifs, mais pas dans le corps de l’amendement. Il y a tout lieu de craindre que l’adoption de cet amendement ne crée une rupture d’égalité, considérant que celui-ci vise tout particulièrement les ASA des marais, comme vous venez de le dire.

Deuxièmement, comme vous l’avez souligné, le dispositif paraît excessivement complexe. Il aurait peut-être été plus simple – je dis bien : peut-être – de prévoir que les communes ou les EPCI puissent exonérer ces contribuables de la taxe GEMAPI en tout ou partie. Le bien-fondé de la mesure proposée apparaît donc contestable.

En effet, en instituant la compétence GEMAPI, le législateur n’a pas voulu exonérer les propriétaires riverains de cours d’eau non domaniaux de leurs obligations d’entretien des cours d’eau – curage, enlèvement des embâcles et débris, etc. Ces obligations sont la contrepartie de leur droit de propriété sur le lit du cours d’eau, qui emporte le droit d’en extraire des matériaux ; d’un droit d’usage préférentiel de l’eau et du droit de pêche. En faisant l’acquisition de terrains bordant des cours d’eau, ces propriétaires savaient qu’ils seraient assujettis à de telles obligations.

Dans ces conditions, nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’avis du Gouvernement est identique.

Je veux vous expliquer que le paiement de la redevance est directement lié au statut de propriétaire des membres de l’ASA, qui paient pour le fonctionnement de leur association. Il n’y a donc pas d’inégalité devant l’impôt dans la mesure où ces contribuables ne sont pas dans la même situation. En l’espèce, il n’y a pas d’incompatibilité entre le fait de payer cette redevance et le fait d’être assujetti à la taxe GEMAPI.

En outre, votre amendement prévoit un crédit d’impôt sur le revenu et donc grève le budget de l’État : une telle mesure relève en principe de la loi de finances.

Toutefois, il est possible qu’existent localement des regroupements entre les missions dévolues aux intercommunalités du fait de la compétence GEMAPI et celle qui est assurée par les ASA. Dans ce cas de figure, que la loi ne peut régir, il conviendra, si cela est justifié, de trouver des solutions locales, qui pourront incorporer des reversions financières des EPCI aux ASA ; voilà ce qui est possible.

Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 17 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Daniel Laurent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié ter est retiré.

Article additionnel après l'article 6
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Article 8

Article 7

(Suppression maintenue)

Article 7
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Article 9 (nouveau)

Article 8

(Supprimé)

Article 8
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 9 (nouveau)

Le II de l’article 1530 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « , ou de la mission mentionnée au 4° du I du même article, y compris les provisions pour charges à répartir entre plusieurs exercices » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « celles constituées », sont insérés les mots : « par les provisions, » ;

b) À la fin, les mots : « au même I bis » sont remplacés par les mots : « au I bis du même article L. 211-7, ou de la mission mentionnée au 4° du I dudit article L. 211-7 » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut reverser tout ou partie du produit de cette imposition à une ou plusieurs communes membres, aux fins de financer les charges de fonctionnement et d’investissement, y compris celles constituées par le coût de renouvellement des installations ainsi que par le remboursement des annuités des emprunts, résultant de l’exercice de la mission mentionnée au même 4°. »

Mme la présidente. L’amendement n° 44, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à supprimer l’article 9 de la proposition de loi, qui résulte des travaux de la commission, et ce pour plusieurs motifs.

Le premier motif tient aux finances publiques. La taxe GEMAPI, prévue à l’article 1530 bis du code général des impôts, taxe affectée, est destinée à permettre aux EPCI à fiscalité propre, qui seront les seuls à compter du 1er janvier 2018 à devoir exercer de manière obligatoire la compétence GEMAPI, de bénéficier de moyens de financement suffisants.

Aussi, dans la mesure où il s’agit d’une taxe affectée au financement exclusif de la compétence GEMAPI, toute extension de son champ de financement ne saurait être opérée sans une extension du champ de compétence GEMAPI défini dans le code de l’environnement.

M. Pierre-Yves Collombat. On vient de le faire !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Dès lors, il est impossible de prévoir cette extension, sans remettre en cause le caractère affecté de cette taxe.

Le second motif est lié à la compétence GEMAPI elle-même. Si les dispositions actuelles autorisent les EPCI à fiscalité propre à reverser le produit de cette taxe au syndicat mixte, à l’EPAGE, l’établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau, ou à l’EPTB, l’établissement public territorial de bassin, auquel la compétence GEMAPI aurait été transférée, ce dernier ne saurait être reversé à des communes membres pour financer une compétence telle que la maîtrise des eaux pluviales ou du ruissellement, qui demeure partagée entre toutes les collectivités territoriales, au titre du code de l’environnement.

J’attire en outre votre attention sur un point important : la gestion de fortes pluies est déjà couverte, comme je l’ai indiqué précédemment, par le 1° et le 5° de la compétence GEMAPI lorsque celles-ci sont susceptibles d’engendrer des inondations. Ainsi, dans les cas de bassins versants agricoles présentant des enjeux de ravinement, d’érosion et de pollution, qui jouent un rôle majeur dans les phénomènes de ruissellement, certaines infrastructures de stockage en amont peuvent d’ores et déjà être financées par la taxe GEMAPI, au titre de la prévention des inondations.

M. Pierre-Yves Collombat. Si seulement c’était vrai !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Si le 4° de l’article L. 211-7 du code de l’environnement était rattaché à la compétence GEMAPI et non plus à la compétence assainissement, conformément à la jurisprudence de la Communauté européenne, cela poserait la question de la gestion des installations qui traitent à la fois les eaux usées et les eaux pluviales, comme les réseaux unitaires de transport des eaux ou certains bassins d’orage ayant une vocation à la fois de récupération des eaux de pluie et de stockage des eaux usées en prévention des débordements du réseau et de la station d’épuration, qui relèvent logiquement de la responsabilité de la collectivité compétente au titre de l’assainissement.

De plus, la problématique de la gestion des rejets d’eaux pluviales dans les milieux aquatiques ne serait plus abordée sous l’angle qualitatif si le 4° de l’article précité était rattaché à la compétence GEMAPI. Or cet aspect doit être assuré, conformément aux exigences de la directive-cadre sur l’eau.

L’ensemble de ces éléments me conduisent à constater l’inopportunité de l’article 9, que je vous demande de bien vouloir supprimer.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Ce sera difficile pour nous tous ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Madame la ministre, je vais oser dire que l’argumentation du Gouvernement ne tient pas. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Osez donc ! (Sourires.)

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. D’abord, élargir l’affectation du produit d’une taxe, dans des proportions limitées d’ailleurs, ne revient pas à remettre en cause sa nature de taxe affectée.

Ensuite, personne n’est exposé au risque de double paiement. La commission n’a pas relevé le plafond de la taxe ; elle a seulement permis aux communes et EPCI d’en faire le meilleur usage pour prévenir les inondations et gérer les milieux aquatiques.

Enfin, l’article 9 serait contraire à la politique défendue par le Gouvernement en matière d’incitation à la mise en place de solutions de rétention des eaux à la source par la désimperméabilisation ou la végétalisation des surfaces. Mais la commission n’a nullement prévu que la taxe GEMAPI doive être intégralement affectée à la construction de canalisations. Tout au contraire, nous avons rappelé dans le rapport que la prévention des inondations liée au ruissellement passait aujourd’hui non plus par le « tout-tuyau », mais par différents types d’action et de travaux, tels que le terrassement, le creusement de noues et de fossés, le changement de revêtement de la voirie, la plantation de haies, la végétalisation, l’urbanisation raisonnée.

En revanche, je suis heureux d’entendre Mme la ministre affirmer que certains équipements de maîtrise du ruissellement peuvent déjà être financés par la taxe GEMAPI, au titre des missions d’aménagement d’un bassin hydrographique et de prévention des inondations. D’après ce que nous avons entendu dire lors des auditions, les préfets sont loin d’être tous du même avis.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. On leur écrira !

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Les élus locaux pourront désormais se prévaloir des propos tenus ici même par vous, madame la ministre, en séance publique, qui plus est. Il serait d’ailleurs utile que vous précisiez quels types de travaux sont d’ores et déjà éligibles, sans qu’il soit nécessaire de modifier le code général des impôts.

En attendant ces précisions et d’autres éléments d’information qui pourraient nous être apportés au cours de la navette, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je ne sais pas qui a rédigé l’objet de l’amendement, mais je crains que cette personne n’ait pour seule lecture que les codes… et peut-être quelques bouquins ! Je ne suis pas persuadé qu’elle sache comment cela se passe sur le terrain.

Le plus beau dans votre argumentation, c’est la fin ! Il faudrait retenir l’eau à la source ! C’est vrai, mais je vous invite à venir sur le terrain lorsque se produisent des accidents météorologiques tels que les pluies cévenoles. Là, votre argumentation est un peu juste.

En revanche, je retiens qu’il faudrait peut-être opérer une distinction – vous avez commencé à le faire – entre ce qui relève des ouvrages importants – aussi en raison de leur taille lorsqu’est décidée, par exemple, une action d’envergure en termes de canalisation – et des travaux usuels concernant les eaux usées ou les eaux pluviales.

Enfin, l’argument selon lequel on ne pourrait pas transférer aux communes le produit de la taxe tombera si, d’aventure, vous votez l’amendement n° 39 que je propose.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 44.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 39, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Alinéas 6 et 7

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Comme je viens de le dire, il s’agit d’intégrer le ruissellement à la définition de la GEMAPI et à son champ d’application, car c’est un point essentiel.

Toutefois, si l’on ne veut pas trop perturber, dans le même temps, l’unité de conception de la gouvernance, la décision, il faut que ce soit l’EPCI ou l’EPAGE qui soit chargé des travaux, lesquels sont directement liés à la maîtrise des inondations.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Nous avons déjà évoqué le sujet et longuement explicité les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement. Il sera souhaitable de reprendre cette discussion lors de l’examen du texte sur l’eau et l’assainissement dont a parlé Mme la ministre.

Même si je comprends les motivations qui sous-tendent cet amendement, nous l’avons dit et redit au cours de la discussion, l’avis est, je le répète, défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’avis est favorable par cohérence, monsieur Collombat ! Vous n’avez pas voulu supprimer l’article 9, alors supprimons au moins les deux alinéas visés !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 39.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9.

(Larticle 9 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 9 (nouveau)
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des raisons qui me conduisent à être en désaccord avec ce texte, qui met à mal l’un des aspects fondamentaux de la loi dite GEMAPI. J’ai une forte inclination à voter contre, à l’instar de mes votes successifs sur les articles. Cela dit, au regard de la prise en compte du ruissellement, un élément essentiel, je me contenterai de m’abstenir sur le texte.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

M. Jérôme Bignon. J’avais l’intention de voter pour, notamment parce que ce texte contient des avancées, et j’en prends bonne note. Je pense notamment au ruissellement, comme vient de le mentionner notre collègue Pierre-Yves Collombat.

Toutefois, cette proposition de loi a une vision trop restrictive de la compétence GEMAPI, car elle ne prend pas en compte les contraintes des directives européennes, et cela me choque. Que cela plaise ou non, que ce soit trop pour les communes ou les collectivités, le grand cycle de l’eau est autre chose que l’eau qui coule sur le sol. L’eau fait partie du patrimoine mondial – je suis désolé de rappeler cette évidence –, qu’elle soit salée ou douce : c’est un cycle permanent. On ne peut donc pas dire que l’on ne s’occupe que de l’eau qui coule dans chacun de nos territoires. Cela ne fonctionne pas comme cela ! Même si le code des collectivités territoriales n’est pas en accord avec ce principe, c’est l’eau en général qu’il faut considérer.

Que l’on ne tienne pas compte des directives et qu’on l’assume, comme l’ont fait certains, cela me surprend, pour ne pas dire me choque !

Par ailleurs, n’est pas non plus prise en compte la vision géophysique de l’eau, dont les frontières ne sont pas administratives. Le concept de bassins versants est plus large que le simple concept de bassins versants agricoles évoqué par Mme la ministre. La géographie de l’environnement ne fait pas encore bon ménage, me semble-t-il, avec le droit des collectivités territoriales. Les changements climatiques, qui ont des conséquences, on le voit bien, de façon assez violente, sur la maîtrise de ruissellement, nous contraindront probablement plus vite que nous le pensons.

Pour toutes ces raisons, je m’abstiendrai.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Madame la ministre, j’ai fait part, au nom du groupe centriste, des interrogations qui sont les nôtres et des points sur lesquels il nous faudra sans doute revenir.

Toutefois, je tiens à saluer la volonté de Mme la ministre et du Gouvernement d’essayer de trouver des solutions en vue d’améliorer une situation inopérante, dont nous avons hérité.

Compte tenu de l’urgence, à quelques jours de la mise en œuvre du transfert de compétence, je confirme que cette proposition de loi est utile : elle rassure et elle simplifie.

Aussi, le groupe Union Centriste votera à l’unanimité cette proposition de loi.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je me rappelle parfaitement la manière dont la compétence GEMAPI a été introduite, par voie d’amendement, dans la loi MAPTAM, par Pierre-Yves Collombat, au lendemain des inondations de Vaison-la-Romaine. Je me souviens aussi des débats, notamment des discussions avec Pierre-Yves Collombat qui ont permis à la Ligérienne que je suis de découvrir que les situations dans le Sud-Est étaient extrêmement différentes : certaines régions de France sont organisées, tandis que d’autres ne le sont pas.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a accueilli favorablement la proposition de loi déposée par l’Assemblée nationale, car elle vient un peu assouplir le dispositif, pour répondre bien sûr aux spécificités locales. Le président du conseil départemental de la Charente-Maritime m’a expliqué qu’il a dû engager de lourds investissements, à la suite de la tempête Xynthia, pour lutter contre les submersions marines. Ce texte est donc empreint de bon sens ; il ne s’agit pas là de principes ni d’a priori : le président du conseil départemental de la Charente-Maritime réagirait à un événement, comme l’a fait Pierre-Yves Collombat.

L’objet de cette proposition de loi que nous avons soutenue à l’Assemblée nationale – elle a été votée à l’unanimité, je le rappelle, ce qui n’est pas si fréquent ! – est d’assouplir le dispositif, je le répète, pour faciliter l’organisation locale entre les syndicats, les EPTB et les EPAGE. Nous avons voulu la limiter à ces syndicats, car il s’agit d’une mission bien particulière.

Nous venons d’avoir un débat. Visiblement, vous n’avez pas toujours compris la manière dont le Gouvernement envisage les choses. L’idée n’est pas de détricoter le texte ; nous voulons simplement l’adapter, comme l’ont demandé certains sénateurs ou certains députés d’Alsace, à des particularismes locaux.

J’espère que nous trouverons un terrain d’entente pour la suite de ce texte, qui, je me permets de vous le dire, est attendu par les élus locaux.

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations.

(La proposition de loi est adoptée.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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8

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mardi 19 décembre 2017 :

À quatorze heures trente :

Nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018 (n° 172, 2017-2018) et nouvelle lecture du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (n° 173, 2017-2018).

À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.

À dix-sept heures quarante-cinq et, éventuellement, le soir :

Suite de la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018 (n° 172, 2017-2018) et de la nouvelle lecture du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (n° 173, 2017-2018).

Projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité (procédure accélérée) (n° 105, 2017-2018) ;

Rapport de M. Philippe Bonnecarrère, fait au nom de la commission des lois (n° 161, 2017-2018) ;

Texte de la commission (n° 162, 2017-2018).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt et une heures cinq.)

 

 

nomination de membres dune éventuelle commission mixte paritaire

La liste des candidats établie par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale a été publiée conformément à larticle 12 du règlement.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai prévu par larticle 9 du règlement, cette liste est ratifiée.

Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :

Titulaires : MM. Philippe Bas, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine di Folco, Françoise Gatel, MM. Éric Kerrouche, Jérôme Durain et Alain Richard ;

Suppléants : M. François Bonhomme, Mme Maryse Carrère, MM. Pierre-Yves Collombat, Christophe-André Frassa, Mmes Laurence Harribey, Muriel Jourda et M. Hervé Marseille.

 

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD