M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Ayant pris le soin de faire une longue déclaration liminaire sur les problématiques soulevées par l’ensemble de ces amendements, je ne vais pas revenir en détail sur chacun d’entre eux. Certains tendent à confier la répartition de la DSIL au préfet de département, d’autres à une commission départementale pour la DETR, d’autres à une commission des investissements locaux, avec, notamment, la présence de parlementaires.
Pour l’heure, il est certain que la DSIL, du point de vue de son fonctionnement, n’est pas un modèle et mérite d’être améliorée. Moi-même, je vois bien ce qu’il en est, ce qu’est la relation région-département : il y a encore beaucoup de flou, et un certain nombre d’améliorations sont nécessaires pour une plus grande fluidité et une meilleure information des élus locaux comme, d’ailleurs, des parlementaires.
Mais les solutions que vous proposez sont très radicales et ne nous semblent pas répondre à la problématique. Au travers de l’ensemble de ces amendements, vous cherchez à faire en sorte que la répartition soit profitable notamment aux territoires et aux petites communes rurales. Or l’adoption de ces amendements pourrait conduire à un effet totalement contraire.
En effet, la DSIL permet d’avoir une enveloppe régionale fléchée, sans qu’il soit tenu compte de la population des départements ; si elle est départementalisée, l’enveloppe sera répartie en fonction du nombre d’habitants des départements – et certains ne sont pas très importants –, alors que la DETR, de son côté, fait œuvre péréquatrice, puisqu’elle est répartie au niveau départemental de manière péréquée.
Il faut vraiment que chacun sache où l’on va.
En outre, se poserait le problème de la composition de cette commission d’élus : autant les commissions pour la DETR ont une composante très rurale, les élus y siégeant étant des élus ruraux, autant, avec la DSIL, vous serez obligés d’y introduire des élus urbains. C’est extrêmement complexe.
Pour toutes ces raisons, comme je vous l’ai expliqué dans mon propos liminaire, nous demandons le retrait de l’ensemble de ces amendements.
M. Ladislas Poniatowski. Y compris de celui de la commission des lois ?…
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Oui !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je ferai également une réponse globale, en rappelant ce que j’ai dit tout à l’heure au cas où certains n’auraient pas été présents.
Je suis de ceux qui pensent, je le répète, que les parlementaires doivent être mieux informés sur la DSIL. Cela dit, on est en train de mettre en place un système assez extraordinaire.
Vous avez voté tout à l’heure un amendement visant à ce qu’une partie de la DSIL soit gérée directement par les parlementaires. Maintenant, il est proposé que la DSIL soit gérée au niveau départemental, tandis qu’un autre amendement tend à créer une commission départementale d’élus unique compétente à la fois pour l’attribution de la DSIL et de la DETR, au sein de laquelle siégeraient l’ensemble des parlementaires. Même si vous prenez soin de préciser qu’il s’agit d’une instance consultative, on sait bien ce qui se passera : face aux parlementaires, aux côtés des élus ruraux – il faudra réintroduire les élus urbains, comme vient de le signaler, Charles Guené –, le préfet n’aura plus la main sur aucun crédit – sur rien ! – de cette « réserve parlementaire », qui s’élève maintenant à 1,8 milliard d’euros – elle a beaucoup augmenté !
M. Philippe Dallier. Ce n’est pas comparable !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le système qu’il est proposé de monter, c’est bien celui-là. Cela pose bien sûr un problème de constitutionnalité, et je ne sais pas quel gouvernement pourrait l’accepter.
Le rôle des parlementaires, c’est de voter le budget, et vous savez bien que personne, ni les élus ruraux ni les préfets, ne peut faire quoi que ce soit sans le vote de ces crédits, comme vous l’avez fait en première partie.
Je suis donc défavorable sur toute la ligne à ces amendements ; il faut quand même, quelque part, être raisonnable et équilibré dans son rôle de parlementaire.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Madame la ministre, j’entends bien ces arguments, mais tous ces amendements pointent un problème central : que les parlementaires, qui votent des crédits, puissent s’assurer de leur bonne utilisation au moyen des commissions ! Or, et ceux d’entre nous qui y ont déjà siégé le savent, l’avis des parlementaires au sein des commissions pour la DETR n’est que consultatif. Par conséquent, je ne comprends pas comment vous pouvez avancer l’argument de la censure constitutionnelle.
Autre problème : à supposer que cet avis ne soit pas suivi par le préfet, ce qui arrive, les parlementaires et les maires découvrent par la suite la décision qu’il a prise en douce, si je puis dire, contraire à l’avis émis par la commission. Se pose donc la question du suivi de cette décision.
Ensuite se pose un problème de formalisme : selon les départements, les règles d’éligibilité à la DETR et les règles de fonctionnement diffèrent.
Quant aux amendements visant à élargir les attributions de la commission en la rendant compétente pour l’attribution de la DSIL et de la DETR, ils me semblent traduire cette nécessité, cette volonté que les parlementaires puissent contrôler au mieux ces crédits, en assurant la publicité des débats et des délibérations qu’ont les élus qui composent cette commission, y compris pour la répartition des crédits de la DSIL. Effectivement, on ne peut pas simplement s’en remettre au préfet, car je ne vois pas pourquoi celui-ci serait plus légitime pour faire ses affaires dans son coin sans que les élus locaux et les parlementaires qui votent le budget de l’État soient mis dans le coup.
Je comprends, dans son esprit, l’amendement de notre collègue Alain Marc. Donner un pouvoir décisionnaire à la commission dès 20 000 euros, diront certains, créera une lourdeur administrative. Mais, dans certains départements, des dossiers à 20 000 euros, cela fait sens. Aussi, je ne vois pas pourquoi les parlementaires ne pourraient pas être étroitement associés à ces discussions.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Madame la ministre, cette expression quasi identique sur toutes les travées du Sénat traduit une certaine inquiétude parmi les parlementaires, qui souhaitent en même temps agir au plus près des territoires et des élus.
Il n’est pas nécessaire de caricaturer les positions qui sont exprimées ici : nous ne souhaitons pas – en tout cas pour ce qui concerne notre groupe – remettre en place la réserve parlementaire, et nous nous sommes opposés à l’amendement qui allait dans ce sens. Nous ne souhaitons pas davantage agir à la place des préfets, non plus que nous ne voulons nous substituer aux élus locaux.
Nous demandons tout simplement d’être associés, informés ; nous voulons faire valoir notre connaissance des territoires, relayer les demandes d’élus qui, tout à fait légitimement, sont venus nous présenter leurs projets en nous expliquant pourquoi ils étaient importants. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que le préfet de département gère l’attribution de l’ensemble des subventions relatives à l’investissement local.
Par son intitulé même, la DSIL, qui remplace le Fonds de soutien à l’investissement local, est bien une dotation de soutien à l’investissement public local, tandis que la DETR, que l’on connaît tous, est effectivement une dotation pour les territoires.
Nous voulons être associés, ni plus ni moins, à la répartition de ces dotations, conformément à ce que sont nos responsabilités ici.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. J’irai dans le même sens que mes deux collègues, et je soutiens globalement l’ensemble des amendements qui ont été défendus.
En démocratie, la légitimité procède du peuple, et ce sont les élus qui ont cette légitimité ; les préfets, eux, ne sont pas élus.
Je me suis opposé à la suppression de la réserve parlementaire parce que je considérais que les règles de transparence qui avaient été mises en place étaient suffisantes pour qu’elle soit vraiment utile aux territoires. Je ne suis donc pas favorable à ce que l’on substitue les préfets aux élus.
S’agissant de la DETR, je suis favorable à ce que les élus aient le droit non seulement de donner un avis, mais aussi de décider. Concernant la DSIL, je veux bien que ce soit le préfet qui décide, mais alors que l’on rapproche la décision du terrain. Nous avons beaucoup plus de liens avec le préfet de département qu’avec le préfet de région, d’autant que les régions sont aujourd’hui très grandes. Il est donc beaucoup plus difficile, y compris pour les parlementaires, d’exercer une influence sur les décisions que ce dernier prend.
On sait malheureusement d’expérience que ces décisions sont souvent arbitraires. En tout cas, pour ma part, jusqu’à présent, je n’ai jamais eu la moindre explication au sujet des critères d’attribution de la DSIL. Si l’on se trouve au bon moment dans le bureau du préfet, on bénéficie en général de l’enveloppe, sinon on est « squeezé ».
Ainsi qu’y tendent la plupart des amendements qui ont été déposés, notre volonté, c’est de rapprocher la décision du terrain et d’associer les élus.
J’aurais tendance, avec, me semble-t-il, mes collègues du groupe Union Centriste, à soutenir les amendements visant à transférer le pouvoir décisionnaire dans l’attribution des crédits de la DSIL du préfet de région vers le préfet de département, en souhaitant que celui-ci reste très à l’écoute des élus, notamment des parlementaires, qui sont la voix du peuple. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Françoise Gatel. Oui !
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. J’irai dans le même sens que Vincent Delahaye.
D’un côté, le turn-over est assez important parmi les préfets – ils restent généralement en poste trois ans – ; de l’autre, les élus territoriaux ont de l’expérience, connaissent le terrain, se sont parfois heurtés à la complexité de nos différences territoriales. C’est pourquoi ces décisions méritent d’être prises au plus près justement de ces réalités locales que nous connaissons.
Par ailleurs, dans la mesure où nous autres parlementaires ne pouvons plus cumuler notre mandat avec une fonction exécutive locale, il ne faudrait pas nous couper des réalités locales en ne nous laissant pas prendre part à la répartition de ces fonds.
C’est la raison pour laquelle je crois sincèrement qu’il faut voter ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.
M. Ladislas Poniatowski. Je dois avouer que je suis assez tenté de me laisser séduire par l’amendement de la commission des lois, en m’en excusant auprès de mon collègue Charles Guené. Pourquoi ? D’abord, parce que, si jamais il est adopté, les autres risquent de ne plus avoir d’objet.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Pas tous !
M. Ladislas Poniatowski. À tout le moins, ils seront globalement satisfaits.
Je regrette que la départementalisation de la DETR ne soit pas l’occasion de donner plus de poids aux élus. Mais toujours est-il que nous, parlementaires, pourrons assister à tous les travaux de la commission pour la DETR. L’adoption de l’amendement de la commission des lois nous permettrait également de prendre part aux travaux d’attribution de la DSIL, ce qui n’est pas possible dans le cadre régional. En effet, je ne vois pas comment il pourrait être possible, dans les deux ou trois très grandes régions – Grand Est ou Auvergne-Rhône-Alpes –, de travailler avec la totalité des sénateurs et des députés.
Mme Nathalie Goulet. Jamais !
M. Ladislas Poniatowski. On n’y arrivera jamais !
M. André Reichardt. Très bien !
M. Ladislas Poniatowski. Madame la ministre, je ne suis pas d’accord avec ce que vous avez dit tout à l’heure : les parlementaires que nous sommes ont un avantage par rapport aux élus locaux, auxquels vous voulez nous opposer. Nous avons une dimension départementale et, à ce titre, nous défendrons la totalité des collectivités territoriales de nos départements – les petites communes rurales, les villes moyennes et grandes. Cette dimension, nous l’avons, contrairement à certains élus locaux, qui ne défendront que leurs intérêts personnels. Je ne suis donc pas d’accord avec ce que vous avez dit tout à l’heure.
J’apporte un peu d’eau au moulin de notre collègue Didier Guillaume lorsqu’il défendait tout à l’heure l’eau et l’assainissement. Notre rôle, par rapport à un préfet, consiste à exploiter notre connaissance du territoire. Accordez-nous cette connaissance, que vous avez vous-même de votre département, madame la ministre. Reconnaissez-le !
Cette proposition n’a rien de révolutionnaire, elle est relativement modérée. Reconnaître la dimension départementale de la DETR et de la DSIL est une bonne chose.
C’est pourquoi, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des lois, je soutiendrai votre amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur pour avis applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. La profusion d’amendements sur ce sujet montre que le texte pose un petit problème. Effectivement, pour aller dans le même sens que mes collègues, celui-ci sous-tend une espèce de volonté de recentralisation ou de régionalisation.
Je suis élu de la région des Hauts-de-France, nouvelle région, et plus précisément du département de l’Oise. Le préfet de région, mon collègue et moi-même ne l’avons jamais vu. Comme le disait précédemment l’un d’entre nous, les préfets passent, les élus restent ! (Exclamations amusées.)
M. Didier Marie. Pendant six ans au moins !
M. Olivier Paccaud. Ils restent tout de même quelques années ! (Sourires.)
Les parlementaires ne sont pas là que pour voter le budget ! Ils sont là pour parlementer, pour défendre leur territoire parce qu’ils le connaissent, comme l’a très bien dit M. Poniatowski. Effectivement, la DSIL doit être départementalisée. La plupart de mes collègues ici présents ont eu connaissance de la liste des dossiers qui ont été soutenus ces dernières années au titre de la DSIL. Or, comme par hasard – je parle pour l’Oise ! –, 80 % des dossiers étaient urbains ; la ruralité n’avait quasiment jamais droit de cité. Pourquoi ? Parce que le préfet ne voyait que les élus des grandes villes et des grands territoires pour prendre ses décisions. Et si compétent soit-il, il ne peut pas visiter les 4 000 communes de son territoire – même si les sous-préfets peuvent éventuellement le suppléer –, il ne peut pas faire le travail que feront les élus de terrain que sont les parlementaires, qui sont des élus locaux, qu’on le veuille ou non.
C’est pourquoi tous ces amendements, malgré leurs différences, me semblent aller dans le bon sens. J’espère très sincèrement, madame le ministre, que le Gouvernement retrouvera le sens de la « proximité », qui passe non pas par la recentralisation, ni par la régionalisation, mais par la mise en commun du savoir-faire, de la connaissance du terrain des élus locaux et aussi, peut-être un peu quand même, du préfet de département. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je serai très bref parce que tout a été dit.
Je veux également qu’on fasse une place à part à l’amendement présenté par la commission des lois, qui tend à mettre l’accent sur l’action du préfet de département au lieu du préfet de région. Vous l’avez compris, comme cela a été dit, dans les régions « XXL » comme la mienne, la région du Grand Est, il est évident que le préfet de département – chez moi, le préfet de région est le préfet de département, mais ce n’est pas nécessairement le cas – connaît bien mieux que le préfet de région les problématiques locales. Le moins que l’on puisse faire, c’est d’établir une cohérence entre la commission d’attribution pour la DETR et celle pour la DSIL.
Je voudrais aussi dire mon accord avec ce qu’a dit Didier Marie : il ne faut surtout pas caricaturer nos propos.
Madame la ministre, je suis très à l’aise, car je n’ai pas non plus voté tout à l’heure l’amendement tendant à rétablir la réserve parlementaire, mais nul doute, et vous le savez bien, qu’il fera long feu. Alors, laissez-nous au moins en contrepartie la possibilité pour le préfet de département de disposer du pouvoir décisionnaire dans l’attribution de la DSIL.
Mes chers amis, dans l’exposé des motifs de l’amendement de la commission des lois, il est indiqué que celle-ci a déposé un autre amendement visant à instituer une commission « mixte » compétente pour se prononcer sur les subventions au titre de la DETR et de la DSIL. J’ai le sentiment que ces deux amendements répondent à la quasi-totalité de la problématique que nous examinons maintenant depuis au moins une demi-heure.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Je sais ce que sera le vote final sur ces amendements.
M. Jean-Pierre Grand. Votre lucidité vous honore !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Pour autant, je vais quand même continuer à les critiquer, tous, y compris, monsieur Poniatowski, celui de l’excellente commission des lois.
Si la discussion politique et les échanges d’arguments sont utiles, leur traduction au travers de ces amendements ne l’est pas – je le pense comme cela ! –, sur deux aspects au moins et même sur un troisième.
La départementalisation de la DSIL aura pour conséquence que, dans certains départements, le montant de la dotation sera ridicule. Je dis bien : ridicule. Une assemblée fait donc le choix d’affecter des sommes ridicules à des projets importants. Voilà ce que vous proposez concrètement. Politiquement, je le comprends parfaitement, mais la réalité des choses, c’est celle-là.
M. André Reichardt. Il y a une péréquation !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Tous les arguments en faveur d’une commission compétente à la fois pour la DSIL et la DETR me paraissent totalement contradictoires avec l’objectif que vous souhaitez atteindre et auquel je peux tout à fait souscrire.
Le problème démocratique avec la DSIL est levé avec l’amendement n° II-74 rectifié ter, dont M. Leroux est le premier signataire, qui a, à un détail rédactionnel près, du sens. L’idée de créer une commission consultative d’élus chargée de se prononcer sur les modalités d’attribution des subventions au titre de la DSIL, sur le modèle de la commission pour la DETR, autour du préfet de région, a du sens. On peut travailler sur ce point. Cet amendement me convient.
Vous dites que tous les amendements vous conviennent, et donc celui-ci aussi. Or il ne prévoit pas la même chose que les autres, il prévoit même l’inverse puisqu’il ne tend pas à départementaliser la DSIL. Il a pour objet de créer une commission d’élus pour la DSIL. Cet argument a, selon moi, du sens, je le répète.
Mme Françoise Gatel. Oui, cela a du sens !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Enfin, je voudrais rappeler qu’on n’a toujours pas installé les commissions pour la DETR dans lesquelles siègent les parlementaires. Elles le seront le 1er janvier 2018, à la demande d’ailleurs des présidents des deux assemblées.
Mme Françoise Gatel. C’est vrai !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Je vous le rappelle, sans que cela ait prêté ici à discussion, le président du Sénat nomme les représentants au sein de chacune des commissions départementales pour la DETR.
Je vous suggère de ne pas revenir tous les ans sur des sujets qui n’ont même pas encore donné lieu à la moindre expérimentation. D’ailleurs, ce serait peut-être pas mal qu’on voie en 2018 comment fonctionne la DETR, qu’on dépose alors un amendement portant sur la présence des élus au sein de la commission pour la DSIL. À partir de là, on aurait, me semble-t-il, dans un premier temps, un ensemble assez cohérent.
À un moment donné, cela a été dit à juste titre, il faudra bien que l’on discute du rôle des parlementaires et du rôle des élus locaux. Et il va falloir arrêter de dire qu’on a confiance dans les élus locaux tout en voulant les chapeauter. Non !
Que l’on ait, dans les réunions des commissions pour la DETR, un retour d’information « départementalisé » sur ce qui s’est passé dans les commissions pour la DSIL, ce serait utile. Mais, de grâce, ne mettons pas en place des usines à gaz pour en remplacer d’autres, en l’occurrence les commissions pour la DETR, qui n’ont pas encore été mises en place. Laissons vivre un peu le système et reparlons-en dans un an ou deux !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Loïc Hervé, rapporteur pour avis. On fait œuvre de simplification en créant une commission unique à l’échelon départemental…
M. André Reichardt. Absolument !
M. Loïc Hervé, rapporteur pour avis. … et en permettant ainsi aux élus locaux d’abord, et aux parlementaires ensuite, d’avoir une vision consolidée de ces deux types d’aide que sont la DETR, d’une part, et la DSIL, d’autre part. Cet éclairage démocratique double – élus locaux et parlementaires – aidera en amont le préfet dans la préparation de son travail, dans le choix de ses critères pour prendre ses décisions et dans le compte rendu qu’il en fera.
On pourrait dire que cet amendement est une lubie : vexés qu’on leur ait supprimé la réserve parlementaire, quelques parlementaires se seraient dit un matin qu’ils allaient s’occuper de la DSIL ! Il n’en est rien. D’ailleurs, référons-nous aux grands auteurs ! M. Darmanin a déclaré, le 21 octobre 2017, à l’Assemblée nationale (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) : « Cela n’engage que moi, et le ministre de l’intérieur aura à donner ses consignes, mais il me semble qu’autant la réserve parlementaire n’était pas justifiée institutionnellement parce qu’un parlementaire n’a pas à distribuer de l’argent, autant il y aurait un très grand intérêt à ce que les parlementaires siègent de droit » – de droit ! – « dans les commissions où le préfet attribue les crédits de la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, et de la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement local. »
M. André Reichardt. CQFD !
M. Loïc Hervé, rapporteur pour avis. Du point de vue de la subsidiarité, le fait de constituer auprès du préfet de région une commission constituée d’élus locaux et de parlementaires ne me semble pas pertinent sur le plan territorial pour faire ce travail. Le préfet de mon département m’a donné, à ma demande, la liste complète des subventions accordées au titre de la DETR et de la DSIL ; je vous assure, mes chers collègues, que le tableau est extrêmement instructif. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. André Reichardt. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Dans cette discussion, il y a plusieurs sujets.
Premier sujet : à quelle échelle doit être gérée la DSIL ? À l’échelle régionale ou départementale ? Pour ce qui me concerne, je pense que l’échelle départementale est la bonne.
Deuxième sujet : qui doit décider de l’attribution des subventions ? Très franchement, je pense que cela ne peut pas être les élus. Ce ne serait pas réaliste.
En revanche, troisième sujet, j’adhère à l’idée que la commission de suivi de la DETR auprès du préfet de département suive également l’attribution de la DSIL au niveau départemental.
Mon collègue Claude Raynal affirme que, si la DSIL est gérée au niveau départemental, certains départements ne disposeront que d’une très petite enveloppe. J’ai envie de lui répondre que tout dépend des critères qui seront fixés. Évidemment, si l’on ne retient qu’un seul critère, celui de la démographie, ce sera le cas. Mais on peut imaginer que soient retenus des critères qui permettent une attribution juste de ces dotations dans chaque département. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, la conception du parlementaire que vous exposez est différente de celle du Sénat.
Selon votre conception – peut-être plus moderne, je ne sais pas, le temps le dira ! –, le parlementaire se consacre à son travail législatif, déconnecté du terrain, car on lui demande de passer de plus en plus de temps à Paris. Selon une autre conception, celle que nous défendons peut-être plus largement au Sénat, le parlementaire, notamment le sénateur, est le représentant des territoires. Et, ces territoires, il ne faut pas les oublier ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous avons donc vraiment une conception différente du rôle du parlementaire.
Maintenant qu’il a été mis fin au cumul des mandats, il n’y a plus de liens d’intérêts directs tels qu’ils pouvaient en exister quand certains étaient présidents de conseil départemental ou maires dans la gestion des crédits publics. La vie change complètement. Je ne sais pas ce qu’il en est de mes collègues, mais, depuis que j’ai quitté la présidence de mon département, département moyen, voilà quelques semaines, je vois la différence : du jour au lendemain, vous n’avez plus un mail, plus un coup de téléphone, vous êtes déconnecté du terrain. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Naturellement, on voit les choses très différemment.
Sans participation et sans action efficace du parlementaire auprès des élus locaux, comment évaluer la politique de territoire ? Comment assumer notre rôle sur le plan national ? Nous nous sommes tous engagés, au moment des élections, à représenter nos départements à Paris, parce que l’État décentralisé reste encore très jacobin. Il est donc important d’être aux côtés de ceux qui, sur le territoire, prennent des décisions avec la neutralité qu’impose cette loi interdisant tout cumul.
Il faut trouver, à l’échelon départemental, une instance permettant aux parlementaires de dire leur mot. De toute façon, madame le ministre, quand cela se passera bien, ce sera toujours, bien sûr, grâce au préfet, et, quand cela se passera mal, ce sera à cause des élus ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.
M. Michel Dagbert. Madame la ministre, on a entendu parler de défiance et de confiance. En tant qu’ancien président de département, je veux dire la confiance que je porte au représentant de l’État dans le département, avec qui j’ai toujours bien travaillé. Mais je voudrais attirer l’attention sur le fait que, dans un département comptant 740 communes rurales de moins de 2 000 habitants, la relation entre le président du conseil départemental et le préfet permet souvent d’avoir une meilleure lecture des projets qui sont financés ou à financer.
L’échelon départemental me paraît le plus pertinent pour analyser les projets et participer utilement au soutien à l’investissement dans les territoires. Aujourd’hui, les parlementaires ont bien souvent exercé des mandats locaux, mais ne sont plus chargés de responsabilités exécutives, ce qui, comme le disait notre collègue, lève le doute ou la suspicion.
Par conséquent, cela me paraît de nature à autoriser d’une certaine manière, comme cela a été dit au sujet d’un amendement dont il y a de fortes chances qu’il n’aboutisse pas, cette grille de lecture départementale pour la DETR et la DSIL.