M. Jean-Louis Tourenne. Il s’agit là du nombre de mandats successifs pouvant être accomplis par les délégués, à l’intérieur de l’entreprise.

La rédaction présentée par le Gouvernement entendait limiter ce nombre ; elle a été précisée par le vote de la commission, laquelle a décidé que trois mandats suffisaient, pour, en général, neuf années de fonction.

Pourtant, on nous explique qu’il faut donner aux délégués syndicaux, aux représentants du personnel les moyens de leur formation, laquelle est, certes, en partie théorique, mais demeure surtout pratique, et se fait « sur le tas ».

La connaissance des textes ne suffit pas, il faut tenir compte également de la façon de se comporter, de la capacité à être à l’aise dans la négociation, à affronter des réunions intimidantes face à un ensemble de personnes exerçant une certaine autorité. Tout cela nécessite que l’on ne limite pas le nombre de mandats.

En tout état de cause, on ne voit pas bien pourquoi nous devrions nous ingérer dans cette affaire, sauf à vouloir étendre aux délégués syndicaux ce qui a été décidé pour les élus de la Nation !

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 105.

M. Dominique Watrin. Nous considérons que le renouvellement des équipes militantes et des élus syndicaux dans les entreprises est une vraie question, mais que le Gouvernement choisit de prendre le problème par le petit bout de la lorgnette, si je peux m’exprimer ainsi : le cumul des mandats syndicaux. La commission a abondé dans son sens.

Si les salariés ne s’engagent pas dans des mandats d’élus représentants du personnel ou dans des fonctions de délégué du personnel, c’est pour d’autres raisons que celles qui sont invoquées.

À notre sens, c’est la discrimination syndicale, voire la répression, menée dans certaines entreprises à l’encontre de certains salariés porteurs de mandats syndicaux qui posent problème. Il convient donc de s’atteler à le résoudre, ainsi que le propose le Conseil économique, social et environnemental, le CESE.

Cette question n’est pas négligeable, puisque 11 % des salariés, selon le CESE, seraient affectés par ces discriminations. C’est en s’attaquant à ce problème que l’on renouvellera le vivier potentiel de délégués syndicaux et de représentants du personnel.

M. le président. L’amendement n° 244, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

trois

insérer les mots :

, sauf exceptions,

La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement gouvernemental vise à limiter le nombre de mandats électifs successifs à trois, sauf exception.

Pourquoi une limitation, et pourquoi une exception ? Ce sujet ne concerne pas les délégués syndicaux, mais les représentants du personnel élus. La convention de l’OIT de Genève prévoit en effet que le mandat des délégués syndicaux n’est pas limité, en raison des risques de discrimination syndicale, ainsi que vient de l’évoquer M. Watrin. J’ai dit, par ailleurs, que nous allions prévoir des dispositions en matière de discriminations syndicales, qui, si elles sont rares, sont graves et, donc, non tolérables.

En ce qui concerne les représentants du personnel élus, il s’agit d’éviter une surprofessionnalisation à vie. En contrepartie, nous prenons un engagement sur les parcours professionnels et sur la reconnaissance des compétences. En effet, beaucoup de compétences qui se développent chez les représentants du personnel, notamment en matière de négociation, d’expression, de conviction, de travail en équipe, sont mal reconnues aujourd’hui dans les entreprises.

Nous entendons donc mener une action positive – cela a beaucoup été évoqué durant la concertation – sur les parcours professionnels et la formation. La limitation des mandats donc va de pair avec cette crainte de professionnalisation à vie pour certains.

La crainte d’une professionnalisation à vie dissuade beaucoup de vocations. Une des explications de la difficulté à renouveler les générations dans les organisations syndicales comme chez les représentants du personnel se trouve dans cette crainte, une fois que l’on a commencé, de ne pas avoir d’autres choix durant sa carrière. C’est un peu la question de la poule et de l’œuf ! On manque de vocations, aujourd’hui, pour les mandats de ce type.

L’introduction d’une possibilité d’exceptions s’explique par le fait que, notamment dans les très petites entreprises et dans les petites et moyennes entreprises, il arrive qu’il n’y ait pas suffisamment de candidats pour renouveler les mandats. Le comble serait que cette difficulté de renouvellement entraîne la disparition des interlocuteurs ! Ce point avait été évoqué durant les concertations avec les partenaires sociaux, l’ordonnance devra donc prévoir des exceptions pour éviter une carence de candidats, qui serait bien sûr dommageable au dialogue social.

M. le président. L’amendement n° 204 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Allizard, G. Bailly, Bas, Bonhomme, Buffet, Calvet, Cantegrit, Cambon et César, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon, Cuypers, Dallier, Danesi, Darnaud, Dassault, Delattre et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi et Di Folco, MM. Doligé et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gremillet, Grosdidier, Guené, Huré, Husson, Karoutchi, Kennel, Laménie, D. Laurent, Lefèvre, de Legge, Leleux, P. Leroy, Longuet, Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mme Mélot, MM. Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Perrin, Pierre, Pillet, Pointereau, Poniatowski et Poyart, Mme Primas, MM. Raison, Rapin, Reichardt, Retailleau, Revet et Savin, Mmes de Rose et Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle et Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, le partage des frais entre l’entreprise et l’instance créée, et la fixation d’un barème pour ceux-ci

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Mme Élisabeth Lamure. On ne compte plus les reproches concernant le coût, la qualité et la probité des prestations des experts devant le comité d’entreprise ou le CHSCT, le tout dans le cadre d’un choix relevant uniquement des élus.

Un amendement présenté par notre rapporteur a permis une mise en concurrence des cabinets d’experts.

Le présent amendement tend, en outre, à prévoir le partage de la charge financière des expertises entre l’entreprise et l’instance fusionnant les IRP, ainsi que la création d’un barème pour ces frais.

M. le président. L’amendement n° 61 rectifié quater, présenté par Mmes Féret et Génisson, M. Daudigny, Mme Yonnet, M. Godefroy, Mme Jourda, M. Labazée, Mmes Tocqueville et S. Robert, MM. Marie, Lalande, F. Marc, Leconte, J.C. Leroy, Montaugé et Raoul, Mme Blondin, MM. Cabanel et Anziani, Mme Bonnefoy et M. Bérit-Débat, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par un membre de phrase ainsi rédigé :

au sein de cette instance, une commission spécifique traitant des questions d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut être créée ;

La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à compléter l’alinéa 2 de l’article 2 du présent projet de loi, qui prévoit de réorganiser l’ensemble des institutions représentatives du personnel et de refondre également les règles de négociation.

La fusion des CHSCT avec les autres instances représentatives du personnel inquiète tout particulièrement. Le CHSCT rempli en effet des missions très spécifiques. Il mène les enquêtes lors d’accidents du travail graves, il tient à jour le registre des accidents du travail et le document d’évaluation des risques, il donne des avis et interpelle l’employeur sur les risques dans l’entreprise, il peut faire suspendre en justice les réorganisations du travail et les restructurations qui portent atteinte à la santé physique et mentale des salariés, il peut inciter les salariés à exercer leur droit de retrait face à une situation de danger, etc.

Toutes ces missions risquent d’être confondues, voire noyées, dans l’ensemble des autres compétences de l’instance unique. Cet amendement vise donc à garantir, a minima, la possibilité de créer une commission spécifique au sein de l’instance unique, chargée des sujets relevant antérieurement du CHSCT.

M. le président. L'amendement n° 104, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le périmètre de mise en place de cette instance est celui de l’établissement dans le sens d’une collectivité de salariés dotés d’intérêts communs et spécifiques, qui exercent soit des activités similaires soit des activités complémentaires, la présence ou non de représentants du ou des employeurs des salariés étant indifférente ;

Cet amendement est retiré.

L’amendement n° 106, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. L’alinéa 3 porte un coup particulièrement grave à la compétence, aux pouvoirs des délégués syndicaux.

Les dispositions concernées expriment la volonté du Gouvernement de permettre à l’instance unique de négocier directement des accords de groupe et ainsi de se substituer, dans cette fonction, aux délégués syndicaux.

Le texte que vous proposez, madame la ministre, est, je l’ai déjà dit, imprécis. Il peut laisser présager un véritable coup de pouce contre les délégués et, par là même, contre les syndicats.

M. Milon, président-rapporteur, souligne même, fort judicieusement, que l’étude d’impact n’aborde absolument pas ce point. Vous me direz que votre volonté est de pallier l’absence de délégués des nombreuses petites et moyennes entreprises.

Ce que vous ne dites pas, en revanche, c’est que l’ensemble des entreprises, y compris les plus importantes, pourront exercer un oukase à l’égard des syndicats et de leurs délégués.

Ce point de vue n’est pas issu d’irréductibles opposants. M. Milon, qui soutient votre projet, affirme dans son rapport : « Alors que le Gouvernement n’a pas souhaité intégrer le délégué syndical à cette IRP, il serait donc nécessaire de définir l’articulation entre le rôle de l’instance en tant que négociatrice des accords collectifs et celui des délégués syndicaux qui, dans ce cas de figure, seraient dépossédés d’une de leurs principales attributions. »

Madame la ministre, le statut des délégués syndicaux a été forgé dans la loi en 1936, par la lutte, les grèves. Supprimé sous le régime de Vichy, il a été rétabli par le Conseil national de la Résistance. C’est donc extrêmement important.

Les délégués syndicaux sont au cœur de la démocratie sociale, ils assurent la représentation syndicale. Leur remise en cause participe, de notre point de vue et nous ne sommes pas les seuls à porter cet état d’esprit, du véritable coup d’État social organisé par ce texte.

C’est pourquoi, à défaut d’avoir supprimé l’article entier, nous vous proposons de voter en faveur de la suppression de cet alinéa.

M. le président. L’amendement n° 236, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

exerce, sauf accord majoritaire contraire,

par les mots :

peut également exercer

La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Nous souhaitons rétablir le texte du Gouvernement, lequel prévoit que l’instance unique peut exercer les compétences de négociation, et non qu’elles les exercent systématiquement par défaut, sauf accord majoritaire contraire.

À travers l’instance, on doit permettre d’envisager les mécanismes selon lesquels les compétences en matière de négociations collectives, en l’absence de représentants syndicaux ou lorsque les syndicats présents souhaiteront lui déléguer certaines missions, pourront fonctionner.

Il s’agit de rendre le dialogue social plus efficace et de représenter de façon plus adéquate la collectivité de travail. Cette instance unique va le permettre.

Le droit international rappelle le principe de la primauté des organisations syndicales pour négocier avec l’employeur ou les organisations d’employeurs.

Quoi qu’il en soit, la présence d’un délégué syndical reste prioritaire pour négocier les accords collectifs.

M. le président. L’amendement n° 33 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, MM. Tourenne et Jeansannetas, Mmes Féret, Génisson et Campion, MM. Daudigny, Durain, Godefroy et Labazée, Mmes Meunier, Yonnet et Jourda, MM. Assouline, Botrel, M. Bourquin, Courteau et Magner, Mme Monier, M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l’emploi des personnes handicapées et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise ;

La parole est à Mme Dominique Gillot.

Mme Dominique Gillot. La commission des affaires sociales du Sénat a décidé de supprimer cet alinéa, qui prévoyait une habilitation du Gouvernement à déterminer les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur, notamment en vue de renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Or, nous le savons, l’instauration de l’égalité professionnelle entre femmes et hommes n’est pas naturelle, mais passe par le développement de pratiques itératives, par le renforcement du service public éducatif pour élever le niveau global de qualification, par la construction de l’estime de soi et par l’émancipation.

Ce projet s’inscrit dans le temps long et je suis convaincue que la participation de toutes nos concitoyennes à la vie collective de notre pays dans une association, une fondation, une coopérative et, bien sûr, dans l’entreprise, nous fera collectivement bénéficier de l’apport des parcours individuels.

La discussion actuelle peut se résumer simplement : l’expérience des salariés peut-elle contribuer à moderniser le dialogue social et à améliorer la vie dans l’entreprise ? J’en suis convaincue, de même que de nombreux salariés et beaucoup de chefs d’entreprise.

Le rétablissement de cet alinéa, complété par mes soins d’un deuxième engagement de société fondamental, à savoir le renforcement de l’emploi des personnes handicapées, est gage de réussite de la politique de l’entreprise dynamique et solidaire, de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de l’emploi des personnes en situation de handicap.

Les salariés de genre féminin et les personnes qui vivent avec un handicap, a fortiori quand il s’agit de femmes, souffrent toujours de fortes discriminations au travail, dans l’accès à l’emploi ou à des responsabilités, dans la reconnaissance de l’intérêt de leur travail au sein de l’entreprise, dans les relations de travail avec leurs collègues et avec leur hiérarchie. Ces sujets ne sont pas suffisamment portés dans le dialogue social courant dit « de droit commun ».

Alors que la mixité de la réflexion est à même de réduire les biais qui freinent les avancées sociétales hautement profitables au dynamisme et à la modernisation de nos rapports humains dans tous les secteurs d’activité, particulièrement dans l’entreprise, où les idées reçues ont la vie dure, la participation des salariés aux discussions et à la prise de décision sur ces deux sujets ne réglera pas l’ensemble des problèmes, mais constitue un élément nécessaire pour lutter contre les discriminations insidieuses et souvent involontaires que subissent encore trop de nos concitoyens dans leur vie professionnelle.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de voter en faveur de cet amendement de rétablissement de l’alinéa 4.

M. le président. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, MM. Tourenne et Jeansannetas, Mmes Féret, Génisson et Campion, MM. Daudigny, Durain, Godefroy et Labazée, Mmes Meunier, Yonnet et Jourda, MM. Assouline, Botrel, M. Bourquin, Courteau et Magner, Mme Monier, M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur en vue de renforcer l’emploi des personnes handicapées au sein de l’entreprise ;

La parole est à Mme Dominique Gillot.

Mme Dominique Gillot. Il s’agit, vous l’aurez constaté, d’un amendement de repli. J’ai bon espoir que notre assemblée, dans sa sagesse, adhère à l’esprit de mes propositions ! Si l’argument de promotion pour les représentants du personnel du renforcement de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ne retenait pas votre adhésion, cet amendement de repli tend à conférer la possibilité de déterminer les conditions dans lesquelles les représentants du personnel seront mieux associés aux décisions de l’entreprise en vue de renforcer l’emploi des personnes handicapées.

Il vise donc à donner de l’élan pour satisfaire, de façon harmonieuse et consentie, aux obligations issues de la loi de 2005, à savoir 6 % de salariés avec handicap dans les effectifs d’une entreprise, fut-elle privée ou publique.

Souvent, les frilosités, les idées reçues, des pudeurs inappropriées ou des préjugés freinent le recrutement et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées. Les salariés, qui, souvent, connaissent une personne concernée, dans leur environnement ou dans leur famille et qui savent qu’ils pourraient eux-mêmes devenir un jour des travailleurs avec handicap, font preuve de bienveillance et d’attention à l’égard de ceux des leurs qui, ayant des besoins spécifiques, n’en ont pas moins des compétences professionnelles et des capacités relationnelles et organisationnelles utiles à l’entreprise.

Le dialogue social doit prendre en charge cette question de progrès social, qui, par ailleurs, fait l’objet d’une priorité du Président de la République, lequel a souhaité que soit développée une politique inclusive des personnes handicapées. Cette politique inclusive doit véritablement irriguer l’ensemble des politiques publiques, et particulièrement la politique de l’emploi. (Mme Odette Herviaux applaudit.)

M. le président. L’amendement n° 107, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise, notamment en renforçant les prérogatives du comité d’entreprise, dont l’objet est d’assurer l’expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts, par sa participation aux décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production ;

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Je serai brève, car ma collègue Dominique Gillot a développé les raisons pour lesquelles il est nécessaire de rétablir la rédaction issue de l’Assemblée nationale.

La commission des affaires sociales du Sénat a supprimé cet alinéa au nom du principe de non-discrimination. Pourtant, alors même que l’article 2 a pour objet d’améliorer les conditions du dialogue social dans les instances représentatives du personnel, et donc, en premier lieu, dans les comités d’entreprise, pour les entreprises de plus de cinquante salariés, il nous semble important, au contraire, d’offrir aux représentants des salariés la possibilité d’être parties prenantes du renforcement de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Nos collègues du groupe GDR ont travaillé à cette fin, à l’Assemblée nationale, avec le soutien du rapporteur de la commission comme du Gouvernement.

Ce sujet est important. Il a été déjà été question dans nos échanges de l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’entreprise. Malgré des lois successives, nous ne sommes pas parvenus à un résultat en 2017. Il faut donc faire preuve de volontarisme.

Il est incompréhensible de supprimer cet alinéa au nom du principe de non-discrimination. Il importe, au contraire, de créer les conditions d’un renforcement de ces démarches, afin que l’égalité réelle entre les femmes et les hommes dans l’entreprise s’impose à tous les niveaux, qu’il s’agisse notamment de la rémunération et de l’avancement.

Le chemin est encore très long, il serait judicieux qu’une assemblée comme le Sénat ne nous prive pas des maigres outils qui sont à notre disposition. (M. Christian Favier applaudit.)

M. le président. L’amendement n° 108, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise, notamment en leur accordant un droit de veto sur des mesures relatives à la gestion et l’évolution économique et financière de l’entreprise, l’organisation du travail, la formation professionnelle et les techniques de production, en vue de conduire à une augmentation durable du niveau des salaires dans l’entreprise et en prenant en considération leurs avis, vœux et propositions après les avoir mis à l’étude et en débat, puis en motivant la suite qui leur est donnée ;

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Il nous semble vital que les salariés, à travers leurs représentants, aient voix au chapitre sur des sujets qui intéressent directement la gestion de l’entreprise : organisation du travail, formation professionnelle, gestion économique et financière, etc.

En effet, nos entreprises restent majoritairement organisées sur un modèle de division des tâches et de séparation entre la prise de décision par les dirigeants et son application par les salariés.

Or, l’entreprise étant également un bien collectif, il apparaît nécessaire d’en moderniser la gouvernance. Si toutes les questions sociales qui concernent les salariés sont remises à plat dans ce projet de loi et, demain, dans les ordonnances qui en seront issues, il n’y a aucune raison d’exclure du nouveau cadre de relations entre salariés et employeurs les choix économiques qui ont trait à la vie de l’entreprise.

Mieux encore, ce partage de la prise de décision permettrait de sauver certaines entreprises de décisions regrettables. Nous connaissons tous des exemples de choix économiques désastreux et douteux, faits unilatéralement par des directions d’entreprise sous pression des actionnaires.

Si les salariés pouvaient intervenir réellement dans les décisions économiques de l’entreprise ou du groupe, il est certain que beaucoup d’emplois seraient sauvés.

Dans le Pas-de-Calais, par exemple, deux sites de l’industrie papetière, Stora Enso et Arjowiggins, ont fermé, en raison de décisions purement financières prises par les grands groupes internationaux de l’industrie papetière, désireux de diminuer la production en Europe pour faire remonter les cours du marché et délocaliser les productions hors d’Europe.

Notre amendement vise donc à mieux associer les représentants de salariés aux décisions de l’employeur et à leur conférer de nouveaux pouvoirs.

M. le président. L’amendement n° 192, présenté par M. Arnell, Mme Laborde, MM. Bertrand et Castelli, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve, M. Collombat, Mme Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment en vue de renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise ;

La parole est à M. Guillaume Arnell.

M. Guillaume Arnell. L’article 2 autorisait le Gouvernement à préciser les conditions dans lesquelles les représentants des salariés élus ou désignés pouvaient être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment pour renforcer l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Il s’agissait de renforcer la présence salariale et, donc, la transparence et la confiance, en permettant aux salariés ou à leurs représentants de participer à la gouvernance.

Cet alinéa a été supprimé par la commission des affaires sociales, au motif que son imprécision pourrait porter atteinte à la liberté d’entreprendre et pourrait se traduire par des mesures préjudiciables à la capacité de l’employeur à diriger son entreprise.

Parce qu’il nous semble nécessaire de mieux prendre en compte le point de vue du personnel dans les processus de décision stratégique de l’entreprise, nous proposons tout simplement de rétablir cet alinéa.

M. le président. L’amendement n° 235, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° Déterminant, dans le cas mentionné au 2°, les conditions dans lesquelles les représentants du personnel peuvent être mieux associés aux décisions de l’employeur dans certaines matières, notamment concernant la formation, et favorisant au sein des instances mentionnées au 1°, au 2°et au 4°la prise en compte de l’objectif d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise ;

La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Plusieurs amendements précédents ont montré l’importance, que nous partageons, de rétablir ce qu’avait dit l’Assemblée nationale sur la nécessité de se focaliser sur l’égalité entre les hommes et les femmes. J’ajouterai à ce sujet l’insertion professionnelle des personnes handicapées.

Nous proposons nous-mêmes un amendement, car les débats ont également fait apparaître la nécessité de préciser cet alinéa, lequel traite de deux sujets proches, mais distincts.

Le premier est le rétablissement de l’habitation initiale pour la codécision dans le cas des conseils d’entreprise. Je rappelle que le conseil d’entreprise, issu de la fusion des quatre instances, jouit du pouvoir de négociation. Dans ce cadre, la négociation permet, pour certains sujets, la codécision. L’instance unique pourrait donc l’exercer dans des domaines à définir par les partenaires sociaux, par exemple sur le plan de formation, comme cela a été évoqué pendant les concertations.

Le second sujet de cet alinéa est l’habilitation, introduite à l’Assemblée nationale et votée à l’unanimité, me semble-t-il, relative à l’égalité entre les hommes et les femmes. Ce thème ne saurait être limité aux entreprises, minoritaires, qui créeront un conseil d’entreprise, mais les concerne toutes.

Nous souhaitons donc prendre des mesures pour favoriser la prise en compte de cet objectif dans toutes les instances : le futur comité social et économique, le conseil d’entreprise, mais aussi le conseil de surveillance et le conseil d’administration, soit, d’une manière générale, toutes les instances de gouvernance.

Nous sommes très favorables également à l’ajout de l’insertion des handicapés dans l’emploi, peut-être par voie de sous-amendement.

Nous vous proposons une nouvelle rédaction de cet alinéa, qui comporte deux sujets distincts, afin de prendre en compte vos différents amendements, que je vous demanderai donc tout à l’heure de retirer au profit de notre amendement, si sa rédaction vous paraît complète et adéquate.