M. Mathieu Darnaud. Tout va bien !
M. Jean-Marc Ayrault, ministre. « En 2015, l’éducation nationale est redevenue le premier poste budgétaire de l’État. La création de 60 000 postes couvrant tous les métiers de l’éducation a été engagée sur l’ensemble du quinquennat. En 2017, nous conforterons les lycées professionnels, où nous créerons 500 nouvelles formations sur des métiers d’avenir.
« La culture est un autre élément fondamental de liberté et d’émancipation. Parce que l’inégalité dans l’accès à la culture se noue dès le plus jeune âge, le Gouvernement a commencé à donner corps à l’ambition d’une véritable éducation artistique et culturelle à l’école, à travers l’opération Création en cour. Dès le début de l’année prochaine, 100 artistes seront invités en résidence dans les écoles et les collèges.
« L’effort que nous avons engagé au bénéfice de l’enseignement supérieur et de la recherche a permis à 40 000 étudiants supplémentaires d’entrer chaque année dans nos universités. Le budget des bourses a été augmenté de 500 millions d’euros depuis 2012. Aujourd’hui, un étudiant sur trois bénéficie d’une bourse sur critères sociaux.
« Nous allons poursuivre la politique de construction de pôles d’excellence de niveau mondial financés par le programme des investissements d’avenir. Je pense aux pôles d’excellence créés à Bordeaux, Aix-Marseille, Strasbourg, mais aussi à ceux qui doivent aboutir à Paris, Saclay, Grenoble et Nice. Lille et Lyon présenteront des projets en 2017.
« Pour soutenir l’enseignement supérieur, pour donner à la recherche française la place la plus éminente dans la compétition scientifique internationale, l’effort budgétaire annuel devra se situer durablement autour de 1 milliard d’euros. Seul un tel investissement permettra à la fois d’accompagner l’autonomie des établissements, d’améliorer l’accueil des bacheliers dans l’enseignement supérieur et de maintenir notre recherche au plus haut niveau. Cette ambition sera au cœur des priorités des prochains mois.
« Enfin, je voudrais rappeler l’importance stratégique que présente la candidature de Paris à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et à l’Exposition universelle de 2025. Je m’impliquerai personnellement dans cette double bataille, afin d’aider notre capitale à la gagner. »
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’arrive à la conclusion du discours de M. le Premier ministre. Je vais maintenant lire le passage, en quelque sorte « plus personnel », qui s’adresse à vous, mesdames, messieurs les parlementaires.
M. Jean-Claude Lenoir. Cela devient intéressant !
M. Jean-Marc Ayrault, ministre. « J’ai évoqué les crises que doit affronter notre société et les dangers qui menacent notre pays, car, dans les épreuves, j’ai vu le pays de près.
« J’ai vu sa force, son courage, ses ressources presque infinies de sang-froid, de lucidité, de volonté et de fraternité. J’ai vu une nation digne dans le deuil. J’ai vu de la sincérité dans la compassion. J’ai puisé de la force dans cette volonté farouche de notre peuple de résister face à ceux qui souhaitent l’atteindre. J’ai vu son attachement aux valeurs de la démocratie et à la devise de la République. Je parle de cet amour de la France qui transcende toutes les origines, toutes les cultures et toutes les religions.
« Notre pays est un grand pays. Une fois encore, il s’est montré capable de résister à la violence déchaînée contre lui par le terrorisme, sans céder à la panique, ni à la haine ni à la tentation d’un lâche renoncement aux valeurs et aux vertus qui le fondent. Une fois encore il a suscité, au-delà de la sympathie, l’admiration de ses amis partout dans le monde, qui ont senti qu’en s’attaquant à la France le terrorisme s’en prenait à leur propre liberté. Une fois encore, il a su se rassembler, surmonter ses divisions, comprendre que ce qui unit les Français est infiniment plus fort que ce qui les sépare. Car la France n’est jamais plus grande ni plus unie que dans l’épreuve.
« Mais les ressources de notre peuple ne se révèlent pas seulement dans les circonstances douloureuses ou dramatiques. La volonté de créer et d’être utile, la persévérance dans l’effort, la solidarité sont des vertus qui s’exercent quotidiennement, sans bruit, dans les entreprises, dans les administrations, dans les associations, dans les universités et les laboratoires. Ce sont les atouts d’une société vivante et solidaire, qui me semble très différente du portrait désabusé qu’en font les polémistes et les prophètes du déclin.
« Si notre pays se redresse, jour après jour, c’est bien sûr parce que cette majorité a engagé les réformes nécessaires pour préparer l’avenir. (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.) Mais c’est avant tout parce que les Français eux-mêmes ont la volonté de progresser, de travailler, de créer, de s’entraider et ne demandent à leurs élus, quelles que soient leurs préférences partisanes, que de les soutenir dans leur dessein de bâtir cette France plus forte, plus belle et plus juste à laquelle ils aspirent, pour eux et pour leurs enfants. Je veux parler de cette France qui est en nous et qui doit nous réconcilier avec l’espérance.
« Je me présente donc devant vous aujourd’hui avec un engagement. Celui de faire de chaque journée une journée utile à notre pays. »
M. Bruno Sido. Très bien !
M. Jean-Marc Ayrault, ministre. « Celui de mettre en œuvre sans délai chacune des mesures que l’Assemblée nationale a décidées. Celui de contribuer, par l’action de ce gouvernement, au confortement de notre pacte républicain. Celui de défendre et de faire vivre la laïcité, ce joyau qui rend possible notre vivre-ensemble. Celui, enfin, de placer au cœur de mon action le respect.
« Le respect qui proscrit le cynisme, le mensonge, les postures, les violences, les outrances. Le respect que l’on doit à l’enseignant, à l’infirmière, au policier, aux acteurs et aux serviteurs du bien commun. Le respect que l’on doit à l’ouvrier, à l’artisan, au commerçant, au paysan, à tous ceux qui produisent et entreprennent. Le respect que l’on doit à ceux qui ne sont pas nés ici, mais qui ont choisi la France, qui respectent ses lois et contribuent par leur travail et leur talent à sa prospérité.
« L’engagement que je prends est de chercher chaque jour à nous montrer à la hauteur des ambitions de nos concitoyens, en s’adressant à leur intelligence plutôt qu’à leurs instincts, en leur proposant des débats dignes et des choix clairs.
« La campagne pour l’élection présidentielle devra proposer des débats de fond et mettra en lumière les différences de conception qui nous opposent les uns aux autres. Pour convaincre les Français de la justesse de nos choix, je veux consolider, conforter, amplifier l’action engagée par la majorité depuis 2012, parce que cette majorité s’est employée à redresser l’économie et les comptes publics, qu’elle a renforcé notre modèle social et préparé l’avenir de notre pays à travers l’école, les territoires, le numérique, la transition énergétique.
« À cette tribune, devant les représentants de la Nation, je songe à celui qui fut l’un des hommes les plus admirables qui ait siégé dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Je pense à Jean Jaurès et à l’exigeant message qu’il délivra aux élèves du lycée d’Albi un jour de 1903. Ce jour-là, Jaurès,…
M. Bruno Sido. Et pourquoi pas Victor Hugo ?
M. Didier Guillaume. Respectez !
M. Jean-Marc Ayrault, ministre. … qui avait quarante-cinq ans et venait d’être réélu député de Carmaux, s’est adressé à la jeunesse de France et, par-delà le temps, à nous tous. Et voilà ce qu’il nous a dit : “Le courage, c’est de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense.”
« Mesdames, messieurs les parlementaires, l’engagement ne se compte pas en mois, ni le dévouement en semaines. L’engagement et le dévouement ne cherchent pas la récompense. Ils s’estiment en réformes poursuivies, en actions menées, en progrès accomplis.
« Dans les mois qui sont devant nous,…
M. Roger Karoutchi. Ou plutôt les semaines…
M. Jean-Marc Ayrault, ministre. … je vous propose de nous consacrer aux grandes causes. Et il n’en est pas de plus grande que de servir la France ! » (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur quelques travées du RDSE.)
M. le président. Acte est donné de la déclaration de politique générale dont il vient d’être fait lecture au Sénat.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.)
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
4
Communication relative à une commission mixte paritaire
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire qui s’est réunie sur le projet de loi de finances pour 2017 n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
M. Daniel Raoul. Comme c’est étonnant !
5
Renvoi pour avis unique
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique (n° 176, 2016-2017), dont la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est saisie au fond, est envoyée pour avis, à sa demande, à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
6
Dépôt d’un rapport
Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les mesures d’accompagnement en faveur de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna pour leur permettre d’appliquer les principaux dispositifs de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il a été transmis à la commission de l’aménagement du territoire, à celle des affaires économiques et à la délégation sénatoriale à l’outre-mer.
7
Dépôt d’avis du congrès de la Nouvelle-Calédonie
Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du congrès de la Nouvelle-Calédonie, par lettre en date du 8 décembre 2016 :
- un avis formulé sur le projet d’ordonnance relatif à l’aptitude médicale à la navigation des gens de mer et à la réglementation de l’alcoolémie en mer ;
- un avis formulé sur le projet d’ordonnance portant transposition de la directive 2014/92/UE sur la comparabilité des frais liés aux comptes de paiement, le changement de compte de paiement et l’accès à un compte de paiement assorti de prestations de base ;
- un avis sur le projet d’ordonnance portant réforme du dispositif de gels d’avoirs ;
- et un avis formulé par le congrès de la Nouvelle-Calédonie sur le projet d’ordonnance relative aux espaces maritimes français.
Acte est donné de cette communication.
8
Modernisation, développement et protection des territoires de montagne
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (projet n° 47 rectifié, texte de la commission n° 192, rapport n° 191 et avis nos 182, 185, 186).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, à l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 9 sexies.
Titre II (suite)
SOUTENIR L’EMPLOI ET LE DYNAMISME ÉCONOMIQUE EN MONTAGNE
Chapitre Ier (suite)
Favoriser le déploiement du numérique et de la téléphonie mobile
Articles additionnels après l’article 9 sexies
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 22 rectifié est présenté par MM. L. Hervé, Delcros, Lasserre et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L’amendement n° 252 rectifié bis est présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 9 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 34-8-1-1 du code des postes et des communications électroniques est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’autorité constate que cela est nécessaire à la réalisation des objectifs mentionnés au 4° du II de l’article L. 32-1, elle peut demander la mise en œuvre d’un partage de réseaux radioélectriques ouverts au public.
« Après consultation publique, l’autorité précise les opérateurs tenus de mettre en œuvre ce partage, le délai dans lequel la convention de partage doit être conclue et le périmètre géographique, ainsi que les principales caractéristiques contractuelles, techniques, économiques et financières, qui fondent la convention de partage. Elle approuve la convention de partage et peut, le cas échéant, en demander sa modification dans des termes et un délai qu’elle détermine. Le refus de négocier de bonne foi, le non-respect ou le défaut de mise en œuvre de la convention de partage sont sanctionnés par l’autorité, conformément à l’article L. 36-11.
« En cas d’échec des négociations entre les parties, l’autorité peut exiger d’un ou de plusieurs opérateurs la publication d’une offre d’accès à leur réseau en vue de permettre la mise en œuvre d’un partage de réseaux radioélectriques ouverts au public.
« Après consultation publique, l’autorité précise les opérateurs qui doivent formuler une telle offre d’accès, le délai dans lequel l’offre doit être formulée et rendue publique et le périmètre géographique, ainsi que les principales caractéristiques contractuelles, techniques, économiques et financières, qui fondent cette offre d’accès. Elle peut demander la modification de cette offre dans des termes et un délai qu’elle détermine. Le refus de formuler une offre, de négocier de bonne foi avec un opérateur tiers la signature d’une convention d’accès sur cette base, ou le défaut de mise en œuvre de cette convention sont sanctionnés par l’autorité, conformément à l’article L. 36-11.
« Sans préjudice de l’article L. 34-8-1, lorsque la prestation permet la fourniture de services de communications électroniques sur une des zones identifiées en application du III de l’article 52 ou des articles 52-1 et 52-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, des articles 119, 119-1 ou 119-2 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ou de l’article L. 34-8-5 du présent code, elle est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires. »
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié.
M. Loïc Hervé. Nous revenons cet après-midi sur la question essentielle de la couverture mobile en montagne, qui a occupé nos débats hier soir. Un amendement que nous avions déposé et permettant de définir les zones blanches au niveau législatif a été adopté. Je m’en félicite.
L’objet du présent amendement est de prévoir la possibilité pour l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, lorsque cela est justifié au titre de l’objectif d’aménagement du territoire, d’enjoindre les opérateurs à négocier un accord de mutualisation de leurs infrastructures mobiles dont elle encadre les termes.
À défaut d’accord, le régulateur pourra amener chaque opérateur à proposer une offre de référence d’accès à son réseau mobile en zone rurale.
L’ensemble du mécanisme pourra également donner lieu à des sanctions de la part du régulateur.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand, pour présenter l’amendement n° 252 rectifié bis.
M. Alain Bertrand. Le présent amendement a pour objet de renforcer la mutualisation des infrastructures de réseaux mobiles afin d’améliorer la couverture et la qualité de service dans les zones de montagne et les zones rurales.
Il apparaît nécessaire de prévoir la possibilité pour l’ARCEP d’enjoindre les opérateurs à négocier un accord de mutualisation de leurs infrastructures mobiles, lorsque cela est justifié au titre de l’objectif d’aménagement du territoire.
À défaut d’accord, l’ARCEP pourrait contraindre chaque opérateur à proposer une offre de référence d’accès à son réseau mobile.
Le non-respect de ces dispositions ferait l’objet de sanctions prononcées par l’ARCEP.
Le présent amendement reprend une disposition qui avait été votée par le Sénat lors de l’examen du projet de loi pour une République numérique qui avait été supprimée par la commission mixte paritaire.
Le libellé de cet amendement est très clair : il vise à fixer les conditions de droit pour parvenir à cet accord.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Ce sujet a en effet déjà été examiné voilà quelques mois par le Sénat dans le cadre de la loi pour une République numérique. Notre assemblée avait été très partagée lors du vote sur cette disposition, qui avait finalement été supprimée lors de la commission mixte paritaire.
En ciblant la mutualisation des réseaux, ces amendements visent davantage à améliorer la couverture des zones grises que celle des zones blanches. Toutefois, il n’est pas certain qu’ils contribuent sur la durée à un meilleur aménagement du territoire.
Comme vous le savez sans doute, ils font beaucoup réagir les opérateurs. Ils opposent en particulier ceux qui ont déployé l’essentiel des réseaux existants et le dernier arrivant sur le marché mobile.
Les adopter reviendrait à privilégier l’opérateur qui a, de fait, le moins contribué à la couverture des territoires, compte tenu de son arrivée tardive. Je ne suis pas certain que le Parlement doive intervenir dans ces rapports de marché.
Par ailleurs, certains opérateurs se sont déjà engagés dans la mutualisation de leurs réseaux sur certaines parties moins denses du territoire, sur la base du volontariat.
Enfin, sans parler d’un mécanisme de « passager clandestin », car l’accès ne serait pas gratuit, l’argument selon lequel un dispositif de ce type constituerait une désincitation à l’investissement n’apparaît pas complètement infondé.
Sur le fond, je partage l’intention des auteurs d’accroître la vigilance des pouvoirs publics quant aux efforts de couverture des opérateurs et au respect de leurs obligations.
J’ajoute que c’est parce que nous avions évoqué cet amendement durant la discussion du projet de loi pour une République numérique que les opérateurs ont accepté d’augmenter leur contribution au déploiement des sites complémentaires hors centre-bourg.
Techniquement, toutefois, nous ne sommes pas certains que ce mécanisme soit le plus pertinent pour traiter durablement les problèmes de la couverture mobile.
La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur ces amendements. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Le Gouvernement partage l’analyse du rapporteur.
En effet, il s’agit d’une vraie problématique. Nous en avons longuement parlé hier soir, il est incontestable que la couverture mobile n’est satisfaisante pour personne. Malgré les demandes réitérées des élus, des parlementaires et de l’ARCEP, nous n’avançons pas.
Pourtant, qu’on le veuille ou non, des solutions existent, et ces amendements vont dans le bon sens, même si nous connaissons les difficultés qu’ils posent aux opérateurs.
Monsieur le rapporteur, je vous ai bien écouté. Parce qu’ils nous disent à tous la même chose, je sais qu’un opérateur menace de cesser d’investir si nous le forçons à mutualiser, parce qu’un autre opérateur, arrivé plus tard, viendrait alors profiter de ses infrastructures, ce qui lui paraît ne pas être équitable, le remède risquant, selon lui, d’être pire que le mal.
J’ai saisi l’ensemble des opérateurs, que j’ai rencontrés plusieurs fois, et la Fédération française des télécoms. Après le débat en séance à l’Assemblée nationale, ils se sont engagés à nous faire des propositions, mais elles ne nous sont jamais parvenues.
M. Jean Desessard. Voilà !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Après le passage du texte devant votre commission, nous nous trouvons dans la même situation, et nous faisons une fois de plus le constat en séance que nos concitoyens sont victimes de fractures téléphonique et numérique. Ils se tournent naturellement vers leurs élus, qui se voient répondre par les opérateurs que des solutions vont être trouvées, mais rien n’avance.
Nos débats portaient cette nuit sur les zones blanches. Je suis certain que l’amendement qui a été adopté contribuera à accélérer le mouvement, mais nous savons très bien, monsieur Bertrand, qu’il y a loin de la coupe aux lèvres et que la réalité ne correspond pas du tout à ce que l’on nous présente.
Nous discutons maintenant d’amendements qui visent à rechercher la mutualisation. Lors du passage du texte devant l’Assemblée nationale, nous avions attendu que les opérateurs réagissent. Force est de constater qu’ils n’ont rien fait.
Même si je sais que cela risque de contrarier les uns ou les autres, je vais adopter la même position que celle du rapporteur et m’en remettre à la sagesse du Sénat, en espérant qu’enfin, d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire dans quelques jours, les acteurs se réveilleront et que nous parviendrons à trouver la bonne solution.
J’ai bien vu, dans les votes exprimés cette nuit comme dans les propos tenus durant le débat dans tous les groupes, que la détermination des sénateurs était forte et qu’elle le restera. Je les comprends ! Ils sont excédés d’entendre de belles paroles sans jamais obtenir de résultats efficaces qui convaincraient nos compatriotes qu’enfin ce dossier avance.
On a mis quatre-vingts ans pour amener l’eau potable en zone rurale et un peu moins pour l’électricité, mais nous ne vivons plus à la même époque. Il n’y a pas de raison pour que les territoires de montagne soient une fois de plus défavorisés au motif qu’en l’absence de cahier des charges à l’origine les opérateurs les ont délaissés pour se précipiter vers les secteurs urbains.
J’ai conscience de ne peut-être pas adopter la position officielle dans les hautes sphères, mais je sais prendre mes responsabilités – c’est aussi le devoir d’un ministre. (Applaudissements sur les travées du RDSE ainsi que sur le banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Merci, monsieur le ministre, d’avoir adopté cette position, qui va d’ailleurs dans le sens des propositions qu’a émises Mme Axelle Lemaire, puisqu’il y a maintenant des procédures contradictoires pour évaluer la couverture mobile dans les différents bassins de vie de ce pays. Il s’agit, à mon sens, d’une avancée intéressante.
Le problème est sérieux. Nous travaillons tous, en ce moment, sur le schéma d’accessibilité aux services publics. Si nous voulons que nos services publics soient dignes du XXIe siècle, la téléphonie, le très haut débit mobile et le très haut débit fixe – deux solutions technologiquement complémentaires – sont indispensables. À cet égard, il y a des territoires à deux vitesses.
M. Loïc Hervé. C’est exact !
M. René-Paul Savary. Près des villes, il n’y a aucun problème de téléphonie mobile.
M. Jean Desessard. Mais des problèmes de pollution !
M. René-Paul Savary. Tout se passe bien, même si certains villages n’ont pas la 3G, mais, dès qu’ils vont dans les territoires ruraux, les élus se font engueuler, et c’est normal ! Être à portée d’engueulade, c’est d’ailleurs important pour mener une politique de proximité (Sourires.) et nous comprenons que nos concitoyens n’acceptent pas la situation actuelle ! Et on ne peut pas leur raconter qu’il ne s’agit que d’une histoire d’opérateurs.
Mme Évelyne Didier. Pourtant, c’est ainsi !
M. René-Paul Savary. Il faut leur proposer des solutions. En matière de très haut débit fixe, c’est maintenant le cas : des échéances sont fixées, on connaît le coût des opérations, il est possible d’avancer des propositions. En ce qui concerne le très haut débit mobile, en revanche, les élus ont perdu la main.
Nous ne pouvons pas continuer à laisser cette question aux mains des opérateurs. Nous devons impérativement être en mesure d’influer sur la politique à mener : il en va de la solidarité entre chacun des territoires. C’est la raison pour laquelle je suis sensible à vos propos, pour une fois, monsieur le ministre ! (Nouveaux sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Je goûte avec délectation l’argumentaire développé par M. le ministre. D’une part, il avance des arguments supplémentaires en faveur de cet amendement et, d’autre part, en s’en remettant à la sagesse du Sénat, il affirme que le travail d’écriture de la loi appartient aux parlementaires, et non pas aux opérateurs.
Comme celui que nous avons adopté hier soir, cet amendement vise à rompre avec le scandale national que constitue la couverture mobile notre pays ou, plutôt, la non-couverture mobile de tant de territoires, qu’on les appelle zones blanches ou zones grises.
Il s’agit d’envoyer un message législatif et politique fort et coercitif en imposant aux opérateurs de se mettre d’accord et de définir entre eux les modalités financières nécessaires à l’ouverture mutuelle de leurs réseaux, en tenant compte de l’historique de leur création. À ce propos, monsieur le rapporteur, il est possible de définir ces modalités économiques et financières dans leurs relations contractuelles. Si les opérateurs ne résolvaient pas d’eux-mêmes cette situation, il appartiendrait alors au régulateur de définir les sanctions à leur infliger.
Nous avons tous reçu des coups de téléphone de la part de ces opérateurs ces derniers jours. Ils ont le droit de défendre leurs intérêts économiques et financiers, mais il me semble que c’est l’honneur du Parlement de se saisir de cette question.
Nous qui représentons les élus locaux de nos différents territoires ; nous qui avons entendu le message du congrès de l’Association nationale des élus de la montagne, à Saint-Dié-des-Vosges ; nous qui avons dans les territoires ruraux tant de collègues, maires, adjoints ou conseillers municipaux, qui n’en peuvent plus ; nous qui sommes régulièrement en contact avec des chefs d’entreprise et des citoyens excédés, nous avons la responsabilité d’avancer et d’envoyer un message politique fort. De ce point de vue, une disposition législative m’apparaît comme la meilleure option ! (M. Vincent Capo-Canellas applaudit.)