Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Rapin, rapporteur. La commission n’a pas très bien saisi le sens de cet amendement. A-t-il fait l’objet d’une concertation préalable avec le Gouvernement ? Peut-être y a-t-il un problème de rédaction. Vous faites référence au tribunal administratif de Grenoble ; et donc ? La commission souhaiterait entendre le Gouvernement.
Personnellement, à défaut d’avoir un avis bien arrêté sur cet amendement, je suis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Cet amendement n’a pas fait l’objet d’une concertation avec le Gouvernement, pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur.
Le législateur a autorisé, en cas de cession d’activité totale ou partielle, le titulaire à la céder à titre onéreux sans tenir compte des délais minimaux d’exploitation.
Toutefois, il a assorti cette dérogation d’une interdiction pour les personnes concernées d’exploiter une nouvelle autorisation pendant une durée de cinq ans.
Cet amendement vise à supprimer cette interdiction pour les cas de cession en la limitant au cas d’inaptitude définitive. Cette proposition sera inopérante dans la mesure où, par définition, après qu’une inaptitude définitive a été prononcée, on ne peut pas conduire un taxi.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Monier, l'amendement n° 33 est-il maintenu ?
Mme Marie-Pierre Monier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 33 est retiré.
Article 8
I. – Le livre Ier de la troisième partie du même code est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Le premier alinéa du III de l’article L. 3120-2 est complété par les mots : «, notamment les centrales de réservation au sens de l’article L. 3142-1 » ;
3° L’article L. 3120-3 est abrogé ;
4° À l’article L. 3120-4, les mots : « et celles qui les mettent en relation avec des clients, directement ou indirectement, doivent pouvoir » sont remplacés par les mots : « sont en mesure de » ;
5° Le deuxième alinéa de l’article L. 3121-11-1 est supprimé ;
6° L’article L. 3121-11-2 est abrogé ;
7° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 3122-1 est supprimée ;
8° Les sections 1 et 3 du chapitre II du titre II sont abrogées ;
9° Le III de l’article L. 3124-4 est abrogé ;
9° bis À la fin du I de l’article L. 3124-7, les références : « aux articles L. 3122-3 et L. 3122-5 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 3122-3 » ;
10° L’article L. 3124-13 est abrogé.
II. – (Non modifié) Le 14° de l’article L. 511-7 du code de la consommation est ainsi rédigé :
« 14° De l’article L. 3142-5 du code des transports ; ».
III. – (Supprimé)
IV. – (Non modifié) Au VII de l’article 16 de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, la référence : « L. 3124-13 » est remplacée par la référence : « L. 3143-3 ».
V. – (Supprimé)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Rapin, rapporteur. Je prends la parole à ce stade pour revenir sur un amendement très intéressant, l’amendement n° 3, à l’article 7, que son auteur, François Commeinhes, n’a malheureusement pas pu présenter. Celui-ci concernait la location-gérance. Or la commission souhaitait précisément entendre le Gouvernement à ce sujet. Au cours des auditions auxquelles a donné lieu cette proposition de loi ces derniers mois, la location-gérance a souvent été évoquée par les professionnels du taxi.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Je ne vais pas faire une présentation générale de la location-gérance, mais vous indiquer ce que j’aurais répondu à M. Commeinhes si celui-ci avait présenté son amendement.
La loi, en réalité, ne fait qu’expliciter un avis du Conseil d’État du 12 novembre 2003, qui indique que la location-gérance doit comprendre l’autorisation de stationnement – ce que l’on appelle communément la licence – et le véhicule spécialement équipé.
De surcroît, des arrêtés municipaux – par exemple, l’article 8 de l’arrêté pris par la Ville de Marseille – reprennent cette obligation de l’autorisation et du véhicule. En effet, la définition légale du taxi, c’est un véhicule, un exploitant et une autorisation de stationnement. Ces deux éléments font partie du fonds de commerce et une location-gérance doit donc obligatoirement porter sur tous les éléments du fonds de commerce.
Si l’on dissocie, ce qui était l’objet de l’amendement, le véhicule de l’autorisation de stationnement, on risque de voir contester la valeur patrimoniale de l’autorisation de stationnement en l’absence de fonds de commerce. Ce n’était donc pas forcément une bonne idée.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 31 rectifié, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 3121-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-1. – Les taxis sont des véhicules automobiles comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum, munis d’équipements spéciaux, d’un compteur connecté qui enregistre toutes les transactions et transmet automatiquement ces données à l’autorité administrative, ainsi que d’un terminal de paiement électronique fonctionnel qui accepte tout paiement, et dont le propriétaire ou l’exploitant est titulaire d’une autorisation de stationnement sur la voie publique, en attente de la clientèle, afin d’effectuer, à la demande de celle-ci et à titre onéreux, le transport particulier des personnes et de leurs bagages. » ;
…° L’article L. 3121-1-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-1-1. – Des signes distinctifs et une couleur unique de ces véhicules automobiles sont imposés à l’ensemble des taxis par l’autorité administrative compétente pour délivrer les autorisations de stationnement mentionnées à l’article L. 3121-1 à compter du lendemain de la promulgation de la loi n° … du … relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le domaine du transport public de voyageurs. » ;
…° Après l’article L. 3121-1-1, il est inséré un article L. 3121-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-1-2. – Le non-respect des obligations résultat de la présente section est sanctionné en application de l’article L. 3124-2. » ;
II. – Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 3124-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3124-2. – En cas de violation par un conducteur de taxi de la législation, notamment les articles L. 3121-1 et L. 3121-1-1, et de la réglementation applicable à la profession, l’autorité administrative peut lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle. » ;
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Cet amendement m’a valu une avalanche de courriels très vindicatifs de la part du syndicat Sud Taxi.
La loi de 2014 disposait que les clients des taxis devaient pouvoir payer par carte bancaire et que ces derniers étaient tenus d’accepter ce moyen de paiement. Avec mes collègues Jean-Jacques Filleul et Jean-Yves Roux, nous dressons le même constat : cette disposition n’est toujours pas appliquée,…
Mme Nicole Bricq. Absolument !
M. Michel Bouvard. … singulièrement en région parisienne. C’est un vrai problème pour la clientèle étrangère, qui, arrivant dans un aéroport, après avoir fait la queue, doit encore attendre vingt ou trente minutes avant de trouver un taxi qui accepte le paiement par carte bancaire. Ce n’est quand même pas la meilleure image que l’on puisse donner de l’accueil dans notre pays et de son adaptation à la clientèle étrangère. C’est là un vrai problème, qui concerne aussi l’économie du tourisme.
Il existe sans doute des raisons pour lesquelles une proportion non négligeable de professionnels du taxi continuent à ne pas être équipés d’un terminal de paiement, quand celui-ci n’est pas tout simplement en panne.
Au travers de cet amendement, je propose que nous déployions le même dispositif que celui qui a été mis en œuvre en Belgique, c’est-à-dire le compteur connecté – le taximètre enregistreur. Celui-ci a quelques mérites : d’une part, il permet de retracer l’ensemble des transactions ; d’autre part, il fournit un certain nombre de données sur les déplacements effectués, données qui peuvent être utiles dans la gestion des flux de déplacements, dans l’identification d’un certain nombre de lieux où des aménagements seraient possibles.
À cet égard, je tire une conclusion différente de celle de mes collègues Jean-Jacques Filleul et Jean-Yves Roux : considérant que la loi n’est pas appliquée, ils proposent de supprimer l’obligation inscrite dans la loi de 2014 de la présence à bord du véhicule d’un terminal de paiement électronique, en indiquant simplement que le passager peut payer la course par carte bancaire.
Mme la présidente. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 3121-1 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Sont ajoutés deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. – Les détenteurs d’une carte professionnelle pour l’exercice de l’activité de conducteur de taxi prévue à l’article L. 3121-10 bénéficient d’une attribution automatique de la carte professionnelle nécessaire pour la conduite de véhicules de transport avec chauffeur. Ils peuvent effectuer les prestations prévues à l’article L. 3120-1 avec le même véhicule sous réserve que les équipements spéciaux mentionnés au I du présent article ne soient pas utilisés ou visibles.
« III. – Les autorisations de stationnement prévues au I du présent article ne peuvent être louées ou exploitées à titre onéreux par une personne qui n’est pas le titulaire désigné par l’autorité administrative. Toute stipulation contractuelle contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent alinéa sont d’ordre public. »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le II de l’article L. 3221-1 du code des transports entre en vigueur un an après la date d’entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Cet amendement ne porte pas du tout sur le même sujet.
Mme la présidente. Mais il fait l’objet de la discussion commune.
M. Michel Bouvard. Je retire cet amendement, madame la présidente, parce que l’amendement précédent me paraît plus important. (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 29 rectifié est retiré.
L'amendement n° 18, présenté par MM. Filleul et Roux, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 3121-1, les mots : « et d’un terminal de paiement électronique, » sont supprimés ;
II. – Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
6° L’article L. 3121-11-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3121-11-2. – Pour toutes les courses réalisées par un taxi, quel que soit le montant du prix, le passager peut payer dans le véhicule par carte bancaire. » ;
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Cet amendement vise à reformuler une obligation déjà adoptée dans le cadre de la loi de 2014 : pouvoir payer sa course par carte bancaire dans tous les taxis. Dans ce but, l’article 2 de la loi de 2014 a prévu que les taxis seraient équipés d’un terminal de paiement électronique. Cependant, cette obligation fait parfois l’objet de détournements : il peut en effet arriver que les professionnels refusent malgré tout ce paiement par carte bancaire en raison de problèmes de connexion ou ne l’acceptent qu’à partir d’un montant minimal élevé.
Cet amendement vise à pleinement répondre à l’objectif fixé par la loi de 2014 : permettre à tous les clients de payer par carte bancaire. Il remplace donc l’obligation de moyens, qui imposait la présence d’un terminal de paiement, par une obligation de résultat, en prévoyant dans le code des transports que le passager peut payer par carte bancaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?
M. Jean-François Rapin, rapporteur. Aux termes de l’article 2, il est déjà possible d’obtenir des données via les dispositifs de paiement et leur transmission. Cet article devrait permettre de satisfaire à l’objectif visé par l’amendement de M. Bouvard, même s’il faut prendre garde de transmettre tout et n’importe quoi, objet du système de protection que nous avons mis en place.
Ce matin, en commission, à notre demande, et afin de nous permettre de prendre position, les auteurs de l’amendement n° 18 ont apporté quelques précisions – cela nous a d’ailleurs valu un très beau cours de droit de la part de M. Bignon. Ils nous ont expliqué qu’ils entendaient substituer à une obligation de moyens – un terminal de paiement électronique – une obligation de résultat – le client doit pouvoir payer par carte bancaire.
Nombre d’entre vous l’ont souligné : il arrive souvent que ce terminal ne fonctionne pas, ne soit pas connecté, qu’il n’ait pas été réapprovisionné en papier, et que le client ne puisse donc pas payer par carte.
M. Michel Bouvard. Ceux qui sont concernés se moquent de la loi ! Ils n’appliquent rien du tout !
M. Jean-François Rapin, rapporteur. Si cette obligation de résultat n’est pas respectée – et hors les cas de force majeure, que M. Bignon a détaillés ce matin –, le client aura la possibilité de s’adresser à la police pour indiquer que la loi n’est pas respectée.
M. Michel Bouvard. Et l’Américain ou le Russe qui arrivent à Paris ?
M. Jean-François Rapin, rapporteur. Votre amendement, monsieur Bouvard, étant satisfait en partie par la réintégration de l’article 2 (M. Michel Bouvard sourit.), je vous invite à le retirer ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable. En revanche, et à la suite des précisions apportées sur cette obligation de résultat par ses auteurs, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 18.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. L’objet de l’amendement de M. Bouvard est beaucoup plus large et reprend l’obligation prévue par l’amendement n° 18.
Sur le plan juridique, ce dernier est particulièrement pertinent, ainsi que l’a souligné à l’instant M. le rapporteur : on passe d’une obligation de moyens à une obligation de résultat, seul un cas de force majeure pouvant exonérer le débiteur de cette obligation. De fait, la panne du terminal de paiement ou l’absence de papier ne sera plus un motif pour refuser le paiement par carte et s’assimilera à un non-respect de la réglementation.
Le Gouvernement entend que le consommateur ait le droit absolu de payer sa course par carte bancaire. Cette obligation de moyens, qui existe déjà dans la loi, n’est pas satisfaisante, ce que pallie l’amendement n° 18, qui me paraît aller dans le bon sens. Le consommateur a besoin de cette garantie.
L’amendement n° 31 rectifié est partiellement satisfait. Pour le reste, et c’est la raison pour laquelle il vaut mieux ne pas le voter à ce stade, il a été mal interprété, jugé par la profession comme un amendement anti-fraude fiscale.
M. Michel Bouvard. J’assume !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Le débat peut être ouvert, et pour avoir animé ces groupes de travail pendant tous ces mois, je ne prétends pas que le problème n’existe pas. (M. Michel Bouvard sourit.) Mais il me paraît préférable de continuer à monter le mur et d’aborder les choses les unes après les autres. (M. Michel Bouvard sourit de nouveau.) Voilà la bonne méthode !
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 18 et demande le retrait de l’amendement n° 31 rectifié. En effet, monsieur Bouvard, vous avez déjà à moitié raison puisque votre amendement comporte la même disposition que l’amendement n° 18.
Mme la présidente. Monsieur Bouvard, l'amendement n° 31 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Bouvard. Merci de votre délicatesse, monsieur le secrétaire d’État. L’obligation de résultat, c’est une chose, mais comment la faire respecter à l’égard des ressortissants étrangers qui viennent séjourner en France ? Je suis tenté de penser que, dans quelques mois, nous constaterons que les choses ont peu évolué.
Et, puisqu’il faut aussi savoir dire des choses désagréables, comme dans toute profession, une immense majorité remplit ses obligations, y compris fiscales, cependant que d’autres les remplissent moins. J’observe que, dans le cadre de la loi de finances, nous avons, voilà quelques mois, imposé l’obligation d’utiliser des logiciels de caisse certifiés à l’ensemble des commerçants de manière à éviter la fraude. Et ce que nous imposons à une profession qui est tout aussi honorable que n’importe quelle autre profession de notre pays, nous ne l’imposerions pas en l’occurrence, le sujet étant plus sensible ?
Monsieur le secrétaire d’État, l’obligation d’accepter le paiement par carte bancaire est en vigueur depuis un an, et si elle n’est pas respectée, ce n’est pas toujours parce que la machine est en panne : soit les professionnels ne sont pas équipés, soit ils la refusent. Je prends le pari que, dans quelques mois, malheureusement, nous dresserons le même constat, et je redéposerai alors cet amendement si l’occasion se présente.
Pour l’heure, je le maintiens, car il me paraît aller dans le sens d’une transparence que tous ceux qui exercent leur profession honnêtement souhaitent également.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
(Suppression maintenue)
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Lors de la discussion générale au cours de laquelle j’étais intervenu au nom du RDSE, j’avais dit que notre groupe portait un regard différencié sur la proposition de loi et que nous déterminerions notre vote à l’issue des débats.
Ce soir, à la lueur de l’ensemble des explications que nous avons entendues, je pense que nous sommes mieux informés et que la loi précise davantage les choses. Nous le devons au travail accompli par la commission, principalement par son rapporteur dont je veux souligner encore une fois le travail.
Il subsiste une question, que j’avais évoquée dans mes propos liminaires et sur laquelle j’aurais souhaité entendre le Gouvernement : quid de la fiscalité de ces plateformes sur le territoire national ?
Quelle que soit la réponse qui sera donnée par le secrétaire d'État, et tout en réaffirmant que nous souhaitons qu’il y ait une réponse, le groupe du RDSE se prononcera en faveur du texte, car celui-ci apporte une plus-value sur la loi Thévenoud. Je me dois, malgré tout, de redire qu’il faudra très probablement un troisième texte, voire d’autres, afin d’élargir l’ensemble du dispositif. (Mme Françoise Laborde applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. J’ai écouté avec passion ces débats. Je tiens à remercier en particulier le rapporteur, qui a sûrement amené une valeur ajoutée dans un dispositif compliqué, en Île-de-France, certes, mais aussi en province.
Je veux, pour ma part, exprimer la préoccupation que je ressens en ma qualité de gestionnaire d’un aéroport ouvert aux passagers où j’ai organisé, par le biais d’un navetier, des navettes bien coordonnées, avec possibilité de réservation via des applications. Or je constate que des compagnies organisent parallèlement des transports sauvages. Les transporteurs qui interviennent dans ce cadre n’ont pas forcément demandé des autorisations. On ignore, d'ailleurs, les qualifications et les assurances dont peuvent disposer les chauffeurs qui viennent amener – souvent de loin – des passagers pour prendre l’avion. Une fois arrivés à l’aéroport, ils en profitent pour mettre un petit panneau et ramener à leur destination d’autres personnes en covoiturage sauvage.
Face à cette situation, je pensais trouver dans cette loi une réglementation de nature à cadrer quelque peu ces activités qui se déroulent sur un mode spontané, insuffisamment régulé pour assurer la protection nécessaire dans le cadre du développement de ces offres de transport multimodal.
Malgré le travail en profondeur accompli au Sénat, qui a sûrement permis d’enrichir ce texte, je pense que tous les problèmes ne sont pas réglés et qu’il risque de s’en poser encore à l’avenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Nous l’avons rappelé, avec Jean-Jacques Filleul et moi-même lors de la discussion générale, cette proposition de loi est indispensable. Elle apporte des éléments essentiels qui permettront de réguler ce secteur d’activités et de mettre fin au détournement du statut LOTI dans les grandes agglomérations.
Je voudrais remercier le rapporteur et le secrétaire d'État de leurs explications.
Arrivés au terme de ce débat, nous regrettons cependant quelques modifications apportées au texte.
À l’article 1er, l’exclusion du covoiturage du champ de la proposition de loi ne nous paraît pas opportune. Le secrétaire d'État l’a rappelé, ce débat ne porte pas sur l’avenir de l’économie collaborative, que nous soutenons tous, bien évidemment. La vraie question est de sécuriser juridiquement le secteur du T3P, le transport public particulier de personnes, afin que les difficultés d’hier ne se reproduisent plus demain.
S’agissant de l’article 2, nous nous félicitons du fait qu’il soit réintroduit, mais la rédaction adoptée ce soir nous paraît en deçà de l’article initial. Elle est moins précise : l’objectif de régulation et celui de l’information des AOT ont disparu.
Nous regrettons également que l’article 6, qui permet aux chambres de métiers et de l’artisanat d’organiser les examens, n’ait pu être réintroduit. Cet article permettait d’optimiser le déroulement des examens, indépendamment des centres de formation, cela s’accompagnant de plus de transparence sur les taux de réussite.
Pour terminer sur une note plus positive, nous nous félicitons du compromis trouvé sur l’article 4. Cet article permet de mettre fin au détournement du statut LOTI, tout en préservant les emplois concernés dans le cadre de la période transitoire que nous avons adoptée.
Nous espérons maintenant que l’amélioration de ce texte se poursuive et que la commission mixte paritaire puisse remédier aux difficultés que je viens d’évoquer.
Dans cette perspective, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra sur cette proposition de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je suis solidaire de mon groupe, comme il l’a été quand j’étais chef de file sur des textes difficiles qui ont été débattus ici au Sénat.
Je voudrais dire mes motivations, qui ne sont pas tout à fait les mêmes que celles qui viennent d’être exposées.
Cette loi, telle qu’elle sort des travaux du Sénat et telle qu’elle sera sans doute votée in fine, présente un gros défaut à mes yeux : il s’agit d’un texte de circonstance, qui ne règle absolument rien pour l’avenir. En fait – et la majorité sénatoriale s’entend finalement assez bien avec le Gouvernement sur ce point – la loi arbitre entre deux capacités de nuisance. Et ceux qui l’emportent sont ceux qui ont une capacité de nuisance plus forte, parce qu’ils sont plus anciens et mieux organisés. Elle ne prépare absolument pas l’avenir, car elle met des barrières qui ne tiendront pas.
On a beaucoup parlé des plateformes. Je voudrais quand même rappeler qu’elles ne sont pas toutes américaines. Il y a beaucoup de petites plateformes françaises. Et cette loi a un caractère antiéconomique. En effet, si les VTC se sont développés, certes de façon anarchique, il n’en demeure pas moins que l’arrivée de ces nouveaux acteurs correspond à un besoin, qui dépasse l’Île-de-France. Ces phénomènes, toutes les grandes agglomérations les connaissent, avec des spécificités. Outre que ce texte est contre le consommateur, il apporte peu de reconnaissance à un secteur qui crée des emplois. Et je croyais que l’emploi était la lutte n° 1 du Gouvernement, dont je suis solidaire par ailleurs !
Pour terminer, je voudrais m’adresser à M. le secrétaire d'État et, au-delà de lui, aux uns et aux autres, pour leur demander s’ils ont mesuré la portée sociale de cette affaire. En effet, cette loi est et sera ressentie comme un outil de ségrégation sociale. Avez-vous remarqué le statut de tous ceux qui sont partants pour cette aventure, qu’ils soient indépendants ou salariés ?
Lors de la discussion de la loi Travail, nous avons évoqué ce problème des plateformes. Mme la ministre a eu le courage de défendre, face à la majorité sénatoriale – et je l’ai soutenue – le fait que ceux qui travaillaient pour un seul donneur d’ordre n’étaient ni des indépendants ni des salariés et qu’il fallait travailler pour leur reconnaissance. En effet, là où je vous rejoins, c’est sur le fait que, quelle que soit la formule développée, ces travailleurs ne doivent pas être exploités. Mais la loi ne règle absolument pas le problème de l’exploitation de ces travailleurs.
Mme la présidente. Il faut conclure, madame Bricq !
Mme Nicole Bricq. Je termine, madame la présidente.
Je regrette que la législation soit effectivement vécue comme une mesure antisociale par ceux qui ont foncé dans ces activités. C’est dommage !
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Je voulais d’abord souligner un certain nombre d’acquis obtenus au fil de ce débat, qui a été courtois et posé. Il a permis de dépasser un certain nombre d’antagonismes. Avoir pu parler d’un sujet difficile me paraît déjà un point positif.
Comme l’a dit Mme Bricq à l’instant, beaucoup de problèmes restent devant nous et peu sont réglés par ce texte.
Néanmoins, M. le secrétaire d'État a bien voulu apporter un certain nombre de compléments et l’opiniâtreté de notre rapporteur a sans doute permis de pousser le Gouvernement dans ses retranchements.
En tout cas, ce débat a été utile. Je retiens un certain nombre de points positifs, notamment le fait de sortir le transport partagé du champ de ce texte et d’avancer sur la tarification à la place, ce qui me semble un élément important.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez bien voulu clarifier aussi – au moins, ce point sera-t-il versé au débat – les conditions de passage du statut de LOTI à celui de VTC pour les véhicules de moins de huit places.
Pour autant, nous le savons tous, le moment, à six mois des élections, n’était peut-être pas le plus propice pour rappeler un certain nombre de vérités – comme Mme Bricq vient d'ailleurs de le faire fort bien – et dire qu’il faudra que ce secteur évolue encore, dans une logique de mobilité, dans une logique plus métropolitaine, dans une logique plus écologique afin de pousser chacun de nos concitoyens à délaisser la voiture particulière et à opter pour un transport public de personnes ou, parfois, pour un mode de transport partagé.
Beaucoup de problèmes restent donc devant nous. Nous l’avons aussi mesuré cet après-midi, le sujet est très technique. D’ailleurs, je ne suis pas persuadé qu’au fil des débats on ait écarté l’idée qu’un peu plus de préparation n’aurait pas été utile. Et, en optant pour une proposition de loi, nous n’avons pas forcément choisi le bon outil. En tout cas, il me semble que cela devra être médité pour l’avenir.
Un point majeur n’a pas été traité – M. le secrétaire d'État y a évidemment répondu –, il s’agit du financement du rachat de licence. Nous le savons tous, c’est un point clé et nous devrons nous poser la question des modalités de basculement vers un autre système. M. le secrétaire d'État a dit que le consensus fait défaut. Dont acte. Pour autant, il faudra quand même revenir sur ce sujet, car il est majeur.
Et puis, comme cela vient d’être fort bien dit, il y a une logique sociétale dans laquelle il ne faut pas opposer des emplois entre eux. Je pense que taxis et VTC peuvent se développer ensemble et que d’autres textes permettront de le faire.
Le groupe UDI-UC votera le texte dans sa version issue des travaux du Sénat par esprit de responsabilité, sans grand enthousiasme, dois-je le rappeler.