Mme Annie Guillemot. Il faut une décision de justice !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Mais non !
Mme Annie Guillemot. Sans décision de justice, ils ne voudront pas le faire !
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Bien entendu, nous soutiendrons l’amendement présenté par M. le ministre.
Rappelez-vous, mes chers collègues, nous l’avons tous mentionné dans le cadre de la discussion générale, ce texte fait essentiellement suite aux graves attentats du mois de janvier 2015. Lorsque le Parlement s’est réuni à Versailles, nous voulions que toutes les précautions soient prises pour assurer une sécurité maximale dans notre pays. La commission d’enquête qui s’est constituée sur ce sujet a beaucoup travaillé sur les responsabilités éventuelles de l’école concernant les problèmes de la radicalisation de certains jeunes. Nous apportons là une réponse, en contrôlant plus et mieux l’ouverture des écoles privées hors contrat.
C’est pourquoi nous approuvons cet amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Carle. Madame le rapporteur, vous avez dit, en reprenant mes propos lors de la discussion générale, que le diable se cachait souvent dans les détails. C’est le cas ici.
L’article 14 decies, comme l’article 14 bis, émane d’une ambition tout à fait louable, celle de lutter contre la radicalisation. Pour ce faire, le Gouvernement propose, entre autres mesures, de passer d’un régime de déclaration à un régime d’autorisation. Or, là, c’est toucher à une liberté constitutionnelle, monsieur le ministre.
D’ailleurs, le Conseil constitutionnel, dans un arrêté du 16 juillet 1971 concernant la liberté d’association, qui est une liberté constitutionnelle, a confirmé qu’elle ne pouvait être soumise à une autorité administrative, ni même à une autorité judiciaire. Vous l’avez d’ailleurs implicitement reconnu lors de la discussion de l’article 14 bis. Votre proposition me semble donc contraire à la Constitution.
Si le législateur a voulu à plusieurs reprises, en 1881, en 1886 et en 1950, un système déclaratif, c’est bien pour garantir cette liberté fondamentale. D’ailleurs, l’Association des maires de France réclame elle aussi qu’on s’en tienne à un régime déclaratif mieux encadré, ce que propose Mme le rapporteur.
Monsieur le ministre, ne voyez aucune malice dans ma question, mais qu’est-ce qui se cache derrière tout cela ? Sans doute – et c’est votre droit – votre peu d’appétence pour l’enseignement privé. Ce n’est pas nouveau : en 1983, M. Savary avait agi de façon tellement voyante que les gens étaient descendus dans la rue. Aujourd’hui, vous agissez de façon plus cachée, mais non moins efficace…
On doit se poser une seule question : pourquoi tant de parents mettent-ils leurs enfants dans des établissements privés, sous contrat ou hors contrat ? Parce qu’ils n’ont pas la garantie de la réussite de leurs enfants dans l’enseignement public. Voilà le vrai problème : notre système éducatif n’assure plus l’égalité des chances. Je suis d’autant plus à l’aise pour en parler que je suis moi-même un pur produit de l’enseignement public, tout comme mes enfants.
Plutôt que de remettre en cause la liberté de l’enseignement, Mme la ministre de l’éducation nationale devrait plutôt se consacrer à la réussite de tous les élèves. Je le dis sans idéologie (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain.) : l’école n’est ni de droite ni de gauche, elle appartient à l’ensemble de la Nation ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Patrick Kanner, ministre. Monsieur Carle, chacun appréciera votre soutien actif à l’école de la République au travers de votre propos.
J’ai bien entendu que vous étiez un enfant de l’école publique de votre village ou de votre ville. Cela étant, ce sont les actes qu’il faut juger. Le rétablissement des moyens affectés à l’école publique montre qui soutient aujourd’hui l’école de la République de manière efficace. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
L’alinéa 14 de l’article 14 decies tel que vous l’avez rédigé, madame la rapporteur, ne change rien au droit en vigueur : en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale, tout agent public ayant connaissance d’une infraction doit en aviser le procureur de la République. En revanche, vous l’avez souligné vous-même, dans le cas où un établissement d’enseignement privé ayant ouvert sans autorisation serait amené à fermer, les enfants y étant scolarisés devraient être inscrits dans un autre établissement. Imaginez-vous le traumatisme que cela peut représenter pour un enfant d’être brutalement changé d’école ? (Exclamations sur les travées de l'UDI-UC. – Mme Françoise Gatel, rapporteur, proteste.)
Madame la rapporteur, je n’ai pas de leçon à recevoir de vous et je n’accepte pas le ton que vous avez employé.
M. Ladislas Poniatowski. Quel sectarisme ! C’est insupportable !
M. Patrick Kanner, ministre. Je vous le dis avec beaucoup de respect.
Ce débat nous permet de constater que certains, dans cet hémicycle, ont manifestement adopté une posture idéologique. (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Alain Vasselle. Balayez devant votre porte !
M. Ladislas Poniatowski. Petit ministre sectaire !
M. Patrick Kanner, ministre. Sachez non seulement que je maintiens cet amendement, mais encore que je défendrai cette position devant l’Assemblée nationale, parce que le Gouvernement a à cœur de protéger les intérêts de l’enfant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Christine Prunaud applaudit également.)
M. Ladislas Poniatowski. Tout petit ministre !
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je n’avais pas l’intention d’intervenir, mais, comme vous estimez que je vous ai manqué de respect, monsieur le ministre,…
M. Alain Vasselle. C’est un provocateur !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. … je tiens à dire que je trouve incroyable que, dans ce pays, on ne puisse s’exprimer sur l’éducation nationale sans se faire qualifier de toutes les épithètes.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je vous ai expliqué hier, avec beaucoup de respect – je ne suis pas énervée, je ne fais que m’expliquer –, que votre texte dérivait. Mais là, vous coulez ! Vous êtes à la peine !
Mme Françoise Férat. Eh oui !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je vous prie de m’excuser, monsieur le ministre, je vais adopter un ton plus aimable.
Vous l’avez rappelé, nous proposons à l’alinéa 14 de cet article que, dès lors qu’un établissement aurait enfreint l’interdiction d’ouverture, le recteur d’académie puisse « vider » celui-ci de ses élèves, à charge pour les parents d’inscrire ceux-ci dans un autre établissement scolaire, et ce dans un délai de quinze jours. Vous me dites que ce n’est pas possible, mais alors expliquez-moi pourquoi le DASEN peut faire obligation à des parents assurant l’instruction de leur enfant à domicile et qui n’auraient pas satisfait dans les formes requises, successivement, à deux contrôles d’inscrire celui-ci dans un établissement scolaire dans un délai de quinze jours ?
Monsieur le ministre, j’ai beaucoup de respect pour vous et nous avons toujours bien travaillé ensemble. Si vous n’avez pas apprécié le ton que j’ai employé, je vous prie de m’en excuser, mais, quant à moi, je trouve que vos propos dépassent le fond de votre pensée, ce que je vous pardonne. (Rires et applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. Alain Vasselle. Excellent rapporteur !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 663.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 4 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 189 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 711, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
La même déclaration doit être faite en cas de changement des locaux de l’école, ou en cas d’admission d’élèves internes. Un décret fixe la liste des pièces constitutives du dossier de déclaration.
II. – Alinéa 8
Remplacer le mot :
école
par le mot :
établissement
III. – Alinéa 9, au début
Insérer le mot :
Simultanément,
IV. – Alinéa 10, seconde phrase
Remplacer le mot :
pédagogique
par le mot :
d’établissement
V. – Alinéa 13
Après le mot :
chapitre
insérer les mots :
, les articles L. 914-4 et L. 914-5
VI. – Alinéa 16
Remplacer le mot :
premier
par le mot :
deuxième
VII. – Alinéa 19
Supprimer le mot :
de
VIII. – Compléter cet article par sept alinéas ainsi rédigés :
4° a) Au II de l’article 7 de l’ordonnance n° 2007-1801 du 21 décembre 2007 relative à l’adaptation à Mayotte de diverses dispositions législatives, la référence : « L. 441-13 » est remplacée par la référence : « L. 441-3 » ;
b) Le a) du 4° du 4 de l’article 261 du code général des impôts est ainsi modifié :
- Au deuxième alinéa, la référence : « L. 441-9 » est remplacée par la référence : « L. 441-3 » ;
- Au quatrième alinéa, les références : « L. 441-10 à L. 441-13 » sont remplacées par les références : « L. 441-1 à L. 441-3 » ;
c) Au 1° du I de l’article L. 234-6 du code de l’éducation, les mots : « les articles L. 441-5 et L. 441-6 » sont remplacés par les mots : « l’article L. 914-5 » ;
d) Au 2° du I du même article, la référence : « L. 441-8 » est remplacée par la référence : « L. 914-5 » ;
e) Aux articles L. 6234-1 et L. 6234-2 du code du travail, la référence : « L. 441-13 » est remplacée par la référence : « L. 441-3 ».
La parole est à Mme Françoise Gatel, rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 247, présenté par Mme Prunaud, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « peut prescrire chaque année » sont remplacés par les mots : « prescrit au moins une fois par an » ;
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Cet amendement vise à permettre aux autorités compétentes de ne pas se limiter à un contrôle unique par an dans les cas où un doute subsisterait quant à l’honnêteté ou à la représentativité du contrôle effectué.
Il s’agit ici d’un filet de sécurité pour l’éducation nationale, combinant à la fois le respect de la liberté d’instruction et l’obligatoire prudence des services de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 247 ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Mon cher collègue, votre amendement est satisfait par le texte de la commission, lequel dispose que le contrôle a lieu au moins une fois par an.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 711.
Concernant l’amendement n° 247, comme Christian Favier, nous sommes tous convaincus qu’il faut renforcer le contrôle des établissements déjà ouverts, ce que le Gouvernement fait déjà. Il poursuivra dans cette voie en y consacrant des moyens supplémentaires. Cette action passe par une meilleure sélection des établissements inspectés, en particulier, même s’ils sont une minorité, ceux dont le fonctionnement manque de transparence – ils existent manifestement. Il faut donc saluer les élus locaux quand ils signalent à l’État ces établissements scolaires qui posent problème, car ce sont bien eux qui sont le plus à même de repérer ceux qui ne respecteraient ni leurs obligations légales ni leurs obligations vis-à-vis des enfants.
Monsieur le sénateur, j’estime préférable de ne pas rigidifier le système en imposant des obligations parfois difficiles à faire respecter. Par conséquent, je sollicite le retrait de votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 247 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 626 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Collombat, Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 10, seconde phrase
Après les mots :
nom et les titres du chef d’établissement et des enseignants,
insérer les mots :
leur acte de naissance, un extrait de leur casier judiciaire, l’indication des lieux où ils ont résidé et des professions qu’ils ont exercées pendant les dix dernières années,
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Comme l’a rappelé la ministre de l’éducation nationale, « il est plus facile d’ouvrir une école qu’un restaurant ou un bar ».
Afin de garantir le droit de l’enfant à l’éducation, le Gouvernement proposait de modifier par ordonnance le régime d’ouverture des établissements privés. Si les dysfonctionnements ou les dérives sont minoritaires, elles existent. C’est pourquoi nous saluons la méthode adoptée par la rapporteur de la commission spéciale, qui a mis en place un régime de déclaration unique, renforcé le contrôle en allongeant les délais d’opposition et complété les motifs d’opposition, mais nous estimons que ces mesures ne vont pas assez loin : il faut faire la différence entre écoles sous contrat et écoles hors contrat, même si nous avons bien compris qu’il fallait être hors contrat pendant cinq ans avant de passer sous contrat.
Les dispositions du code de l’éducation en vigueur prévoient que, pour ouvrir un établissement d’enseignement du premier degré privé, le demandeur adresse son acte de naissance, ses diplômes, l’extrait de son casier judiciaire, l’indication des lieux où il a résidé et des professions qu’il a exercées pendant les dix années précédentes. Le présent amendement vise à exiger ces justificatifs, qui sont essentiels, pour vérifier que le chef d’établissement et les enseignants – et non un demandeur – remplissent les conditions de moralité et qu’ils sont en capacité de garantir le droit de l’enfant à l’instruction. Il vise ainsi à étendre les dispositions en vigueur à l’ensemble des établissements et aux enseignants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Les dispositions que vous évoquez, ma chère collègue, sont de nature réglementaire.
Vous l’aurez remarqué, nous avons particulièrement durci les règles et augmenté le nombre de pièces à fournir. Il y a notamment le projet pédagogique et les modalités de financement de l’établissement, les programmes et l’horaire de l’enseignement devant être dispensé. Toutefois, la commission a fait le choix de renvoyer à un décret en Conseil d’État la fixation des modalités de la déclaration et la liste des pièces qui la constituent. Par conséquent, votre amendement est satisfait, et je vous invite à le retirer ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. La fixation des modalités d’examen d’une déclaration de demande relève du domaine réglementaire ; le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Par ailleurs, le Gouvernement considère que le dispositif adopté par la commission n’est pas abouti.
M. le président. Madame Laborde, l'amendement n° 626 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président, puisque ce que nous proposons est d’ordre réglementaire. Cela étant, nous serons attentifs au contenu du décret.
M. le président. L'amendement n° 626 rectifié est retiré.
L'amendement n° 623 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L’établissement ne peut être ouvert qu’après décision favorable de l’autorité compétente de l’État en matière d’éducation rendue dans les trois mois à compter du jour de la réception de la déclaration adressée par le demandeur. L’absence de réponse vaut rejet de la demande d’autorisation.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Dans le même esprit que le précédent, cet amendement vise à instaurer un régime d’autorisation pour l’ouverture des établissements d’enseignement privé. Il tend à maintenir la possibilité pour le maire, l’autorité académique, le préfet et le procureur de la République de s’opposer à l’ouverture de l’établissement. Cela laisserait ainsi le temps à l’administration d’évaluer le projet pédagogique, cependant que l’absence de réponse vaudrait rejet de la demande – ce qui est assez sévère, j’en conviens.
L’autorisation ne constituerait pas un blanc-seing octroyé à ces établissements, puisque le non-respect des conditions fixées par la loi, vérifié lors des contrôles a posteriori, entraînerait la fermeture de l’établissement, après mise en demeure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. L’adoption de cet amendement permettrait à l’administration de refuser à un citoyen, sans se justifier, l’exercice d’une liberté constitutionnelle.
Pour cette raison, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Chacun l’aura bien compris, nous reviendrons sur ces débats à l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement propose un régime d’autorisation, le silence valant accord au bout de quatre mois. Nous voulons laisser le temps aux services de l’État d’instruire les dossiers, mais nous ne souhaitons pas allonger ce délai afin d’éviter d’enjamber trop aisément les vacances scolaires.
Madame Laborde, il existe plusieurs régimes d’ouverture d’écoles privées hors contrat, et les dispositions qui les régissent sont pour certaines plus que centenaires.
L’ordonnance que nous présenterons le moment venu sera examinée par le Conseil d’État, ce qui permettra de vérifier sa conformité aux principes constitutionnels et d’assurer une coordination parfaite du dispositif dans chacun des textes qui seront ainsi impactés.
Compte tenu de cette procédure à venir et de cette analyse juridique précise que délivrera le Conseil d’État – si l’Assemblée nationale rétablit son texte –, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Laborde, l'amendement n° 623 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président ; je fais confiance à M. le ministre.
M. le président. L'amendement n° 623 rectifié est retiré.
L'amendement n° 624 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le montant :
15 000 euros d'amende
insérer les mots :
, de 1 000 euros par jour de retard après signification de l'opposition de l'autorité administrative compétente
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Je pense que le présent amendement va également plaire… (Sourires.) Il vise à instaurer une astreinte financière plus importante afin de renforcer le caractère dissuasif des sanctions applicables en cas d’ouverture d’un établissement d’enseignement privé malgré l’opposition des autorités compétentes ou lorsque les conditions fixées par la loi ne sont pas respectées. Cette sanction devrait inciter l’établissement à se mettre rapidement en conformité, dans l’intérêt des enfants qui y sont accueillis.
Cette disposition rejoint ce qui figure aux alinéas 13 et 14, en renforçant, j’en conviens, les sanctions financières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. J’apprécie vos commentaires, chère collègue, sur les propositions que nous avons faites. Toutefois, votre amendement – vous avez d’ailleurs anticipé mon avis au début de votre intervention – soulève quelques difficultés.
D’une part, s’agissant de l’exercice d’une liberté publique, seul le juge est compétent pour prononcer ces sanctions.
D’autre part, l’astreinte que vous proposez d’introduire aurait un effet rétroactif, ce qui est contraire à la législation en la matière.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. En dépit de la confiance que m’accorde Mme Laborde, j’émets également un avis défavorable sur cet amendement.
Dans le régime actuel comme dans le régime projeté, une peine correctionnelle est prévue si un établissement ouvre alors que l’administration y a opposé un refus. Prévoir en plus de cette peine une astreinte administrative apparaît comme contraire au principe traditionnel du droit français non bis in idem, principe selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni à raison des mêmes faits. Une telle disposition serait jugée disproportionnée au regard de l’objectif visé.
M. le président. Madame Laborde, l'amendement n° 624 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je vais le retirer, monsieur le président, et, même si j’ai une prédisposition pour le comique de répétition, je retire dès à présent l’amendement n° 627 rectifié, qui est dans la même veine. En effet, chacun l’aura compris, je suis pour le régime d’autorisation et non pour le régime de déclaration.
Je retire donc l’amendement n° 624 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 624 rectifié est retiré.
L'amendement n° 712, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
…) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Il fournit un certificat de stage constatant qu'il a rempli, pendant cinq ans au moins, les fonctions de professeur ou de surveillant dans un établissement d'enseignement du second degré public ou privé d'un État membre de l’Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'espace économique européen. Ce certificat de stage est délivré par le recteur sur l'attestation des chefs des établissements où le stage a été accompli, après avis du conseil académique de l'éducation nationale.
« Le fait, pour un chef d'établissement d'enseignement du second degré privé ou public, de délivrer une fausse attestation, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. »
La parole est à Mme Françoise Gatel, rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer les exigences dans la procédure d’ouverture d’une école en rétablissant l'obligation, pour le directeur d'un établissement d'enseignement du second degré privé, d'avoir exercé pendant cinq ans au moins les fonctions de professeur ou de surveillant dans un établissement scolaire du second degré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Sans surprise, le Gouvernement émet un avis défavorable, par cohérence avec la position qu’il a défendue précédemment.
Je souhaite que le travail de recodification puisse être soumis en premier lieu au Conseil d’État dans le cadre de l’ordonnance qui sera présentée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote sur l'article.
M. Jean-Claude Carle. Notre groupe votera cet article dans sa rédaction issue des travaux de la commission, et ce pour trois raisons.
Premièrement, il respecte la liberté constitutionnelle en conservant le régime déclaratif.
Deuxièmement, il rallonge les délais – huit jours, c’était effectivement trop court – et renforce les contrôles.
Troisièmement, il harmonise les différents régimes.
À cet égard, je remercie Mme le rapporteur de l’important travail qu’elle a fait dans un temps très réduit.
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Nous l’avons dit lors du long débat que nous avons eu : l’amendement présenté par le Gouvernement avait notre agrément. Par conséquent, le groupe socialiste et républicain ne votera pas cet article compte tenu des modifications qui lui ont été apportées.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14 decies, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 5 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Pour l’adoption | 189 |
Contre | 124 |
Le Sénat a adopté.
Article additionnel après l'article 14 decies