M. le président. Monsieur Longeot, l'amendement n° 39 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 39 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 68 sexies, modifié.
(L'article 68 sexies est adopté.)
TITRE VI
PAYSAGE
Chapitre Ier
Sites
Article 69
(Pour coordination)
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – (Supprimé)
III. – Le code du patrimoine est ainsi modifié :
1° A Au premier alinéa de l’article L. 143-8, les mots : « par les dispositions du code de l’environnement reproduites à l’article L. 630-1, ainsi que » sont supprimés ;
1° L’article L. 630-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 630-1. – Les règles relatives à la protection des monuments naturels et des sites sont fixées aux articles L. 341-1 à L. 341-22 du code de l’environnement. » ;
2° et 3° (Supprimés)
IV. – (Supprimé)
M. le président. Je mets aux voix l'article 69.
(L'article 69 est adopté.)
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Chapitre II
Paysages
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Article 72 bis AA
(Non modifié)
Après l’article L. 350-2 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 350-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 350-3. – Les allées d’arbres et alignements d’arbres qui bordent les voies de communication constituent un patrimoine culturel et une source d’aménités, en plus de leur rôle pour la préservation de la biodiversité et, à ce titre, font l’objet d’une protection spécifique. Ils sont protégés, appelant ainsi une conservation, à savoir leur maintien et leur renouvellement, et une mise en valeur spécifiques.
« Le fait d’abattre, de porter atteinte à l’arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l’aspect d’un ou de plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres est interdit, sauf lorsqu’il est démontré que l’état sanitaire ou mécanique des arbres présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres ou bien lorsque l’esthétique de la composition ne peut plus être assurée et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d’autres mesures.
« Des dérogations peuvent être accordées par l’autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction.
« Le fait d’abattre ou de porter atteinte à l’arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l’aspect d’un ou de plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres donne lieu, y compris en cas d’autorisation ou de dérogation, à des mesures compensatoires locales, comprenant un volet en nature (plantations) et un volet financier destiné à assurer l’entretien ultérieur. »
M. le président. L'amendement n° 69 rectifié, présenté par MM. Revet, Chaize et Pierre, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Cet article semble méconnaître le caractère vivant des arbres. La loi ne peut pas tout figer !
On ne sait si cet article permettra encore l’exploitation du bois d’élagage, notamment pour les plaquettes et copeaux, ni même l’ébranchage des haies vives d’arbres de haut jet, dont certaines, notamment en Haute-Normandie, aujourd'hui appelée la Normandie, clôturent les terrains sur des talus de terre et bordent quasi systématiquement routes et chemins.
De plus, les rédacteurs de cet article méconnaissent des dispositions en vigueur, qui vont dans le même sens. En effet, l’article L. 126-3 du code rural et de la pêche maritime prévoit la protection des formations linéaires boisées.
Le préfet peut prononcer la protection de boisements linéaires, haies et plantations d'alignement, existants ou à créer, soit sur des emprises foncières d’aménagement, soit lorsque le propriétaire en fait la demande. Leur destruction est alors soumise à l'autorisation préalable du préfet, et le plus souvent donnée après avis de la commission départementale d'aménagement foncier. Une amende de 3 750 euros est encourue en cas d’infraction.
Ces dispositions déjà applicables paraissent plus raisonnables que l’article 72 bis AA, dont nous demandons la suppression.
Permettez-moi d’insister sur la situation de la Normandie. Nos aînés ont planté des talus pour se protéger du vent,…
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Absolument !
M. Charles Revet. … et il faut bien les entretenir, les élaguer. Tel que les choses sont prévues, on se posera demain la question de savoir s’il sera possible de le faire. Faisons confiance à celles et à ceux qui, au fil des siècles, ont construit les territoires : s’ils ont planté des talus de haut jet, c’était par nécessité. On s’aperçoit d’ailleurs que la disparition de ces talus crée des problèmes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, qui vise à supprimer l’article créant un régime de protection pour les allées et alignements d’arbres.
Tout d’abord, ce régime apparaît extrêmement complexe à mettre en œuvre.
Ensuite, de nombreux dispositifs permettent déjà de préserver les arbres, tels que les documents d’urbanisme, qui peuvent les protéger de tout arrachage, au travers des espaces boisés classés ou des éléments de paysage, ou la trame verte et bleue, qui identifie, via les schémas régionaux de cohérence écologique, les continuités écologiques. Des dispositions peuvent aussi être prises par les préfets pour protéger les alignements d’arbres.
Ne rajoutons pas sans cesse des dispositifs complexes ! Si l’administration appliquait déjà les dispositions en vigueur, nous ne perdrions pas notre temps.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État. Ce sujet anime la fin de nos débats depuis la première lecture. Au gré des lectures, un certain nombre de rectifications ont eu lieu. J’estime que nous sommes arrivés à la fin d’un cycle : cet article mérite de vivre. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
J’entends bien vos propos, monsieur Revet, mais ce que vous souhaitez n’est pas incompatible avec la protection des alignements d’arbres. Des dispositifs sont d’ailleurs prévus dans cet article pour régler les problèmes.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je veux aller dans le sens du rapporteur, qui connaît parfaitement les lois et règlements. Aussi, il a fait valoir des arguments opposables au Gouvernement. J’ai d’ailleurs du mal à comprendre que le Gouvernement persiste.
M. Jérôme Bignon, rapporteur. À cette heure tardive !
M. Alain Vasselle. Comme l’a relevé le rapporteur, des dispositions existent déjà, tels les documents d’urbanisme, qui peuvent protéger les haies et les arbres.
Dans ma petite commune rurale de 250 habitants, lorsque nous avons élaboré notre POS, qui a ensuite été transformé en PLU, nous avons protégé toutes les haies, tous les talus et arbres. Aujourd'hui, aucun propriétaire ou exploitant ne peut les faire disparaître sans demander une modification du document d’urbanisme au conseil municipal.
Comme la majeure partie des dispositions de ce texte, il s’agit ici d’une mesure d’affichage, avec des arrière-pensées purement politiques pour plaire à un certain nombre d’électrices et d’électeurs sensibles aux questions environnementales. Cet article est totalement redondant et, donc, inutile. C’est la raison pour laquelle j’invite mes collègues à voter l’amendement de suppression de notre collègue Charles Revet.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Je me demande si nous ne sommes pas schizophrènes en France.
Avec mon collègue Yannick Botrel, nous sommes en train d’élaborer un rapport sur la PAC : la France verse à l’Europe 1 milliard d’euros par an de refus d’apurement pour défaut d’entretien de ces talus. La France est la seule en Europe à avoir un système de comptabilité géographique par l’IGN, l’Institut national de l’information géographique et forestière, au lieu d’utiliser, comme les Allemands, le satellite, ou mettre dans la globalité de la parcelle les talus, si bien que les agriculteurs coupent les haies pour bénéficier de la PAC et ne pas en être amputés à cause des talus.
Parce que j’aime la Normandie et que j’apprécie beaucoup notre collègue Charles Revet, je soutiens l’amendement n° 69 rectifié. Les haies doivent exister ; elles font partie de notre paysage, de notre patrimoine. Même si elles ont constitué un frein pour le Débarquement, elles sont essentielles, et il faut les élaguer. Élaguer, cela veut dire émonder et, en agriculture, les produits issus de l’émondage étaient exploités pour produire du fourrage et servir à l’élevage.
M. le président. En conséquence, l'article 72 bis AA est supprimé, et l'amendement n° 42 rectifié n'a plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de cet amendement.
L'amendement n° 42 rectifié, présenté par MM. D. Dubois et Bonnecarrère, Mme N. Goulet et MM. Kern, Détraigne, Lasserre, Longeot et Guerriau, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
Des dérogations peuvent être accordées par l’autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction ou dans le cas d’arbres situés sur les terres à usage agricole au sens de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme la secrétaire d'État.
Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État. Dans la mesure où nous allons enfin en terminer avec ce texte au Sénat, puisqu’il ne restera plus que la lecture définitive à l’Assemblée nationale, je tenais à vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la qualité des débats que nous avons eus, même s’ils ont parfois été un peu vifs et rudes. Ceux-ci ont en effet permis de soulever un grand nombre de questions et de faire prendre conscience de la nécessité de travailler tous ensemble à l’évolution de certaines mentalités.
Malgré des points de désaccord, il faut le dire, le Sénat a introduit des éléments importants dans ce projet de loi. Je pense notamment à la réparation du préjudice écologique, qui est l’élément le plus important, à la ratification du protocole de Nagoya ou à l’interdiction des microbilles de plastique. Nous pouvons être collectivement fiers de ces avancées. Nous avons en effet réalisé un bon travail tous ensemble. Le projet de loi va maintenant retourner à l’Assemblée nationale, qui choisira souverainement de conserver ou non les amendements que le Sénat a adoptés.
Sachez que j’ai pris beaucoup de plaisir à travailler avec vous. Je remercie beaucoup M. le rapporteur, qui a fait preuve d’un esprit très constructif tout au long de nos débats, les services de la commission ainsi que les services du Gouvernement, en particulier les membres de mon cabinet, qui ont réalisé un gros travail. On ne souligne pas assez souvent l’importance de nos collaborateurs ; c’est pourquoi je les félicite et les remercie beaucoup de leur aide.
J’espère que nous nous retrouverons pour d’autres aventures autour de la biodiversité. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Nous arrivons au terme d’un long parcours, qui a débuté, si ma mémoire est bonne, il y a deux ans et demi avec Mme Royal, pour s’achever avec vous, madame la secrétaire d’État. C’est un parcours au cours duquel sont apparus de nombreux désaccords. Par exemple, nous ne souhaitons pas monter le monde économique contre le monde environnemental. Cependant, ces désaccords ont davantage porté sur la méthode que sur l’objectif de préservation de la biodiversité. Nous sommes en effet tous convaincus dans cet hémicycle que la biodiversité représente probablement l’avenir de l’homme sur cette planète et qu’il importe de la préserver de toutes nos forces. Nous sommes également tous d’accord pour dire qu’il faut nous protéger des lobbys, qu’ils agissent dans un sens ou dans l’autre.
Comme vous l’avez indiqué, madame la secrétaire d'État, le Sénat a pris sa part de responsabilité. Nous avons beaucoup travaillé et tenté de trouver des compromis. Je pense évidemment à l’épineux problème des néonicotinoïdes, qui restera l’une des batailles importantes menées par le Sénat. Sur ce sujet, j’ai pris plaisir à travailler à la fois avec le monde agricole, avec mes collègues du groupe Les Républicains et avec ma collègue du groupe socialiste et républicain Nicole Bonnefoy.
Cela étant, il reste des désaccords assez profonds au sein du groupe Les Républicains. Il n’y aura donc pas de consigne de vote au sein de notre groupe : nous laisserons chaque sénateur libre de voter comme il le souhaite. Pour ma part, je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Contrairement à ce qui a été dit précédemment, le clivage politique reste très marqué lorsqu’il est question de l’importance des enjeux environnementaux. J’en veux pour preuve la suppression de cette disposition centrale qui consistait à orienter l’action publique vers l’objectif « zéro perte nette de biodiversité ». Elle représente pourtant un enjeu fondamental face à l’effondrement de la biodiversité que chacun perçoit sur notre territoire.
Droite et gauche confondues, nous aurions pu débattre des mesures à prendre pour parvenir à une action publique efficace sur cet objectif d'absence de perte nette, en confrontant des propositions différentes, certaines de nature libérale, d’autres plus réglementaires. Seulement, ce débat « propositions contre propositions » n’a pas eu lieu. D’un côté, le débat s’est engagé autour des mesures figurant dans le projet de loi initial du Gouvernement, enrichies par le travail des parlementaires. De l’autre côté de l’hémicycle, il s’est surtout concentré autour de propositions visant à réduire la portée du texte, ce qui a été très net au cours de cette nouvelle lecture. C’est tout de même le gros des propositions qui ont été faites, mes chers collègues !
Le débat sur l’huile de palme, en particulier, m’a beaucoup inquiété. Au travers de certains arguments entendus à droite de cet hémicycle, on a très nettement constaté un sentiment d’impuissance et une forme de fatalisme par rapport aux grands désordres environnementaux. Cela témoigne d’un déni de réalité par rapport à la gravité de la situation, notamment en ce qui concerne les forêts primaires, et montre que certains sont convaincus qu’il est impossible de réguler le monde économique et le libéralisme. Or ce n’est absolument pas notre conception des choses. La question politique qui est devant nous est de savoir comment on parvient à réguler l’économie, tout en acceptant la mondialisation économique.
Même si, dans l’ensemble, le clivage politique est resté très présent, il faut tout de même reconnaître que nous sommes sortis du débat idéologique sur un certain nombre de sujets. Je tiens à cet égard à remercier une nouvelle fois le rapporteur et le président de la commission, ainsi que l’ensemble de nos collègues qui ont participé à ce débat. Nous avons ainsi fait œuvre utile sur des questions comme la compensation des atteintes à la biodiversité, les espèces protégées ou la réparation du préjudice écologique. De ce point de vue, nous avons contribué à enrichir le projet de loi.
Quoi qu’il en soit, comme un certain nombre de marqueurs clés n’y figurent plus, nous allons voter contre ce texte en nouvelle lecture. Pour nous, le texte de l’Assemblée nationale est en effet plus ambitieux que celui proposé par le Sénat. C’est le message politique que nous souhaitons de nouveau adresser à nos collègues députés, même si nous ferons en sorte que certains amendements de progrès, adoptés ici ou là dans le texte du Sénat, soient repris par l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Mon sentiment est mitigé à l’issue de l’examen de ce texte en troisième et dernière lecture, ce que nous appelons la nouvelle lecture.
La première lecture a correspondu à une découverte : il a permis un dialogue et des échanges. J’ai personnellement gardé un souvenir très positif de débats au cours desquels chacun, quelles que soient les travées sur lesquelles il siégeait, cherchait à comprendre. Il faut en effet le reconnaître : tout ce qui touche à la biodiversité est loin d’être évident. A-t-on bien compris, par exemple, ce que signifie la notion d’« écosystème » ? L’écosystème, en réalité, c’est l’interdépendance de tous les éléments qui composent la vie, qu’il s’agisse de l’animal, du végétal ou de nous, humains, puisque nous sommes des animaux, qu’on le veuille ou non ! Les interactions ne s’arrêtent jamais. L’écosystème évolue en permanence. De fait, toutes ces notions sont difficiles à comprendre.
Nous avons progressé modestement mais collectivement, même s’il reste encore beaucoup de choses à faire. Progrès dans les têtes et progrès collectifs : on a effectivement échangé, on s’est écouté la plupart du temps et tout cela a été très positif.
Il n’empêche que nous avons eu un certain nombre de points de désaccord. C’est d’ailleurs la deuxième lecture qui a marqué une certaine rigidification des positions et le retour de certains à des postures politiques. De ce point de vue, la deuxième lecture n’a plus rien eu à voir avec la première lecture. J’ai malheureusement senti qu’on en était revenu à la politique politicienne, ce qui a, me semble-t-il, altéré le travail que nous avions réalisé en première lecture.
Enfin, je considère que cette troisième lecture est faite de bric et de broc, pour le dire gentiment. Elle ne nous laissera pas un souvenir impérissable, même si je reconnais que certaines choses ont encore bougé.
En tout cas, pour notre part, comme nous l’avions indiqué en commission, nous voterons contre cette version du projet de loi. En effet, compte tenu de tous les compromis obtenus, le texte qui nous convient est celui qui sortira de l’Assemblée nationale. C’est pourquoi j’espère que nos collègues députés feront du bon travail.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.
M. Jean-Jacques Filleul. Le domaine du vivant et la biodiversité ont été une découverte pour beaucoup d’entre nous, dans la mesure où ce ne sont pas des thèmes familiers dans nos débats parlementaires. Pour autant, je crois que nous avons plutôt bien travaillé globalement : l'Agence française pour la biodiversité, la réparation du préjudice écologique, le principe de non-régression, la ratification du protocole de Nagoya, ce n’est pas rien ! Ce sont des pas importants qui viennent d’être franchis.
Par ailleurs, nous nous étions fixé comme ligne de conduite de parvenir à un compromis sur l’article 51 quaterdecies relatif aux néonicotinoïdes. Nous avons su avec nos collègues du groupe Les Républicains aboutir à des consensus qui figurent désormais dans le texte. J’espère que nos collègues députés comprendront l’intérêt de cette mesure et le pragmatisme dont nous avons su faire preuve, et qu’ils intégreront dans leur réflexion le fait que, sur le terrain, la profession agricole comprend un texte qui permet à l'ANSES de peser de tout son poids dans l’établissement de la vérité scientifique, ce qui après tout est au fondement de son rôle.
Le groupe socialiste et républicain s’était abstenu sur le projet de loi lors des deux premières lectures, mais, toutes les conditions étant désormais réunies, il votera pour ce texte en nouvelle lecture.
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. On a peut-être limité la casse lors de cette nouvelle lecture, mais, s’il y a un peu de bon, il y a aussi beaucoup de mauvais, selon moi.
Je suis très déçu par l’attitude adoptée par certains de nos collègues députés en commission mixte paritaire, parce qu’ils ont refusé un dialogue qui aurait pourtant permis d’avancer.
Pour ma part, je resterai cohérent avec mes précédents votes en m’abstenant à l’issue de l’examen de ce projet de loi. D’une part, on sait très bien ce qu’il va en advenir : l’Assemblée nationale va de toute façon revenir au projet de loi initial. D’autre part, on est en train d’introduire beaucoup de normes dans le texte. Je ne sais pas combien il y en a précisément, mais ce sont des dizaines de normes supplémentaires que nous allons instaurer !
Comme le disait mon collègue Alain Vasselle, je crains qu’aucune étude d’impact sérieuse sur le plan économique n’ait été réalisée sur ce texte. Cela devrait pourtant être la règle : un texte aussi important devrait comporter une étude d’impact mesurant les coûts engendrés par les différentes mesures pour l’agriculture, notamment.
Je rejoins également mon collègue Jean Bizet lorsqu’il affirme que l’on cherche à détruire notre modèle agricole, et qu’on agit surtout par dogmatisme. Il n’est qu’à voir certains de nos collègues qui en ajoutent systématiquement une couche !
Je voudrais également vous dire avec gravité, mes chers collègues, que l’année 2016 va certainement être l’année de tous les dangers pour l’agriculture française. Je le dis très solennellement, car le monde agricole a subi beaucoup de dégâts cette année. (M. Alain Vasselle opine.) On sera certainement dans l’obligation de lancer un plan Marshall pour l’agriculture. J’en parle aujourd’hui, mais on se reverra peut-être à la rentrée pour en débattre. Si on ne fait rien, on risque d’avoir de gros problèmes.
Enfin, je voudrais rappeler que c’est à l’ANSES de faire le bilan des néonicotinoïdes.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Rémy Pointereau. Ce n’est pas à nous de le faire. Sinon, dans ce cas, il faudrait évaluer tous les médicaments, car, comme l’a dit notre collègue Michel Raison en commission, certains médicaments sont plus dangereux que les néonicotinoïdes. Alors, arrêtons d’en rajouter dans ces moments qui se révèlent pénibles pour l’agriculture. Et ce texte y participe ! (M. Alain Vasselle applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Je suis d’accord avec notre collègue Sophie Primas à propos de la biodiversité : il s’agit d’un élément fondamental de l’équilibre de nos biotopes. C’est absolument vrai, on ne mesure pas l’importance de la biodiversité.
Cela étant, je regrette vivement un certain nombre de postures prises au cours de l’examen de ce texte. Ces postures sont sous-tendues par les théories de la décroissance, ne nous y trompons pas ! Le débat sur les néonicotinoïdes en est certainement l’exemple le plus probant : on a choisi d’imposer au monde de la recherche une date butoir pour trouver des molécules de substitution dont le bilan bénéfice-risque serait plus favorable que celui de ces substances. Dont acte ! Simplement, ce n’est pas du tout ainsi que fonctionne la science, je suis absolument désolé ! Quant à la réduction des doses de produits phytosanitaires, en particulier d’imidaclopride, à 1,5 gramme par hectare, n’en parlons pas ! Dans ces conditions, avouez qu’il faut saluer l’excellence de la recherche et du développement en France…
Je regrette également que les agriculteurs soient toujours montrés du doigt et opposés à la société civile. Mais cela est savamment orchestré ! Un fossé demeure malheureusement entre les grandes déclarations faites dans cet hémicycle et les actes sur le terrain.
Madame la secrétaire d’État, je ne reviendrai pas sur la prise de position adoptée par votre ministre de tutelle à propos d’un territoire qui m’est cher, à savoir la baie du Mont-Saint-Michel, et sur le non-respect de deux directives européennes majeures. À cause de cette posture, je voterai contre ce texte. Je le regrette pour le rapporteur, dont je salue l’engagement et la sincérité, mais je ne comprends pas comment la ministre de l’environnement de ce pays peut se permettre de ne pas appliquer deux directives européennes majeures, simplement parce qu’elle entend céder un jour à l’émotion ou à la pression publique. Je suis désolé, mais ce n’est pas comme cela qu’un État de droit fonctionne !
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle.
M. Pierre Médevielle. La biodiversité est l’affaire de tous : des apiculteurs, des agriculteurs, des responsables politiques, des scientifiques, des industriels, de tous les groupes, des enfants, des adolescents, des adultes, des personnes âgées. C’est peut-être pour cela qu’il est difficile de trouver des positions communes.
Je tiens à dire que je partage les inquiétudes de mon collègue Pointereau concernant l’agriculture. Il est vrai que celle-ci croule sous les normes et en souffre.
M. Rémy Pointereau. Tous les jours !
M. Pierre Médevielle. Elle est en train d’en mourir !
Personnellement, je suis élu d’une zone rurale de montagne. Je peux donc témoigner du fait qu’il faudrait aller vers davantage de simplification. On parlait à l’instant du rôle de la ministre de l’environnement : il est vrai que notre pays a une fâcheuse tendance à pratiquer la « surtransposition » des normes européennes, ce qui nuit à l’agriculture, à la simplification des normes et au bon fonctionnement de nos institutions.
Cela étant, il faut reconnaître un certain nombre d’avancées dans ce texte grâce au travail fait par les différents rapporteurs, et ce même si le débat a conduit à des discussions tendues.
Nous avons parlé des néonicotinoïdes : j’espère que nous développerons d’autres substances et que nous irons plus loin encore dans la prise de conscience de la biodiversité et de l’héritage que cela représente pour les générations futures.
Globalement, les discussions sont allées dans le bon sens et ce texte conduira à quelques réformes positives. Si l’on parvient à simplifier davantage, cela sera bien sûr une bonne chose, notamment en ce qui concerne les normes européennes.
Dans sa grande majorité, le groupe UDI-UC votera donc en faveur de ce texte.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je partage ce qui a été dit par Sophie Primas, Jean Bizet et mon collègue du département du Cher, Rémy Pointereau, qui, compte tenu de leur expérience, ont pu eux-mêmes apprécier à leur juste mesure la pertinence de ce texte !
Mes chers collègues, nous sommes tout simplement en train de voir s’appliquer le principe de précaution, que nous avons introduit dans la Constitution et que connaît bien M. Bizet…