compte rendu intégral

Présidence de Mme Françoise Cartron

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Colette Mélot,

Mme Catherine Tasca.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Communication relative à une commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour une République numérique est parvenue à un texte commun.

3

Questions orales

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

conditions d’accueil des migrants dans la région de calais

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteur de la question n° 1364, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du ministre de l’intérieur sur les conditions d’accueil des migrants, plus particulièrement dans la région de Calais.

Les nombreux déplacements effectués par des membres du Gouvernement et des parlementaires et l’importance des moyens matériels et financiers dégagés depuis le début de l’année 2016 ont permis d’améliorer de façon significative la situation des migrants les plus défavorisés, notamment celle des femmes et des enfants.

Loin des clichés que certains diffusent, un grand nombre de ces migrants sont des réfugiés ayant quitté la Syrie, l’Afghanistan, le Soudan ou l’Érythrée pour des motifs politiques et sécuritaires.

Le 11 janvier dernier, à l’occasion d’un déplacement à Calais de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, il est apparu que l’organisme chargé de la gestion des demandes d’asile, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides – l’OFPRA –, ne disposait dans cette ville d’aucune antenne qui lui conférerait une présence permanente là où se trouve une majorité de migrants.

Il nous a été rapporté par les associations que nous avons rencontrées que, pour l’instruction de leurs dossiers, les migrants étaient, en début d’année, dans l’obligation de voyager jusqu’à Paris à leurs frais, généralement par le train. Outre que ces trajets sont onéreux et les déplacements vers la capitale compliqués pour des personnes en situation irrégulière, le fait que les rendez-vous à l’OFPRA puissent avoir lieu tôt le matin oblige les demandeurs à dormir à Paris, ce qui occasionne des frais supplémentaires.

J’aimerais savoir comment l’action de l’OFPRA s’inscrit dans le processus d’accueil des migrants et comment les officiers de protection les accompagnent au cours de l’instruction de leurs demandes d’asile depuis un an, au vu des changements notables qui ont eu lieu, notamment sur le plan législatif et dans la gestion de la crise migratoire.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.

Dans un contexte d’augmentation de la demande d’asile dans notre pays – vous l’avez souligné –, l’OFPRA a multiplié, depuis trois ans, les missions hors de ses murs, grâce notamment à une augmentation de 40 % de ses effectifs.

Sa mission fondamentale consistant à instruire les demandes d’asile, ce sont des missions d’instruction temporaires de l’OFPRA qui s’installent régulièrement dans les régions françaises, à Lyon, Metz, Grenoble, Strasbourg, Nantes, Lille, Bordeaux ou encore Cayenne, mais aussi au Liban, en Jordanie, en Turquie et en Égypte pour la réinstallation et en Grèce pour la relocalisation.

Dans le même temps, et même si l’information et l’entrée dans la procédure d’asile relèvent de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et des préfectures, l’OFPRA intervient désormais dans des situations d’urgence pour contribuer au travail de conviction, afin de favoriser l’entrée des migrants dans la procédure d’asile. Ainsi en a-t-il été en 2014 à Saint-Ouen et en 2015 pour les mises à l’abri de plusieurs milliers de personnes provenant des campements parisiens. Aujourd’hui encore, l’OFPRA intervient en Italie et dans le nord de la Grèce pour informer les personnes éligibles au programme européen de relocalisation.

C’est dans ce contexte que l’OFPRA assure depuis le printemps de 2014 une présence régulière et d’une ampleur sans précédent à Calais.

Ainsi, des équipes de l’Office sont présentes chaque semaine pour informer les migrants sur les départs en centre d’accueil et d’orientation et sur l’accès à la demande d’asile. Elles interviennent à la fois au sein du centre Jules-Ferry, du centre d’accueil provisoire et sur la lande.

Bien évidemment, des officiers spécialisés dans la protection des mineurs et des femmes sont aussi régulièrement présents. S’y est ajoutée, au printemps 2015, une mission d’instruction sur place, afin d’encourager les demandeurs érythréens à entrer dans la procédure de demande d’asile.

L’OFPRA n’a cependant pas vocation à instruire sur place les demandes. Tous les efforts sont mis en œuvre pour une mise à l’abri des personnes hors de Calais, dans la dignité, dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile – les fameux CADA – ou les centres d’accueil et d’orientation.

L’Office arrive à tenir des délais d’instruction réduits pour les demandeurs. Cette mobilisation de l’OFPRA contribue largement à permettre à des milliers de personnes de quitter Calais et d’être mises à l’abri depuis la fin de l’année 2014.

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse détaillée.

Ce point aurait pu figurer dans le rapport qui a été présenté par la délégation aux droits des femmes sur la traite des êtres humains, mais nous avons décidé qu’il était plus approprié de le soulever en posant une question orale au Gouvernement.

Depuis, le temps a passé et la situation a beaucoup évolué. Vous avez fait la démonstration de l’attention que l’OFPRA apporte aux besoins que les réfugiés expriment sur le terrain.

Je salue la délocalisation des officiers de protection. Leur présence à Calais, de manière hebdomadaire, mais aussi dans toute la France et à l’étranger, est très importante. Il importe aujourd’hui d’améliorer les conditions d’accueil de ces réfugiés et de les accompagner au mieux.

Je crains, hélas ! que nous ne soyons qu’au début d’un phénomène qui perdurera tant que la situation politique et sécuritaire ne s’améliorera pas dans un certain nombre de régions du monde.

développement de la prostitution dans le bois de vincennes

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 1461, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Christian Cambon. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et concerne le développement de la prostitution dans le bois de Vincennes.

En effet, dans une partie de ce bois, de très nombreuses jeunes prostituées originaires du Nigéria sont scandaleusement exploitées par plusieurs réseaux de proxénètes. Ces réseaux sont particulièrement bien organisés et hiérarchisés.

Les camionnettes garées en file indienne – on en voit parfois près d’une centaine – sont réservées aux plus anciennes de ces malheureuses prostituées, qui se partagent les lieux à deux ou trois. Elles peuvent ainsi recevoir leurs clients en versant un loyer de plus de 1 000 euros à leur protecteur. Quant aux plus jeunes, qui donnent trop souvent l’impression d’être mineures, elles doivent se contenter des espaces verts du bois.

Toutes ces femmes sont sous l’emprise d’un réseau de prostitution pyramidal dirigé depuis le Nigéria. Cette exploitation de l’être humain suit le cheminement d’un nouveau commerce triangulaire effroyable, de l’Afrique de l’Ouest à l’Europe, en passant par le Maghreb. Au départ du Nigéria, les victimes sont conduites en voiture ou en car en Libye, puis elles passent, par bateau, en Italie. Elles sont même vêtues de vêtements blancs ou clairs pour que l’on puisse les différencier des autres migrants et marquer leur valeur dans les embarcations ; elles sont placées au centre des bateaux afin qu’elles ne tombent pas à l’eau.

À leur arrivée en France, les promesses d’une vie étudiante se transforment en une prostitution d’abattage. Ces femmes commencent à travailler sur les trottoirs du quartier de la Goutte-d’Or, puis, en fonction de l’arrivée de nouvelles filles, sont envoyées au bois de Vincennes.

Sous l’emprise d’anciennes prostituées nigérianes, ces malheureuses doivent rembourser leur voyage, d’un montant, parfois, de plus de 60 000 euros. Avant qu’elles ne quittent leur pays, le réseau détourne les traditions de sorcellerie locale à des fins criminelles : pour qu’elles obéissent à leur protecteur, un sorcier leur jette un sort menaçant la sécurité de leur famille si elles ne se soumettent pas.

En région parisienne, on le sait, une dizaine de gangs armés ultraviolents gèrent ces réseaux de traite organisés depuis le Nigéria.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, face à ces organisations criminelles d’exploitation et à ce véritable scandale de santé publique, pouvez-vous indiquer aux membres de notre Haute Assemblée les mesures que le Gouvernement souhaite prendre pour protéger ces prostituées soumises et terrorisées et les moyens qu’il envisage de mettre en place pour lutter contre ce trafic, qui porte une atteinte invraisemblable à la dignité humaine ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État et de la simplification. Monsieur le sénateur, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.

Comme vous l’indiquez, le phénomène de l’exploitation sexuelle nigériane perdure au niveau national, même si les indicateurs affichent une tendance à la baisse. Il touche principalement Paris, plus particulièrement le XVIIIe arrondissement et le bois de Vincennes, auquel vous êtes évidemment spécialement attaché, en tant que sénateur du Val-de-Marne.

Les femmes qui s’y prostituent sont originaires du Sud-Ouest nigérian. Elles transitent par la Libye et sont acheminées par des passeurs en Europe, par voie maritime, via Malte, la Grèce, l’Italie ou l’Espagne. Se retrouvant dans l’espace Schengen, elles circulent alors par voie terrestre, en utilisant des documents authentiques avec identité d’emprunt. Les passeurs leur fournissent un soutien matériel et logistique.

Les réseaux de traite fonctionnent essentiellement sur la « proxénétisation » des prostituées : sortant un jour de leur condition, certaines deviennent à leur tour proxénètes, achetant de jeunes femmes nigérianes pour les exploiter, en les soumettant aux rituels vaudous que vous avez évoqués.

La prostitution s’opère essentiellement sur la voie publique. Si les tarifs pratiqués sont dérisoires, les profits réalisés par les têtes de réseaux sont considérables, leur permettant d’acquérir des biens immobiliers au Nigéria ou des produits manufacturés en Europe, exportés par voie maritime.

Face à cette situation, les services du ministère de l’intérieur sont particulièrement mobilisés. L’Office central pour la répression de la traite des êtres humains, l’OCRTEH, coordonne le travail de l’ensemble des services opérationnels de police et de gendarmerie et leur apporte son appui et sa connaissance des organisations criminelles. Il facilite également les actions en matière de coopération policière internationale permettant la saisie de biens acquis frauduleusement.

L’activité est soutenue, comme le prouve l’actualité récente. Ainsi, au début du mois de juin, l’OCRTEH a démantelé un réseau de prostitution nigérian à Sarcelles, comme il l’avait déjà fait en février dernier dans l’Albigeois, où six membres d’un réseau avaient été interpellés. À Paris, en 2015, la brigade de répression du proxénétisme a démantelé pas moins de sept réseaux nigérians, dont cinq dans le ressort de la zone de sécurité prioritaire du XVIIIe arrondissement et deux dans le bois de Vincennes, conduisant à l’incarcération de seize de leurs membres. Depuis le début de l’année 2016, trois affaires ont permis d’incarcérer vingt et une personnes.

Parce que les premières victimes sont les femmes elles-mêmes, l’action de l’État doit permettre d’apporter à celles qui osent briser le silence l’aide et l’assistance qu’elles méritent. C’est précisément l’objet de la loi du 13 avril 2016, qui a permis la verbalisation des clients d’actes sexuels. Le Gouvernement s’est mobilisé pour permettre une entrée en vigueur très rapide de cette loi. Les amendes forfaitaires de 350 euros sont aujourd’hui applicables et les premières procédures ont été engagées.

Tels sont les éléments de réponse que le Gouvernement voulait apporter à la question importante que vous venez de poser, monsieur le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie des précisions que vous avez apportées.

Je ne doute pas de la volonté des services de police d’agir avec la plus grande efficacité. Je pense néanmoins qu’il faut multiplier les opérations « coup de poing » contre les réseaux de proxénétisme, car je puis vous assurer que les conditions d’exploitation de ces malheureuses sont absolument effroyables.

De surcroît, le site du bois de Vincennes doit être préservé. Je rappelle, au passage, que la route de la Pyramide est située à quelques centaines de mètres du château de Vincennes, où siégerait le Président de la République en cas de crise, comme nous l’avons appris récemment. Surtout, ce bois ne peut pas devenir le réceptacle de tous les malheurs du monde. On sait déjà que plus de 200 SDF y survivent dans des conditions terribles.

Au-delà du drame humain que représente le proxénétisme, qui est évidemment essentiel dans nos préoccupations, nous souhaitons que cet espace vert de Paris, dont les Parisiens et les banlieusards ont fortement besoin, puisse être sauvegardé.

Les deux éléments du problème doivent faire l’objet d’une attention toute particulière de la part du Gouvernement, notamment du ministre de l’intérieur.

facturation pour prestations particulières de certains établissements de santé

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1432, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Daniel Reiner. Je voulais interroger Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la facturation, par certains établissements de santé, de frais supplémentaires pour des prestations dites « particulières ».

En effet, dans ma région, plus particulièrement en Lorraine, la Mutualité française a conduit une enquête sur les nombreux dispositifs, qui sont en train de se multiplier, tant dans les cliniques privées que dans les hôpitaux, voire dans le cadre de la médecine de ville, et alourdissent le « reste à charge » des patients.

Des frais supplémentaires, qui n’ont rien à voir avec les soins, sont facturés sous forme de forfaits par les établissements, sans que le caractère optionnel de ces prestations ait été précisé ni que les patients aient formulé un accord explicite préalable. Or ces frais ne sont remboursés ni par l’assurance maladie ni, pour la grande majorité d’entre eux, par les complémentaires santé.

Je veux prendre quelques exemples.

Une chambre individuelle ne peut être facturée que si le patient en fait la demande expresse. Aucuns frais ne peuvent être facturés pour la télévision, le téléphone ou encore l’hébergement d’un accompagnant sans l’assentiment du patient. Il en va de même pour les frais d’archivage des radios ou d’acheminement des prélèvements biologiques, frais qui peuvent être refusés par les patients.

Enfin, certains établissements privés facturent des frais censés couvrir le coût de la gestion administrative du dossier du patient. Ces facturations sont contraires aux instructions de la direction générale de l’offre de soins, lesquelles précisent que « les prestations administratives, renvoyant aux missions habituelles de l’établissement et financées par ailleurs par les tarifs de prestation, ne peuvent être facturées aux patients », ce qu’a d’ailleurs rappelé le Défenseur des droits dans sa décision du 29 juillet 2014.

Voilà quelques jours, Mme Ségolène Neuville a indiqué qu’un décret tendant à sanctionner ces pratiques illégales était en cours de rédaction. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous me préciser, au nom du Gouvernement, la date envisagée pour la parution de ce décret, ainsi que les objectifs et le contenu de celui-ci ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État et de la simplification. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser Marisol Touraine, qui est retenue par des engagements pris de longue date.

Je veux commencer par rappeler que les conditions de facturation des prestations pour exigence particulière du patient sont strictement encadrées par la loi.

Seules peuvent être facturées au patient les prestations pour exigence particulière sans fondement médical visées par le code de la sécurité sociale. Ces prestations doivent faire l’objet d’une demande écrite, dans la mesure où elles ne sont pas couvertes par les tarifs des prestations de l’établissement.

Il convient d’être particulièrement vigilant sur le respect de la réglementation.

C’est en ce sens que la ministre des affaires sociales et de la santé a demandé aux agences régionales de santé que les réclamations des patients portant sur les pratiques des établissements de santé soient systématiquement traitées et suivies, si nécessaire, d’un rappel à l’ordre de l’établissement concerné, avec, au besoin, l’appui des services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, dont l’une des missions est de vérifier la loyauté des pratiques commerciales des professionnels à l’égard des consommateurs.

Par ailleurs, comme vous le savez, une instruction a été publiée au Bulletin officiel du 15 mai 2015 afin de rappeler aux établissements de santé la réglementation applicable en matière de facturation des prestations pour exigence particulière du patient. Ce document rappelle que les forfaits d’assistance aux démarches administratives, que vous avez évoqués, ne peuvent faire l’objet d’une facturation au patient, ces charges étant déjà couvertes dans le cadre du financement des établissements.

En parallèle, Marisol Touraine a souhaité que la loi de modernisation de notre système de santé rappelle avec fermeté cette exigence de non-facturation au patient de prestations dont les frais sont intégralement couverts par les régimes obligatoires.

Pour que cette exigence soit suivie d’effets, elle a été accompagnée par un renforcement des pouvoirs de la DGCCRF en la matière. Ainsi, tout manquement à ces principes rend désormais les établissements passibles d’une amende administrative lourde, de 15 000 euros. Le décret qui permettra d’entériner cette disposition est en cours de rédaction.

Vous l’avez compris, monsieur le sénateur, la détermination de Mme la ministre pour prévenir et sanctionner, le cas échéant, les pratiques de facturation abusives à l’égard des patients est totale.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Monsieur le secrétaire d’État, nous attendrons donc la parution de ce décret.

Dans l’immédiat, je suggère, pour mettre fin aux abus, qu’une campagne d’information soit lancée à destination des patients qui, actuellement, sont les premières victimes de ces pratiques. Ce serait une bonne initiative !

démographie médicale des cardiologues en vendée

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon, auteur de la question n° 1456, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Annick Billon. Monsieur le secrétaire d’État, depuis le 1er février 2016, le département de la Vendée compte 13 cardiologues exerçant leur activité sous forme libérale, soit 1 pour 50 000 habitants. Compte tenu des départs à la retraite prévus au cours de l’année 2016, qui, visiblement, ne seront pas remplacés, la situation ira en s’aggravant.

Le délai moyen pour obtenir un rendez-vous à Cannes est de quinze jours, pour une moyenne de cinquante-trois jours sur le territoire national. Il est de plus de six mois en Vendée, qui détient, en la matière, un malheureux record.

Il paraît désormais évident que la surcharge de travail des praticiens, associée à ce délai insupportable, devient un risque sanitaire que les autorités ne peuvent nier.

La question de la liberté d’installation se pose de manière cruciale. Or la loi de modernisation de notre système de santé n’y a pas apporté de réponse, l’amendement visant à réduire partiellement cette liberté présenté par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, à la suite du rapport pour avis, n’ayant pas obtenu le soutien du Gouvernement.

Les mesures incitatives du pacte territoire santé sont insuffisantes et ne donnent pas les résultats escomptés.

Faut-il aller au-delà ? À l’occasion de l’examen, au Sénat, de l’amendement que je viens d’évoquer, la question a été posée. À cette question, on ne peut répondre que par l’affirmative.

Monsieur le secrétaire d’État, je tire la sonnette d’alarme pour les patients. Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en place pour répondre à l’alerte des médecins cardiologues vendéens et aux légitimes préoccupations de la population vendéenne, dont on peut dire qu’elle se trouve en danger ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État et de la simplification. Madame la sénatrice, je connais votre engagement sur ces sujets et votre mobilisation particulière pour la Vendée, ce beau département qui est votre terre d’élection.

Améliorer l’accès aux soins, réduire les inégalités entre les territoires sont des objectifs prioritaires du Gouvernement ; le pacte territoire santé que vous avez évoqué est là pour en attester.

Contrairement à ce qui a été fait auparavant, le pacte lancé par Marisol Touraine en 2012 est un véritable plan d’action, qui mobilise différents leviers, de la formation des professionnels aux conditions d’exercice, pour attirer les jeunes médecins dans des territoires manquant de professionnels.

Je veux citer deux exemples.

Premièrement, le contrat d’engagement de service public permet aux jeunes en formation de percevoir une bourse, en contrepartie d’une installation dans un territoire manquant de professionnels. Plus de 1 750 jeunes ont déjà signé ! Un nouvel objectif de 800 contrats supplémentaire d’ici à 2018 a été fixé.

Deuxièmement, la réalisation des stages au cours de la formation est essentielle pour faire connaître et apprécier l’exercice en cabinet. La pratique des stages de médecine générale sera généralisée pour tous les étudiants de deuxième cycle. La ministre a voulu que l’effort porte aussi sur les stages effectués en ville, dans d’autres spécialités.

Une régulation de la démographie médicale s’opère également par le numerus clausus ou encore par les épreuves classantes nationales, qui permettent de répartir les étudiants en médecine entre les différentes spécialités. Un effort particulier a été fait pour la cardiologie : le nombre de postes offerts dans cette spécialité a augmenté de 65 % depuis 2010, quand la hausse est de 28 % pour l’ensemble des spécialités. Cette augmentation représente 230 postes au titre de l’année universitaire 2015-2016.

La région des Pays de la Loire bénéficie de cette évolution positive : le nombre de postes pourvus en cardiologie était de 11 en 2015, soit une augmentation de 57 % par rapport à 2010.

Dans votre région, madame la sénatrice, les acteurs sont très impliqués. Ainsi, l’agence régionale de santé accompagne notamment une démarche expérimentale de téléexpertise auprès de cardiologues volontaires. Cette démarche, engagée dans le département de la Sarthe, qui m’est cher, puisque mon grand-père en était originaire (Sourires.), doit être étendue à l’ensemble de la région.

Madame la sénatrice, la réponse pour améliorer l’accès aux soins n’est pas unique. Nous devons rester mobilisés. C’est dans la durée que nous mesurerons la portée de nos efforts.

Je sais que vous serez vigilante et que vous défendrez des efforts utiles pour votre département et vos concitoyens !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Billon.

Mme Annick Billon. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.

D’abord, je regrette que votre grand-père ne soit pas né en Vendée : nous aurions pu bénéficier des conditions dont profite la Sarthe… (M. le secrétaire d’État sourit.)

Plus sérieusement, la réalité du risque sanitaire pour les patients, les conditions de travail qui découlent, pour les praticiens et leurs secrétariats, d’agendas de consultations surchargés exigent de nouvelles réponses.

Les villes moyennes et petites ne séduisent plus les jeunes internes. Non seulement ceux-ci ont beaucoup de réticence à quitter les grandes villes universitaires, mais seulement trois sur dix s’installent sous statut libéral, toutes spécialités confondues.

Cela étant, depuis le 1er janvier 2015, des contrats de praticien territorial de médecine ambulatoire, les PTMA, permettent aux collectivités territoriales de s’attacher les services d’un spécialiste pour trois à cinq ans. Comme vous le savez, le praticien s’engage alors en échange d’une protection sociale améliorée, notamment pour les congés de maternité et de paternité. Or, pour l’heure, l’agence régionale de santé des Pays de la Loire n’en compte aucun.

L’absence de réforme et de réponse efficace nous conduit dans une impasse. La question de la liberté d’installation finit par se poser !

inquiétudes des responsables des établissements privés de santé

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, auteur de la question n° 1460, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les fortes inquiétudes exprimées par les responsables des établissements privés de santé.

Notre système de santé repose sur la diversité et la complémentarité des modes d’exercice des professionnels de santé, libéraux et salariés, et des statuts des établissements de santé, publics et privés.

Si le Gouvernement a, à plusieurs reprises, indiqué son attachement à notre système de santé et à sa richesse, à savoir l’existence de secteurs différents et complémentaires permettant un libre choix pour les citoyens, il remet actuellement en cause l’existence même des cliniques privées, qui emploient pourtant plus de 150 000 personnes et prennent en charge plus de 8,5 millions de patients par an.

Pourquoi asphyxier ce secteur, en prenant à l’encontre de celui-ci des mesures hostiles, qui menacent sa pérennité ?

Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, d’en citer quelques-unes.

La baisse des tarifs hospitaliers est à l’origine de tarifs inférieurs aux coûts de prise en charge. À cet égard, je trouve très éloquent que les tarifs de 2016 soient inférieurs à ceux qui avaient été fixés en 2004 – et je ne vous décris pas l’évolution des charges…

En outre, moins de 1 % des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, les fameuses MIGAC, a été octroyé aux établissements privés de santé, malgré l’implication de ceux-ci dans les missions de service public.

Par ailleurs, ces derniers sont inéligibles au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et au pacte de responsabilité et de solidarité : ce sont les seules entreprises qui n’en bénéficient pas.

Enfin, de nombreuses mesures discriminatoires conduisent à une inégalité de traitement entre les secteurs public et privé.

Je veux rappeler que les cliniques privées sont des acteurs économiques nationaux, car ces entreprises ne délocalisent pas, des acteurs économiques responsables, qui assurent des missions de service public et participent, aux côtés du secteur public, à garantir en toute sécurité des soins de qualité à la population sur tout le territoire, et, enfin, des acteurs économiques dynamiques, le secteur ayant su se restructurer depuis vingt ans pour faire évoluer les établissements, adapter les organisations et moderniser l’offre de soins aux Français.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures le Gouvernement a-t-il l’intention de prendre – c’est urgent ! – pour arrêter cet abandon et endiguer cette « mort lente » de l’hospitalisation privée ? Cette dernière est indispensable au maintien de l’offre de soins aux Français et créatrice d’emplois sur les territoires !