M. le président. Acceptez-vous, madame la ministre, de rectifier l’amendement n° 479 comme le suggère Mme la rapporteur ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Non, monsieur le président, je souhaite préserver l’intégrité de l’amendement. Je le maintiens donc tel quel.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J’ai vraiment du mal à suivre la position de la commission de la culture et de son rapporteur. Mme Férat s’est opposée précédemment, avec le Gouvernement, à un amendement défendu par M. Bosino au nom de son groupe et visant à introduire l’inconstructibilité des domaines nationaux.
Par son amendement, la commission, qui n’est pas favorable à l’amendement du Gouvernement, souhaite déclarer inconstructibles les domaines nationaux, sauf pour certaines constructions destinées à l’accueil du public ou à que sais-je encore. Il me semble qu’une certaine contradiction apparaît entre, d’une part, la position précédente qui s’opposait à l’inconstructibilité sur la totalité du domaine et, d’autre part, la déclaration de l’inconstructibilité assortie d’une simple dérogation.
A priori, pour ma part, je suis donc plutôt prêt à voter l’amendement du Gouvernement, qui me semble plus en cohérence avec ce que nous avons voté précédemment.
M. Hubert Falco. Tout à fait !
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. J’irai dans le sens de mon collègue Alain Vasselle sur le principe de l’inconstructibilité. Notre collègue David Assouline évoquait tout à l’heure une pyramide chère à son cœur, construite sous le régime de François Mitterrand (Sourires.) ; je souhaite pour ma part évoquer une modification du Louvre réalisée sous la présidence de Jacques Chirac : l’ouverture du département des arts de l’islam. Les locaux de ce département ont été construits par un architecte merveilleux, Rudy Ricciotti, également architecte du musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, le MUCEM.
L’architecture est faite de strates ; la vie est faite de strates. Chacun y ajoute son grain de sel. Le grand Cioran disait que tout effort humain est voué à l’archéologie. Or l’archéologie consiste justement à découvrir un peu ces strates.
Quand nous, ou nos collègues députés européens, allons à Strasbourg, nous voyons, sur une colline à gauche du train, un grand château, celui du Haut-Kœnigsbourg. Or ce château a été reconstruit et restauré par Guillaume II, pour montrer peut-être la puissance de l’Allemagne, mais aussi la beauté de l’Alsace.
Ainsi, l’inconstructibilité m’embarrasse un peu, parce que construire uniquement pour refaire des toilettes, pour mettre des bâtiments en conformité avec les normes d’accessibilité ou pour accueillir des gens me gêne. L’histoire, c’est l’histoire des hommes ; l’architecture, c’est l’architecture des hommes. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.)
M. Henri de Raincourt. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Nous sommes parfaitement d’accord, mes chers collègues ! Permettez-moi de vous relire l’objet de mon amendement : les parties d’un domaine national qui appartiennent à l’État ou à l’un de ses établissements publics « sont inconstructibles, à l’exception des bâtiments ou structures strictement nécessaires à leur entretien, à leur visite par le public ou s’inscrivant dans un projet de restitution architecturale ou de création artistique ».
Cet amendement ne vise qu’à éviter les abus. Encore une fois, nous avons déjà vécu ce genre de situation assez récemment ; monsieur Vasselle, je suis à votre disposition à la sortie de l’hémicycle pour vous donner quelques informations à ce sujet.
À travers cet amendement, notre commission a donc simplement souhaité prendre les garanties nécessaires pour éviter de revivre l’expérience malheureuse que nous avons connue il y a peu.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Karoutchi, Laufoaulu, Commeinhes, Morisset, Mouiller, Dufaut, Mayet et Gilles, Mmes Duchêne et Morhet-Richaud, MM. Charon, Milon, D. Laurent et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Mandelli, Trillard, Doligé, Vasselle, Longuet, Laménie, Genest, B. Fournier et Bouchet, Mmes Primas, Debré et Gruny, M. Savary, Mme Canayer, M. Pinton, Mme Imbert, MM. Houel, Houpert et Lefèvre, Mme M. Mercier, M. Gournac, Mme Lamure, MM. Revet et Chasseing, Mmes Deroche et Lopez et MM. Rapin, Husson et Darnaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 55
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 621-… – Afin de faciliter sa conservation, sa mise en valeur et son développement l’établissement public, en charge du domaine national de Chambord, peut se voir confier, par décret, la gestion d’autres domaines nationaux ainsi que de domaines et d’immeubles appartenant à l’État. » ;
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. Cet amendement cible essentiellement le domaine national de Chambord. Il s’agit de donner à l’État la possibilité de confier par décret à ce domaine national, créé par la loi, la gestion d’un autre domaine national ou de plusieurs domaines nationaux, ou encore de domaines et d’immeubles appartenant à l’État, afin de mutualiser les moyens qui y sont affectés. L’objectif est de réaliser des économies d’échelles, mais surtout de faciliter le développement du domaine de Chambord, dans la mesure où les activités de certains autres domaines nationaux sont en effet complémentaires des siennes.
Je rappelle simplement que ce monument est parmi les plus visités de France. Parmi ceux de province, il se situe presque en seconde position, derrière le Mont-Saint-Michel et pratiquement à égalité avec Chenonceau – qui se situe également dans le Val de Loire, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Depuis quelques années, la direction de Chambord a entrepris des efforts considérables pour assurer le développement du domaine, avec pour objectif d’atteindre dans quelques années 1 000 000 de visiteurs par an, contre près de 800 000 actuellement.
Parmi ces efforts, je veux citer la mutualisation de moyens avec des fondations privées, comme le musée de la chasse et de la nature de Paris, situé à l’hôtel de Guénégaud, et plus récemment un effort considérable pour remettre en culture cinq hectares de vignes d’un terroir tout à fait spécifique au Val de Loire. Ces efforts doivent être poursuivis.
Permettre au domaine national de Chambord de mutualiser, si l’État le souhaite, ses moyens avec d’autres domaines nationaux ayant des activités comparables représenterait un coup d’accélérateur significatif pour le développement de ce domaine, compte tenu de l’objectif touristique qui lui a été assigné par son nouveau président, M. Garot, et par le Président de la République quand il a visité ce domaine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Vous proposez à travers cet amendement que l’établissement public du domaine national de Chambord puisse se voir confier par décret la gestion et la valorisation d’autres domaines nationaux de même nature. Les missions de cet établissement public sont définies par une loi de 2005 et elles ne peuvent effectivement évoluer que par la voie législative.
Votre amendement vise à permettre de confier par décret à cet établissement de nouvelles missions, dans un champ proche de celles qu’il remplit aujourd’hui. Le fait de confier au domaine national de Chambord la gestion et la valorisation d’autres domaines nationaux, avec le souci de toujours mieux faire connaître la richesse et la diversité de notre patrimoine, mériterait une analyse approfondie. Cet amendement renvoie celle-ci au pouvoir réglementaire, sans préjuger de la solution retenue in fine.
Considérant que cette analyse doit encore être menée, mais qu’elle le sera par le Gouvernement, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Je remercie Mme la ministre de ses explications. Je vais soutenir cet amendement, parce qu’il existe un projet très intéressant autour du domaine de Chambord. Celui-ci fait partie du patrimoine mondial, mais il est en même temps le seul établissement jumelé avec des institutions d’autres pays, notamment en Chine et bientôt en Inde – on y cherche actuellement un site prestigieux.
Cet établissement entend pouvoir valoriser un autre domaine qui présenterait des similitudes ou des vocations transversales. Or la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux dispose que l’établissement de Chambord peut avoir des missions hors les murs, mais qu’il n’est pas habilité à gérer d’autres domaines. Il faut donc un support législatif pour pouvoir, demain, confier à Chambord de telles missions de gestion par voie de décret. Toutefois, je souhaiterais que cet amendement soit rectifié pour prévoir plutôt un décret en Conseil d’État.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je me réjouis de l’avis favorable de la commission de la culture. En revanche, madame la ministre, j’ai du mal à comprendre l’avis réservé que vous avez exprimé en demandant de renvoyer des études au pouvoir réglementaire. Mais les études sont toutes faites !
Je ne crois pas qu’il faille mener de savantes études pour comprendre que la mutualisation qui résulterait de la gestion commune des domaines de Chambord, de Rambouillet et d’autres encore se traduirait par des économies d’échelle non négligeable.
C’est une situation qui est notoirement connue de longue date. Vous venez de prendre vos fonctions ministérielles, madame la ministre, mais je pense que vos collaborateurs pourraient vous expliquer sans aucune difficulté que la réunion de la gestion de ces deux domaines permettrait des économies, lesquelles éviteraient d’ailleurs au Gouvernement d’avoir à apporter des concours financiers pour assurer l’équilibre de l’opération.
Enfin, M. Cardoux ayant fait état de la plantation de cinq hectares de vignes, j’invite chacun de mes collègues à prendre une participation : il leur en coûtera 1 000 euros et cela permettra d’améliorer le financement du domaine de Chambord et la tenue de ses comptes !
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. J’appuierai cet amendement, parce que Chambord offre le magnifique exemple d’un château construit, dans un lieu inconfortable, par François Ier, qui n’y a vécu que cinq jours…
Madame la ministre, vous en avez appelé à la sagesse du Sénat. La sagesse, selon moi, serait que cet amendement fasse des petits !
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Gourault. J’ai bien écouté tous les arguments et je suis d’accord avec les auteurs de cet amendement, à qui je dirai simplement, en toute amitié, qu’il aurait été élégant d’en parler aux sénateurs de Loir-et-Cher, surtout quand ils font partie de la majorité… (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Le domaine national de Chambord est un sujet qui dépasse parfois les limites des appartenances politiques – on vient d’entendre M. Patriat soutenir l’amendement de M. Cardoux –, mais il y avait beaucoup moins de monde quand il s’est agi de défendre la commune de Chambord. Je rappelle que je resterai vigilante sur ce point. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Je suis heureux que le Gouvernement considère qu’une vision d’ensemble est nécessaire, même si, s’agissant de Chambord, on sait exactement ce que peuvent être les mutualisations.
Je pense surtout qu’il ne faut pas que cet exemple reste isolé : il faut que cet « amendement Chambord », si je puis dire, constitue une première étape vers une réflexion d’ensemble sur les domaines nationaux et sur les meilleures mutualisations à organiser pour assurer leur équilibre financier et leur permettre d’être à la hauteur des attentes que l’on peut avoir en termes de valorisation patrimoniale. Il serait en effet souhaitable, madame la ministre, alors que vous prenez vos fonctions, que cette réflexion puisse être élargie à l’ensemble des domaines nationaux.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je voterai cet amendement, car c’est une très bonne idée que d’aller dans le sens de la mutualisation.
Je rejoindrai cependant Mme Gourault pour rappeler à notre assemblée que, s’il est extrêmement positif de faire rayonner Chambord au-delà du domaine et, cher François Patriat, au-delà des frontières, car c’est un joyau qui a une dimension universelle, il est peut-être sage également de se souvenir, et nous avons déjà déposé des amendements en ce sens ici, qu’il existe aussi une commune de la République française à Chambord. Il n’est peut-être pas inutile que ces vastes desseins soient mis en œuvre avec la considération qui est due à la commune.
M. Hubert Falco. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Sueur. En cette assemblée où nous avons l’habitude de défendre ardemment les communes, il serait sage de faire en sorte que cette commune dispose des prérogatives prévues par le code général des collectivités territoriales au même titre que toutes les autres communes de France.
J’appelle de mes vœux, moi aussi, une pleine coopération, positive et constructive, cher François Patriat, entre l’établissement public, qui fait un travail utile, et la commune, gérée par un maire et un conseil municipal qui ont été élus par les habitants de Chambord.
M. Henri de Raincourt. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote. (Le Loiret ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Éric Doligé. Je veux rassurer ma collègue Jacqueline Gourault. Lorsque nous avions voté la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, nous avions cru que nous pourrions fusionner les départements de Loir-et-Cher et du Loiret : Chambord se serait ainsi trouvé en territoire commun. (Mme Jacqueline Gourault sourit.) C’est la raison pour laquelle nous avons oublié de lui demander d’être cosignataire, mais, bien évidemment, dans notre esprit, elle était couchée sur la liste des signataires. (Exclamations amusées.)
Mme Françoise Férat, rapporteur. Bravo !
M. David Assouline. C’est du vieux français ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Cardoux, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° 2 rectifié ter dans le sens suggéré par M. François Patriat ?
M. Jean-Noël Cardoux. J’accepte bien entendu la proposition de François Patriat visant à préciser qu’il s’agit d’un décret « en Conseil d’État ».
Je voudrais par ailleurs m’excuser auprès de vous, madame Gourault, de ne pas vous avoir sollicitée. Je pensais que vous étiez au courant de cette démarche,…
Mme Jacqueline Gourault. Pas du tout ! Je ne chasse pas.
M. Jean-Noël Cardoux. … mais je reconnais mon erreur et vous prie de bien vouloir me pardonner. Je sais que, un jour ou l’autre, nous nous retrouverons à Chambord et nous pourrons en discuter ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 2 rectifié quater, présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Karoutchi, Laufoaulu, Commeinhes, Morisset, Mouiller, Dufaut, Mayet et Gilles, Mmes Duchêne et Morhet-Richaud, MM. Charon, Milon, D. Laurent et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Mandelli, Trillard, Doligé, Vasselle, Longuet, Laménie, Genest, B. Fournier et Bouchet, Mmes Primas, Debré et Gruny, M. Savary, Mme Canayer, M. Pinton, Mme Imbert, MM. Houel, Houpert et Lefèvre, Mme M. Mercier, M. Gournac, Mme Lamure, MM. Revet et Chasseing, Mmes Deroche et Lopez et MM. Rapin, Husson et Darnaud, qui est ainsi libellé :
Après l’alinéa 55
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 621-… – Afin de faciliter sa conservation, sa mise en valeur et son développement l’établissement public, en charge du domaine national de Chambord, peut se voir confier, par décret en Conseil d’État, la gestion d’autres domaines nationaux ainsi que de domaines et d’immeubles appartenant à l’État. » ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Je voudrais très brièvement réexpliquer la position de sagesse du Gouvernement sur laquelle j’ai été interpellée.
Je ne suis pas une experte de la chasse, c’est manifeste…
M. Henri de Raincourt. Ça peut venir !
Mme Audrey Azoulay, ministre. Ce qui nous préoccupe, c’est la bonne valorisation de ce patrimoine exceptionnel qu’est Chambord et de ceux qui pourraient éventuellement lui être rattachés.
Pour autant, des questions complexes sont en jeux. Elles ne concernent pas uniquement la chasse, mais peuvent recouvrir aussi des aspects administratifs ou de gestion. Ces questions méritent des analyses approfondies qui peuvent être menées de façon spécifique sur les domaines qui seraient éventuellement rattachés à Chambord, et donc ne pas être traitées uniquement comme une question générale.
C’est la raison pour laquelle je vous remerciais, en donnant cet avis de sagesse, de confier cette expertise au Gouvernement, de surcroît par l’intermédiaire d’un décret en Conseil d’État, ce qui me paraît tout à fait conforme à ce qu’il est possible de faire.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Karoutchi, Laufoaulu, Commeinhes, Morisset, Mouiller, Dufaut, Mayet et Gilles, Mmes Duchêne et Morhet-Richaud, MM. Charon, Milon, D. Laurent et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Mandelli, Trillard, Doligé, Vasselle, Longuet, Laménie, Genest, B. Fournier et Bouchet, Mmes Primas, Debré et Gruny, M. Savary, Mme Canayer, M. Pinton, Mme Imbert, MM. Houel, Houpert et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Gournac, Revet et Chasseing, Mmes Deroche et Lopez et MM. Rapin, Husson et Darnaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 55
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sous-section 4
« Gestion et exploitation de la marque et du droit à l’image des domaines nationaux
« Art. L. 621-… – L’utilisation de prises de vue photographiques ou de représentations graphiques des immeubles qui constituent les domaines nationaux à des fins strictement commerciales est soumise à une autorisation préalable délivrée par le gestionnaire du domaine national concerné.
« Cette autorisation peut prendre la forme d’un acte unilatéral ou d’un contrat, assortis ou non de conditions financières. » ;
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. Je veux d’abord vous remercier, madame la ministre, de votre propos. Je constate que vous avez remis en avant les particularités et l’épicurisme du Val de Loire en associant la chasse à la vigne, ce qui nous situe parfaitement dans le contexte que nous voulons défendre.
Cet amendement vise, comme le précédent, à redonner des ressources et à protéger l’image de marque des monuments et domaines nationaux. L’utilisation photographique ou graphique de leur image n’est en effet pas spécialement protégée, ce qui ne permet pas à leur gestionnaire de négocier des autorisations, autorisations qui pourraient désormais être délivrées, à son choix, sous la forme « d’un acte unilatéral ou d’un contrat, assortis ou non de conditions financières ».
Cette proposition résulte de deux rapports qui préconisaient d’aller dans ce sens : le rapport Économie de l’immatériel : la croissance de demain, dit rapport « Lévy-Jouyet », et le rapport d’Évaluation de la politique de développement des ressources propres des organismes culturels de l’État, rendu en mars dernier par l’Inspection générale des finances, qui pointait la faiblesse de l’appareil législatif applicable la matière en relevant que « les recettes sur les droits sont limitées par l’absence de droit des établissements sur différents aspects de leur patrimoine, en particulier leur image ».
On ne peut pas admettre, d’une part, de voir des monuments associés à des publicités pour tel ou tel fromage – non pas que je sois « anti-fromage », mais c’est l’exemple qui me vient en tête, s’agissant toujours de Chambord –, d’autre part et surtout, qu’ils se privent d’une ressource qu’ils pourraient obtenir en négociant des retours financiers sur l’autorisation d’utiliser ou des photographies ou des représentations graphiques.
M. le président. L’amendement n° 319 rectifié, présenté par MM. Patriat et Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 55
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sous-section 4
« Gestion et exploitation de la marque et du droit à l’image dans les domaines nationaux
« Art. L. 621-… – L’utilisation de photographies ou de représentations graphiques d’un ensemble immobilier constituant un domaine national ou d’une partie d’ensemble de ce domaine, à des fins commerciales, est soumise à autorisation préalable du gestionnaire du domaine national.
« Un contrat fixe les conditions de mise en œuvre de l’autorisation et le montant de la rémunération due au titre de la représentation du bien concerné. » ;
La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Madame la ministre, il ne s’agit absolument pas là d’amendements « chasse ».
Je participe au conseil d’orientation du château de Chambord, sous la présidence de M. Renaud Denoix de Saint-Marc. Une réunion se tiendra d’ailleurs mercredi prochain au Conseil constitutionnel. Je peux vous assurer qu’à aucune de nos réunions nous n’abordons le problème de la chasse.
Notre préoccupation est la mise en avant du patrimoine, patrimoine qui, me semble-t-il, a été remarquablement valorisé au cours des dernières années : réouverture d’une partie des promenades et des écuries du maréchal de Saxe, développement architectural, expositions de sculptures, représentation du Bourgeois gentilhomme, qui a été joué pour la troisième fois à Chambord, programmes musicaux… Il s’agit bien là de la protection non seulement de cette œuvre de génie qu’est le château de Chambord, mais bien de l’ensemble du domaine national.
L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes met clairement en évidence le vide juridique qui caractérise le droit à l’image des établissements constitutifs du domaine public de l’État. On peut utiliser la représentation de n’importe quel très beau château ou de n’importe quel très beau lieu de culte, cathédrale ou autre, à des fins commerciales sans que l’autorisation ait été donnée par les propriétaires et sans qu’il y ait de restitution financière pour améliorer les domaines.
Cet amendement n’est donc pas un amendement « chasse », mais bien un amendement de protection des domaines nationaux, qui vient combler un vide juridique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ces amendements mettent en place un droit à l’image concernant les domaines nationaux. En ce sens, ils posent une exception à la jurisprudence selon laquelle la possession d’un bien ne donne pas d’exclusivité sur son image tant qu’aucun préjudice n’est causé à son propriétaire.
Cela étant, au regard du caractère particulier des domaines nationaux, notamment le lien exceptionnel qu’ils présentent avec l’histoire de la Nation, la mise en place d’une telle mesure ne semble pas disproportionnée.
À cet égard, il convient de souligner que le dispositif prévu ne porte pas atteinte à l’exception de panorama, puisqu’il est bien précisé que l’autorisation du gestionnaire du bien n’est nécessaire que dans le cas où les images seraient utilisées à des fins commerciales.
La rédaction de l’amendement n° 3 rectifié me paraît cependant préférable. Elle limite l’autorisation aux images qui concerneraient des immeubles au sein de ces domaines nationaux qui sont généralement les plus emblématiques et identifiables. Ses dispositions sont par ailleurs très précises concernant les modalités de l’autorisation.
Je suis donc favorable à l’amendement n° 3 rectifié et je souhaiterais le retrait de l’amendement n° 319 rectifié, monsieur Patriat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il s’agit de soumettre à l’autorisation préalable du gestionnaire d’un domaine national et, éventuellement, à rémunération les prises de vue photographiques ou les représentations graphiques de leurs immeubles à fins strictement commerciales.
Cette proposition rejoint une jurisprudence administrative toute récente qui a reconnu l’existence d’un régime d’autorisation sans texte permettant au propriétaire public soit de s’opposer à l’exploitation à des fins commerciales de la reproduction d’un bien appartenant au domaine public, soit de se faire rémunérer pour cette exploitation en raison de l’image de marque qui est utilisée.
Cette question peut d’ailleurs aussi se poser pour les monuments historiques privés, comme on le verra un peu plus loin dans l’examen de ce projet de loi.
Des travaux complémentaires nous semblent nécessaires pour comprendre quelle solution juridique pérenne peut être trouvée à la question, réelle, que vous évoquez à travers ces amendements, pour concilier à la fois le droit des propriétaires, lorsqu’une exploitation à des fins commerciales est envisagée, et le respect des principes du code général de la propriété des personnes publiques.
Il me semble donc prématuré, à ce stade, d’introduire, dans le code du patrimoine, une disposition dont les contours restent encore à mieux préciser du point de vue juridique. J’y insiste, ce débat est légitime, mais nous devons l’approfondir. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. M. Sueur a évoqué un point important : la relation entre le monument historique et la commune, qui est souvent le parent pauvre.
J’interpelle mon ami François Patriat sur la situation d’une commune de notre département. Châteauneuf abrite en effet un magnifique château, qui accueille des dizaines de milliers de visiteurs par an. Or la commune reçoit zéro centime par an pour entretenir la voirie ou encore pour construire des toilettes destinées aux visiteurs.
Dans ce domaine, on peut parler de rupture d’égalité ! Nos monuments – Chambord et d’autres – sont magnifiques, mais pensons aux communes qui les accueillent !
Si j’adresse cet appel à notre assemblée, c’est pour que nous réfléchissions au moyen de trouver des financements. Pourquoi ne pas instaurer une taxe sur les visites, à l’instar de la taxe de séjour pour l’hôtellerie ? Une part pourrait être reversée à la commune.