M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Tout le monde se réjouit que le traitement de la CSPE soit désormais mieux inscrit dans les travaux du Parlement.
M. Roland Courteau. En effet !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Que le compte d’affectation spéciale soit créé tardivement, dans le projet de loi de finances rectificative plutôt que dans le projet de loi de finances initiale, n’a finalement pas d’importance. Quand on n’a rien à dire sur le fond, on parle de la forme !
Tout le monde considère, me semble-t-il, que la création d’un compte d’affectation spéciale dédié est une bonne solution. Voilà, le Gouvernement le fait. Cela étant dit, pourquoi prévoir dès maintenant les ressources qui y seront affectées en 2017 ?
Pour ma part, je considère que la différence entre ces deux amendements n’est pas que rédactionnelle, l’un tendant à prévoir d’affecter au compte d’affectation spéciale 1,8 milliard d’euros, ce qui sera trop, on le sait, et l’autre 160 ou 180 millions d’euros, ce qui ne sera probablement pas assez.
Je partage votre conclusion, monsieur le rapporteur pour avis : attendons le projet de loi de finances pour 2017 pour calibrer parfaitement les choses.
Vous avez évoqué le dépôt d’un autre amendement visant à diminuer la CSPE en 2017. Nous ne sommes plus là dans l’esprit de ce que le Gouvernement vous propose. Pour notre part, nous proposons, comme je l’ai dit hier, de maintenir sur le stock le niveau de la CSPE à partir de 2016, de ne plus y toucher, puis de faire appel progressivement aux ressources dégagées par les énergies carbonées pour financer, notamment, les énergies renouvelables, lesquelles entrent dans le champ du compte d’affectation spéciale.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Je suis un peu étonné par la première partie de votre propos, monsieur le secrétaire d’État. Vous banalisez la création de ce compte d’affectation spéciale, considérant que l’inscription de cette réforme dans le projet de loi de finances initiale ou dans le projet de loi de finances rectificative n’a pas d’importance.
Comme je l’ai déjà fait hier, je rappelle que le montant prélevé au titre de la CSPE est supérieur au produit de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF. Aurions-nous pu légiférer sur un dispositif aussi lourd que l’ISF en fin de semaine, trois jours après que le texte nous eut été transmis, compte tenu des contraintes que chacun connaît ? Certainement pas !
Nombre de sénateurs ici présents sont d’accord, je crois, avec la remarque de M. le rapporteur général.
Sur le fond, monsieur le secrétaire d’État, je rappelle que l’article 1er de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit une compensation au titre de la création de la contribution climat-énergie afin que le dispositif soit neutre pour le consommateur.
Or les chiffres sont très clairs : nous ne pourrons pas atteindre l’objectif fixé avec les chiffres inscrits aujourd'hui dans le projet de loi de finances rectificative ! Nous avons estimé que le décalage serait de 755 millions d’euros dès 2017 et de 1,6 milliard d’euros en 2018.
Vous nous dites aujourd'hui que les besoins ne sont pas satisfaits. Le Gouvernement doit afficher très clairement qu’il met en œuvre la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et qu’il prévoit à cette fin les financements nécessaires au développement des énergies renouvelables en taxant les énergies carbonées. À quelques heures, nous dit-on, de la conclusion d’un accord à la COP 21, c’est un signal important qu’il nous faut donner.
J’invite donc l’ensemble des sénateurs à adopter l’amendement que j’ai eu l’honneur de présenter au nom de la commission des affaires économiques.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. M. le rapporteur pour avis considère qu’il est important d’envoyer un signal ; or c’est ce que fait le Gouvernement en introduisant dans le projet de loi de finances rectificative une nouvelle modalité de comptabilisation et en créant un compte d’affectation spéciale. Cette manière de procéder présente de nombreux avantages – nous en avons déjà longuement débattu.
Le principe est clairement affirmé, le signal est donné.
D’un point de vue budgétaire, une question simple se pose : doit-on inscrire dans le projet de loi de finances rectificative pour 2016 des crédits prévus pour 2017 ? La position de M. le secrétaire d’État me semble assez claire, et je pense que c’est celle qu’il faut suivre : tenons-nous-en à nos préoccupations du quotidien ; nous pourrons toujours procéder aux ajustements nécessaires dans le projet de loi de finances pour 2017 puisque nous ne savons pas, à quelques centaines de millions d’euros près, chiffrer le montant nécessaire.
Je pense qu’il faut suivre les préconisations de M. le secrétaire d’État et ne pas adopter les deux amendements qui nous sont soumis.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. En tant que membre de la commission des finances, je souscris totalement à l’objet de l’amendement de notre collègue Jean-Claude Lenoir. Comme lui, je regrette que cette réforme nous soit proposée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative alors que nous l’attendions depuis longtemps, que nous avions ici, au Sénat, fait des propositions en ce sens lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte, que nous avions même obtenu un accord de la ministre, avant finalement que la réforme ne soit reportée. Je déplore que cette réforme nous soit aujourd'hui proposée en catimini.
Une réforme de cette ampleur mérite un débat de bon niveau au Parlement, car les sommes en jeu sont importantes. Nos concitoyens doivent pouvoir s’approprier les problématiques combinant à la fois des enjeux énergétiques et la fiscalité associée. Il ne faut cacher aucune vérité.
Nous devons, dans un premier temps – avec une fiscalité pesant sur les entreprises ou les ménages qui reste constante avant d’être réduite –, opérer les transferts, en informant à la fois la représentation nationale et nos concitoyens. Faute de quoi, les débats sur la fiscalité punitive, sur l’écologie punitive se poursuivront, ce qui n’est pas une bonne chose à l’heure où – Jean-Claude Lenoir, là encore, l’a rappelé – nous sommes confrontés aux grands enjeux de la COP 21.
Je fais partie de ceux qui pensent que les enjeux énergétiques sont de grands enjeux stratégiques qui touchent aussi la vie quotidienne de nos concitoyens.
Il faut de la clarté, il faut une ligne directrice et des outils de mesure et de contrôle. C'est la raison pour laquelle je dis sans réserve, et même avec vigueur, que nous avons intérêt à voter ces amendements, en tout cas l’amendement n° 70 de la commission des affaires économiques.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 229 n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 71 est présenté par M. Lenoir, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 108 est présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l’alinéa 22
Insérer onze alinéas ainsi rédigés :
…° Le I de l’article L. 100-4 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … - Le Parlement fixe chaque année en loi de finances le plafond de puissance installée par filière des nouvelles capacités de production d’électricité issue de sources d’énergies renouvelables résultant de la trajectoire définie au 4° du I.
« Pour l’année 2016, ce plafond s’élève à :
« 1° éolien terrestre : 11 800 mégawatts ;
« 2° photovoltaïque : 7 800 mégawatts ;
« 3° hydraulique : 25 300 mégawatts ;
« 4° éolien en mer posé : 1 750 mégawatts ;
« 5° biomasse : 11 480 kilotonnes d’équivalent pétrole ;
« 6° biogaz : 220 kilotonnes d’équivalent pétrole ;
« 7° géothermie (hors pompe à chaleur) : 160 kilotonnes d’équivalent pétrole ;
« 8° solaire thermique : 168 kilotonnes d’équivalent pétrole. »
II. - Après l’alinéa 25
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Le premier alinéa de l’article L. 121-7 est complété par les mots : « , dans les limites définies à l’article L. 121-7-1 » ;
…° Après l’article L. 121-7, il est inséré un article L. 121-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 121-7-1. – Les surcoûts mentionnés au 1° de l’article L. 121-7 sont compensés dans la limite d’un plafond correspondant aux montants d’achats d’électricité liés à la mise en œuvre des articles L. 311-10 et L. 314-1 par Électricité de France ou, le cas échéant, par les entreprises locales de distribution qui seraient concernées. Ce plafond est fixé annuellement par une loi de finances. Pour l’année 2016, il est fixé à 4,514 milliards d’euros.
« Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »
III. - Après l’alinéa 72
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° La première phrase du premier alinéa de l’article L. 311-10 est complétée par les mots : « dans le respect des limites définies à l’article L. 121-7-1 » ;
…° Au premier alinéa de l’article L. 314-1, après les mots : « des réseaux », sont insérés les mots : « et du respect des limites définies à l’article L. 121-7-1 » ;
…° À l’article L. 314-18, après les mots : « des réseaux », sont insérés les mots : « et du respect des limites définies à l’article L. 121-7-1 ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. J’ai la faiblesse de penser que cet amendement est l’un des plus importants que nous ayons à examiner dans le cadre de ce projet de loi de finances rectificative.
Personne ici ne sera insensible à la nécessité que le Parlement puisse jouer pleinement son rôle dans le domaine que nous sommes en train de traiter.
Jusqu’à présent, le montant de la CSPE était fixé, conformément à la loi, soit par le Gouvernement – un arrêté du ministre –, soit, à défaut d’un arrêté, par la Commission de régulation de l’énergie, avec un plafond – c’est ce que nous avions voté – de 3 euros par mégawattheure. Donc, par palier, on est passé de 4,50 euros en 2003-2004 à 22,50 euros aujourd'hui.
L’un des défauts de la CSPE telle qu’elle a été construite, c’est que le Parlement n’en avait pas la maîtrise. Le Gouvernement a souhaité que le Parlement puisse, aujourd'hui, décider du montant de la CSPE qui sera affecté aux différentes missions qui ont été rappelées.
Monsieur le secrétaire d'État, en fait, si l’on vous suivait, le Parlement aurait un rôle extrêmement modeste, d’ordre purement comptable : il enregistrerait le montant de la dépense et, en face, le montant de la ressource, point final. Ce n’est pas du contrôle démocratique et le Parlement n’est absolument pas respecté.
La commission des affaires économiques – et je me réjouis que la commission des finances ait, dans le même élan, élaboré un amendement rigoureusement identique – propose que nous fixions, dans le cadre de la loi de finances, à la fois le volume, c'est-à-dire les capacités de production qui peuvent être financées, et le montant des dépenses affectées au développement des énergies renouvelables.
Les chiffres qui figurent dans cet amendement sont cohérents. Ils reprennent tout simplement la tranche annuelle du programme pluriannuel de développement des énergies renouvelables. Il s’agit donc non pas de diminuer l’effort en faveur des énergies renouvelables, mais de tenir compte des chiffres qui ont été arrêtés par le Gouvernement.
En ce qui concerne les sommes consacrées au développement des énergies renouvelables, nous avons, par précaution, ajouté 20 % au montant qui est nécessaire aujourd'hui au financement de ces tranches annuelles.
C'est la raison pour laquelle je pense que cet amendement ne peut pas être suspecté d’être en retrait. Il ne s’agit pas du tout de minorer l’effort qui doit être fait.
M. le président. Veuillez conclure !
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Je termine, monsieur le président, mais en ayant été un peu plus long sur cet amendement, je serai plus bref par la suite.
Mes chers collègues, je vous invite, par souci de cohérence, à affirmer le rôle du Parlement sur les bases que je viens d’expliciter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 108.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement identique au précédent a été défendu. J’ajouterai qu’il reprend purement et simplement la rédaction de l’amendement qui avait été adopté par le Sénat lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique et qui résultait de l’accord auquel nous étions parvenus avec la ministre de l’écologie. Le Gouvernement avait donné son approbation totale à cet amendement et l’article avait été adopté tel quel dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Jean-Claude Lenoir l’a dit à l’instant, tout au long des débats sur le PLF ou le PLFR, nous consacrons de longues minutes à l’examen d’amendements qui portent parfois sur des impositions de quelques milliers, voire quelques centaines d’euros – de mémoire, la taxe sur les végétaux s’élève à 324 euros. Et bizarrement, lorsqu’il s’agit de traiter une imposition de plus de 5,6 milliards d'euros, le Parlement ne joue pas son rôle !
Donc, très concrètement, cet amendement vise à respecter l’esprit et la lettre de l’article 34 de la Constitution : c’est au Parlement de fixer l’assiette des impositions. Pour ce faire, il ne faut pas seulement se borner à reprendre les chiffres de la Commission de régulation de l’énergie, il faut aussi qu’on puisse fixer très concrètement, filière par filière, les plafonds de puissance installée.
Cet amendement prévoit des plafonds supérieurs de 20 % au montant fixé par la CRE, comme l’a dit à l’instant Jean-Claude Lenoir. Cela évitera des contentieux à l’avenir parce que, en l’état actuel, le Parlement ne joue assurément pas son rôle, ne respecte pas la Constitution. C’est au Parlement de fixer l’assiette et le taux des impositions, et, de toute évidence, il ne peut pas se désintéresser d’une question budgétaire aussi importante.
Cette imposition, qui s’élève, je vous l’ai dit, à plus de 5 milliards d'euros aujourd'hui et qui devrait monter à environ 11 milliards d'euros, va évidemment toucher l’ensemble des Français, que ce soient les particuliers ou les entreprises. C’est un sujet majeur, et le Parlement est pleinement dans son rôle lorsqu’il fixe des plafonds par filière.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite très fermement à voter cet amendement tout à fait essentiel qui constitue un vrai changement par rapport au rôle que nous avions abandonné à une commission, aussi compétente soit-elle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il faudrait savoir si c’est un amendement essentiel, ainsi que vous venez de le dire, monsieur le rapporteur général, ou si c’est un amendement de peu d’incidence, comme l’a indiqué le président Lenoir. (M. le rapporteur pour avis et M. le rapporteur général de la commission des finances s’exclament.)
Je vous ai écouté attentivement, monsieur Lenoir : vous avez dit avoir fixé des niveaux majorés de 20 %, ce qui veut dire qu’ils ne sont pas contraignants. C’est ce que vous avez dit.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Mais non !
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Vous avez une mauvaise compréhension de mes propos !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il faut savoir ! Vous nous avez dit vouloir fixer des volumes énergie par énergie, en majorant les plafonds de 20 %, de manière à s’assurer que cela ne bridera personne.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Ah non !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. C’est ce que j’ai compris.
Votre amendement n’a rien à voir avec les pouvoirs du Parlement concernant l’assiette, le taux, etc.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Si !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’assiette est fixée par la loi. Là, en fait, vous fixez le volume des énergies.
M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur pour avis. Non !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Mais si ! Vous avez dit : « Je transcris le volume des énergies que je souhaite voir se développer dans notre pays, avec un maximum bien entendu, et en prévoyant une majoration des plafonds de 20 % ». Mais l’assiette de l’impôt, elle, est connue.
M. Gérard Longuet. Mais on ne connaît pas le prix !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le prix, c’est vous qui le fixez ! Le niveau de la CSPE, c’est vous qui le fixez !
Quand vous fixez l’impôt sur le revenu, vous fixez un barème, une assiette…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Et un taux !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En effet. Le taux de la CSPE va être fixé par le Parlement. Mais, s’agissant de l’impôt sur le revenu, vous ne connaissez pas les revenus qui vont être perçus. Dans cet amendement, vous dites : « L’assiette, ce sont les énergies qui sont produites, le taux, c’est le montant de CSPE que nous déterminons par la loi ». C’est comme si, à propos de l’impôt sur le revenu, vous décidiez que 20 % des revenus imposés devraient être des revenus immobiliers, 10 % des revenus fonciers, etc. Or, c’est ce que vous faites dans votre amendement,…
M. Gérard Longuet. Pour éviter les dérapages !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … puisque vous fixez des volumes d’énergies produites qui constituent l’assiette pour les années suivantes.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais non !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Si, je suis désolé ! Cet amendement, selon moi, n’a aucun sens !
M. Jean-François Husson. Allons…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a prévu que l’orientation donnée quant à la répartition de la production des énergies soit, effectivement, fixée dans une loi de transition énergétique, non dans une loi de finances. Cet amendement n’a donc pas sa place dans ce projet de loi de finances rectificative, et, en tout cas, ne présente pas d’intérêt par rapport aux indications qu’il donne.
Pour cette raison, le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Que doit faire le Parlement ? Il doit fixer la nouvelle CSPE qui financera les énergies renouvelables, la CSPE étant un nombre de mégawattheures autorisé multiplié par un prix de rachat.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est bien le Gouvernement qui autorise un nombre de mégawatts !
Si on se borne simplement à laisser la CRE nous dire que nous avons besoin de temps, le Parlement ne peut pas jouer son rôle.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ce sont les dépenses que vous voulez piloter, non les recettes !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Pas du tout !
C’est bien un nombre de mégawattheures autorisé multiplié par un prix de rachat qui aboutira à un produit attendu.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Et le Parlement est là tout à fait dans son rôle.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ce ne sont pas les recettes que vous fixez, ce sont les dépenses !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Au jeu des jugements de valeur, quand je vous entends dire, monsieur le secrétaire d'État, que cet amendement n’a pas de sens, cela me gêne un peu, en tout cas pour le gouvernement que vous représentez. En effet, je rappelle que la ministre Ségolène Royal avait accepté un amendement similaire lors de la discussion de la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte.
Ce que nous proposons aujourd'hui, nous l’avons dit, c’est que le Parlement reprenne à la fois ses droits, mais surtout des pouvoirs. En outre, il s’agit de revoir les modalités de calcul qui étaient opérées par la CRE.
Pour tout vous dire, l’un des enjeux est de faire en sorte que le Parlement ne signe pas un chèque en blanc : nous avons eu l’occasion de l’indiquer, certains producteurs d’énergies renouvelables ont bénéficié par le passé d’effets d’aubaine. Je n’en désignerai aucun pour ne pas être désagréable, mais aussi parce qu’il en va de l’honneur et de la responsabilité des élus, plus encore en ces temps particulièrement agités où l’opinion publique a tendance à dire que nous serions des irresponsables ou, du moins, à se laisser berner par celles et ceux qui voudraient le faire croire.
Comme beaucoup, je l’espère, pour ne pas dire comme tous ceux qui sont ici présents, je m’efforce d’être digne du mandat qui m’est confié de représenter un certain nombre d’élus, de responsables, en ayant une vision à la fois objective, juste, mais aussi rigoureuse des finances publiques.
C'est la raison pour laquelle je considère qu’il n’est pas dans notre rôle de jouer – je le dis sans malice aucune – les comptables ou d’effectuer des actes notariés. Nous avons plus et mieux à faire.
Tel est le sens de ces amendements que je soutiens avec vigueur.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Nous sommes au cœur de la complexité qu’engendre nécessairement une économie industrielle volontariste.
La loi relative à la transition énergétique a fixé des objectifs quantitatifs en termes de mégawatts afin de modifier le panier énergétique français. Mais la loi n’a pas prévu le coût de ce volontarisme.
Lors du débat sur la transition énergétique, nous avons décidé – et je remercie le président Lenoir de l’avoir rappelé – que nous irions vers ce quantitatif, dont l’évolution devrait cependant être plafonnée par la capacité contributive des abonnés à l’électricité au sens large. En effet, avant la mise en place de la contribution climat-énergie, la CCE, ce sont eux qui finançaient exclusivement ce volontarisme.
C’est la raison pour laquelle, dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, nous avons rappelé que le rôle du Parlement était de fixer une enveloppe annuelle. Aujourd’hui, nous la mettons en œuvre à travers cet amendement. Cette démarche nous semble compatible avec les objectifs quantitatifs demandés par ceux qui souhaitent à tout prix une transition énergétique – telle était la démarche de votre collègue du Gouvernement Mme Ségolène Royal –, mais encadrés dans un volume qui est supporté jusqu’à ce jour par les abonnés des réseaux électriques.
Cette disposition d’une simplicité biblique ne pose selon moi aucun problème, mais crédibilise au contraire les conditions de cette transition énergétique.
Je vous rappelle que des dérapages se sont produits par le passé dans ces différentes filières. Ils ont conduit des gouvernements que je soutenais à revenir en arrière et à adresser des signaux extrêmement négatifs à des secteurs qui s’étaient organisés pour se développer.
En l’occurrence, nous fixons des règles du jeu permettant aux filières d’imaginer quelles sont leurs perspectives.
J’ajoute enfin – mais c’est un autre débat – que la commission de régulation de l’énergie, la CRE, devra régler le problème de la rareté des mégawatts selon l’imagination des promoteurs de telle ou telle filière. Mais à chacun ses problèmes ! Le nôtre, dans l’immédiat, est de respecter la capacité contributive des abonnés de l’électricité.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je maintiens ma position. Vous voulez fixer dans une loi de finances des quotas de production par type, que vous qualifiez de « confortables », et vous dites que le Parlement est dans son rôle car il fixe l’assiette de l’impôt. Non ! En réalité, vous essayez d’encadrer les dépenses de l’État, et non ses recettes. (M. Richard Yung acquiesce.)
M. Gérard Longuet. Ce n’est pas l’État, ce sont les abonnés !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous prétendez que la CRE assurait auparavant ce rôle de régulation. Non ! La CRE opère une transcription des défauts de recettes qu’elle constate pour EDF, notamment à la suite du prix de rachat, et elle fixe le montant que doit payer l’État à EDF pour compenser le manque à gagner du distributeur.
J’attire simplement votre attention sur le fait que cet amendement ne modifie en rien la capacité que ce texte attribue au Parlement de fixer le montant de l’imposition de toute nature qu’est la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, dont le volume est en effet important.
Mais cet amendement ne va pas régler tous les problèmes. Vous pourriez très bien me dire – allons plus loin ! – que plafonner la dépense pourrait induire des difficultés pour trouver des recettes.
Mais le Gouvernement est clair sur ce point : la CSPE n’est pas la seule recette destinée à équilibrer le compte d’affectation spéciale. Le but de la réforme est justement de lui adjoindre le complément de ressources issu de la contribution climat-énergie.
C’est pourquoi je me permets de mettre en doute votre analyse sur cet amendement. Loin de résoudre tous les problèmes comme vous semblez le penser, cet amendement vise à plafonner les dépenses (M. Gérard Longuet acquiesce.), dans un esprit financier, en s’appuyant sur la répartition des modes de production d’énergie prévue par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
Ne nous méprenons pas ! À chaque fois, j’entends que vous voulez donner plus de pouvoirs au Parlement ; Non, en l’occurrence, vous mettez un carcan, si j’ose dire – ce mot va sans doute vous déplaire… –, un plafonnement…
M. Richard Yung. Oui, un plafonnement !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous dites que ce n’est pas un carcan, car vous avez fixé des niveaux majorés de 20 %, et qu’il n’y a donc pas de problème. C’est pourquoi je me suis permis de dire que, finalement, pour vous ce n’était pas contraignant…
Nous avons passé beaucoup de temps sur ce sujet,…