M. Didier Guillaume, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » prend, à la lumière des événements du 13 novembre dernier qui ont endeuillé Paris et la France, un relief particulier. Cette mission constitue l’expression du soutien public à la jeunesse, à sa diversité et à son dynamisme, qui a été la cible de ces attaques.
Le soutien public ne se résume évidemment pas à cette mission : l’éducation nationale, l’enseignement supérieur, la culture, mais aussi les collectivités territoriales jouent un rôle majeur dans ces politiques transversales de la jeunesse et du sport.
Avec une dotation globale de 621,6 millions d’euros en crédits de paiement pour 2016, la mission se caractérise par une augmentation très importante de 33 % de ses crédits par rapport à 2015. Cette augmentation est intégralement portée par la montée en charge du service civique, qui est un enjeu encore plus crucial depuis la semaine dernière. Hors service civique, les crédits de la mission sont stables.
Le programme 219 « Sport » ne représente qu’une partie mineure de l’ensemble du soutien public au sport, estimé à 12 milliards d’euros, et qui est principalement supporté par les collectivités territoriales. Ces crédits s’établissent, pour 2016, à 78,7 millions d’euros, dont 19,5 millions d’euros en provenance d’un fonds de concours du Centre national pour le développement du sport, le CNDS.
Je propose, cependant, un amendement afin d’augmenter ce montant de 4,8 millions d’euros. En effet, il sera appliqué à ce budget la réserve de précaution générale de 8 %, qui pourrait entraîner une diminution des crédits effectivement versés aux fédérations par rapport à 2014, lesquels s’étaient établis à 77 millions d’euros.
Cet amendement s’explique pour deux raisons principales.
Une raison de forme, d’abord : les fédérations que j’ai rencontrées au cours de nombreuses auditions ont toutes, sans exception, souligné qu’il fallait évoluer, afin d’avoir une visibilité pluriannuelle plus importante, sur une partie au moins des actions voulues par l’État. Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes sensible à cette problématique.
Une raison de fond, ensuite. Albert Camus a écrit : « Ce que je sais de plus sûr à propos de la moralité et des obligations des hommes, c’est au sport que je le dois. »
Monsieur le ministre, au regard du rôle majeur joué par les associations sportives locales dans la promotion des valeurs de la société et l’accompagnement de la jeunesse, et après les discours que vous avez tenus, il importe de soutenir l’action des fédérations. Certes, elles ont déjà les moyens de fonctionner, mais il serait souhaitable de leur adresser un signe.
Concernant le programme 219, je me félicite de deux « budgétisations » : d’une part, la prise en charge, à hauteur de 4,3 millions d’euros, des cotisations de retraite pour les sportifs de haut niveau – et le Sénat y a contribué –, et, d’autre part, une dotation de 5 millions d’euros pour le financement des primes aux médaillés des jeux de Rio, ce qui n’avait pas été le cas pour ceux de Londres en 2012.
Sans parler des dépenses exceptionnelles, notamment pour ce qui concerne le financement des infrastructures et des associations sportives, via le CNDS, qu’il s’agisse de la construction et de la rénovation des stades en vue de l’Euro 2016, ainsi que du financement, pour 2016, de la part de l’État dans le projet de candidature de la ville de Paris aux jeux de 2024, à hauteur de 10 millions d’euros. Il s’agit là de deux projets d’envergure.
J’en viens au programme 163 « Jeunesse et vie associative », qui se caractérise par des orientations fortes de la part du Gouvernement.
Le doublement des crédits destinés au service civique revêt un caractère d’importance pour notre jeunesse, qui a besoin d’avoir des caps et d’être intégrée dans les chemins de la République.
La réussite de la montée en charge du service civique est une priorité de l’action du Gouvernement : cette action avait toute son importance après les événements qui ont endeuillé la France en janvier dernier, et elle est encore plus prioritaire depuis les attentats de novembre dernier. Hors service civique, le programme est porté par la mise en place des mesures décidées après le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté du 6 mars dernier. Il se traduit par un New Deal avec, notamment, le financement de loisirs éducatifs pour les jeunes, pour plus de 3 millions d’euros, ou encore le renforcement du soutien aux associations actives dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville au sein des subventions aux associations agréées d’éducation populaire et de jeunesse.
Par ailleurs, plusieurs évolutions vont dans le sens d’une meilleure gestion et de la maîtrise budgétaire : la fusion de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, l’INJEP, avec l’Agence du service civique, ainsi que la réduction de certaines subventions.
Au total, le Gouvernement s’est fixé l’objectif de financer 110 000 missions jeunes en 2016, avant d’atteindre les 150 000 missions prévues en 2017. C’est vraiment une priorité, et le Parlement vous soutient.
Pour conclure, il s’agit d’un budget à la fois responsable et cohérent.
Il est responsable, car il participe à la maîtrise des dépenses publiques sur les postes où cela est possible. Il est cohérent, car il assure un financement puissant pour le service civique, afin de favoriser l’engagement citoyen de notre jeunesse.
Certes, les collectivités réalisent des efforts, mais nous constatons que l’État aussi apporte sa part. Les crédits de cette mission consacrés au sport sont stables, et ceux qui sont destinés à la jeunesse ainsi qu’à la vie associative doublent. C’est une chance. C’est la raison pour laquelle la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, pour le sport. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce budget du sport s’inscrit dans un contexte particulièrement difficile pour les finances publiques et doit répondre à des enjeux importants comme la préparation de l’Euro 2016 et la candidature de Paris aux jeux Olympiques de 2024.
Avec un montant de 230,5 millions d’euros, on peut dire que l’essentiel est largement préservé. Je retiens, pour ma part, que, si le niveau de ces crédits est quasiment identique à celui de l’année dernière, avec 230,69 millions d’euros, et si l’on fait abstraction des crédits de 2015 qui étaient non reconductibles, c’est une hausse de 2,73 % qui est prévue pour 2016.
Les crédits de l’action n° 1, consacrée au sport pour tous, connaissent une légère baisse de 2,6 %, pour s’établir à 27,11 millions d’euros. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit également une réduction des ressources du CNDS à hauteur de 5,7 millions d’euros, dans le cadre de son indispensable plan de redressement, ce qui portera ses ressources à 264,5 millions d’euros.
Toutefois, quelque 8,8 millions d’euros seront affectés au CNDS pour assurer le financement du plan « Citoyens du sport » décidé le 6 mars dernier. Le sport contribue ainsi pleinement à la mise en œuvre du CIEC, le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté, du 6 mars dernier. Néanmoins, il est à noter que les dépenses supportées par le CNDS pour la construction et la rénovation des stades de l’Euro 2016 sont compensées à l’euro près.
Concernant l’Euro 2016, j’ai auditionné Jacques Lambert, le président de la société qui organise l’Euro 2016, avant les événements du 13 novembre. Il affirmait déjà que la sécurité était sa seule véritable préoccupation, et que toutes les mesures nécessaires étaient prises en coordination avec le ministère de l’intérieur.
Aujourd’hui, l’inquiétude se porte d’abord sur l’organisation des « fan zones ». De nombreuses villes hôtes considèrent qu’elles n’ont pas les moyens d’assurer la sécurité de ces espaces. Une mesure de bon sens pourrait consister à ne pas rendre obligatoire l’organisation de ces zones lorsque les élus ont des doutes sur la sécurité.
J’en viens maintenant aux crédits de l’action n° 2, relatifs au sport de haut niveau, qui représentent environ 75 % du programme 219.
Ces crédits ont fait l’objet de certaines réallocations pour financer des mesures nouvelles, comme les éventuelles primes des médaillés aux jeux Olympiques de Rio, à hauteur de 5 millions d’euros, et la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles des sportifs de haut niveau, à la suite de l’adoption, à l’unanimité, de la proposition de loi concernée. Une enveloppe de 1,8 million d’euros est prévue à cet effet.
L’État prend toute sa place dans la préparation de la candidature de Paris aux jeux Olympiques de 2024. Compte tenu du fonds de concours du Centre national pour le développement du sport, le CNDS, les crédits alloués aux fédérations dans le cadre de l’action n° 2 s’établiront à 78,7 millions d’euros, soit un montant comparable à celui de l’année dernière. L’annonce d’une réserve de précaution appliquée aux crédits alloués aux fédérations, à hauteur de 4,8 millions d’euros, a suscité une certaine émotion, en particulier à l’aube d’une année olympique.
C’est la raison pour laquelle que je soutiens l’amendement du rapporteur spécial visant à réaffecter 4,8 millions d’euros du programme 163 au programme 219.
Pour ce qui concerne les opérateurs de l’État, l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance, l’INSEP, poursuit sa rénovation. Le transfert aux régions des centres de ressources d’expertise et de performance sportives, les CREPS, s’effectue de manière très satisfaisante. Les engagements ont effectivement été tenus, puisque près de 52,1 millions d’euros sont prévus pour assurer la rémunération des personnels de ces centres.
La commission a donné un avis favorable sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis.
M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, pour la jeunesse et la vie associative. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Président de la République a inscrit les politiques de la jeunesse au premier rang des priorités du quinquennat. Cela suppose une implication de l’ensemble des acteurs des politiques publiques, dans tous les secteurs, et à tous les niveaux, pour améliorer la situation des jeunes et en faire les partenaires et les acteurs des politiques qui les concernent.
Mener ces politiques exige également d’y affecter des moyens. Au total, ce sont 86 milliards d’euros qui seront consacrés à la jeunesse en 2016. Certes, le budget de l’éducation nationale y participe pour une bonne part. Avec 383,5 millions d’euros, les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative » de cette mission ne représentent qu’une modeste fraction de l’effort national consenti en faveur de la jeunesse. Toutefois, ils témoignent du fort engagement du Gouvernement en ce qui concerne cette priorité.
Comme cela a été rappelé, cette augmentation de 61,7 % par rapport à 2015 est en grande partie liée au quasi-doublement des crédits en faveur du service civique. En effet, le Gouvernement a fixé à 110 000 le nombre de missions de service civique pour 2016, avec l’objectif de 150 000 missions à l’horizon de 2017. C’était une promesse ; elle est en passe d’être tenue. Si les crédits alloués à l’Agence du service civique doivent lui permettre de faire face à la montée en puissance du dispositif, il convient toutefois de continuer à élargir le vivier des missions du service civique au-delà du secteur associatif. Car, en effet, à ce jour, c’est ce secteur qui accueille le plus grand nombre de jeunes.
L’année 2015 a été marquée par l’engagement de nombreux ministères : le ministère de l’écologie, avec 5 000 missions ; le ministère de la culture, avec 6 000 missions ; le ministère de l’intérieur, avec 1 000 missions ; le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative, avec 4 500 missions, et le ministère de l’éducation nationale, avec 5 000 missions à la rentrée 2015. Il revient désormais aux collectivités locales de se mobiliser pour accueillir davantage de jeunes en service civique.
Au-delà du service civique, le programme 163 soutient le développement de la vie associative et les actions en faveur de la jeunesse.
Les crédits pour 2016 restent stables. Ainsi, l’accroissement des crédits accordés au service civique n’a eu globalement aucun impact négatif sur l’évolution des crédits consentis aux autres actions du programme 163.
L’événement marquant en direction de la jeunesse cette année aura été le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté, qui s’est tenu le 6 mars dernier. À cette occasion, le Premier ministre a annoncé un New Deal avec le monde associatif : un engagement de simplification pour alléger le quotidien des associations, ainsi que de nouveaux crédits. Quelque 11,1 millions d’euros sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2016, notamment pour financer le dispositif Sésame vers l’emploi pour le sport et l’animation dans les métiers de l’encadrement, dit SESAME, qui permettra d’accompagner 1 500 jeunes rencontrant des difficultés d’insertion.
En conclusion, je vous propose, au nom de la commission de la culture, d’adopter les crédits de ce programme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est un budget en très forte augmentation que nous sommes amenés à examiner aujourd’hui avec la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Il est vrai que l’essentiel de cette progression est à porter au crédit de la montée en charge du service civique. La priorité est ainsi clairement donnée à la cohésion nationale, ce dont le groupe du RDSE se félicite.
Ainsi, le doublement des crédits de cette ligne budgétaire doit permettre l’accession de 110 000 jeunes volontaires au service civique en 2016. Quand on sait qu’il y a quatre fois plus de volontaires que de missions proposées et que les jeunes, pour une grande majorité d’entre eux, retirent une expérience positive du service civique, ce choix nous paraît important et salutaire.
Par ailleurs, alors qu’il devient capital de retisser du lien social parmi des jeunes désenchantés par un chômage endémique et de favoriser leur insertion au sein de la société, cet engagement citoyen doit leur ouvrir des perspectives professionnelles. Mais il faudra, pour ce faire, que cette montée en puissance du service civique s’accompagne d’une diversité des structures d’accueil et des missions proposées, ainsi que d’une vraie formation pour les tuteurs. Valoriser cette expérience en l’intégrant dans un portefeuille de compétences, ainsi que l’a suggéré notre rapporteur, me paraît aussi une piste à creuser.
Les associations jouent un rôle déterminant dans le fonctionnement du service civique, puisqu’elles portent plus de 86 % des missions proposées, quand l’État et les collectivités territoriales y concourent respectivement à hauteur de 8 % et 7 %. Or la progression du service civique, qui représente désormais 77 % du programme « Jeunesse et vie associative », se fait mécaniquement au détriment du développement de la vie associative.
Le Fonds pour le développement de la vie associative, le fonds national comme les fédérations, accuse ainsi une baisse de 1,2 million d’euros. À cet égard, j’ai été alertée par un collectif d’associations citoyennes, qui est très préoccupé par la trajectoire des aides qui leur sont accordées. Comme vous le savez, monsieur le ministre, les associations sont prises en étau entre, d’un côté, la stagnation des crédits qui leur sont attribués par le ministère de la ville et, de l’autre, la baisse des dotations de l’État aux collectivités, qui se répercute très souvent sur leurs subventions.
Ce sont pourtant ces bénévoles qui, par le temps qu’ils y consacrent et les initiatives qu’ils prennent, font vivre les quartiers et la solidarité, en impliquant les habitants et en produisant du lien, notamment dans les territoires où celui-ci est le plus distendu. Ce sont également eux qui jouent un rôle de palliatif quand les services publics de proximité reculent. Mais aujourd’hui, de nombreuses associations sont exsangues, elles peinent à recruter des bénévoles et ne sont plus en capacité d’assurer ces missions.
Le sport, lui aussi, ne mobiliserait pas tant les foules sans les bénévoles du monde associatif qui lui permettent d’exister et de fonctionner au quotidien. Je pense à ces milliers d’éducateurs qui prennent de leur temps pour faire vivre les clubs où évoluent nos enfants ou qui, le dimanche, assurent la logistique des épreuves sportives, comme les nombreuses courses de fond.
Aussi les 12,1 millions d’euros dévolus à l’emploi de 400 éducateurs sportifs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, dans le cadre du plan Citoyens du sport, constituent un signal positif qui doit pousser les jeunes à s’investir.
Les crédits du programme « Sport » sont globalement identiques à ceux de l’année dernière. Mais, dans le détail, je m’interroge sur le recul de la promotion du sport pour le plus grand nombre devant la prééminence du sport de haut niveau.
C’est évidemment compréhensible dans une année qui va compter l’Euro de football en France et les jeux Olympiques de Rio de Janeiro. Néanmoins, à plus long terme, il faudrait envisager une réorientation de l’action de l’État en faveur du sport pour tous, ainsi que le préconisait déjà la Cour des comptes, dans un rapport publié en janvier 2013. Aujourd’hui encore, le décalage est considérable, alors que le sport de haut niveau représente 75 % des crédits dédiés au sport.
J’en profite également pour rappeler qu’une proposition de loi relative à la représentation des supporters au sein des instances du football, cosignée par des parlementaires de tout bord, n’est toujours pas examinée par les deux chambres parlementaires. J’espère, monsieur le ministre, que vous appuierez cette initiative.
Le groupe du RDSE, dans sa majorité, soutiendra les crédits tels qu’ils ont été adoptés par l’Assemblée nationale, étant favorable à la montée en charge du service civique.
Dans la période que nous vivons, je suis, pour ma part, convaincue que le vivre ensemble ne passe pas seulement par le partage d’un corpus de valeurs : il se renforce aussi au travers des expériences de cohésion et de solidarité que procure la pratique du sport, notamment collectif. De ce point de vue, et pour terminer par une note un peu moins comptable et plus philosophique, je citerai les propos de Nelson Mandela : « Le sport a le pouvoir de changer le monde, il a le pouvoir d’unir les gens d’une manière quasi unique. Le sport peut créer de l’espoir là où il n’y a que du désespoir. » Tâchons de ne pas l’oublier ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2016 est un budget que je qualifierai « de budget en trompe-l’œil ». Une nouvelle fois, monsieur le ministre, vos propositions budgétaires ne répondent ni aux enjeux ni aux attentes du monde sportif et associatif.
La seule augmentation significative concerne le budget consacré au service civique. Sur ce point, si nous partageons tous l’objectif de tout faire pour aider la jeunesse à trouver un emploi, nous ne pouvons nous satisfaire de votre constat lorsque vous déclarez : « Le chômage recule chez les jeunes, ces bons résultats sont la conséquence des efforts menés par le Gouvernement et la majorité depuis trois ans. »
En effet, si les jeunes en service civique disparaissent, temporairement du moins, des statistiques des demandeurs d’emploi, via ce dispositif financé à coups de centaines de millions d’euros d’argent public, leur situation reste d’une grande précarité. Il est donc, à mes yeux, exagéré de le présenter comme le remède miracle à la problématique du chômage des jeunes. Nous ne pouvons, en effet, nous contenter d’emplois précaires dont la rémunération oscille entre 400 euros et 600 euros par mois, pour une durée de contrat comprise entre six et douze mois.
Se pose la question de la pérennité de ces emplois aidés. Quelles perspectives offre-t-on réellement à ces jeunes ? Les aide-t-on ainsi à s’orienter, à développer de nouvelles compétences et à se dessiner une carrière dans laquelle ils pourront s’épanouir ?
Avant de doubler les crédits affectés au service civique, il serait indispensable de disposer d’un bilan beaucoup plus précis des contrats signés en 2015.
Le service civique ne risque-t-il pas de devenir une solution par défaut vers laquelle seront orientés nos jeunes, faute de mieux ? Il incarne aujourd’hui presque à lui seul la politique du Gouvernement à destination de l’emploi des jeunes. À mon sens, la montée en puissance du service civique démontre le cuisant échec du Gouvernement durant ces cinq dernières années en matière d’emploi des jeunes.
Le service civique pose la même problématique que les contrats aidés, notamment les emplois d’avenir : une fois encore, le secteur non marchand est le pourvoyeur d’emplois très provisoires pour les jeunes. Plusieurs études, dont celle qui a été publiée en juillet dernier par l’INSEE, ont démontré l’inefficacité des contrats aidés conclus dans le secteur non marchand, lesquels peinent à fournir des formations utiles et de réels débouchés. C’est pourtant la voie quasi exclusive que vous vous entêtez à poursuivre !
Il faudrait en priorité – nous sommes nombreux à le penser ! – se pencher sur les causes du mal qui touche notre jeunesse, en redonnant du sens à nos formations pour lutter contre l’échec scolaire, qui nourrit un chômage massif des jeunes. À titre personnel, je préférerais que l’on oriente une partie du montant de ces contrats supplémentaires en direction du développement de l’alternance et de l’apprentissage. L’alternance doit être promue comme une voie d’excellence qui agit comme un véritable tremplin vers l’emploi.
J’en viens maintenant au programme 219 « Sport ».
Depuis votre arrivée au pouvoir, vous nous annoncez, monsieur le ministre, une grande loi sur le sport. Les années passent, les budgets se succèdent et, malheureusement, rien n’a réellement changé sur les enjeux importants de la gouvernance, du financement et de l’évolution de l’économie du sport.
Bien sûr, nous en sommes tous conscients, la situation budgétaire est compliquée. Bien sûr, chaque ministère doit faire des efforts. Mais si vous voulez faire de la jeunesse votre priorité, comme le rappelle régulièrement le Président de la République, il ne faut pas nous proposer une baisse des crédits, comme c’est le cas dans ce budget si on l’examine à périmètre constant.
En effet, lorsque nous comparons le budget pour 2016 à celui de 2015, les crédits accordés à la promotion du sport pour le plus grand nombre baissent de 2,5 %, tandis que ceux qui sont dévolus au développement du sport de haut niveau sont en recul de 600 000 euros. Quand je parle de budget en trompe-l’œil, en voilà un exemple concret !
Vous nous annoncez une augmentation de 6,2 millions d’euros pour le sport de haut niveau entre 2015 et 2016 mais, pour être juste et transparent, si l’on veut comparer ces deux budgets à périmètre constant, il convient de retirer les mesures nouvelles, à savoir 5 millions d’euros prévus pour les médaillés des jeux Olympiques de Rio et 1,8 million d’euros inscrits pour la protection des sportifs de haut niveau, soit, au total, 6,8 millions de mesures supplémentaires. En comparaison des 6,2 millions que vous annoncez, il s’agit donc bien d’une baisse de 600 000 euros sur ce budget. Il serait intéressant de savoir quelles politiques seront impactées par ces baisses.
Si le Sénat a adopté, je le rappelle, la proposition de loi visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale, il est hors de question que cette avancée importante se fasse au détriment d’autres actions.
J’évoquerai une autre baisse, celle des crédits attribués au Centre national pour le développement du sport, le CNDS, qui passent de 270 millions à 264 millions d’euros, alors même que le nombre de projets subventionnés par cet établissement a déjà été divisé par deux en cinq ans.
Les collectivités locales, fortement impactées par la baisse importante des dotations de l’État, se voient une nouvelle fois pénalisées, ce qui va retarder et même, dans certains cas, annuler des investissements sportifs attendus par les pratiquants et les bénévoles, qui représentent la vitalité du mouvement sportif.
Je note également que le budget de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance, l’INSEP, diminue de 2,2 millions d’euros. Il est tout à fait regrettable de gripper la capacité d’investissement de cet outil national au service des sportifs de haut niveau, dont les qualités et les atouts ne sont plus à démontrer.
Quant aux moyens dédiés aux fédérations, s’ils sont stables dans la présentation que vous en faites, ils restent incertains, car une réserve de précaution de 8 % est prévue, qui ne peut s’imputer que sur le chapitre des conventions d’objectifs. À la suite du transfert aux régions des centres de ressources, d’expertise et de performances sportives, les CREPS, le budget dédié aux fédérations semble donc destiné à servir de nouvelle variable d’ajustement du programme.
Cette situation a incité le rapporteur spécial Didier Guillaume à déposer un amendement visant à rétablir les crédits visés par la réserve de précaution grâce au transfert de 4,8 millions d’euros de l’Agence du service civique vers les conventions d’objectifs des fédérations. Je souscris totalement à cette démarche et je la prolongerai, en proposant la remise à niveau des divers postes, dont je viens d’indiquer qu’ils étaient en baisse dans le présent budget.
J’estime que le domaine du sport, qui ne représente que 0,2 % du budget de la nation, n’a pas à pâtir des mesures d’affichage du Gouvernement.
J’apporterai des rectificatifs en recourant à la même source de financement que notre rapporteur spécial, c’est-à-dire au travers des crédits importants prévus pour le développement du service civique.
En comparaison avec les 300,4 millions d’euros réservés à la montée en charge du service civique, la part que je proposerai de prélever reste modeste – 12,6 millions –, et je tiens à préciser que le principe d’une participation de tous les acteurs à la réduction du déficit public est maintenu dans mon amendement, les montants indiqués ayant été calculés en ce sens.
Mes chers collègues, notre assemblée doit envoyer un signal fort de soutien aux acteurs du sport dans notre pays. Pour cela, il n’est pas concevable de réduire un budget, qui est déjà le parent pauvre de celui de l’État depuis de nombreuses années.
Vous l’aurez compris, l’adoption de cet amendement de rétablissement des crédits du programme « Sport » conditionnera le vote de notre groupe sur la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, soyons un peu sport ! (Sourires.) Face à l’enthousiasme général suscité par cette mission, je me dois de saluer votre prestation, monsieur le ministre.
En effet, sur presque toutes les travées – et cela n’est pas si fréquent ! –, la tonalité est plutôt favorable et optimiste sur ces crédits.
Il est vrai que, compte tenu du contexte budgétaire contraint, le Gouvernement nous a jusqu’à présent plutôt demandé de résoudre l’équation : « faire plus avec moins. » Alors, quelle ivresse de constater la hausse spectaculaire de l’ensemble des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », qui progressent de 36,9 % ! (M. Charles Revet s’exclame.)
Cependant, passé ce stade de la quasi-euphorie, vient le temps de l’analyse et du retour sur terre. Car cette augmentation importante s’explique uniquement par la montée en charge du service civique, qui est universel depuis le 1er juin. Les crédits qui lui sont affectés passent en effet de 148 millions d’euros à 300 millions entre 2015 et 2016, soit une hausse de 103 %.
M. Charles Revet. Et voilà !