M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Ségolène Royal.
Vous attirez son attention sur les attentes fortes des élus locaux et de la population de la commune d’Aubord quant au renforcement des mesures de prévention des inondations prévues dans le cadre du chantier de la ligne nouvelle TGV « contournement Nîmes-Montpellier ».
Comme vous l’indiquez, l’exploitation complète de la carrière n’a pas été autorisée, du fait d’une insuffisance du dossier de dérogation relatif aux espèces protégées. Le volume des excavations réalisées s’avère cependant suffisamment important pour valoriser ce volume de stockage en bassin écrêteur.
La ministre de l’écologie souhaite que la commune, qui avait saisi l’occasion des travaux du grand chantier, puisse bénéficier d’un bassin écrêteur de crues dans le cadre du réaménagement de la carrière dont l’extraction a été arrêtée, dans un secteur dont nous savons qu’il est fréquemment affecté par les pluies violentes de type cévenol.
Ce bassin devrait contribuer ainsi à renforcer significativement le dispositif de prévention des inondations d’Aubord. La ministre a demandé au préfet de procéder à un examen de la situation et de rechercher, en lien avec les élus locaux, la solution la plus adaptée, permettant la réalisation des aménagements hydrauliques nécessaires au fonctionnement du bassin écrêteur, en cohérence avec le projet global du programme d’actions de prévention des inondations du Vistre, en cours d’élaboration.
En fonction de la solution retenue, il sera nécessaire ou pas de déposer un nouveau dossier de demande de dérogation relative aux espèces protégées, qui sera soumis au Conseil national de protection de la nature avant décision de l’État. Mme la ministre est vigilante à ce que la sécurité des populations de votre territoire soit pleinement prise en compte. Le préfet du Gard ne manquera pas de vous tenir informé des suites et des décisions qui seront prises.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier.
M. Jean-Paul Fournier. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions. Toutefois, je ne suis pas totalement rassuré par votre réponse. Ce dossier, qui devrait être réglé aujourd’hui, a pris beaucoup de retard. De plus, je reste persuadé que la population de ce territoire est encore très vulnérable. C’est pourquoi j’aurais souhaité obtenir une réponse beaucoup plus claire. La commune peu riche d’Aubord ne peut se permettre d’apporter une contribution financière.
J’attendrai que M. le préfet du Gard m’informe de ses intentions, mais il importe que ce dossier soit traité rapidement et que le bassin d’écrêtement soit réalisé, compte tenu de la fréquence des épisodes cévenols.
visas des étudiants stagiaires, des voyageurs d'affaires et permis de conduire en chine
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 1174, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
M. Richard Yung. Le 1er juillet 2013, les autorités chinoises ont considérablement compliqué la procédure de délivrance des visas, en particulier pour les étudiants stagiaires. Or, chaque année, environ 2 000 étudiants français se rendent en Chine pour améliorer leurs connaissances linguistiques et effectuer un stage. Cela devient de plus en plus difficile, alors que la France a, au contraire, facilité les démarches pour les jeunes Chinois souhaitant accomplir un stage en France.
Lors de la visite du Président de la République française en Chine au mois de novembre 2015, un accord « 1 000 stagiaires » a été signé entre la France et ce pays, l’objectif étant de faciliter l’obtention de stages et de visas pour les Français. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous donner des détails sur la mise en œuvre de cet accord ?
Par ailleurs, des difficultés existent aussi pour les voyageurs d’affaires français désireux de se rendre en Chine. La systématisation de la délivrance de visas à entrées multiples aux ressortissants qui remplissent les conditions fixées par les deux législations a été évoquée entre la France et la Chine. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous indiquer si un tel accord est en négociation s’agissant des visas pour les voyageurs d’affaires ?
Enfin, alors même que les ressortissants chinois peuvent utiliser leur permis de conduire en France, la Chine ne reconnaît pas le permis de conduire français sur son territoire, ce qui oblige nos compatriotes à passer le permis de conduire chinois. Quelles sont les raisons de cette non-réciprocité de la reconnaissance du permis de conduire ? Pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d’État, si des négociations sont en cours pour remédier à cette situation ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, la facilitation des échanges humains avec la Chine est une priorité. Nous discutons de ces questions avec nos partenaires de l’Union européenne et dans le cadre du dialogue entre celle-ci et la Chine.
Nous avons déjà obtenu des avancées importantes, notamment un engagement de la partie chinoise à faciliter l’octroi de visas à entrées multiples pour les visiteurs réguliers en Chine.
S’agissant des stagiaires, il est exact que la nouvelle législation chinoise de juillet 2013 a rendu plus difficile l’octroi de visas aux demandeurs de stage étrangers, à moins qu’ils ne suivent un cursus universitaire en Chine.
Cette question a été abordée depuis lors dans le cadre du dialogue de haut niveau sur les échanges humains. La France a insisté sur l’importance des stages dans la formation des étudiants chinois et français.
À l’occasion de la deuxième session de ce dialogue, qui s’est tenue à Pékin le 15 mai 2015 et que le ministre des affaires étrangères et du développement international, M. Fabius, a coprésidé avec la vice-première ministre chinoise, Mme Liu Yandong, nous nous sommes entendus pour concevoir et mettre en œuvre un programme d’échanges à destination des étudiants qui souhaitent effectuer un stage dans le pays partenaire.
La visite d’État du Président de la République en Chine en novembre dernier a permis de signer un accord intergouvernemental permettant à 1 000 jeunes, de part et d’autre, d’effectuer un stage dans le pays partenaire. Les modalités de la mise en œuvre de l’accord seront précisées d’ici au 1er janvier 2016, date à laquelle le programme sera lancé.
S’agissant des permis de conduire, nous souhaitons parvenir à un dispositif de reconnaissance réciproque afin de faciliter la mobilité. Actuellement, comme vous l’avez rappelé, un ressortissant chinois peut conduire en France avec son permis pendant un an, alors que ce n’est pas le cas pour les Français en Chine. Nous devons donc tendre vers davantage de réciprocité et une meilleure reconnaissance, sur le territoire chinois, des capacités à conduire des titulaires du permis de conduire français.
À cette fin, une négociation est engagée entre autorités françaises et chinoises, en vue de parvenir à un dispositif profitable aux deux parties.
Les autorités françaises agissent afin de favoriser les échanges humains entre la France et la Chine, dans le respect des impératifs de la politique française et européenne en matière de sécurité routière. Ce sujet a encore été évoqué entre les présidents français et chinois lors de leurs échanges cette semaine.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Je remercie M. le secrétaire d’État de ces précisions. J’encourage le Gouvernement à faire preuve d’allant dans les négociations avec la Chine. Si la France s’est montrée très ouverte, et c’est une bonne chose, on a parfois le sentiment que cette ouverture n’est pas toujours payée de retour. Il faut davantage de coopération et de compréhension mutuelle.
conditions d'accueil des migrants
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 1263, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Alain Fouché. Ma question porte sur les conditions d’accueil des migrants, et tout particulièrement sur l’instruction de leurs demandes d’asile.
Le 7 septembre 2015, le Président de la République a annoncé l’accueil de 24 000 réfugiés sur les deux prochaines années. Ce chiffre est-il toujours d’actualité ?
L’accueil des migrants présente un risque social, mais également de sûreté nationale.
Pour obtenir ce statut de réfugié, les migrants doivent déposer une demande d’asile auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. Or, monsieur le secrétaire d’État, vous savez bien que l’OFPRA, et ses quelque 500 agents, est surchargé de demandes. En effet, le nombre de demandeurs d’asile a doublé depuis 2007, pour atteindre 66 000 en 2013.
Au début de l’année 2015, le délai moyen d’instruction était déjà de vingt mois, durant lesquels le demandeur d’asile est titulaire d’une autorisation provisoire de séjour et se voit accorder le bénéfice d’une allocation temporaire d’attente mensuelle d’environ 343,50 euros, l’accès à la couverture maladie universelle, ainsi qu’à une solution d’hébergement en urgence, mais n’est pas autorisé à travailler.
Les demandeurs d’asile se trouvent dans une situation précaire, qui présente toutefois un coût non négligeable pour les Français : l’instruction de 25 000 demandes d’asile coûtera chaque année au minimum près de 100 millions euros. Or les demandeurs d’asile n’aspirent pas à un tel assistanat, au surplus très coûteux pour nos concitoyens. La France se révèle ainsi peu attractive pour les demandeurs d’asile hautement qualifiés, qui lui préfèrent l’Allemagne. C’est un vrai problème !
Pour être acceptés des Français, ils doivent pouvoir contribuer davantage en taxes et en cotisations qu’ils ne reçoivent en prestations individuelles.
Par ailleurs, leur identité n’est vérifiée qu’à l’occasion de l’instruction de leur demande par l’OFPRA. Or, on l’a vu, il est pour le moins risqué de permettre à des personnes dont l’identité n’est pas vérifiée d’aller et venir librement sur notre territoire, compte tenu des circonstances actuelles. Cette immigration humanitaire ne pourra être acceptée des Français que si elle est organisée de manière à garantir leur sécurité.
Je vous remercie de bien vouloir me préciser quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre face à ces situations exceptionnelles.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur.
La réduction des délais de la procédure de demande d’asile constitue une priorité du ministère de l’intérieur. La loi relative à la réforme du droit d’asile adoptée le 29 juillet 2015 accélère cette procédure, sans remettre en cause la qualité de l’instruction et en préservant les droits des demandeurs. L’objectif est de parvenir, à la fin de 2016, à un délai moyen de neuf mois pour le traitement d’une demande d’asile, alors qu’il s’établit à près de quinze mois aujourd’hui.
Le renforcement des effectifs de l’OFPRA et de la Cour nationale du droit d’asile a déjà donné des résultats puisque, au troisième trimestre de 2015, le délai moyen de traitement a baissé de seize jours par rapport au trimestre précédent, et la réduction du nombre des dossiers accumulés ces dernières années se confirme de manière significative. Des recrutements supplémentaires permettront de faire face aux exigences de la mise en œuvre du programme européen de relocalisation.
La loi du 29 juillet 2015 vise aussi à améliorer les conditions d’accueil des demandeurs d’asile et à limiter le coût financier que cet accueil représente pour l’État. À ce propos, le fait que les demandeurs d’asile choisissent l’Allemagne plutôt que la France, comme vous l’avez signalé, suffit en soi à tordre le cou à l’idée absurde et fallacieuse selon laquelle ils abuseraient de l’assistanat.
Par ailleurs, le dispositif a été amélioré pour permettre au demandeur d’asile d’accéder au marché du travail lorsque l’OFPRA, pour des raisons qui ne sont pas imputables à ce dernier, n’a pas statué sur la demande d’asile dans un délai de neuf mois à compter de l’introduction de celle-ci.
Enfin, vous m’interrogez sur les contrôles effectués pour s’assurer que les migrants accueillis dans le cadre du programme de relocalisation ne constituent pas une menace pour l’ordre public.
La relocalisation ne s’adresse qu’aux migrants qui ont été enregistrés par les autorités grecques ou italiennes au moment de leur arrivée sur le territoire européen et qui ont formulé une demande d’asile.
Avant de soumettre les cas à la relocalisation, les autorités grecques ou italiennes doivent vérifier l’identité et la nationalité des personnes et consulter tous les fichiers disponibles. Elles bénéficient du soutien des autres États membres à travers les experts, notamment français, déployés par Frontex.
Les États membres peuvent aussi s’opposer à la relocalisation d’un demandeur d’asile s’il présente un danger pour la sécurité nationale ou l’ordre public. La loi du 29 juillet 2015 permet de refuser ou de retirer la qualité de réfugié à toute personne qui commettrait sur le territoire des faits très graves représentant une menace pour l’ordre public.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Monsieur le secrétaire d’État, je prends note de la volonté du Gouvernement d’accélérer les procédures. Cela est indispensable. Que des migrants hautement qualifiés préfèrent se rendre en Allemagne plutôt qu’en France nuit à l’économie française. Enfin, il me paraît essentiel que, dans le domaine sécuritaire, des efforts importants soient réalisés.
impact du changement climatique outre-mer
M. le président. La parole est à M. Félix Desplan, en remplacement de M. Jacques Gillot, auteur de la question n° 1269, transmise à Mme la ministre des outre-mer.
M. Félix Desplan, en remplacement de M. Jacques Gillot. Monsieur le secrétaire d’État, la 21e conférence des parties à la convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques, dite « COP 21 », a été ouverte officiellement hier, à Paris, et durera jusqu’au 11 décembre prochain.
L’enjeu de cette conférence, réunissant pour la première fois plus de 150 chefs d’État et de Gouvernement, est de conclure le premier accord universel et contraignant sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre en vue de limiter la hausse des températures à 2 degrés Celsius d’ici à 2100.
Toutefois, de nombreux points de divergence persistent entre les 195 pays souhaitant aboutir à un texte pour contenir le réchauffement terrestre sous le seuil des 2 degrés Celsius, alors que les experts scientifiques anticipent une augmentation de 5 degrés si l’on n’inverse pas la tendance rapidement. Or les conséquences d’un tel réchauffement seraient catastrophiques pour les écosystèmes et les sociétés humaines.
Les autres points-clefs de l’accord sont le financement de l’adaptation aux changements climatiques et la juste répartition des efforts entre pays pauvres, pays émergents et pays industrialisés, ces derniers étant tenus pour historiquement responsables du réchauffement.
Les territoires français d’outre-mer occupent une place très particulière dans ces négociations. Ils relèvent à la fois des pays les plus pollueurs et de la communauté des territoires les plus vulnérables. En effet, nos outre-mer ont la particularité d’appartenir administrativement à la France, qui accueille cette conférence, et politiquement à l’Union européenne, seul échelon reconnu, dans les négociations, par l’Organisation des Nations unies. Nos intérêts nous semblent très éloignés des centres de décision onusiens.
Par ailleurs, les outre-mer appartiennent géographiquement aux territoires insulaires, particulièrement exposés au changement climatique. Parallèlement, ils offrent de belles opportunités en termes d’alternatives aux énergies fossiles et recèlent des solutions concrètes aux problèmes de la crise climatique.
Nos politiques publiques tiennent d’ores et déjà compte des évolutions du climat et des risques que représentent celles-ci pour les secteurs de l’urbanisme et des infrastructures, de la production et de la distribution d’énergie, de la protection de la biodiversité.
Monsieur le secrétaire d’État, de quelle manière pouvons-nous faire connaître et valoriser toutes ces initiatives locales au cours de la COP 21 ? Plus largement, quelle place les territoires d’outre-mer, à la fois forts de leur potentiel énergétique et particulièrement vulnérables face au dérèglement climatique à l’œuvre, occupent-ils dans les négociations climatiques en cours ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, depuis hier et jusqu’au 11 décembre prochain, 196 délégations sont réunies pour définir ensemble les conditions d’une transition vers des sociétés plus sobres en ressources et moins émettrices de gaz à effet de serre, bref vers des sociétés durables.
Nous sommes tous concernés par les bouleversements liés aux changements climatiques. Vous l’avez rappelé de manière extrêmement juste et avec beaucoup de précision : ce constat s’applique également aux outre-mer, où se concentrent 80 % de la biodiversité française et 10 % des récifs coralliens du monde.
Les effets du changement climatique mettent en péril l’environnement des outre-mer, mais aussi et surtout nos concitoyens qui y vivent : les crues y deviennent plus fortes, les sécheresses plus longues, et l’on y assiste à une intensification des cyclones. Les outre-mer sont donc particulièrement concernés par la COP 21.
C’est pourquoi Mme la ministre des outre-mer a souhaité que nos territoires ultramarins soient représentés au sein de la délégation française et dans les différents lieux de cette conférence.
Ainsi, dix-sept représentants des outre-mer font partie de la délégation française. Dans le pavillon France de la COP 21, le ministère des outre-mer mobilise une trentaine de personnes pour assurer une présence quotidienne active et faire connaître au plus grand nombre la contribution ultramarine face aux défis du changement climatique, dans le cadre d’un stand exclusivement dédié aux outre-mer.
La ministre des outre-mer a également valorisé les projets exemplaires et innovants – ils sont nombreux ! – réalisés outre-mer pour faire face aux changements climatiques. C’est tout le sens de l’agenda des solutions outre-mer.
Enfin, plus d’une vingtaine d’événements autour de nos outre-mer se tiendront dans le cadre de la COP 21, tant au pavillon France, qui est réservé aux délégations internationales, que dans les espaces générations climat, qui eux sont ouverts au grand public.
Toutes les occasions de mettre en avant les outre-mer dans le cadre de la COP 21 ont été saisies, pour le constat et les diagnostics comme pour les solutions qui sont dès à présent mises en œuvre dans nos territoires ultramarins, de manière exemplaire et innovante.
Monsieur le sénateur, je vous remercie d’avoir permis au Gouvernement de rappeler ces initiatives. Je salue votre implication et celle de l’ensemble des parlementaires ultramarins sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Félix Desplan.
M. Félix Desplan. Monsieur le secrétaire d’État, le réchauffement climatique a non seulement de nombreuses conséquences écologiques, économiques et sociales, mais il a également des effets culturels et sanitaires, que nous n’avons malheureusement pas le temps d’aborder aujourd’hui. Malgré tout, il faut se demander comment tenter de s’en prémunir au travers de nos politiques publiques. Je pense notamment aux conséquences sanitaires du dérèglement climatique, en particulier à l’augmentation considérable des maladies vectorielles, notamment celles qui sont transmises par les moustiques. On le sait, les sécheresses actuelles induisent des mécanismes de stockage des eaux propices au développement de parasites.
Nous comptons sur le Gouvernement pour défendre les territoires ultramarins au cours des négociations, pour faire valoir à la fois notre vulnérabilité et notre inventivité face à cette crise climatique, dans les domaines de la prévention des risques, de la protection du littoral et de la préservation de la biodiversité.
L’adaptation aux changements climatiques est un défi majeur. Les outre-mer entendent y prendre toute leur part lors de cette conférence de Paris, dont nous espérons tous vivement le succès.
Je vous remercie de nous avoir rassurés quant à la prise en compte des initiatives prises par les outre-mer.
avancées des recherches sur le chlordécone aux antilles
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 1252, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Catherine Procaccia. Le chlordécone, utilisé comme pesticide de 1972 à 1993 dans les bananeraies contre le charançon, s’est révélé être un polluant organique puissant et persistant. Son emploi a eu des conséquences sanitaires graves et des incidences environnementales importantes, à la fois sur les cultures et sur les milieux aquatiques de la Guadeloupe et de la Martinique.
Heureusement, depuis 1999, les gouvernements successifs ont engagé plusieurs plans « chlordécone » afin de déployer des actions de prévention, faute de pouvoir assurer une dépollution : en effet, cette molécule n’est pas biodégradable et pourrait persister dans les sols entre 350 et 700 ans. À ce jour, on n’a trouvé aucune voie fiable de dépollution.
Dans notre rapport remis il y a six ans au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPECST, Jean-Yves Le Déaut et moi-même insistions sur la nécessité de mener des recherches sur des processus de décomposition chimique. Or, depuis quelques mois, des informations convergentes confortent la crédibilité de cette approche.
En particulier, deux laboratoires semblent avoir trouvé des pistes crédibles.
Premièrement, le laboratoire de l’Institut méditerranéen de biodiversité et d’écologie marine et continentale, l’IMBE, étudie l’hypothèse d’une biodégradabilité naturelle de cette molécule qualifiée d’« alien chimique ».
Deuxièmement, le Genoscope a isolé une bactérie capable de déchlorer, voire de permettre l’ouverture de la molécule de chlordécone, mais sans pouvoir déterminer par quel mécanisme. Pour progresser dans ses travaux, ce laboratoire aurait besoin d’utiliser du chlordécone radiomarqué au carbone 14 ; mais le coût de ce produit – environ 30 000 euros – est prohibitif pour cette structure.
Compte tenu de la pérennité de la pollution au chlordécone dans les sols antillais et de ses conséquences sur la santé, la recherche est la seule voie d’espoir.
Le Gouvernement entend-il coordonner les efforts de ces deux équipes de recherche ? Des moyens financiers seront-ils débloqués pour permettre à ces laboratoires d’avancer vers cette dépollution des sols totalement atypique ? En pleine COP 21, nos concitoyens d’outre-mer ont également besoin d’être rassurés sur leur avenir !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. Thierry Mandon, qui est actuellement au Conseil européen des ministres de la recherche.
Vous interrogez le ministère chargé de la recherche quant à l’engagement de la recherche face aux conséquences sanitaires et environnementales de l’utilisation du chlordécone, pesticide employé aux Antilles jusqu’à son interdiction, en 1993. Il s’agit d’une importante question de santé et environnementale. Vous l’avez souligné, la recherche est une voie essentielle pour y répondre.
Dès 2008, les services de l’État se sont fortement impliqués sur ce sujet, à travers un plan national d’action chlordécone, le PNAC-1, couvrant les années 2008 à 2011, suivi d’un PNAC-2, pour les années 2011 à 2013. À l’issue de la réunion interministérielle du 25 juillet 2014, un troisième plan, doté de 30 millions d’euros, a été officialisé au début de 2015 : il s’agit du PNAC-3, courant de 2015 à 2020.
Sous l’égide du directeur général de la santé, coordinateur interministériel du plan d’action chlordécone, le ministère de la recherche s’est impliqué, dès 2008, dans la définition des programmes de recherche sur ce sujet.
Par ailleurs, l’ensemble des organismes de recherche réunis au sein de l’alliance AllEnvi – notamment le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, le CIRAD, et l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, bénéficiant de l’appui du Commissariat à l’énergie atomique, le CEA, du CNRS, de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, l’IFREMER, de l’Institut de recherche pour le développement, l’IRD, de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture, l’IRSTEA, et des universités – a été mobilisé sur les actions de recherche. Cet ensemble inclut le laboratoire de l’Institut méditerranéen de biodiversité et d’écologie marine et continentale, que vous avez évoqué.
En outre, une coordination plus large de la recherche sur le sujet a été mise en œuvre. Dans le cadre du PNAC-3, un « groupe inter alliances » adossé au comité de pilotage national du plan a été mis en place pour assurer cette coordination. Une feuille de route intitulée « Initiative française pour la recherche en environnement-santé » a été préparée. Elle est reprise dans la stratégie nationale de recherche et les différents plans nationaux.
Les services du ministère chargé de la recherche ont également veillé à l’inscription de la thématique santé-environnement dans les appels à projets dédiés de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR. Ainsi, dans la programmation 2015 et 2016 de l’ANR, ces projets sont éligibles à des financements par le biais d’un axe clairement identifié, l’axe « risques sanitaires et environnement ». Les équipes que vous mentionnez pourront solliciter des fonds à ce titre.
Le ministère chargé de la recherche soutient donc bien la recherche sur le chlordécone, dans ses dimensions tant environnementales que sanitaires.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.