Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 350, présenté par M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 110, première phrase
Après les mots :
des frais de santé
insérer les mots :
, de gestion du risque et d’accès aux droits
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte adopté par l’Assemblée nationale pour l’alinéa 110 de l’annexe est rédigé de manière trop limitative, ne reflétant pas l’activité réelle des mutuelles, gestionnaires du régime obligatoire.
En effet, il est fait référence exclusivement aux opérations de remboursement des frais de santé, alors que le périmètre de gestion de ces mutuelles est bien plus étendu puisqu’il inclut par exemple les opérations de prévention, de gestion du risque, de lutte contre les abus et fraudes, d’information, d’accompagnement et d’accueil des assurés.
Ces activités sont essentielles aux missions menées par les mutuelles gestionnaires du régime obligatoire. Il s’agit donc de ne pas détruire les cohérences au profit des assurés sociaux et de suivre la logique selon laquelle il appartient à l’organisme payeur d’assurer en continuité des missions complémentaires de gestion des risques et d’accès aux soins.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 454, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 350
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Alinéa 112
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’organisation, de mise en œuvre et de financement de ces opérations de gestion, notamment dans le cadre de conventions, ainsi que les modalités d’évaluation de leurs résultats. Les conventions précisent, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les organismes concernés peuvent participer aux actions portant sur l’accès aux droits et la gestion du risque. »
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur Daudigny, votre amendement n° 350 vise à préciser que les opérations de gestion peuvent porter sur des actions favorisant l’accès au droit et la gestion du risque. Le Gouvernement est favorable à cette précision qu’il vous propose toutefois, par le sous-amendement n° 454, d’introduire à un autre alinéa, où elle trouvera mieux sa place.
Ce sous-amendement permettra également de satisfaire la demande exprimée par votre amendement n° 352 relatif au financement des opérations de gestion.
Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 350.
Mme la présidente. L'amendement n° 352, présenté par M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 112
Remplacer les mots :
et de mise en œuvre
par les mots :
, de mise en œuvre et de financement
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. L’amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. S’agissant de l’amendement n° 350, défendu par M. Daudigny, la commission avait souhaité solliciter l’avis du Gouvernement, avis que vous avez donné, madame la secrétaire d’État, en défendant le sous-amendement n° 454 : vous préférez l’insertion de la disposition à un autre alinéa – il est vrai que vous aviez le choix parmi les nombreux alinéas que compte cet article de vingt-sept pages !
La commission n’a pu examiner le sous-amendement n° 454, mais, à titre personnel, j’émets un avis favorable. Je pense que le Sénat pourra me suivre sur ce point.
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 352 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 351, présenté par M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 110, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Pour la prise en charge de ces frais de santé en cas de maladie et de maternité des personnes mentionnées aux articles L. 712-1 et L. 712-2, les mutuelles habilitées sont régies par le code de la mutualité constituées entre fonctionnaires, ou à des unions de ces mêmes organismes qui reçoivent compétence à cet effet, pour l’ensemble des fonctionnaires d’une ou plusieurs administrations.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. La rédaction actuelle de l’alinéa 96 introduit une incertitude sur le périmètre de gestion de population, toute mutuelle pouvant gérer indifféremment les étudiants ou les fonctionnaires.
Cet amendement vise à éviter la dispersion de la gestion au titre du régime obligatoire des agents des administrations de l’État entre plusieurs organismes mutualistes, cette gestion étant réintroduite uniquement auprès des mutuelles constituées entre fonctionnaires. Cette dispersion risquerait d’accroître fortement les démarches administratives des assurés et d’entraîner une perte de qualité de service – multiplication des mutations, risque sur le transfert de toute opération de gestion, risque sur l’accès à leurs droits.
Selon le texte initial, une mutuelle étudiante serait susceptible de gérer les agents de l’État. Ce texte est contraire à l’esprit même de la loi, qui a un objectif fort de simplification et ne vise pas à la remise en cause de l’organisation de la gestion actuelle conformément à l’annexe 10 du PLFSS sur les études d’impact.
Enfin, l’adoption de cet amendement permettrait d’éviter la modification de nombreux autres articles du code de la sécurité sociale, notamment les articles D. 712-30 à D 712-36 concernant l’organisation des sections locales mutualistes, de telles modifications risquant de produire une grande incertitude juridique sur l’organisation et le périmètre des missions actuelles de mutuelles de fonctionnaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à garantir dans la loi la situation actuelle, ce qui ne nous paraît pas vraiment nécessaire. Par ailleurs, qu’adviendra-t-il de ces mutuelles qui gèrent la sécurité sociale ? C’est une autre question dont nous n’allons pas débattre ce matin…
La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, votre préoccupation est tout à fait légitime, mais votre proposition se heurte à l’absence de définition législative des mutuelles de fonctionnaires. Par conséquent, cette précision au niveau de la loi n’apporterait rien. Le décret définira les critères d’habilitation précisant quelles mutuelles peuvent gérer les différentes catégories d’assurés.
Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Daudigny, l'amendement n° 351 est-il maintenu ?
M. Yves Daudigny. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 351 est retiré.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 100 rectifié bis, présenté par MM. Médevielle, Luche, L. Hervé, Guerriau, Kern et Cadic, n’est pas soutenu.
L'amendement n° 299 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 110
Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
relatives à la prise en charge des frais de santé et des prestations en espèces en cas de maladie et de maternité. L'encaissement et le recouvrement amiable et contentieux des cotisations d'assurance maladie des membres des professions libérales sont délégués à ces mêmes organismes.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. L’article 39, tel qu’il résulte des travaux de l’Assemblée nationale, risque de modifier l’architecture du Régime social des indépendants, le RSI.
Ainsi, il n’est plus précisé que les organismes complémentaires conventionnés par le RSI gèrent, comme c’est le cas actuellement, les prestations en nature maladie-maternité, les prestations en espèces de l’ensemble des indépendants non agricoles ainsi que le recouvrement des cotisations maladie des professions libérales.
Or il ne nous semble pas pertinent de remettre en cause ces délégations, même partiellement, dès lors qu’elles fonctionnent bien. Par ailleurs, cela engendrerait une rupture de service aux assurés qui n’est pas souhaitable.
Cet amendement tend donc à maintenir aux organismes complémentaires conventionnés par le RSI les délégations de gestion existantes.
Mme la présidente. Les amendements nos 227 rectifié bis et 228 rectifié bis, présentés par Mme Canayer, M. Mouiller et Mme Gruny, ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 299 rectifié ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’objet de cet amendement nous paraît satisfait par la suppression de l’article 12, précédemment adopté par le Sénat, qui a pour conséquence de maintenir sans changement les compétences des organismes complémentaires conventionnés par le RSI.
La commission invite donc au retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. S’agissant du premier volet de votre proposition, monsieur le sénateur, à savoir la gestion des prestations en nature d’assurance maladie, les dispositions de l’article 39 du présent projet de loi sont claires et ne remettent nullement en question la possibilité ouverte par les dispositions du code de la sécurité sociale d’effectuer une telle délégation. Il n’est donc pas nécessaire d’ajouter quoi que ce soit.
Sur le second volet, le Gouvernement, à l’instar de la commission, considère qu’il est satisfait compte tenu de la suppression par le Sénat de l’article 12.
Je vous invite donc à retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Arnell, l'amendement n° 299 rectifié est-il maintenu ?
M. Guillaume Arnell. Compte tenu de ces explications, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 299 rectifié est retiré.
L'amendement n° 224 rectifié ter, présenté par Mme Canayer, M. Mouiller et Mme Gruny, n'est pas soutenu.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 102 rectifié bis, présenté par MM. Médevielle, Kern, L. Hervé, Luche, Guerriau, Cadic et Gabouty, n’est pas soutenu.
L'amendement n° 301 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 334
Remplacer les mots :
Le dernier alinéa de l'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale s'applique
par les mots :
Les quatre derniers alinéas de l'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale s'appliquent
II. – Alinéa 335
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. Il s’agit d’un amendement de cohérence rédactionnelle avec l'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale, qui vise à homogénéiser les règles applicables à l'ensemble des textes encadrant les délégations de gestion existantes.
Il est ainsi proposé de préciser que les quatre derniers alinéas de l'article L. 160-17 relatifs aux principes de la contractualisation et de la rémunération sont applicables aux délégations données aux mutuelles et/ou aux groupements mutualistes en application de l’article L. 221-4.
Mme la présidente. Les amendements nos 239 rectifié bis et 223 rectifié, présentés par Mme Canayer, M. Mouiller et Mme Gruny, ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 301 rectifié ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le I de cet amendement tend à opérer une coordination qui paraît bienvenue à la commission.
Quant au II, il tend à supprimer par coordination le décret fixant les conditions permettant de faire évoluer les délégations en cours. Or ce décret a une portée plus large que celui qui est prévu à l’article L. 160-17, dont l’existence fonde la demande de suppression. À l’article L. 160-17, le décret prévoit la seule possibilité de mettre fin à la délégation tandis que le décret de l’alinéa 335 permet de faire évoluer les délégations en cours sans nécessairement y mettre fin
La commission émet donc un avis favorable sur le I et demande la suppression du II.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Permettez-moi de donner quelques explications. Contrairement aux habilitations dont disposent les mutuelles de fonctionnaires et les mutuelles d’étudiants, les délégations de gestion actuelles du code de la sécurité sociale ont un caractère non automatique et dépendent de la seule appréciation des conseils d’administration des caisses primaires.
L’article 39 du présent projet de loi maintient explicitement en vigueur sans limitation de durée les habilitations qui ont été accordées antérieurement à ce titre. En revanche, il ne sera plus possible pour les CPAM d’accorder à l’avenir de nouvelles habilitations en application de l’article L.211-4.
En réalité, le projet de loi ne fait qu’entériner une situation de fait puisque aucune habilitation n’a été accordée à ce titre depuis plus de trente ans, le nombre de mutuelles agréées dans ce cadre diminuant donc régulièrement.
En distinguant les mutuelles de l’article L.211-4 des autres mutuelles et organismes délégataires, la rédaction actuelle du projet de loi traduit des situations très différentes, tant en droit qu’au regard de leurs perspectives d’évolution respectives.
L’amendement n° 301 rectifié conduit à ne pas tenir compte de ces réalités, et le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Arnel, souhaitez-vous modifier l’amendement n° 301 rectifié dans le sens suggéré par M. le rapporteur général ?
M. Guillaume Arnell. Plutôt que de voir l’ensemble de l’amendement repoussé, je préfère rectifier ce dernier en supprimant le paragraphe II.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 301 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall, et ainsi libellé :
Alinéa 334
Remplacer les mots :
Le dernier alinéa de l'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale s'applique
par les mots :
Les quatre derniers alinéas de l'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale s'appliquent
Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ainsi rectifié?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 301 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l'amendement.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'article.
Mme Laurence Cohen. Nous avons entamé l’examen de l’article 39 hier soir tardivement.
Alors que l’on assiste depuis des années à une remise en cause très forte de notre système de protection sociale, les membres de la Haute Assemblée, avec des réponses évidemment contradictoires puisque nous ne sommes pas d’accord entre nous sur le fond, cherchent à aménager le remboursement aux assurés des soins de santé en posant çà et là des « rustines », pour reprendre un terme employé par Jacqueline Fraysse à l'Assemblée nationale.
Les propositions avancées ce matin au sujet des mutuelles sont du même ordre : on essaie d’aménager tant bien que mal un système de protection sociale qui continue de tendre vers une privatisation du système de santé, et ce sans répondre aucunement aux questions tant du renoncement aux soins que du reste à charge pour les patients, y compris les plus fragiles d’entre eux, alors que ces points devraient guider notre réflexion, notamment sur cet article.
Nous le savons pertinemment les uns et les autres, les questions relatives au remboursement des soins – les soins bucco-dentaires, les lunettes, les prothèses auditives – ne sont pas réglées ici, y compris par la CMU, la couverture maladie universelle, la CMU-C, la CMU complémentaire, et l’aide au paiement d’une complémentaire santé.
On répond donc d’une manière bancale à un problème qui, en fait, pourrait être réglé une bonne fois pour toutes avec une prise en charge à 100 % couvrant tout le panier de soins. Ce mécanisme pourrait concerner les plus fragiles, dans un premier temps, pour s’étendre ensuite à tous les autres patients. Il pourrait également prendre en compte les plus jeunes. Or ce n’est pas réglé.
C’est pourquoi les membres du groupe CRC interviennent à chaque fois sur ce sujet. Mais les réponses diverses qui sont apportées ne sont pas de nature à traiter au fond les besoins en termes de soins. C’est pourquoi nous ne voterons pas l’article 39.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 39, modifié.
M. Jean Desessard. Je vote contre !
(L'article 39 est adopté.)
Article additionnel après l'article 39
Mme la présidente. L'amendement n° 438, présenté par Mme Cohen, M. Bosino, Mme David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 39
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur la reconnaissance de la sclérose en plaque au titre des maladies ouvrant droit aux congés de longue durée pour les fonctionnaires.
Ce rapport détaille le nombre potentiel de fonctionnaires concernés par cette mesure ainsi que l’impact potentiel du remplacement de la poliomyélite par la sclérose en plaques dans la liste des maladies ouvrant droit aux congés de longue durée.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Aujourd’hui, seules cinq pathologies donnent accès au congé de longue durée pour les agents de la fonction publique : le déficit immunitaire grave et acquis, le VIH, le virus de l’immunodéficience humaine, les maladies mentales, les affections cancéreuses, la tuberculose et la poliomyélite.
La sclérose en plaques ne figure pas dans cette liste. Or cette maladie neurologique grave, chronique et invalidante se déclare souvent chez les personnes jeunes, entre vingt et quarante ans, et elle est dégénérative. Ainsi, au bout de quinze ans, 50 % des malades ont des difficultés pour marcher et, au bout de trente ans, la moitié d’entre eux devront utiliser un fauteuil roulant. Les symptômes physiques et cognitifs empêchent souvent le malade de poursuivre une activité professionnelle dans de bonnes conditions.
Après la découverte de la maladie, c’est toute la vie et la carrière professionnelle de ces jeunes patients – trente-trois ans en moyenne au moment de l’annonce de la maladie – qui doivent être recomposées. Les malades ont besoin d’une protection et d’une sécurité que le congé de longue maladie ne garantit pas suffisamment.
Avec le congé de longue maladie, les malades ne peuvent bénéficier que de trois ans de congé, dont une année seulement à plein traitement et deux ans à mi-traitement. Le congé de longue durée permettrait aux agents de la fonction publique atteints de la sclérose en plaques de bénéficier d’un congé de cinq ans, dont deux ans à plein traitement. De plus, ces périodes seraient comptabilisées dans le calcul des droits à la retraite.
Selon nous, la reconnaissance du droit au congé de longue durée pour les fonctionnaires atteints de sclérose en plaques permettrait de corriger une inégalité au niveau de la prise en charge socioprofessionnelle par rapport à d’autres affections médicales plus rares et moins invalidantes.
C’est pourquoi nous souhaitons qu’un rapport portant sur la reconnaissance de la sclérose en plaques au titre des maladies ouvrant droit aux congés de longue durée pour les fonctionnaires soit remis au Parlement. Ce rapport détaillera l’impact potentiel du remplacement de la poliomyélite par la sclérose en plaques dans la liste des pathologies retenues.
En effet, la poliomyélite figure dans la liste des maladies ouvrant droit aux congés de longue durée bien qu’elle ait été déclarée éliminée en Europe par l’Organisation mondiale de la santé en 2002. Or tel n’est pas le cas de la sclérose en plaques, qui concernait pourtant, en 2014, d’après l’assurance maladie, 80 000 patients.
Je le sais, la commission des affaires sociales n’est pas favorable à la remise de rapports. Mais celui que nous demandons par l’amendement n° 438 vise véritablement à apporter une meilleure connaissance et une meilleure compréhension de l’épidémiologie du XXIe siècle. Cela pourrait permettre la mise en place d’une mesure de justice sociale et de solidarité.
C’est pourquoi je vous invite vraiment, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous le savez, ma chère collègue, nous ne sommes pas très favorables aux demandes de rapport…
Mme Annie David. Oui, je le sais, je l’ai dit !
Mme Laurence Cohen. On peut bouger parfois !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à demander un rapport sur l’admission, au titre des maladies ouvrant droit aux congés de longue durée, des fonctionnaires atteints d’une sclérose en plaques.
Je dois humblement l’avouer, je ne savais pas que se posait un problème particulier pour les fonctionnaires. Il s’agit incontestablement d’un sujet d’une grande importance. C’est pourquoi la commission aimerait connaître l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Permettez-moi d’apporter quelques précisions sur le congé de longue durée.
Ce congé, qui est accordé lorsque l’agent est atteint de l’une des cinq maladies que vous avez citées, madame la sénatrice – la tuberculose, les maladies mentales, le cancer, la poliomyélite ou le déficit immunitaire grave acquis –, dure jusqu’à cinq ans, dont trois ans à plein traitement et deux ans à demi-traitement. Il s’agit là d’une garantie statutaire supplémentaire par rapport au droit commun des assurés du régime général.
La notion de congé de longue durée et celle d’affection de longue durée, que l’on connaît mieux, sont distinctes. Les fonctionnaires peuvent tout à fait bénéficier de ces deux dispositifs liés à la reconnaissance d’affections de longue durée.
Le Gouvernement a engagé avec les organisations syndicales un cycle de concertations portant à la fois sur la santé et sur la sécurité au travail : ce cycle traitera, notamment, de ces questions.
Lors de la création du congé de longue durée, qui date de 1984, me semble-t-il, seuls cinq types de maladie ont été retenus. Pourquoi ne pas intégrer la sclérose en plaques ? Mais dans ce cas, pourquoi ne pas intégrer d’autres maladies chroniques ? Pourquoi demander un rapport spécifique sur l’opportunité d’intégrer dans le dispositif la sclérose en plaques, alors que d’autres maladies chroniques peuvent être aussi fréquentes et aussi invalidantes ?
Tel est l’objet des négociations qui ont été engagées avec les organisations syndicales. Sur le fond, je ne suis pas contre le fait de discuter à nouveau des maladies ouvrant droit à ce congé de longue durée, mais, je le répète, le rapport que vous demandez est uniquement ciblé sur la sclérose en plaques, ce qui paraît quelque peu réducteur. Remettons-nous-en plutôt, madame la sénatrice, aux négociations avec les partenaires sociaux !
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est, en définitive, l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. J’ai bien entendu l’argumentation de notre collègue Annie David sur la sclérose en plaques. Cette affection chronique de longue durée, qui est particulière, pourrait être considérée comme la remplaçante – malheureusement, bien évidemment ! – de la poliomyélite, même si les origines de la maladie et l’épidémiologie sont différentes.
En effet, c’est une affection de longue durée dont, on le sait, on ne guérit pas, même si la maladie peut être stabilisée. Au fil des années, cette maladie devient de plus en plus invalidante sur le plan tant physique que psychologique d’ailleurs.
L’attention portée à cette maladie n’est pas anodine. Les cinq maladies retenues dans la liste ouvrant droit aux congés de longue durée recouvrent un ensemble de pathologies très vaste. Il importe d’accorder une importance toute particulière à la sclérose en plaques, une maladie particulièrement fréquente dans notre région d’ailleurs – je ne sais comment cela s’explique, mais là n’est pas le sujet.
Cette maladie extrêmement invalidante, je le répète,…
Mme Catherine Génisson. … éloigne souvent les personnes qui en sont atteintes de leur travail et de leur famille et crée un isolement, avec une fin qui se traduit parfois malheureusement par le suicide. Il convient donc de faire un focus particulier sur cette pathologie, notamment chez les agents de la fonction publique.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.
M. Gérard Roche. La sclérose en plaques est une affection très particulière dans la mesure où l’évolution de la maladie est variable d’un patient à l’autre : la maladie peut évoluer lentement chez certains, alors qu’elle se caractérise par des poussées chez d’autres, avec des périodes de rémission qui peuvent durer plusieurs années. S’agissant de la sclérose en plaques, la notion de maladie de longue durée ne peut donc être appréciée que rétrospectivement. Ce n’est par conséquent pas facile.
Quoi qu’il en soit, je voterai cet amendement compte tenu de la discordance dans la reconnaissance de la maladie entre le régime général de la sécurité sociale et celui de la fonction publique.