M. Richard Yung. En ce qui concerne la question du remboursement, je comprends bien sûr ce que dit Mme Bricq. Je n’ai d’ailleurs pas déposé d’amendement à ce sujet, j’ai simplement dit que, pour les raisons que j’ai données, je regrettais cette situation.
S’agissant de l’amendement n° 97, que j’ai déposé, je veux souligner deux points. Premièrement, nous n’inventons rien, nous reprenons exactement la mécanique adoptée par le gouvernement Jospin en 2001 concernant l’application de la CSG sur les revenus du travail ; pourquoi ce qui est valable pour les revenus du travail ne le serait-il pas pour les revenus du capital ? J’attends encore une explication…
Secondement, nous ne demandons pas de traitement spécifique, privilégié, pour les Français de l’étranger. On a parfois l’impression qu’on nous reproche de vouloir exonérer les Français de l’étranger de payer. Pas du tout ! Nous affirmons que tout le monde doit être traité de la même façon, sous réserve d’être affilié à la sécurité sociale française. Voilà le critère, et il est juste puisqu’il s’applique que l’on soit en France ou à l’étranger. Il n’existe donc pas traitement dérogatoire ou particulier demandé pour les Français de l’étranger.
Mme la présidente. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Je serai court, madame la présidente, parce que M. Vasselle a dit exactement ce que je voulais préciser mais il l’a fait beaucoup mieux que moi… (Sourires.) J’approuve donc ce qu’il a dit et je m’arrêterai là.
Par ailleurs, je partage également certains arguments de MM. Leconte et Yung. Je suis d’accord avec vous, mes chers collègues ; néanmoins, je veux bien instaurer l’égalité pour les Français de l’étranger, mais votre amendement tend à faire bénéficier de la sécurité sociale des personnes qui en ont déjà une et, en contrepartie, à leur faire payer la CSG.
Voilà pourquoi je voterai contre cet amendement de M. Yung, à regret ; je soutiendrai le nôtre qui paraît plus justifié.
M. Alain Gournac. Qui est meilleur !
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Je veux répondre à Mme la ministre sur un point. Elle dit que les informations relatives au remboursement sont disponibles sur le site internet de la DGFIP. Mais, justement, comment nos concitoyens concernés sont-ils au courant que cette décision a été prise et que le site internet a été mis à jour ?
En revanche, vous savez réclamer la CSG à des personnes qui ne doivent plus l’acquitter, ce qui est quand même assez extraordinaire !
Monsieur Leconte, madame Lepage, monsieur Yung, estimez-vous que les contribuables résidant en dehors de l’Espace économique européen diffèrent de ceux qui vivent en son sein ? Vous balayez cette question d’un revers de main ! Le système que vous défendez oblige les Français résidant en Australie ou aux États-Unis à payer localement de l’impôt sur la CSG qu’ils ont acquittée en France et cela ne vous empêche pas de vouloir le conserver, et même d’en être fiers – les intéressés apprécieront ! Dans le même temps, le Gouvernement vient de décider d’exonérer certains contribuables de taxe foncière ou de taxe d’habitation. Je peux vous dire que, sur le terrain, cette application du principe « deux poids, deux mesures » est diversement appréciée !
Monsieur Yung, je ne voterai pas votre amendement, car, comme l’a très bien dit mon collègue Robert del Picchia, une affiliation simultanée à deux systèmes de sécurité sociale compliquerait encore plus les choses.
Bien évidemment, nous soutiendrons l’amendement de notre collègue Robert del Picchia, qui est très proche du nôtre. Nous nous réjouirions qu’il soit adopté !
M. Robert del Picchia. Merci !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je vous rappelle que, tout à l’heure, nous n’avons pas pris de position : nous avons dit que nous écouterions le Gouvernement et les différents orateurs qui interviendraient pour explication de vote. Je dois avouer que je n’ai toujours pas d’avis tranché sur la question, qui est loin d’être évidente.
Toutefois, les réponses qui ont été apportées par le Gouvernement ne me paraissent pas sécuriser fondamentalement le dispositif pour les non-résidents. Dès lors, mes chers collègues, je vous invite, au nom de la commission, à faire preuve de sagesse dans le vote de ces amendements, qui soulèvent un problème de fond.
J’ajoute que je ne voudrais pas que notre État soit à nouveau condamné ! (M. Robert del Picchia opine.) Or je n’ai pas le sentiment que l’article proposé par le Gouvernement tire véritablement les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne.
M. Alain Gournac. Eh oui !
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour explication de vote.
Mme Jacky Deromedi. Qu’ils soient ou non assujettis à la sécurité sociale française, les Français de l’étranger restent des Français.
En tout état de cause, ceux qui y sont assujettis sont souvent obligés de contracter des assurances personnelles locales, parce que la sécurité sociale ne leur rembourse pas la totalité des frais qu’ils engagent. Il me semble donc que nous devons soutenir l’amendement de M. del Picchia, qui est le plus complet.
M. Alain Gournac. Oui !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 97.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que la commission s’en remet à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 46 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Pour l’adoption | 4 |
Contre | 329 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Avant de mettre aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis, sur lequel j’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains, je donne la parole à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote. (M. Robert del Picchia proteste.)
Mme Nicole Bricq. J’attire l’attention de nos collègues sur la radicalité de l’amendement de M. del Picchia, qui vise à supprimer purement et simplement le dispositif de prélèvement.
Dans son rapport, le rapporteur général a eu l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’il pouvait y avoir une contradiction entre le droit européen et le droit français qui, depuis la création de la CSG, en 1990, a toujours considéré celle-ci comme relevant de la catégorie des « impositions de toutes natures » – cela ne date donc pas de l’arrêt de Ruyter.
Mme Deromedi nous a rappelé que les Français vivant à l’étranger sont des Français à part entière. Je pourrais cependant lui objecter que, à la limite, le vote qu’elle s’apprête à émettre est contraire aux intérêts de la France ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Monsieur Cadic, vous dites que vous avez soulevé depuis longtemps les risques juridiques liés à une telle mesure. Je veux vous rappeler que, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités en 2012, nous avons dû tirer les conséquences d’un arrêt rendu par la juridiction européenne sur les organismes de placements collectifs en valeurs mobilières, les OPCVM. Cette décision nous a coûté 4 milliards d’euros.
M. Olivier Cadic. Justement !
Mme Nicole Bricq. La France s’en est acquittée, au nom de la continuité de l’État.
Alors, ne venez pas nous dire que nous n’aimons pas les Français qui vivent à l’étranger ! Surtout pas à moi, madame Deromedi : vous savez que je les ai toujours défendus, partout où je suis passée… et même là où je ne suis pas passée ! (Rires.) Je ne peux accepter ce reproche : c’est le pétard que vous nous avez laissé qui a explosé !
Mme la présidente. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Si vous le permettez, madame la présidente, je m’étonne que notre collègue Nicole Bricq ait pu s’exprimer alors que le vote de l’amendement avait commencé. (Mme Nicole Bricq le conteste.)
Mme la présidente. Monsieur del Picchia, le scrutin n’était pas encore ouvert lorsque j’ai donné la parole à Mme Bricq !
M. Robert del Picchia. Au temps pour moi, madame la présidente ! Je vous prie d’accepter mes excuses.
Étant un profond démocrate, j’attendrai le résultat du vote. Que ceux qui souhaitent s’exprimer auparavant puissent le faire ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
Mme Éliane Assassi. C’est la moindre des choses !
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Madame Bricq, l’arrêt relatif aux OPCVM date de mai 2012. Or, au mois de juillet 2012, vous avez pris une disposition strictement identique à celle qui avait été censurée, en décidant de prélever la CSG sur les revenus immobiliers des non-résidents. J’avais d’ailleurs écrit à Mme Conway-Mouret sur le sujet, lui rappelant que les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Les autres pays ne considèrent pas la CSG comme un impôt. Relisez les conventions fiscales bilatérales ! Relisez, par exemple, celle qui nous lie au Royaume-Uni. De fait, les Français qui y résident vont payer de l’impôt sur la CSG. Il faudrait vraiment que tout le monde se le mette dans la tête ! Cela a été dit et répété depuis 1991 et les demandes en ce sens sont récurrentes. L’État doit maintenant en prendre conscience. La situation n’a que trop duré.
Au reste, si vous voulez imposer les non-résidents, créez de vrais impôts ! Passer par la CSG ne fonctionne pas et met tout le monde dans l’embarras.
Vous accusez ceux qui soutiennent cet amendement de ne pas servir la France, mais nous ne faisons que veiller au respect du droit européen. C’est bien la moindre des choses quand on siège dans cet hémicycle ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour explication de vote.
Mme Jacky Deromedi. Madame Bricq, nous défendons vraiment les Français de l’étranger.
J’ignore le montant du déficit que vous avez trouvé quand vous êtes arrivée aux responsabilités. Ce qui est certain, c’est que les Français de l’étranger qui ne sont pas affiliés à la sécurité sociale ne coûtent rien à la France !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Madame Bricq, on ne peut vous laisser affirmer que la CSG relève des « impositions de toutes natures » au regard du droit français et faire fi de l’analyse qu’en fait l’Europe, pour laquelle cette contribution équivaut à une cotisation sociale.
M. Alain Gournac. En effet !
M. Alain Vasselle. Pour le coup, si vous ne voulez pas tenir compte de cette interprétation, la France sera condamnée et devra payer une indemnité !
Vous déplorez d’avoir eu à débourser 4 milliards d’euros en 2012. Vous risquez d’avoir à acquitter une somme équivalente si le dispositif proposé par M. del Picchia n’est pas retenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cadic et Jean-Marc Gabouty applaudissent également.)
Mme Nicole Bricq. On verra !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que la commission s’en remet à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 47 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 189 |
Contre | 152 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos 89 rectifié ter et 251 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 48 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 3 rectifié n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 374.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 368, présenté par M. Daudigny, Mmes Bricq, Campion, Claireaux, Emery-Dumas, Féret, Génisson, Meunier, Riocreux, Schillinger et Yonnet, MM. Caffet, Durain, Godefroy, Jeansannetas, Labazée, Tourenne, Vergoz et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 101
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Il est opéré, au bénéfice du régime d’assurance vieillesse complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics, un prélèvement forfaitaire sur le montant global des recettes mises en réserve mentionnées au III de l’article L. 135-3 du code de la sécurité sociale. Un décret fixe :
1° Les modalités de calcul de ce prélèvement, qui représente 50 % du montant actualisé des prestations dues par le régime d’assurance vieillesse complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics, arrêté au 31 décembre 2015 ;
2° Le calendrier des versements afférents, qui interviennent avant le 31 décembre 2019.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour le fonds de solidarité vieillesse du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Le régime complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics, le RCEBTP, est un régime d’assurance vieillesse complémentaire fermé en 1998 et géré par la Caisse nationale du régime social des indépendants.
Jusqu’en 2015, l’unique ressource de ce régime provenait de l’attribution d’une fraction du produit de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, la C3S, sur le fondement de l’article D. 651-17 du code de la sécurité sociale, désormais abrogé.
Dans ce contexte, le RCEBTP ne dispose plus de ressources pérennes. Faute d’intervention de notre part, son financement reposerait intégralement sur les ressources des régimes complémentaires de retraite des artisans et commerçants, pour près de 30 millions d’euros la première année.
Le présent amendement a pour objet de tirer la conséquence de la suppression à l’horizon de 2017 de la C3S et vise à sécuriser la situation financière du régime en opérant, au profit du RCEBTP, un prélèvement exceptionnel sur les sommes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, pour contribuer à la couverture de 50 % au moins du montant actualisé des droits à servir.
Dans un second temps, il serait opportun que le régime complémentaire du RSI, lequel dispose par ailleurs de réserves importantes d’un montant de 13 milliards d’euros, contribue également au financement solidaire des droits de ce régime fermé en 1998. En effet, le RSI bénéficie depuis cette date des cotisations du RCEBTP, sans qu’une soulte lui ait été versée à l’époque, alors que les principes de répartition qui guident ces deux régimes l’auraient rendue nécessaire.
Cette opération d’adossement financier ne modifie pas les prestations offertes aux 13 500 retraités et 6 500 adhérents non retraités du régime, qui demeurent régies par les dispositions en vigueur, mais elle vise à les sécuriser. Les assurés resteront affiliés au régime complémentaire, lequel continuera à verser leur pension.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission des affaires sociales émet des réserves sur l’idée de ponctionner la section 3 du FSV, qui faisait pour une fois l’objet d’une gestion prudente, même si l’on nous dit que la section est suffisante pour cet objet. Pourquoi ne pas la déboucler, dans ce cas, pour financer le minimum contributif ?
La commission est également réticente à l’idée de financer ainsi un régime complémentaire de retraite, qui ne relève pas a priori du champ du PLFSS.
Même si nous sommes conscients de la difficulté liée à la suppression de la C3S pour le régime complémentaire du BTP, toutes ces interrogations nous ont cependant conduits à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Afin que celui-ci puisse être adopté dans de bonnes conditions, je lève d’ores et déjà le gage.
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° 368 rectifié.
Veuillez poursuivre, madame la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. M. Daudigny propose d’affecter au régime complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics un prélèvement exceptionnel sur les recettes mises en réserve du Fonds de solidarité vieillesse. Cette solution vise à pallier la situation délicate dans laquelle va se trouver ce régime complémentaire, qui était jusque-là financé par l’affectation d’une fraction du produit de la C3S.
Or – et je n’y reviens pas en détail puisque vous l’avez rappelé – il se trouve que la décision a été prise de supprimer progressivement la C3S, ce qui prive le RCEBTP d’une source de financement pérenne. Votre proposition semble aller dans le bon sens pour traiter ce problème très concret de financement.
Monsieur le rapporteur général, s’abstenir de voter cet amendement reviendrait à priver de financement ce régime. J’aurais mieux compris que vous choisissiez de voter l’amendement, en dépit de vos interrogations et de votre manque d’enthousiasme à l’égard de cette proposition de M. Daudigny, pour ne pas prendre le risque de laisser ce régime complémentaire sans ressources. Bien évidemment, pour la suite, vous auriez pu demander qu’un travail soit réalisé au cours de l’année pour faire le point sur la situation et étudier d’autres pistes.
En revanche, je ne comprends pas que vous appeliez à voter contre l’amendement, tout en reconnaissant qu’il y a un problème. Votre position me paraît dangereuse, dans la mesure où vous allez priver de financement les retraites complémentaires des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics.
À mon sens, ce n’est pas un très bon message que la majorité sénatoriale risque d’envoyer à ces personnes.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, je suis d’accord avec vous pour dire qu’il y a un problème de financement ; mais la réponse est-elle appropriée ? Je ne le crois pas.
Mme Nicole Bricq. Cela règle le problème de financement !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si on pioche çà et là pour régler tous les problèmes de financement, au mépris, finalement, des règles régissant les lois de financement de la sécurité sociale…
M. Jean Desessard. Cela arrive !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est vrai, monsieur Desessard, mais nous n’avons de cesse d’essayer de mettre de l’ordre dans ce domaine.
J’ai tout à fait conscience du problème soulevé, mais je rappelle tout de même que l’adoption de cet amendement nous conduirait à prélever une somme sur le FSV pour l’attribuer à un régime de retraite complémentaire. Est-ce bien là le rôle du FSV ? Maintenant, si vous me dites que la solution est temporaire, je peux le comprendre, mais cela n’apparaît nulle part dans l’amendement.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En êtes-vous sûre ? Dans ce cas, apportez-moi la précision, ce qui sera de nature à corriger quelque peu l’avis non pas du rapporteur général et de la commission, mais de l’ensemble du Sénat.
Néanmoins, il me semble que nous procédons là de façon un peu cavalière.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas un cavalier ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je dois dire que je suis dubitative devant les justifications apportées à l’appui de cet amendement, notamment par le Gouvernement. Mme la ministre nous explique que la suppression de la C3S va avoir des conséquences notamment pour le RCEBTP, et qu’il est donc indispensable d’effectuer un prélèvement sur le FSV. Or la responsabilité d’un gouvernement ne consiste-t-elle pas à anticiper les difficultés pouvant résulter d’une mesure qu’il s’apprête à prendre ?
Pour sa part, le groupe CRC est opposé à la suppression, même progressive, de la C3S. En effet, une fois de plus, les entreprises, notamment les plus grandes, seront les principales bénéficiaires. Nous avons dit qu’il s’agissait d’une mauvaise mesure et nous avons proposé d’autres solutions, qui n’ont pas été approuvées jusqu’à présent.
En tout cas, il ressort de cette affaire une impression non pas de bricolage, car ce terme n’exprime pas le fond de notre pensée, mais d’amateurisme. Tout d’un coup, on laisse passer des amendements qui visent à déshabiller Pierre pour habiller Paul, et ainsi de suite. Enfin, madame la ministre, nous discutons du budget de la sécurité sociale ! Nous essayons de proposer des recettes pérennes, mais vous faites preuve d’un certain entêtement à vouloir préserver les grandes entreprises de toute taxation. Toute votre politique peut se résumer ainsi, que vous soyez d’accord ou non.
Vous nous dites que la majorité du Sénat va engager sa responsabilité dans cette affaire ; mais la première responsabilité n’incombe-t-elle pas au Gouvernement ? Que chacun pèse bien les conséquences de ses décisions !
Vous nous déclarez également qu’il convient de prendre son temps pour étudier d’autres pistes. Mes chers collègues, à quoi sert la représentation parlementaire dans ce cas ? Nous avons fait des propositions et nous continuons à en faire, mais elles ne plaisent pas, et un comité « truc-bidule » va être chargé d’explorer d’autres voies pour faire des propositions.
Nous sommes en désaccord total tant avec la philosophie de l’amendement qu’avec la façon dont il est défendu, notamment par le Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je veux apporter des précisions à l’intention de Mme Cohen et de M. le rapporteur général.
Mme Cohen, qui est opposée à la politique consistant à réduire, puis à supprimer, la C3S est, par conséquent, logiquement opposée à l’amendement n° 368 rectifié. Cela, je l’entends très bien. Mais ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, madame Cohen ! Je n’ai pas dit que nous allions créer un comité ! Ce que j’ai dit, c’est que j’aurais compris la position de M. le rapporteur général s’il avait proposé, en guise de solution d’attente, de créer un comité pour réfléchir au financement de ce régime complémentaire de retraite que nous ne pouvons pas laisser sans ressources. Telle n’est pas la proposition du Gouvernement, qui émet un avis favorable sur l’amendement n° 368 rectifié, défendu par M. Daudigny, lequel ne propose pas davantage la création d’un comité.
Monsieur le rapporteur général, le régime complémentaire en question est en extinction, puisqu’il est fermé depuis plus de quinze ans. Il s’agit donc bien d’assurer un financement temporaire en une fois, sous la forme d’une soulte dont le montant est prédéfini par les termes de l’amendement. Faisant l’objet d’un versement unique, elle doit permettre de compenser la perte de recettes provoquée par la suppression de la C3S. Je ne peux donc pas laisser dire que nous introduisons un mécanisme de financement pérenne et régulier dans chaque loi de financement de la sécurité sociale ! Ce que nous proposons, c’est d’introduire un financement forfaitaire et unique, qui viendra compenser les pertes de recettes supportées par ce régime.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Cet amendement démontre l’amateurisme – excusez-moi du terme – dont a fait preuve le Gouvernement lors de la préparation de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale !
Mme Nicole Bricq. Cela a déjà été dit !
M. Alain Vasselle. En effet, personne n’est dupe sur l’origine de cet amendement : tout le monde sait que c’est le Gouvernement qui en est l’instigateur, même s’il a été déposé par M. Daudigny, de surcroît ancien rapporteur général de la commission des affaires sociales – il doit s’interroger dans son for intérieur sur la pertinence d’une telle initiative !
Les observations de Mme Cohen ne sont pas dénuées de pertinence : le Gouvernement, qui a décidé de supprimer la C3S dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, n’a pas pensé aux conséquences néfastes de cette suppression pour le régime complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics. Sans doute s’en est-il aperçu un peu tard, après l’examen du texte par l’Assemblée nationale. Il a alors eu l’idée de « rattraper le coup » au Sénat, en faisant déposer un amendement par le groupe socialiste afin d’éviter au régime complémentaire de se trouver en difficulté.
Qu’il me soit quand même permis de rappeler, mes chers collègues, que lorsque nous avons créé le Fonds de solidarité vieillesse, ce dernier n’avait nullement pour vocation de financer des régimes complémentaires ! Son unique raison d’être consistait à compenser l’incapacité dans laquelle se trouvent un certain nombre de nos concitoyens de payer des cotisations leur ouvrant des droits à la retraite. Or, je m’en rends compte depuis quelque temps – ce n’est d’ailleurs pas l’apanage de cette majorité, puisque la précédente a usé du même artifice –, on utilise à toutes fins le Fonds de solidarité vieillesse pour essayer d’arranger des situations du moment, le transformant en un dispositif complexe de tuyauteries enchevêtrées. Faute de lisibilité et de cohérence, le dispositif devient complètement incompréhensible pour nos concitoyens !
Le rapporteur général avait donc, à mon sens, des raisons tout à fait fondées pour dire que cet amendement soulevait un certain nombre d’interrogations.
Nous avons évidemment noté, madame la ministre, que ce dispositif aurait un caractère exceptionnel. Je vous ai bien entendue, mais nous savons que le FSV est utilisé en toutes occasions. Et nous savons aussi que, s’il apparaît demain que cela ne suffit pas, ce qui a aujourd’hui un caractère exceptionnel deviendra pérenne. C’est la raison pour laquelle il me paraîtrait sage de ne pas voter cet amendement.