Mme Nicole Bricq. Ne prétendez pas, vous, que votre proposition ne coûterait rien !
M. Jean-Noël Cardoux. Le COPIESAS s’est montré tout à fait favorable à un tel élargissement de l’application du taux réduit de forfait social dans un rapport de 2014, et je crois savoir qu’il a réitéré son soutien à cette mesure lors d’une récente réunion. Dieu sait si je suis un adversaire de ces comités Théodule et autres structures qui se réunissent sans fin, accaparant le temps des élus ! Si, en plus, le Gouvernement ne suit pas les avis qu’ils émettent, on se demande vraiment à quoi ils peuvent servir…
M. Alain Gournac. En effet !
M. Jean-Noël Cardoux. Je constate, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement nous refuse tout.
Voilà peu, j’ai proposé par voie d’amendement au projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement que le Haut Conseil de l’âge puisse mener une réflexion sur la mise en place d’une démarche assurantielle privée en matière de retraites ; c’est contre l’avis du Gouvernement que le Sénat l’a adopté. Cet après-midi, nous proposons de favoriser une démarche collective visant à améliorer les retraites futures des salariés actuels, lesquels ont des raisons de s’inquiéter compte tenu des échéances : encore un refus !
Certes, monsieur le secrétaire d’État, il n’y a plus d’argent dans les caisses : raison de plus pour faire preuve d’audace ! Comme l’a parfaitement expliqué M. le rapporteur général, la mise en œuvre de la mesure que nous proposons provoquera une émulation et incitera de nouvelles entreprises à entrer dans les dispositifs de l’épargne salariale, de sorte que l’État bénéficiera à terme de ressources supplémentaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Nous nous souvenons tous des difficultés rencontrées par M. Macron, dans cet hémicycle, pour faire admettre par son propre camp l’intérêt de l’épargne salariale, pour les entreprises comme pour les salariés. Ce fut un très grand moment de la vie parlementaire !
Vous vous étiez finalement laissé convaincre pour les entreprises de cinquante salariés au moins, mais pas pour les autres. Pourtant, les entreprises de moins de cinquante salariés aspirent à se développer, et l’épargne salariale n’est pas un outil inutile de ce point de vue : elle représente aussi un moyen pour les entreprises de se procurer des fonds propres.
Je sais très bien que l’association du capital et du travail est une notion qui a connu moult vicissitudes au cours de l’histoire… (M. Jean-Pierre Bosino rit.) Toujours est-il que, aujourd’hui, opérer une distinction entre les entreprises selon qu’elles comptent plus ou moins de cinquante salariés n’a pas de sens. Si l’on veut aider les PME et les PMI, il faut leur donner les moyens de se doter de fonds propres et leur offrir un dispositif attractif.
Même à l’occasion d’un débat budgétaire, il n’est pas inutile de faire un peu d’économie…
Mme Nicole Bricq. Nous ne faisons que cela !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous créez de la confusion en affirmant que la loi opère une distinction entre les entreprises selon qu’elles comptent plus ou moins de cinquante salariés : ce n’est pas du tout cela !
La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a abaissé de 20 % à 8 % pendant six ans le taux du forfait social pour les entreprises de moins de cinquante salariés qui concluront pour la première fois un accord d’intéressement ou de participation. L’amendement dont nous débattons vise à étendre le champ de cette mesure, pour les mêmes entreprises, aux versements effectués par les employeurs. Quant aux entreprises comptant au moins cinquante salariés, elles sont assujetties au forfait social au taux de 20 % et ne sont donc pas concernées par le dispositif de l’amendement.
Je répète que le Gouvernement n’est pas favorable à ce dernier, compte tenu des assouplissements qui ont déjà été adoptés sur son initiative.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11.
L’amendement n° 111 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Béchu et Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu, Darnaud et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi, Estrosi Sassone et Gatel, MM. Genest et Gilles, Mmes Imbert et Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Lenoir, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Perrin, Raison, Savary, Trillard et Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 243-6-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 243-6-3. – Tout cotisant, toute organisation professionnelle d’employeurs ou de salariés agissant dans le cadre d’une branche professionnelle, tout ordre professionnel bénéficiant d’une existence légale au niveau national, a la faculté de solliciter de l’organisme de recouvrement dont il dépend son interprétation sur une situation de fait au regard des dispositions législatives et réglementaires relatives aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale.
« La demande doit être faite en lettre recommandée. Elle doit contenir l’identité du demandeur, la disposition légale visée ainsi que la présentation écrite, précise et complète de la situation de fait.
« Tant qu’aucune décision n’a été prise, la demande doit être complétée par tout élément nouveau susceptible de concerner la situation de l’intéressé.
« La décision est communiquée au demandeur dans un délai de deux mois à compter de l’envoi de la demande rédigée conformément au deuxième alinéa. Elle indique les voies de recours.
« Une publicité des différentes décisions rendues par les organismes est instaurée selon des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« La décision prise lie pour l’avenir l’organisme de recouvrement, sauf en cas de modification des dispositions légales visées ou si la situation décrite a été substantiellement modifiée ou encore si les informations données étaient erronées.
« Aucun redressement ne peut être appliqué à un cotisant de bonne foi qui a interrogé un organisme de recouvrement dans les conditions prévues par le deuxième alinéa et auquel il n’a pas été apporté de réponse dans le délai requis.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Le présent amendement vise à simplifier la procédure du rescrit, par laquelle un cotisant peut demander à une URSSAF son interprétation d’une situation de fait. Il précise en particulier que cette interprétation liera l’organisme de recouvrement et qu’aucun redressement ne pourra être appliqué en cas d’absence de réponse dans le délai requis.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement et les suivants, relatifs aux relations entre les entreprises et les URSSAF, s’inspirent largement des propositions du rapport établi par les députés Goua et Gérard. Or, quoique tout à fait intéressants, ces amendements ne relèvent pas, pour la majorité d’entre eux, du domaine de la loi, ni même de celui du règlement. D’autres ont d’ailleurs été déclarés irrecevables au titre de l’article 41 de la Constitution.
À la vérité, ces propositions relèvent de ce que l’on pourrait qualifier de bonnes pratiques. Les bonnes pratiques procèdent d’une interprétation intelligente des textes, qui ne complique pas la vie des entreprises de bonne foi tout en préservant la possibilité de sanctionner des comportements répréhensibles. Dans ces conditions, il a semblé difficile à la commission d’en faire la règle de droit. C’est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur la plupart des amendements restant en discussion qui visent à insérer un article additionnel après l’article 11. Elle est défavorable, en particulier, à l’amendement n° 111 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Tout le monde regrette qu’il soit encore peu recouru au rescrit social, parce qu’il constitue un élément important pour la sécurisation juridique des entreprises. C’est la raison pour laquelle la loi relative à la simplification de la vie des entreprises a habilité le Gouvernement à prendre une ordonnance, avant la fin de l’année, pour moderniser ce rescrit et en favoriser l’utilisation par les entreprises.
Je pense que cette ordonnance, qui est en cours de préparation, répondra à plusieurs de vos préoccupations, madame la sénatrice. Elle ira même plus loin, puisque les organisations syndicales pourront elles-mêmes formuler une demande de rescrit, ce qui contribuera à sécuriser les accords ou projets d’accord collectif.
Les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles, pourront mandater un tiers, tel qu’un expert-comptable ou un avocat, pour procéder à cette demande pour leur compte auprès des URSSAF.
En outre, la possibilité offerte aux entreprises d’opter pour une procédure dématérialisée plus souple permettra de simplifier la démarche. Les délais de réponse des URSSAF seront également réduits.
Au bénéfice de ces explications et de cet engagement, je vous demanderai, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement. L’ordonnance que j’ai évoquée sera prise avant la fin de l’année et devrait vous donner satisfaction.
Mme la présidente. Madame Gruny, l'amendement n° 111 rectifié est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Non, je le retire, madame la présidente, compte tenu de ce que M. le secrétaire d’État vient d’expliquer.
Les entreprises sont vraiment en attente d’une simplification. Si l’ordonnance annoncée ne leur donne pas satisfaction, je présenterai un nouvel amendement l’an prochain !
Mme la présidente. L'amendement n° 111 rectifié est retiré.
L'amendement n° 109 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Béchu et Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu, Darnaud et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi et Estrosi Sassone, MM. Genest et Gilles, Mmes Imbert et Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Lenoir, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Perrin, Raison, Savary, Trillard et Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 243-6-4 du code de la sécurité sociale, après les mots : « décisions explicites », sont insérés les mots : « ou implicites ».
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Nous proposons que le cotisant puisse se prévaloir non seulement des décisions explicites, mais aussi des décisions implicites d’une autre URSSAF dans le cas d’un changement d’organisme de recouvrement, comme il arrive parfois lors d’un déménagement d’entreprise ou d’une fusion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article L. 243-6-4 du code de la sécurité sociale, issu de la loi du 12 mai 2009, dispose que, « dans le cas d’un changement d’organisme de recouvrement lié à un changement d’implantation géographique », un cotisant « peut se prévaloir, auprès du nouvel organisme, des décisions explicites rendues par le précédent organisme dont il relevait, dès lors qu’il établit que sa situation de fait ou de droit » n’a pas changé.
Le présent amendement vise à étendre cette opposabilité aux décisions implicites, c’est-à-dire aux pratiques de l’entreprise qui ne sont pas remises en cause lors d’un contrôle.
Or si les décisions explicites sont motivées et circonstanciées, il n’est, en revanche, pas possible d’apprécier le champ d’une décision implicite. Il ne semble donc pas opportun de lier le nouvel organisme de recouvrement par les décisions prises ainsi par le précédent organisme.
La commission émettra un avis défavorable sur votre amendement, madame Gruny, si vous ne le retirez pas.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Gruny, l'amendement n° 109 rectifié est-il maintenu ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 109 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Mme la présidente. L'amendement n° 133 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, M. Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu, Darnaud et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi et Estrosi Sassone, MM. Genest et Gilles, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lenoir, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Perrin, Raison, Savary, Trillard et Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 243-11 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf dans le cas de travail dissimulé dûment prouvé, l’organisme de recouvrement fait parvenir un avis de contrôle à l'employeur ou au travailleur indépendant au moins quinze jours ouvrables avant la date de la première visite. »
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement a pour objet de prévoir l’envoi d’un avis de contrôle à l’employeur préalablement à la première visite de l’organisme de recouvrement, sauf en cas de travail dissimulé, bien évidemment. Cette mesure rejoint celles qui sont appliquées en matière fiscale et en matière d’assurance maladie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le présent amendement prévoit que l’organisme de recouvrement envoie un avis de contrôle préalablement à sa première visite, sauf en cas de travail dissimulé dûment prouvé. Or on voit mal comment le travail dissimulé pourrait être dûment prouvé par l’organisme de recouvrement avant la visite de l’entreprise. Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cette disposition est d’ordre réglementaire. En outre, elle figure déjà dans la charte du cotisant contrôlé.
Dans ces conditions, le Gouvernement vous demande, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Gruny, l'amendement n° 133 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme la présidente. L'amendement n° 133 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 104 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, MM. Béchu et Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi et Estrosi Sassone, M. Gilles, Mmes Imbert et Lamure, MM. P. Laurent, Lefèvre, Lenoir et Gremillet, Mme Gatel, MM. Darnaud, Genest, Masclet, Mayet et Mandelli, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Savary, Trillard, Vaspart, Gabouty, Perrin et Raison, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section 4 du chapitre 3 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 243-13-… ainsi rédigé :
« Art. L. 243-13-… – En cas de création ou de modification d’un nouveau dispositif ou de nouvelles obligations pour le cotisant ou encore de modification du système existant, et dès lors que l’erreur du cotisant a été commise de bonne foi dans l’année qui suit la mise en application desdits dispositifs ou obligations, aucun redressement n'est opéré pendant cette période si le redressement porte sur une somme inférieure à un montant fixé par décret. L’organisme de recouvrement adresse alors au cotisant ses observations en lui demandant de régulariser sa situation pour l’avenir et dans un délai restreint. Passé ce délai, le cotisant est informé qu’un redressement sera opéré. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. La plupart des redressements opérés par les URSSAF concernent des cotisants de bonne foi. Le présent amendement vise à prévoir l’instauration d’une période d’adaptation d’une année après l’adoption de nouvelles dispositions, pendant laquelle les entreprises ne pourraient faire l’objet de redressements dès lors qu’elles sont de bonne foi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si cet amendement était adopté, l’organisme de recouvrement ne pourrait plus mettre en œuvre de procédure de redressement à l’encontre des cotisants de bonne foi pendant l’année suivant une évolution de la législation ou de la réglementation relative aux cotisations sociales.
Le champ des évolutions visées est très large, puisqu’il couvre tout dispositif créé ou modifié, toute nouvelle obligation pour le cotisant ou toute modification de l’existant. L’adoption d’une telle disposition conduirait à priver d’effet toute modification du droit applicable pendant une période d’un an, ce qui ne saurait être véritablement souhaitable.
La commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Gruny, l'amendement n° 104 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
On le voit bien, les lois changent constamment et l’environnement des entreprises devient de plus en plus complexe. Dans ces conditions, accorder un délai d’adaptation d’un an aux entreprises ne serait pas superflu, sachant que les contrôles portent souvent sur trois ans.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Je soutiendrai cet amendement. Au cours de ma vie professionnelle passée, j’ai bien souvent eu l’occasion de constater la perplexité des petites entreprises devant la complexité de textes élaborés par des conseillers ministériels. Ces entreprises n’ont pas les moyens de financer les services d’experts-comptables ou de conseils sociaux. Or, quand elles interrogent les agents chargés de mettre en œuvre les nouvelles dispositions, il arrive fréquemment que ceux-ci soient incapables de leur répondre. Cependant, douze ou dix-huit mois après l’entrée en vigueur des mesures, une fois la jurisprudence finalisée, ces mêmes agents reprochent aux entreprises d’avoir méconnu les règles…
J’estime donc qu’il serait bon de reconnaître aux entreprises un droit à l’erreur : ainsi, elles ne se trouveraient plus dans une situation d’insécurité permanente chaque fois que de nouveaux textes sont mis en œuvre. J’ajouterai qu’il n’est pas souhaitable de « pénaliser » – ce verbe est très péjoratif – les entreprises de bonne foi qui commettent des erreurs en appliquant de nouveaux textes extrêmement complexes : la simple application des intérêts de retard me semble suffisante.
Ma petite expérience personnelle m’incite à soutenir cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Ayant été pendant plusieurs années membre du conseil d’administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, j’ai pu voir comment cet organisme travaillait avec le réseau des URSSAF. Les représentants des partenaires sociaux au sein de ce conseil d’administration connaissent bien la problématique soulevée par notre collègue Pascale Gruny.
Je pense pouvoir dire que l’objectif du présent amendement est satisfait par la pratique au sein du réseau des URSSAF. Il n’est pas impossible que certaines URSSAF fassent parfois un peu d’excès de zèle en matière de recouvrement, mais, d’une manière générale, un véritable débat s’instaure entre syndicats et représentants du patronat, qui essaient toujours de faciliter les relations entre les entreprises et les URSSAF.
On peut vouloir sécuriser la pratique en adoptant cet amendement, mais, mon sens, celui-ci est déjà satisfait.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je voudrais formuler deux observations pour alimenter la réflexion du Sénat.
En premier lieu, il faut bien comprendre qu’un redressement n’est pas une sanction : c’est simplement la correction d’une erreur dans l’application du droit. Ce sont les éventuelles majorations ou pénalités, d’ailleurs souvent effacées ou réduites si l’entreprise est de bonne foi, qui peuvent être perçues comme une sanction.
En second lieu, il faut aussi envisager le problème dans l’autre sens : beaucoup de redressements conduisent à des remboursements, à des restitutions, les erreurs commises par les entreprises pouvant être en leur défaveur. Ainsi, en 2014, 145 millions d’euros ont été remboursés à des entreprises !
Si la disposition que vous préconisez était adoptée, madame la sénatrice, il conviendrait, par parallélisme des formes, d’en prévoir la réciproque en matière de remboursements…
On pourrait écrire bien des livres sur le droit à l’erreur ou sur la notion de bonne foi, mais les pratiques en vigueur me semblent satisfaisantes. Je ne crois pas que cet amendement soit de bon aloi et je maintiens l’avis défavorable du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Il m’est déjà arrivé de devoir transmettre moi-même aux URSSAF des éléments sur certains textes parce que, les circulaires ne leur parvenant que très tardivement, elles ne sont pas en mesure de répondre aux questions qui leur sont adressées par les entreprises.
Vous nous objectez, monsieur le secrétaire d’État, que si l’on adoptait la mesure que nous proposons, les URSSAF bénéficieraient elles aussi d’une année pour surseoir au remboursement des sommes versées à tort par les entreprises, mais on ne peut tout de même pas admettre que les agents des URSSAF ne connaissent pas la loi !
En revanche, il est clair que les petites et moyennes entreprises n’ont pas forcément les moyens de suivre les évolutions réglementaires et sont confrontées à des difficultés d’interprétation des textes. Leur laisser une année d’adaptation ne serait que justice à mes yeux.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11.
L'amendement n° 107 rectifié, présenté par Mme Gruny, M. Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu, Darnaud et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi et Estrosi Sassone, MM. Genest, Gilles et Gremillet, Mmes Imbert et Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Lenoir, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Perrin, Raison, Savary, Vaspart et Trillard, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 243-15 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les mêmes dispositions sont applicables s’agissant de la présentation de documents et renseignements que doit fournir le candidat auquel est attribué un marché public. »
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement a pour objet de permettre à une entreprise contestant un redressement d’obtenir l’attestation de vigilance. Cette attestation certifie que le cotisant est à jour de ses cotisations sociales. Elle lui est nécessaire notamment pour candidater à des marchés publics.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Aux termes de l’article D. 243-15 du code de la sécurité sociale, « la contestation des cotisations et contributions dues devant les juridictions de l’ordre judiciaire ne fait pas obstacle à la délivrance de l’attestation ». Cet amendement me semble donc satisfait par le droit existant, qui doit s’appliquer aux attestations de régularité.
Si tel n’était pas le cas, le Gouvernement pourrait peut-être nous exposer les raisons pour lesquelles la délivrance de l’attestation de régularité ne serait pas envisageable en cas de contestation d’un redressement.
L’avis de la commission est favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je rappelle que l’attestation de vigilance a pour objet de certifier l’absence de travail dissimulé, bien entendu, mais aussi le respect par l’entreprise de ses obligations en matière de déclaration et de paiement des cotisations sociales.
Il ressort des textes en vigueur que l’entreprise ayant contracté une dette à l’égard des URSSAF peut d’ores et déjà obtenir son attestation de vigilance, dès lors qu’elle a souscrit et respecte un plan d’apurement de cette dette ou qu’elle en conteste le montant par recours contentieux.
Je considère donc que l’amendement est déjà satisfait par les textes existants. Son adoption créerait de la confusion, en donnant à penser qu’il en est autrement.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Dès lors que M. le rapporteur général et M. le secrétaire d’État considèrent cet amendement comme satisfait, je le retire. Cela étant, le fait que j’aie été sollicitée pour présenter un tel amendement démontre qu’il doit exister des cas dans lesquels les choses se passent autrement. La précision apportée aujourd'hui en séance publique me semble donc de nature à clarifier ce point.
Mme la présidente. L'amendement n° 107 rectifié est retiré.
L'amendement n° 127 rectifié, présenté par Mme Gruny, M. Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Commeinhes, Cornu, Darnaud et de Raincourt, Mmes Deroche, Deromedi et Estrosi Sassone, M. Gabouty, Mme Gatel, MM. Genest et Gilles, Mmes Imbert et Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Lenoir, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud et MM. Perrin, Raison, Savary, Trillard et Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 244-9 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La contestation de la mise en demeure, prévue à l’article L. 244-2 dans le cadre du contentieux général de la sécurité sociale suspend toute procédure en recouvrement des cotisations. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Pascale Gruny.