Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Puisqu’on me demande des chiffres, je vais en livrer quelques-uns.

En 2014, le médicament contre l’hépatite C aurait coûté 1,1 milliard d’euros si l’on avait appliqué son prix facial. Des remises ont été négociées, y compris avec un certain nombre de nos voisins européens. Il y a bien eu une « pression », pour reprendre l’expression de Mme Cohen ! Indépendamment de ces remises, l’enveloppe W a permis d’économiser 230 millions d’euros. En d’autres termes, le coût du médicament a été ramené de 1,1 milliard d’euros à quelque 600 millions d’euros.

En 2015 – certes, l’année n’est pas terminée –, cette enveloppe devrait, selon nos estimations, permettre d’économiser 50 millions à 60 millions d’euros. Le coût avoisinerait ainsi les 700 millions d’euros, chiffre à mettre en relation avec les 600 millions d’euros de 2014.

Pour 2016, on ne sait évidemment pas si l’enveloppe W sera ou non dépassée. Nous commençons à approcher d’une moyenne, je dirais presque d’un équilibre de 700 millions d’euros.

À mon sens, ce dispositif, dont les membres du groupe CRC semblent douter de l’efficacité, a tout de même permis de contenir les prix. C’est, je le rappelle, ce qui a permis de soigner l’ensemble des patients.

M. Gilbert Barbier. Non ! Pas « l’ensemble » !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, on aurait pu instituer des critères de sélection ; je crois que d’aucuns avaient envisagé cette option. Mais, je le maintiens, on a pu soigner l’ensemble des patients !

Le taux L permet justement de contenir les prix pour l’ensemble des médicaments concernés, en exerçant une pression, ce que certains critiquent.

D’un côté, on nous reproche de ne pas suffisamment exercer de pression sur l’industrie pharmaceutique ; de l’autre, on nous accuse de fragiliser notre économie. En réalité, comme je crois l’avoir démontré, nous avons un dispositif équilibré. Il garantit non seulement le fonctionnement de l’industrie pharmaceutique, mais également le développement de la recherche, que les professionnels réclament à juste titre. Nous avons une bonne articulation entre les besoins des uns et les capacités financières des autres.

Je tenais à vous communiquer ces éléments et ces chiffres, qui peuvent alimenter la réflexion collective.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 423.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 211 rectifié, présenté par MM. Pellevat, Vasselle, Frassa, Commeinhes et de Raincourt et Mmes Deromedi et Imbert, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

… La deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 138-12 est supprimée ;

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à rétablir une règle de calcul cohérente pour le déclenchement de la clause de sauvegarde.

La contribution visée à l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale prévoit que le déclenchement du mécanisme résulte de la comparaison entre le chiffre d’affaires net de remises d’une année n et le même chiffre d’affaires de l’année n-1 minoré de la contribution versée au titre du mécanisme L de l’année n-1.

L’assiette de cette contribution n’étant pas identique d’une année sur l’autre, cela crée un cercle vicieux : plus la contribution versée l’année n-1 est élevée, plus le versement de l’année n sera important. Cet effet se cumule et s’accentue au fil des années.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer la possibilité de déduire, dans le calcul de la contribution due au titre du taux L, le montant de la remise conventionnelle versée au même titre.

Cela conduirait les entreprises ayant conclu une convention avec le CEPS, le Comité économique des produits de santé – c’est ce qui est souhaité –, à payer deux fois leur contribution. Elles ne seraient plus incitées à passer par la voie conventionnelle.

Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 211 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Article 6

Article 5

Au titre de l’année 2015, sont rectifiés :

1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ainsi qu’il suit :

(En milliards d’euros)

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

190,5

198,0

-7,5

Vieillesse

223,5

223,8

-0,2

Famille

52,8

54,4

-1,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

13,9

13,2

0,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

467,3

475,9

-8,6

 ;

2° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale, ainsi qu’il suit :

(En milliards d’euros)

Prévisions de recettes

Objectifs de dépenses

Solde

Maladie

166,6

174,1

-7,5

Vieillesse

119,9

120,5

-0,6

Famille

52,8

54,4

-1,6

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,4

11,8

0,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

339,3

348,3

-9,0

 ;

3° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ainsi qu’il suit :

(En milliards d’euros)

Prévisions de recettes

Prévisions de dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

16,5

20,3

-3,8

 ;

4° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, qui est fixé à 13,6 milliards d’euros ;

5° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, qui demeurent fixées conformément au III de l’article 38 de la loi n° 2014-1554 de financement de la sécurité sociale pour 2015 ;

6° Les prévisions rectifiées de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.

M. Dominique Watrin. L’article 5 tend à rectifier les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et les tableaux d’équilibre pour 2015, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du régime général, ainsi que les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV.

Permettez-moi de formuler deux remarques.

Premièrement, vous vous félicitez de l’amélioration du solde des branches vieillesse et famille. Je le rappelle, ces deux branches ont fait l’objet de mesures injustes dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 : pour la branche famille, vous avez fortement remis en cause l’universalité des prestations sociales ; pour la branche vieillesse, vous avez instauré une réforme des retraites en allongeant encore, après la droite, la durée de cotisation.

Deuxièmement – cela concerne précisément le Fonds de solidarité vieillesse –, le Gouvernement a réussi à décaler d’une année supplémentaire l’application du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement et donc à détourner encore en 2015 le produit de la CASA, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, de l’accompagnement de la perte d’autonomie vers le déficit du Fonds de solidarité vieillesse.

Initialement, le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement devait intervenir à la fin de l’année 2013. On nous a ensuite dit « courant de l’année 2014 », puis « courant 2015 ». Au mieux, ce sera au 1er janvier 2016. Et encore : si tous les décrets d’application sont signés !

Il est dommage que l’argent de la CASA, d’ailleurs injustement pris dans les seules poches des retraités imposables, c'est-à-dire à partir de 1 200 euros environ par mois, ait une nouvelle fois été détourné de sa finalité.

Mme la ministre se félicitait de la profusion de textes législatifs examinés en quelques semaines. On peut dire que le temps a été particulièrement élastique s’agissant de l’affection de la CASA à sa vraie finalité !

Mme la présidente. L'amendement n° 72, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances. Une loi organique de 2010 fixe les règles de fonctionnement de la dette sociale. Elle permet au Gouvernement d’en élargir l’accès à la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, à condition que l’équilibre de cette dernière ne soit pas saturé. Or avec le transfert de 23,6 milliards d’euros qui s’ajoute aux 10 milliards d’euros, et malgré un ajout de « mini » recettes au profit de la CADES, il semble bien que celle-ci soit proche de la saturation.

J’ai le sentiment que ces 23,6 milliards d’euros sont des déficits portés par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, en 2013 et en 2014. Or nous ne savons pas exactement pour 2015 quelle part des déficits prévisibles supportés par l’ACOSS est transférée à la CADES. Nous ne connaissons pas exactement le déficit de la branche maladie, mais il existe, et je pense même qu’il s’est plutôt creusé… Dans ces conditions, l’équilibre ne peut être atteint. Je vous renvoie à une note de la Cour des comptes vous incitant, monsieur le secrétaire d’État, à faire en sorte, dès les prévisions, que les ressources de la CADES permettent de faire face au transfert de déficit.

Sauf information précise du Gouvernement qui viendrait contredire ma compréhension de ces dispositifs, car les chiffres sont complexes à interpréter, il me paraît de notre responsabilité, mes chers collègues, de faire respecter la loi organique et de suivre les sages recommandations de la Cour des comptes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer un article ayant trait à l’approbation des tableaux d’équilibre relatifs à un exercice pratiquement achevé. Tout comme pour l’amendement déposé à l’article 1er, en prendre acte ne signifie pas approuver la politique menée. La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. J’avoue avoir du mal à comprendre, monsieur le rapporteur pour avis.

Mme Nicole Bricq. Moi aussi !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’article 5, que vous proposez de supprimer, ne vise qu’à informer le Parlement, conformément aux dispositions de la loi organique à laquelle vous avez vous-même fait référence, des conditions de l’exécution de 2015, soit de l’année en cours, avant de fixer les prévisions pour 2016. Le transfert de l’ACOSS à la CADES, que j’ai évoqué dans mon propos liminaire, se trouve à l’article 17…

L’adoption de votre amendement conduirait le Sénat à voter un projet de loi de financement de la sécurité sociale non conforme à la loi organique. Vous auriez pu proposer de modifier les tableaux, de changer des chiffres, mais je ne comprends pas que vous souhaitiez la suppression d’un article faisant obligation au Gouvernement d’informer le Parlement. Il serait plus sage de retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 72 est-il maintenu ?

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis. Non, je le retire, madame la présidente. Nous aurons l’occasion de discuter de ces sujets à l’article 17. Cela laissera le temps à chacun de mûrir sa réflexion.

Mme la présidente. L'amendement n° 72 est retiré.

La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'article.

M. Alain Vasselle. Je souhaite demander au Gouvernement une précision.

Le 5° de l’article 5 du projet de loi initial faisait état des « prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites qui demeurent fixées conformément au II de l’article 35 de la loi n° 2014-1554 de financement de la sécurité sociale pour 2014 ». Je ne suis pas allé vérifier le contenu de cet article 35, mais j’ai noté que M. Bapt, à l’Assemblée nationale, avait modifié cette référence.

Cela étant, vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, le Fonds de réserve des retraites n’a plus de recettes, hormis les produits financiers de ses placements. À quelles recettes fait donc référence ce 5° ? J’aimerais être éclairé sur ce point, si ce n’est à l’instant par vous-même, du moins dans les heures qui viennent par vos services. Je vous en serais reconnaissant.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Troisième partie

Article 6

Au titre de l’année 2015, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :

(En milliards d’euros)

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

82,9

Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l’activité

56,8

Autres dépenses relatives aux établissements de santé

19,8

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées

8,7

Contribution de l’assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées

9,1

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional

3,0

Autres prises en charge

1,6

Total

181,9

Mme la présidente. L'amendement n° 73, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis. Il est retiré.

Mme la présidente. L'amendement n° 73 est retiré.

Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Article 7

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

(La deuxième partie du projet de loi est adoptée.)

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2016

Titre Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Chapitre Ier

Dispositions relatives au pacte de responsabilité et de solidarité et évolutions de certains dispositifs particuliers en découlant

Troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Articles additionnels après l'article 7

Article 7

I. – À l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 1,6 » est remplacé par le nombre : « 3,5 ».

II. – Le I s’applique aux cotisations dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er avril 2016.

Pour chacune des périodes du 1er janvier au 31 mars 2016 et du 1er avril au 31 décembre 2016, la réduction de taux mentionnée à l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale est calculée en fonction de la rémunération annuelle totale perçue en 2016.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet, sur l'article.

M. Alain Joyandet. Je m’étonne que la commission des affaires sociales ait retoqué deux amendements que j’avais déposés sur cet article. L’un tendait à mettre fin au CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, pour un certain nombre de raisons que je n’ai pas le temps d’expliquer ici ; l’autre visait à remettre en place la TVA « compétitivité » ou TVA « anti-délocalisation », que le Président Hollande a reconnu avoir supprimée peut-être hâtivement. Il a fait son mea culpa, sans en tirer les conséquences. Nous souhaitions précisément l’aider à tirer les conséquences de ses regrets. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Nicole Bricq. Quelle sollicitude !

M. Alain Joyandet. Ces amendements ont été rejetés par la commission des affaires sociales. Le Gouvernement n’est pas en cause. Je précise, par ailleurs, qu’ils ont été cosignés par près de trente sénateurs. Or aucun d’eux ne s’est étonné de leur dépôt.

De surcroît, les articles 7 à 8 concernant des dispositions relatives aux recettes, au recouvrement et à la trésorerie, nous allons évoquer le pacte de responsabilité et tous les dispositifs qui en découlent. Je ne comprends donc pas pourquoi ces amendements ont été écartés. J’aurais éventuellement pu l’admettre si l’article 40 avait été invoqué…

Je comprends qu’il faille respecter le règlement de notre assemblée et raccourcir la durée des débats. Je rappelle néanmoins que le droit d’amendement est un droit sacré pour l’ensemble des parlementaires que nous sommes. S’il s’agissait de petits amendements à la marge, j’aurais pu comprendre qu’on les écarte. Mais, ici, ce n’est pas le cas : nous étions au cœur du sujet.

Las, ces amendements ne seront pas examinés. Pourtant le CICE ne fonctionne pas bien. J’aurais voulu demander ce soir pourquoi certaines entreprises ne sont pas remboursées, pourquoi les versements sont repoussés de plusieurs années, alors que d’autres reçoivent des subventions. La TVA compétitivité était un dispositif formidable pour nos entreprises.

J’attends, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, quelques explications pour comprendre ce qui s’est passé avec ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.

Mme Laurence Cohen. L’article 7 prévoit la mise en place de ce qu’il est convenu d’appeler la deuxième phase du pacte de responsabilité et de solidarité.

La première étape, votée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale précédent, prévoyait la réduction des cotisations et contributions sociales des employeurs sur les bas salaires et une exonération des cotisations pour les salariés dont la rémunération était inférieure à 1,6 fois le SMIC. Ces réductions et exonérations ont été compensées par l’État à hauteur de 23 milliards d’euros, mais les résultats n’ont pas été au rendez-vous, comme nous avons toutes et tous pu le constater.

Alors que le Gouvernement nous propose d’adopter la deuxième phase du projet en diminuant encore le niveau des cotisations pour les entreprises et en supprimant la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés, nous demandons pour le moins une évaluation du dispositif.

Selon le troisième rapport annuel sur l’utilisation du CICE, les premiers résultats sur les effets concrets de ce dispositif ne seront disponibles qu’à la fin de 2016, et encore ; il ne s’agira que des effets observés sur la première année d’application, à savoir 2013. Certes, le processus d’évaluation est complexe et exige du recul, mais, à partir du moment où le chef de l’État a annoncé la transformation du CICE en exonération générale de cotisations sociales à horizon de 2017, l’exercice de suivi devient quelque peu problématique quand on sait que les effets macroéconomiques du crédit d’impôt en 2017 ne seront connus au mieux qu’en 2020.

Face à ces incohérences et à cette évolution programmée inacceptable, nous vous demandons de ne pas créer de nouvelles exonérations de cotisations sociales et de réorienter fiscalement de toute urgence le dispositif selon un ciblage des aides, accompagné d’un cadre effectif de réelles contreparties en matière d’emplois et d’investissement productif. Il faut en finir avec cette logique d’avantages automatiques à des secteurs et à des entreprises qui n’en ont aucun besoin, tandis que d’autres, en particulier les PME, souffrent de véritables difficultés financières.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur Joyandet, effectivement la commission a déclaré irrecevables vos amendements relatifs au CICE et à la TVA sociale. Pourquoi ? Tout simplement parce que le CICE est une mesure de réduction d’impôt qui n’a pas d’impact sur les comptes de la sécurité sociale. Vos amendements étaient donc des cavaliers. En revanche, ils ont toute leur place dans le projet de loi de finances.

Par ailleurs, vous proposiez de supprimer l’article ayant abrogé la TVA sociale, et non de rétablir celle-ci.

M. Alain Joyandet. Quand on supprime la suppression, on la rétablit !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Non !

Là encore, il n’y avait pas d’impact sur le solde de la sécurité sociale.

Si nous n’avions pas rejeté ces amendements, c’est le Conseil constitutionnel qui aurait refusé une telle disposition...

M. Alain Joyandet. En vérité, vous ne voulez pas en débattre !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 216 est présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

L’amendement n° 370 est présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 216.

M. Jean Desessard. L’article 7 prévoit d’étendre jusqu’au seuil de 3,5 SMIC, soit 5 000 euros bruts mensuels, la baisse de 1,8 point des cotisations familiales.

À ce niveau de salaire, il ne s’agit plus d’encourager l’emploi, car le frein à l’embauche que peuvent représenter les cotisations familiales à la charge de l’employeur est quasi inexistant. Il s’agit d’une ristourne offerte sans aucune contrepartie, puisque les entreprises visées ne sont même pas celles en difficulté et aucune condition n’est exigée.

Rappelons tout de même que, au moment de la création de la sécurité sociale, la France a fait le choix d’une politique familiale universaliste. Au début, le taux des cotisations pour financer cette branche s’élevait à 16,75 %. Il a peu à peu décru pour se stabiliser à 5,4 % depuis 1991.

Selon le rapport de la Cour des comptes relatif au financement de la branche famille de mai 2013, si ce taux est, depuis lors, resté facialement inchangé, la contribution des entreprises a en réalité très sensiblement diminué du fait de la mise en œuvre d’un dispositif d’allégements généraux de cotisations, qui s’est traduit par un transfert des financements sur d’autres assiettes, donc sur les ménages.

Les entreprises bénéficient largement de la politique familiale telle qu’elle est menée dans notre pays puisque près d’un tiers du budget total de la branche permet de financer la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Selon la Cour des comptes, ces actions auraient un effet positif sur le taux d’activité et contribueraient au dynamisme global du marché du travail, ainsi qu’à l’augmentation de la croissance potentielle.

Puisque ce nouvel allégement serait injuste et inefficace, et que les entreprises qui bénéficient de la politique familiale doivent logiquement y contribuer, les écologistes proposent de supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 370.

Mme Annie David. Le présent article prévoit une nouvelle fois des exonérations patronales dans le cadre de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité. Il vise ainsi à élargir, au 1er avril 2016, au bénéfice des employeurs, la réduction du taux de cotisations d’allocations familiales aux rémunérations comprises entre 1,6 et 3,5 fois le SMIC, afin, prétendument, « de relancer la compétitivité et la création d’emplois ».

Nous constatons pourtant que cet argent public offert aux entreprises depuis plusieurs années ne donne pas de résultats tangibles puisque, au fond, ces allégements ne sont compensés par aucune création d’emplois, et ce malgré les discours du MEDEF promettant « un million d’emplois ». Ce genre de promesse n’engage que celles et ceux qui y croient…

Pour notre part, nous n’y croyons pas. L’expérience montre en effet que les chefs d’entreprise utilisent cet argent pour augmenter, notamment, leurs dividendes, sans jamais investir, et parfois même en procédant à des licenciements, comme c’est le cas chez Air France. Pourtant, le Gouvernement persévère dans cette voie puisqu’il accentue encore cette mesure, confirmant ainsi une stratégie aussi inefficace que coûteuse.

Vous proposez ainsi, monsieur le secrétaire d’État, d’attribuer 4,5 milliards d’euros d’aides supplémentaires, sans aucune contrepartie, à toutes les entreprises, alors même que les situations de celles-ci sont extrêmement différentes : l’écart est grand entre les entreprises du CAC 40 et les PME, qui, elles, souffrent non pas de la lourdeur des cotisations sociales, mais de la faiblesse du carnet de commandes et des desiderata des donneurs d’ordre.

Nous proposons de supprimer cet article, car il étend un dispositif qui nous prive d’un argent public précieux, dont nous avons impérativement besoin au regard du déficit prévu pour 2016 du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, lequel s’établit à 9,7 milliards d’euros.

Parallèlement, et cette question a été soulevée à l’Assemblée nationale, les mesures figurant dans cet article représentent une diminution des prélèvements obligatoires de 0,2 % du PIB. Où cette baisse se répercute-t-elle ?

Sur le fond, nous ne partageons pas non plus la logique sous-tendue par cet article. Nous considérons qu’une politique familiale de qualité contribue au bon fonctionnement des entreprises et de l’économie du pays. Les entreprises doivent y être attentives et apporter leur contribution à l’épanouissement des familles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces amendements visent à supprimer l’article élargissant la réduction de 1,8 point de la cotisation famille au motif que, à ce niveau de salaire, le niveau de la cotisation famille n’a pas d’effet sur l’emploi.

Comme je le disais lors de mon intervention liminaire, cette réduction de cotisation n’est pas seulement une politique de l’emploi, c’est aussi, plus largement, une politique de compétitivité des entreprises. Elle prend acte de la nécessité de financer autrement la protection sociale, afin que celle-ci pèse moins sur la masse salariale, de restaurer les marges des entreprises et de favoriser ainsi l’investissement et l’emploi.

La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?