Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Monsieur Dantec, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, pour deux motifs majeurs.
Premièrement, une telle modification ouvrirait la voie à des contentieux avec l’Europe.
Deuxièmement, la rédaction actuelle de cet alinéa vous satisfait : cette directive permet bel et bien de refuser tous les types d’OGM sur l’ensemble du territoire national.
M. Ronan Dantec. Ce n’est pas tout à fait faux !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Monsieur Dantec, en réalité, l’autorisation des OGM ne doit être possible que sur l’ensemble du territoire national.
Vous suggérez que la rédaction actuelle de cet alinéa répond à une situation concernant non pas la France, mais des pays à pouvoirs régionaux forts, par exemple l’Allemagne.
Quelle que soit la rédaction, accordez-moi que, si nous faisons du droit, nous faisons aussi de la politique, et qu’il n’a jamais été dans l’intention du Gouvernement de faire en sorte que les OGM puissent être autorisés sur une partie du territoire français seulement. Notre démarche, je vous le confirme, mesdames, messieurs les sénateurs, s’étend bien à l’ensemble du territoire.
Cela étant, si ces dispositions, telles qu’elles figurent dans la directive, n’étaient pas transposées, la mesure dont il s’agit serait fragilisée, car cela remettrait en cause y compris ce qui resterait de la transposition.
Mme Odette Herviaux. Oui !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Cela ne me paraît pas raisonnable, et serait sans doute très contre-productif, y compris au regard des objectifs qui sont les vôtres.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Dantec, l’amendement n° 6 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 6 est retiré.
L'amendement n° 7, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer les mots :
Après la délivrance des autorisations mentionnées aux articles L. 533-5 et L. 533-6,
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Il s’agit là de dispositions assez techniques, dont nous avons débattu en commission : la restriction ou l’interdiction de mise en culture d’un OGM intervient-elle après la délivrance des autorisations mentionnées aux articles L. 533-5 et L. 533-6, ou avant l’achèvement de la procédure d’autorisation ?
Peut-être ai-je mal saisi. J’attends l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Monsieur Dantec, il s’agit bien d’une incompréhension, que M. le secrétaire d’État a déjà levée en ouvrant la discussion générale.
M. Vidalies a en effet clairement expliqué que, pour empêcher la mise sur le marché d’un organisme génétiquement modifié, la France devait, dans un premier temps, demander au porteur de projet, au semencier, de retirer son projet ; si le semencier refusait d’obtempérer et si l’Europe validait la mise sur le marché de cet OGM, la France se réservait ensuite le droit d’interdire la mise sur le marché du produit sur son territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Monsieur Dantec, pour les raisons que M. le rapporteur vient d’exposer, je vous invite à retirer cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Dantec, l’amendement n° 7 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 7 est retiré.
L'amendement n° 8, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer les mots :
tout ou partie du
par le mot :
le
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Je retire également cet amendement, madame la présidente, dans la mesure où il a le même objet que l’amendement n° 6, précédemment retiré.
Mme la présidente. L’amendement n° 8 est retiré.
L'amendement n° 9, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 24, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Mes chers collègues, cet alinéa 24 est assez étonnant ; je le relis : « Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ou du dossier de demande ne permettent pas sa mise à disposition par voie électronique, le public est informé, par voie électronique, de l’objet de la procédure de participation et des lieux et horaires où l’intégralité du projet ou du dossier de demande peut être consultée. »
À mon sens, une telle disposition est assez dangereuse.
Imaginons que le porteur de projet faisant l’objet d’une demande d’autorisation ne souhaite pas que l’on examine le dossier trop en détail. Il peut très bien réunir un ensemble de documents extrêmement lourd, qu’il ne serait pas possible d’expédier par voie électronique !
Aussi, je vous invite à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 24.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Cette procédure de consultation du dossier reprend mot pour mot les articles du code de l’environnement décrivant le régime de droit commun en matière de participation du public.
De plus, en règle générale, tous les dossiers déposés jusqu’à présent faisaient moins d’une centaine de pages. Je doute que quiconque ait envie de grossir ces documents pour que le public ne puisse pas les consulter…
M. Ronan Dantec. Oh, ça …
M. Michel Raison, rapporteur. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. D’un point de vue strictement juridique, je peux souscrire à l’avis de la commission. Néanmoins, je suis assez sensible aux inquiétudes de M. Dantec.
Cette rédaction peut sembler a priori d’une grande banalité. Elle distingue, d’une part l’envoi d’un dossier par voie électronique, de l’autre sa consultation au format papier.
Toutefois, les modalités de consultation ne sont bien entendu pas les mêmes. En résulte une question qui ne me semble pas sans intérêt : ces dispositions pourraient-elles être détournées par un esprit mal intentionné ou, à tout le moins, opportuniste ?
Certes, M. le rapporteur l’a dit, cette rédaction est celle qui prévaut dans le code de l’environnement. Mais des précautions de cette nature peuvent alimenter notre réflexion. Voilà pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 18.
(L'article 18 est adopté.)
Article 19
(Non modifié)
L’article L. 663-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « et toute contamination transfrontalière dans les États membres de l’Union européenne où la culture de ces organismes génétiquement modifiés est interdite sur tout ou partie de leur territoire » ;
2° Au premier alinéa et à la fin de la dernière phrase du dernier alinéa, le mot : « communautaire » est remplacé par le mot : « européenne ». – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 19
Mme la présidente. L'amendement n° 10, présenté par MM. Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’importation d’aliments génétiquement modifiés pour animaux peut faire l’objet d’une interdiction.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Les dispositions de cet amendement – il s’agit du dernier de la série – s’inscrivent dans la même logique que précédemment.
Imaginons que l’on propose un OGM posant des problèmes connus, soulevant un ensemble de risques de nature environnementale, sociale ou sanitaire : nous devons nous donner la capacité de l’interdire !
Chaque territoire national reste responsable d’une éventuelle mise en culture d’organismes génétiquement modifiés. Parallèlement, la France doit être en mesure de refuser un certain nombre d’importations d’OGM.
Il s’agit là, bien sûr, d’une possibilité et non d’une interdiction totale de toute importation d’organismes génétiquement modifiés.
Pour que le compromis européen soit cohérent, il doit aller jusqu’à son terme : je le répète, il est tout à fait logique que nous gardions la maîtrise de nos importations !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. La France ne peut pas prendre seule des décisions de ce type. De telles mesures iraient au-delà non seulement de la transposition de la directive, mais aussi du droit européen. Quant à l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, elle risquerait de ne pas être tout à fait d’accord…
Aussi, cette disposition ne serait absolument pas conforme au droit en vigueur.
M. Ronan Dantec. Si ! Pour une mesure environnementale, c’est prévu !
M. Michel Raison, rapporteur. D’ailleurs, je crains que le but visé à travers cet amendement ne soit quelque peu idéologique, et qu’il s’agisse plutôt de jeter l’opprobre sur les OGM en affichant une interdiction d’importation.
Quoi qu’il en soit, cette mesure est juridiquement impossible à mettre en œuvre. Voilà pourquoi la commission y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nelly Tocqueville, pour explication de vote.
Mme Nelly Tocqueville. Cet amendement ne m’apparaît en effet pas conforme au droit européen, en ce qu’il tend à mettre en place un moratoire.
M. Ronan Dantec. Il n’est pas question de moratoire !
Mme Nelly Tocqueville. Mais si !
En outre, cet amendement est contraire à la position défendue par la France au niveau européen, position que partage la représentante Verte au sein de la commission de l’environnement du Parlement européen, Michèle Rivasi : elle s’était opposée à cette mesure à l’occasion du vote.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 10.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 19 bis
(Non modifié)
Le chapitre Ier du titre III du livre V du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 531-4 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Le président du Haut Conseil et les présidents des comités sont nommés par décret. Les autres membres des comités sont nommés par arrêté du ministre chargé de l’environnement. » ;
2° Après le mot « agronomiques », la fin du premier alinéa de l’article L. 531-4-1 est ainsi rédigée : « et aux sciences appliquées à l’environnement. » – (Adopté.)
Article 19 ter
(Non modifié)
Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les risques de contamination accidentelle de cultures conventionnelles ou biologiques par des organismes génétiquement modifiés, notamment dans les zones frontalières, ainsi que sur les mesures techniques de coexistence et sur la responsabilité juridique et financière des utilisateurs d’organismes génétiquement modifiés.
Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par M. Pointereau, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Cet amendement vise à supprimer une demande de rapport sur les risques de contamination des cultures conventionnelles et biologiques par des organismes génétiquement modifiés. Un tel rapport doit en effet être remis par le Haut Conseil des biotechnologies dans les semaines ou les mois qui viennent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
À titre personnel, j’y étais favorable, dans la mesure où il est d’ores et déjà prévu que le Haut Conseil des biotechnologies remette un rapport sur ce sujet. Au vu de sa composition, on peut faire confiance au Haut Conseil. Un rapport est nécessaire, certes, mais pas deux !
Lorsque l’on connaît les difficultés financières de notre pays et la nécessité de réduire le nombre de fonctionnaires, il apparaît cohérent de demander un peu moins de travail aux services de l’État. Si l’on commande dix rapports par séance du Sénat, on n’y parviendra pas !
M. Ronan Dantec. Oh !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Le Haut Conseil est chargé de préparer ce rapport, et il le fera bien. Je considère donc, à titre personnel, que cet article est superfétatoire !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je confirme que le Gouvernement a d’ores et déjà saisi le Haut Conseil des biotechnologies sur ces questions et transmettra, dans tous les cas, le rapport qu’il obtiendra au Parlement.
Dans ces conditions, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Le Gouvernement est donc en mesure de nous confirmer qu’il a saisi le Haut Conseil des biotechnologies, dont l’approche n’est pas particulièrement juridique ou économique, sur l’ensemble des conséquences juridiques d’une contamination au-delà des frontières et sur l’ensemble des conséquences économiques de ces contaminations, et non sur le seul aspect scientifique relatif à la capacité de contamination ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 19 ter.
(L’article 19 ter est adopté.)
Titre V
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DROITS ACQUIS EN MATIÈRE D’INSTALLATIONS CLASSÉES POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT
Article 20
(Non modifié)
Au premier alinéa de l’article L. 513-1 du code de l’environnement, les mots : « la publication » sont remplacés par les mots : « l’entrée en vigueur ». – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 20
Mme la présidente. L'amendement n° 12, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 relative à l’expérimentation d’une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement est ainsi modifiée :
1° L’article 10 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « Ces permis ou cette déclaration » sont remplacés par les mots : « Les permis et décisions de non-opposition à déclaration préalable requis en application des articles L. 421-1 et L. 421-4 du code de l’urbanisme » ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « de permis de construire » sont remplacés par les mots : « de permis de construire ou d’aménager » ;
2° Au premier alinéa de l’article 11, les mots : « être délivrée » sont remplacés par les mots : « pas recevoir exécution » ;
3° Après l’article 12, il est inséré un article 12… ainsi rédigé :
« Art.12... – Le dernier alinéa de l’article L. 341-6 et le premier alinéa de l’article L. 341-9 du code forestier ne s’appliquent pas lorsque l'autorisation unique vaut autorisation de défrichement au titre de l'article L. 341-3 du même code. » ;
4° L’article 13 est ainsi modifié :
a) Au début de cet article, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La présente ordonnance entre en vigueur le 16 juin 2014 pour les régions Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes et le lendemain de la publication de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte pour les autres régions ainsi que pour les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. Le présent alinéa a un caractère interprétatif. » ;
b) Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le titre Ier n'est pas applicable, sauf si le demandeur fait le choix de déposer une demande d’autorisation unique, aux projets dont l'utilité publique a été déclarée par l'autorité compétente de l'État avant le 16 juin 2014 pour les régions Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes et le lendemain de la publication de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte pour les autres régions ainsi que pour les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, sans préjudice de l’intervention d’une déclaration d’utilité publique modificative postérieurement à ces dates. »
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. La forme de cet amendement peut mériter quelques observations, que j’enregistre par anticipation, mais le fond est extrêmement important.
L’ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 organise une expérimentation dans les régions Rhône-Alpes et Languedoc Roussillon, consistant à regrouper autour de l’autorisation au titre de la police de l’eau, les autres décisions environnementales qui seraient requises pour un même projet.
L’ordonnance du 17 août 2015 a généralisé cette expérimentation à l’ensemble des régions qui n’étaient pas concernées jusque-là.
Sans remettre en cause la démarche que nous avons engagée, une difficulté est née de ses conséquences sur un certain nombre de projets en cours de réalisation, qui ont obtenu une déclaration d’utilité publique avant l’entrée en vigueur des dispositions de l’ordonnance organisant l’expérimentation.
C’est le cas, par exemple, de deux grands projets : d’une part, le grand contournement ouest de Strasbourg, soit le plus grand projet routier en cours, soutenu par l’ensemble des élus locaux - j’ai d’ailleurs désigné la semaine dernière l’entreprise avec laquelle nous allons engager la discussion en vue de la concession ; d’autre part, un projet de parc éolien au large de Saint-Brieuc.
Nous sommes soucieux de sécuriser juridiquement ces projets, sans que cela remette en cause l’expérimentation et sa généralisation.
Une erreur a été commise, dans la mesure où cette expérimentation présentait sans doute un défaut d’encadrement, nous devons le reconnaître. Cela a suscité des craintes quant aux procédures déjà engagées. Il nous revient d’y répondre, car il n’était dans l’intention ni du Gouvernement ni du législateur de réinitialiser des procédures abouties.
Je suis conscient que, formellement, la démarche du Gouvernement est tardive, mais elle est extrêmement importante en termes d’investissement et mérite aujourd’hui votre attention. Voilà pourquoi je vous demande de bien vouloir voter cet amendement, mesdames, messieurs les sénateurs.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Après avoir entendu vos explications, monsieur le secrétaire d’État, je dois dire que l’avis de la commission reste défavorable, et j’ai bien peur de devoir le confirmer également à titre personnel.
En effet, vos propos ne concernent que la quatrième et dernière partie de l’amendement, mais pas les trois premières, qui sont d’ailleurs assez difficiles à « décortiquer ».
Cet amendement, déposé à la dernière minute – nous ne vous en voulons pas ! – vise à apporter divers ajustements à la procédure d’autorisation unique pour les projets soumis à la loi sur l’eau.
Vous vous en souvenez, cette autorisation unique résulte d’une loi de simplification de janvier 2014. Il s’agit d’offrir au demandeur d’une autorisation un guichet administratif unique, ce qui est bien, afin de simplifier les procédures et de raccourcir les délais. Ce dispositif expérimental a été étendu par la loi de transition énergétique à l’ensemble du territoire.
Le Gouvernement propose ici de modifier l’ordonnance de juin 2014 qui a défini le régime des autorisations uniques. L’objectif est, entre autres, de prévoir des dispositions transitoires pour les projets en cours à la date de promulgation de la loi de transition.
Pour autant, le dispositif proposé est bien plus large, notamment dans les paragraphes 1 à 3, puisqu’il entend tirer les premières conclusions de l’expérimentation avant même que son bilan n’ait été transmis au Parlement. Notre collègue Rémy Pointereau va d’ailleurs engager dans les semaines qui viennent un travail en vue de présenter un rapport sur le sujet.
Sans me prononcer sur le fond de ces dispositions, il me semble impossible de voter cet amendement ainsi, à l’aveugle. Comme rapporteur, je n’ai pas pu auditionner les secteurs concernés. De surcroît, ce sujet touche à la réflexion en cours sur la simplification du droit de l’environnement et ne relève en aucune manière de la présente loi de transposition du droit européen.
En d’autres termes, cet amendement est un véritable cavalier législatif.
Nous nous sommes fixé comme ligne de conduite, jusqu’à présent, de ne verser ni dans la surtransposition – ce n’est pas le cas ici - ni dans l’adoption de dispositions susceptibles d’être censurées par le Conseil constitutionnel. Or ce cavalier législatif ne manquera pas de l’être !
Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Les sites concernés qu’a évoqués M. le secrétaire d’État ne sont absolument pas négligeables : le contournement autoroutier en Alsace, rien que cela ! Je me demande même si l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes n’est pas également concerné par cet amendement. (M. le secrétaire d’État fait un geste de dénégation.)
Il faudrait vérifier, mais nous n’en avons pas le temps, voilà le problème ! Comme l’a très bien dit M. le rapporteur, cet amendement déboule à la dernière minute alors qu’il concerne des projets extrêmement importants. Enfin, il s’agit de la loi sur l’eau, sujet extrêmement sensible en France aujourd’hui !
Je suis également presque certain qu’il s’agit d’un cavalier.
Cela n’est pas sérieux, nous ne pouvons pas travailler ainsi ! Nous débattons d’une directive qui, précisément, vise à améliorer l’environnement. Nous nous sommes tous félicités, en préambule à cette discussion, que l’Europe avance ensemble. Et vous profitez de ce moment de satisfaction devant le renforcement du droit de l’environnement pour tenter de faire passer un cavalier sur une expérimentation dont on n’a pas tiré le bilan précis !
On veut aller plus vite que la musique, ce n’est pas sérieux ! Avec un tel comportement, le Gouvernement porte atteinte à sa propre crédibilité sur ces sujets environnementaux. Pourtant, souvent, je vous soutiens, monsieur le secrétaire d’État, mais là… !
Vous devriez retirer cet amendement et revenir plus tard sur ce point avec le bilan de l’expérimentation. Vous serez alors capable de nous dire exactement quels sont les projets concernés.
Je ne comprends pas votre volonté de procéder ainsi maintenant. Ces sujets sont sérieux et ne méritent pas d’être traités de cette manière, avec un amendement sur table. Je voterai évidemment contre, et s’il le faut, nous irons au Conseil constitutionnel !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Filleul. Nous avons évidemment examiné cet amendement du Gouvernement un peu rapidement en commission. À la suite de l’intervention de M. le secrétaire d’État, je souhaite rappeler l’importance de cet amendement et souligner que nous n’en avons pas la même lecture que Ronan Dantec.
Cet amendement vise à assurer la continuité du déroulement de certains projets d’infrastructures déjà autorisés au titre du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et dont certaines démarches utiles pour couvrir le champ de l’autorisation unique au titre des installations, ouvrages, travaux et activités, ou IOTA, ont déjà été engagées au moment de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique.
Le groupe socialiste, après avoir entendu M. le secrétaire d’État, est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, il y a deux débats différents.
Il est vrai que les paragraphes 1 à 3, intéressants sur le fond, sont issus de la leçon tirée d’une expérimentation dont le compte rendu final n’a pas été établi à ce jour. On peut effectivement recevoir cette observation.
L’essentiel de l’amendement, dans la démarche du Gouvernement, se trouve pourtant dans le paragraphe 4, qui sécurise la procédure, ainsi que je l’ai exposé.
La situation est donc la suivante : le Gouvernement vous propose un amendement dont la partie qui lui semble la plus importante ne fait pas l’objet de vos critiques. En revanche, sur l’autre partie, qui ne nous semblait pas devoir poser de difficulté, vous concentrez vos critiques, et elles me paraissent fondées.
Ne pourrions-nous pas nous rassembler autour du seul paragraphe 4 de cet amendement et supprimer les autres ? Je m’empresse d’ajouter, au nom du Gouvernement, qu’il en irait alors ainsi pour la suite de la procédure législative.
Nous attendrions donc de disposer du résultat de l’expérimentation pour reprendre ce débat sur des bases plus cohérentes.
J’interroge donc le rapporteur et la commission. J’ai indiqué les enjeux de cette disposition, ils sont très importants pour la sécurité juridique d’un certain nombre de grands projets. Un texte limité à cette partie-là me semble susceptible de nous rassembler.
Mme la présidente. Quel serait l’avis de la commission, monsieur le rapporteur ?
M. Michel Raison, rapporteur. Je ne peux pas donner l’avis de la commission, parce qu’il faudrait la réunir et donc suspendre la séance. Je ne livrerai donc que l’avis du rapporteur.
La rédaction du 4°, qui prévoit notamment que le paragraphe inséré « a un caractère interprétatif » me semble vague, pour ne pas dire inquiétante !
De plus, je crains que le maintien de ces derniers paragraphes n’entraîne le rétablissement de l’ensemble de l’amendement par la CMP.
Dans le doute, et par souci de sécurité, je maintiens donc un avis défavorable, même sur l’amendement rectifié.
M. Ronan Dantec. Bravo !