compte rendu intégral
Présidence de Mme Françoise Cartron
vice-présidente
Secrétaires :
M. Jean Desessard,
M. Bruno Gilles.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Mises au point au sujet d’un vote
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Raison.
M. Michel Raison. Madame la présidente, lors de la mise aux voix par scrutin public de l’amendement n° 14, à l’article 12 quater A, mon groupe m’a fait par erreur voter contre,…
Mme Catherine Deroche. Nous n’avons fait que suivre les consignes de vote !
M. Michel Raison. … alors que j’étais pour. Je souhaiterais donc que l’on rectifie mon vote en ce sens et, si vous le permettez, je me propose d’associer à cette demande de rectification, encore que j’ignore si notre règlement le permet,…
M. Michel Raison. … MM. Cédric Perrin, Cyril Pellevat, Didier Mandelli et Daniel Gremillet, qui, eux aussi, étaient favorables à cet amendement.
Mme la présidente. Mon cher collègue, acte vous est donné de cette mise au point multiple. (Sourires.) Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Madame la présidente, je tiens à préciser que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable s’était prononcée en faveur de cet amendement, présenté par M. Longeot. Comme M. Raison, je souhaitais voter pour cet amendement.
Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera également dans l’analyse politique du scrutin.
3
Modernisation de notre système de santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé (projet n° 406, texte de la commission n° 654, rapport n° 653 [tomes I et II], avis nos 627 et 628).
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la ministre, j’ai eu la surprise de recevoir, en tant que membre du conseil de surveillance d’un hôpital, un courrier de l’Agence régionale de santé Auvergne me demandant, comme aux représentants de presque tous les autres conseils de surveillance de la région, d’appliquer l’article 27 du projet de loi de modernisation de notre système de santé.
Mme Annie David. Ah !
M. Jacques Mézard. Le directeur de l’ARS écrit à ce propos : « Sans préjuger des dispositions définitives du projet de loi de modernisation de notre système de santé, je vous demande de bien vouloir me transmettre, pour le 15 septembre 2015 au plus tard, une délibération d’intention du conseil de surveillance de votre établissement, portant tant sur le périmètre projeté d’intégration d’un groupement hospitalier territorial que sur les compétences et fonctions dont la mutualisation est envisagée. »
Il est stupéfiant, et inacceptable, qu’un directeur d’ARS se permette de demander aux conseils de surveillance des hôpitaux une « délibération d’intention » – je relève qu’il s’agit là d’une nouveauté dans notre droit ! – pour appliquer les dispositions d’un texte de loi qui n’est pas encore voté.
Mme Annie David. Très bien !
M. Jacques Mézard. Je le sais bien, depuis le début de la Ve République, quels que soient les gouvernements, on observe une dérive constante de nos institutions conduisant à abaisser le Parlement. Mais, en l’espèce, on atteint véritablement des abysses !
M. Gérard Dériot. Très bien !
Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente. Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
Dans l’examen des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre III, au chapitre III.
TITRE III (SUITE)
INNOVER POUR GARANTIR LA PÉRENNITÉ DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ
Chapitre III
Innover pour la qualité des pratiques, le bon usage du médicament et la sécurité des soins
Article 35
(Non modifié)
L’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Élaborer ou mettre à jour des fiches sur le bon usage de certains médicaments permettant notamment de définir leur place dans la stratégie thérapeutique, à l’exclusion des médicaments anticancéreux pour lesquels l’Institut national du cancer élabore ou met à jour les fiches de bon usage ; »
2° Le 2° est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle élabore ou valide également, dans des conditions définies par décret, un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes ainsi que des listes de médicaments à utiliser préférentiellement, à destination des professionnels de santé, après avis de l’Institut national du cancer s’agissant des médicaments anticancéreux ; ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, avant tout, permettez-moi de revenir un instant sur les rectifications de vote qui viennent d’être opérées : lors de la mise aux voix par scrutin public de l’amendement n° 14, le groupe Les Républicains a appliqué les consignes qui lui ont été données !
Mais j’en viens à l’article 35 de ce projet de loi.
Le présent article confie à la Haute Autorité de santé, la HAS, des missions supplémentaires dans le but d’améliorer l’analyse médico-économique des traitements et des stratégies thérapeutiques.
Cet article prévoit, d'une part, l’élaboration de fiches de bon usage pour certains médicaments, afin de permettre de définir leur place dans la stratégie thérapeutique, d’autre part, l’élaboration d’un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes, et de listes de médicaments à utiliser préférentiellement à destination des professionnels de santé.
Le but est de fournir à ces professionnels de santé des outils d’information claire, dans le respect, bien sûr, de leur liberté de prescription.
Les fiches de bon usage sont d’ores et déjà élaborées par la HAS. Il s’agit de leur donner une base juridique et non de créer une nouvelle catégorie de documents. Au demeurant, les amendements que nous allons examiner ne tendent pas à remettre en cause l’élaboration de ces fiches.
En revanche, le guide des stratégies les plus efficientes et les listes de médicaments à utiliser préférentiellement constituent, eux, une nouveauté. Ils donneront plus de poids et de visibilité à l’analyse médico-économique du médicament. Ainsi, ils amélioreront l’efficience mais aussi la sécurité des prescriptions, en réduisant les risques d’affections iatrogènes.
Les corapporteurs souscrivent à cet objectif. Aussi, la commission émettra un avis défavorable sur les amendements tendant à remettre en cause l’élaboration d’un guide de stratégies diagnostiques et thérapeutiques et de listes de médicaments à utiliser préférentiellement. A contrario, nous nous prononcerons pour les amendements qui, à nos yeux, tendent à améliorer le dispositif proposé, tel qu’il est issu du texte de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, corapporteur. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Cornano, sur l'article.
M. Jacques Cornano. Le présent article traite de l’information des professionnels sur l’état des connaissances scientifiques.
À cet égard, je reviendrai brièvement sur les amendements nos 525 rectifié et 526 rectifié, qui, chacun, visaient à insérer un article additionnel après l’article 11 quater A et avaient pour objet les perturbateurs endocriniens.
Plusieurs de mes collègues ont déjà eu l’occasion, au cours de ces débats, de développer les motivations de ces amendements. Je souhaite, à mon tour, revenir sur cette question. En effet, le 22 septembre dernier, ont été publiées les conclusions de l’enquête EXPPERT 5, portant sur l’exposition aux pesticides perturbateurs endocriniens.
À la lecture de cette étude, on apprend que les salades font partie des légumes qui contiennent le plus de résidus de pesticides, dont certains sont des perturbateurs endocriniens. Sept pesticides interdits en France y ont été retrouvés, dont le DDT. En outre, 77 % de l’échantillon analysé contenait plusieurs résidus de pesticides.
Si lesdites substances ont été quantifiées à des doses faibles, l’effet cocktail reste une question pendante, dans la mesure où il n’est pas maîtrisé. Sans être alarmiste, il faut souligner qu’il y a péril en la demeure.
Madame la ministre, nous disposons, en vertu de notre droit, du principe de précaution. À ce titre, pouvez-vous nous indiquer ce que vous entendez faire à la lumière de cette enquête ?
Mme la présidente. La parole est à M. François Commeinhes, sur l'article.
M. François Commeinhes. Mme Deroche vient de le rappeler, le présent article élargit les missions de la HAS à la rédaction ou à la validation d’un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes, ainsi qu’à des listes de médicaments à utiliser préférentiellement, à destination des professionnels de santé, après avis, bien sûr, de l’Institut national du cancer, l’INCA, pour les médicaments anticancéreux.
D’après l’étude d’impact qui précise l’intention du Gouvernement, le but est ici de fournir aux prescripteurs des outils réduisant les choix possibles parmi les médicaments présents sur le marché, notamment les molécules les plus récentes et onéreuses.
Selon cette même étude d’impact, ces guides porteront sur les pathologies les plus fréquentes ainsi que les plus coûteuses pour l’assurance maladie.
Le périmètre de ce guide est donc large. Les modalités d’application de cet article seront définies par décret.
Nous ne pouvons qu’être favorables à un juste usage du médicament et à l’élaboration de démarches d’efficience des dépenses de santé, dans le cadre d’un dialogue entre les industriels et les pouvoirs publics. Il s’agit en effet de dégager des économies et, partant, de maintenir l’accès des patients aux innovations.
Néanmoins, cet article 35 ne semble pas répondre à ces principes et soulève différentes questions.
Tout d’abord, la création d’une nouvelle catégorie de listes risque de compliquer davantage l’acte de prescription que doivent effectuer les professionnels de santé. Ces listes s’ajouteront aux diverses recommandations émises par la HAS et par l’assurance maladie dans le cadre des rémunérations sur objectifs de santé publique, les ROSP.
Ensuite, cette mesure est prématurée : l’évaluation de l’efficience devrait reposer sur les données de l’efficience en vie réelle et non sur des données théoriques, comme c’est actuellement le cas pour les avis de la commission évaluation économique et de santé publique de la HAS, la CEESP.
L’évaluation de l’efficience des médicaments et technologies de santé est une mission récente de la HAS. Or les conséquences à court ou à long terme de l’introduction d’une technologie dans le panier des biens et services remboursables présentent souvent des incertitudes. Ces dernières peuvent porter sur divers paramètres : l’efficacité de ces traitements, leur tolérance par les patients, les effets à long terme, les conditions réelles d’utilisation, le coût des médicaments ou encore l’impact sur l’organisation des soins.
Le recueil des données en vie réelle est donc essentiel pour réduire l’incertitude, entre les résultats espérés à partir des essais cliniques et l’intérêt d’un produit dans la vraie vie.
Voilà pourquoi le guide dont cet article prévoit la création devrait reposer sur des données d’efficience en vie réelle, et non sur des calculs hypothétiques, extrapolés à partir de données modélisées avant commercialisation.
Mme la présidente. Je suis saisie de dix-sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les cinq premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 185 rectifié est présenté par MM. Barbier, Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Requier et Vall.
L’amendement n° 248 rectifié bis est présenté par MM. Danesi, Calvet, Commeinhes et de Legge, Mme Duchêne, MM. Grand et Laménie, Mme Mélot et MM. Reichardt, de Raincourt, P. Leroy et Husson.
L’amendement n° 570 est présenté par M. Vasselle.
L’amendement n° 578 rectifié bis est présenté par MM. Houpert, Saugey, Joyandet, Lefèvre, Charon, Guerriau et Cambon.
L’amendement n° 1169 rectifié est présenté par MM. Bonnecarrère, Médevielle et Kern.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 4 et 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 185 rectifié.
M. Gilbert Barbier. Pour avoir écouté Mme le rapporteur évoquer cet article, il est vrai assez particulier, je souhaiterais savoir s’il revient au médecin de rechercher l’efficience ou l’efficacité des médicaments. La nuance existant entre ces deux notions ne me semble pas ressortir clairement de son propos.
Selon moi, le médecin doit avant tout viser l’efficacité du médicament qu’il prescrit à son patient.
Les médecins sont déjà submergés d’informations de toutes sortes et de recommandations les plus diverses. Ces nouvelles listes vont irriter, en ce qu’elles vont conduire à infantiliser la profession médicale.
Écrire que, pour telle affection, vous avez l’obligation de prescrire tel médicament…
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Il n’y a aucune obligation !
M. Gilbert Barbier. … c’est aller trop loin dans la redéfinition du rôle du médecin, lequel doit juger de sa prescription au regard de son patient, et non, comme cela vient d’être dit, en fonction de tests généraux d’un médicament.
Une telle mesure provoquera de surcroît la suspicion du patient, dès lors qu’il constatera que le médicament prescrit n’apparaît pas dans la liste, qui aura entre-temps été citée dans les médias et connue du grand public.
La nécessité de ces listes préférentielles ne m’apparaissant pas urgente, il est préférable, me semble-t-il, de supprimer les alinéas 4 et 5 de cet article 35.
Mme la présidente. La parole est à M. René Danesi, pour présenter l’amendement n° 248 rectifié bis.
M. René Danesi. Cet amendement identique vise en effet à supprimer ces deux alinéas.
La Haute Autorité de santé a été investie par la loi du 21 décembre 2011 d’une mission d’évaluation de l’efficience des médicaments, que l’alinéa 5 de cet article tend à élargir à l’élaboration d’un « guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes », ainsi que de « listes de médicaments à utiliser préférentiellement, à destination des professionnels de santé ».
Afin de bien mesurer la portée de cet élargissement, il est nécessaire de définir la notion d’efficience. En effet, ne figureront sur cette liste que les médicaments considérés comme les plus efficients par la HAS.
L’efficience, ici, doit être comprise comme le produit de la comparaison médico-économique de deux stratégies alternatives portant sur les coûts et l’efficacité ou l’utilité des traitements. Les ratios coût-efficacité, d’une part, et coût-utilité, d’autre part, traduisent l’efficience de la stratégie thérapeutique étudiée.
Certains médicaments innovants qui améliorent ou prolongent la vie ne seront donc pas considérés comme efficients, car ils seront comparés à des médicaments anciens devenus peu coûteux. Dans un classement des médicaments selon leur efficience, ces traitements innovants n’apparaîtraient qu’en fin de liste, voire, s’ils devaient dépasser le seuil d’efficience, en seraient exclus. Cela pourrait entraîner une perte de chance pour les patients français, à l’instar de ce qui se passe déjà en Grande-Bretagne, où un tel seuil a été institué.
Ce risque apparaît plus sérieux encore si l’on considère la portée juridique des recommandations de la HAS. Un arrêt du Conseil d’État du 27 avril 2011, relatif à une recommandation professionnelle de la HAS à propos du traitement médicamenteux du diabète de type 2, les a rendues de facto obligatoires.
M. René Danesi. Dès lors qu’elles sont rédigées de façon impérative, ce qui est, à l’évidence, le cas d’une liste, ces recommandations sont obligatoires !
À terme, le risque existe que seuls les médicaments et les thérapies figurant sur la liste soient remboursés. Alors, la liberté de choix du professionnel de santé n’existera plus.
Or la liberté du médecin est déjà très encadrée par l’assurance maladie, dont il doit obtenir l’accord préalable pour le remboursement d’une prescription considérée comme coûteuse. En témoigne la décision de l’assurance maladie, en date du 23 septembre 2014, soumettant à accord préalable le remboursement de plusieurs médicaments anticholestérol, qui découle du non-respect des recommandations de la HAS par les médecins. Selon l’assurance maladie, en d’autres termes, ces traitements ont été trop prescrits, alors même qu’il s’agit de médicaments de ville dont le coût unitaire n’est pas très élevé.
Pour toutes ces raisons, il ne me semble pas judicieux de maintenir cet alinéa 5. Je vous propose donc de le supprimer.
Mme la présidente. L’amendement n° 570 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Alain Houpert pour présenter l’amendement n° 578 rectifié bis.
M. Alain Houpert. Cet amendement ayant déjà été défendu, permettez-moi de donner mon avis de médecin.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Docteur Houpert !
M. Alain Houpert. Sénateur je suis, médecin je reste ! (Sourires.)
Avec ces alinéas 4 et 5, nous risquons d’ouvrir la boîte de Pandore et d’accroître la défiance envers les médecins, comme l’a dit mon collègue et confrère Gilbert Barbier.
Ce texte préconise la rédaction d’un guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes. Mais c’est quoi, l’efficience ? Quels en sont les critères ?
Il impose également l’établissement d’une liste de médicaments à utiliser préférentiellement, à l’intention des professionnels de santé.
Dans la relation entre le patient et le médecin, il y a un chef d’orchestre, le médecin, car chaque patient est unique.
Permettez-moi une anecdote : le cancer de l’estomac a pratiquement disparu, parce que l’on a utilisé des antibiotiques, et c’est ensuite que l’on a découvert l’helicobacter pylori.
En faculté de médecine, on dit souvent que la médecine n’est pas une science, mais un art. Mais, si c’était une science, ce serait bien la science du doute !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Médevielle pour présenter l’amendement n° 1169 rectifié.
M. Pierre Médevielle. L’article 35 du projet de loi modifie l’article L.161-37 du code de la sécurité sociale en confiant une mission supplémentaire à la HAS : l’élaboration et la validation, « dans des conditions définies par décret », d’un « guide des stratégies thérapeutiques et diagnostiques les plus efficientes ainsi que des listes de médicaments à utiliser préférentiellement, à destination des professionnels de santé ».
Chacun est favorable au juste usage des médicaments et à la recherche de l’efficience des dépenses de santé, dans le cadre d’un dialogue entre les industriels et les pouvoirs publics, afin de dégager des économies et de favoriser l’accès des patients à l’innovation. Cet article ne permet toutefois pas de répondre à ces préoccupations et suscite plusieurs commentaires.
La création d’une nouvelle catégorie de listes à destination des professionnels de santé risque de complexifier davantage l’environnement dans lequel ceux-ci exercent. De multiples listes, référentiels ou recommandations sont déjà élaborés pour les aider à rendre leurs prescriptions plus efficientes.
Ainsi, les avis des commissions de transparence, diffusés obligatoirement aux professionnels de santé par la visite médicale, comprennent un chapitre détaillé relatif à la place du médicament objet de l’évaluation dans la stratégie thérapeutique. Ces développements sont destinés à préciser le positionnement du médicament par rapport à ses concurrents déjà présents sur le marché, lesquels sont utilisés comme comparateurs dans les mêmes indications.
Des fiches de bon usage sont également élaborées par la HAS. Elles ont pour but de faire connaître les résultats de l’évaluation d’un médicament ou d’une classe thérapeutique par la commission de la transparence.
Le niveau d’efficacité, c’est-à-dire le progrès que les médicaments évalués sont susceptibles d’apporter aux patients ou à certains groupes de patients, permet de préciser la place de ces médicaments dans la stratégie thérapeutique au regard des moyens déjà disponibles. Ces fiches visent ainsi à apporter des informations essentielles au bon usage de ces médicaments par les professionnels de santé concernés.
Les recommandations de la HAS sur la prise en charge globale des pathologies peuvent, en outre, comporter des développements relatifs aux traitements médicamenteux prescrits dans ce cadre.
Sur son site internet, l’Agence nationale pour la sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, considère que l’élaboration et la diffusion des « recommandations de bonne pratique concernant les produits de santé » constituent l’une de ses missions.
Principalement destinées aux professionnels de santé, ces recommandations « définissent une stratégie médicale optimale en fonction de l’état des connaissances. Elles précisent ce qu’il est utile ou inutile de faire dans une situation clinique donnée. Les recommandations résultent principalement de l’analyse des données de la littérature scientifique ; de l’évaluation des données utilisées pour octroyer les autorisations de mise sur le marché, pour apprécier le service médical rendu et pour élaborer les fiches de transparence de la consultation des experts, des sociétés savantes ».
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Pierre Médevielle. L’évaluation de l’efficience des médicaments est une mission récente de la HAS. La commission évaluation économique et de santé publique, ou CEESP, doit désormais émettre un avis sur les médicaments sollicitant une amélioration du service médical rendu, ou ASMR, de I à III, ayant un impact important sur les dépenses d’assurance maladie. Une douzaine d’avis d’efficience attendue ont déjà été rendus.
Les évaluations sur l’efficience en vie réelle des produits seront rendues dans quelques années. Les avis de la CEESP donnent un avis éclairé sur l’efficience des médicaments concernés.
Mme la présidente. Mon cher collègue, nos temps de parole ont changé, il faut en tenir compte : je vous demande de conclure !
M. Pierre Médevielle. Au vu de la complexité de cette évaluation, du faible nombre d’avis publiés et du manque de recul sur cette démarche, l’élaboration d’un guide des stratégies thérapeutiques les plus efficientes, comme de listes de médicaments reposant sur ce guide, paraît très prématurée.
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous demande de respecter les temps de parole plus restreints que prévoit notre nouveau règlement !
M. Yves Daudigny. Règlement que nous avons tous voté !
Mme Annie David. Non, pas nous !
Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 249 rectifié bis est présenté par MM. Danesi, Calvet et Commeinhes, Mme Duchêne, MM. Grand et Laménie, Mme Mélot et MM. Reichardt, de Raincourt, P. Leroy et Husson.
L’amendement n° 299 rectifié bis est présenté par M. Gilles, Mme Cayeux, MM. de Nicolaÿ, B. Fournier et Lefèvre, Mmes Deromedi, Hummel et Garriaud-Maylam et M. Trillard.
L’amendement n° 571 est présenté par M. Vasselle.
L’amendement n° 584 rectifié ter est présenté par MM. Houpert, Saugey, Joyandet, Charon, Guerriau et Cambon.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à M. René Danesi, pour présenter l’amendement n° 249 rectifié bis.
M. René Danesi. Madame la présidente, permettez-moi une observation préalable : examiner à cet instant des amendements de repli revient à considérer que la suppression des alinéas 4 et 5 prévue par les premiers amendements identiques sera repoussée par le Sénat. Ne préjugeons-nous pas ainsi le vote ?
Mme la présidente. Mon cher collègue, ces amendements sont en discussion commune et sont donc appelés comme le prévoit le règlement.
M. René Danesi. Pardonnez-moi, n’étant membre de cette assemblée que depuis un an, je suis encore en apprentissage ! (Sourires.) Et pourrais-je aller jusqu’à demander que ces propos soient décomptés de mon temps de parole ?... (Protestations au banc des commissions.)
L’alinéa 5 prévoit que le guide des stratégies diagnostiques et thérapeutiques les plus efficientes ainsi que la liste de médicaments à utiliser préférentiellement seront élaborés par la Haute Autorité de santé dans des conditions définies par décret.
Au vu de l’importance des enjeux pour tous les acteurs du secteur, il n’est pas opportun que les conditions dans lesquelles seront élaborés ce guide et ces listes soient définies par un décret simple, c’est pourquoi je vous propose que ce décret soit pris en Conseil d’État.
J’ai déjà évoqué l’arrêt du Conseil d’État du 27 avril 2011 selon lequel les recommandations de la HAS sont obligatoires, dès lors qu’elles sont rédigées de façon impérative, ce qui est, à l’évidence, le cas d’une liste.
En outre, deux arguments plaident en faveur d’un tel décret.
Tout d’abord, la mise en œuvre de ce guide, et de ces listes, alors que l’application de l’alinéa 5 soulève de nombreuses interrogations, apparaît extrêmement complexe. En toutes circonstances, l’avis du Conseil d’État apporte la garantie de la régularité juridique des décisions. En l’espèce, il résultera en sus d’une analyse approfondie tenant compte des différents enjeux en matière de santé publique et de la consultation des organismes concernés.
Le second argument est purement juridique, mais non des moindres pour autant. L’article 47 de la loi du 21 décembre 2011 a investi la HAS de la mission d’évaluation médico-économique, qui conduit directement aux avis d’efficience sur les médicaments. Or cette loi prévoit expressément que les modalités de cette évaluation seront définies par décret en Conseil d’État. Le décret du 2 octobre 2012 en est le fruit.
Par souci de cohérence, il est logique que l’alinéa 5 élargissant cette mission et s’intégrant dans le même article L. 161-37 du code de la sécurité sociale prévoie également un décret en Conseil d’État.