Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.
Mme Laurence Cohen. Alors que les besoins en psychiatrie sont immenses, je déplore la faible place que ce texte accorde à cette spécialité : 2 articles sur les 200 que comptait le projet de loi tel qu’il a été adopté par l'Assemblée nationale.
Notre pays a toujours été le fer de lance d’une psychiatrie humaine et bienveillante, mais les différentes politiques menées depuis des années lui ont porté de rudes coups.
Comment redévelopper la psychiatrie de secteur, afin de mener une politique de santé mentale innovante et humaine, qui tienne compte des patients ?
Les professionnels parlent à juste titre de recul. Ils nous alertent sur le recours de plus en plus répandu à la contention. Un texte du Collectif des 39 circule à ce sujet et, dernièrement, lors d’un colloque qui s’est tenu au Sénat, le Dr Jean-Claude Pénochet, président du syndicat des psychiatres des hôpitaux, a dénoncé la situation en ces termes : « La contention est un indicateur de la bonne ou de la mauvaise santé de la psychiatrie. Plus elle va mal, plus la contention sera utilisée. »
Ils éprouvent désarroi et colère face à une psychiatrie centrée non plus sur la prise en charge de la souffrance du sujet et la continuité des soins, mais exclusivement sur la crise et l’abrasement du symptôme ; désarroi et colère face à un manque criant de moyens, notamment en nombre de postes d’infirmiers, de psychologues, de psychiatres.
À cela s’ajoute le fait que la formation n’est pas à la hauteur des défis de la psychiatrie du XXIe siècle. Pour en revenir à une psychiatrie soucieuse de la personne, centrée sur la relation thérapeutique, il est indispensable de développer une formation spécifique pour tous les soignants exerçant en psychiatrie.
Et comment ne pas évoquer le dénuement de la pédopsychiatrie, la non-reconnaissance du rôle et du statut des psychologues ?
Comment ne pas évoquer les restrictions budgétaires, les fermetures ou les regroupements d’hôpitaux ?
Tous ces facteurs ont pour conséquences des parcours de soins chaotiques, comme le dénoncent non seulement les professionnels, mais également les patients et leurs familles.
Pour toutes ces raisons, il est urgent d’élaborer une loi-cadre spécifique à la santé mentale et d’avoir une ambition à la hauteur des attentes et des besoins des patients et des personnels. Pour l’heure, nous sommes déçus que le présent projet de loi ne compte que deux articles consacrés à la psychiatrie.
J’espère, madame la ministre, que vous entendrez cet appel.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Mon propos s’inscrit dans la continuité de ceux de ma collègue Laurence Cohen.
Pour illustrer la réalité du terrain, permettez-moi d’évoquer la situation de l’hôpital psychiatrique du Vinatier, dont mon ami et collègue Guy Fisher a soutenu avec force les luttes.
Le Vinatier, situé dans la banlieue lyonnaise, est le plus important hôpital psychiatrique de France. Cet hôpital a malheureusement défrayé la chronique au début de l’année : un infirmier du Vinatier a été poignardé par un patient à la fin du mois de janvier ; deux patients se sont ensuite donné la mort, puis ce fut le cas d’un infirmier huit jours plus tard. En juin dernier, une jeune femme a été agressée sexuellement par un autre patient au sein des urgences. Il est à noter que ce patient était présent aux urgences depuis plus de dix jours, ce qui donne un premier aperçu des dysfonctionnements existant dans cet hôpital.
Comme l’indique l’ancienne médecin-chef des urgences, si les professionnels de la psychiatrie ont l’habitude de canaliser la violence, ils se trouvent dans un tel climat de saturation au Vinatier qu’il ne leur est plus possible d’éviter tous les accidents.
En effet, le personnel consacre une grande part de son énergie à trouver des lits, à faire face au manque de places et de moyens, si bien que la prise en charge curative passe au second plan.
Cette situation trouve son origine en 2013, quand quarante lits ont été fermés dans les services de cet hôpital. Résultat, les patients restent et s’entassent aux urgences, ce qui est loin de concourir à leur rétablissement. Le contrôleur général des lieux de privation des libertés ainsi que le bâtonnier ont rendu des rapports accablants : suroccupation chronique, conditions d’exercice des soins « susceptibles d’être à l’origine de violences non maîtrisées », etc.
Alertés, l’agence régionale de santé et le ministère des affaires sociales ont finalement accepté d’ouvrir une unité d’hospitalisation de très courte durée et d’expérimenter des urgences départementales. Or ces projets semblent être davantage politiques que médicaux, et servent de vitrine au directeur, par ailleurs fortement critiqué.
En effet, au-delà de la question des moyens, la situation de l’hôpital du Vinatier serait due, selon l’ensemble des acteurs, à l’impossibilité de dialoguer avec la direction. Ainsi, il faudrait créer des systèmes permettant de contrecarrer les pouvoirs des directeurs ou directrices d’établissement et de prendre davantage en compte l’avis des professionnels, et ce afin de garantir des soins de qualité aux patients.
Mme la présidente. L'amendement n° 1205, présenté par Mmes Deroche et Doineau et M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 4° de l’article L. 3215-2, les mots : « de l’article L. 3212-7, » sont supprimés ;
II. – Alinéas 20 et 37
Remplacer la référence :
L. 1434-11
par la référence :
L. 1411-11-2
III. – Alinéa 30
Supprimer les mots :
et du conseil territorial de santé mentionné à l’article L. 1434-9
IV. – Alinéa 34, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
V. – Alinéa 41
Supprimer les mots :
de territoires
VI. – Après l’alinéa 48
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° À l’article L. 3221-4-1, les mots : « au second alinéa de l’article L. 3221-1 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 3221-1 ».
La parole est à M. Alain Milon, corapporteur.
M. Alain Milon, corapporteur. Cet amendement vise à procéder à différentes coordinations.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 727, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Après les mots :
niveau territorial suffisant
insérer les mots :
dans la limite de soixante-quinze mille habitants
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. J’ai souligné, dans mon intervention sur l’article 13, toute l’inquiétude du groupe CRC sur la faible part consacrée à la psychiatrie dans le présent projet de loi.
Les secteurs constituaient la base de l’organisation publique avant le plan Hôpital 2007 et la loi HPST de 2009. Cette sectorisation a pourtant perduré en psychiatrie, car elle est la plus à même de répondre aux exigences en matière de continuité des soins.
Pourtant, l’article 13 prévoit de remettre en cause ce qui subsiste de la politique de secteur, dont le fondement principal est non pas le « quadrillage » des populations, mais la continuité des soins de prévention, de cure et de post-cure au long cours par la même équipe.
S’il était adopté l’article 13, les missions de la psychiatrie pourraient se limiter au traitement de la crise, à la suppression des symptômes, à la normalisation des comportements et des populations, y compris dans les centres d’accueil thérapeutique à temps partiel. La continuité des soins serait assurée par les médecins généralistes, tandis que la continuité de la prise en charge serait garantie par le secteur médico-social.
Avec cette loi, les ARS auraient à redéfinir le territoire des secteurs : une base de 200 000 habitants nous est proposée, ce qui correspond à trois secteurs actuels et reviendrait à généraliser la mise en place des grands pôles, comme le prévoyait d’ailleurs initialement le plan Hôpital 2007. Dans ces conditions, comment suivre les patients ?
On nous dit déjà que des patients souffrant de troubles psychiatriques se retrouvent aujourd'hui dans les prisons. Qu’adviendra-t-il demain ?
En outre, l’hospitalisation n’étant plus sectorisée, il y aura de fait mise en concurrence avec des établissements privés à but lucratif.
Madame la ministre, en triplant la population concernée dans un secteur – de 75 000 à 200 000 habitants –, le risque est grand de voir le secteur devenir une entité gestionnaire, un instrument de quadrillage, ce qui annihilerait les raisons mêmes de son existence.
C’est la raison pour laquelle nous souhaitons maintenir la limite des secteurs à 75 000 habitants, comme c’est actuellement le cas.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Mme Cohen propose que les projets territoriaux de santé ne puissent pas être élaborés et mis en œuvre à l’échelle d’un bassin de vie excédant 75 000 habitants.
Son amendement pose, outre un problème de rédaction, un problème de fond : s’il était adopté, il remettrait en cause la souplesse permise par l’alinéa 17 de l’article 13 dans sa rédaction actuelle. Or si les secteurs couvrent des territoires comptant en moyenne 75 000 habitants, il faut tenir compte des territoires pour lesquels l’application stricte de cette limite pourrait poser problème pour la mise en œuvre d’une véritable coordination.
La commission souhaite obtenir du Gouvernement des précisions sur ce sujet ; en tout cas, elle a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 727, pour le cas où il ne serait pas retiré.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je suis défavorable à cet amendement, qui vise à instaurer un cadre beaucoup trop rigide.
Si les premiers textes sur la politique psychiatrique sectorielle fixaient une référence de population, il est très vite apparu que ce principe était peu adapté à la réalité du terrain. De fait, il faut pouvoir tenir compte à la fois des bassins de population, des caractéristiques de la population et de sa densité, ainsi que de l’offre de soins qui existe par ailleurs. Au demeurant, la plupart des professionnels de santé du secteur sont attachés à la possibilité de disposer de la souplesse nécessaire dans la définition de leur organisation et dans la prise en charge des patients.
L’adoption de votre amendement, madame la sénatrice, rigidifierait un système qui a besoin de souplesse !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Notre intention n’est pas de rigidifier les règles, elle est de donner suite aux alertes que les professionnels du secteur psychiatrique lancent aux parlementaires que nous sommes.
Au cours des auditions que la commission des affaires sociales a tenues, mais aussi de celles qui ont été organisées par notre groupe, un certain nombre de ces professionnels nous ont alertés avec insistance sur l’état actuel de la psychiatrie. Or ils demandent non pas un éloignement, mais une proximité plus grande, ainsi qu’un meilleur suivi des patients. Comment peut-on prétendre relever une psychiatrie qui a été mise à mal du fait de l’élargissement des secteurs ?
Nous avons besoin d’une psychiatrie humaine, qui suive les patients ; d’une psychiatrie qui n’enferme pas, ni ne recoure à la camisole médicamenteuse pour calmer les patients. À cet égard, les sénatrices et les sénateurs de notre groupe ont été particulièrement sensibles aux témoignages non seulement des personnels psychiatriques, mais aussi des patients. Ces derniers nous ont signalé que, dans un contexte de dénuement des personnels, le recours aux traitements médicamenteux, voire à des contentions et des enfermements, était de plus en plus fréquent. Je tiens à souligner que ces pratiques n’avaient pas cours naguère, grâce au rôle pionnier joué par la psychiatrie française ; songeons à des figures emblématiques comme Bonnafé.
Aujourd’hui, on fait comme si la psychiatrie allait bien, et on persévère dans une voie qui me semble extrêmement néfaste pour la santé mentale, qui est un enjeu de société : il s’agit de savoir quel projet nous élaborons pour la société d’aujourd’hui et de demain. Ce n’est pas une question de rigidité, c’est une affaire de projet politique !
Mme la présidente. L’amendement n° 178 rectifié bis, présenté par MM. Vasselle, B. Fournier et Laménie, Mme Hummel et MM. Mayet et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 19, seconde phrase
Après les mots :
, les professionnels
insérer le mot :
, centres
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement vise à réparer ce qui me paraît être un oubli : les centres de santé ne sont pas cités parmi les acteurs associés à l’élaboration du projet territorial de santé mentale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. À vrai dire, il ne s’agit pas d’un oubli : la rédaction de l’alinéa 19 est générale et non exhaustive ; elle n’exclut pas que les centres de santé puissent être associés à l’élaboration de ce projet, sans compter qu’elles couvrent les professionnels qui travaillent en leur sein.
Par ailleurs, pour des raisons de clarté, il nous paraît difficile de citer uniquement les centres de santé sans faire référence aussi aux maisons de santé, aux pôles de santé et à d’autres structures. Si nous citons l’une d’entre elles, il faut les citer toutes, et nous risquons d’en oublier ! Mieux vaut donc nous en tenir à une formulation générale.
Je prie donc M. Vasselle de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Vasselle, l’amendement n° 178 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Puisqu’il est satisfait, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 178 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 81 rectifié, présenté par MM. Commeinhes, Charon et Calvet, Mme Deromedi, M. Houel et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment l’actualisation du projet régional de santé et des documents qui le constituent
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. L’intérêt majeur d’un diagnostic des insuffisances de l’offre de prestations en santé sur le territoire est de permettre l’actualisation des documents supports de la régulation publique de cette offre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Ma chère collègue, cet amendement paraît superfétatoire compte tenu de la logique de l’article 38 du projet de loi. Cet article prévoit une planification stratégique et un diagnostic territorial, et il est raisonnablement permis de penser que la première repose nécessairement sur le second. Si le diagnostic territorial réalisé en santé mentale fait l’objet de modalités spécifiques, il est explicitement mentionné aux alinéas 50 et 51 du même article, qui régissent le diagnostic territorial partagé.
En outre, l’alinéa 19 de l’article 13 prévoit clairement que le projet territorial spécifique au secteur de la santé mentale sera défini sur le fondement de ce diagnostic.
Enfin, pour des raisons de parallélisme, il paraît difficile de préciser explicitement que le diagnostic territorial détermine l’actualisation du projet régional de santé pour le seul secteur de la santé mentale.
Pour ces raisons, nous sollicitons le retrait de cet amendement ; à défaut, nous émettrons un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Deromedi, l’amendement n° 81 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jacky Deromedi. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
L’amendement n° 1108, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 26
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° À un programme d’accès rapide et de maintien dans le logement pour les personnes à la rue, en situation de précarité sociale sévère, et souffrant de troubles psychiques graves et d’addiction, moyennant un accompagnement pluridisciplinaire assuré par l’ensemble des acteurs mentionnés à l’article L. 3221-1.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Parmi les personnes souffrant de troubles psychiques sévères, les personnes à la rue en situation de précarité sociale sévère échappent souvent aux actions de prévention, de soin et d’insertion proposées.
Afin d’assurer à tous, en particulier aux personnes les plus vulnérables, un égal accès aux services, nous proposons de déployer sur les territoires, dans le cadre du projet territorial de santé mentale, des dispositifs adaptés aux besoins des sans-abri les plus fragiles, ceux qui souffrent de troubles psychiques et d’addictions et cumulent les plus grandes difficultés.
Nous nous inspirons du programme de recherches « Un chez-soi d’abord », qui fait le pari d’orienter directement ces personnes vers un logement ordinaire, sans condition de traitement ni d’arrêt des consommations de produits psychoactifs, en leur prodiguant un accompagnement très soutenu assuré par une équipe pluridisciplinaire médico-sociale. Cette démarche casse donc les frontières traditionnelles entre l’action sociale, la psychiatrie, l’addictologie, et l’accès au logement.
Les premiers résultats de ce programme, expérimenté depuis avril 2011 dans quatre grandes villes françaises, montrent un maintien dans le logement pour plus de 80 % des 350 personnes accompagnées, une réduction de moitié des temps d’hospitalisation dans le cadre de parcours de santé coordonnés associant l’ensemble des acteurs concernés sur le territoire, mais aussi une diminution des symptômes et une amélioration de la qualité de vie et du rétablissement des personnes.
Les premiers éléments d’évaluation font apparaître que l’expérimentation est un outil efficace pour la coopération entre les acteurs de la santé, du social, du médico-social, de l’addictologie et du logement, et qu’elle favorise, aux échelles nationale et locale, un décloisonnement global.
Du point de vue des pratiques professionnelles, le programme, fondé sur la philosophie du rétablissement, apparaît comme un laboratoire favorisant l’innovation autour de la pluridisciplinarité, l’apport des médiateurs de santé pairs et les pratiques collaboratives.
Enfin, il apparaît que ce programme permet globalement de réaliser des économies, tant sur le plan de la santé que sur le plan de l’hébergement et de l’accompagnement social.
Mme la présidente. L’amendement n° 1104, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 28
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un programme relatif au maintien dans le logement et d’accès au logement et à l’hébergement accompagné est développé pour les personnes en souffrance psychique qui en ont besoin.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Ma chère collègue, des programmes du type de ceux qui sont visés par les amendements nos 1108 et 1104 pourront être mis en œuvre en application des alinéas 26 et 27 de l’article 13. Afin de garantir la bonne intelligibilité de la loi, la commission a estimé qu’il n’était pas opportun d’aller aussi loin dans les détails que vous le proposez dans le cadre d’un article qui fixe des principes généraux.
Je vous prie donc de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. La question que vous soulevez est tout à fait importante. Il apparaît en effet nécessaire de proposer une offre telle que celle que vous avez présentée, qui est vraiment de nature sanitaire puisque l’accès au logement fait partie du processus thérapeutique.
Si je comprends très bien la position de M. le rapporteur, qui considère que, tel qu’il est actuellement rédigé, le projet de loi permet déjà cette offre, je suis également très sensible au type de programme que vous évoquez, madame Archimbaud. Dans la mesure où il est novateur, il me paraît utile de la mettre en avant. Le programme international de recherches « Un chez-soi d’abord », qui s’implante en France, ouvre à cet égard des perspectives intéressantes.
Madame Archimbaud, vos deux amendements sont assez voisins, mais l’amendement n° 1108 vise à la fois les personnes en situation de précarité et les personnes ayant besoin de soins psychiatriques, tandis que l’amendement n° 1104 porte plus précisément sur les personnes recevant des soins psychiatriques. Compte tenu de l’objet du présent projet de loi, je vous suggère de retirer le premier, étant entendu que je suis favorable au second.
Mme la présidente. Madame Archimbaud, l’amendement n° 1108 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Je remercie Mme la ministre d’encourager cette démarche et je retire bien volontiers l’amendement n° 1108.
M. Alain Milon, corapporteur. Je souscris au propos de Mme la ministre : de toute évidence, nous ne sommes pas hostiles à ce que les personnes atteintes de troubles psychiques graves puissent disposer d’un appartement thérapeutique où elles seraient suivies. Encore faut-il que l’on dispose des moyens d’assurer ce suivi, s’agissant notamment des infirmières psychiatriques, ce qui me paraît incertain ; et que l’on dispose de suffisamment de logements pour l’ensemble des malades, ce qui ne me semble pas être encore le cas.
Si Mme la ministre émet un avis favorable sur l’amendement n° 1104, c’est qu’elle estime pouvoir fournir des appartements à l’ensemble des malades psychiatriques qui en ont besoin ; dans ces conditions, nous suivons son avis.
Mme la présidente. L’amendement n° 44 rectifié, présenté par MM. Commeinhes, Charon et Calvet, Mme Deromedi, MM. D. Robert, Malhuret, César, B. Fournier et Mouiller, Mme Mélot et M. Houel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 31
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Une publication, sur le site de l’agence régionale de santé, du diagnostic territorial partagé est obligatoire, visant à permettre aux établissements de santé publics et privés, aux structures médico-sociales, aux professions libérales de la santé et aux représentants d’associations d’usagers agréées de prendre connaissance des actions et modalités.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Le présent projet de loi prévoit un pacte territoire-santé. Dans un souci de transparence vis-à-vis de l’ensemble des acteurs de santé du territoire, ce pacte doit être accessible à tous sur le site internet des agences régionales de santé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1133 rectifié, présenté par MM. Amiel et Guérini, Mme Malherbe et M. Requier, n’est pas soutenu.
L'amendement n° 467, présenté par Mme Génisson, M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas et Féret, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 35
1° Remplacer les mots :
signataires d’un même contrat territorial de santé peuvent constituer entre eux une communauté psychiatrique de territoire
par les mots :
peuvent constituer une communauté psychiatrique de territoire
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ils en ont l’obligation en cas d’absence de groupement hospitalier de territoire relatif à l’activité de psychiatrie.
La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. L’article 13 vise à mettre en place une nouvelle politique de santé mentale et d’organisation de la psychiatrie. À cet effet, il ouvre la possibilité aux établissements « signataires d’un même contrat territorial de santé mentale » de « constituer entre eux une communauté psychiatrique de territoire pour la définition et la mise en œuvre de leur projet médical d’établissement ».
Notre amendement tend à rendre obligatoires les communautés psychiatriques de territoire pour l’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la psychiatrie, et ce sur un territoire pertinent en termes de parcours de soins et de vie ainsi qu’en l’absence de groupement hospitalier de territoire relatif à l’activité de psychiatrie.
Cette obligation nous apparaît primordiale eu égard à la nécessité d’articuler et de coordonner l’ensemble des actions avec les champs médico-social et social.
Précédemment, j’ai dénoncé le caractère trop souvent prescriptif des amendements présentés. Si j’ai conscience que celui-ci l’est quelque peu, je considère que la psychiatrie constitue un domaine à part entière et qu’il est difficile de ne pas en tenir compte. Elle est, en quelque sorte, une « médecine à côté de la médecine ».
Pour autant, je vais écouter attentivement les arguments présentés successivement par M. le corapporteur et par Mme la ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Madame Génisson, je vous remercie de m’écouter avec attention (Sourires.), même si je rappelle qu’un débat sur ce sujet a déjà eu lieu hier soir en commission. J’essaierai donc d’être bref, afin de laisser Mme la ministre exposer sa position plus longuement.
L’article 13 constitue le pendant, dans le secteur psychiatrique, des articles 12 et 12 bis, qui permettent aux professionnels de travailler en coopération, selon diverses formules. Afin de garantir leur efficacité, les différents groupements ainsi créés doivent l’être sur l’initiative des professionnels de santé. Ils ne sauraient, dès lors, être constitués de manière coercitive, surtout en milieu psychiatrique.
Par ailleurs, nous avons rencontré les représentants du secteur – vous étiez d’ailleurs présente, madame Génisson – et ceux-ci se sont déclarés satisfaits du point d’équilibre atteint par cet article 13. Il ne nous paraît donc pas, à ce stade, souhaitable de le remettre en cause.
Par conséquent, la commission vous prie de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.