M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Certes…
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Cependant, je ne vais pas ranimer des débats antérieurs.
Je vous confirme que la rédaction retenue dans l’amendement provient du Conseil d’État. Ce n’est donc pas une initiative de l’administration.
L’enjeu est clair : si le Sénat conserve la version du texte élaboré par la commission, nous nous trouverons avec deux établissements qui seront privés d’un certain nombre de compétences essentielles à leur activité. Même si la formule vous paraît un peu résumée, monsieur le rapporteur, le rattachement des établissements publics fonciers et d’aménagement de Guyane et de Mayotte à une catégorie d’établissement public existant représente la solution la plus satisfaisante.
Dans un souci de simplification, le Conseil d’État a proposé une rédaction en se référant à ce qui existe déjà dans un texte. En fait, ce que vous avez jugé incompréhensible est assez simple : on prend un bloc, duquel on soustrait les dispositions qui ne sont pas applicables en raison de la spécificité de ces établissements. Je pense que la démarche est cohérente et que, si la rédaction juridique est très ramassée, on ne peut pas en faire grief aux auteurs.
En tout état de cause, si cet alinéa n’était pas rétabli, on se trouverait confronté non plus à un problème de rédaction juridique mais à un véritable « vide » quant aux objectifs mêmes du dispositif.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. À l’issue de nos auditions, nous avions expliqué les raisons pour lesquelles cet alinéa était mal rédigé. Nous avions donc demandé à ce qu’il soit réécrit. Les services de la direction générale à l’outre-mer s’y étaient engagés auprès de moi, mais cela n’a pas été fait.
En réalité, nous ne sommes pas du tout opposés au but visé puisque nous sommes d’accord pour appliquer le statut de l’AFTRP aux établissements publics considérés, sous réserve de quelques modifications relatives à leurs missions.
Je suis désolé, mais la rédaction de cet alinéa reste insatisfaisante. Je vais quand même m’en remettre à la sagesse du Sénat, mais il faudra veiller à la corriger à l’Assemblée nationale.
3
Demande d’avis sur un projet de nomination
M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, M. le Premier ministre, par lettre en date du 25 juin 2015, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente sur le projet de nomination de M. Christian Dubreuil aux fonctions de directeur général de l’Office national des forêts.
Cette demande d’avis a été transmise à la commission des affaires économiques.
Acte est donné de cette communication.
4
Décisions du Conseil constitutionnel sur deux questions prioritaires de constitutionnalité
M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 26 juin 2015, deux décisions du Conseil relatives à des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur :
- l’imposition des dividendes au barème de l’impôt sur le revenu – Conditions d’application de l’abattement forfaitaire (n° 2014-473 QPC) ;
- l’imposition des plus-values latentes afférentes à des actifs éligibles à l’exonération postérieurement à l’option pour le régime des SIIC (n° 2015-474 QPC).
Acte est donné de ces communications.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Modernisation du droit de l'outre-mer
Suite de la discussion et adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à la modernisation du droit de l’outre-mer.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la section 1 du chapitre II, aux amendements portant article additionnel après l’article 5.
Articles additionnels après l’article 5
M. le président. L’amendement n° 21 rectifié, présenté par MM. Patient, Karam, S. Larcher, Desplan, Mohamed Soilihi, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au neuvième alinéa de l’article 1394 et au V de l’article 1400 du code général des impôts, les mots : « forêts et terrains » sont remplacés par les mots : « bois et forêts ».
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Le présent amendement vise à apporter une correction rédactionnelle à l’article 1394 du code général des impôts qui assujettit les forêts de l’État à la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la TFNB, et à l’article 1400 du même code qui désigne l’Office national des forêts, l’ONF, comme le redevable de cette taxe. En effet, la rédaction actuelle de ces deux articles n’est pas conforme aux formulations comprises dans les articles L. 211-1 et L. 221-2 du nouveau code forestier réécrits par l’ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012 et qui définissent le régime forestier et les missions essentielles de l’ONF.
Il s’agit de prévenir toute incertitude sur l’identification des biens de l’État pour lesquels l’exonération permanente de TFNB a été expressément levée par le législateur. Conformément aux conclusions du rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer sur les domaines public et privé de l’État en outre-mer, il convient d’assurer, contre l’attentisme de l’administration fiscale, une application effective des dispositions du code général des impôts assujettissant à cette taxe la forêt guyanaise sous régime forestier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L’article 1394 du code général des impôts assujettit les forêts et terrains de l’État à la taxe foncière sur les propriétés non bâties, et l’article 1400 du même code désigne l’ONF comme le redevable de cette taxe.
M. Patient a raison de signaler que les termes employés dans le code général des impôts ne sont pas identiques à ceux qui figurent dans le code forestier tel qu’il résulte de l’ordonnance du 26 janvier 2012 relative à la partie législative du code forestier. Il convient néanmoins de s’assurer que la correction rédactionnelle proposée par notre collègue n’entraînerait pas de conséquences fiscales. La commission désire connaître l’analyse du Gouvernement à cet égard, et s’en remet à son avis sur l’amendement n° 21 rectifié.
M. le président. Madame la secrétaire d’État, je vous souhaite, au nom de l’ensemble de mes collègues, la bienvenue dans l’hémicycle du Sénat.
Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le président, je vous remercie de me souhaiter la bienvenue alors que je fais mes débuts au banc du Gouvernement de la Haute Assemblée, après y avoir siégé une première fois jeudi dernier, pour les questions d’actualité au Gouvernement.
Monsieur Patient, j’ai bien entendu vos arguments, mais le Gouvernement estime que la modification que vous proposez, a priori de nature rédactionnelle, entraînerait en réalité une incertitude sur l’assiette de la taxe acquittée par l’ONF, et donc sur les recettes fiscales de l’État. Son incidence serait d’autant plus forte que votre amendement ne porte pas seulement sur les outre-mer : il a une portée nationale. Une telle mesure ne peut être prise qu’à l’issue d’une concertation approfondie avec toutes les parties prenantes, et c’est dans le projet de loi de finances qu’elle devrait, le cas échéant, figurer.
Toutefois, le Gouvernement entend le souhait des parlementaires d’ouvrir un débat sur la gestion foncière en Guyane, notamment en ce qui concerne le domaine forestier, afin de définir un modèle économique, social et environnemental adapté à ce territoire. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que les parlementaires guyanais seront associés aux réflexions interministérielles qui ont d’ores et déjà été lancées par le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt et par celui des outre-mer.
Compte tenu de ces explications, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Patient, l’amendement n° 21 rectifié est-il maintenu ?
M. Georges Patient. Je consens à le retirer, monsieur le président, bien que cette question tourmente les élus guyanais. Mme la secrétaire d’État a annoncé que les parlementaires de Guyane seraient invités aux négociations prochaines : je suis disposé à patienter, mais j’espère ne pas avoir à attendre trop longtemps !
M. le président. L’amendement n° 21 rectifié est retiré.
L’amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Patient, Karam, S. Larcher, Desplan, Mohamed Soilihi, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 2° de l’article L. 272-1 du code forestier, avant la référence : « l’article L. 223-4 », sont insérés les mots : « Le 2° de l’article L. 223-1 et ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’Office national des forêts du I est compensée, à due concurrence, par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Cet amendement vise à exonérer les forêts des collectivités territoriales de Guyane des frais de garderie et d’administration normalement versés à l’ONF.
En effet, les projets de forêts communales en Guyane sont obérés par la nécessité d’acquitter ces frais, en vertu d’un dispositif national censé compenser les charges résultant pour l’ONF de l’application sous son autorité du régime forestier. Alors que leurs finances subissent un effet de ciseau lié à de faibles rentrées fiscales et à de lourdes charges consécutives aux besoins en équipements collectifs d’une population en forte croissance, les communes guyanaises ne peuvent assumer des frais qui s’élèvent à deux euros par hectare.
C’est pourquoi la délégation sénatoriale à l’outre-mer a proposé, dans son rapport sur les domaines public et privé de l’État en outre-mer rendu public le 18 juin dernier, de stimuler la création de forêts communales en Guyane en exonérant celles-ci de frais de garderie et d’administration ; cette mesure apporterait des ressources aux communes, tout en les rendant pilotes de l’exploitation du bois sur leur territoire. Par ailleurs, cette exonération au bénéfice des communes serait une juste contrepartie du non-versement de la TFNB par l’ONF, au mépris des dispositions du code général des impôts.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La proposition défendue par M. Patient est issue du récent rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer sur les domaines public et privé de l’État en outre-mer. Elle vise à stimuler la création de forêts communales en exonérant celles-ci de frais de garderie et d’administration ; elle donnerait aux communes des ressources nouvelles et les rendrait pilotes de l’exploitation du bois sur leur territoire. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Monsieur Patient, vous proposez d’exonérer les communes de Guyane des frais de garderie et d’administration versés à l’ONF, en faisant valoir que cette mesure leur donnerait des moyens financiers supplémentaires.
Le Gouvernement juge inopportune cette exonération, qui créerait un précédent préjudiciable aux recettes de l’ONF. Je vous rappelle que les frais de garderie et d’administration représentent une contribution des communes aux frais supportés par l’ONF dans le cadre de ses prestations de gestion de leur patrimoine. Le niveau de cette rémunération doit faire l’objet d’une réflexion globale, portant sur l’ensemble du territoire français. La mission interministérielle en cours sur le coût du régime forestier étudiera notamment cette question, et ses recommandations serviront de base aux négociations préalables à la conclusion du contrat d’objectifs et de performance de l’ONF pour la période 2016-2020.
Dans l’attente de ces discussions importantes, le Gouvernement vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Patient, l’amendement n° 23 rectifié est-il maintenu ?
M. Georges Patient. Oui, monsieur le président !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 5.
L’amendement n° 44, présenté par M. Soilihi, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est créé, à Mayotte, une conférence territoriale regroupant l’ensemble des acteurs fonciers publics et privés d’aménagement et de développement local qui se réunit une fois par an, sous l’autorité du représentant de l’État, afin de :
- cibler avec précision les réserves foncières à constituer,
- saisir les opportunités foncières pour les futurs aménagements,
- influer sur les prix de vente des terrains dans une logique anti-spéculative, en identifiant des moyens de libérer des terrains à des prix abordables dans des espaces stratégiques,
- ou encore garantir la cohérence et la qualité des projets d’aménagement,
- adapter l’établissement public foncier aux spécificités du département de Mayotte en réaffirmant la priorité des établissements publics fonciers locaux sur l’établissement public foncier de l’État.
La parole est à M. Abdourahamane Soilihi.
M. Abdourahamane Soilihi. Cet amendement est inspiré par le constat des irrégularités importantes qui entachent les opérations foncières à Mayotte, du fait notamment d’un cadastre qui n’offre pas une assise réellement opérationnelle à la fiscalité locale. Je propose de profiter de l’opportunité que représente l’examen du présent projet de loi pour instaurer non pas un système nouveau, mais plutôt une mesure originale qui prend réellement en compte les difficultés relatives aux parcelles qui pèsent à Mayotte sur la conduite d’opérations d’aménagement dignes du droit commun.
L’outil foncier devient un bien très cher, et cette cherté est accentuée par les mutations juridiques introduites de façon trop rapide à Mayotte – c’est là l’effet de la départementalisation, j’en conviens parfaitement. Les difficultés actuelles, techniques et juridiques, sont des freins nuisibles à toute opération d’aménagement dans la quasi-totalité des communes. Résultat : on observe des constructions sauvages en nombre d’endroits et les bidonvilles s’étendent, ce qui est inadmissible.
C’est pourquoi je propose la création d’une conférence territoriale composée de tous les acteurs de l’aménagement que j’ai mentionnés dans la discussion générale. Cette instance permettrait notamment de favoriser l’installation de notaires, qui manquent dans le département, ce qui sécuriserait les transactions. Bien sûr, rien ne s’oppose à ce que les différents acteurs compétents en matière foncière se réunissent pour débattre des problèmes fonciers du département ; mais il faut que la loi leur en donne l’autorisation, raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La situation foncière que vous venez de décrire, mon cher collègue, est connue. Je vous rappelle que le présent projet de loi prévoit la création obligatoire d’un établissement public foncier et d’aménagement de l’État, au sein duquel siégeront des représentants des collectivités territoriales, ce qui est un premier pas. Pour le reste, une conférence territoriale réunissant l’ensemble des acteurs fonciers publics et privés peut très bien exister en l’absence de disposition législative. (M. Thani Mohamed Soilihi opine.) En effet, les uns et les autres se concertent nécessairement, et rien ne s’oppose à ce qu’ils se réunissent pour débattre des problèmes fonciers du département.
Dans ces conditions, et même si je trouve votre idée intéressante, je vous demande, au nom de la commission, de bien vouloir retirer votre amendement, sous réserve que Mme la secrétaire d’État nous garantisse une réelle concertation entre les collectivités territoriales et l’État dans le domaine foncier.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Monsieur Soilihi, l’article 5 du projet de loi instaure à Mayotte un établissement public foncier et d’aménagement de l’État. Le conseil d’administration de cet établissement comprendra des représentants de l’État et de la collectivité territoriale de Mayotte. Il devra réaliser son projet stratégique et opérationnel sur la base d’une stratégie foncière élaborée en concertation étroite, bien entendu, avec les collectivités concernées.
Le présent amendement vise à créer une conférence territoriale dont les missions seraient identiques à celles des établissements publics fonciers et d’aménagement dont la création est prévue à l’article 5. Une telle instance serait donc, me semble-t-il, source de confusion et de complexification, et compromettrait sans doute aussi la réussite de l’établissement public avant même la création de ce dernier, au moment où la situation en termes d’aménagement foncier à Mayotte nécessite pourtant une stratégie claire.
À lumière de ces éléments, le Gouvernement vous demande de retirer cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Abdourahamane Soilihi, l'amendement n° 44 est-il maintenu ?
M. Abdourahamane Soilihi. Compte tenu de ces explications, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 44 est retiré.
L'amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Patient, Karam, S. Larcher, Desplan, Mohamed Soilihi, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
A. – Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre II du titre IV du livre Ier de la cinquième partie du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Après les mots : « collectivités territoriales », la fin de l’intitulé est ainsi rédigée : « , à leurs groupements et aux établissements publics en Guyane » ;
2° À la première phrase du 3° de l’article L. 5142-1, après les mots : « à leurs groupements », sont insérés les mots : « , au grand port maritime de la Guyane pour l’accomplissement de ses missions de service public ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section …
Aménagement foncier
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Le grand port maritime de la Guyane, mis en place au 1er janvier 2013 à la suite à la réforme des ports d’outre-mer, rencontre depuis sa création des difficultés, notamment financières. Malgré ces conditions difficiles, il a pu élaborer son projet stratégique pour la période 2014-2018.
La stratégie portuaire repose sur l’amélioration des conditions de fonctionnement du port et sur le développement à moyen terme d’activités permettant de valoriser les atouts guyanais. La capacité du grand port maritime à sécuriser et à maîtriser les approvisionnements passe par sa performance et par une optimisation du foncier public. Or les limites actuelles du port compromettent la mise en œuvre de son projet stratégique, y compris à court terme. Pour permettre son développement, l’État devrait lui céder trois parcelles de son domaine privé.
S’agissant d’un équipement public, il n’est pas illégitime que le grand port maritime de la Guyane revendique la cession à titre gratuit de terrains du domaine privé de l’État, ce qui lui permettra à très court terme d’améliorer le service portuaire, avec la mise en place d’un dispositif d’entrée et de sortie pour les conteneurs, et à moyen terme de préserver sa capacité de développement.
Je rappelle que des dispositions particulières à la Guyane figurant dans le code général de la propriété des personnes publiques prévoient déjà de nombreux cas de cessions gratuites : celles-ci peuvent être consenties en vue de la mise en valeur de terres agricoles, à des collectivités territoriales et à un établissement public d’aménagement, à des personnes morales en vue de l’utilisation des biens par les communautés d’habitants tirant leurs moyens de subsistance de la forêt et à des personnes physiques ayant construit leur résidence principale avant 1998.
Or, en l’état actuel des textes, aucune de ces dispositions particulières ne permet de cession gratuite à l’établissement public portuaire pour l’aménagement d’équipements collectifs. Le présent amendement a donc pour objet de permettre la cession à titre gratuit de parcelles du domaine privé de l’État au grand port maritime de la Guyane en élargissant la portée de l’article L. 5142-1 du code précité.
Je souligne d’ailleurs que, dans un courrier en date du 24 juin dernier adressé aux ministères concernés – les ministères de l’économie, des outre-mer, du budget, des transports, de la mer et de la pêche –, le préfet de Guyane avait souhaité qu’une issue favorable soit trouvée afin de permettre ces cessions à titre gratuit et proposé une solution de nature législative similaire à celle que vise cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comme vous l’avez indiqué, mon cher collègue, des dispositions concernant les cessions à titre gratuit existent déjà. Si la commission des lois n’a pas pu procéder à des vérifications, une cession de parcelles du domaine privé de l’État lui paraît néanmoins nécessaire. Quoi qu’il en soit, elle souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Le grand port maritime de la Guyane peut d’ores et déjà bénéficier de cessions gratuites du foncier de l’État par l’intermédiaire d’un acteur de l’aménagement, soit la collectivité territoriale, soit l’établissement public d’aménagement de la Guyane. Toutefois, la mesure proposée permettra d’accélérer la conduite des projets portuaires sans recours systématique à un intermédiaire. Le Gouvernement émet par conséquent un avis favorable sur cet amendement, et il lève le gage.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 24 rectifié bis, présenté par MM. Patient, Karam, S. Larcher, Desplan, Mohamed Soilihi, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
A. – Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre IV du livre Ier de la cinquième partie du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Après les mots : « collectivités territoriales », la fin de l’intitulé est ainsi rédigée : « , à leurs groupements et aux établissements publics en Guyane » ;
2° À la première phrase du 3° de l’article L. 5142-1, après les mots : « à leurs groupements », sont insérés les mots : « , au grand port maritime de la Guyane pour l’accomplissement de ses missions de service public ».
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section …
Aménagement foncier
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Article 6
L’annexe III de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public est complétée par un alinéa ainsi rédigé :
« Les établissements publics fonciers et d’aménagement définis à l’article L. 321-36-1 du code de l’urbanisme. » – (Adopté.)
Article 7
(Non modifié)
Le dernier alinéa de l’article 2 de l’ordonnance n° 2011-1068 du 8 septembre 2011 relative aux établissements publics fonciers, aux établissements publics d’aménagement de l’État et à l’Agence foncière et technique de la région parisienne est supprimé. – (Adopté.)
Section 2
Agences des cinquante pas géométriques
Article 8
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d’outre-mer est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « pour une durée de quinze ans » sont remplacés par les mots : « pour une durée qui ne peut excéder le 31 décembre 2018 » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.
M. Maurice Antiste. Trois des amendements que j’avais déposés se sont vu opposer l’article 40. Je souhaite néanmoins avoir un avis sur leur pertinence.
Il me paraît indispensable de repousser de deux ans la date prévue pour la fin de la mission des deux agences – seules la Guadeloupe et la Martinique sont concernées – dites « des cinquante pas », mission qui devrait alors s’achever en 2020.
La durée de vie de ces instances a fait l’objet d’un impressionnant feuilleton législatif. Les agences ont été instituées par la loi du 30 décembre 1996 pour une période de dix ans portée à quinze ans par la loi de programme du mois de juillet 2003. La loi pour le développement économique des outre-mer de mai 2009 est allée encore plus loin, en prévoyant la possibilité de prolonger par décret la durée des agences de cinq ans, renouvelables deux fois. Mais la loi Grenelle II du mois de juillet 2010 est revenue en arrière : tout en élargissant les missions des agences, elle a prévu leur disparition au 1er janvier 2014. Cette échéance s’étant avérée irréaliste, une nouvelle loi, adoptée sur l’initiative de Serge Larcher, a prolongé l’activité des agences jusqu’au 1er janvier prochain.
Anticipant de nouvelles difficultés, le projet de loi qui nous est soumis repousse l’échéance jusqu’au 31 décembre 2018. Or ce nouveau report risque de ne pas être satisfaisant. Au lieu d’être obligé d’adopter une proposition de loi supplémentaire d’ici à deux ou trois ans, il me paraît plus sûr de retenir d’ores et déjà l’année 2020 comme date butoir.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous devons mesurer la très grande complexité de la situation juridique, humaine et sociale dans la zone des cinquante pas. Les agences doivent accompagner jusqu’à leur terme les demandes de cession-régularisation, mener à bien une mission d’aménagement et d’équipement en cohérence avec la clarification de la propriété, et travailler avec des collectivités dont le régime est en pleine évolution. Compte tenu de tous ces éléments, mieux vaut faire preuve de réalisme et allonger de deux ans l’échéance prévue par le projet de loi.
En outre, il est souhaitable, selon moi, d’assurer une meilleure cohérence entre les interventions du fonds concerné et l’action des agences dites « des cinquante pas », compétentes pour instruire les demandes de cession-régularisation dans la zone des cinquante pas et pour organiser l’équipement et l’aménagement de cette zone.
Historiquement, l’objectif de la loi du 23 juin 2011 était de s’attaquer aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les collectivités d’outre-mer. L’article 126 de la loi de finances de 2012 a ensuite prévu une contribution pluriannuelle du fonds de prévention des risques naturels majeurs, le « fonds Barnier », afin d’aider à la mise en œuvre des orientations de cette loi.
C’est pourquoi je vous propose, madame la secrétaire d’État, que les interventions du fonds puissent prendre la forme d’une participation à la réalisation des missions de ces agences. Je précise qu’il s’agit non pas d’augmenter les dépenses, mais de se donner les moyens d’une action mieux coordonnée, gage d’une meilleure utilisation des moyens existants.