M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Avec votre permission, monsieur le président, je donnerai l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements qui suivent.
Je serai ensuite beaucoup plus laconique, puisque le groupe CRC adopte une position de principe tendant à rejeter les dispositions de la nouvelle ordonnance du 20 août 2014.
La commission spéciale estime que l’ordonnance est utile, car elle a permis de rassembler en un seul document le droit applicable à l’État actionnaire, alors que de nombreuses dispositions avaient été votées depuis 1986. Il s’agit donc d’abord d’un travail de clarification.
Cette ordonnance permet aussi de moderniser le droit applicable à l’État actionnaire, en le rapprochant du droit commun des sociétés. Là encore, de nombreuses dispositions ad hoc s’étaient empilées sans qu’elles soient encore justifiées. À titre d’exemple, le nombre d’administrateurs représentant l’État était limité à un tiers, même s’il possédait l’intégralité du capital.
Le rôle du législateur est renforcé s’agissant des opérations de cession ; nous aurons l’occasion d’y revenir. C’est d’ailleurs sur ce fondement que nous examinerons l’article 47, relatif à Nexter, et l’article 49, qui concerne la privatisation des aéroports de Nice et de Lyon.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission spéciale est défavorable à l’ensemble des amendements du groupe CRC, de l’article 43 A à l’article 46.
M. Jean Desessard. Carrément ! Vous prenez de l’avance !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1124, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 1 de l’article 43 A, qui tend à limiter encore la participation des salariés aux conseils de surveillance. Cela nous renvoie à ce que nous disions à propos du projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi et de l’Accord national interprofessionnel, l’ANI.
Le Gouvernement nous avait alors présenté cette mesure comme étant de nature à accroître la participation des salariés à la gouvernance des sociétés. Il y avait de petites avancées. Néanmoins, nous avions alors émis des doutes. Nous avions raison, puisque le texte revient aujourd'hui sur ce qui avait été proposé alors.
L’article 43 A du projet de loi aura très certainement pour conséquence de revenir sur une situation que l’on croyait dépassée. En effet, la participation des salariés au conseil de surveillance était facultative. L’ANI l’avait rendue obligatoire sans que les salariés aient pour autant réellement droit de prendre part aux votes et encore moins d’exercer un droit de veto.
Une telle option avait été choisie pour ne pas briser l’équilibre établi entre les « sachants », ceux qui ont fait l’ENA ou n’importe quelle autre grande école. Cet « entre soi » est bien entendu néfaste, dans le privé comme dans le public.
La préconisation de faire entrer les salariés dans les conseils d’administration était tirée du rapport Gallois, de novembre 2012.
Comprenez notre inquiétude. Au mois de novembre 2014, M. le ministre de l’économie avait annoncé dans les colonnes du journal Le Monde que le Gouvernement souhaitait privatiser entre cinq milliards et dix milliards d’euros d’actifs. C’est la vente du patrimoine de l’État, patrimoine qu’il a, bien entendu, valorisé avant de le céder.
Dans ce contexte, il est totalement inacceptable de restreindre la participation des salariés !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Dans l’objet de cet amendement, il est écrit : « Cet alinéa valide, là encore, l’ordonnance de privatisation d’août 2014, qui permet la vente à l’encan du patrimoine public. »
À mes yeux, l’expression « vente à l’encan », est particulièrement malheureuse, pour ne pas dire insupportable ! Être en désaccord avec la gestion des actifs, c’est une chose ; employer une telle formule, c’en est une autre !
Monsieur Bosino, vous avez mentionné un certain nombre d’entreprises où il y a eu des ventes de participations publiques. Mais vous n’expliquez pas que cet argent a servi à des prises de participation dans les sociétés Alstom et Peugeot, nous permettant ainsi de conserver ces entreprises majeures, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.
Quoi qu’il soit, vous pourriez trouver un autre terme que « vente à l’encan » !
M. le président. L'amendement n° 1706, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
par l'État
insérer le mot :
et
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1125, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement de repli vise à supprimer les alinéas 3 à 5 de l’article, dont nous ne partageons pas l’esprit, ainsi que nous l’avons déjà expliqué.
Il ne nous semble pas opportun que l’État puisse proposer des administrateurs n’ayant pas le statut d’agents publics ; il faut des garde-fous. Et quid des cas où l’État est majoritaire ?
Si nous avons bien compris les modifications apportées, nous serions dans la situation suivante. Dans les sociétés dont l’État détient directement plus de la moitié du capital et dont le nombre de salariés employés est au moins égal à cinquante, le conseil d’administration et le conseil de surveillance ou l’organe délibérant en tenant lieu comprend un tiers de représentants des salariés.
La situation sera identique dans les sociétés anonymes dans lesquelles l’État ou les établissements publics détiennent directement ou indirectement plus de 50 % du capital et dont le nombre de salariés employés est au moins égal à deux cents. Cependant, le nombre maximal de représentants des salariés y est limité à trois.
Enfin, dans les autres sociétés relevant de la présente ordonnance, c'est-à-dire les sociétés où l’État ne détient pas 50 % du capital, les représentants des salariés sont désignés selon les modalités prévues par le code de commerce, auquel ils sont soumis.
Ainsi, excepté dans le premier cas de figure, le nombre de représentants des salariés est sensiblement en baisse, puisqu’il est limité à trois contre cinq ou six, selon les cas de figure prévus dans la loi de 1983.
Nous souhaiterions donc avoir des précisions sur ces points. Certes, j’ai bien compris que M. le ministre ne souhaitait plus répondre. Quoi qu’il en soit, une telle baisse de participation ne nous paraît pas une bonne chose.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1126, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Nous souhaitons supprimer les alinéas 6 à 8 de l’article 43 A.
L’ordonnance du 20 août 2014 prévoit une représentation des salariés pour les seules sociétés dont l’État dispose d’au moins 50 % du capital. Cela se limite donc aux entreprises publiques, notamment la SNCF, GDF ou Aéroports de Paris.
En dehors de ces entreprises publiques, les règles de représentation relèveraient du code de commerce. Or l’article L. 225-27-1 de ce code prévoit que « le nombre d’administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre d’administrateurs […] est supérieur à douze et au moins à un s’il est égal ou inférieur à douze. »
Nous voyons donc bien quel sera le recul pour les salariés représentés actuellement dans les sociétés à participation publique, dans lesquelles s’appliquait la loi de 1983 relative à la démocratisation du secteur public. L’application du code de commerce aura pour conséquence de réduire considérablement la représentation des salariés dans les anciennes entreprises publiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 43 A, modifié.
(L'article 43 A est adopté.)
Article 43 B
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 7, après le mot : « comprend », sont insérés les mots : « au moins » ;
2° L’article 8 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – Les représentants des salariés sont élus :
« 1° Dans chacune des filiales détenues, à lui seul, par l’un des établissements publics mentionnés au second alinéa du I de l’article 7 ou par l’une des sociétés mentionnées au premier alinéa du même I, par les salariés qui remplissent les conditions requises pour être électeur au comité d’entreprise ;
« 2° Dans les autres filiales mentionnées au second alinéa dudit I ou dans les sociétés mentionnées au premier alinéa du même I, par les salariés qui remplissent les conditions requises pour être électeur au comité d’entreprise ou à l’organe en tenant lieu soit dans la société elle-même, soit dans l’une de ses filiales comprenant des représentants des salariés en application dudit I, dont le siège social est situé sur le territoire français. » ;
c) La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :
– au début, est ajoutée la mention : « III. – » ;
– la référence : « précédent alinéa » est remplacée par la référence : « présent article » ;
3° La première phrase du second alinéa de l’article 16 est complétée par les mots : « ou des autres dispositions équivalentes du même code » ;
4° L’article 22 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du II, après le mot : « participations », sont insérés les mots : « au secteur privé » ;
b) Au IV, après le mot : « personnes », sont insérés les mots : «, appréciés sur une base consolidée, » ;
c) Le V est ainsi modifié :
– à la fin du premier alinéa, le mot : « article » est remplacé par le mot : « titre » ;
– il est ajouté un d ainsi rédigé :
« d) Les participations détenues par un établissement public de l’État ayant pour objet principal la détention de titres sont assimilées à des participations détenues directement par l’État. » ;
5° L’article 23 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « à l’article 22 » est remplacée par la référence : « au présent titre » ;
b) Le 1° est complété par les mots : « ainsi que les opérations assimilées réalisées simultanément à de telles prises de participation en faveur des salariés situés à l’étranger » ;
6° L’article 24 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est assimilée à une opération d’acquisition toute opération de constitution d’une société. » ;
7° L’article 34 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– à la dernière phrase du premier alinéa, la référence : « au VI » est remplacée par les références : « aux a à c du VI » ;
– après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assemblée générale, saisie dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent I, peut statuer également sur la composition de l’ensemble du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu, notamment sur la nomination ou le maintien en fonction des membres qu’il lui appartient de désigner. » ;
b) Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Après la date limite fixée pour la mise en conformité, toute clause des statuts contraire à la présente ordonnance est réputée non écrite. »
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, afin d’accélérer nos débats, je renonce à ma prise de parole. Vous voyez que nous faisons des efforts, mes chers collègues.
M. le président. L'amendement n° 50, présenté par Mme Assassi, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous proposons de supprimer l’article 43 B.
La commission spéciale de l’Assemblée nationale a introduit dans le texte initial du projet de loi un grand nombre de dispositions qui n’étaient pas contenues dans l’ordonnance du 20 août 2014. Le nombre d’articles entre l’article 43 et l’article 53, qui était logiquement de onze au début, a plus que doublé, avec des dispositions importantes. L’article 43 B fait partie de cet ensemble. Il tend à accélérer le rythme de mise en œuvre des dispositions de l’ordonnance du 20 août 2014.
On pourrait nous rétorquer que les articles initiaux de ce volet consacré au secteur public et à sa gouvernance sont de simples mesures de « coordination » avec l’esprit de l’ordonnance, purement rédactionnelles.
Mais l’article 43 B modifie assez profondément les conditions de formation des conseils d’administration des entreprises à participation publique, majoritaire ou non.
Les conditions de formation ont été fixées à l’origine par la loi de nationalisation du 11 février 1982, signée par François Mitterrand, Pierre Mauroy, Claude Cheysson, Jacques Delors, Laurent Fabius, Robert Badinter, Pierre Dreyfus, Jean Auroux et Jean Le Garrec. Elles ont été confirmées par la loi relative à la démocratisation du secteur public de juillet 1983, signée par une bonne partie des mêmes personnalités, ainsi que par le regretté Pierre Bérégovoy, alors ministre des affaires sociales, Charles Fiterman, alors ministre des transports, ou encore Charles Hernu, alors ministre de la défense.
La combinaison des articles 7,8 et 34 de l’ordonnance devrait conduire à la réduction du nombre de représentants de l’État au sein des conseils d’administration et organes de direction et, plus encore, à celle des salariés, dont la nomination dépendra pour l’essentiel de l’application non plus du texte de 1983 – de notre point de vue, c’est tout à fait regrettable –, mais, plus banalement, des dispositions du code de commerce.
Il est donc à craindre que la parole ouvrière ne soit guère entendue dans les organes dirigeants des entreprises demeurées dans le périmètre des participations gérées par l’Agence des participations de l’APE, dont l’action se résume en général à un arbitrage en faveur du choix de l’État actionnaire.
L’article 43 B fragilise la présence de l’État et des salariés au sein des organes dirigeants des entreprises à participation publique. Nous ne pouvons donc qu’en réclamer la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1127, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud, Mme David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés
« 3° L’article 16 est ainsi rédigé :
« Art. 16 - Les contrats de plan élaborés en application de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 susvisée et les contrats d’entreprise prévus par l’article 140 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sont examinés par le conseil d’administration ou le directoire, après avis du conseil de surveillance. Les représentants des salariés disposent dans ce cadre d’un droit de veto.
« Ce veto emporte nécessité de présenter un nouveau projet de contrat de plan ou de contrat d’entreprise, dans un délai de deux mois maximum. » ;
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Je constate que nos collègues étaient beaucoup plus nombreux à prendre la parole lorsqu’il s’agissait d’accorder des exonérations fiscales aux entreprises ou, il y a quelques jours, de privatiser les services de transports…
Mme Éliane Assassi. Tout à fait !
Mme Annie David. Il y a un instant encore, lorsque nous débattions de la participation salariale, nos collègues prenaient volontiers la parole, en particulier sur les travées de la droite.
Maintenant qu’il s’agit de maintenir la présence des salariés dans les conseils d’administration et d’asseoir le rôle de l’État dans les entreprises publiques, étrangement, il n’y a plus grand-monde au rendez-vous – excepté le groupe communiste, qui s’efforce de préserver, en dépit de tout, la présence de l’État dans les entreprises de service public, où il nous semble très important que la puissance publique joue tout son rôle.
M. Jean Bizet. On est sans voix !
Mme Annie David. Je vous rappelle, mes chers collègues, que le rôle des travailleurs dans les entreprises, notamment dans les entreprises publiques, est garanti au plan constitutionnel, puisque le préambule de la Constitution de 1946 dispose que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».
Les instances de participation n’accordent généralement aux représentants des salariés qu’un droit d’information et une voix consultative. Or il serait véritablement illusoire de croire que la seule présence de leurs représentants au sien de ces organes suffirait à renforcer automatiquement le pouvoir des salariés.
Parmi les diverses formes de participation des salariés aux instances de décision de l’entreprise figurent les administrateurs et administratrices salariés, qui, en France, sont les seuls représentants du collectif de travail à avoir voix délibérative en tant que tels. Leur participation aux décisions n’en reste pas moins partielle, faute d’une réelle capacité d’influence. Certes, les représentants des salariés assistent aux débats, mais le conseil d’administration n’est pas un lieu de négociation, surtout pas en ce qui concerne la stratégie de l’entreprise.
Les élus du personnel rendent donc des avis qui ne contraignent aucunement les employeurs. Ils peuvent émettre des avis négatifs dans les négociations rendues obligatoires, obtenir l’appui d’experts-comptables et de cabinets économiques pour prouver la viabilité des activités menacées, mettre en évidence les conséquences dramatiques des choix opérés, non seulement pour les salariés, mais aussi pour les populations et les territoires, et, surtout, suggérer des stratégies alternatives. En règle générale, cependant, leurs contre-propositions sont balayées d’un revers de la main !
Dans les faits, les institutions représentatives du personnel sont des chambres d’enregistrement qui ne peuvent que retarder les échéances.
Ce caractère facultatif de leurs avis empêche toute prise en compte du point de vue du personnel sur les choix stratégiques des entreprises, dont les salariés sont pourtant les principaux artisans.
C’est pourquoi nous proposons d’accorder aux représentants des salariés un véritable pouvoir, sous la forme d’un droit de veto qui leur permette de peser sur les décisions stratégiques de leur entreprise. Ce droit de veto emporterait l’obligation de présenter un nouveau projet de contrat de plan ou de contrat d’entreprise dans un délai maximal de deux mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1128, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 13 à 19
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article 22 est ainsi rédigé :
« Art. 22. - I. - Les opérations par lesquelles l’État transfère tout ou partie du capital qu’il détient ne peuvent être décidées par décret qu’après avoir été autorisées par la loi.
« II. - Les opérations par lesquelles un établissement public de l’État ou une société dont l’État ou ses établissements publics détiennent directement ou indirectement, seuls ou conjointement, tout ou partie du capital sont soumises aux mêmes règles. »
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Comme ma collègue Annie David, je trouve ce débat passablement curieux.
Alors que nous traitons d’un problème grave, la privatisation d’un certain nombre de sociétés, quelle image du Parlement, quelle image du Sénat donnons-nous à nos concitoyens, qui en ont déjà une idée bien mauvaise ?
M. Olivier Cadic. Vous n’y êtes pas pour rien !
M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas vous qui allez l’améliorer !
Mme Sophie Primas. Il nous faut de la patience !
M. Michel Bouvard. Et nous faisons beaucoup d’efforts !
M. Jean-Pierre Bosino. J’observe simplement que tout le monde se tait sur les questions que nous soulevons, en particulier M. le ministre, qui ne veut même plus répondre aux sénateurs communistes, ce qui est pour le moins étrange !
Fidèles à leur opposition à l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, les auteurs du présent amendement proposent d’en réécrire l’article 22.
On a parlé de l’utilisation des privatisations et des cessions d’actifs détenus dans les entreprises publiques. Peut-être ont-elles eu une petite utilité dans le cas d’Alstom ; mais elles servent surtout à respecter les règles fixées par Bruxelles en matière de limitation du déficit public !
C’est pourquoi nous proposons que les opérations de transfert ou de cession ne puissent être décidées par décret qu’après avoir été autorisées par la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1129, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 20 à 22
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article 23 est abrogé ;
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ne soyez pas inquiets : nous ne nous fatiguerons pas ! (Exclamations sur différentes travées).
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Nous ne sommes pas inquiets !
Mme Sophie Primas. Et nous ne nous lasserons pas non plus !
M. Jean-Pierre Bosino. Dans sa rédaction actuelle, l’article 23 de l’ordonnance du 20 août 2014 vise à permettre le dépeçage, au profit du privé, d’un certain nombre d’entreprises dans lesquelles la participation de l’État est minoritaire, par le recours à des ordonnances, et non à la loi.
Ce dispositif est à nos yeux désastreux, car il ouvre la voie à des cessions d’actifs de l’État décidées sans que le Parlement ait son mot à dire. Il risque aussi de faire s’éloigner encore un peu plus la perspective d’un État stratège, artisan d’une véritable politique industrielle ; cette perspective s’effrite depuis au moins trente ans, en raison d’un mouvement général de désengagement massif de l’État de notre économie.
Les cessions d’actifs de l’État par ordonnance pourraient concerner notamment Thales, dont l’État possède 27 % du capital, Renault, dont l’État détient 15 %, Orange ou Airbus.
Après les privatisations de ces grands fleurons de l’industrie française, qui ont souvent rimé avec licenciements, la vente d’actifs de l’État risque de nuire de nouveau à l’emploi et aux conditions de travail.
De plus, sous la pression des actionnaires privés, la perte d’influence de l’État dans ces grands groupes industriels va favoriser une vision à court terme, alors que c’est une vision à long terme dont ces entreprises ont besoin.
L’exemple le plus flagrant est celui des groupes aéronautiques comme Thales ou Airbus, dont nous aurons certainement l’occasion de reparler. Ces groupes sont actuellement dans une forme éblouissante ; les commandes se multiplient et les cadences de production augmentent. Ainsi, Airbus a annoncé, le 7 avril dernier, 101 commandes nettes et 134 livraisons d’avions commerciaux pour le premier trimestre de 2015.
Or les défis que notre industrie aéronautique doit relever sont encore nombreux : la filière doit continuer d’investir pour conserver son avance sur la concurrence plutôt que de satisfaire les intérêts immédiats d’actionnaires toujours plus gourmands.
Pour favoriser une vision stratégique de long terme visant à consolider la compétitivité française – objectif dont on parle beaucoup – et à créer des richesses et des emplois, il faut une influence forte de l’État dans ces entreprises !