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Nomination d’un membre d’un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Hervé Maurey membre du conseil de surveillance de la SNCF.
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Croissance, activité et égalité des chances économiques
Suite de la discussion d’une proposition de loi en procédure accélérée dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.
Mme Éliane Assassi. Ce rappel au règlement a trait au déroulement de nos travaux.
On laisse entendre ici ou là que, dans le débat sur le présent projet de loi, le groupe communiste républicain et citoyen ferait de l’obstruction.
Je tiens donc à préciser que, à aucun moment, notre groupe n’a contrevenu au règlement du Sénat. Nous ne faisons qu’utiliser notre droit d’amendement, garanti par la Constitution. J’ajoute que seulement 450 des 1 650 amendements déposés sur ce texte l’ont été par notre groupe.
Je rappelle par ailleurs que l’Assemblée nationale a consacré trois semaines à la discussion de ce texte en séance publique, contre deux semaines pour le Sénat. La conférence des présidents a certes prévu de se réunir à nouveau mardi prochain pour adapter éventuellement l’ordre du jour de nos travaux.
Je fais également observer que le débat à l’Assemblée nationale s’est déroulé sous le régime du temps programmé et que certains intervenants n’ont pas eu la possibilité de s’exprimer comme ils l’auraient souhaité.
La particularité du Sénat, et je m’en réjouis, réside dans le fait que nous débattons sur le fond. Nos collègues se plaisent à dire, à raison, que c’est ici que les débats sont le plus approfondis. Cela suppose nécessairement de prendre un peu de temps.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Je remercie Mme la présidente Éliane Assassi de son salutaire rappel au règlement.
Il n’est venu à l’esprit de personne de qualifier d’obstruction le travail de tel ou tel sénateur ou de tel ou tel groupe.
Mme Éliane Assassi. Si, si !
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Pas en séance publique, en tout cas ! Certains ont pu toutefois faire des commentaires sur la lenteur des débats.
Bien sûr, au Sénat, nous sommes attachés au fait de débattre sur le fond et sur l’essentiel. Cependant, nous gardons à l’esprit qu’il faut parfois concentrer nos interventions et notre temps de parole sur les points essentiels, justement, afin de les rendre plus lisibles pour ceux qui assistent à nos débats.
La commission spéciale, pour sa part, a veillé, avec les présidents de séance, à ce que chacun puisse s’exprimer, conformément à la bonne application du règlement. Personne ne s’est vu interdire de prendre la parole.
Nous avons simplement le souci de permettre à l’ensemble des sénateurs d’organiser leur temps en ayant connaissance du déroulement de nos travaux. Il est de bonne méthode que chacun des groupes y contribue.
L’institution vénérable qu’est le Sénat est capable de s’adapter. Nous consacrerons donc le temps nécessaire à ce débat, afin que s’exerce pleinement la démocratie parlementaire, avec discernement et dans le respect de chacun.
Article 5 (suite)
M. le président. Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements à l’article 5.
L’amendement n° 1359 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 19, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ces exceptions ne peuvent pas concerner les marchés de travaux d’un montant supérieur à 500 000 euros.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article 5 du projet de loi tend à renforcer le contrôle de la régulation des marchés des sociétés concessionnaires d’autoroutes.
Nous saluons les avancées visant à garantir le principe de l’assujettissement des concessionnaires privés à des règles de publicité et de mise en concurrence, compétence étant donnée à l’ARAFER pour contrôler le respect, par les concessionnaires, de leurs obligations en matière de passation de marchés ainsi que des règles d’information préalable à l’attribution des marchés.
Il semble toutefois que seuls les marchés d’un montant supérieur à 2 millions d’euros soient actuellement concernés par les règles de publicité pour appel d’offres. L’Autorité des marchés de travaux des sociétés concessionnaires d’autoroutes a en effet montré qu’une part non négligeable des marchés d’un montant inférieur à 2 millions d’euros échappait à ces obligations de publicité et de mise en concurrence.
L’Autorité de la concurrence a donc recommandé que les obligations de publicité et de mise en concurrence inscrites à l’article 6 du cahier des charges des SCA soient désormais applicables à partir d’un seuil de 500 000 euros hors taxes.
L’abaissement du seuil de mise en concurrence présenterait un autre avantage : avec la Commission nationale des marchés – CNM – l’Autorité de la concurrence a constaté que les SCA appartenant aux groupes Vinci – ASF, ESCOTA, Cofiroute – et Eiffage – APRR et AREA – ne transmettaient pas les informations relatives à leurs achats de travaux d’un montant supérieur à 500 000 euros hors taxes mais inférieurs au seuil de mise en concurrence. Dès lors, conformément aux recommandations de la CNM, ces achats pourraient faire l’objet d’un examen visant à vérifier que les SCA ne fractionnent pas leurs marchés de manière à échapper à leurs obligations de publicité et de mise en concurrence.
L’ARAFER ne doit pas être confrontée aux mêmes difficultés et c’est pourquoi nous avons déposé cet amendement.
Beaucoup d’entre nous, en tant qu’élus locaux, connaissent bien le sujet.
Au fond, l’Autorité de la concurrence n’a pas vraiment les moyens d’agir ; elle ne peut que formuler certaines remarques.
Il faut savoir que nombre d’entreprises sont définitivement écartées des marchés. En dessous de 2 millions d’euros, il n’y a pas de concurrence ; la liberté d’attribution est totale. Cela signifie que les PME et PMI de nos territoires sont exclues de l’essentiel des marchés ; d’où l’importance de cette question.
Pour les marchés de 2 millions à 5,270 millions d’euros, ce qui représente des marchés non négligeables, le pouvoir adjudicateur peut établir des critères. Mais qui détient ce pouvoir ? Les sociétés d’autoroutes !
Autrement dit, les sociétés d’autoroutes sont juges et parties.
M. Bruno Retailleau. Cela vaut pour tous les marchés publics !
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Évelyne Didier. Cette absence de véritable concurrence entraîne l’exclusion de nombreuses entreprises.
Je ne parlerai pas des appels d’offres restreints, car vous savez ce qu’il en est.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur de la commission spéciale. La commission spéciale est favorable à cet amendement de précision, qui reprend, comme vous l’avez rappelé, une recommandation de l’Autorité de la concurrence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Sur le fond, le Gouvernement partage l’objectif des auteurs de l’amendement, d’autant qu’il s’agit de reprendre une recommandation de l’Autorité de la concurrence pour éviter le fractionnement dans la procédure des marchés publics et l’application du cadre réglementaire.
Toutefois, cette disposition relève du domaine réglementaire. Je vous invite donc à retirer cet amendement, madame Didier, moyennant l’engagement que je prends ce soir au nom du Gouvernement et aux termes duquel un décret fixera le seuil, comme il est d’usage dans toutes les procédures de mise en concurrence, à 500 000 euros, afin, notamment, d’encourager l’activité des PME et des ETI.
M. le président. Madame Didier, l'amendement n° 1359 rectifié est-il maintenu ?
Mme Évelyne Didier. Je note avec satisfaction que la commission spéciale et le Gouvernement considèrent qu’il s’agit d’une bonne mesure.
Madame la secrétaire d'État, je suis comme saint Thomas : je veux bien vous faire confiance, mais j’aimerais voir le décret, afin de ne pas être le « dindon de la farce ». Dans ces conditions, je suis prête à retirer mon amendement.
Plusieurs sénateurs du groupe CRC. Non, ce n’est pas une bonne idée !
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Prenez vos responsabilités !
Mme Évelyne Didier. Alors, je maintiens l’amendement, monsieur le président, comme mes collègues m’y invitent.
M. le président. L'amendement n° 1363, présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 22
1° Première phrase
Après le mot :
avis
insérer le mot :
conforme
2° Dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Afin de tenir compte des observations formulées par l’Autorité de la concurrence, le Gouvernement entend améliorer, dans le projet de loi, le contrôle des marchés de travaux, de fournitures et de services des SCA.
Les députés ont proposé d’imposer dans chaque SCA dont la taille excède un seuil fixé par voie réglementaire une commission des marchés, dont ils ont renforcé les pouvoirs. Chaque commission devra être composée en majorité de personnalités indépendantes du concessionnaire et comprendre un représentant de l’ARAFER ou de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF. Elle devra définir les règles internes pour la passation et l’exécution des marchés et veiller au respect de celles-ci. Un avis conforme de l’ARAFER sera requis sur ces règles et la composition de la commission. On peut donc espérer que ces commissions seront neutres et agiront en toute indépendance.
Le projet de loi prévoit, dans son alinéa 22 que l’attribution des marchés sera soumise à l’avis préalable de la commission des marchés, qui le transmettra à l’ARAFER et l’informera de tout manquement constaté. En d’autres termes, sur le modèle qui existait déjà avec la Commission nationale des marchés et la commission interne des marchés, le texte conforte deux niveaux de contrôle : l’ARAFER et les commissions internes des marchés.
Ces deux commissions ont des missions importantes en matière de définition des règles de passation ou de contrôle des procédures. Il est étonnant de constater que l’avis de la commission des marchés ne sera pas contraignant pour les sociétés concessionnaires d’autoroute. En effet, « le concessionnaire ne peut refuser de suivre l’avis de la commission des marchés que par une décision de son conseil d’administration ou de son conseil de surveillance ». Autrement dit, les conseils d’administration seront souverains.
Pour aller dans la logique du renforcement des contrôles voulue par le Gouvernement et pour faire respecter les dispositions légales en vigueur en matière de passation des marchés, nous proposons que l’avis de la commission interne soit conforme et, donc, s’impose aux SCA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Comme vous venez de le rappeler, ma chère collègue, l’article 5 prévoit déjà que « le concessionnaire ne peut refuser de suivre l’avis de la commission des marchés que par une décision de son conseil d’administration ou de son conseil de surveillance ».
Dans ces conditions, il n’est pas opportun d’aller au-delà. Cela pourrait rigidifier et complexifier les procédures.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
La liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre sont des principes constitutionnels. Or la modification que vous proposez, madame la sénatrice, permettrait à l’État de s’immiscer beaucoup trop dans la gestion d’une société purement privée.
Instituer une commission des marchés est déjà en soi une mesure intrusive. Mais celle-ci se justifie par un objectif de régulation concurrentielle du marché, un objectif que nous partageons, si je vous ai bien comprise. Toutefois, aller au-delà porterait très vraisemblablement atteinte au principe constitutionnel de liberté contractuelle.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 521 est présenté par M. Nègre.
L'amendement n° 1422 rectifié est présenté par M. Médevielle et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 23, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Tout projet d’avenant à un marché de travaux, fournitures ou services entraînant une augmentation du montant global supérieure à un seuil défini par voie réglementaire est soumis pour avis à la commission des marchés.
L’amendement n° 521 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Pierre Médevielle, pour présenter l’amendement n° 1422 rectifié.
M. Pierre Médevielle. Cet amendement a pour objet de rendre plus transparente la passation des avenants aux contrats de concession autoroutière ainsi que de compléter le dispositif s’agissant de leur contrôle.
À cette fin, cet amendement vise à introduire une saisine a priori de la commission des marchés pour tout avenant supérieur à un seuil défini par voie réglementaire du montant global des travaux.
Ainsi, il ressort des pratiques antérieures une certaine hétérogénéité dans la présentation des avenants, qui, selon les concessionnaires d’autoroutes, s’échelonnait entre 5 % et 25 % du montant global du marché, certains allant même jusqu’à refuser de présenter leurs avenants. Le pourcentage s’appréciera sur la base de l’évolution du montant du contrat par rapport au marché.
En cas de pluralité d’avenants passés successivement, l’avis de la commission devra être recueilli pour tout avenant qui, pris individuellement, est inférieur au seuil réglementaire, mais dont le cumul avec le ou les avenants précédents, a pour effet de majorer le montant initial du marché du seuil fixé réglementairement.
Une fois de plus, il s’agit de doter nos régulateurs de tous les moyens juridiques possibles pour que les opérateurs fournissent à nos concitoyens le meilleur service au meilleur coût possible, et ce dans la plus grande transparence.
D’ailleurs, la soirée étant placée sous le signe de la transparence, après le déballage de chiffres auquel nous avons eu droit à la reprise de la séance, je rappelle, notamment à l’intention de nos collègues du groupe CRC, qu’anime apparemment un grand souci du détail, qu’ils ont oublié de citer un chiffre important : ce sont 40 % de leur chiffre d’affaires que nos horribles concessionnaires reversent tous les ans au Gouvernement, soit 3,7 milliards d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale est favorable à cet amendement, qui vise à compléter utilement le dispositif.
Dans son avis, l’Autorité de la concurrence a en effet souligné les difficultés de régulation concernant ces avenants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement.
Par cet amendement, vous poursuivez, monsieur le sénateur, le même objectif que celui qui était visé à travers l’amendement précédent,…
Mme Annie David. Il n’est pas intrusif ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. … à savoir éviter le contournement de l’application des règles relatives à la libre concurrence, ainsi que le fractionnement. Vous apportez là une réponse adaptée à une préoccupation clairement identifiée.
M. le président. L'amendement n° 1360, présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 23, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ainsi que les avenants ayant pour conséquence de faire sortir les marchés des réserves mentionnées à l’article L. 122-13
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Le projet de loi prévoit que la commission des marchés dans les SCA obtiendra du concessionnaire la communication de la liste des entreprises avec lesquelles il conclut des marchés entrant dans le champ des réserves mentionnées à l’article L. 122-13 du code de la voirie routière : « Pour les marchés de travaux, fournitures ou services, le concessionnaire d’autoroute procède à une publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions et sous réserve des exceptions définies par voie réglementaire. »
Il ressort du rapport de la Commission nationale des marchés publié en juillet dernier que certaines difficultés se font jour quant au contrôle effectif de la procédure de passation des marchés. Selon cette instance, les commissions internes doivent avoir connaissance des avenants et des marchés complémentaires passés par les SCA si l’on veut donner une portée effective à ce contrôle. Elle rappelle que, aux termes de l’article 11 du décret du 30 décembre 2005, le pouvoir adjudicateur ne peut se soustraire au respect des règles de publicité et de mise en concurrence, notamment en scindant ses achats. La Commission nationale des marchés relève que certains avenants supérieurs à 15 % sont de nature à bouleverser l’économie initiale du marché. Ces avenants ne sont pas communiqués par certaines SCA.
Ainsi, la commission estime qu’elle n’est pas en mesure de vérifier que les sociétés ESCOTA et ASF respectent leurs obligations en matière de passation et d’exécution des marchés de travaux, de fourniture et de services.
Par notre amendement, nous souhaitons préciser l’information prévue à l’alinéa 23 du projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La première phrase de l’alinéa 23 du projet de loi prévoit que la commission des marchés est informée de l’ensemble des avenants. La précision que vous proposez d’introduire est donc redondante. Aussi la commission émet-elle un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission : la commission des marchés est informée non seulement des avenants aux marchés conclus par le concessionnaire, mais aussi de la liste des entreprises avec lesquelles celui-ci conclut des marchés en dehors des règles de passation des marchés. Dès lors, cette précision n’est pas nécessaire.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Il s’agit, me semble-t-il, d’une information obligatoire, à laquelle les concessionnaires ne peuvent se soustraire. Il est donc assez curieux que nous ne nous donnions pas les moyens de contraindre les sociétés.
M. le président. L'amendement n° 1368, présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu’une société concessionnaire d’autoroute ne respecte pas la communication des informations prévues au présent alinéa, elle en informe l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières qui peut prononcer une sanction en application de l’article L. 2135-7 du code des transports.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Aux termes de ce projet de loi, l’ARAFER a pour compétence d’exercer un rôle de régulation et de contrôle dans le secteur des transports terrestres, notamment en ce qui concerne les concessions autoroutières.
L’Assemblée nationale a étendu parallèlement les pouvoirs de l’autorité en matière de sanctions administratives dans ces nouveaux secteurs. Comme le prévoit déjà l’article L. 2135-7 du code des transports en matière de transports ferroviaires, l’ARAFER pourra mettre en demeure une entreprise de transport public routier de personnes, un concessionnaire d’autoroute ou une entreprise intervenant dans le secteur des travaux, fournitures et services sur le réseau autoroutier qui refusera de lui donner accès à sa comptabilité ou à ses informations économiques, financières et sociales.
L’ambition affichée est donc de garantir un contrôle effectif dans le secteur des transports terrestres. Or, en ce qui concerne plus particulièrement les sociétés concessionnaires d’autoroutes, le projet de loi conforte les commissions des marchés dans leur rôle de contrôle sur les obligations inscrites dans les cahiers des charges annexés aux conventions de concession en matière de passation et d’exécution des marchés de travaux, de fournitures ou de services.
En effet, l’alinéa 23 de l’article 5 dispose que la commission des marchés instituée par chaque société concessionnaire « est informée des avenants aux marchés » mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 122-13-1 du code de la voirie routière et que « le concessionnaire communique à la commission des marchés la liste des entreprises avec lesquelles il conclut des marchés entrant dans le champ des réserves mentionnées à l’article L. 122-13 » du même code.
Cependant, dans son rapport d’activité pour 2013, la Commission nationale des marchés des sociétés concessionnaires d’autoroutes ou d’ouvrages d’art a formulé des remarques assez inquiétantes en ce qui concerne la réalité du contrôle exercé par les commissions internes des marchés.
Ainsi, elle a signalé que les commissions internes de certaines sociétés, notamment celles d’APRR, d’AREA, d’ESCOTA et d’ASF, n’avaient pas communiqué la liste de l’ensemble des achats d’un montant supérieur à 500 000 euros pour les travaux et à 90 000 euros pour les fournitures et les services. En d’autres termes, les informations demandées n’ont pas été transmises !
Dans ce rapport, la Commission nationale des marchés des sociétés concessionnaires d’autoroutes ou d’ouvrages d’art conclut que « le refus de communication de la liste de l’ensemble des marchés ne lui permet pas d’exercer sa mission prévue à l’article 1er du décret n° 2004-86 du 26 janvier 2004, à savoir veiller au respect, par les sociétés, de la réglementation applicable et de leurs obligations inscrites dans les cahiers des charges annexés à leurs conventions de concession, ni en matière de passation ni d’exécution des marchés de travaux, de fournitures et de services ».
Il est particulièrement grave et choquant, dans un État de droit, de constater que des entreprises peuvent se soustraire à leurs obligations légales sans être inquiétées. Le présent amendement vise donc tout simplement à donner à l’ARAFER les moyens d’assurer le respect de la loi.
Mme Laurence Cohen. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Je vous signale, madame Didier, que l’ARAFER disposera de toute façon d’un pouvoir général d’accès aux données des concessionnaires, ainsi qu’il est prévu aux alinéas 46 et 47 de l’article 5.
Aussi, la commission spéciale, fidèle à son souci de ne pas complexifier ni alourdir davantage le dispositif, a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, vous avez eu raison d’insister sur la nécessité d’assurer l’effectivité des contrôles et des sanctions en cas de non-respect des nouvelles obligations légales en matière de communication d’informations et de documents. Il est bon, lorsque ces obligations sont méconnues, que l’ARAFER ait le pouvoir de prononcer une sanction, par exemple une amende fixée selon le chiffre d’affaires de la société concessionnaire concernée.
Contrairement à la commission spéciale, le Gouvernement est donc favorable à cet amendement. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Évelyne Didier. Merci, madame la secrétaire d’État !
M. le président. L'amendement n° 524 n’est pas soutenu.
L'amendement n° 1361, présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque ces travaux donnent lieu à une compensation, elle vérifie le respect des délais de leur réalisation, ainsi que le respect de l’échéancier financier et du calendrier d’investissement.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Cet amendement vise à permettre le suivi par l’ARAFER des travaux réalisés en exécution des marchés définis à l’article L. 122-10 du code de la voirie routière, en particulier de leur date de réalisation effective, lorsqu’il s’agit de travaux compensés par l’État.
Il faut bien voir, mes chers collègues, que les travaux compensés constituent un cas particulier. De fait, l’Autorité de la concurrence a mis en évidence de nombreux retards dans l’exécution par les SCA des travaux prévus dans le cadre du « paquet vert » autoroutier. Or ces retards n’ont donné lieu à aucune réduction correspondante des compensations.
Mes chers collègues, en ce qui concerne, au-delà de la question des compensations non justifiées, les retards que le suivi du « paquet vert » a fait apparaître dans la réalisation des travaux et dans le décaissement des SCA, je vais vous donner lecture du constat dressé par l’Autorité de la concurrence dans son avis du 17 septembre 2014 sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires.
« Alors qu’ils devaient débuter au dernier trimestre 2009, les travaux n’ont commencé à être réalisés que six mois plus tard, si bien qu’ils se sont prolongés en 2012 et en 2013. Or, dans la méthodologie servant de base au calcul de la compensation, les coûts étaient actualisés à partir des décaissements, lesquels étaient censés intervenir tous avant la fin 2011. Les travaux ayant été retardés, la valeur actualisée de leur coût aurait dû être recalculée en conséquence. Cependant, la direction des infrastructures de transport a confirmé que "les effets de décalage ne sont pas pris en compte tant que le délai d’exécution est respecté" ». Bref, les sociétés encaissent un petit bonus au passage !
L’Autorité de la concurrence poursuit ainsi son constat : « Comme une seule opération n’a pas été achevée dans les temps, la SCA fautive – ESCOTA – ayant d’ailleurs été sanctionnée par le versement d’une indemnité, les effets de ce décalage sur la compensation n’ont pas été mesurés dans le rapport d’exécution ».
Logiquement, ces retards auraient dû conduire à une réduction correspondante de la compensation accordée par l’État aux différentes sociétés.
Seulement, la direction des infrastructures de transport a estimé que le respect de la date de fin des travaux suffisait pour considérer que les engagements conditionnant les compensations étaient respectés, alors même que, s’agissant d’investissements de « verdissement », il aurait été particulièrement opportun de faire preuve de diligence.
Nous souhaitons que, à l’avenir, pour les travaux donnant lieu à une compensation, l’ARAFER vérifie le respect des délais de réalisation, mais aussi de l’échéancier financier et du calendrier d’investissement.