Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Les propos de M. le rapporteur en témoignent, la position de la commission a évolué en la matière. Je vais donc retirer cet amendement, au profit de mon amendement n° 731, qui intervient d’ailleurs au bon moment.
On a effectivement tout intérêt à écrire dans la loi que « tout renouvellement ou renégociation de délégation et de cahier des charges doivent prévoir une tarification réduite pour les véhicules sobres et peu polluants ». Il s’agit bien d’une modulation, dans le cadre de laquelle on peut faire ce que l’on veut !
Dans la mesure où un groupe de travail a été constitué avec les concessionnaires autoroutiers, il semble utile d’y participer en sachant qu’on a le tournevis dans la boîte à outils. Je rejoins donc tout à fait l’analyse du rapporteur. Par conséquent, je retire l’amendement n° 736, au profit de l’amendement n° 731, que je viens ainsi de défendre.
Mme la présidente. L’amendement n° 736 est retiré.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 731, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l’article L. 122-4 du code de la voirie routière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Tout renouvellement ou renégociation de délégation et de cahier des charges doivent prévoir une tarification réduite pour les véhicules sobres et peu polluants tels que définis à l’article L. 318-1 du code de la route. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par un décret en Conseil d’État. »
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 464 rectifié bis, présenté par MM. Mandelli, Calvet, Revet et Morisset, Mme Deromedi, MM. de Nicolaÿ, Laménie, Mouiller et B. Fournier, Mme Lopez, M. D. Robert, Mme Imbert, M. Vogel et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article L. 122-4 du code de la voirie routière est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La convention de délégation et le cahier des charges doivent prévoir une tarification réduite pour les véhicules propres, définis comme les véhicules électriques ainsi que les véhicules de toutes motorisations et de toutes sources d'énergie produisant de faibles niveaux d'émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphérique ; ayant un poids total autorisé en charge de moins de 3,5 tonnes. »
II. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par un décret en Conseil d'État.
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Il s’agit de rendre obligatoire dans les conventions et les cahiers des charges le principe d'une tarification réduite pour les véhicules propres définis par l’amendement.
Cette démarche pourrait faire l’objet d’une compensation financière par un allongement du délai de concession, similaire à celui, annoncé en 2010, dont ont bénéficié pour une année cinq sociétés d'autoroutes françaises, afin de leur permettre des travaux d'amélioration visant à protéger la biodiversité et, plus largement, l'environnement.
Mme la présidente. L'amendement n° 653 rectifié, présenté par Mme Jouanno et MM. Guerriau et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l’article L. 122-4 du code de la voirie routière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La convention de délégation et le cahier des charges doivent prévoir une tarification réduite pour les véhicules propres définis comme les véhicules de toutes motorisations et de toutes sources d'énergie produisant de faibles niveaux d'émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, fixés par référence à des seuils déterminés par décret. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par un décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Dans la mesure où nous avons déjà eu une longue discussion sur ce sujet, j’estime que cet amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 731, qui nous permet d’avancer et d’anticiper, tout en tenant compte de la réalité des concessions actuelles. J’ai bien compris, madame la ministre, que vous souhaitiez que le monde autoroutier évolue.
Les discussions que l’État a entamées avec les concessionnaires autoroutiers pourront peut-être nous permettre, sans attendre 2028 ou 2032, d’obtenir des résultats significatifs dans le cadre de la transition énergétique.
Quant à l’amendement n° 464 rectifié bis, il soulève une difficulté. Je le rappelle, on ne peut pas décider de manière unilatérale. Dans le cadre juridique actuel des contrats de concession, l’adoption d’une telle mesure devrait donner lieu à une compensation au bénéfice des sociétés concessionnaires d’autoroutes, soit par un allongement de la durée des concessions, soit par une augmentation des tarifs de péage pour tous les autres véhicules. Là encore, on en revient aux discussions en cours entre l’État et les sociétés d’autoroute.
Par ailleurs, je rappelle qu’une compensation financière sous la forme d’un allongement du délai de concession, similaire à celui qui a été accordé en 2010 à certaines sociétés d’autoroutes, pourrait soulever un problème au niveau européen, l’Union n’ayant pas forcément les yeux de Chimène pour cette procédure d’adossement. Nous ne sommes pas tout seuls : nous sommes dans un cadre européen ! J’attire donc votre attention, monsieur Laménie, sur le fait que nos décisions devront être validées par l’Europe. C’est ce qui me conduit à vous demander le retrait de cet amendement. À défaut, la commission y serait défavorable.
Je formule la même demande auprès de Mme Jouanno s’agissant de son amendement n° 653 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. S’agissant des concessions autoroutières, il conviendrait en principe d’adopter des dispositifs visant à favoriser les véhicules propres, qui seraient mis en place dans le cadre d’un renouvellement du cahier des charges ou d’un nouveau cahier des charges.
Or je ne voudrais pas que ce type de mesures soit mis dans la balance par les sociétés d’autoroutes, notamment les sociétés d’autoroutes historiques, lesquelles sont actuellement sur la sellette. En effet, la Cour des comptes et l’Autorité de la concurrence, mais aussi des parlementaires et des particuliers – certains mouvements de particuliers sont prêts à engager des actions de groupe – remettent en cause le système des concessions, eu égard à ce que ces sociétés ont payé et à ce qu’elles récoltent. Je ne souhaite donc pas que ce type de mesures vienne polluer le débat, en légitimant, en quelque sorte, un allongement des concessions.
Bien entendu, je ne m’opposerai pas à un amendement tel que celui-ci. Toutefois, je vous mets en garde, mes chers collègues : veillons à ce que les mesures que nous prenons ne soient pas utilisées comme prétextes dans un autre cadre.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Filleul. Je suis sensible aux arguments développés par notre collègue Évelyne Didier, mais compte tenu de la négociation actuellement en cours avec les sociétés d’autoroutes, il nous apparaît quelque peu superfétatoire de déposer cet amendement aujourd’hui. Pour autant, nous le voterons.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9, et les amendements nos 464 rectifié bis et 653 rectifié n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 655 rectifié, présenté par Mme Jouanno, M. Guerriau et Mme Billon, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1609 quater A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est supprimé ;
b) Au quatrième alinéa, les mots : « dans la limite d’un seuil défini par décret en Conseil d’État » sont supprimés ;
2° Au dernier alinéa du II, les mots : « décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « délibération des collectivités ou groupements de collectivités intéressés ».
La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Cet amendement récurrent vise à permettre aux collectivités territoriales d’expérimenter la mise en place de péages urbains, sujet qui, en général, suscite des réactions épidermiques.
À l’article 1er, nous avions défendu un amendement de portée générale visant à permettre aux collectivités de procéder à des expérimentations dans tous les domaines de leurs champs de compétence, afin de participer à la réalisation des objectifs fixés par le présent projet de loi. Celui-ci n’a pas été adopté.
Dans la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « loi Grenelle 2 », nous avions accepté le principe de la mise en place de péages urbains. Cette notion recouvre des réalités extrêmement diverses : le péage urbain n’est pas simplement un péage de rendement visant à créer un cordon autour d’une zone ; il sert aussi – et souvent – à limiter la pollution par une modulation des contributions en fonction du niveau de celle-ci et en cas de pics.
Cette solution me semble moins brutale et moins injuste que la situation qui prévaut actuellement par exemple à Paris, à savoir l’interdiction de circulation pure et simple pour certains véhicules. Cette mesure réglementaire est très brutale tant sur le plan social que sur le plan économique.
Le péage urbain, quant à lui, permet une totale modulation.
En outre, s’il déplaît, ce sont les élus responsables de sa mise en place qui, in fine, seront reconduits ou non dans leurs fonctions. Laissons-leur au moins cette liberté de pouvoir expérimenter ce type de dispositif.
Mes chers collègues, si jamais vous portez un intérêt particulier à ce sujet, je vous renvoie à une étude intéressante qu’y a consacrée en juillet 2014 l’ADEME : État de l’art sur les péages urbains : objectifs recherchés, dispositifs mis en œuvre et impact sur la qualité de l’air.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. La commission a émis un avis défavorable.
J’adhère à l’objectif de faciliter la mise en place d’une mesure que j’avais moi-même introduite dans la loi Grenelle 2 en tant que rapporteur.
Mme Chantal Jouanno. Tout à fait !
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. En revanche, ma chère collègue, je suis plus réservé sur le dispositif que vous proposez.
Juridiquement, cette expérimentation, conformément au droit positif en vigueur, doit être limitée dans le temps, même si je comprends bien que les investissements nécessités par la mise en place d’un péage urbain doivent pouvoir être amortis sur une durée supérieure à trois ans.
Peut-être faudrait-il revoir le dispositif dans son ensemble et supprimer son caractère expérimental.
Je rappelle les conditions dans lesquelles nous avons réussi à obtenir l’accord du Sénat – Charles Revet avait pris part à nos débats.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. À l’époque, nos discussions sur la création du péage urbain avaient montré, d’une part, que celui-ci fonctionnait déjà dans plusieurs villes européennes,…
Mme Chantal Jouanno. Oui !
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. … d’autre part, qu’aucune d’entre elles, même après un changement de majorité politique, ne l’avait jamais remis en cause.
Je souligne même que celui de Stockholm a été validé par un référendum.
Mme Chantal Jouanno. Effectivement !
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Il existe toutes sortes de péages urbains : le péage urbain de zone, le péage urbain de cordon, le péage urbain d’axe, le péage urbain de pollution, etc. Tout dépend de l’objectif. À Milan, par exemple, a été mis en place un péage urbain de pollution : les véhicules les plus polluants ne peuvent plus entrer en ville. (Mme Chantal Jouanno opine.)
De même, les tarifications sont très différentes les unes des autres : cela va de 1,2 euro à Stockholm jusqu’à plus de 10 livres sterling à Londres. Par ailleurs, les horaires et les conditions d’application ne sont pas les mêmes.
Ainsi, chacun peut imaginer son type de péage, selon l’objectif.
Si le Parlement a accepté de voter le principe du péage urbain, c’est parce que, sur ma proposition, avaient été posées toute une série de conditions pour sa mise en place. Nous avions ainsi réussi à faire passer le message.
Bien que son principe soit donc inscrit dans la loi, aucun péage urbain n’a jamais été installé nulle part. Peut-être serait-il temps de revoir le dispositif dans son ensemble pour le rendre plus accessible à certaines agglomérations qui le souhaiteraient.
Mme Chantal Jouanno. Ce serait une démarche bienvenue !
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Le premier bénéficiaire du péage urbain, paradoxalement, c’est l’automobiliste. Pourquoi ? Tout simplement, comme l’a montré l’exemple suédois, parce que la réduction de la circulation, en décongestionnant le trafic, permet de se déplacer plus rapidement.
Chaque matin, la radio annonce cent ou deux cents kilomètres de bouchons autour de Paris, ce qui a des incidences très importantes sur l’activité économique – on parle d’externalités négatives. Est-ce un mode de gestion efficace de la Cité ? Ce n’est pas certain. Nos collègues européens qui ont mis en place des péages urbains ont fait d’autres choix, sur lesquels ils ne sont pas revenus au final.
C’est pourquoi je suggère de revoir le dispositif tel que nous l’avons voté en 2010.
J’ajoute que la suppression de la référence au décret en Conseil d’État pose un problème de constitutionnalité ; il revient en effet au législateur de préciser le plafond du péage urbain.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Je vais retirer mon amendement puisque le rapporteur pour avis s’est engagé – sauf erreur de ma part – à ce que ce dispositif soit retravaillé afin de le faire évoluer en supprimant tous les verrous juridiques qui le rendaient impraticable, et ce dans le but d’offrir cette liberté nouvelle aux collectivités. Mais comment allons-nous procéder ?
Mme la présidente. L'amendement n° 655 rectifié est retiré.
La parole est à M. Louis Nègre, rapporteur pour avis.
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. La commission du développement durable est notamment chargée des questions liées à la mobilité ; le sujet du péage urbain entre donc dans ses attributions.
Je l’ai dit et je le répète : je suis favorable à ce que l’on procède à une relecture de la loi de 2010, de manière à l’adapter au contexte de 2015 et aux évolutions qui sont survenues depuis lors. Il faudra sans doute que l’État nous accompagne dans cette démarche.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 816, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 283 quinquies du code des douanes, il est inséré un article 283-… ainsi rédigé :
« Art. 283-… – Une région peut instaurer une taxe additionnelle à la taxe mentionnée à l’article 269 sur des tronçons de route situés sur le territoire de la région. Le taux kilométrique de cette taxe additionnelle ne peut être supérieur à 0,10 euro par kilomètre. Le produit de la taxe additionnelle est affecté à la région sur le territoire de laquelle se trouve le tronçon de route taxé. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Nous avons déjà échangé à plusieurs reprises sur ce sujet extrêmement important et essentiel pour la crédibilité globale de ce projet de loi.
Vous le savez, madame la ministre, nous avons défendu jusqu’au bout le principe de l’écotaxe. Je ne reviens pas sur ce débat, qui est en partie derrière nous. Il n’en demeure pas moins que le Président de la République a quand même laissé la porte ouverte à une écotaxe régionalisée, à tout le moins à une taxe poids lourds en fonction des parcours, le terme écotaxe n’étant pas bon, car il pouvait donner l’impression d’une écologie punitive.
Nous en discutions avec certains collègues : certes, nous avons récupéré des recettes, mais toute idée de solidarité régionale et d’aménagement du territoire a disparu. Là est la faiblesse du nouveau mécanisme. Maintenant, tout le monde paie, les régions excentrées plus que ce qui était prévu avec l’écotaxe.
En tout état de cause, le trafic de transit – qui concerne plus particulièrement certaines régions – échappe dorénavant à toute taxation, alors que les véhicules en cause utilisent et usent nos routes.
L’écotaxe, parce qu’elle était régionalisée, était extrêmement intéressante pour un certain nombre de régions, car elle permettait justement de flécher ce trafic de transit. À présent, ce n’est plus possible. C’est pourquoi je propose, par cet amendement, d’autoriser les régions à instaurer une taxe additionnelle de 0,10 euro à la taxe mentionnée à l’article 269 du code des douanes sur des tronçons de route situés sur leur territoire.
Le Gouvernement a finalement abandonné l’écotaxe, pourtant voulue et défendue par un certain nombre de régions – notamment dans l’est de la France. Pourquoi a-t-il fermé la porte à toute possibilité ? Plutôt que de payer des frais de dédommagement, peut-être eut-il mieux valu imaginer un système différent qui aurait pu être mis en place au moins dans quelques régions.
Cet amendement est finalement l’occasion de demander des explications au Gouvernement sur l’abandon de l’écotaxe.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui, néanmoins, a le mérite, madame la ministre, de soulever une nouvelle fois les contradictions entourant la suspension de l’écotaxe.
Cette taxe a été abandonnée par décision du Gouvernement. Le contrat signé avec Écomouv’ a été résilié, ce qui prive l’État du dispositif technique de collecte de la taxe. Or cette décision aurait dû être validée par le Parlement ; les articles du code des douanes relatifs à cette taxe existent toujours.
Comme l’a rappelé opportunément notre collègue Ronan Dantec, le Président de la République a évoqué publiquement une mise en œuvre expérimentale. Dans ce contexte, je doute que l’amendement trouve une traduction concrète dans les faits : comment pourrait-on percevoir une taxe additionnelle si l’écotaxe elle-même n’existe plus ?
Madame la ministre, je saisis la perche que nous tend l’auteur de cet amendement pour demander au Gouvernement de clarifier cette situation. Les uns et les autres, nous évoquons ce sujet sans bien savoir quel sera l’avenir.
Monsieur Dantec, vous avez rappelé que les régions ne disposent pas aujourd’hui de ressources propres. Je ne suis pas certain que la loi relative à la transition énergétique soit le véhicule législatif approprié pour fixer à la fois le périmètre et leur offrir les compétences et les ressources y afférant. Ce pourrait être la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe ».
Enfin, si une nouvelle taxe supplémentaire devait être instaurée dans les régions, il faudrait l’appliquer à enveloppe constante, ce qui exigerait un transfert en direction de la fiscalité carbone.
Si nous voulons effectivement avancer dans la transition énergétique, nous devrons prendre ce genre de décisions. Toutefois, nous ne sommes pas obligés d’agir de but en blanc, comme un bulldozer. Nous pouvons donner des signaux progressivement pour faire évoluer la situation et par l’intermédiaire d’une contribution carbone, à l’instar de celle de la Suède qui a d’ailleurs produit de bons résultats, nous serons capables, en quelques années, de faire bouger les lignes.
En conclusion, nous sommes totalement défavorables à la création d’une taxe supplémentaire qui s’ajouterait à d’autres taxes. Dotons-nous d’une fiscalité carbone, mais cessons d’instaurer de nouvelles taxes !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Ronan Dantec. Qui est derrière nous !
Mme Ségolène Royal, ministre. … qui est en effet derrière nous. Lorsque le processus a été interrompu afin de stopper cette hémorragie financière, la question de l’expérimentation dans les régions a été évoquée, je pense notamment à l’Alsace, qui subit des transits de poids lourds.
M. Gérard Longuet. Exact !
Mme Ségolène Royal, ministre. L’idée de départ pour réformer l’écotaxe visait d’ailleurs à mettre en place le dispositif au moins dans les régions par lesquelles transitent les poids lourds.
M. Jean-Jacques Filleul. C’était en effet la première idée.
Mme Ségolène Royal, ministre. Puisque les autoroutes sont payantes en Allemagne pour les poids lourds, ils traversent l’Alsace et c’est un vrai problème.
Cette situation mérite d’être examinée de façon très approfondie et relève plutôt d’un projet de loi de finances. À mes yeux, il ne serait pas judicieux, au détour de ce texte relatif à la transition énergétique, de légiférer dans la précipitation. Cela risquerait de relancer la polémique, alors que les services de l’État mettent à l’abri les éléments techniques du dispositif Ecoumouv’ pour parer à toute éventualité.
Par ailleurs, le système présente des coûts fixes d’une grande ampleur, y compris pour le fonctionnement des portiques. Je ne suis pas sûre que ce soit un service à rendre aux régions que de voter un tel dispositif, de surcroît au moment où elles sont en pleine restructuration.
D’abord, ce serait envoyer un signal sur les poids lourds. De plus, les entreprises de transport sont actuellement confrontées à un mouvement social, du fait des salaires et de la concurrence dans le secteur. Que se passerait-il si elles apprenaient que le Parlement a voté une nouvelle taxe, alors qu’on leur prélève depuis peu 4 centimes par litre de gazole en vue d’alimenter le fonds d'investissement des infrastructures de transports ? D’une certaine façon, nous venons de mettre en place une fiscalité écologique, puisque l’écotaxe a été remplacée, sans frais, par les 4 centimes sur le diesel.
Je rappelle que, dans l’écotaxe, les coûts de fonctionnement et la rémunération de capitaux propres, y compris d’entreprises installées hors de France, s’élevaient à 25 %, montant qui aurait représenté, si j’ose dire, une évasion fiscale.
En l’occurrence, la taxation sur le gazole ne règle pas le problème des poids lourds de transit qui font le plein en Belgique, traversent toute la France sans prendre de carburant et refont le plein en Espagne. Il va falloir un jour traiter cette question, peut-être en instituant, comme l’a décidé l’Allemagne, une vignette aux frontières, mais pour tous les camions...
Mme Évelyne Didier. Ce serait plus simple !
Mme Ségolène Royal, ministre. … car nous savons quelles sont les règles européennes.
Il faut poursuivre la réflexion sur la question du transit et des poids lourds qui ne paient rien sur le territoire national. Mais, pour la plupart des camions, le problème a été réglé avec la taxation de 4 centimes.
Je suis encline à suggérer le retrait de cet amendement. S’il a le mérite de poser le problème, il constituerait un signal assez catastrophique envers les entreprises du secteur, eu égard aux circonstances économiques qu’elles connaissent. Il entretiendrait une confusion car, alors qu’elles paient les 4 centimes, elles constateraient que le Sénat vient de voter une taxe.
M. Gérard Longuet. Le beurre et l’argent du beurre ! (Sourires.)
Mme la présidente. Monsieur Dantec, l’amendement n° 816 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. J’ai bien entendu Mme la ministre et M. le rapporteur pour avis – je le remercie de son intervention. Pour éviter aux uns et aux autres toute difficulté au moment du vote, je vais retirer mon amendement.
Mme la ministre s’est engagée à revenir sur cette question. Or mon prochain amendement tend justement à demander au Gouvernement de déposer un rapport sur ce sujet. Aussi, je me tourne vers Mme Jouanno, qui a brillamment dit que nous demandions un trop grand nombre de rapports mais qui, hier, a défendu tout aussi brillamment le dépôt d’un rapport.
Mme Chantal Jouanno. C’était par solidarité de groupe !
M. Ronan Dantec. Peut-être, mais vous aviez signé l’amendement !
En l’occurrence, c’est un rapport important, car il existe un réel problème avec le transit de poids lourds étrangers en France. Quant au libellé de ce rapport, l’État a toute latitude pour le modifier.
Mes chers collègues, je vous invite à adopter mon amendement n° 817, afin que, par cohérence avec ce que vient de dire Mme la ministre, nous puissions disposer d’un document émanant du Gouvernement et qui précise la manière de procéder. Puisque vous avez pris l’engagement de revenir sur ce sujet, madame la ministre, nous pourrions trouver un consensus sur ce rapport, même si, je l’avoue, j’ai moi-même voté la suppression de certains rapports lors de séances précédentes. (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 816 est retiré.
L'amendement n° 817, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er juillet 2015, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant la faisabilité et les modalités de création d’un péage de transit poids lourds à l’échelle régionale avec affectation de la recette nette aux régions pour financer leurs politiques de mobilité.
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement a été défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?