M. Bruno Sido. Eh oui !
M. Jacques Genest. Pourtant, même si, avec le regretté Jean Ferrat, tout le monde s’accorde à dire que, en Ardèche, « la montagne est belle », et même si chacun est fier de ce qu’elle apporte à l’identité et à l’activité touristique de notre département, les citoyens ont besoin d’élus locaux pour rappeler les dures réalités qu’elle représente au quotidien et les besoins spécifiques créés par le relief.
Ce problème se pose d’ailleurs pour de très nombreuses terres rurales françaises : l’isolement, l’altitude, l’insularité créent des besoins en infrastructures qui deviennent des freins au développement s’ils ne sont pas satisfaits.
Nous savons bien que les investissements qui seront réalisés sur le territoire de ces communes représenteront un coût par habitant supérieur à celui des zones plus densément peuplées, mais nous avons un choix à faire pour l’aménagement de notre pays et son occupation : soit nous continuons dans la voie de la périurbanisation, qui étire de plus en plus les villes en gagnant sur les terres agricoles, cumulant les défauts de la campagne sans apporter les services de la ville, soit nous souhaitons exploiter et rendre attractif tout le potentiel qu’offre un pays de 550 000 kilomètres carrés.
Mes chers collègues, je pense qu’il est temps de rendre leur juste place à la représentation des collectivités locales de la ruralité. En découvrant les préconisations publiées hier par le Commissariat général à l’égalité des territoires, lequel propose de vider de leurs compétences et de leurs moyens les communes au profit des EPCI pour les transformer en collectivités fantômes, je me suis même dit qu’il y avait urgence.
Si le Conseil constitutionnel ne veut ou ne peut entrer dans une logique qui dépasse ses prérogatives ou son entendement, il nous appartient, comme les présidents Larcher et Bas nous invitent à le faire, de proposer l’inscription de ce principe dans la Constitution. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi constitutionnelle tendant à assurer la représentation équilibrée des territoires
Article 1er
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article 1er de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La République garantit la représentation équitable de ses territoires dans leur diversité. »
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. Kaltenbach, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Kaltenbach.
M. Philippe Kaltenbach. Je me suis déjà longuement exprimé à la tribune pour expliquer que les socialistes étaient sensibles à la défense des territoires ruraux et qu’ils s’y associaient chaque fois que c’était possible. Toutefois, s’il faut défendre la ruralité, il ne faut pas non plus oublier les habitants des zones urbaines, qui ne doivent pas être abusivement opposés aux populations des zones rurales. Quoi qu’il en soit, nous avons pris position pour défendre la ruralité à de nombreuses reprises.
Par ailleurs, nous sommes prêts à travailler à un élargissement du « tunnel ». Nous avons déjà pris position pour un tunnel de plus ou moins 30 %. Cher Jacques Mézard, nous accepterions même sans difficulté qu’il soit porté à plus ou moins 33,33 % !
En revanche, nous ne souhaitons pas que l’article 1er de la Constitution soit modifié. Nous considérons que la modification de l’article 72 est amplement suffisante. Puisque le Conseil constitutionnel a estimé que le principe d’égalité devant le suffrage pouvait souffrir une distorsion de plus ou moins 20 %, nous pouvons tout à fait ne modifier que l’article 72 de la Constitution, pour indiquer que cette distorsion peut atteindre jusqu’à 33,33 %.
Les sénateurs socialistes ont donc déposé un amendement visant à supprimer l’article 1er de la présente proposition de loi constitutionnelle, qui tend à modifier l’article 1er de la Constitution. En revanche, ils sont prêts à voter l’article 2 de la proposition de loi, qui modifie l’article 72 de la Constitution.
Ainsi, il serait possible d’apporter une réponse technique à un problème technique, sans toucher à un article fondamental de la Constitution qui affirme le principe d’égalité devant la loi, avec son corollaire, l’égalité devant le suffrage.
Je le répète, modifier cet article, dans les conditions précipitées – c’est le moins que l’on puisse dire – qu’a rappelées Mme Assassi, sans en peser les éventuelles conséquences, ne nous paraît pas nécessaire. Surtout, placer la représentation équitable des territoires au même niveau que l’égalité devant la loi, principe fondamental pour lequel nos ancêtres se sont soulevés en 1789, mérite bien plus qu’un débat d’une heure en commission et de deux heures en séance publique !
J’ajoute que nous prenons le risque de modifier un article fondamental, sans même qu’un débat avec nos concitoyens soit au préalable organisé. Je salue le travail réalisé par M. le rapporteur, mais il faut bien reconnaître qu’il n’a procédé qu’à très peu d’auditions – deux seulement –, et qu’aucun constitutionnaliste n’a été entendu.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe socialiste souhaite que l’amendement n° 1 soit adopté. Si tel était le cas, son vote sur l’ensemble du texte pourrait évoluer. Mes collègues et moi-même serons donc sensibles aux réponses de M. le rapporteur et des auteurs de la proposition de loi.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hugues Portelli, rapporteur. En 2003, lorsque le titre XII de la Constitution a été modifié de façon substantielle, on a introduit dans l’article 1er de la Constitution la référence à l’organisation décentralisée de la République. En 2008, lorsque le champ de la parité a été élargi, l’affirmation du principe de parité est passée de l’article 4 de la Constitution à l’article 1er.
À deux reprises, l’article 1er de la Constitution a donc été modifié à l’occasion de révisions constitutionnelles importantes. Nous proposons, par parallélisme des formes, qu’il en soit ainsi en ce qui concerne le principe de représentation équitable des territoires.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État. Le Gouvernement est évidemment favorable à cet amendement, puisque, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, il est opposé en tout point à cette proposition de loi, qui remet en cause l’un des fondements de la République, à savoir l’égalité des citoyens devant le suffrage.
J’émets donc un avis favorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
L’article 72 de la Constitution est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa, les mots « et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences » sont supprimés.
2° Après le troisième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Les territoires d’élection des membres des conseils des collectivités territoriales et de leurs groupements sont représentés équitablement dans le respect de l’égalité devant le suffrage.
« La population représentée par les élus de chaque territoire ne peut, sauf impératif d’intérêt général, s’écarter de plus d’un tiers de la population moyenne représentée par les élus du conseil.
« Dans les conditions prévues par la loi, les collectivités territoriales disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences. » – (Adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi constitutionnelle tendant à assurer la représentation équilibrée des territoires, dans le texte de la commission.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 90 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 205 |
Contre | 140 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !
11
Dépôt de documents
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la contre-expertise de l’évaluation socio-économique du projet de réhabilitation des quartiers scientifiques du campus « Lyon-Tech-La Doua », accompagnée de l’avis du commissariat général à l’investissement sur ce projet.
Acte est donné du dépôt de ces documents.
Ils ont été transmis à la commission des affaires économiques, à la commission des finances, ainsi qu’à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
12
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 4 février 2015 :
De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :
1. Suite de la proposition de loi relative à l’instauration d’une journée des morts pour la paix et la liberté d’informer (n° 231, 2013-2014) ;
Rapport de M. Jeanny Lorgeoux, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 576, 2013-2014) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 577, 2013-2014) ;
2. Proposition de résolution relative à la préservation des insectes pollinisateurs, de l’environnement et de la santé et à un moratoire sur les pesticides de la famille des néonicotinoïdes, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution (n° 643, 2013-2014) ;
3. Proposition de loi autorisant l’usage contrôlé du cannabis (n° 317, 2013-2014) ;
Rapport de M. Jean Desessard, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 250, 2014-2015) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 251, 2014-2015).
À dix-huit heures trente :
2. Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 12 et 13 février.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART