M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Madame la sénatrice Valérie Létard, vous avez interrogé Alain Vidalies sur la desserte directe par le train à grande vitesse du trajet Valenciennes-Paris. Mon collègue ne pouvant être présent au Sénat ce matin, il m’a chargée de l’excuser auprès de vous et de vous transmettre sa réponse.
Pour se rendre à Paris en train le matin, les habitants de Valenciennes et de ses environs ont le choix entre sept possibilités de trajet : trois trajets directs en TGV et quatre trajets comportant un parcours en TER jusqu’à Lille, suivi d’une correspondance avec un TGV pour Paris.
Cette dernière solution, qui nécessite un changement de train, peut, à certains égards, sembler moins confortable. Elle n’en est pas moins assez efficace, puisque, pour deux des quatre parcours comportant une correspondance, le temps de trajet est plus court que pour le trajet direct en TGV, même en tenant compte du temps de correspondance.
S’agissant des TGV directs entre Valenciennes et Paris, je vous signale que trois trains, et non pas un seul, permettent d’atteindre la gare du Nord le matin, à des heures comprises entre sept heures trente et neuf heures quinze.
Quelques ajustements devraient être opérés au début de cette année du fait des contraintes liées aux travaux de régénération de la ligne à grande vitesse Nord programmés entre le milieu de janvier et le milieu de juillet. Selon les différentes phases de ces travaux, des allongements de temps de parcours compris entre trois et neuf minutes sont à prévoir, mais aucune suppression de train n’est envisagée. Je tiens à souligner que ces modifications d’horaires, du reste assez mineures, sont destinées à permettre la réalisation de travaux importants pour l’entretien de l’infrastructure, et qui permettront, à terme, d’offrir une meilleure qualité de service aux usagers.
S’agissant des TER entre Valenciennes et Lille, vous savez que, depuis 2002, les régions sont seules compétentes pour définir les services régionaux de voyageurs ; il leur appartient donc de décider, en liaison avec la SNCF, des services de TER qu’elles souhaitent organiser.
Au demeurant, la SNCF nous a indiqué que, d’après ses comptages, seul le TER quittant Valenciennes en direction de Lille à sept heures du matin le mardi présente une occupation qu’elle qualifie d’élevée au regard des occupations habituellement constatées sur les services de TER. (Mme Valérie Létard est dubitative.)
Plus largement, la question de l’amélioration de la desserte des TER de votre région relève également de la compétence du conseil régional. Néanmoins, je rappelle que le Gouvernement veille, dans le cadre de sa politique de transport ferroviaire de voyageurs, à créer les conditions adéquates pour que les autorités compétentes puissent améliorer la qualité de service des trains au quotidien. À ce titre, il convient de souligner tous les apports de la réforme du système ferroviaire, votée cet été au Parlement, et qui sera très prochainement mise en œuvre. Cette réforme concourt à mettre en place un système ferroviaire plus durable, plus efficace au service des usagers en renforçant notamment les compétences des régions.
Vous évoquez enfin la question de la réouverture de la ligne transfrontalière Mons-Valenciennes. Cette ligne, sur laquelle le trafic est aujourd’hui interrompu, permettrait en effet de relier des sites industriels du Valenciennois au réseau ferré belge, ainsi qu’au port d’Anvers.
Dans le contexte actuel, il nous faut concilier deux contraintes : la première est relative aux finances publiques ; la seconde est notre obligation de concentrer les investissements sur le réseau structurant, qui connaît aujourd’hui des besoins importants après des décennies de sous-investissement sur les infrastructures ferroviaires.
La réouverture de cette ligne, qui ne fait pas partie des quatre points frontières définis en commun entre la Belgique et la France pour la mise en œuvre des corridors européens des frets ferroviaires, représenterait un investissement d’environ 10 millions d’euros sur le seul territoire français. Cette réouverture doit donc avant tout s’analyser au regard de ces contraintes et des besoins importants recensés par ailleurs sur le réseau ferroviaire du Nord-Pas-de-Calais.
Telles sont les informations, madame la sénatrice, qu’Alain Vidalies tenait à vous transmettre.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. À travers vous, madame la ministre, je remercie le secrétaire d’État chargé des transports de la précision de sa réponse.
Nous savons les efforts accomplis à ce stade. Au moment où des travaux d’envergure vont être réalisés sur les infrastructures et où l’organisation de la desserte va être redéfinie, n’oublions pas le pôle stratégique ferroviaire régional, qui est aussi la tête de réseau national en matière de pôle d’excellence ferroviaire.
Comme je l’ai dit, notre territoire est en train de construire un cluster accueillant tous les grands comptes mondiaux de l’économie ferroviaire – Alstom, Bombardier… –, ainsi que l’Agence ferroviaire européenne. Si, demain, nous voulons organiser un salon international du ferroviaire, il nous faut encore monter en gamme, pour être capables d’accueillir chercheurs et congressistes. Il faut donc que toute la mécanique suive. Or ne pas desservir par le train un territoire qui se veut le cœur de l’excellence ferroviaire nationale pourrait constituer une difficulté.
Concernant la liaison Valenciennes-Mons, j’ai bien entendu que l’on ne pouvait agir dans tous les domaines au même moment. Nous étions pourtant prêts à cofinancer avec l’État cet effort qui aurait facilité non seulement le report modal de tous les camions venant desservir l’énorme pôle industriel du sud du département, mais aussi le respect des enjeux environnementaux. Quoi qu’il en soit, nous serons prêts quand l’État aura les moyens de nous accompagner.
Nous avons bien compris qu’il n’y aura pas davantage de TGV sur cette desserte. Au moins faut-il garder ceux qui circulent actuellement. Assurons-nous surtout, au-delà des trajets domicile-école et domicile-travail que veulent maintenir les régions dans les meilleures conditions, que ces travaux permettront d’améliorer la liaison entre Paris et Valenciennes : le TGV met une heure et demie pour arriver à Douai, contre quarante minutes pour relier Douai à Valenciennes, alors qu’il s’agit d’un tout petit tronçon. Il s’agit d’un vrai problème, car on en arrive à ne pas prendre ce TGV !
S’agissant du TER, nous manquons de liaisons directes nous permettant d’arriver à l’heure, à Lille, pour prendre le TGV vers Paris ou Bruxelles. C’est vraiment dommage, car ce TER pourrait constituer une bonne alternative. Ne ratons pas le coche : le sud du département du Nord, c’est plus d’un million d’habitants, mais c’est surtout le socle industriel de tout le nord de Paris !
excès des exigences environnementales applicables aux communes rurales
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 936, transmise à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
M. Daniel Chasseing. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les exigences environnementales applicables aux plans locaux d’urbanisme et aux communes n’ayant ni PLU ni carte communale. Ces exigences semblent trop souvent excessives aux élus locaux et leur donnent le sentiment de porter préjudice à l’intérêt même des communes et, plus généralement, à l’avenir de la ruralité.
De nombreuses communes rurales éprouvent aujourd’hui des difficultés de plus en plus accrues pour réaliser leur PLU en fonction des critères issus du Grenelle 2 de l’environnement. Les élus concernés sont placés dans l’incapacité de respecter ce texte, étant confrontés à plusieurs problématiques, dont deux, au moins, ne sont pas résolues à ce jour : les propriétaires qui souhaitent vendre leur terrain ne le peuvent pas ; ceux qui souhaitent construire, agrandir ou modifier leur maison ne le peuvent pas davantage.
Il résulte de ce constat une situation figée qui pénalise tout à la fois les habitants des zones rurales et ceux qui souhaitent s’y installer, ce qui, lorsque l’on y réfléchit quelque peu objectivement, est absurde. Je suis donc persuadé, comme la plupart des maires ruraux de France, que les anciennes dispositions des plans d’occupation des sols, les POS, doivent être globalement respectées : les communes doivent conserver a minima les possibilités de constructibilité à l’intérieur des périmètres déjà urbanisés ; il faut également que les distances de non-constructibilité – du type 300 mètres des rivières, par exemple, ou, plus fréquemment dans mon département, distance de recul par rapport aux projets agricoles, qu’il s’agisse de bâtiments ou de plans d’épandage – soient interprétées avec plus de discernement en regard des réalités de l’environnement ; enfin, il serait souhaitable que les services instructeurs de l’État privilégient une approche constructive de ces questions, conciliant certes le respect de la réglementation en vigueur, mais aussi, de façon plus pragmatique, l’intérêt des communes et de leurs habitants.
En un mot, les maires ruraux, non seulement entendent bien conserver la maîtrise de leur PLU, mais encore demandent aux services de l’État de la souplesse, dans ce domaine comme dans bien d’autres, faute de quoi, à la longue, plus rien ne pourra être ni cédé ni construit dans le monde rural, ce qui accentuera son déclin.
À ce problème déjà crucial pour le PLU, s’en ajoute un autre : celui des communes qui ne possèdent ni PLU ni carte communale – soit le tiers des communes de France –, assez nombreuses dans les départements comme le mien, où l’hyper-ruralité est particulièrement répandue. Là encore, le problème que j’évoque se pose encore plus fortement.
Madame la ministre, l’espace rural français n’est pas ce musée de la nature, dévitalisé de toute activité, mais un ensemble de lieux, où naissent, vivent, travaillent et meurent des Français, qui, au nom de l’égalité républicaine, souhaitent bénéficier des mêmes droits que les autres, d’autant plus qu’ils font, eux aussi, partie intégrante du développement durable et devraient avoir le droit de maintenir la vie sur leurs territoires.
Je vous remercie par avance de votre réponse qu’attendent nombre d’élus de la ruralité ou de l’hyper-ruralité.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur l’articulation et la pertinence des exigences environnementales applicables aux documents d’urbanisme, notamment dans les territoires ruraux.
Je veux le redire ici – car cela n’est pas antinomique, comme je peux l’entendre parfois –, le Gouvernement porte une grande attention à la possibilité, pour nos territoires, notamment ruraux, d’assurer leur développement, leur aménagement de manière équilibrée, dans le souci constant de la préparation de l’avenir.
Ainsi, les exigences environnementales applicables aux plans locaux d’urbanisme ne doivent pas donner le sentiment de porter préjudice à l’intérêt des communes ni, plus généralement, au développement des zones rurales. Au contraire, la prise en compte des enjeux environnementaux doit être considérée – vous l’avez d’ailleurs très justement souligné – comme un levier de développement pour ces territoires et leurs habitants. C’est le sens des mesures destinées à promouvoir la production de documents d’urbanisme respectueux de l’environnement et au service des enjeux sociaux et économiques de la France d’aujourd’hui qui ont été inscrites dans la loi, avec la transformation des plans d’occupation des sols en PLU. Celle-ci devra avoir lieu avant le 31 décembre 2015. Les POS sont en effet des documents anciens, issus de la loi d’orientation foncière de 1967, et dont la disparition était inscrite dans la loi pour la solidarité et le renouvellement urbains, dès l’an 2000. Parmi les objectifs de la loi figure notamment la limitation de l’étalement urbain et de la consommation d’espace.
Je le rappelle – les élus locaux, comme vous, le savent très bien –, ces phénomènes aboutissent à un allongement des déplacements au quotidien, à une hausse des émissions de gaz à effet de serre, à une diminution et à un mitage des espaces naturels et agricoles, ainsi qu’à l’irréversibilité quasi systématique de l’imperméabilisation des sols. Or nous ne pouvons pas prétendre que ces phénomènes sont souhaitables pour l’avenir de nos territoires ruraux ni pour nos concitoyens qui y vivent.
Au 1er janvier 2014, il existait encore 6 500 POS dans notre pays, et pas seulement dans le monde rural : ce type de document est encore en vigueur dans certaines communes de zone urbaine dense.
La transformation d’un POS en PLU ne marque pas l’arrêt du développement pour les communes concernées. Au contraire, elle permet de se projeter dans un projet de territoire prenant en compte les spécificités et les atouts des bourgs et villages concernés, sans méconnaître les enjeux contemporains. Je veux souligner combien les petites communes dotées encore aujourd’hui de POS ont intérêt à s’intégrer dans un PLU intercommunal qui leur permettra, avec l’appui des autres communes de l’intercommunalité, de disposer d’une ingénierie suffisante pour élaborer un projet de territoire leur permettant de préserver leurs caractéristiques tout en développant leur attractivité et leur adaptation à l’évolution du monde.
Je peux vous assurer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement, par son action – ce sujet a d’ailleurs largement été évoqué lors des assises des ruralités –, cherche bien à concilier une meilleure protection de l’environnement, conformément à ses engagements, avec le développement équilibré des territoires, dans le souci constant d’améliorer la qualité de vie de leurs habitants.
Tel est le sens du travail que j’ai engagé sur la réécriture et la refonte des documents d’urbanisme.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. J’ai bien entendu quels étaient vos objectifs, mais je persiste à demander, au nom des maires ruraux, plus de pragmatisme dans l’attribution des permis de construire. Lors d’une rencontre avec les maires des 286 communes de mon département, j’ai vu énormément d’entre eux totalement découragés par de nombreux refus incompréhensibles.
Vous venez d’évoquer un PLU intercommunal. Or la plupart des maires que j’ai rencontrés désirent conserver un PLU communal.
Je demande donc un assouplissement et du pragmatisme dans l’attribution des permis de construire en zone rurale.
logements sociaux et prélèvements annuels
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 943, adressée à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
M. Daniel Laurent. Ma question porte sur les incidences, pour les communes du littoral, de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, codifiée à l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, qui prévoit que les communes n’atteignant pas le seuil de 20 % de logements locatifs sociaux participent financièrement à l’effort de solidarité nationale par un prélèvement annuel sur les logements locatifs sociaux manquants.
Deux bilans sont réalisés : un bilan annuel, qui prévoit que les communes doivent s’engager dans un plan de rattrapage pour tendre vers l’objectif précisé dans la loi, et un bilan triennal pour examiner si le rythme de rattrapage est suffisant. Ainsi, l’accroissement net du nombre de logements sociaux par période triennale ne peut être inférieur à 15 % du nombre de logements manquants.
La loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social et ses décrets d’application du 24 juillet 2013 ont renforcé les obligations de production de logements locatifs sociaux dans les zones tendues, le taux passant ainsi à 25 %.
Le développement de l’offre locative sociale doit être cohérent avec les besoins du marché de l’habitat. Or, si l’on conjugue le prélèvement annuel et la baisse des dotations aux collectivités, les communes s’interrogent sur leurs capacités à engager des programmes de construction de logements sociaux, dans un contexte foncier du littoral atlantique complexe : loi Littoral, plan de prévention des risques d’inondation... De plus, de nombreuses collectivités sont en fin d’urbanisation et leur capacité à se développer hors du cadre du renouvellement urbain est quasiment inexistante.
En assujettissant ces collectivités à l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », on leur impose, pour une durée indéterminée, des pénalités, voire des majorations de pénalités si elles n’atteignent pas les objectifs triennaux. Dès lors, il est difficile pour les maires qui veulent respecter la loi d’y satisfaire, compte tenu de la nature géographique de leur territoire et des contraintes réglementaires qui s’imposent à eux. À cet égard, je peux citer la situation de deux communes littorales de mon département : l’une de moins de 5 000 habitants, l’autre de plus de 5 000 habitants.
Pour celle de moins de 5 000 habitants, la minoration de la dotation globale de fonctionnement représente une perte de 124 000 euros de recettes de fonctionnement, à laquelle il convient d’ajouter la réduction des compensations fiscales versées au titre des exonérations imposées par l’État sur la taxe d’habitation et les taxes foncières à hauteur de 39 %, soit une perte supplémentaire évaluée à 43 000 euros par an. Pour cette commune le prélèvement représente 48 600 euros. Le cumul des prélèvements au cours du mandat, entre 2014 et 2019, permet d’estimer la perte de recettes pour la commune à plus d’une année de dépenses d’investissement, ce qui est considérable.
Pour celle de plus de 5 000 habitants, les pénalités représentent plus de 70 000 euros par an. Son habitat est réparti de la manière suivante : deux tiers de résidences secondaires pour un tiers de résidences principales. Pour que la commune réponde aux critères de la loi, il faudrait qu’elle construise, imaginez-vous bien, 884 logements sociaux. Compte tenu du coût local du foncier, ces chantiers représenteraient une somme de plus de 60 millions d’euros, soit 6 millions d’euros par an, ce qui est inimaginable.
Malgré sa volonté, la commune, qui consacre un budget important à l’acquisition de foncier pour la réalisation de logements sociaux ou qui cherche des solutions pour reconvertir des résidences secondaires en résidences principales, ne pourra atteindre les objectifs fixés et préserver les critères environnementaux et urbanistiques, qu’elle souhaite respecter, à savoir la bande littorale, les forêts, les marais, les terres agricoles limitrophes....
Madame la ministre, quelles sont les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre en la matière et quelles réponses puis-je apporter à mes collègues maires, qui sont complètement désemparés ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur les conditions d’application de l’article 55 de la loi SRU, notamment dans les communes littorales où le foncier disponible pour la construction est parfois plus rare.
Comme vous le savez, nos concitoyens les plus modestes éprouvent de grandes difficultés à accéder à un logement abordable dans les zones tendues. Afin de favoriser l’accès au logement de ces ménages modestes et de garantir l’effectivité de la mixité sociale dans ces zones, la loi du 18 janvier 2013 est venue renforcer les obligations de production de logements sociaux sur ces territoires, ainsi que les sanctions envers les communes qui ne les respectent pas. La loi impose désormais aux communes de plus de 3 500 habitants, situées dans des agglomérations ou des établissements publics de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, de disposer de 25 % de logements sociaux au sein du parc de résidences principales. Une exception existe toutefois dans les territoires ne justifiant pas un effort de production, pour lesquels le taux de 20 % a été maintenu.
Pour les communes ne respectant pas leurs objectifs, un prélèvement annuel est effectué sur les ressources communales, proportionnel au déficit en logement social, mais minoré des dépenses engagées par la commune pour créer l’offre de logements sociaux prévue par la loi. Sauf lorsqu’elles sont soumises à des contraintes d’urbanisation particulières qui leur permettent d’être exemptées de l’obligation législative, les communes peuvent, afin de créer cette offre de logements sociaux, construire des logements neufs ou prévoir le conventionnement de logements existants dans le parc privé ou public.
D’une manière générale, je précise que le Gouvernement entend rester ferme sur l’application de ces obligations. La procédure de bilan triennal de la période 2011-2013 chargée de vérifier l’application du constat de carence est en phase finale. Je rappelle qu’elle pourra donner lieu, pour les communes n’ayant pas respecté leurs objectifs de rattrapage, à des arrêtés de carence, pris après avis des comités régionaux de l’habitat et de l’hébergement et de commissions départementales ad hoc. Ils pourront multiplier, le cas échéant, le prélèvement par cinq pour les communes les plus récalcitrantes en matière de rattrapage. À ce jour, sur les 1 022 communes soumises au bilan SRU, c’est-à-dire les communes déficitaires n’ayant pas 20 % ou 25 % de logement social selon les cas, environ 600 communes n’ont pas respecté leur objectif triennal, dont la moitié avec un taux de réalisation inférieur à 50 %.
Les préfets ont conduit les commissions départementales, conformément à la loi, à apprécier les difficultés réelles des communes et la volonté de chacune à réaliser ses objectifs. Environ 200 communes devraient être considérées comme carencées, mais cette évaluation reste à affiner, car la procédure n’est pas encore close. Elle le sera dans les toutes prochaines semaines.
Enfin, je souligne que la majoration du prélèvement payé par les communes en carence est désormais versée à un fonds national qui finance les logements très sociaux. J’ai d’ailleurs annoncé, à l’occasion du congrès du mouvement HLM, que 15 000 logements de ce type seraient construits d’ici à 2018, car ils répondent à une véritable nécessité de renforcer l’accès au logement des plus modestes.
Monsieur le sénateur, vous m’avez plus particulièrement interrogée sur deux communes de votre département de Charente-Maritime. Je vous propose de m’indiquer le nom de ces communes afin que, avec mes services, je puisse regarder plus précisément les obstacles qui existent par rapport à l’application de la loi Littoral. Nous pourrons sûrement, j’en suis sûre, trouver les bonnes solutions.
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.
M. Daniel Laurent. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, même si elle ne me satisfait qu’à moitié.
Tout le monde est d’accord pour dire que nous devons œuvrer pour permettre à nos concitoyens les plus modestes de se loger. Reste que les communes du littoral n’ont pas toutes les moyens de respecter leurs obligations.
Je vous communiquerai le nom des deux communes que j’ai évoquées, car si, en accord avec les préfets, on pouvait trouver des dérogations ou des assouplissements, j’en serais ravi pour elles.
constructibilité de parcelles d'une carte communale situées en zone d'appellation d'origine protégée
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 933, transmise à Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
M. Aymeri de Montesquiou. Les maires de treize communes viticoles du sud-ouest du département du Gers, dans la zone de Saint-Mont, sont abasourdis et exaspérés par l’incohérence de l’administration : elle remet en cause des décisions qu’elle a elle-même entérinées !
Ces communes ont établi leur carte communale au milieu des années 2000, en conformité avec la loi, après consultation de leur population et validation par la DDT, la direction départementale des territoires. Or l’INAO, l’Institut national de l’origine et de la qualité, a communiqué à la DDT, à la fin de l’année 2014, c’est-à-dire plusieurs années après la constitution des documents d’urbanisme, la cartographie des parcelles protégées dans la zone viticole de Saint-Mont. Celle-ci se superpose à un certain nombre de parcelles déclarées constructibles. Il s’avère que ces parcelles de quelques centaines de mètres carrés sont considérées comme impropres à la culture de la vigne par les syndicats de producteurs eux-mêmes, en raison de leur taille très modeste et de leur enclavement, qui a pour conséquence l’impossibilité de traiter la vigne par pulvérisation.
Désormais, ces mêmes parcelles sont déclarées inconstructibles par l’administration. Il y a là une incohérence insupportable entre les documents d’urbanisme et les délimitations de l’INAO, qui sont communiquées, je le répète, plusieurs années après que les documents d’urbanisme ont été validés. Ce dysfonctionnement courtelinesque pourrait faire sourire, mais ses conséquences sont graves : il provoquera une saisine massive de la juridiction administrative si les services de l’État refusent les demandes de permis de construire, bloquant ainsi tout développement immobilier des communes.
Les terrains dont il s’agit ont été déclarés constructibles, et l’article R. 111-14 du code de l’urbanisme ne s’applique qu’à des parties non urbanisées des communes. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous mettiez fin à ce dysfonctionnement et donniez des instructions sur la juste application de l’article R. 111-14 afin d’apaiser une situation devenue extrêmement tendue. Aujourd’hui, les élus, en particulier ceux des petites communes, se considèrent très mal traités par l’État. Il faut faire en sorte que, dans ce cas précis, ce mécontentement ne se transforme pas en exaspération.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur les problèmes posés par la cartographie communiquée récemment par l’INAO à la DDT du Gers. Cette nouvelle cartographie superpose une protection de type « appellation d’origine protégée », ou AOP, à certaines parcelles antérieurement constructibles.
Comme vous le savez, la protection du patrimoine agricole français est au cœur des préoccupations du Gouvernement. Nous attachons ainsi beaucoup d’importance aux appellations d’origines protégées et aux appellations d’origines contrôlées. Je rappelle que leur objectif est de mettre en avant et de protéger la typicité du terroir que l’on retrouve dans les produits, que cela soit l’origine géographique des ingrédients entrant dans leur composition ou le mode de production. Ces appellations sont également très importantes pour protéger les produits et leurs appellations des imitations, évitant ainsi une concurrence déloyale. Toutefois, nous devons également être très attentifs au fait que la protection des territoires concernés par ces appellations ne s’effectue pas au détriment de leur développement et de leur aménagement équilibré.
Votre question porte plus particulièrement sur le devenir de parcelles de communes dont la carte communale a ouvert des droits à construire en dehors des parties déjà urbanisées. Cette constructibilité est effectivement remise en cause par le nouvel état cartographique de l’INAO.
L’article R. 111-14 du code de l’urbanisme, qui s’applique en l’absence de plan local d’urbanisme, prévoit que les autorisations d’urbanisme peuvent être refusées en dehors des parties urbanisées des communes, notamment lorsque celles-ci pourraient compromettre les activités agricoles en raison de l’existence de terrains faisant l’objet d’une indication géographique protégée. En pratique, chaque demande de permis de construire sur des terrains classés en AOP fait l’objet d’un traitement au cas par cas par l’INAO, en lien avec la DDT et la commune concernée.
S’agissant de la situation que vous évoquez, je peux vous dire que j’ai demandé au préfet du Gers et à la DDT d’étudier actuellement le problème posé par le nouveau zonage AOP du vignoble Saint-Mont, en lien avec les associations de vignerons et l’INAO, dans le but d’adopter une démarche plus consensuelle sur ce sujet, qui pose effectivement problème à de nombreux élus. Sachez que mon ministère suit attentivement ce dossier et que je reste à votre écoute pour entendre les propositions que vous pourrez formuler pour concilier à la fois la nécessité de protéger ce terroir et d’aménager de façon équilibrée le territoire.