M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’exemple de la Polynésie française est de nature à nous rassurer ! (Sourires.) C’est en effet le meilleur exemple que l’on puisse donner…
Certes, le dispositif qui nous est proposé existe dans d’autres assemblées d’outre-mer, mais certaines affaires nous dépassent…
M. Bruno Sido. En Corse ou en Polynésie ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous ne feindrons pas d’en être les organisateurs ! (Nouveaux sourires.)
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements, car ils lui ont paru un peu biscornus.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Le groupe écologiste votera ces amendements, mais il tenait à faire part de sa déception s’agissant des propositions concernant la Corse. Il aurait aimé une véritable évolution sur les compétences et la gouvernance des différents échelons existants.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 768 et 870.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
TITRE II
Des intercommunalités renforcées
Chapitre Ier
Des regroupements communaux
Articles additionnels avant l'article 14
M. le président. L'amendement n° 224, présenté par M. Maurey, est ainsi libellé :
Avant l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au troisième alinéa de l’article L. 273-10 du code électoral, les mots : « le siège de conseiller communautaire reste vacant jusqu'au prochain renouvellement du conseil municipal de la commune » sont remplacés par les mots : « est pourvu par un conseiller municipal, n’exerçant pas ou plus de mandat de conseiller communautaire, désigné par le conseil municipal dans les conditions fixées à l’article L. 2122-7 du code général des collectivités territoriales ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 690, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Avant l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deuxième et troisième phrases du II de l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales sont ainsi rédigées :
« Cet accord doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux de toutes les communes incluses dans le projet de périmètre représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par un tiers au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population. Ces majorités doivent nécessairement comprendre au moins un quart des conseils municipaux des communes qui sont regroupées dans chacun des établissements publics de coopération intercommunale dont la fusion est envisagée. »
La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. M. Mercier propose au travers du présent amendement que l’accord sur un nouveau périmètre d’EPCI issu d’une fusion soit exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux représentant plus de la moitié de la population totale, ou par un tiers au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population. Cet accord doit émaner des conseils municipaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Des règles de majorité ont été fixées depuis longtemps et permettent déjà les fusions. À trop vouloir les assouplir, nous risquerions de créer des problèmes, d’autant qu’il est important de vérifier l’existence d’un réel consensus en la matière. Les majorités proposées dans cet amendement paraissant insuffisantes, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de M. le rapporteur et s’en remet à la sagesse de l’assemblée.
M. le président. Madame Gourault, l'amendement n° 690 est-il maintenu ?
Mme Jacqueline Gourault. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 690 est retiré.
Article 14
I. – L’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le III est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
a bis) (nouveau) Au 2°, les mots : « Une amélioration de la cohérence » sont remplacés par les mots : « La cohérence » ;
b) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° La réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes, en particulier par la suppression des doubles emplois entre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou entre ceux-ci et des syndicats mixtes ; »
2° Le dernier alinéa du IV est ainsi rédigé :
« Le schéma ainsi élaboré est révisé selon la même procédure tous les six ans. » ;
3° Au V, les mots : « sur le territoire des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que » sont supprimés ;
4° Le premier alinéa du VI est supprimé.
II. – À l’exception des départements composant la région d’Île-de-France, les schémas départementaux de coopération intercommunale révisés selon les modalités prévues à l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales sont arrêtés avant le 31 décembre 2016.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.
M. Joël Guerriau. Voilà déjà sept mois – c’était le 18 juin 2014 – que le conseil des ministres a adopté le projet de loi NOTRe. Depuis cette date, les commissions départementales de coopération intercommunale, les CDCI, dont il sera beaucoup question dans le chapitre du texte dont nous abordons l’examen, ont eu le temps d’anticiper son application et d’analyser sa faisabilité.
En tant que maire, je siège comme assesseur au sein de la CDCI de mon département. Ce cumul des mandats, je tiens à le signaler, permet à chaque parlementaire concerné de se confronter à la réalité du terrain.
En accord avec le préfet, nous avons décidé de rencontrer en priorité les élus communautaires des huit communautés de communes de moins de 20 000 habitants. L’objectif est de faciliter le rapprochement des EPCI directement visés par ce projet de loi avec les intercommunalités voisines, dans la perspective de la révision du schéma départemental de coopération intercommunale au 1er janvier 2016.
Il est communément admis que les facteurs à prendre en considération pour justifier au mieux les rapprochements sont les bassins de vie et l’activité économique. Or ce n’est pas si simple.
Pour illustrer concrètement mon propos, permettez-moi d’évoquer trois situations différentes. Dans les trois cas, il s’agit d’intercommunalités qui s’inscrivent dans l’esprit du projet de loi, mais qui rencontrent des difficultés pour s’y conformer.
La première situation est celle de quatre communautés dont les bassins de vie sont interdépendants. Ces communautés sont réunies au sein d’un même schéma de cohérence territoriale, ce qui a favorisé l’émergence d’un projet de fusion. Cette perspective apparaît d’ailleurs dans le schéma départemental adopté dès 2006. Toutefois, les conditions de majorité n’ayant pas été atteintes, le projet a échoué en 2013.
Aujourd’hui, seule l’une de ces quatre intercommunalités se situe en dessous du seuil de 20 000 habitants : la communauté de communes de Sèvre, Maine et Goulaine, qui compte 14 255 habitants. Les maires de cet EPCI se sont exprimés à l’unanimité en faveur d’un regroupement avec une ou plusieurs autres intercommunalités. Or, si aucun des trois autres EPCI ne décide clairement de fusionner, que se passera-t-il ? Comment le préfet pourrait-il imposer une solution ?
Il est à noter que ces quatre communautés sont très différentes eu égard à leur niveau d’endettement, mais également aux compétences qu’elles se sont attribuées.
De l’étude de ce premier cas, il ressort que ce n’est pas parce que l’on souhaite se marier que l’on trouve l’âme sœur. Devons-nous obliger des intercommunalités à contracter une union non consentie ? Quel en serait le résultat ?
La deuxième situation est celle de deux communautés de communes, celle de la région de Nozay, qui compte 15 000 habitants, et celle de Blain, qui en recense 15 500. Ces deux intercommunalités ont fait connaître leur intention de se rapprocher, mais elles appartiennent à des schémas de cohérence territoriale différents. Avant de conclure une fusion, les deux EPCI doivent se mettre d’accord sur le SCOT de rattachement. Le cinquième alinéa de l’article L. 122-5 du code de l’urbanisme prévoit une adhésion de plein droit au SCOT du territoire dont la population est la plus nombreuse. Or dans ce cas, l’écart de population est très faible et peut évoluer dans un sens ou un autre.
C’est là l’autre écueil d’une loi qui manquerait de souplesse. Il convient en effet dans cet exemple de veiller à la cohérence globale des rapprochements en étudiant leur incidence au niveau des périmètres supra-communautaires.
Dans les deux cas que je viens d’évoquer, la mise en œuvre d’études par les collectivités est nécessaire pour nourrir la réflexion des élus. Je suis persuadé qu’il ne faut pas précipiter les choses. Il faut laisser du temps à la concertation.
À cet égard, permettez-moi de citer Jean-Paul Delevoye : « Aucune politique ne peut être acceptée et appliquée telle la parole divine et infaillible : le temps de l’explication et de l’acceptation de la décision est bien plus important que le temps de la décision elle-même. »
Ces deux situations montrent à quel point il est difficile d’appliquer la loi, malgré la volonté réelle des élus d’aller dans le sens du texte.
Ce n’est pas en fixant la barre à 20 000 habitants que nous apportons une réponse aux exemples que je viens de citer, alors que certains maires s’y sont déjà engagés. Nous tombons dans les mêmes travers que pour le seuil de 25 % de logements sociaux, lequel n’apporte pas de solution.
Pourquoi définir un seuil au lieu de faire confiance au bon sens des élus locaux qui ont en charge l’équilibre des territoires et qui connaissent leurs spécificités ?
Enfin, la troisième situation que je tiens à évoquer est celle de la communauté de communes de Pornic.
Les articles 18, 19 et 20 du projet de loi ont pour objet de compléter le champ des compétences nécessaires et optionnelles des communautés de communes et des communautés d’agglomération pour qu’elles soient éligibles à une bonification de la dotation globale de fonctionnement. Trois nouvelles obligations sont ajoutées : la création d’un office du tourisme, l’aménagement, l’entretien et la gestion des aires d’accueil des gens du voyage, enfin, la création et la gestion de maisons de services au public.
Pour être éligible à la DGF bonifiée, une communauté de communes devra donc exercer six compétences dans la liste des onze qui sont prévues. L’ajout d’un seuil de population me paraît regrettable alors que ces obligations sont parfois déjà satisfaites en raison de l’activité ou du dynamisme des communes.
Aussi, je souhaite soulever un élément de bon sens concernant les communautés d’agglomération et les communes littorales.
Il me semble pertinent que la population DGF des communes littorales, dites « centres », disposant d’un classement en station de tourisme puisse être prise en compte pour l’appréciation du seuil des 15 000 habitants.
En effet, les communes classées stations de tourisme disposent d’infrastructures et de services d’envergure, bien souvent surdimensionnés et suréquipés par rapport aux besoins de la population des résidences principales. Ils doivent prendre en compte une grande partie de l’année les besoins de la population des résidences secondaires, mais aussi la fréquentation touristique.
Le classement en station de tourisme est le signe d’un engagement fort de la commune. Elle s’engage à proposer des services publics de qualité, et ce dans des domaines très larges, qui vont bien au-delà des services offerts sur des territoires non touristiques. La prise en compte de la population DGF pour la commune-centre classée en station de tourisme est donc pertinente.
Pour conclure, dans un contexte de montée en puissance de l’échelon régional, de raréfaction des deniers publics, de clarté et d’efficacité de l’action publique, les élus communautaires ont déjà engagé des réflexions afin d’agrandir les communautés de communes, voire de créer des communautés d’agglomérations. Leur volonté est de répondre efficacement aux besoins en services de leur population. Ils sont déjà dans une logique de coconstruction.
Il ne saurait y avoir de bonne loi territoriale sans souplesse. D’ailleurs, les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux qui ont été créés au 1er janvier 2015 favorisent les échanges sur des sujets intercommunautaires. Pour autant, il est essentiel que les rapprochements ne résultent pas d’une simple volonté administrative.
6
Décision du Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité
M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat le 19 janvier 2015 que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 91 de la loi sur les finances du 28 avril 1816 (Greffe des tribunaux de commerce) (2015-459 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.)
PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
7
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, pour finir, comme prévu, la discussion des articles du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République cette semaine, il paraît préférable, en accord avec la commission des lois et le Gouvernement, d’ouvrir, éventuellement, la nuit du vendredi 23 janvier et de siéger, éventuellement, le samedi 24 janvier, le matin et l’après-midi.
En conséquence, l’ordre du jour des séances du vendredi 23 et, éventuellement, du samedi 24 janvier s’établirait comme suit :
vendredi 23 janvier 2015
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :
- Suite du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Éventuellement, samedi 24 janvier 2015
À 9 heures 30 et à 14 heures 30 :
- Suite du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Il n’y a pas d’observation ?...
Il en est ainsi décidé.
8
Nouvelle organisation territoriale de la République
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Nous poursuivons la discussion des articles.
Article 14 (suite)
M. le président. Nous en sommes parvenus à l’examen des amendements déposés à l’article 14.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 556 est présenté par M. Adnot.
L'amendement n° 691 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 871 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 556 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour présenter l’amendement n° 691.
Mme Jacqueline Gourault. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article, car nous sommes opposés au fait que de nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale soient arrêtés avant le 31 décembre 2016.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° 871.
Mme Cécile Cukierman. Personne ne sera étonné que nous demandions également, au travers de notre amendement, la suppression de l’article 14.
D’une part, dès la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, nous avons condamné l’autoritarisme de cette procédure qui contraignait les communes à se regrouper au sein d’intercommunalités ne correspondant pas, le plus souvent, au développement de projets communs et ne s’appuyant sur aucune volonté d’action commune.
Cette disposition est, en fait, un outil d’intégration communale et non la mise en œuvre d’un outil de coopération entre les communes, auquel nous restons attachés. Cela pose une nouvelle fois la question de l’avenir de nos communes… ou de leur évaporation !
D’autre part, nous contestons la volonté exprimée par ce texte de développer de nouvelles intercommunalités, regroupant un plus grand nombre de communes et renforçant encore leurs compétences. Si, en 2010, nous étions opposés au seuil minimum de 5 000 habitants, nous ne pouvons, comme la commission des lois, qu’être en désaccord avec son relèvement à 20 000 habitants.
Autre argument qui milite à ce jour en faveur de la suppression de cet article tel qu’il résulte de la rédaction de la commission : les intercommunalités en place aujourd’hui viennent seulement d’être installées. Elles disposent de compétences nouvelles qu’elles n’ont pas encore eu le temps de mettre en œuvre, dans la mesure où les élus sont en train d’apprendre à travailler ensemble et vont, dans les jours qui viennent, adopter leur premier budget.
En ouvrant dans les prochains mois une nouvelle procédure de concentration, nous allons bloquer leur activité et aucun projet ne pourra être envisagé. Nous craignons d’organiser l’attentisme, la gestion des affaires courantes, alors que la situation économique et sociale de notre pays appelle au contraire une mobilisation publique renforcée.
Enfin, les conditions de modification de la carte intercommunale sont déjà codifiées dans notre législation, il n’est nul besoin d’y revenir. Notre loi est suffisante, puisque, si des intercommunalités souhaitent se regrouper sur la base de projets partagés, elles peuvent d’ores et déjà le faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. J’incite tous nos collègues à suivre Jacqueline Gourault dans la brièveté de ses interventions. Sa concision n’a pas empêché la clarté de son propos.
Il ne faudrait pas non plus multiplier les interventions, car toutes ces déclarations, certes intéressantes, finiront par nous obliger à modifier profondément nos méthodes de travail : le Sénat débat, contrairement à l’Assemblée nationale ; le temps programmé n’est pas, à mon avis, une bonne chose pour le débat parlementaire, encore faut-il que chacun fasse preuve d’un peu de discipline. Or, monsieur le président, depuis votre déclaration concernant la modification de notre ordre de jour, il est prévu que nous siégions vendredi dans la nuit et éventuellement samedi prochain ; et si cela ne suffisait pas, le lundi pourrait encore s’ajouter !
J’en reviens à l’article 14. Je rappelle que le projet du Gouvernement consistait à refondre complètement la carte territoriale pour tenir compte du nouveau seuil. Je rappelle également que la loi de 2010 prévoyait une clause dite de « revoyure », même si je n’apprécie guère ce terme. Considérant que l’effort n’a pas été consenti partout, cet article vise aussi à regrouper les syndicats faisant double emploi, car il y a encore beaucoup à faire en la matière.
La commission des lois qui, vous le savez, a estimé que le seuil de 20 000 habitants n’était pas pertinent, souhaite que l’on examine ce point, car presque toutes les communes de France font aujourd’hui partie d’intercommunalités. Nous aurons l’occasion de développer ce point lorsque nous examinerons l’amendement du Gouvernement. L’intercommunalité, je le souligne, n’est pas la « supracommunalité » Je vous renvoie au rapport de nos excellents collègues Jean-Pierre Raffarin et Yves Krattinger sur le sujet.
Nous sommes d’accord pour examiner la situation : certaines intercommunalités sont jeunes, d’autres plus anciennes, et des regroupements restent sans doute à faire dans des départements. Nous souhaitons donc conserver cette possibilité, sans pour autant nous livrer à un véritable remue-ménage et tout remettre en cause si rapidement.
La carte de l’intercommunalité étant récente et n’ayant pas été facile à établir dans certains départements, il convient d’y apporter des améliorations. C’est pourquoi nous sommes hostiles à la suppression de l’article ; mais, de grâce, comparez l’article voté par la commission des lois et le projet de Gouvernement !
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous maintenons cet amendement et tenons ensuite à rappeler à notre excellent rapporteur que la menace de séances qui se poursuivraient jusqu’à samedi ne suffirait pas à remettre en cause l’expression des groupes. Je ne pense pas que nous en abusions,…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n’est pas vous qui étiez en cause.
Mme Cécile Cukierman. … d’autant que, sur certains articles importants, il est nécessaire de se positionner – d’où ces amendements de suppression.
Je le dis à l’ensemble de cette assemblée : nos débats ne doivent nullement être calqués sur ceux de l’Assemblée nationale, sauf à ce que notre pays perde en démocratie.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je l’ai dit aussi.
Mme Cécile Cukierman. Je vous rejoins sur ce point, monsieur le rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 691 et 871.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 1105, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
1° Le I est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Ces établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupent au moins 20 000 habitants.
« Il est toutefois possible d’adapter ce seuil de population, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la densité de population est inférieure à la moitié de la densité moyenne du département où se trouve le siège ou dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
« Il est également possible d’adapter ce seuil de population, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont le périmètre a évolué entre le 1er janvier 2012 et la date de la publication de la loi n° … du …. portant nouvelle organisation territoriale de la République.
« Il est également possible d’adapter ce seuil pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant toutes les communes d’un territoire insulaire. » ;
1° bis Au début du premier alinéa du II, les mots : « Ce schéma » sont remplacés par les mots : « Le schéma départemental de coopération intercommunale » ;
1° ter Le III est ainsi modifié :
a) Le 1° est abrogé ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Dans le texte initial refondu par la commission des lois, nous avions envisagé, en utilisant la clause de revoyure de la dernière loi sur laquelle nous nous sommes alignés concernant les dates, de réintroduire un seuil de 20 000 habitants pour nos intercommunalités, estimant que, pour sauver les communes, rien ne vaut bien souvent l’intercommunalité ; encore faut-il que des bases fiscales importantes lui permettent d’agir.
Nous avons attentivement relu l’excellent travail réalisé, département par département, par le Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, qui a bien montré que ce seuil était un objectif largement atteignable ; nous avons entendu les uns et les autres, en considérant les remarques des élus au cours de nos nombreux déplacements, notamment à Caen, monsieur le président de la commission des lois, mais aussi les observations des associations départementales des maires de France ou des préfets : nous en avons retenu qu’il fallait envisager, non pas des dérogations, car ce mot choque les élus de montagne, mais des adaptations.
Le Premier ministre s’est engagé en ce sens lorsque la densité démographique et/ou la géographie ne permettent pas de constituer des intercommunalités de 20 000 habitants qui fonctionnent dans de bonnes conditions pour les élus, et donc pour les populations.
Face à cette évidence, nous avons envisagé une première adaptation pour les intercommunalités dont la densité démographique est inférieure de moitié à la densité moyenne du département.
D’autres critères, dont nous nous étions ouverts auprès de M. Larcher, ont été testés, comme celui de la distance entre le siège de l’intercommunalité et la commune la plus éloignée de ce dernier. Nous nous sommes toutefois aperçus que le critère de la densité démographique recouvrait tous les autres. Les résultats des simulations sont en effet les mêmes, que l’on retienne la densité démographique, la distance ou le nombre de communes.
Le critère de la densité permet donc de régler nombre de cas, en zones de montagne ou ailleurs. Cette première adaptation tient compte à la fois des observations des élus de montagne sur la nécessité de retenir un seuil différent et des remarques formulées par beaucoup de maires, de présidents de conseils généraux et de parlementaires qui connaissent dans leurs départements des zones de faible densité démographique.
Nous proposons une autre adaptation qui, pour sa part, devient dérogation, car elle n’est pas de la même nature.
En effet, si certaines intercommunalités qui viennent de se constituer depuis le 1er janvier 2012 ne comptent que 17 000 habitants, nous n’allons pas leur demander de tout recommencer.
Le cas est le même lorsque, dans une zone donnée, on peut constituer deux ou trois intercommunalités de 20 000 habitants, puis qu’il reste 17 000 habitants à regrouper.
Si le critère de la densité démographique permet de régler la très grande majorité des problèmes, nous devons aussi prendre en compte le cas des intercommunalités récemment créées – on ne peut pas leur demander de revoir leur copie pour trouver 3 000 ou 4 000 habitants supplémentaires –, et celui des zones frontalières ou littorales qui ne comptent pas suffisamment d’habitants pour atteindre le seuil de 20 000 habitants.
J’en viens aux territoires insulaires. Très peu sont concernés, mais une demande est intervenue de Belle-Île-en-Mer, qui compte plusieurs communes et peut donc constituer une intercommunalité. À l’inverse, d’autres îles appartiennent depuis longtemps à des communautés de communes qui, bien qu’elles soient rurales et dirigées par une majorité de même sensibilité politique que la majorité actuelle du Sénat, estiment que le seuil de 20 000 habitants constitue, pour un territoire rural, le minimum requis pour pouvoir se développer. Ainsi, l’île de Batz, que le président Larcher connaît bien pour avoir eu l’honneur de la visiter, a rejoint la communauté de communes du Pays Léonard.
Il convient de prendre en compte les questions posées, essentiellement, par Belle-Île-en-Mer et l’île de Ré, dont les communes abritent suffisamment d’habitants pour qu’elles puissent travailler ensemble et progresser en s’appuyant sur des outils de développement non négligeables comme le tourisme et l’agriculture.
Des adaptations d’une part, des dérogations d’autre part et, je l’espère, une façon d’avancer qui se traduira par une instruction aux préfets pour leur demander de prendre en compte ces différents critères, en premier lieu celui d’une densité démographique inférieure de moitié à la densité moyenne du département : telle est, monsieur le rapporteur, exposée aussi sommairement que possible, la nouvelle proposition du Gouvernement, issue des multiples discussions que nous avons eues avec les acteurs concernés.
Il faut avoir un horizon, mais aussi faire preuve de bon sens et développer une capacité d’adaptation ou de dérogation pour pouvoir prendre en compte toutes les situations.
Pour conclure, on voit bien que ce sujet suscite des doutes sur la façon de travailler en intercommunalités.
Nous avons discuté tout à l’heure du risque de perte d’identité, mais celui-ci peut être écarté, me semble-il, tant que la commune subsiste. En revanche, que confie-t-on à l’intercommunalité, que peut-on faire ensemble pour lutter contre les violentes inégalités entre les territoires ?
Il me semble qu’une petite intercommunalité perdue au milieu d’une zone de densité démographique moyenne à l’échelle de la France n’a pas beaucoup de chance de résister à une nouvelle concurrence entre les territoires. Aujourd’hui, l’association des maires ruraux s’inquiète notamment du fait que les intercommunalités rurales affichent souvent un faible taux d’emprunt et une pression fiscale très basse, car la base fiscale est tout simplement insuffisante pour mobiliser une population sur des projets structurants.
Au nom de l’intérêt général que nous devons défendre – c’est la mission d’un exécutif –, nous devons être lucides sur les difficultés de ces intercommunalités, dont certaines ne sont même plus en mesure de faire face aux dépenses liées à leur école primaire.
Je ne sais pas si l’on rendrait service à ces intercommunalités en les empêchant de disposer de moyens supplémentaires. En effet, le monde est difficile, et ceux de nos concitoyens qui partent vivre en milieu rural, s’ils acceptent d’avoir peu de services au début, ne l’acceptent souvent pas longtemps, quitte à devenir parfois un peu « difficiles », selon les termes des ruraux.
De la même façon, nous devons gagner dans nos territoires ruraux la bataille du maintien de la terre agricole et du développement de l’agroalimentaire, qui est en danger aujourd’hui, et qui le sera demain si l’on n’y prend garde. J’ai souvent insisté sur ce point, non pas pour défendre absolument nos territoires ruraux, mais pour les porter, car ils nous sont vraiment indispensables.
Quand on parle de densification, de prise en compte de tous ces mètres carrés précieux qui sont ceux de l’agriculture ou des espaces naturels qui nous protègent, il faut que l’intercommunalité en charge de ces terres dispose de quelques moyens. Or ceux-ci sont très limités quand on regroupe trop peu d’habitants.
C’est pourquoi le Gouvernement a ouvert le débat avec cet amendement, qui prévoit ces adaptations et ces dérogations.