M. Charles Revet. Ces quatre amendements sont similaires, même s’ils ne concernent pas les mêmes catégories de personnes.
L’amendement n° 66 rectifié bis concerne les élèves et étudiants aides-soignants, l’amendement n° 67 rectifié bis, les élèves et étudiants auxiliaires de puériculture, l’amendement n° 68 rectifié bis, les élèves et étudiants ambulanciers et l’amendement n° 58 rectifié bis, les élèves et étudiants travailleurs sociaux.
Les formations de ces élèves et étudiants comportent des enseignements magistraux et des temps de stages professionnels sur leurs futurs lieux d’exercice. À ce titre, les professionnels visés dans les amendements participent à la formation des élèves et étudiants dans le cadre de ces stages pratiques.
Ainsi, pour ces étudiants et élèves, les stages obligatoires conditionnent l’accès à la profession à laquelle ils se préparent et toute difficulté pouvant y faire obstacle doit être levée.
C’est pourquoi ces amendements visent les stages liés à un cursus pédagogique intégré à la formation de ces futurs professionnels, qui ne peuvent, de par leur spécificité, bénéficier d’aucune forme de rémunération ou de gratification, à l’exclusion des indemnités liées aux contraintes engendrées par ces stages.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?
M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. Ces amendements ont pour objet d’exclure de l’obligation de gratification les stages réalisés dans le cadre de la formation respective des aides-soignants, des auxiliaires de puériculture, des ambulanciers et des travailleurs sociaux. M. Revet ne sera pas surpris : la commission a émis un avis défavorable.
M. Charles Revet. C’est dommage !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 85, présenté par Mmes Procaccia, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann et MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une plateforme en ligne est mise en place par les pouvoirs publics afin de mettre à disposition les données et informations relatives aux offres de stage, aux droits des stagiaires et aux organismes d’accueil des stagiaires.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Le Gouvernement a annoncé son intention de se lancer dans l’open data. D’ailleurs, un certain nombre de ministères commencent à mettre en place des plates-formes intéressantes.
Si une plate-forme en ligne était mise en place en matière de stages, cela permettrait de diffuser des informations concrètes sur les offres de stage, sur les droits des stagiaires et sur les organismes d’accueil. Cela permettrait également sans doute d’éviter des abus et de mieux informer les stagiaires. Ceux pour qui les stages se sont mal déroulés pourraient en parler et décrire la situation à laquelle ils ont été confrontés.
Une telle base de données nous semble utile pour tout le monde, qu’il s’agisse des entreprises d’accueil, des stagiaires ou des établissements d’enseignement supérieur, qui pourraient suivre le processus au fur et à mesure des années et des stages. Quand on s’occupe de milliers d’étudiants qui font des stages, on ne peut pas vraiment faire des regroupements. Un tel dispositif contribuerait à la transparence des pratiques et irait dans le sens de ce que souhaite mettre en œuvre le Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par Mmes Procaccia, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann et MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, six mois après la publication de la loi n° … du … tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires, un rapport proposant des pistes sur la mise en place d’une plateforme en ligne destinée à mettre à disposition du public les données et informations relatives aux offres de stage, aux droits des stagiaires et aux organismes d’accueil des stagiaires.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Il s’agit d’un amendement de repli. Si le Gouvernement n’a pas les moyens matériels ou financiers de mettre en place le dispositif de l’open data, le présent amendement prévoit la remise d’un rapport.
M. Daniel Raoul. Encore ?
Mme Catherine Procaccia. Après l’intervention de notre présidente en commission sur tous les rapports demandés qui ne sont jamais remis, je préférerais néanmoins ne pas avoir à présenter cet amendement de repli…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. La création d’une plate-forme publique d’information en ligne est une idée intéressante. Cependant, au vu de la multiplicité des acteurs concernés, elle nous semble très difficile à mettre en œuvre.
De plus, il ne s’agit pas véritablement d’une démarche de type open data, car nous ne disposons pas aujourd'hui de grande base de données publiques à ce sujet, sur laquelle l’accès serait restreint.
La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
Quant à l’amendement de repli n° 86, la commission étant assez défavorable à la multiplication des demandes de rapport,…
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. … elle en demande le rejet.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. L’un de mes prédécesseurs, Laurent Wauquiez pour le nommer, avait tenté de mettre en place une centralisation des données sur les stages en en confiant la gestion à l’Office national d’information sur les enseignements et les professions, l’ONISEP. Il s’agissait d’une banque de données. Mais ça n’a pas fonctionné, tout simplement parce que les offres de stage se font au niveau des territoires et que leur centralisation s’est avérée tout à fait impossible.
Il ne s’agit pas d’open data. Le problème vient tout simplement de la difficulté qu’il y a recueillir et à collationner au niveau central des données territorialisées. Il nous semble beaucoup plus intéressant d’opérer ce travail à l’échelle des territoires, là on dispose de données efficaces.
En ce qui concerne l’open data, je tiens à souligner que le secrétariat d’État à l’enseignement supérieur et à la recherche est le premier département ministériel à avoir mis en ligne des données, auxquelles vous avez déjà accès dans un certain nombre de secteurs.
Quant aux stages, ils dépendent tellement du bassin d’emploi local que leur centralisation s’est avérée inefficace, même si l’idée est bonne. Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. L’intention inscrite dans l’amendement est extrêmement intéressante. Votre réponse, madame la secrétaire d’État, me laisse un peu perplexe. En effet, vous semblez considérer que les pouvoirs publics, c’est les pouvoirs publics au niveau de l’État. Non ! Les pouvoirs publics, ça peut être également au niveau régional, au niveau départemental, au niveau local. Ce sont les pouvoirs publics organisés, qui apportent un certain nombre de services.
À partir de là, l’amendement peut très bien, compte tenu de l’argumentation que vous avez défendue, être adopté et concerner, par un fléchage que vous avez-vous-même indiqué, les pouvoirs publics locaux.
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs des secteurs d’activités mentionnés à l’article L. 6331–55 du code du travail ouvrent dans un délai d’un mois après la promulgation de la présente loi, des négociations visant à proposer, avant le 31 décembre 2014, l’adaptation de ses dispositions visant à un encadrement renforcé de l’accueil des stagiaires pour les stages dont la durée est inférieure à deux mois.
Ces négociations ne peuvent prévoir de dispositions moins favorables aux stagiaires que la présente loi. Les négociations devront proposer les adaptations des différents articles de la loi à l’ensemble des stages proposés dans les secteurs d’activité mentionnés.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 91, présenté par Mmes Procaccia, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann et MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dispositions de la présente loi ne s’appliquent pas aux conventions de stage signées avant la publication de ses décrets d’application.
L'amendement n° 90, présenté par Mmes Procaccia, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann et MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi entre en vigueur à compter de la rentrée universitaire 2014–2015.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour présenter ces deux amendements.
Mme Catherine Procaccia. Le texte tel qu’il nous a été transmis par l’Assemblée nationale pose problème. Nous ne souhaitons pas que les nouvelles dispositions concernant les stages s’appliquent aux conventions de stage qui ont été signées avant la publication des décrets d’application. C’est l’objet de l’amendement n° 91.
L’amendement n° 90 va un peu dans ce sens, en prévoyant que la loi n’entrera en vigueur qu’à la rentrée universitaire 2014–2015. À l’origine, cette loi devait s’appliquer au mois d’avril.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 91, il est logique que les dispositions de ce texte qui nécessitent un décret d’application ne soient pas applicables avant la publication de celui-ci. C’est un principe général. L’amendement est donc satisfait sur ce point. En revanche, toutes les dispositions de ce texte n’appellent pas de décret. La plupart d’entre elles sont d’application directe et il ne faut pas retarder leur mise en œuvre. Comme à chaque fois, nous souhaitons que les décrets soient publiés le plus rapidement possible. L’avis est donc défavorable.
Quant à l’amendement n° 90 – qui vise à différer l’entrée en vigueur du texte –, je tiens à rassurer ses signataires : le vote de cette loi ne modifiera pas les conventions de stage déjà signées. Elle ne s’appliquera qu’aux conventions conclues postérieurement à son entrée en vigueur et, pour certaines dispositions, à la publication des décrets nécessaires. L’objectif n’est pas de porter atteinte aux conventions légalement conclues. En revanche, il est nécessaire que l’examen parlementaire de ce texte s’achève dans les meilleurs délais pour qu’elle soit applicable dès que possible.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Intitulé de la proposition de loi
M. le président. L'amendement n° 69, présenté par Mmes Procaccia, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann et MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet intitulé :
Proposition de loi tendant à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise à supprimer un mot de l’intitulé de la proposition de loi. Selon nous, ce texte tend à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires, mais pas au développement des stages, puisque cela va beaucoup compliquer les choses.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Godefroy, rapporteur. La commission désapprouve complètement la suppression de la mention relative au développement, car nous constatons depuis quelques années un développement très important des stages.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Tout d’abord, je me réjouis que nous terminions l’examen de ce texte ce soir. Le morcellement de sa discussion au fil des trous dans notre ordre du jour a été très désagréable : c’était à se demander si le Gouvernement avait envie que l’on vote ce texte, pourtant présenté par lui comme important !
Le groupe UMP estime qu’il s’agit d’un texte majeur. C’est d’ailleurs notre groupe et les gouvernements précédents qui ont lancé toutes les bases des lois sur les stages. Si, comme vous l’avez souligné dans votre intervention liminaire, madame la secrétaire d’État, ce texte complète les dispositions précédentes, il les complexifie également. On aurait pu se contenter de faire paraître les décrets qui n’avaient pas été publiés. Et, puisque le Gouvernement souhaitait présenter un texte, on aurait pu faire un texte pour sanctionner les entreprises ne respectant pas la réglementation actuelle en matière de stages.
Toutes les auditions que nous avons menées ont montré que ce texte allait faire encore un peu plus peur aux entreprises, en particulier les PME, qui ne sont pas armées. L’une des craintes du groupe UMP est que l’offre de stages aille en diminuant.
Je l’ai dit tout à l’heure, l’article 1er contient, selon moi, un certain nombre d’avancées. J’apprécie que la commission et un certain nombre de collègues de diverses travées aient approuvé plus d’une dizaine de nos amendements.
Pour ma part, je m’abstiendrai donc sur ce texte, en espérant que la commission mixte paritaire maintiendra un certain nombre des avancés du Sénat. Néanmoins, le groupe UMP dans son ensemble est opposé à la plupart des dispositions qu’il contient et votera contre, sauf exception de quelques-uns d’entre nous.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici donc arrivés à l’issue de ces débats. Enfin ! serais-je tenté de dire. Je ne crois trahir le sentiment de personne en disant que l’examen de ce texte a semblé interminable. Pourquoi ? Pour la bonne et simple raison qu’il s’est effectué dans des conditions proprement déplorables.
Comment a-t-on pu « saucissonner » – je ne trouve pas d’autre mot et c’est celui qui convient – à ce point cette proposition de loi ? Qu’on en juge : une discussion à peine entamée le 29 avril, poursuivie le 6 mai, et c’est un miracle si, grâce à la bonne volonté de chacun, nous l’avons terminée aujourd’hui ! Nous avons échappé à la fenêtre du mardi 27 mai, prévue à l’ordre du jour !
MM. Jean-Claude Lenoir et Charles Revet. Eh oui !
Mme Françoise Férat. C’est un message très positif envoyé aux jeunes, vous en conviendrez, signe du grand cas que l’on fait de leur sort et qui prouve à quel point on se soucie de leur insertion dans l’emploi.
S’agissant du fond, notre appréciation n’est guère plus positive. Elle peut être résumée en une formule, celle de notre collègue Jean-Léonce Dupont : le mieux est l’ennemi du bien.
Oui, bien sûr, il faut un cadre minimal aux stages. Et cela, nous l’avons toujours défendu. Le groupe et la famille politique auxquels j’appartiens ont fait partie des plus actifs et des plus mobilisés pour mettre en place un tel cadre.
Je rappelle que cela a été fait sur l’initiative de Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, dans la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.
L’article 9 de cette loi légalisait la convention de stage, mettait en place une gratification pour les stages longs et en limitait la durée maximale.
Par la suite, dans la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche – que vous connaissez parfaitement, madame la secrétaire d’État –, nous avons fait adopter un amendement visant à interdire que les stages puissent servir à pourvoir un emploi permanent dans l’administration publique et les associations, et non pas seulement dans les entreprises.
Ce cadre protège les stagiaires, et c’est bien normal. Mais le présent texte va bien plus loin, bien trop loin. Il crée un carcan rigide, totalement antiéconomique. En effet, il crée des contraintes nouvelles, dont l’une des plus emblématiques est sans doute celle du quota de stagiaires par rapport aux effectifs de l’entreprise, et universalise celles qui existaient déjà.
Conséquence : ce cadre nouveau est totalement inadapté à certains secteurs d’activité et à certains acteurs économiques.
Exemple de secteur d’activité, celui de l’agriculture et de l’enseignement agricole, pour lequel je me suis engagée. Comment voulez-vous que la règle de la gratification et de la durée maximale des stages y soit applicable ? Pour autant, doit-on arrêter de former les jeunes ?
Le résultat risque donc d’être totalement contre-productif puisqu’il conduira les jeunes à ne plus trouver de stages. Pour soi-disant mieux les protéger, on va les priver de cette voie d’insertion privilégiée.
« Privilégiée » et j’ajoute aussi « incontournable » – je l’ai tellement répété – puisque les stages sont aujourd’hui indispensables pour valider nombre de formations.
Le cadre mis en place par le texte est aussi totalement incompatible avec l’activité de certains acteurs économiques tels que les PME et les entreprises naissantes.
Ces entreprises ont besoin de stagiaires de manière plus souple pour survivre, prospérer et donc créer de l’emploi. Parce que le stagiaire d’aujourd’hui est le salarié de demain ! C’est cela que l’on semble oublier.
Encore plus fondamentalement, la philosophie même de ce texte est très problématique puisqu’il tend à faire entrer le stagiaire dans un statut de salariat. C’est très grave.
Parce que c’est oublier que le stagiaire est avant tout un jeune en formation. Parce que c’est aussi aux antipodes du choc de compétitivité et de simplification que nous appelons de nos vœux et qui, malgré tous les pactes de responsabilité, ne semble toujours pas devoir se profiler.
Nous avions déposé un certain nombre d’amendements visant à assouplir le texte ; ils n’ont malheureusement pas été retenus.
Dans ces conditions, vous comprendrez, madame la secrétaire d’État, que la très grande majorité des membres du groupe de l’UDI-UC voteront contre le présent texte.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la construction de l’avenir des jeunes, j’en suis persuadée, est une priorité politique pour nous tous.
Les jeunes vivent aujourd’hui dans un environnement qui n’est pas toujours facile à assumer ; une longue phase de précarité est le lot de beaucoup d’entre eux, y compris nombre de ceux qui ont une formation.
C’est dans ce contexte que les stages ont connu néanmoins ces dernières années un développement exponentiel. Pour de bonnes raisons : la professionnalisation des études, la capacité des entrants sur le marché du travail à être rapidement opérationnels et intégrés dans le monde du travail ; mais aussi pour de mauvaises raisons : l’utilisation de jeunes souvent diplômés et immédiatement exploitables dans un contexte de fort chômage et de difficultés économiques.
Cela a été dit par les intervenants précédents : le sujet du développement des stages, du statut des stagiaires, occupe le législateur depuis de nombreuses années. Je veux rendre particulièrement hommage à notre rapporteur qui, depuis 2006, et au cours de ces débats actuels, a prouvé sa compétence, sa détermination, son engagement.
Je vous remercie également, madame la secrétaire d’État, qui avez été à l’écoute des propositions émanant de nous tous. Nos débats ont été de grande qualité, même s’ils ont été longs.
Avec ce nouveau texte, nous avons encore progressé. Nous protégeons mieux les jeunes avec des dispositions concernant la durée des stages, le renforcement des missions des établissements d’enseignement, la définition plus précise des tuteurs, la limitation du nombre de stagiaires par enseignant et par entreprise, la lutte contre les abus de stage avec intervention de l’inspection du travail.
Nous avons adopté deux amendements très importants sur l’initiative de notre rapporteur Jean-Pierre Godefroy : l’un visant à augmenter de 90 euros la gratification minimale ; l’autre visant à rendre celle-ci obligatoire après un mois de stage pour les stagiaires de l’enseignement supérieur.
Contrairement à certains, le groupe socialiste ne pense pas que les dispositions de ce texte vont tarir l’offre de stages. Nous soutenons que les entreprises, les collectivités, les associations dans leur grande majorité souhaitent participer à la construction de l’avenir des jeunes. Si la majorité des organismes les accueillent bien et avec plaisir, il est important de définir des règles pour éviter les dérives. Les jeunes, dès lors qu’ils sont respectés, seront d’autant plus motivés.
Ce texte est un signal fort pour l’intégration de qualité dans le monde du travail.
Permettez-moi d’évoquer aussi la qualité de nos travaux concertés relatifs aux stagiaires des maisons familiales rurales. Nous avons tous évoqué ce sujet. Je remercie le Gouvernement de s’être engagé à ce qu’un futur décret permette d’intégrer de façon satisfaisante ces stagiaires. Les MFR sont un lieu d’enseignement tout à fait intéressant.
L’Assemblée nationale a accompli une partie du travail ; nous avons, je le pense, encore amélioré la rédaction de cette proposition de loi, au terme de débats très constructifs. Le groupe socialiste votera donc ce texte.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Notre collègue Catherine Procaccia a indiqué à l’instant quelle était la position de notre groupe ; je fais partie de la très grande majorité de ses membres qui ne voteront pas ce texte.
En effet, je suis inquiet. Je suis inquiet des conséquences de certaines de ses dispositions, qui alourdissent les procédures. L’objectif, l’obligation pour des jeunes, c’est de faire des stages. Or pratiquement sur toutes les travées, nous avons dit que nous étions souvent sollicités par des jeunes aux abois, qui ne trouvent pas de stage. Leur diplôme est en cause. Très franchement, je crains que l’alourdissement des conditions dans lesquelles les entreprises peuvent accueillir ces jeunes ne fassent reculer un certain nombre d’entre elles, et ce au détriment des jeunes, qui doivent être notre objectif.
Je souhaite que nous nous trompions, mais je crains que ce ne soit le cas.
Je le répète, c’est pour cette raison que, comme la majorité des membres de mon groupe, je voterai contre ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux tout d’abord remercier notre rapporteur, Jean-Pierre Godefroy, qui, lors de nos débats tant en commission qu’en séance publique, s’est montré particulièrement attentif. Il est demeuré fidèle à la proposition de loi qu’il avait déposée en 2006. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous nous sommes retrouvés sur plusieurs points, même si nous ne sommes pas parvenus à y faire adhérer l’ensemble des membres de cet hémicycle.
Je commencerai par évoquer les aspects de ce texte que nous trouvons encore un peu trop frileux, un peu trop négatifs. Je rappelle que le candidat François Hollande s’était prononcé sur l’encadrement des stagiaires et avait notamment promis une allocation destinée aux jeunes. Celle-ci se fait attendre et, à mon avis, ne verra malheureusement pas le jour. Aussi, nous aurions pu faire preuve d’un peu plus d’audace pour que les stagiaires soient encore mieux encadrés.
Autre point négatif : je regrette qu’une partie de la gauche ait voté avec la droite un amendement visant à supprimer l’alinéa 40 de l’article 1er, alinéa dont je rappelle les termes : « Le temps de présence du stagiaire fixé par la convention de stage ne peut excéder la durée légale hebdomadaire de travail fixée par l’article L. 3121-10 du code du travail. » C’est très grave, car cela signifie que l’on fait exploser les 35 heures et que l’on ouvre la porte à un temps de travail d’une durée incompatible, du point de vue de mon groupe, avec un statut d’élève ou d’étudiant digne du XXIe siècle. J’espère que la commission mixte paritaire reviendra sur cette disposition.
Heureusement, cette proposition de loi contient des mesures qui, en tout cas dans leur esprit, permettront de réduire considérablement les abus que pouvaient subir les stagiaires. À cet égard, nous nous réjouissons particulièrement que soit prévu un encadrement de ceux-ci, notamment à l’université, avec une limitation du nombre d’étudiants. C’est tout à fait positif, car cet encadrement sera d’une bien meilleure qualité.
Nous nous réjouissons également qu’un certain nombre de nos amendements s’inscrivant dans la philosophie de cette proposition de loi aient été adoptés. Je pense par exemple à celui qui visait à étendre à l’ensemble des stagiaires, même à ceux qui ne bénéficient pas de gratification, l’accès à la restauration scolaire, aux titres-restaurant et à la prise en charge des titres de transport. Je pense également à la capacité offerte aux stagiaires dans l’impossibilité de poursuivre leur stage de faire valider celui-ci par l’établissement d’accueil.
Tout cela est intéressant, positif, et je regrette que certains dans cet hémicycle aient voulu faire peur en avançant que ces mesures positives, adoptées dans l’intérêt des stagiaires, allaient mettre en péril l’avenir des entreprises.