M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 160 est présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 452 rectifié est présenté par Mmes Jouanno et N. Goulet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l'amendement n° 160.
M. Joël Labbé. Je ne peux pas être d’accord avec le rapporteur lorsqu’il dit qu’il faut choisir entre le pastoralisme et le loup ! Nous défendons la mise en place d’un équilibre, et par suite d’une régulation et d’un véritable suivi.
Dans le passé, la présence humaine était beaucoup plus importante dans les zones de pastoralisme. Pour des raisons économiques, de compétitivité, il y a de moins en moins de bergers. Or l’équilibre tient aussi à une présence humaine suffisante.
Certes, l’augmentation du nombre de loups pose des problèmes notables, parfois dramatiques, aux éleveurs, et jamais une indemnisation, aussi forte soit-elle, ne compensera la perte d’un animal : nous sommes complètement d’accord sur ce point.
Pour autant, autoriser les chasseurs et les éleveurs détenteurs d’un permis de chasse à opérer des tirs de prélèvement ne nous semble ni répondre au problème ni être souhaitable.
L’État doit s’assurer du respect de la convention de Berne et de la directive habitats, mais aussi assumer la responsabilité de la régulation des meutes, le suivi de celles-ci, ainsi que protéger les éleveurs et le pastoralisme. Il ne peut se défausser de toutes ses responsabilités sur les individus ; il lui revient de définir, en lien avec les parties prenantes, dont les officiers de louveterie, et dans le respect du plan loup, les aménagements à opérer, et d’assurer le suivi régulier de l’évolution des meutes.
M. le président. L'amendement n° 452 rectifié n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 160 ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. M. le rapporteur nous dit que cet article est soutenu par l’ensemble de la commission des affaires économiques…
M. Didier Guillaume, rapporteur. La quasi-unanimité !
Mme Marie-Christine Blandin. Cependant, au sein de celle-ci ne siègent que des sénateurs intéressés avant tout par la dimension économique des problèmes. Cette orientation spécifique fait que la position de la commission des affaires économiques ne reflète pas forcément l’opinion des sénateurs membres de la commission du développement durable ou de la commission de la culture.
Je suis d’accord, il est regrettable que des pertes d’animaux surviennent, mais il ne faudrait tout de même pas imputer au loup toutes les difficultés de l’élevage ovin. Pensons aux importations massives de gigots de mouton de Nouvelle-Zélande consécutives à l’affaire Greenpeace, dont les éleveurs ovins français ont fait les frais…
En outre, en matière de mortalité, si 5 000 animaux seraient tués chaque année par des loups, quelque 46 000 ovins disparaissent pour cause de maladie ou du fait d’autres prédateurs, tels que les chiens.
Enfin, l’indemnisation des pertes causées par le loup représente 1 centime par Français et par an… Est-ce là un coût excessif ?
M. Gérard César. Ce n’est pas le problème !
Mme Marie-Christine Blandin. Les subventions aux céréaliers coûtent 170 euros par an et par habitant !
Nous contestons le dispositif de l’article 18 bis, car il ne prend en compte qu’une seule dimension, celle de l’élevage, et ne prévoit qu’un seul outil, la gâchette !
Nous devons et pouvons gérer la cohabitation entre le pastoralisme et le loup, mais cette dernière doit être réinventée. L’Italie a su le faire. Pourquoi la situation est-elle bloquée en France ? Parce que vous avez fondé le développement de l’élevage ovin sur cinquante ans d’éradication du loup, avec le recours à l’insémination artificielle et des troupeaux où tous les animaux ont le même âge. Il faut s’adapter et inventer d’autres modes d’élevage, afin que tout le monde puisse cohabiter.
D’ailleurs, en raison du changement climatique, il y aura plus d’herbe dans les estives, dans les zones intermédiaires et dans les vallées, mais moins de fourrage, et les céréales coûteront plus cher. La profession devra, par conséquent, muter : la cohabitation avec le loup n’est un aspect de cette évolution.
Pour conclure, je dirai que le loup n’est vraiment pas malin : il s’installe et prospère dans les départements concernés par la prochaine élection sénatoriale ! (Sourires.) Les écologistes, quant à eux, s’inscrivent dans la droite ligne de la convention de Berne ; ils préfèrent la science, le savoir et le dialogue aux fusils !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. J’approuve les propos de Didier Guillaume. On ne peut tourner cette affaire en dérision, madame Blandin, même si vous avez raison de souligner que la situation difficile de l’agropastoralisme ne tient pas qu’à la présence du loup.
Cela étant, là où 800 mètres de barbelé suffisaient, il en faut maintenant 1 500, là où il fallait deux patous, il en faut quatre. Cela s’ajoute au fait que, quand l’éleveur descend le samedi au bourg, il trouve dans les bacs des supermarchés de l’épaule d’agneau vendue en dessous de son prix de revient !
Il faut souligner que l’agropastoralisme assure l’entretien de la basse et de la moyenne montagne, ce qui est loin d’être négligeable. Les éleveurs méritent donc d’être traités avec un minimum d’égards ! Il importe à mon sens de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour améliorer des conditions de travail qui sont de moins en moins acceptables. Je n’en rajouterai pas en parlant de l’ours, mais la problématique est exactement la même en termes de dédommagement. Outre les pertes directes liées aux attaques de loups ou d’autres animaux sauvages, il faut aussi prendre en compte les avortements consécutifs à celles-ci.
Le ministre a expliqué à juste titre que, depuis l’époque de la négociation de la convention de Berne, la population de loups avait considérablement augmenté et qu’il convenait d’actualiser ce texte. Je suis tenté de dire : restons-en là !
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Tous les arguments peuvent être entendus, madame Blandin, mais le loup est présent depuis des années dans les départements dont les sénateurs sont renouvelables et il le sera encore l’année prochaine…
Plus sérieusement, il faut prendre la mesure de la détresse des éleveurs ovins. Certains font des tentatives de suicide ou renoncent à leur activité. Les friches s’’étendent alors.
M. Jean-Jacques Mirassou. Eh oui !
M. Gérard César. Voilà !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Il faut savoir ce que l’on veut ! La cohabitation à la française, ça ne fonctionne pas.
Mme Marie-Christine Blandin. Et en Italie ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Nous ne sommes pas en Italie, où les troupeaux comptent de 4 000 à 5 000 bêtes ! Chez nous, l’éleveur ovin est un petit éleveur. Je vous invite à venir cet été dans un beau département concerné par le renouvellement sénatorial : vous constaterez vous-même la situation.
Un parlementaire qui connaît très bien les questions relatives à l’élevage veut renégocier la directive habitats et la convention de Berne : je veux parler de José Bové.
Mme Marie-Christine Blandin. C’est un traître !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Il a déjà lancé cette discussion au Parlement européen. Ce n’est donc pas une position de partisan de la gâchette ou de cow-boy. La question est très sérieuse, elle ne doit pas être traitée par la dérision !
Au rythme où vont les choses, il n’y aura bientôt plus de pastoralisme et d’élevage ovin dans nos territoires. Par conséquent, si l’on est favorable à la biodiversité, il faut repousser les loups hors des zones d’élevage, car la cohabitation ne fonctionne pas ! C’est aussi simple que cela.
Évitons les discours extrémistes sur des sujets aussi graves. Pour être moi-même fils d’éleveur ovin, je peux vous dire que cette profession est dans une détresse terrible. Ce qui se passe aujourd'hui n’est pas acceptable : je refuse de voir pleurer des éleveurs, de voir des familles se déchirer. Ma vision des choses n’est nullement intégriste ou manichéenne : je défends la biodiversité, mais celle-ci s’étend aussi à l’homme et à l’élevage ! (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe socialiste et de l'UMP.)
M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 853, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 427-6 du code de l'environnement est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les territoires où l'importance et la récurrence des dommages à l'élevage le justifient, le préfet peut autoriser la destruction de spécimens de loups lors de ces chasses et battues, dans le respect des textes fixant les conditions et limites dans lesquelles il peut être dérogé aux mesures de protection de l'espèce. »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est un débat extrêmement sensible. En tant que ministre de l’agriculture, je rencontre beaucoup d’éleveurs, et je connais ces situations de détresse, de dépression, cette incapacité à se projeter dans l’avenir.
La semaine dernière, vous m’avez demandé s’il était envisageable de renégocier la convention de Berne et, surtout, la directive habitats. Ce sujet n’a jamais été abordé à l’échelon européen. La Pologne, qui a été un allié pour la France dans toutes les discussions, défend ses loups. Je ne parle même pas des pays du Nord, qui ne seront jamais favorables à une renégociation de la convention de Berne ! En Espagne, la situation est plus compliquée : chasser le loup est possible en Galice, mais ailleurs il s’agit d’une espèce strictement protégée et la convention de Berne s’applique. En Italie, il n’y a pas de plan loup et l’organisation pastorale est quelque peu différente de la nôtre.
Bref, il ne me paraît pas évident d’obtenir une majorité, à l’échelon européen, pour renégocier la convention de Berne ou la directive habitats. Ce point mérite néanmoins d’être étudié plus longuement ; en particulier, je prendrai l’attache de mon homologue italien, qui vient d’être nommé.
En tout état de cause, il nous appartient de régler nous-mêmes le problème qui se pose en France. Voilà où nous en sommes ! La mise en œuvre des tirs de prélèvement prévus par le plan loup s’est heurtée à des difficultés. En particulier, les autorisations délivrées par les préfets pour chasser le loup dans le cadre de battues visant d’autres animaux ont été cassées à plusieurs reprises. L’amendement du Gouvernement tend donc à inscrire dans la loi l’autorisation de procéder à des tirs de prélèvement dans ce contexte, lorsque les attaques de loups sont récurrentes.
M. Jean-Jacques Mirassou. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 342 rectifié bis, présenté par M. César, Mmes Masson-Maret et Lamure, MM. Pointereau, Sido, Hérisson, Houel, Billard, Hyest, Couderc et Milon, Mme Mélot et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après l’article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime, il est rétabli un article L. 113-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 113-4. – Dans le cadre de la mise en valeur et de la pérennité de l’espace pastoral, des opérations de tirs de prélèvement de loup et de tirs de défense peuvent être organisées par arrêté préfectoral durant toute l’année. En cas de dommage récurrent et grave dû aux attaques des loups, le préfet définit des seuils de destruction plus élevés en fonction de la vulnérabilité des milieux concernés. »
La parole est à M. Gérard César.
M. Gérard César. Je rends hommage au rapporteur, qui, en commission, a abordé longuement le problème du loup.
La difficulté aujourd'hui, le ministre l’a souligné, c’est qu’il faudra des mois, sinon des années, pour peut-être obtenir un réaménagement de la convention de Berne. En attendant, quid des recours devant le tribunal administratif contre les arrêtés préfectoraux autorisant des tirs de prélèvement ? Les éleveurs se sentent complètement démunis lorsque de tels arrêtés sont annulés.
M. le président. L'amendement n° 525 rectifié bis, présenté par MM. Amoudry, Lasserre et Dubois, Mme N. Goulet et MM. Guerriau, Tandonnet et Détraigne, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’article L. 113-3 du code rural et de la pêche maritime, il est rétabli un article L. 113-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 113-4. – Dans le cadre de la mise en valeur et de la pérennité de l’espace pastoral, des opérations de tirs de prélèvement de loup et de tirs de défense renforcée peuvent être organisées par arrêté préfectoral durant toute l’année. En cas de dommage récurrent et grave dû aux attaques des loups, le préfet définit des seuils de prélèvement plus élevés en fonction de la vulnérabilité des milieux concernés. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 15 rectifié bis, présenté par Mme Masson-Maret, MM. César et Huré, Mmes Procaccia et Sittler, MM. Milon, Pierre, Pointereau, Cardoux et B. Fournier, Mme Duchêne et MM. Beaumont, Doligé, Bernard-Reymond, Revet, Dulait et G. Bailly, est ainsi libellé :
Avant l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après la deuxième phrase de l’article L. 427-6 du code de l’environnement, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ces chasses et battues peuvent également porter sur les loups en cas d’attaques sur des troupeaux ou des êtres humains. »
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Cet amendement, dont le premier signataire est Mme Masson-Maret, vise à élargir aux loups le champ des chasses et battues administratives lorsqu’une attaque de loups contre des troupeaux ou des êtres humains a été constatée. Dans de tels cas, une réaction extrêmement rapide se justifie pleinement. Il ne s’agit bien sûr pas, pour nous, de mettre troupeaux et êtres humains sur le même plan.
M. le président. L'amendement n° 830, présenté par M. Guillaume, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
En ce cas, le préfet délivre sans délai à l'éleveur concerné une autorisation de tir de prélèvement du loup valable pour une durée de six mois.
La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. L’amendement a été défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 381 rectifié bis, présenté par MM. Bertrand, Mézard, Alfonsi, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L’abattage de loups est autorisé dans des zones de protection renforcée délimitées chaque année par arrêté préfectoral, indépendamment du prélèvement défini au niveau national. Un plafond de destruction spécifique est déterminé pour chaque zone.
Les zones de protection renforcée regroupent les communes dans lesquelles des dommages importants sont constatés, causant une perturbation de grande ampleur aux activités pastorales en dépit des mesures de protection susceptibles d’assurer un équilibre entre les intérêts économiques et sociaux et la protection de l’environnement.
Les zones de protection renforcée contre le loup ne peuvent nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, de cette espèce sur le territoire national.
Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de ce paragraphe.
La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Nous avons déjà beaucoup discuté du problème de la prolifération des loups, notamment au cours de l’examen de l’article 1er. À cette occasion, mes collègues ont rappelé que celle-ci nuit aux activités pastorales. En effet, en 2012, on a encore enregistré plus de 400 attaques, qui ont causé de graves préjudices pour l’élevage ovin ou caprin.
Personne ne méconnaît le caractère protégé de cette espèce à l’échelon européen. Sans vouloir contourner ce principe, il est nécessaire de l’adapter aux réalités locales. Cela suppose la mise en place de dispositifs suffisamment subtils pour lutter contre cette prolifération sans remettre en cause ladite réglementation européenne.
À l’occasion de l’examen de ce projet de loi, les travaux du Sénat ont déjà permis deux avancées.
En premier lieu, cet article 18 bis, introduit par la commission, autorise les tirs de prélèvement de loup en cas d’attaque avérée. Outre sa pertinence sur le fond, il a le mérite d’ouvrir le débat.
En second lieu, l’adoption, à l’article 1er, de l’amendement de notre collègue Amoudry affirme notamment la nécessité de préserver la friche de la prédation.
La grande majorité des membres du RDSE, en particulier Alain Bertrand, proposent, au travers de cet amendement, d’adopter une autre mesure, que je qualifierai de plus radicale : il s’agit de créer des zones d’exclusion pour le loup, regroupant les communes dans lesquelles les activités pastorales sont gravement perturbées. Il n’aura échappé à personne ici que c’est là l’objet d’une proposition de loi d’Alain Bertrand, sénateur de la Lozère, que le Sénat a votée au début de l’année dernière.
L’adoption de cet amendement serait un signal fort adressé à nos collègues députés afin de les sensibiliser à cette question et d’accélérer l’examen par l’Assemblée nationale de notre proposition de loi.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 253 rectifié ter est présenté par MM. Adnot et Deneux.
L'amendement n° 343 rectifié ter est présenté par M. César, Mmes Masson-Maret et Lamure, MM. Pointereau, Sido, Hérisson, Houel, Billard, Carle, Hyest, Couderc et Milon, Mme Mélot, MM. Delattre, Huré, Laménie, Beaumont et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 450 rectifié est présenté par M. Bernard-Reymond.
L'amendement n° 497 rectifié est présenté par MM. J. Boyer et Roche.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le Gouvernement s’engage, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, à demander le déclassement du loup en tant qu’espèce protégée par la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe adoptée à Berne le 19 septembre 1979 ainsi que par la directive n° 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et la flore sauvages afin de parvenir à une gestion de ces prédateurs qui garantisse la pérennité de l’élevage en plein air sur tout le territoire.
L’amendement n° 253 rectifié ter n'est pas soutenu.
La parole est à M. Gérard César, pour présenter l'amendement n° 343 rectifié ter.
M. Gérard César. Notre collègue Hélène Masson-Maret aurait aimé prendre part à ce débat, car la présence du loup dans son département des Alpes-Maritimes suscite de graves problèmes.
M. le ministre s’est engagé à obtenir la renégociation de la convention de Berne à l’échelon européen. Sa mise à jour est une nécessité : je rappelle qu’elle date de 1979.
M. le président. Les amendements nos 450 rectifié et 497 rectifié ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 853, 342 rectifié bis, 15 rectifié bis, 381 rectifié bis et 343 rectifié ter ?
M. Didier Guillaume, rapporteur. Monsieur le ministre, vous m’en voyez navré, mais la commission émet un avis défavorable sur l’amendement du Gouvernement, pour deux raisons.
D’une part, cet amendement fixe des conditions. Or soit le loup attaque le troupeau, soit il ne l’attaque pas : on ne peut pas poser de conditions.
D’autre part, l’amendement ouvre au préfet la possibilité d’autoriser la destruction de loups. Or si un troupeau subit une attaque, le préfet doit autoriser sans délai des tirs de prélèvement.
Certes, je comprends bien que vous êtes engagé dans des discussions à l’échelon interministériel, mais la commission ne peut qu’émettre un avis défavorable.
L’amendement n° 342 rectifié bis est pleinement satisfait. Il en va de même pour l’amendement n° 15 rectifié bis.
S’agissant de l’amendement n° 381 rectifié bis, contrairement à ce que j’ai indiqué tout à l’heure, je suis obligé d’émettre un avis favorable, dans la mesure où la proposition de loi de M. Bertrand visant à créer des zones d’exclusion pour les loups a été votée par le Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’ensemble des amendements autres que celui qu’il a présenté ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement de la commission. Je ne puis que respecter le droit en vigueur, faute d’avoir eu le temps de renégocier la convention de Berne et la directive habitats : il a fallu négocier la nouvelle politique agricole commune, prendre les mesures nécessaires pour lutter contre la crise, élaborer le présent projet de loi, travailler sur le problème du foncier, etc. J’ai traité le sujet du loup dès que j’ai pris mes fonctions, en lien avec la ministre de l’environnement, au travers du plan loup. Je le rappelle, si les chasseurs sont aujourd’hui autorisés à procéder à des tirs de prélèvement, c’est à la demande du ministre de l’agriculture.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Nous vous en avons remercié, monsieur le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Il n’est pas possible d’inscrire tel quel dans la loi le dispositif de l’amendement de la commission : il est nécessaire de préciser que, avant tout tir, doit être mise en œuvre une protection graduée des troupeaux telle que prévue par les textes européens. Au regard de la convention de Berne, les prélèvements de loups ne doivent pas menacer la conservation de l’espèce.
En l’absence de ces réserves, la proposition de la commission contrevient au droit en vigueur. C’est pourquoi j’ai déposé, au nom du Gouvernement, un amendement visant à préciser les conditions dans lesquelles il peut être procédé à des prélèvements de loups dans le cadre de chasses et battues, sachant que les autorisations d’opérer de tels prélèvements ont souvent été remises en cause par les tribunaux administratifs. Son adoption permettrait d’avancer dans le sens que vous souhaitez, c’est-à-dire de donner la possibilité de procéder à des tirs de loups plus rapidement et plus efficacement lorsque des attaques sont survenues.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement de la commission.
S’agissant des autres amendements, le Gouvernement y est également défavorable, puisque tous tendent à remettre en cause le cadre général du dispositif.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Je tiens à saluer la détermination manifestée par M. le rapporteur pour parvenir au consensus que nous avons élaboré en commission.
C’est là un sujet difficile. Ce matin même, j’assistais, à la préfecture du Jura, à une réunion du comité départemental de suivi des grands prédateurs, au côté de représentants des organismes de protection de la nature et de la faune, des fédérations de chasse, de la gendarmerie. Nous avons fait le point sur la prévention des attaques de loup et de lynx, celui-ci étant bien présent dans mon département. Cette réunion a permis de recenser les difficultés et de relativiser l’action des patous : les patous, c’est pas tout ! De même, les barrières ne sont pas toujours très efficaces. Même si la production ovine est assez peu développée dans mon département – on y compte environ deux cents élevages –, il est bien difficile de faire de la prévention en tout lieu, d’autant que l’on ignore où vont se produire les attaques nocturnes de loup ou de lynx.
Nous nous sommes tous accordés sur la nécessité de trouver un équilibre. Comment y parvenir ? Nous pensons que la situation actuelle est déséquilibrée parce que la population de loups a progressé très rapidement ces dernières années, de l’ordre de 27 % à en croire les experts.
Il est exact que des plans ont été mis en place afin de réduire le nombre de ces animaux. Entre 2005 et 2013, soixante-dix-neuf autorisations de prélèvement ont été délivrées, mais dix-huit prélèvements seulement ont été effectués. Les loups ainsi épargnés continuent à courir et à faire des petits…
Dans ces conditions, on ne peut que souscrire à l’amendement de la commission. Monsieur le ministre, mes collègues et moi-même sommes conscients des difficultés que vous rencontrez pour vous faire entendre des autres pays européens. Nous ne vous faisons aucun reproche à cet égard, mais je trouve que votre amendement ne va pas assez loin. Il faut avancer, car, dans certaines zones de montagne, la production ovine a complètement disparu. C’est pourquoi je voterai l’amendement de la commission, et pas celui du Gouvernement.
Je profite de cette occasion pour évoquer le lynx. Dans l’Est, en particulier dans le Jura, on a dénombré 86 attaques de lynx l’année dernière, qui ont causé la mort de 132 animaux. Cet animal se déplace très rapidement et sur de longues distances, puisque des études ont montré que certains spécimens avaient migré du Jura vers l’Isère, parcourant plus de 200 kilomètres. Il faut mener une réflexion sur ce problème, même s’il est moins aigu que celui du loup.
Enfin, il a été question, voilà quelques instants, du bien-être animal, sujet auquel je suis très sensible. En tant qu’éleveur, je ne peux supporter de voir souffrir des chèvres, des moutons agonisant, déchiquetés par les loups. Je ne comprends pas que l’on n’ait pas autant de compassion pour les 6 147animaux tués en 2013, pour les dizaines de milliers de moutons dévorés depuis toutes ces années, que pour les loups, présents en trop grand nombre. Je voudrais que l’on parvienne à un équilibre, en conservant bien sûr une population de loups et de lynx, mais moins nombreuse.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 342 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)