M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. J’évoquerai les échanges que j’ai eus avec différents partenaires sociaux, qu’il s'agisse de membres d'organisations patronales ou d'organisations salariées. Je l'ai dit, les cinq confédérations de salariés sont favorables à ce droit d'information : ça compte ! (M. René-Paul Savary opine.) Et je ne dénombre que les organisations représentatives de salariés ; je vous épargne la liste des autres organisations : elles y sont toutes favorables, et ça compte.

Au cours des discussions avec les organisations patronales, sont apparues quelques différences d'approche que je me permets d'indiquer. Toutes les organisations patronales – pour l'essentiel les organisations patronales représentatives que sont l'UPA, la CGPME et le MEDEF – m'ont écrit pour me faire part de leur inquiétude, en invoquant des motifs assez différents.

En réalité, après discussion et après que nous avons avancé dans ce texte, je constate que nous avons rassuré l'UPA à bien des égards, notamment sur le fait que lorsqu’il existe des ayants droit familiaux, que leur succession s'organise dans le cadre d'un fonds de commerce familial, le droit d'information des salariés est alors écarté. Aujourd'hui, nous n'observons pas un enthousiasme de la part de l'UPA sur la mesure – je vous mentirais si je vous disais le contraire –, mais, je le crois, beaucoup des inquiétudes qu’elle a formulées dans son courrier ont pu être levées. J’en veux pour preuve que le président de l'UPA, que j’ai croisé il y a quelques jours, ne m’a pas manifesté d'opposition farouche sur ce texte.

J’ai essayé d'écouter les remarques qui ont été formulées. Je n’ai jamais pensé que ces remarques, en particulier celles de la CGPME, tombaient de je ne sais où, étaient déconnectées de la réalité. Incontestablement, des chefs d'entreprise s'inquiètent aujourd'hui des conditions de transmission et nous avons essayé d'en tenir compte.

Je veux aussi vous faire percevoir une certaine réalité. Je reprends l'exemple de la PME de menuiserie dans laquelle le patron travaille six jours sur sept pour faire ses 3 %. Honnêtement, cette entreprise-là, pour le patron, c'est une forme de servitude et d'accaparement qui ne laisse guère de temps au loisir. C'est une réalité que vous constatez : la vie de ces patrons de PME n’est pas la vie dorée des quelques grands patrons d'entreprises cotées qui viennent aujourd'hui expliquer que la transmission dans les entreprises de moins de 50 salariés, ça n’est pas bien, alors qu’ils ne connaissent pas plus la situation que bon nombre de ceux qui en parlent beaucoup !

La réalité de la vie d'un patron de PME, dans ces territoires-là, c'est une vie qui n’est pas facile. Lors de la transmission, qu’est-ce qui intéressera le maire, la chambre de commerce, les clients de la PME, ses salariés ? C'est que l'activité se maintienne, alors que les candidats ne sont pas forcément nombreux à vouloir reprendre le flambeau tant on sait que la gestion de nombre de ces entreprises en période de crise repose sur un investissement et une implication qui sont extrêmement lourds. Il n’y a pas toujours les candidats pour ce type de job.

Notre droit d'information, madame la sénatrice Nathalie Goulet, s'apparente effectivement à un appel à candidature : qui mieux que ceux qui jouent leur emploi, donc leur vie, dans le maintien de l'entreprise, sont le plus susceptibles de la reprendre ? Personne, souvent. Évidemment, il faut être formé, on ne passe pas, du jour au lendemain, de vingt années de gestion d'une imprimante offset à la gestion d'une entreprise… Le collectif des salariés reste souvent le plus intéressé au maintien de l'activité.

C'est à partir de ce raisonnement que nous avons travaillé. J’entends les remarques qui peuvent être faites. Pour les questions de discrétion et de confidentialité, on s'est aligné sur le droit du travail existant : les obligations des salariés détenteurs de ce droit d'information seront les même que celles qui sont imposées aux comités d'entreprise, les CE.

Nous avons donc essayé de construire une stratégie pour maintenir l'activité économique. Après, on trouvera toujours toutes sortes d'arguments pour soutenir qu’un droit nouveau est un facteur de complexification. Mais avec un tel raisonnement, il n’y aurait pas de CE ni de délégués du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés ! C'est la fameuse métaphore du renard libre dans un poulailler où les poules sont également libres, ce qui n’empêche pas le renard de manger les poules ! Nous voulons, au contraire, construire des droits.

J’ai été sensible à l'argument de Mme Demontès, qui était frappé du sceau du bon sens. L'alliance du capital et du travail, c'est le général de Gaulle, qui a construit un discours à partir de cette idée. Avec ce dispositif, nous ne nous posons pas en héritiers de Charles de Gaulle. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) En revanche, vous gagneriez à vous rappeler un peu plus de cet héritage ! (Mêmes mouvements.) On peut tous évoquer quelques figures emblématiques, et je n’ai pas eu l'audace de citer ici Jaurès et Blum ! Je parle simplement du général de Gaulle pour vous dire que sur cette question de l'alliance du capital et du travail le raisonnement était le suivant : sur le terrain, dans l'entreprise, l'alliance des forces productives, c’est-à-dire les salariés et les entrepreneurs, c'est la meilleure manière de maintenir l'emploi.

Nous essayons de concilier l'intérêt du chef d'entreprise qui vend – faire une plus-value – avec celui du salarié – maintenir son emploi – par le rachat de l'entreprise dans laquelle il travaille. C'est le sens de cette mesure qui, je le crois, est bonne pour l'économie (M. Claude Dilain opine.), bonne pour l'emploi et bonne pour le droit du travail ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Gérard Le Cam et Stéphane Mazars applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Notre groupe, unanimement, ne votera pas ces amendements de suppression. Comme vous tous, nous avons travaillé sur ce texte. Nous sommes très attachés à des principes : le droit de propriété, la liberté individuelle, mais aussi l'intérêt général et le service au public.

Je dirai que notre tradition est d'essayer de trouver un équilibre entre ces grands principes qui gouvernent notre République. Je ne me référerai pas au créateur de la VRépublique, ce n’est pas notre histoire… (Sourires.)

Dans ce texte, ce qui est révélateur, c'est ce qui persiste d'une caractéristique française : le climat de méfiance entre les chefs d'entreprise et les salariés – je n’en attribue pas la responsabilité exclusivement aux uns ou aux autres.

Pour en revenir aux propos de notre collègue Marie-Noëlle Lienemann sur ce qui se passe en Allemagne – je ne dis pas qu’il faut toujours se référer à l'exemple allemand –, nous avons un réel problème. Ces relations se vivent comme un combat. S'il est normal que les salariés défendent leurs intérêts et qu’il en aille de même des chefs d'entreprise, il faut sortir d'une certaine guerre de tranchée à laquelle tout le monde concourt depuis trop longtemps.

Nous ne sommes pas de ceux – en tout cas, la majorité de mon groupe – qui prônent un droit de préférence. Il aurait des conséquences néfastes sur le plan économique et présenterait des inconvénients évidents sur le plan constitutionnel. En revanche, je considère qu’il est normal d'informer les salariés.

Dans le cadre des dispositions de l'article L. 2323–19 du code du travail, qui concernent un certain nombre d'entreprises importantes, l'information et la consultation des comités d'entreprise sont déjà prévues ! Je rappelle à nos collègues que, lorsqu'il y a une cession de fonds de commerce, une information paraît dans les journaux d'annonces légales pour que les créanciers puissent éventuellement réagir.

Pourquoi les salariés ne bénéficieraient-ils pas de l’information et ne seraient-ils pas informés que le chef d’entreprise souhaite vendre ? Il n’y aurait là rien d’anormal, et cela ne mettrait pas en danger les entreprises. En effet, soit les salariés disposent déjà d’informations parce que le chef d’entreprise en donne, soit on leur cache la situation, pour des motifs qui ne sont pas toujours très louables.

D’ailleurs, ayant exercé la profession d’avocat pendant trente-huit ans, j’ai plaidé pour des salariés et des chefs d’entreprise. Et j’ai souvenance d’avoir vu des chefs d’entreprise informer les salariés une fois la vente réalisée. Cela pouvait aboutir dans certains cas à des catastrophes économiques. Tout n’est donc pas blanc d’un côté et noir de l’autre.

L’intention ne peut suffire ; il faut sécuriser l’information donnée aux salariés et, par ailleurs, aider ces derniers à reprendre l’entreprise. Voilà la vraie difficulté. Aujourd’hui, avec les bouleversements des moyens de communication que nous connaissons, il devient difficile de continuer à refuser de transmettre l’information de mise en vente.

Nous devons avancer calmement, en respectant les intérêts des uns et des autres. Ce sera d’ailleurs l’objet de l’amendement que je soutiendrai tout à l’heure. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 rectifié et 165.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 44 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 345
Pour l’adoption 167
Contre 178

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de 37 amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, P. Leroy, César et Bécot, Mme Cayeux, M. Mayet, Mme Lamure et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de commerce est complété par deux sections ainsi rédigées :

« Section 3

« De l'instauration d'un délai permettant aux salariés de présenter une offre en cas de cessation d’activité dans les entreprises de moins de cinquante salariés

« Art. L. 141-23. - Dans les entreprises qui n’ont pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail, la réalisation des formalités de radiation du registre du commerce et des sociétés ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification par l’employeur de son intention de mettre un terme à l’activité de l’entreprise ou de la société, afin de permettre à un ou plusieurs salariés de l’entreprise de présenter une offre pour la reprise de l’entreprise.

« La réalisation des formalités de radiation peut intervenir avant l’expiration du délai de deux mois dès lors que les salariés ont informé le cédant de leur décision unanime de ne pas présenter d’offre.

« Art. L. 141-24. - L’employeur porte sans délai à la connaissance des salariés la notification prévue au premier alinéa de l’article L. 141-23, en les informant qu’ils peuvent présenter une offre de reprise de l’entreprise.

« L’information des salariés peut être effectuée selon tout moyen, notamment par voie d’affichage sur le lieu de travail.

« Les salariés sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations communiquées en application des dispositions qui précèdent.

« Art. L. 141-25. - La cessation d’activité est de nouveau soumise aux dispositions des articles L. 141-23 et L. 141-24 lorsqu’elle intervient plus de deux ans après l’expiration du délai prévu à l’article L. 141-23.

« Art. L. 141-26. - Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux sociétés faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire régie par les dispositions du livre VI.

« Section 4

« De l’information anticipée des salariés leur permettant de présenter une offre de reprise en cas de cessation d’activité dans les entreprises employant de cinquante à deux cent quarante-neuf salariés

« Art. L. 141-27. - En cas de cessation d’activité, il est instauré une obligation d’information anticipée permettant à un ou plusieurs salariés de l’entreprise ou de la société de présenter une offre de reprise.

« En même temps qu’il procède, en application des dispositions de l’article L. 2323-19 du code du travail, à l’information et à la consultation du comité d’entreprise, l’employeur porte à la connaissance des salariés son intention de mettre un terme à l’activité de l’entreprise ou de la société et leur indique qu’ils peuvent présenter au cédant une offre de reprise.

« Art. L. 141-28. - L’information des salariés peut être effectuée selon tout moyen, notamment par voie d’affichage sur le lieu de travail.

« Les salariés sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations communiquées en application des dispositions qui précèdent.

« Art. L. 141-29. - La cessation d’activité est de nouveau soumise aux dispositions des articles L. 141-27 et L. 141-28 lorsqu’elle intervient plus de deux ans après l’expiration du délai prévu à l’article L. 141-27.

« Si pendant cette période de deux ans le comité d’entreprise est consulté en application de l’article L. 2323-19 du code du travail, sur un projet de cession des éléments faisant l’objet de la notification prévue à l’article L. 141-27 du présent code, le cours du délai est suspendu entre la date de saisine du comité et la date où il rend son avis, et à défaut jusqu’à la date où expire le délai imparti pour rendre cet avis.

« Art. L. 141-30. - Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables :

« - aux sociétés faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire régie par les dispositions du livre VI ;

« - aux sociétés qui dépassent, à la clôture d’un exercice social, les seuils définissant les petites et moyennes entreprises prévus à l’article 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises. »

La parole est à M. Bruno Retailleau.

M. Bruno Retailleau. Ayant été retenu, hier et ce matin, par des réunions importantes concernant l’emploi, notamment avec les cabinets d’Arnaud Montebourg et de Michel Sapin pour évoquer le dossier FagorBrandt, je n’ai pu être présent en séance et je vous prie de bien vouloir m’en excuser.

Je tiens toutefois à présenter cet amendement et j’interviendrai ultérieurement pour une explication de vote sur l’article.

Nous nous rejoignons sur plusieurs constats, monsieur le ministre. D’abord, la transmission est incontestablement un enjeu dans notre pays, et le sera de plus en plus, les chefs d’entreprise vieillissant, tout comme le reste de la population. Ensuite, la non-transmission d’une entreprise saine peut provoquer une perte d’emplois. Enfin, une reprise par des salariés peut constituer une solution. D’ailleurs, la reprise d’une entreprise par des salariés n’est pas une exception en France, et cela se passe souvent de manière naturelle.

En revanche, le dispositif que vous nous proposez présente énormément d’inconvénients et de lourdeurs. C’est la raison pour laquelle, par cet amendement, nous vous soumettons un dispositif plus souple, dont l’objectif est de synthétiser les articles 11 et 12 en un seul article.

Par ailleurs, cet amendement tend à recaler le dispositif sur votre intention principale, monsieur le ministre, qui découle de ce constat effectué dans l’exposé des motifs : « La non-transmission d’entreprises saines est une source croissante de pertes d’emplois. De nombreuses entreprises cessent en effet leur activité faute de repreneurs. »

Le texte de l’étude d’impact le montre, vous vous préoccupez avant tout de ces entreprises qui auraient dû trouver un repreneur et qui n’en trouvent pas, et qui vont donc cesser leur activité et détruire des emplois.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. En effet !

M. Bruno Retailleau. Cet amendement tend à restreindre les obligations d’information au seul cas de cessation d’activité.

On pourrait ainsi écarter la rigidité, la lourdeur, les problèmes de confidentialité, de complexification et d’insécurité juridique, pour se concentrer sur la priorité rappelée dans l’exposé des motifs.

M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Le Cam, Mme Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de commerce est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« De l'instauration d'un droit de priorité accordé aux salariés en cas de cession d'un fonds de commerce

« Art. L. 141-23. – Les salariés, au sens de l’article L. 1111-2 du code du travail, qui souhaitent se porter acquéreur du fonds de commerce de leur entreprise, bénéficient, en cas de cession, d’un délai de deux mois, pendant lequel leur offre est examinée prioritairement, sous réserve que cette dernière ne soit pas moins avantageuse qu’une offre concurrente et que le projet porté par les salariés propose la reprise ou la création d’une société coopérative mentionnée dans la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.

« Art. L. 141-24. – Le propriétaire du fonds ou l’exploitant informe par écrit les représentants du comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel et informe par voie d’affichage l’ensemble du personnel, de leur intention de vendre.

« Il les informe qu’ils peuvent présenter au cédant une offre de rachat des éléments qui font l'objet de l'intention de cession, conformément à l’article L. 141-23 du présent code. 

« Il communique également le prix et les conditions de ventes projetées, ainsi que les offres de reprises formulées pendant toute la durée mentionnée à l’article L. 141-23 du même code.

« Art. L. 141-25. – À leur demande, les salariés peuvent se faire assister par un représentant de la chambre de commerce et de l’industrie territorialement compétente ou par toute personne désignée par les salariés, dans des conditions définies par décret.

« Dans les quinze jours qui suivent la demande formulée par les délégués du personnel ou par un nombre suffisant de salariés, une réunion ouverte à tous le personnel est organisée.

« Sur la base des informations mentionnées à l’article L. 141-24, les salariés qui souhaitent se porter acquéreur se prononcent sur l’offre formulée à l’exploitant ou au cédant. À l’issue de cette rencontre, un procès-verbal est dressé et signé par l’ensemble des salariés. Cette signature vaut approbation des salariés signataires et constitue l’offre transmise à l’exploitant ou au cédant.

« Art. L. 141-26. – Si, à l’issue du délai mentionné à l’article L. 141-23, l’offre formulée par les salariés n’est pas retenue, l’exploitant ou le cédant informe, dans les mêmes conditions que celles mentionnées à l’article L. 141-24, les représentants du comité d’entreprise ou à défaut les délégués du personnel et l’ensemble des salariés, de l’offre qui a été retenue.

« L’information porte notamment sur le prix de vente, la date à laquelle l’offre a été formulée, la date et les conditions de la cession ainsi que les conditions de reprise des effectifs.

« Les salariés sont tenus à une obligation de discrétion à l'égard des informations communiquées en application des dispositions qui précèdent.

« Art. L. 141-27. – Tous les six mois, jusqu’à la cession du fonds de commerce à un acquéreur, les salariés disposent de la possibilité de renouveler leur offre. Elle est alors examinée dans les mêmes conditions que celles visées à l’article L. 141-23, exception faite du délai de priorité qui est porté à un mois.

« Art. L. 141-28. – Les dispositions de la présente sous-section ne sont pas applicables en cas de succession, de liquidation du régime matrimonial ou de cession du fonds à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant.

« Art. L. 141-29. – Dans le cas où le plan mentionné à l’article L. 626-1 est mis en œuvre, le tribunal informe par tout moyen les salariés de l’engagement de la procédure et tient compte, le cas échéant, de l’offre formulé par un ou plusieurs salariés.

« Art. L. 141-30. – La cession intervenue en méconnaissance des dispositions des alinéas qui précèdent peut être annulée par la juridiction civile ou commerciale compétente sur demande d’un ou plusieurs des salariés visés à l’article L. 141-23.

« L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de l'avis de cession du fonds.

2° Après l’article L. 631-1, est inséré un article L. 631-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 631-1-…. – Dès l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le tribunal informe les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel que les salariés sont admis à présenter une offre de reprise totale ou partielle.

« L’offre ainsi formulée bénéficie d’un examen prioritaire pendant un délai de deux mois à compter de la notification mentionnée à l’alinéa précédent, sous les mêmes réserves que celles mentionnées à l’article L. 141-23.

II. – Les droits au titre de la participation aux résultats de l’entreprise affectés, en application des articles L. 3323-2 et L. 3323-5 du code du travail, antérieurement au 1er janvier 2013, à l’exclusion de ceux affectés à des fonds investis dans des entreprises solidaires en application du premier alinéa de l’article L. 3332-17 du même code, sont négociables ou exigibles, pour leur valeur au jour du déblocage, avant l’expiration des délais prévus aux articles L. 3323-5 et L. 3324-10 dudit code, sur demande du salarié pour financer un projet de rachat total ou partiel d’un fonds de commerce dans les conditions définies à l’article L. 141-23 du code du commerce.

Les sommes attribuées au titre de l’intéressement affectées à un plan d’épargne salariale, en application de l’article L. 3315-2 du code du travail, antérieurement au 1er janvier 2013, à l’exclusion de celles affectées à des fonds investis dans des entreprises solidaires en application du premier alinéa de l’article L. 3332-17 du même code, sont négociables ou exigibles, pour leur valeur au jour du déblocage, avant l’expiration du délai prévu à l’article L. 3332-25 dudit code, sur demande du salarié pour financer un projet de rachat total ou partiel d’un fonds de commerce dans les conditions définies à l’article L. 141-23 du code du commerce.

Le salarié peut demander le déblocage de tout ou partie des titres, parts, actions ou sommes mentionnés au I entre le 1er juillet et le 31 décembre 2013. Il est procédé à ce déblocage en une seule fois.

Les sommes mentionnées aux I et II du présent article bénéficient des exonérations prévues aux articles L. 3315-1 et L. 3315-2, ainsi qu’aux articles L. 3325-1 et L. 3325-2 du code du travail.

Les dispositions du présent article ne s’appliquent pas aux droits à participation ni aux sommes attribuées au titre de l’intéressement, affectés à un plan d’épargne pour la retraite collectif prévu par l’article L. 3334-2 du code du travail.

Les sommes versées au salarié au titre des deux premiers alinéas du III ne peuvent excéder un plafond global de 20 000 €, net de prélèvements sociaux.

L’employeur ou l’organisme gestionnaire déclare à l’administration fiscale le montant des sommes débloquées en application du présent article.

Le salarié tient à la disposition de l’administration fiscale les pièces justificatives attestant l’usage des sommes débloquées conformément aux deux premiers alinéas du I.

III. – La perte de recettes pour l’État résultant du II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Cet amendement, qui vise à réécrire l’article 11, sera associé, par cohérence, à un amendement de réécriture de l’article 12.

Je tiens à le défendre, même si, en général, plus un amendement est long, moins il a de chances d’aboutir…

L’article 11, dans sa rédaction actuelle, constitue sans doute une avancée, puisqu’il instaure un droit d’information, mais une avancée somme toute mesurée.

Il est limité en ce qui concerne la nature de l’information, puisque les salariés ne sont informés que de l’intention de vendre et n’ont pas accès aux offres formulées par d’éventuels repreneurs.

Il est aussi limité dans l’objectif, puisqu’il ne s’agit pas d’instaurer un droit effectif de reprise d’une entreprise par les salariés eux-mêmes. En effet, rien ne permet aux salariés intéressés d’être prioritaires, même à offre égale, par rapport à un repreneur tiers.

Face à l’urgence sociale qui secoue notre pays, il est absolument nécessaire de renforcer le droit d’information des salariés et d’accorder à l’offre de reprise émanant d’un ou de plusieurs salariés un droit de priorité, à la double condition que cette offre soit à la fois au moins égale à celle formulée par d’autres repreneurs et que le projet porté par les salariés prévoit d’organiser la reprise sous une forme coopérative.

Enfin, afin de rendre effectif ce droit de reprise prioritaire, il convient de soutenir économiquement les salariés dans leurs démarches. À défaut de pouvoir engager des fonds publics, sous réserve de recevabilité financière, les auteurs de cet amendement proposent d’autoriser les salariés qui souhaitent reprendre leur entreprise sous une forme coopérative à bénéficier de la possibilité de débloquer les produits des droits à participation des salariés aux résultats de l’entreprise et de l’intéressement. En effet, lorsque ceux-ci sont investis en compte courant bloqué ou sur un plan d’épargne salariale, ils sont normalement indisponibles pendant cinq ans.

Le droit de priorité, qui avait été l’un des engagements de François Hollande, nécessite une réelle volonté politique. Vous avez parfois considéré qu’un tel droit pouvait constituer une atteinte au principe d’égalité, au droit de propriété et à la liberté d’entreprendre. Ces arguments tirés de l’inconstitutionnalité de ce droit ne nous semblent toutefois pas assez solides pour renoncer à cette promesse. En effet, la préemption ne porte atteinte ni au droit de propriété ni à la liberté d’entreprendre, le cédant ne pouvant arguer d’aucun préjudice dès lors que l’offre est équivalente.

M. le président. L'amendement n° 117, présenté par Mme Lamure, M. César et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement tend à supprimer la section 3 que le présent article prévoit d’insérer dans le chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de commerce.

Si cette nouvelle obligation d’information des salariés était votée, le dialogue naturel entre le dirigeant et le repreneur serait inévitablement faussé, sans compter le développement inévitable de procédures et de recours.

La vente d’une entreprise est un moment très important que nous souhaitons préserver.

M. le président. L'amendement n° 119 rectifié ter, présenté par M. César, Mme Lamure, MM. Buffet et Husson, Mmes Troendle et Masson-Maret, MM. Cardoux, Lefèvre et Charon, Mmes Deroche et Hummel, MM. Couderc, de Raincourt, Houel et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire et M. Adnot, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

1° Après les mots :

du code du travail,

insérer les mots :

la cessation d’activité ou

2° Après le mot :

vendre

insérer les mots :

ou de cesser son activité

II. – Alinéa 5, première phrase

Après le mot :

vendre

insérer les mots :

ou de cesser son activité

III. – Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

ou si un repreneur a été trouvé plus de deux mois avant la cession

IV. – Alinéa 17

Après les mots :

fonds de commerce

insérer les mots :

ou de cessation d’activité

V. – Alinéa 18

Après les mots :

En cas de

insérer les mots :

cessation d’activité ou

VI. – Alinéa 28

Compléter cet alinéa par les mots :

ou si un repreneur a été trouvé plus de deux mois avant la cession

La parole est à Mme Élisabeth Lamure.

Mme Élisabeth Lamure. L’exposé des motifs précise que le droit d’information préalable est destiné à pallier la non-transmission d’entreprises saines. Il aurait donc vocation à s’appliquer uniquement lorsqu’il n’y a pas de repreneurs. Or le texte va au-delà, en imposant cette information dans tous les cas.

Les transmissions risquent d’être plus difficiles. Ainsi, un chef d’entreprise qui aura anticipé sa cession et trouvé un repreneur devra proposer à ses salariés de lui faire une offre de reprise qui a de grandes chances d’être refusée. Au final, une reprise qui aurait pu se faire sans conflit risque d’être entourée, du fait de cette procédure, de grandes tensions.

Par cet amendement, nous vous proposons que soit ajouté dans les conditions d’exemption le fait que le dirigeant ait déjà trouvé un repreneur.

M. le président. L'amendement n° 110 rectifié quater, présenté par MM. Savary, P. André, Bas, Beaumont et Billard, Mmes Boog et Bruguière, MM. Cardoux et Cléach, Mme Debré, MM. de Legge et de Montgolfier, Mmes Deroche et Des Esgaulx, MM. Doligé, Huré, Hyest, Laufoaulu, Lefèvre, Legendre, Leleux, P. Leroy, Milon et Pierre, Mme Procaccia, M. Reichardt et Mme Sittler, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

du code du travail,

insérer les mots :

la cessation d’activité ou

La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Ma présentation vaudra également défense de l’amendement n° 111 rectifié quater, qui va dans le même sens, monsieur le président.

Il s’agit d’inscrire le droit d’information dans le cadre de la cessation d’activité.

Lorsque le chef d’entreprise, n’ayant pas trouvé de repreneur, s’oriente vers une cessation d’activité, il doit pouvoir consulter les employés et engager une concertation. Mais il ne doit pas être obligé de le faire dès le départ.

Par ces amendements, nous souhaitons trouver une solution pour permettre l’information des salariés, sans qu’elle soit pour autant rédhibitoire pour la transmission de l’entreprise.

M. le président. L’amendement n° 265 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Remplacer les mots :

la cession d’un fonds de commerce par son propriétaire ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de son intention de vendre

par les mots :

lorsque le propriétaire d’un fonds de commerce veut le céder, les salariés en sont informés, et ce au plus tard deux mois avant la cession

II. - Alinéa 5

Remplacer les mots :

la notification de l'intention de vendre est faite

par les mots :

cette information est notifiée

III. - Alinéa 6

Remplacer les mots :

son intention

par les mots :

sa volonté

IV. - Alinéa 18

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 141-27. – Lorsqu'il veut céder un fonds de commerce, son propriétaire notifie sa volonté de céder à l'exploitant du fonds.

V. - Alinéa 19

Remplacer les mots :

d’intention de cession

par les mots :

prévue au précédent alinéa

VI. - Alinéa 20

Remplacer les mots :

son intention

par les mots :

sa volonté

La parole est à M. Jacques Mézard.