compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaire :

M. Hubert Falco.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

crédit d'impôt recherche dans le secteur du service informatique et de l'édition de logiciel

M. le président. La parole est à M. Michel Berson, auteur de la question n° 479, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Michel Berson. Madame la ministre, le numérique irrigue aujourd’hui l’ensemble de notre économie et de notre société. Il est au cœur du redressement industriel de notre pays.

Comment développer la compétitivité des écosystèmes numériques ? Comment affirmer l’attractivité de la France en matière de recherche et d’innovation ?

Le crédit d’impôt recherche, le CIR, est un dispositif fiscal particulièrement incitatif qui favorise les efforts de recherche des entreprises, notamment des PME, et tout particulièrement des entreprises du secteur numérique.

Or les contrôles fiscaux relatifs au crédit d’impôt recherche sont en sensible augmentation ces deux dernières années, qu’il s’agisse de contrôles a priori, au moment des déclarations, ou a posteriori. Certes, la croissance de ces contrôles est liée au nombre croissant de sociétés déclarant un CIR, lesquelles sont surtout des PME et, de plus en plus, des entreprises de services informatiques et d’édition de logiciels.

Les contrôles débouchent sur des redressements fiscaux croissants dont le montant peut s’élever à 90 % du crédit d’impôt recherche. Les conséquences financières de ces redressements peuvent remettre en cause le modèle économique des entreprises, voire mettre en danger leur existence.

À l’évidence, il y a une spécificité de la recherche et développement dans le secteur du numérique, ce qui devrait conduire à ouvrir le crédit d’impôt recherche à de nouveaux types d’innovation, que ce soit en termes de service, de design ou de marketing. Cela soulève la question de la nécessité de trouver une définition plus pertinente de la recherche et de l’état de l’art. Madame la ministre, il faudrait aussi que votre ministère intervienne beaucoup plus qu’il ne le fait dans la procédure de contrôle du crédit d’impôt recherche.

Dans la grande majorité des cas, c’est en effet l’administration fiscale qui évalue les travaux de recherche des entreprises pour vérifier qu’ils sont bien éligibles au crédit d’impôt recherche. Or cette administration, à l’inverse du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ne dispose pas de toutes les compétences scientifiques pour juger du respect des critères d’éligibilité au crédit d’impôt recherche.

Je ferai une dernière réflexion relative à la sous-traitance des dépenses de recherche qui sont plafonnées pour pouvoir bénéficier du crédit d’impôt, ce qui entraîne, par conséquent, un plafonnement du CIR lui-même.

La sous-traitance est source de litiges entre l’administration, les entreprises sous-traitantes et les entreprises donneuses d’ordre. Sans remettre en cause l’esprit de la loi, il conviendrait de supprimer les plafonds et de faire de la sous-traitance collaborative le nouveau support du calcul du crédit impôt recherche, avec des taux modulés entre sous-traitants et donneurs d’ordre.

Il est urgent de répondre à un certain nombre de problématiques qui se posent aujourd’hui dans le mécanisme du crédit d’impôt recherche. Il est bien évident que le crédit d’impôt recherche, qui fait couler beaucoup d’encre, ne doit pas être remis en question.

Cependant, au regard de l’évolution de notre société et de notre économie, il convient d’adapter le crédit d’impôt recherche sur un certain nombre de points, qui ne remettent nullement en cause ses fondements. Le Président de la République a pris en effet l’engagement de sanctuariser le crédit d’impôt recherche parce qu’il contribue efficacement à soutenir la compétitivité et la croissance de notre économie.

Madame la ministre, pourriez-vous préciser quelles mesures le Gouvernement envisage de mettre en œuvre pour fluidifier les relations entre les entreprises et l’administration et pour clarifier la situation du crédit d’impôt recherche, notamment dans l’industrie numérique, qui est l’un des secteurs aujourd’hui les plus actifs en termes d’innovation et de création d’emplois ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur les redressements au titre du crédit d’impôt recherche que connaissent, à la suite de contrôles a posteriori ou a priori – au moment de l’établissement de leur demande –, les entreprises de services informatiques et d’édition de logiciels.

Vous mentionnez aussi les difficultés rencontrées par l’administration fiscale pour qualifier les activités de ces entreprises en matière d’assiette à prendre en compte pour la recherche et développement éligible au titre du CIR. Comme vous, j’ai été interpellée à ce sujet par les sociétés elles-mêmes, en particulier les PMI, les PME, les start-up et les entreprises de taille intermédiaire, ou ETI, et par le président de Syntec numérique. En effet, la pérennité de certaines entreprises peut être compromise par ces redressements.

Je voudrais d’abord rappeler que, en février 2012, une instruction fiscale établie en étroite collaboration avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a précisé la définition des opérations de recherche et développement pouvant bénéficier du crédit d’impôt recherche. Cette instruction donne des exemples pour cinq secteurs d’activités, dont celui des technologies de l’information et de la communication. Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, les entreprises du numérique représentent une proportion importante des entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt recherche : il est donc essentiel que ce dispositif soit adapté à leurs enjeux et qu’il soit parfaitement lisible.

Néanmoins, le secteur du numérique est, vous le savez, en évolution technologique rapide, ce qui nécessite un travail permanent de clarification des éléments à prendre en compte au titre de la recherche et développement. J’ai donc relancé un groupe de travail en mai dernier avec les principaux représentants des entreprises de ce secteur et les administrations compétentes. Y participent notamment la direction du contrôle fiscal et la direction générale de la recherche et de l’innovation de mon ministère, laquelle – je vous rassure ! – est présente à toutes les étapes.

Le travail réalisé a permis de constater que les définitions utilisées pour les dépenses de recherche et développement, telles que présentées par les experts scientifiques de mon ministère et ceux des organismes de recherche auxquels nous faisons appel au cas par cas, faisaient l’objet d’un accord général. Ce qui pose problème, en réalité, c’est la lisibilité des procédures de contrôle.

Pour clarifier ces procédures, une annexe sectorielle au bulletin officiel des finances publiques, le BOFIP, est en cours de rédaction par la direction de la législation fiscale, à la suite des travaux du groupe de travail. Elle apportera aux entreprises la clarification nécessaire du périmètre éligible pour limiter autant que possible les différends qui pourraient surgir au moment des contrôles, notamment dans certains secteurs comme celui de la veille technologique, ou dans la définition des développements spécifiques par rapport aux standards et à l’état de l’art, c'est-à-dire au regard de l’état des connaissances au niveau mondial, à la réalité des logiciels. Cette annexe, qui sera opposable à l’ensemble de l’administration fiscale, devrait être finalisée au début de 2014.

Quant à la question de la sous-traitance, elle relève de Bercy. J’ai eu l’occasion, avec d’autres ministres, d’attirer l’attention des services et des ministres concernés. Une réflexion est en cours à ce sujet. Vous l’avez dit, et je ne peux qu’adhérer à votre propos, les rapports entre donneurs d’ordre et sous-traitants sont un véritable sujet.

Je rappelle par ailleurs que le Gouvernement est attaché à améliorer globalement le crédit d’impôt recherche, tout en assurant sa stabilité et sa constance. Les ajustements prévus dans le projet de loi de finances pour 2014 simplifieront l’application du crédit d’impôt recherche pour l’ensemble des entreprises du numérique. Une entreprise qui subit des restrictions globales de personnels en raison de difficultés économiques mais qui maintient ses effectifs de recherche et développement ne sera plus pénalisée concernant le doublement du crédit d’impôt recherche pour l’embauche de jeunes chercheurs, en particulier de jeunes doctorants. Je sais, monsieur le sénateur, que cette question vous tient à cœur.

Le crédit d’impôt recherche est maintenu, ce qui est important dans la période actuelle, et il est constamment révisé, notamment pour les secteurs les plus évolutifs comme celui du numérique.

M. le président. La parole est à M. Michel Berson.

M. Michel Berson. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions. Elles confirment que le Gouvernement reste attaché, comme les entreprises, au crédit d’impôt recherche, lequel doit être adapté en fonction de l’évolution de notre économie.

J’aimerais revenir sur un point qui me paraît aujourd’hui crucial. Le nombre d’entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt recherche a été multiplié par deux au cours des cinq dernières années. Aujourd'hui, 20 000 déclarants et 15 000 entreprises bénéficient du crédit d’impôt recherche.

Si cette croissance est très importante et extrêmement positive, le nombre d’experts du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche chargés, conjointement avec l’administration fiscale, du contrôle de ce dispositif n’a quant à lui pas augmenté. Cela pose un véritable problème d’ordre budgétaire : il faut davantage de crédits pour recruter davantage d’experts.

Il s’agit d’une voie de progrès essentiel, je dirais même prioritaire, pour que ces contrôles se passent dans de meilleures conditions et que les entreprises puissent in fine bénéficier du crédit d'impôt recherche auquel elles ont droit et qui leur permette véritablement de financer leurs projets.

Ma seconde remarque concerne le débat contradictoire.

À ma connaissance, aucun décret ne définit, pour l’heure, ce qu’est le débat contradictoire dans les entreprises bénéficiaires du crédit d'impôt recherche. Si le principe du débat contradictoire existe dans notre droit public, il n’est pas véritablement codifié. Je souhaite qu’il puisse l’être de façon précise, de manière à rendre le débat plus serein et, in fine, plus positif pour les entreprises, notamment pour les sous-traitants et les donneurs d’ordre.

disponibilité des crédits de paiement de la ligne budgétaire unique en guyane

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 361, adressée à M. le ministre des outre-mer.

M. Georges Patient. Monsieur le ministre, le logement social en Guyane connaît une crise d’une gravité et d’une acuité particulières.

D’après les derniers chiffres, les demandes de logement non satisfaites s’élèvent à 13 000, auxquelles il convient d’ajouter environ 11 000 habitations insalubres, dans lesquelles vivent près de 35 000 personnes.

Ces chiffres sont à rapporter à ceux de la population, estimée à 220 000 habitants. Autrement dit, un quart de la population souffre du mal-logement !

Cette situation s’explique par le dynamisme de la demande, lié à une forte croissance de la population, laquelle est cinq fois plus élevée qu’en métropole, et la plus forte des outre-mer. Elle est également due à une très forte proportion de ménages à faibles ressources et au pourcentage de la population éligible au logement social, qui s’établit à 80 %.

La construction de 3 600 logements par an serait nécessaire pour faire face à cette croissance de la demande.

Or, l’offre ne suit pas. Une progression des constructions avait été enregistrée en 2011, à la suite de la réorientation de la défiscalisation vers le logement social. Mais cet élan – ou cet allant – est vite retombé en raison, d’une part, des difficultés rencontrées par les opérateurs de logements sociaux pour percevoir les versements de la ligne budgétaire unique, la LBU, et, d’autre part, des délais anormaux de traitement des dossiers de défiscalisation par Bercy. Ainsi, au 30 septembre 2013, 38 millions d’euros seraient dus aux sociétés d’économie mixte de Guyane.

Même si la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Guyane a pu récupérer 8 millions d’euros de crédits de paiement, les besoins pour honorer les demandes des opérateurs restent estimés à 45 millions d’euros à la fin de l’année 2013, pour une dotation initiale de 20 millions d’euros.

L’Association régionale des maîtres d’ouvrage sociaux en Guyane, l’ARMOS Guyane, avait très rapidement tenu à informer du niveau des besoins, lesquels s’élevaient à 68 millions d’euros.

Outre les risques sur l’appareil de production et sur l’emploi, c’est toute la dynamique de rattrapage et de construction de logements sociaux qui est atteinte. Les chantiers sont quasiment gelés et les constructions risquent de tomber à 500 ou 600 logements par an, loin de l’objectif, fixé à 3 000 logements par an.

Si l’on ajoute à cela l’arrêt de la production de logements sociaux en accession, les logements évolutifs sociaux, ou LES – c’est une autre singularité de la Guyane –, les conditions semblent réunies pour une explosion sociale dans ce domaine.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire connaître le montant des crédits de paiement que vous comptez allouer à la Guyane au titre de la LBU et, en cas d’insuffisance, les moyens que vous envisagez de consacrer à l’apurement de cette dette, qui met en défaut de paiement les opérateurs de logements sociaux et, au-delà, met en péril toute la chaire du BTP ?

Un dispositif comparable à celui qui a été mis en place pour la Semsamar, c'est-à-dire un abondement des crédits de paiement, doit être envisagé en 2014 pour les bailleurs et opérateurs de Guyane.

De même, monsieur le ministre, pouvons-nous avoir la certitude que la Guyane sera correctement dotée en autorisations de programme et en crédits de paiement pour l’exercice 2014, eu égard à sa situation de crise ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, vous soulevez là une difficulté majeure et récurrente.

La politique en faveur du logement social et de la lutte contre l’habitat insalubre est une priorité du Gouvernement, plus particulièrement de mon ministère.

Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, les crédits de la ligne budgétaire unique ont été portés à 244 millions d’euros, soit une augmentation de 18 % par rapport à l’année dernière et de 25 % par rapport à 2011.

La situation du logement en Guyane ne m’a pas échappé.

Dès mon entrée en fonctions, j’ai souhaité, en dépit des contraintes de gestion, renforcer la dotation dont bénéficie ce territoire au titre de la LBU : alors que cette dernière était de 16 millions d’euros en crédits de paiement, je l’ai portée à 20 millions d’euros. En complément, le préfet a redéployé près de 6 millions d’euros vers la LBU, depuis d’autres lignes moins tendues. Au total, en 2012, mon ministère a fait passer la dotation initiale de 16,5 à 26 millions d’euros, soit une augmentation de près de 60 %.

Nous savions que de telles tensions se reproduiraient en 2013, pour une raison simple : l’accélération des constructions de logements sociaux, permise par le couple LBU-défiscalisation.

Pour y faire face, j’ai d’emblée décidé de porter la dotation initiale pour 2013 à 20 millions d’euros, soit 4 millions d’euros de plus que l’année précédente. Cela n’a pas suffi. Aussi, j’ai autorisé un abondement de 3 millions d’euros supplémentaires en juillet dernier. Les 25 septembre et 11 octobre derniers, devant des tensions persistantes sur les moyens de paiement – vous les avez évoquées –, j’ai demandé un nouvel abondement de 5,2 millions d’euros.

Vous voyez donc que nous sommes tout sauf inactifs devant cette réalité. En 2013, la dotation initiale est ainsi passée de 20 à 28 millions d’euros.

Au reste, pour le cas où cet effort ne suffirait pas à résoudre tous les paiements en attente, j’ai engagé des discussions avec le ministre chargé du budget pour majorer les crédits disponibles dans le cadre de la fin de gestion. J’espère que les sommes gelées pourront être débloquées très prochainement.

Je ne souhaite pas que ce phénomène se reproduise perpétuellement. Aussi, monsieur le sénateur, pour répondre précisément à votre question concernant les dotations dont bénéficiera la Guyane, au titre de la LBU, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, je vous indique qu’elles seront de 31,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 32 millions d’euros en crédits de paiement, contre 16 millions d’euros en 2012.

Par ailleurs, j’ai déjà annoncé que, compte tenu du dynamisme démographique du département et conformément au mandat que m’a confié le Premier ministre, 100 000 logements seront construits sur les dix prochaines années, à raison de 10 000 logements par an, contre environ 7 400 ou 7 500 aujourd'hui. Tout le problème sera de trouver les moyens pour financer ces nouvelles constructions.

M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

J’ai bien entendu l’engagement du Gouvernement en faveur du logement social et je sais qu’il s’agit là de l’une des priorités de sa politique en direction des outre-mer.

Je me permets toutefois d’insister, compte tenu de la gravité sans précédent de la situation en Guyane, dans un contexte très sensible.

Ce que je demande, ce n’est pas un doublement de la dotation au titre de la LBU pour le début de l’année 2014 ; c’est un doublement des crédits de paiement nécessaires à apurer la dette et à poursuivre l’effort annuel, afin d’éviter un effet « boule de neige », qui verrait les crédits de paiement pour 2014 rembourser une partie des dettes de 2013, et ainsi de suite. Sur ce sujet, j’ai bien entendu votre réponse, et je pense donc que votre engagement va se traduire concrètement.

S’agissant du guichet unique, sujet sur lequel nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, je me permets d’insister sur la nécessité d’en installer un en Guyane car, je le rappelle, c’est le seul département d’outre-mer qui n’en dispose pas actuellement.

Or, les besoins en matière d’accession très sociale sont importants : ils s’élèvent à près de 700 logements évolutifs sociaux par an. Pour pouvoir y répondre, la présence, sur place, d’une interface sociale et financière, dans le cadre du montage des dossiers de logements évolutifs sociaux, est essentielle.

Aussi, je réitère ma demande de réouverture du dossier du fonds de garantie habitat Guyane, en espérant qu’il ne s’agira pas d’un vœu pieux.

Sur tous ces points, je compte sur vous, monsieur le ministre ! Vous savez que vous avez toute ma confiance.

conditions d'attribution de la croix du combattant volontaire

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, auteur de la question n° 523, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, j’ai souhaité attirer l'attention de M. le ministre de la défense sur la différence de traitement existant entre les engagés volontaires ayant servi lors des guerres mondiales, des guerres d'Indochine, de Corée et d'Afrique du Nord, et ceux qui servent actuellement dans nos armées.

Depuis la suspension de la conscription, en octobre 1997, seuls des volontaires servent dans nos armées. Une partie de ceux-ci sont des contractuels qui, venant de la société civile, signent un contrat à durée déterminée pour une armée ou une formation rattachée.

Aux termes de ce « contrat d'engagé », ils peuvent être désignés pour servir sur tout territoire où des troupes françaises sont stationnées ou seraient envoyées. Ils n'en demeurent pas moins des volontaires.

Si, pendant ce contrat initial, après avoir servi en unité combattante, ils obtiennent la médaille commémorative avec agrafe ou la médaille d'outre-mer avec agrafe et la carte du combattant, ils remplissent alors toutes les conditions cumulatives pour pouvoir prétendre à la croix du combattant volontaire créée par la loi du 4 juillet 1935 et attribuée, depuis, à toutes les générations du feu.

Cette décoration symbolique, sans aucun coût pour l'État, récompense l'acte de volontariat initial de ces engagés volontaires, qui ont accepté de leur plein gré de mettre leur intégrité physique et éventuellement leur vie au service de la Nation.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, si, au nom de l'équité et de la reconnaissance que méritent ces volontaires, le Gouvernement envisage d'attribuer la croix du combattant volontaire avec agrafe « missions extérieures » aux engagés volontaires venant directement de la société civile et remplissant les conditions habituelles.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants. Madame la sénatrice, alors que nous sommes engagés dans un cycle mémoriel, permettez-moi de rappeler que la croix du combattant volontaire a été créée lors du premier conflit mondial pour récompenser les combattants volontaires ayant servi au front dans une unité combattante, alors qu’ils n’étaient astreints à aucune obligation de service, en raison de leur âge.

Le droit à cette décoration a été étendu par la suite, avec la création des barrettes spécifiques à la guerre 1939-1945 et aux conflits d’Indochine, de Corée et d’Afrique du Nord.

Quatre conditions cumulatives sont aujourd'hui exigées pour son attribution : avoir souscrit un engagement sans l’astreinte à une obligation de service, avoir été affecté en unité combattante et être titulaire, à la fois, de la carte du combattant et de la médaille commémorative afférente au conflit donné.

Les conditions d’obtention de cette distinction ont, par ailleurs, été étendues par deux fois au cours des dernières années.

En effet, le décret du 9 mai 2007 en a ouvert le bénéfice aux appelés qui se sont portés volontaires pour participer à une ou plusieurs opérations extérieures répertoriées dans l’arrêté du 12 janvier 1994 modifié fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant. Cette extension a été réalisée pour reconnaître le volontariat caractérisé des appelés de ce que l’on appelle la « quatrième génération du feu ».

De même, le décret du 22 décembre 2011 a étendu aux réservistes opérationnels, dans les mêmes conditions que pour les appelés, le bénéfice de la croix du combattant volontaire avec barrette « missions extérieures ».

Toutefois, madame la sénatrice, il en va différemment des engagés volontaires, qui sont des contractuels de l’armée de terre, de la marine nationale et de l’armée de l’air et dont le statut est tout autre. En effet, conformément à l’article L.4132-6 du code de la défense, ces derniers signent un contrat au titre d’une formation, pour servir en tout temps, en tout lieu et en toutes circonstances. Ils ne peuvent donc se prévaloir d’un volontariat pour participer à une opération dans le cadre d’une mission extérieure, car il s’agit pour eux d’accomplir leur devoir, en vertu et dans le respect de leur contrat.

Leur situation n’est d’ailleurs pas différente de celle des autres militaires recrutés selon d’autres modalités. En effet, les uns comme les autres ont exprimé, à un moment ou à un autre, leur souhait d’être volontaires pour le métier des armes, que cela soit en étant candidat à un concours d’accès à l’une des grandes écoles de formation militaire ou en postulant pour un recrutement par contrat.

En revanche, leur situation n’est en rien comparable avec les situations ouvrant aujourd’hui droit à cette décoration.

Dans ce contexte, madame la sénatrice, l’extension du droit à la CCV avec barrette « missions extérieures » au profit des militaires contractuels aurait pour effet d’introduire une rupture de l’égalité de traitement entre les différentes générations d’anciens combattants.

Toutefois, il convient de souligner – cette hypothèse est en effet possible – que les intéressés sont éligibles à toutes les distinctions et récompenses auxquelles peuvent prétendre les militaires de carrière, sous réserve bien sûr de réunir les conditions d’attribution requises.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Votre définition du volontariat, ce matin, est un peu particulière, monsieur le ministre. Les militaires apprécieront ou non votre réponse.

Nous reviendrons certainement à la charge sur ce point, car il s’agit d’une question récurrente et importante qui fait l’objet, ce matin, d’un mauvais traitement. Je le regrette.

allocation de retour à l’emploi

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, auteur de la question n° 560, adressée à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, permettez-moi d’attirer votre attention sur l’allocation de retour à l’emploi, l’ARE, plus particulièrement dans l’hypothèse où la personne concernée travaille et perçoit donc des revenus tirés d’une activité réduite.

Je prendrai un cas particulier qui, en fait, devient une généralité pour bon nombre de nos concitoyens.

Une Marnaise était en contrat unique d’insertion, à vingt heures par semaine, depuis septembre 2012.

De septembre à novembre 2012, travaillant vingt heures par semaine sans heure complémentaire, cet agent a perçu 669 euros nets de son employeur, le CCAS, et 180 euros au titre de l’allocation de retour à l’emploi, versés par Pôle Emploi, soit un montant total de 849 euros nets.

Au cours du mois de décembre 2012, cet agent a effectué douze heures complémentaires : elle a alors touché 763 euros nets du CCAS, et aucune allocation de Pôle Emploi, du fait des douze heures complémentaires. Par conséquent, cette employée, en travaillant plus, a été moins rémunérée !

Je sais ce que vous allez me répondre, monsieur le ministre : en principe, l’exercice d’une activité professionnelle exclut tout droit à une quelconque indemnisation au titre de l’assurance chômage !

Toutefois, un dispositif de cumul de l’allocation d’assurance chômage avec le revenu d’une activité professionnelle, salariée ou non, visant à inciter à la reprise d’emploi a été mis en place par les partenaires sociaux gestionnaires du régime d’assurance chômage, et ce sous le précédent quinquennat : voyez les articles 28 à 32 du règlement général annexé à la convention du 6 mai 2011, relative à l’indemnisation du chômage.

Ainsi, un salarié bénéficiaire de l’aide au retour à l’emploi, qui exerce une activité occasionnelle ou réduite, reprise ou conservée, peut bénéficier, parallèlement à son salaire, d’un maintien partiel ou total de cette allocation.

Bien entendu, le salarié ne doit pas travailler plus de cent dix heures par mois... Surtout pas plus ! Et les revenus que lui procure son activité réduite ne doivent pas excéder 70 % de son salaire brut mensuel... Surtout pas plus également !

Pour en revenir à notre citoyenne marnaise en contrat unique d’insertion, le seuil de cent dix heures n’a pas été dépassé, mais le revenu que lui a procuré son activité réduite a excédé le seuil de rémunération déterminé ! C’est donc en travaillant plus qu’elle a gagné moins !

Monsieur le ministre, pouvez-vous m’expliquer ce que vous comptez faire pour éviter ce genre de situation, qui, loin d’être unique, est plus répandue qu’on ne le croit, et qui se révèle être un frein à l’emploi plutôt qu’une incitation ?