Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Carle

Secrétaires :

MM. François Fortassin, Jacques Gillot.

1. Procès-verbal

2. Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires polonais

3. Rappel au règlement

MM. Thierry Foucaud, le président.

4. Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

5. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

6. Communication du Conseil constitutionnel

7. Conventions internationales. – Adoption de sept projets de loi en procédure d’examen simplifié dans les textes de la commission

Convention d’extradition avec la Jordanie. – Adoption de l’article unique du projet de loi

Convention d’entraide judiciaire en matière pénale avec la Jordanie. – Adoption de l’article unique du projet de loi

Protocole d’amendement avec la Suisse relatif à l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire. – Adoption définitive en procédure accélérée de l’article unique du projet de loi

Accord avec la Suisse et l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire. – Adoption définitive en procédure accélérée de l’article unique du projet de loi

Accord avec Monaco relatif aux déchets radioactifs monégasques. – Adoption définitive en procédure accélérée de l’article unique du projet de loi

Accord avec la Norvège sur l’enseignement dispensé en France aux élèves norvégiens. – Adoption définitive de l’article unique du projet de loi

Accord de sécurité sociale avec l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion. – Adoption définitive en procédure accéléré de l’article unique du projet de loi

8. Refondation de l’école de la République. – Discussion en deuxième lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale : M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale ; Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture.

M. Jacques Legendre, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Françoise Férat, M. Jean-Michel Baylet, Mme Corinne Bouchoux, M. Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Giudicelli.

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

Mme Maryvonne Blondin, MM. Jean-Claude Carle, Robert Laufoaulu.

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Carle

Mme Françoise Laurent-Perrigot.

M. Vincent Peillon, ministre.

Clôture de la discussion générale.

9. Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire

10. Refondation de l’école de la République. – Suite de la discussion et adoption en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Article 1er et rapport annexé

Amendement n° 9 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture, M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. – Rejet.

Amendement n° 22 de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Amendement n° 21 de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Amendement n° 10 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 36 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.

Amendement n° 11 de Mme Françoise Férat. – Mme Françoise Férat.

Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet des amendements nos 36 et 11.

Amendement n° 24 de M. Raymond Vall. – M. Raymond Vall, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Amendement n° 12 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 37 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.

Amendement n° 41 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.

M. la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet des amendements nos 37 et 41.

Amendement n° 13 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 14 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 15 de Mme Françoise Férat. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 38 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 16 de Mme Françoise Férat. – Mme Françoise Férat. – Devenu sans objet.

Amendement n° 23 de M. Jacques Mézard. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Amendements nos 17 et 18 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mme Françoise Férat.

Amendements nos 39 et 40 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.

Mme la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; René-Paul Savary, Jean-Claude Lenoir, Mme Sophie Primas, MM. Jean-Pierre Leleux, Daniel Raoul. – Rejet des amendements nos 17, 39 et 40 ; rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 18.

Amendement n° 19 de Mme Françoise Férat. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Jacques Legendre, Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative. – Rejet.

Amendement n° 25 de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Amendement n° 20 de Mme Françoise Férat. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l’ensemble de l'article et du rapport annexé.

Article 3 A. – Adoption

Article 3 ter

M. Roland Courteau.

Amendement n° 42 rectifié bis de M. Bruno Gilles. – M. Bruno Gilles, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 4 bis

M. Jean-Claude Lenoir.

Adoption de l'article.

Article 5

Amendement n° 26 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 6 bis. – Adoption

Article 10

Amendement n° 1 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles 12 et 14. – Adoption

Article 14 bis

Amendement n° 27 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.

Reprise de l’amendement n° 27 par M. René-Paul Savary. – MM. René-Paul Savary, Jean-Claude Lenoir. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 15. – Adoption

Article 20

Amendement n° 28 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Jean-Claude Lenoir. – Rejet.

Adoption de l'article.

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

Article 21

Amendement n° 2 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 29 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 30 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.

Amendement n° 3 de Mme Françoise Férat. – Mme Françoise Férat.

Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet des amendements nos 30 et 3.

Adoption de l'article.

Article 25. – Adoption

Article 27

Amendement n° 43 rectifié ter de M. Bruno Gilles. – M. Bruno Gilles, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 4 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 31

Amendement n° 44 rectifié bis de M. Bruno Gilles. – M. Bruno Gilles, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 45 rectifié bis de M. Bruno Gilles. – M. Bruno Gilles, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 46 rectifié bis de M. Bruno Gilles. – M. Bruno Gilles, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article 32 A

Amendement n° 31 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles 32 B, 42, 44 bis et 45 bis. – Adoption

Article 47

Amendement n° 5 de Mme Françoise Férat. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Hervé Maurey, Jacques Legendre. – Rejet.

Amendements identiques nos 6 de Mme Catherine Morin-Desailly et 32 rectifié de M. Jacques Legendre. – Mme Françoise Férat, M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l'article.

Article 51

Amendement n° 33 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 7 de Mme Françoise Férat. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 35 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 8 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Françoise Férat, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Amendement n° 34 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles 52 ter, 54 bis A et 61. – Adoption

Vote sur l'ensemble

M. Jacques Legendre, Mmes Françoise Férat, Claudine Lepage, Brigitte Gonthier-Maurin, Françoise Laborde, Corinne Bouchoux, MM. René-Paul Savary, François Fortassin, Vincent Peillon, ministre.

Adoption définitive, par scrutin public, du projet de loi dans le texte de la commission

11. Modification de l'ordre du jour

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel

12. Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

M. le président.

MM. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois ; Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques ; Mmes Annie David, présidente de la commission des affaires sociales ; Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture ; MM. Raymond Vall, président de la commission du développement durable ; Philippe Marini, président de la commission des finances ; Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.

Mme Muguette Dini, M. Yves Rome, Mme Cécile Cukierman, M. Yvon Collin, Mme Corinne Bouchoux.

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

MM. Jean-Claude Lenoir, Luc Carvounas.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale.

M. Alain Vidalies, ministre délégué.

M. le président.

13. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaires :

M. François Fortassin,

M. Jacques Gillot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires polonais

M. le président. Mes chers collègues, je suis particulièrement heureux de saluer en votre nom la présence dans notre tribune d’honneur d’une délégation de députés et de sénateurs membres des commissions de la défense de la Diète et du Sénat de la République de Pologne. (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le ministre se lèvent.)

Cette délégation a été invitée par le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, M. Jean-Louis Carrère, et par la présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale, Mme Patricia Adam, afin de discuter, notamment, de l’Europe de la défense, dans la perspective du Conseil européen de décembre 2013.

Elle vient également d’être reçue par le groupe d’amitié France-Pologne du Sénat, présidé par notre collègue M. Jean-Pierre Leleux.

En tant que partenaires stratégiques au sein de l’Union européenne, la France et la Pologne ont un rôle important à jouer pour relancer l’Europe de la défense.

Nous leur souhaitons donc de fructueux échanges, ainsi qu’un excellent séjour parmi nous ! (Applaudissements.)

3

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour un rappel au règlement.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 du règlement du Sénat.

Ces jours derniers, le rectorat de Rouen a annoncé la suppression de tous les postes d’assistants d’éducation, ou AED, de l’académie, soit 253 au total.

Selon les informations dont je dispose, il semble que Mme le recteur ait décidé de donner priorité à l’embauche d’auxiliaires de vie scolaire, ou AVS, pour accompagner les enfants handicapés. J’ignore, d’ailleurs, le nombre de recrutements envisagés.

Cette décision de supprimer des postes d’AED à la rentrée prochaine n’est pas isolée. Certains collègues m’ont indiqué, en effet, que plusieurs autres académies étaient également concernées, comme celles d’Amiens ou de Clermont-Ferrand.

Ainsi, pour la rentrée de 2013, et alors même que les effectifs seront en hausse dans le second degré, près de 2 000 postes d’AED seraient supprimés à l’échelle nationale, soit l’équivalent du nombre de postes créés à la rentrée de 2012. Ce jeu de chaises musicales n’est pas acceptable. Il augure mal des conditions dans lesquelles se fera la prochaine rentrée scolaire.

Ces personnels assurent des missions de surveillance, d’encadrement des élèves et, éventuellement, d’aide aux devoirs. Ils peuvent aussi assister l’équipe éducative pour l’aide à l’accueil et à l’intégration scolaire des élèves en situation de handicap. Indispensables au bon fonctionnement des établissements, ils sont recrutés comme agents non titulaires de l’État et rémunérés sur des crédits répartis par les académies.

Qui, dès lors, assurera ces missions ?

S’agit-il de libérer des postes pour les emplois d’avenir professeur ? Lors du débat sur les emplois d’avenir, nous avions attiré l’attention sur le risque que ce type de manœuvre ne se produise, compte tenu de la similarité des missions confiées aux AED et aux emplois d’avenir professeur, dont l’objectif est d’aider les étudiants dans la poursuite de leurs études. Il nous avait alors été indiqué que ces postes ne se substitueraient pas.

J’attends la réponse de M. le ministre sur ce point.

M. Jean-Louis Carrère. Ce n’est pas une question au Gouvernement !

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Foucaud.

4

Prise d’effet de nominations à une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du vendredi 21 juin prennent effet.

5

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a fait connaître qu’elle avait procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, actuellement en cours d’examen.

Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4 du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.

6

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 24 juin 2013, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le 1 de l’article 80 duodecies du code général des impôts (définition des revenus imposables) (2013-340 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

7

Conventions internationales

Adoption de sept projets de loi en procédure d’examen simplifié dans les textes de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de sept projets de loi tendant à autoriser l’approbation de conventions internationales.

Pour ces sept projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

convention d’extradition avec la jordanie

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie, signée à Paris, le 20 juillet 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie (projet n° 493 [2011-2012], texte de la commission n° 667, rapport n° 666).

(Le projet de loi est adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie
 

convention d’entraide judiciaire en matière pénale avec la jordanie

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie, signée à Paris, le 20 juillet 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie (projet n° 494 [2011-2012], texte de la commission n° 668, rapport n° 666).

(Le projet de loi est adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie
 

protocole d’amendement avec la suisse relatif à l’organisation européenne pour la recherche nucléaire

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole d'amendement de la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative à l'extension en territoire français du domaine de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire conclue le 13 septembre 1965
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation du protocole d’amendement de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative à l’extension en territoire français du domaine de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire conclue le 13 septembre 1965 (ensemble une annexe), signé à Genève, le 18 octobre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation du protocole d’amendement de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative à l’extension en territoire français du domaine de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire conclue le 13 septembre 1965 (projet n° 505, texte de la commission n° 670, rapport n° 669).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole d'amendement de la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative à l'extension en territoire français du domaine de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire conclue le 13 septembre 1965
 

accord avec la suisse et l’organisation européenne pour la recherche nucléaire

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Conseil fédéral suisse et l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire sur le droit applicable aux entreprises intervenant sur le domaine de l 'Organisation afin d'y réaliser des prestations de services revêtant un caractère transnational
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française, le Conseil fédéral suisse et l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire sur le droit applicable aux entreprises intervenant sur le domaine de l’Organisation afin d’y réaliser des prestations de services revêtant un caractère transnational, signé à Genève, le 18 octobre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française, le Conseil fédéral suisse et l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire sur le droit applicable aux entreprises intervenant sur le domaine de l’organisation, afin d’y réaliser des prestations de services revêtant un caractère transnational (projet n° 506, texte de la commission n° 671, rapport n° 669).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Conseil fédéral suisse et l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire sur le droit applicable aux entreprises intervenant sur le domaine de l 'Organisation afin d'y réaliser des prestations de services revêtant un caractère transnational
 

accord avec monaco relatif aux déchets radioactifs monégasques

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques (ensemble une annexe), signé à Paris, le 9 novembre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques (projet n° 507, texte de la commission n° 651, rapport n° 650).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques
 

accord avec la norvège sur l’enseignement dispensé en france aux élèves norvégiens

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège sur l'enseignement dispensé en France aux élèves norvégiens et le fonctionnement des sections norvégiennes établies dans les académies de Rouen, Caen et Lyon
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège sur l’enseignement dispensé aux élèves norvégiens et le fonctionnement des sections norvégiennes établies dans les académies de Rouen, Caen et Lyon (ensemble une annexe), signé à Oslo, le 14 juin 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège sur l’enseignement dispensé en France aux élèves norvégiens et le fonctionnement des sections norvégiennes établies dans les académies de Rouen, Caen et Lyon (projet n° 508, texte de la commission n° 653, rapport n° 652).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège sur l'enseignement dispensé en France aux élèves norvégiens et le fonctionnement des sections norvégiennes établies dans les académies de Rouen, Caen et Lyon
 

accord de sécurité sociale avec l’organisation internationale pour l’énergie de fusion

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de sécurité sociale sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale pour l'énergie de fusion en vue de la mise en oeuvre conjointe du projet ITER
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord de sécurité sociale sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER (ensemble une annexe), signées à Paris, le 7 septembre 2011, et à Saint-Paul-lez-Durance, le 20 septembre 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER (projet n° 509, texte de la commission n° 649, rapport n° 648).

(Le projet de loi est définitivement adopté.)

Mme Corinne Bouchoux. Le groupe écologiste s’abstient !

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de sécurité sociale sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale pour l'énergie de fusion en vue de la mise en oeuvre conjointe du projet ITER
 

8

 
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Discussion générale (suite)

Refondation de l’école de la République

Discussion en deuxième lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (projet n° 641, texte de la commission n° 673, rapport n° 672).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous entamons l’examen en deuxième lecture au Sénat de la loi sur la refondation de l’école de la République. Il s’agira peut-être, d’ailleurs, de la dernière lecture d’un texte qui matérialise la priorité définie par le Président de la République.

Pour nous permettre d’examiner les amendements déposés sur ce texte, je remercierai brièvement les assemblées, et particulièrement le Sénat, de leurs travaux.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous rappelez que, en première lecture, les députés avaient déposé 661 amendements sur ce texte, dont 200 ont été adoptés.

Lors de la première lecture de ce texte au Sénat, 425 amendements avaient été déposés en commission, dont 118 ont été adoptés.

Des amendements ont également été déposés en deuxième lecture à l’Assemblée nationale. J’insiste cependant sur un point : l’important travail réalisé au Sénat a été respecté. J’avais donné ma parole que les enrichissements apportés au texte seraient préservés ; il y allait de l’intérêt même de la loi de refondation de l’école, donc de celui des élèves.

La rédaction du texte, tel qu’il est issu de la première lecture au Sénat, comprenait des avancées notables, portant sur des éléments essentiels : l’éducation artistique et culturelle, le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, la carte des formations et sa définition, la comptabilisation des enfants de moins de trois ans pour l’ouverture des classes – j’ai répondu à une question d’un parlementaire de l’opposition sur ce sujet ce matin même à l’Assemblée nationale –, les secteurs de recrutement communs à plusieurs collèges publics, l’espace à l’usage des parents, ou encore l’éducation à l’environnement et au développement durable.

Un certain nombre de mesures importantes avaient donc été introduites. Elles ont été conservées telles quelles par l’Assemblée nationale.

La commission compétente du Sénat a de nouveau adopté ce texte le 18 juin dernier, sans qu’aucun amendement ait été adopté. Je m’en réjouis.

Tout au long de l’année, j’ai entendu ce qui pouvait se dire sur cette loi. Cela a peu d’importance. Ce qui est essentiel, en revanche, c’est ce que nous avons engagé. Cela, personne, sauf pour des raisons qui ne concernent pas le fond du sujet, ne peut y être opposé.

Nous avons décidé de donner la priorité à l’école primaire. Chacun convient, depuis bien longtemps, que le point faible de notre système éducatif est l’absence de moyens accordés au primaire. Notre pays connaît, en effet, le plus faible taux d’encadrement des pays de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Ce matin encore, à onze heures, l’OCDE a rendu public un rapport soulignant l’important écart qui existe entre le primaire et le secondaire, en matière, notamment, d’exigences pesant sur les enseignants. Cette situation vient de très loin. Lors de la campagne pour l’élection présidentielle, François Hollande avait pris l’engagement d’y remédier. Nous l’avons tenu.

Par ailleurs, nous avons mis en place – et non pas remis en place – une formation des enseignants. C’est là, en effet, le facteur essentiel de la réussite éducative.

J'entends et je lis sur les écoles supérieures du professorat et de l'éducation un certain nombre d'inexactitudes. Interrogé par Mme Blandin, j'ai eu l'occasion de le dire au Sénat la semaine dernière : ces écoles marquent une rupture par rapport à ce qui a été fait jusqu’à présent, et c’était nécessaire.

L’entrée dans le métier d’enseignant doit être professionnalisée. En l’occurrence, elle le sera dès la licence, avant qu’une telle orientation ne soit accentuée en master 1 et poursuivie en master 2. Cette professionnalisation se fera en alternance avec des stages, qui seront proposés avant même le master 1 et au cours de celui-ci. Je perçois la préoccupation qui se fait jour au sujet des « reçus-collés », mais ce concours ne sera pas une césure.

Nous avons défini un cadre national. En outre, contrairement à ce à quoi l’on a assisté ces dernières années, quand l'esprit de compétition entre les universités s'est substitué à l'esprit de coopération, la procédure d'accréditation permettra une entrée progressive et professionnalisante dans le métier. Elle définira ce que l’enseignant doit savoir faire au xxie siècle, tant dans la discipline qu’il enseigne qu’en didactique et dans bien d’autres domaines, comme les usages du numérique, l’égalité entre filles et garçons, l'appréhension des enfants en situation de handicap, la laïcité et les questions pratiques qu’elle pose, le travail en équipe, la capacité à construire le rapport entre l'école et ce qui est extérieur à cette dernière.

Nous avons souhaité, car c’est fondamental, la présence dans ces écoles de praticiens au côté des universitaires, à la fois ceux qui enseignent encore, tant dans le primaire – notre réseau de maîtres formateurs – que dans le secondaire, mais également les partenaires de l'école. C'est une tâche colossale, mais le travail qui a été accompli depuis un an permettra à la rentrée aux nouveaux stagiaires, puisque l’année de stage a été rétablie, de bénéficier de cet enseignement.

Là encore, des incompréhensions se sont fait jour – on a du mal à voir percer le neuf, dans notre pays... Cet enseignement assurera la formation initiale et la formation continue, formera au professorat et aux métiers de l'éducation.

Priorité au primaire, mise en place d'une nouvelle formation des enseignants, service public du numérique éducatif, réforme de nos procédures d'orientation, installation, dès le mois d'octobre prochain, du Conseil supérieur des programmes et du Conseil national d’évaluation du système scolaire, grâce auxquels l'éducation nationale reprendra le mouvement qui doit être le sien : sur tous ces sujets, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez considérablement enrichi ce texte.

Les moyens sont au rendez-vous : 6 700 emplois seront créés à la rentrée sur le terrain, indépendamment de la remise en vigueur de l'année de stage, pour moitié dans le primaire, pour moitié dans le secondaire, lequel n'est pas abandonné.

Nous assistons actuellement à une poussée démographique. Nous y répondons en orientant tous les moyens supplémentaires vers les zones en difficulté, car, là encore, les faits sont implacables : non seulement les apprentissages fondamentaux connaissent des difficultés, mais encore les inégalités s’aggravent, mettant à mal la cohésion nationale et la solidarité avec les zones urbaines sensibles, certains territoires ruraux et les départements et collectivités outre-mer.

C'est pour cette raison que, conformément aux engagements du Président de la République, tous les moyens supplémentaires seront affectés dès cette année dans ces endroits particulièrement sensibles : c'est vrai pour l'accueil des moins de trois ans et pour le principe « plus de maîtres que de classes » ; ce sera vrai, aussi, pour notre action en faveur des collèges.

Ensemble, nous avons redéfini ces fondements de l’école, et vous les avez étayés.

Notre calendrier de travail s’annonce chargé. J'entends dire qu’il faudrait s’occuper du collège. Bien sûr ! Mais cela fait plusieurs mois que, autour de la direction générale de l’enseignement scolaire, se réunissent tous les partenaires pour proposer cette réforme du collège, qui succédera à celle du primaire.

Bien entendu, nos préoccupations fondamentales vont directement à l'éducation prioritaire. Celle-ci concerne près de 20 % de nos écoliers et de nos collégiens et elle ne donne pas les résultats escomptés, malgré l'engagement des personnels. Nous devons faire cesser ces injustices et permettre la réussite éducative de tous. Ce chantier sera engagé.

Un autre chantier est celui des missions des professeurs. Nous avons commencé par les professeurs des écoles et nous poursuivrons ce travail. Des discussions s'ouvriront à la rentrée.

Il y a ceux qui ne veulent rien changer et ceux qui voient l'avenir en regardant dans le rétroviseur. Il y a ceux qui pensent qu'il faudrait ressusciter éternellement les débats d'antan entre l'instruction et l'éducation, entre les républicains et les pédagogues, entre les moyens et les fins, entre la quantité et la qualité. Enfin, il y a ceux qui ont le sens de l'intérêt général, ceux qui, connaissant notre histoire, ont analysé la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, à savoir celle d’un système éducatif à la peine, et qui veulent surmonter ces obstacles. Cela ne se fera pas en un jour ; il faut de la méthode, et la méthode, c'est le chemin.

Or nous nous sommes mis en chemin. Il faut de la détermination. Celle-ci est au rendez-vous et bénéficie de l'appui des plus hautes autorités de l'État, à savoir le Président de la République et le Premier ministre. Nous avons les moyens de mener une grande réforme, et je suis heureux que le débat parlementaire ait permis de l’enrichir. Cette attitude est conforme non pas à une posture politique, mais bien plutôt à ce que doivent être un engagement au service de l’esprit public et des valeurs. Nous avons besoin, pour réussir cette réforme, de l’investissement de tous ; nous sommes plus intelligents à plusieurs que tout seuls. Ce que nous voulons enseigner aux élèves, nous devons le mettre en pratique nous-mêmes.

Je remercie les groupes politiques qui ont apporté leur contribution d’avoir enrichi ce texte. J'appelle les autres à nous rejoindre, car, au fond, nombre de leurs membres partagent nos préoccupations. Parfois, les situations confinent à l'absurde. Ainsi, il arrive que des sénateurs ou des députés de l'opposition m’interrogent sur la scolarisation des moins de trois ans, sur le principe du « plus de maîtres que de classes », sur le nombre d'enseignants dans leur circonscription, sur les écoles supérieures.

Ces avancées appartiennent à toute la Nation, elles sont dans l'intérêt des élèves. Encore une fois, je remercie les groupes qui ont contribué à enrichir ce texte, à lui donner sa cohérence, son ancrage républicain, et je souhaite que les autres puissent profiter de cette dernière lecture pour montrer que leur seul souci, c'est l'intérêt des élèves, c’est celui de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le jour de son investiture, le Président de la République avait adressé ses premiers mots à toutes celles et à tous ceux qui font le choix, au quotidien, de servir la connaissance et d’éveiller les consciences.

Au moment de prendre ses fonctions, dès les premières heures du quinquennat, par son hommage rendu à Jules Ferry, bâtisseur de notre école publique, laïque, gratuite et obligatoire, le Président de la République avait souhaité rappeler la première de ses priorités, celle qui est accordée à la jeunesse, à la refondation de cette grande maison commune qu’est l’école de la République.

La refondation de l’école s’incarnera d’ici peu dans une loi d’orientation et de programmation. Issue d’un travail de concertation dont nous avons reconnu ici l’ampleur et la qualité, fruit également d’un débat parlementaire riche et rigoureux, elle constituera sans conteste cette feuille de route indispensable que nous aurons à suivre dans les années à venir, avec toujours ces objectifs : que l’école retrouve, avec les moyens budgétaires et pédagogiques nécessaires, son ambition de réussite pour tous ; qu’elle demeure ce lieu privilégié de la connaissance, de l’intégration, de la véritable égalité ; que vive à travers elle l’esprit de notre République.

Monsieur le ministre, vous avez su être à l’écoute des parlementaires, de leurs arguments et de leurs propositions. Cette approche constructive aura permis des avancées importantes. Des améliorations ont été apportées à chacune des étapes du processus législatif. Différentes sensibilités ont pu s’exprimer, au service d’une ambition commune : permettre à notre école d’être plus juste pour tous et plus exigeante pour chacun.

Il y a tout juste un mois, le projet de loi était adopté au Sénat en première lecture. Quatre jours et quatre nuits d’échanges approfondis ont permis de consolider les fondations et les principes fondamentaux que nous assignons à notre école, celle-là même qui croit au progrès et à la justice sociale, qui ne se résigne pas face aux inégalités sociales et culturelles.

À la suite du vote intervenu dans cet hémicycle, mon homologue rapporteur à l’Assemblée nationale et les députés membres de la commission des affaires culturelles et de l’éducation ont estimé qu’un point d’équilibre avait été trouvé. Je partage entièrement ce constat.

Les 138 amendements adoptés par notre commission et les 99 autres votés en séance publique ont permis aux sénatrices et aux sénateurs d’apporter, comme je l’avais dit en conclusion de nos débats le 25 mai dernier, leur pierre, ou, plutôt, leurs multiples petites pierres, à cette entreprise de redressement.

Sur les 60 articles modifiés par notre assemblée, 26 nous reviennent aujourd’hui ; 32 avaient été adoptés conformes à l’issue de la première lecture au Sénat, 34 l’ont été en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

La majeure partie des modifications apportées par nos collègues députés est d’ordre rédactionnel. Ces apports, nous les jugeons opportuns. Sans bouleverser aucun des grands équilibres, ils ont eu comme visée principale de parfaire certaines formulations.

Voilà donc, je le crois, un travail législatif réussi. Et c’est bien cette démarche de « coconstruction » que nous défendons pour notre école : un travail collaboratif en lieu et place d’un système parfois trop hiérarchisé, concurrentiel, devenu pour nombre de nos élèves anxiogène et inefficace.

C’est cette idée d’une réussite collective, par le collectif, que nous avons constamment défendue. Elle irrigue le texte que nous nous apprêtons à voter, dans ses dispositions et dans sa conception. L’article 3 A, que nous avons inséré, en première lecture, dans le projet de loi, l’incarne en tout point. Celui-ci, qui redéfinit les missions et rappelle les valeurs fondamentales du service public de l’éducation, n’a été retouché qu’à la marge par les députés. Il nous convient ainsi.

La reconnaissance du principe selon lequel tout enfant est capable d’apprendre, de progresser, la coopération comme valeur cardinale de l’action de la communauté éducative, la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de réussite, la prise en compte par les établissements de la mixité sociale : je crois que nous pouvons éprouver de la fierté à voir inscrits dans le premier article du code de l’éducation tous ces éléments essentiels.

Afin de réaffirmer la démocratisation du système scolaire, c’est collectivement, par une série d’amendements, que nous avons posé les bases symboliques et fixé le cap de la refondation. C’est de cette manière, aussi, que l’école de la République pourra durablement renouer avec sa vocation émancipatrice universelle.

Jean Zay, illustre parmi vos prédécesseurs, monsieur le ministre, avait, sous le Front Populaire, par sa détermination, construit le système d’une école unique, sans distinction de classe sociale, dans l’enseignement primaire. C’est cette œuvre que nous devons poursuivre.

Citer Jean Zay, c’est également réaffirmer la nécessaire vigilance qu’il nous faut avoir, républicains, pour défendre les valeurs universelles de l’humanisme.

Mme Françoise Cartron, rapporteur. C’est pourquoi nous avons également fait figurer ces trois valeurs fondamentales que sont l’égale dignité des êtres humains, la liberté de conscience et la laïcité.

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Trois valeurs que le service public d’éducation a vocation à faire acquérir à tous les élèves en même temps que les connaissances, les compétences et la culture.

Ce sera également le sens de l’enseignement civique et moral, sur lequel il doit nécessairement y avoir consensus, de même que sur la garantie de l’universalité du droit à l’éducation, grâce à un renforcement de l’obligation d’inclusion scolaire de tous les enfants.

Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, a été à l’origine de plusieurs amendements qui ont tendu à donner du corps à ce principe, avec le développement de la coopération entre l’éducation nationale et le secteur médico-social, avec l’objectif de continuité du parcours de scolarisation des élèves en situation de handicap, ou encore avec l’adaptation des épreuves d’examen pour les élèves présentant un trouble de santé invalidant.

Plus généralement, les dispositions du projet de loi en matière de santé scolaire, un élément essentiel pour améliorer le bien-être des enfants et, ainsi, accroître leur chance de réussite, ont été considérablement enrichies au Sénat.

L’Assemblée nationale a validé la plupart de nos avancées sur ce terrain de première importance.

Sans revenir dans le détail sur toutes les mesures, je me réjouis que la rédaction remaniée en première lecture par le Sénat ait été conservée en ce qui concerne l’éducation artistique et culturelle, le nouvel enseignement d’éducation à l’environnement et au développement durable, le socle commun et l’élaboration de la carte régionale des formations professionnelles.

De même, ce que nous avions apporté sur l’école maternelle a été adopté conforme, notamment la comptabilisation des moins de trois ans dans les effectifs et les éléments de formation spécifiques à destination des enseignants. Cela participera de la nécessaire sécurisation des parcours scolaires par un accompagnement renforcé, de qualité, dès le plus jeune âge, en particulier pour les enfants de milieux sociaux défavorisés.

Nous le savons, les moyens supplémentaires octroyés, considérables en cette période de grandes difficultés, ne produiront leurs effets que s’ils coïncident avec une évolution en profondeur des pratiques professionnelles et pédagogiques. De plus, en s’adressant en premier lieu aux écoles des quartiers populaires et à certaines zones rurales isolées, ils permettent de donner plus à ceux qui ont moins.

Les députés ont aussi conservé intact l’ensemble des avancées très importantes que nous avions collectivement faites pour soutenir l’enseignement des langues et cultures régionales.

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Ils se sont prononcés favorablement à l’initiation à la diversité linguistique, en plus des enseignements formels de langues. Les idiomes qui sont parlés dans les familles pourront être utilisés à cette fin.

L’intégration de la continuité d’apprentissage des langues étrangères entre le primaire et le secondaire, votée en deuxième lecture à l’Assemblée nationale, est particulièrement bienvenue. Elle renforce d'ailleurs la liaison entre le CM2 et la sixième.

En outre, ont été approuvés les apports du Sénat pour l’encadrement de la mise à disposition des locaux scolaires, dont nous avions souhaité qu’elle respecte les principes de neutralité politique et commerciale et de laïcité, ainsi que la possibilité de créer des secteurs de recrutement communs à plusieurs collèges publics, afin de favoriser la mixité sociale.

C’est bien en soutenant la cohérence et la synergie entre tous les partenaires de l’école que nous ferons naître des approches nouvelles. Cette démarche partenariale, que nous encourageons, a pris corps plus globalement dans les amendements que nous avions adoptés concernant l’ensemble des acteurs de la communauté éducative.

L’essentiel de nos apports permettant de renforcer la place des parents dans l’école a été approuvé par nos collègues députés.

C’est le cas de la suppression de l’article 4 ter, qui visait à remettre en cause l’accord des parents pour l’orientation et l’accompagnement des élèves handicapés.

C’est aussi valable pour l’obligation nouvelle que nous avions faite au conseil d’administration des établissements de dresser annuellement le bilan des actions menées à destination des parents.

Se trouve également conservée la redéfinition des missions des personnels enseignants, pour prévoir que ceux-ci tiennent informés les parents et les aident à suivre la scolarité de leurs enfants.

Enfin, comme nous en étions convenus, dans tous les établissements sera désormais prévu un espace à l’usage des parents d’élèves et de leurs délégués.

Concernant la mise en œuvre des dispositifs d’aide, le Sénat et l’Assemblée nationale sont arrivés, je le crois, à un compromis. Si l’école prend l’initiative de mettre en œuvre une aide appropriée aux élèves en difficulté, celle-ci ne sera pas limitée aux programmes personnalisés de réussite éducative, les PPRE, et les parents resteront impliqués.

L’ensemble des mesures que nous avions prises en faveur de l’enseignement agricole ont également été préservées. Je pense, notamment, à la reconnaissance du ministre de l’agriculture comme interlocuteur à part entière du Conseil national d’évaluation du système scolaire, à la fourniture par l’État des manuels scolaires dans les établissements agricoles, à la préservation des classes de quatrième de l’enseignement agricole, dont la pédagogie propre comprend des stages, et à la prise en charge par les régions du transport pédagogique. Le 16 mai dernier, Stéphane Le Foll concluait la vaste concertation sur l’avenir de l’enseignement agricole en rappelant les spécificités de ce dernier et son rôle de premier plan dans la promotion sociale et la réussite scolaire.

Nous devons tirer profit, tant en termes de pédagogie que d’organisation, des expérimentations menées au sein de ces foyers d’innovation essentiels.

Oui, une profonde transformation de notre système éducatif ne pourra voir le jour que grâce à la participation de tous. Elle se fera, demain, avec des maîtres bien formés au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, créées dès la rentrée de 2013, ces écoles de formation repensées, dont la formation théorique et les enseignements professionnels seront les deux piliers, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre.

Comme vous pouvez le constater, l’immense majorité de nos amendements ont été confirmés par l’Assemblée nationale. Les modifications que celle-ci a apportées en deuxième lecture aux articles restant en discussion relèvent, je l’ai dit, essentiellement de rectifications rédactionnelles.

Je me félicite donc de l’équilibre ainsi atteint entre les deux chambres. Par conséquent, si j’ai bien pris en considération les 46 amendements déposés sur le texte et dont nous allons débattre cet après-midi, je me prononce, au nom de la commission de la culture, pour une adoption conforme des articles restant en discussion.

Avant que la discussion générale ne débute, je voudrais remercier une nouvelle fois tous mes collègues de la commission qui ont participé aux longues séances de ces dernières semaines, Mme la présidente de la commission, Marie-Christine Blandin, ainsi que les fonctionnaires qui nous ont assistés et ont effectué un immense travail.

Cette loi de refondation porte votre volonté, monsieur le ministre, de permettre à tous les enfants de France de trouver le chemin de la réussite et de l’épanouissement, grâce à la maîtrise du savoir et de la connaissance.

Cette volonté, qui nous permet de croire en l’avenir, nous mobilisera toutes et tous afin de relever le défi qui est devant nous, car, comme l’écrivait Jean-Jacques Rousseau, « il n’y a pas de véritable action sans volonté ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication vient de se prononcer pour une adoption conforme. Le ministre doit penser que la messe est dite…

M. Jean-Louis Carrère. La messe laïque alors ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Legendre. … et qu’il a atteint ses objectifs, malgré les mises en garde, les critiques, les remarques nombreuses venant non seulement des travées des parlementaires de l’opposition, mais aussi de nombreux responsables du monde enseignant et des organisations syndicales enseignantes.

M. Jacques-Bernard Magner. Vous défendez les syndicats, monsieur Legendre ? C’est nouveau !

M. Jacques Legendre. Pour vous, monsieur le ministre, améliorer notre système éducatif passe nécessairement par une augmentation du nombre de postes encadrant les élèves. La principale mesure de votre projet de loi est en effet la création de 60 000 postes, ce qui n’est pas rien dans le contexte budgétaire que nous connaissons.

A-t-on réellement étudié l’opportunité et les risques d’une telle mesure ? Je m’étais déjà interrogé sur ce point lors de la première lecture du texte et je souhaite revenir sur ce sujet primordial.

Tout d’abord, monsieur le ministre, si vous consacrez une telle part du budget de l’éducation au renouvellement ou à la création de postes, vous ne pourrez régler en même temps la question de la révision de la rémunération des enseignants français. Or ces derniers gagnent entre 15 % et 20 % de moins que leurs homologues des pays membres de l’Union européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, à leur début de carrière comme avec quinze ans d’ancienneté,…

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Il a sa carte à la FSU ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Legendre. … et ce, malgré les efforts, trop récents sans doute, de l’ancienne majorité.

Cette révision de la rémunération serait bien plus qu’un simple ajustement. Il s’agirait pour les enseignants d’une reconnaissance de la valeur et de la difficulté de leur métier. Il faut améliorer l’attractivité de cette profession, car la réussite des élèves dépend avant tout de la qualité des enseignants.

Ensuite, vous ne dites pas où vous trouverez le financement de ces postes.

Deux solutions se présentent à vous : soit vous augmentez les charges de l’État, ce qui sera difficilement tenable en cette période, soit vous prenez le risque de déséquilibrer les effectifs de la fonction publique.

M. Jean-Louis Carrère. Non, puisque le Gouvernement les supprime dans l’armée ! (Sourires.)

M. Jacques Legendre. Il faudra bien supprimer des postes ailleurs, puisque le nombre de fonctionnaires est censé dans le même temps ne pas augmenter. N’est-ce pas, monsieur le président de la commission des affaires étrangères et de la défense ? (M. Jean-Louis Carrère opine.)

Enfin, et surtout, votre postulat de départ, à savoir que la réussite des élèves serait liée au nombre d’enseignants, ne répond à aucune donnée reconnue. Les études internationales mesurant les écarts existant entre pays montraient déjà que ceux qui obtiennent les meilleurs résultats ne consacraient pas autant de moyens que la France à l’encadrement des élèves. Nous disposons maintenant d’un avis très récent : lors de l’examen du texte en première lecture, la Cour des comptes a publié un rapport édifiant sur la gestion des enseignants, venant totalement contredire les choix du Gouvernement.

Selon la Cour des comptes, les résultats insatisfaisants que nous connaissons proviennent non pas d’un manque de moyens budgétaires ou d’enseignants, mais d’une utilisation défaillante des moyens existants.

M. Jacques-Bernard Magner. Elle a jugé votre gestion !

M. Jacques Legendre. La Cour des comptes recommande précisément ce dont je viens de parler : une réforme d’ensemble des modalités de gestion des personnels enseignants, revoyant leurs obligations réglementaires de service, la valorisation des ressources humaines et leurs conditions d’affectation.

M. Jacques-Bernard Magner. Elle a jugé le bilan de M. Sarkozy !

M. Jacques Legendre. On aurait pu croire que la publication du rapport amènerait le Gouvernement à revoir sa copie. Or vous maintenez le cap que vous avez fixé, sourd aux avertissements, quand bien même ils proviennent d’une institution reconnue pour la qualité de ses travaux et son impartialité.

Certes, l’exercice de remise en question est difficile, surtout lorsqu’il s’agit d’une promesse électorale, mais en refusant de prendre en compte les avis de spécialistes, vous montrez à quel point la politique du Gouvernement est en décalage par rapport aux réalités du terrain. (M. Jean-Louis Carrère s’esclaffe.)

Quant aux autres dispositions du projet de loi, elles visent surtout à remettre en cause les choix de la majorité précédente. Ainsi, je relève l’affirmation du collège unique, alors que le maintien d’élèves en difficultés dans une voie généraliste est un véritable gâchis. L’enjeu, aujourd’hui, n’est plus la massification, mais bien la personnalisation de l’enseignement.

Par ailleurs, l’un de vos choix me désole particulièrement. Je veux parler de la suppression des internats d’excellence.

M. Vincent Peillon, ministre. Ce n’est pas l’avis de la Cour des comptes ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et au banc de la commission.)

M. Jacques Legendre. Samedi dernier encore, j’étais, monsieur le ministre, dans la région du Nord, plus précisément à Douai, une ville dotée d’un internat d’excellence. J’y ai rencontré des enseignants, toute une équipe mobilisée et désespérée à l’idée que cette expérience de maintenant trois années ne serait pas poursuivie. Certes, il s’agit d’une action coûteuse, mais elle se fait au bénéfice de jeunes particulièrement défavorisés et en difficultés.

M. Jacques-Bernard Magner. Elle bénéficie à très peu de jeunes !

M. Jacques Legendre. Je m’inquiète également de la dilution des matières, quand il faudrait plutôt renforcer le socle des connaissances et des compétences. De plus, ce dernier sera défini par décret et non par la loi. C’est pourtant un élément essentiel, une colonne vertébrale de notre système éducatif. Il serait donc légitime que sa définition soit établie au Parlement.

Je n’approuve pas non plus l’isolement de la maternelle au sein d’un cycle unique, alors qu’il faudrait ouvrir davantage la dernière année de grande section à l’apprentissage de la lecture, en la rapprochant du CP de l’école primaire.

Je note, par ailleurs, que nous devons nous prononcer sur une formation des enseignants dont nous ne connaissons pas le contenu réel, ce qui fait craindre la réapparition des défauts des anciens IUFM.

Je relève enfin une remise en cause du système de notation et des devoirs à la maison, dans un souci d’égalitarisme systématique.

Les mesures dont je viens de parler ne sont pas des mesures de « refondation » de l’école. Pour que votre texte soit un texte d’ampleur, il aurait fallu moins d’idéologie et moins de rigidité.

Ainsi, le projet de loi ne prévoit rien pour accroître l’autonomie des établissements, qui est pourtant une question essentielle. Rien n’est dit sur la création d’un statut des directeurs d’école, par exemple. Or ce n’est qu’en introduisant davantage de souplesse et en permettant des expérimentations évaluées que notre système éducatif pourra progresser.

Bien d’autres sujets n’ont pas été traités. Et lorsqu’ils ont été évoqués, dans la longue liste du rapport annexé, aucun contenu n’est venu leur donner une direction concrète. Votre projet de loi est insuffisant en ce qui concerne la réforme de l’orientation, de l’apprentissage, les liens entre l’école et l’entreprise ou l’équilibre des filières du baccalauréat. Ce texte sera décidément à revoir ou à compléter.

Le budget de l’éducation est le plus important de l’État. Lui donner une mauvaise orientation serait extrêmement dommageable pour la réussite des élèves et la progression du système éducatif. En conséquence, vous ne serez pas étonné, monsieur le ministre, que le groupe UMP vote contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture a connu peu de modifications par rapport à celui qui était issu de nos travaux en première lecture au Sénat. Cela doit être salué, même si je regrette que la priorité à l’utilisation de logiciels libres, votée à l’article 10 sur notre initiative, ait été amoindrie par un amendement du Gouvernement.

Pour le reste, les modifications que nous avions obtenues ont été maintenues.

Ainsi, notre combat pour privilégier une coopération État-régions plutôt qu’une mainmise des régions sur la carte des formations professionnelles initiales prévue dans le projet de loi a rencontré un début de succès, puisque cette carte sera déterminée non par la seule région, mais après accord du recteur. Vous devrez donc être, monsieur le ministre, via les recteurs, le garant de l’égalité de traitement sur le territoire, le garant que l’enseignement professionnel ne sera pas instrumentalisé à des fins de seule employabilité, ni concurrencé par l’apprentissage que le Gouvernement entend par ailleurs promouvoir davantage.

Nous avons aussi obtenu le retrait par le Gouvernement de deux mesures issues du projet de loi de décentralisation, confiant à la région la définition et la mise en œuvre du service public de l’orientation tout au long de la vie. Ce débat, nous le savons, reviendra au moment de l’examen du projet de loi de décentralisation consacré aux régions, et pour notre part, nous livrerons de nouveau bataille.

En ce qui concerne le socle commun, il est désormais précisé que ce dernier « doit permettre la poursuite d’études, la construction d’un avenir personnel et professionnel ». La suppression de la référence aux compétences-clefs européennes n’a pas été réintroduite. Ces disposions créent une première brèche dans la conception utilitariste et minimaliste du socle. Il s'agit d’une évolution modeste, mais sur laquelle nous pourrons nous appuyer pour exiger que le socle, qui va être redéfini, ne soit pas ramené à sa version minimaliste et utilitariste.

Nos propositions sur les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, ont été maintenues, notamment celle qui consiste à leur confier la nouvelle mission de « préparer les enseignants aux enjeux de l’entrée dans les apprentissages et à la prise en compte de la difficulté scolaire dans le contenu des enseignements et la démarche d’apprentissage ».

Comme je l’ai indiqué la semaine dernière lors du débat sur le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et la recherche, la mise en place des ESPE nous inquiète. Les craintes que suscitent la nouvelle procédure d’accréditation et la réalité des moyens en personnels de formation qui leur seront réellement accordés pour fonctionner n’ont pas été levées.

Nous serons également vigilants quant à l’effectivité de cette mission de formation, initiale et continue, pour déjouer l’échec scolaire, que nous avons fait introduire. Cette mission est pour nous tout à fait essentielle dans la réalisation du « tous capables ».

Cette inscription du « tous capables » dans la loi et dans le code de l’éducation a été possible grâce au travail de conviction et à la bataille, qui n’était pas gagnée d’avance, que nous avons menée de concert avec notre rapporteur, Mme Cartron.

Le débat a donné à voir la construction positive d’un travail parlementaire à gauche, chose assez rare pour être soulignée. Il a permis d’éclairer les postures des uns et des autres.

Non, l’échec scolaire n’est pas une fatalité et les différences entre les élèves sont non pas naturelles, mais socialement construites. Si ce débat nous a permis de faire avancer le principe du « tous capables », pour trouver sa plénitude, celui-ci devrait, selon nous, s’accompagner d’une transformation de l’ensemble du système éducatif.

En effet, le défi qui se pose à notre société, donc à l’école et à un service public national capable d’y répondre, c’est celui de la transformation du rapport aux savoirs, afin de répondre à l’exigence d’élévation des connaissances pour tous et toutes. Ce fut notre boussole tout au long du travail que nous avons mené sur ce projet de loi.

Or comment y répondre sans une relance véritable du processus de démocratisation scolaire ? Si tous les élèves sont capables d’apprendre et de réussir, il nous faut alors transformer en conséquence le service public national d’éducation, seul garant de l’égalité territoriale.

Ce fut le sens des autres propositions que nous avons défendues dans ce débat : allongement de la scolarité obligatoire de trois ans à dix-huit ans ; culture commune ambitieuse pour tous les élèves ; orientation moins précoce, enfin déconnectée de l’échec ; réelle refondation et revalorisation du métier des enseignants, qui redonne à ces derniers prise sur leur travail en leur accordant les moyens de faire évoluer leur pratique afin d’assurer la réussite de tous les élèves ; service public national renforcé, garant de l’égalité d’accès aux savoirs sur tout le territoire face au poids toujours croissant des inégalités territoriales, qui affectent lourdement la réussite des élèves. Si nous ne sommes pas hostiles à des partenariats, ceux-ci ne doivent pas servir de paravent à un désengagement de l’État et ou à une avancée du privé.

Ainsi, le rappel à l’ordre du Conseil d’État quant au projet de décret assouplissant les taux d’encadrement en centres de loisirs dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires doit être entendu.

Si ces exigences que nous avons portées n’ont pas trouvé d’écho favorable, nous les avons mises en débat. Elles demeurent et se poseront rapidement avec encore plus d’acuité, compte tenu du défi incontournable d’élévation des connaissances qui est lancé à notre société, ainsi que je le soulignais à l’instant.

Qui plus est, la rentrée s’annonce une nouvelle fois difficile, avec des effectifs en hausse et des suppressions de postes qui se font toujours sentir et qui sont loin d’avoir été résorbées. À cet égard, je partage les propos tenus tout à l'heure par Thierry Foucaud, car je reçois les mêmes informations dans l’académie où se trouve mon département.

L’épreuve de vérité se fera au moment de l’examen du budget. Le vote que nous émettrons sur ce texte en deuxième lecture n’est donc pas un blanc-seing accordé à la politique éducative du Gouvernement. Nous saurons à tout moment vous le rappeler, monsieur le ministre, mais je pense que vous n’en doutez guère !

Vous l’aurez compris, ce texte n’est pas, pour nous, celui d’une refondation, et il nous laisse encore une impression d’inachevé. Notre groupe devrait cependant émettre, à l’issue de cette deuxième lecture, un vote positif, mais qui sera assorti d’exigences, donc d’une grande vigilance. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons cet après-midi l’examen en deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, et je souhaite associer ma collègue Catherine Morin-Desailly à mon intervention.

Monsieur le ministre, à l’énoncé de cet intitulé, nous pouvions fonder de grands espoirs. Les chances de réussite devraient être les mêmes pour tous et sur tout le territoire, et c’est bien dès le primaire que tout se joue. Les écarts sont encore trop grands aujourd’hui. Pis, ils s’aggravent.

En tout premier lieu, permettez-moi de revenir sur ce que prévoit l’article 7 concernant le socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Celui-ci est pour nous la base permettant de progresser, de s’insérer dans la société ainsi que dans la vie professionnelle. C’est une priorité, qui aurait dû être définie par le législateur. Un texte réglementaire ne suffit pas.

L’acquisition de ces fondamentaux est la base de toute réussite. Je tiens à rappeler à ce titre combien je regrette le manque d’ambition du texte concernant la lutte contre l’illettrisme, pourtant reconnue grande cause nationale cette année.

La première mission de l’école, c’est bien d’apprendre à lire et écrire. Or, dans les faits, un nombre croissant d’élèves décroche et quitte le système scolaire sans formation, sans diplôme. Ce sont autant de jeunes qui viennent augmenter les chiffres du chômage, lequel ne cesse de battre de bien tristes records. Quelles sont les chances, aujourd’hui, d’obtenir un emploi sans qualification ?

C’est pourquoi, face à ces constats, je ne comprends pas le parti qui a été pris, notamment quant à l’apprentissage et la formation professionnelle.

L’apprentissage en France, aujourd’hui, ce sont 420 000 apprentis, plusieurs centaines de spécialités de formations donnant accès à 510 activités artisanales. J’ajoute que 80 % des apprentis trouvent un emploi dans leur métier et qu’un chef d’entreprise artisanale sur deux est issu de l’apprentissage. Il s’agit bien là d’une filière d’excellence. Son taux d’insertion professionnelle après l’obtention d’un diplôme en est la meilleure preuve et montre les qualités et la motivation de tous ces jeunes.

Je déplore encore une fois que la place qui lui est accordée dans le système éducatif français soit aussi injuste et peu importante au regard de ses performances, alors que, au final, les jeunes qui choisissent cette filière font partie de ceux qui, aujourd’hui, trouvent un emploi.

La semaine de l’apprentissage organisée par les chambres de commerce et d’industrie de France a eu lieu à la mi-juin dernier, il y a donc quelques jours seulement. À cette occasion, un sondage IFOP-CCI France-RMC a révélé que 55 % des 15-25 ans sont intéressés par une telle formation et que, globalement, l’image de l’apprentissage est très positive auprès des jeunes et de leurs parents.

Alors même que se déroulaient au Sénat les treizièmes rencontres de l’apprentissage, vous avez fait voter, monsieur le ministre, des dispositions qui ne permettront plus aux jeunes en quatrième d’avoir des enseignements complémentaires les préparant à des formations professionnelles. Vous êtes également revenu sur les dispositifs de la loi Cherpion, avec la suppression du préapprentissage et, plus précisément, du dispositif d’initiation aux métiers en alternance, le DIMA, à quatorze ans.

Sur ce point d’ailleurs, une zone d’ombre persiste pour ceux qui ont acquis le socle commun à la fin de la troisième et qui auront quinze ans à la fin de l’année civile.

M. Jacques Legendre. Tout à fait !

Mme Françoise Férat. Tout comme mon collègue Jean-Claude Merceron, sénateur de la Vendée, j’ai été interpellée sur cette question. Il est indispensable de maintenir au moins la possibilité pour un jeune qui le souhaite, au sortir de la troisième, et qui, je le répète, a acquis le socle commun, d’entrer en formation par apprentissage. Aujourd’hui, un élève qui aurait quinze ans dans l’année civile peut perdre un an de cursus. La rédaction actuelle du projet de loi ne permet pas de pallier cette difficulté.

Lorsque j’ai évoqué ce problème au cours des débats en première lecture, la ministre George Pau-Langevin avait précisé : « En pratique, si un jeune de quatorze ans trois quarts a acquis le socle commun, on peut envisager des assouplissements. Mais, en l’état, il ne me semble pas utile de le mentionner dans la loi. »

Pouvez-vous me confirmer aujourd’hui, monsieur le ministre, que les jeunes ayant acquis le socle commun à la sortie de la classe de troisième et qui auront quinze ans au cours de l’année civile pourront effectivement entrer en formation par apprentissage et ne perdront pas ainsi une année précieuse ? C’est une année durant laquelle nous prendrions le risque de les voir décrocher, car ils seraient alors empêchés de s’épanouir dans une voie qu’ils auront pourtant bel et bien choisie ! Obliger un élève à aller en classe de seconde dans ces conditions serait contre-productif, et nombre de familles sont dans l’attente de cette précision.

Nous nous accordons tous sur la nécessité que l’orientation soit choisie et non subie. Or elle est la grande absente de ce texte, tout comme d'ailleurs du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur. Nous mesurons le manque à tous niveaux, alors même que c’est l’un des piliers de la réussite.

Ce texte, hélas ! soulève bien d’autres problèmes ! Il ne permettra malheureusement pas de remédier aux manques de notre système scolaire.

Je ne doute pas que les intentions qui ont présidé à son élaboration aient été bonnes, mais, pour pouvoir réaliser une réforme d’envergure, il faut étudier les problèmes dans leur ensemble et éviter l’écueil de la précipitation. Un temps de concertation aurait permis d’aboutir à un texte plus complet et surtout plus efficace.

Comme je l’ai déjà dit en première lecture, ce projet de loi n’est pas à pas la hauteur de ses ambitions. Le rapport de mai dernier de la Cour des comptes ne contredira pas mes propos. Ses auteurs préconisent en effet de redéfinir le métier d’enseignant, de mieux valoriser les ressources humaines, d’affecter les enseignants en fonction de la réalité des postes et des projets d’établissement, enfin, d’assurer une gestion de proximité. Nous sommes loin du compte aujourd’hui.

La priorité financière donnée à notre système éducatif ne nous permet pas d’enrayer la baisse du niveau des élèves. Les solutions ne sont pas seulement d’ordre budgétaire. Les moyens sont suffisants, mais leur utilisation n’est pas optimisée.

Je finirai mon intervention en évoquant la place accordée par le projet de loi aux collectivités territoriales. Acteurs majeurs de l’éducation, les élus ne sont pas seulement des payeurs ; ils doivent être également des codécideurs. Une meilleure implication des municipalités assurerait une meilleure intégration des élèves dans la vie de la cité. Car n’est-ce pas également le rôle de l’école ?

J’illustrerai mon propos par un seul exemple : la réforme des rythmes scolaire. Vous ne pouviez pas y échapper, monsieur le ministre !

M. Vincent Peillon, ministre. Vous non plus !

Mme Françoise Férat. Je regrette que celle-ci soit absente de ce texte. Elle s’est faite sans réelle concertation ; elle n’a même pas été débattue devant le Parlement et a été imposée aux collectivités.

M. Jean-Michel Baylet. Ce n’est pas vrai !

Mme Françoise Férat. Nous n’avons pas les mêmes sources de renseignement, monsieur Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Moi, je suis sur le terrain !

Mme Françoise Férat. Malgré une réelle bonne volonté, nombre d’entre elles auront les plus grandes difficultés à assumer cette évolution, sur un plan tant financier que pratique, particulièrement en zone rurale. Son faible taux d’application à la prochaine rentrée scolaire en témoigne. Mal évaluée, cette mesure sera créatrice d’inégalités entre les territoires, qui ont été mis devant le fait accompli.

En conclusion, je ferai remarquer que la Haute Assemblée aura, en moins d’une semaine, balayé, en plus d’un sens, deux projets de loi qui ont pour ambition de réformer tout notre système éducatif, de la maternelle au doctorat. Cela représente un parcours qui commence à l’âge de 2 ans et se termine à 26 ou 28 ans. Un quart de siècle d’une vie réformé en une semaine !

Tout cela s’est fait en si peu de temps et avec si peu de concertation... La cause n’aurait-elle pas mérité plus d’échanges et de dialogue ?

Encore une fois, avec mes collègues du groupe UDI-UC, nous ne pouvons que regretter ces constats. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Baylet.

M. Jean-Michel Baylet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si l’examen par le Sénat en deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école devait s’apparenter à une année scolaire, nous pourrions dire que nous entamons aujourd’hui le dernier trimestre. (Sourires.)

Monsieur le ministre, tous vos prédécesseurs rue de Grenelle ont clamé leurs ambitions pour l’école. Celles-ci, très souvent grandioses, ont cohabité, dans un passé récent, avec des moyens toujours plus limités. C’est ainsi que près de dix ans après le vote de la dernière grande loi sur l’école, l’échec scolaire n’a pas disparu – il n’a même pas été réduit ! Dans le même temps, les inégalités sociales et territoriales se sont, elles, creusées.

En première lecture, nous avons été nombreux, y compris – je leur en donne acte – sur les travées de l’opposition, à dresser l’état des lieux d’une école qui n’était plus en mesure de mener à bien ses missions. Notre collègue Jean-Claude Carle soulignait que « chaque année, notre école est plus inéquitable et plus inefficace ». Colette Mélot dressait, quant à elle, le constat que « l’école du XXIe siècle est en crise dans notre pays ».

Vous me connaissez, je ne nourrirai pas la polémique sur la paternité des renoncements qui nous ont conduits à la situation actuelle, mais je soulignerai que le volontarisme affiché et les moyens mobilisés par le Gouvernement, faisant de l’éducation une priorité du quinquennat, constituent une rupture salutaire avec le passé. Il y avait urgence, tant l’éducation nationale était au bord de l’implosion, avec des effectifs rognés, des enseignants déconsidérés et résignés et une formation tronquée.

Alors que nous abordons la deuxième lecture de ce projet de loi, d’aucuns feindront de s’interroger : ce texte est-il irréprochable ? Je sais, de ma longue expérience parlementaire, que la perfection ne se trouve jamais dans un texte de loi, et celui-ci ne déroge pas à la règle. Fruit d’une longue concertation avec les différents acteurs du monde de l’éducation, il a été soumis au Parlement qui, au gré des lectures successives, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, l’a amélioré. C'est un texte de compromis, pragmatique.

Les radicaux auraient souhaité que soit retenu un de leurs amendements sur les regroupements pédagogiques en direction des communes ne faisant partie ni d’un regroupement pédagogique intercommunal ni d’un EPCI exerçant la compétence scolaire.

Nous soutenons néanmoins les nombreuses avancées permises par ce texte. Nous demeurerons attentifs au pilotage et à la mise en œuvre des objectifs fixés. On ne le dira jamais assez, l’une des principales dispositions de ce projet de loi – sinon la principale avec l’annonce de la création de 60 000 postes,…

M. Michel Billout. Avec quels moyens ?

M. Jean-Michel Baylet. … qui mérite d'ailleurs d’être rappelée, et même mise en avant – concerne la formation des enseignants. Elle fut lentement déconstruite ces dernières années, avec une mastérisation ratée.

On en était arrivé à une situation dans laquelle les personnes qui étaient chargées de transmettre un enseignement n’en recevaient pas elles-mêmes pour les préparer à leur belle et noble mission. Être enseignant, mes chers collègues, c’est être pédagogue, et cela s’apprend ! En cela, la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation constitue un progrès indéniable. Ces dernières devraient être opérationnelles à la rentrée de septembre prochain.

Monsieur le ministre, vous profiterez sans doute de l’examen de ce projet de loi pour nous exposer les modalités, que nous aimerions connaître, de ce déploiement.

La polémique entourant la question de la refonte des rythmes scolaires, que nous évoquions à l’instant, a au moins permis de mettre en lumière le rôle clef joué par les collectivités territoriales dans notre système éducatif, qu’il s’agisse des communes, pour l’école primaire, ou des départements et des régions, pour l’enseignement secondaire. Nos collectivités s’investissent et investissent dans l’éducation, pour peu que leurs élus veuillent se donner la peine de faire et de bien faire.

La réussite de cette réforme dépendra donc également du partenariat entre l’éducation nationale, le mouvement sportif et associatif, et les collectivités territoriales dans la coproduction d’offre scolaire et périscolaire, sur l’ensemble du territoire. Dans cette perspective, monsieur le ministre, nous avons pris connaissance du projet de décret encadrant le fonds d’amorçage pour la réforme des rythmes scolaires dans le premier degré, en application de l’article 47 du projet de loi.

Vous le savez, cette réforme suscite des inquiétudes chez les maires, notamment de petites communes. Pouvez-vous informer notre assemblée des modalités d’attribution du fonds, du montant de l’enveloppe qui y est consacrée et de la manière dont ce fonds sera abondé ?

Lors de mon intervention en prélude à l’examen du texte en première lecture, je mobilisais – l’école en vaut la peine ! – certaines figures du Panthéon radical : Alain, Jean Zay ou Ferdinand Buisson. (M. Gérard Longuet s’exclame.)

Mes références seront aujourd’hui plus modestes, et je me bornerai à me féliciter que les amendements déposés par notre groupe et adoptés par le Sénat en première lecture aient été repris par l’Assemblée nationale. Parmi ces seize amendements, plusieurs ont, à nos yeux, une importance particulière.

C’est le cas de l’inscription de la lutte contre les inégalités territoriales au sein des missions du service public de l’éducation. C’est également le cas du renforcement de la place des parlementaires au sein du Conseil supérieur des programmes, qui permettra au Parlement d’être mieux représenté dans cette instance.

Je citerai également parmi ces améliorations notoires l’inscription dans le code de l’éducation de la lutte contre l’innumérisme, le développement d’une politique de promotion de la culture scientifique et technologique, mais aussi la nécessité de réformer l’aide aux enfants en difficulté et le renforcement indispensable des RASED. La mise en œuvre de cet amendement permettra de rendre l’école plus inclusive.

En deuxième lecture, l’Assemblée n’a que peu modifié le texte voté le 24 mai dernier par le Sénat. Sur les 26 amendements adoptés, nombre sont des ajustements rédactionnels. Je salue toutefois l’adoption de celui, symbolique, qui tend à ajouter le drapeau européen au drapeau français sur le fronton des établissements.

M. Gérard Longuet. Si M. Montebourg accepte ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Baylet. Lors de l’examen en deuxième lecture, la commission des affaires culturelles s’est félicitée de l’équilibre atteint entre les deux chambres du Parlement et a estimé que le texte ne nécessitait pas de retouches. Je tenais, à ce stade, à remercier Mme le rapporteur, Françoise Cartron, de son implication, qui a permis un travail parlementaire rigoureux.

Sans modifier l’équilibre général du texte, notre groupe défendra toutefois quelques améliorations au rapport annexé, notamment pour rappeler et renforcer la liberté pédagogique des professeurs et assurer la présence enseignante dans les départements ruraux.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ensemble des sénateurs radicaux de gauche et la quasi-totalité des membres du RDSE apporteront leur voix à la refondation de l’école.

Ils agiront ainsi pour les raisons que je viens d’évoquer, mais aussi parce que ce texte institue un nouvel enseignement civique et moral, qui sera laïque, c’est-à-dire émancipateur.

Parce qu’il accorde une place essentielle à l’orientation, afin que celle soit choisie et non plus subie.

M. Jean-Michel Baylet. Parce qu’il prévoit la création du service public du numérique éducatif.

Parce qu’il répond à l’ambition de fonder l’école du XXIe siècle, lieu de transmission des savoirs et creuset des valeurs républicaines.

Enfin, parce qu’il contribue, et il était temps, à rendre à la jeunesse de notre pays, qui en a bien besoin, l’espoir en l’avenir ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’école doit être l’affaire de tous, et non de quelques spécialistes qui auraient légitimité pour parler alors que les autres écouteraient.

Nous voudrions commencer par souligner, à l’instar de Mme Gonthier-Maurin, le bon esprit qui a présidé à nos travaux : toutes les sensibilités ont pu être entendues et toutes les paroles ont été prises en compte, bien évidemment à des degrés divers.

Aujourd’hui, nous sommes saisis en deuxième lecture du projet de loi dit « de refondation de l’école de la République ». Nous sommes satisfaits que la rédaction issue des travaux du Sénat en première lecture ait été conservée.

Nous avons partagé largement les constats suivants : notre école ne va pas bien, elle va même parfois assez mal ; il faut faire face au phénomène du décrochage scolaire ou des élèves « décrochés » ; le troublant problème de l’ennui à l’école s’aggrave.

Nous avons essayé d’œuvrer collectivement en faveur d’une autre école, d’une école de l’écoute, de la bienveillance, qui éduquerait à la coopération plutôt qu’à la compétition. Nous l’avons déjà dit ici, nous souhaiterions une école qui promeuve la résolution non-violente des conflits avec des adultes formés à ces techniques.

Nous appelons de nos vœux une école qui sensibilise à la rareté et à la finitude des ressources par l’éducation à l’environnement ; une école qui s’adresse à tous les élèves, quels que soient leur milieu social et leur origine, et qui prenne en compte toutes les diversités ; une école où tous et toutes seront reconnus.

Nous avons aussi pu faire entendre que les parcours artistiques donnaient tout son sens à une véritable éducation artistique.

Nombre de nos amendements, fruits de débat engagés et parfois animés, ont été confirmés par l’Assemblée nationale, C'est la preuve que le travail et le dialogue entre les deux chambres sont non seulement nécessaires et utiles, mais également extrêmement précieux.

Nous avons bien avancé sur un grand nombre de points, mais il faut reconnaître qu’il s’agit seulement ici d’un début de refondation de l’école. En dépit des limites du texte, que nous avions déjà signalées – mais nous savons qu’il est très difficile de réformer l’école –, ce commencement est une impérieuse nécessité.

Le chantier est immense, et les acteurs nombreux ; les intérêts convergent lorsqu’il s’agit de parler de la réussite des élèves et divergent parfois quand on évoque le rythme de vie de chacun. Un cap est maintenant fixé et, même si ce n’est pas à 100 % l’école rêvée des écologistes, il faut reconnaître que les choses vont incontestablement dans le bon sens.

Selon nous, l’une des questions cruciales est celle de la formation des enseignants, qui fut sacrifiée ces dernières années. Il faut que les écoles supérieures du professorat et de l’éducation soient des lieux structurés et vivants, qui doivent donner un nouveau souffle à la formation de nos enseignants. Enseigner est un métier qui s’apprend, et pas seulement une vocation.

Nous savons que le calendrier sera extrêmement difficile à respecter, comme cela a été dit en réponse à une question de Marie-Christine Blandin lors des questions d’actualité. Toutefois, nous attirons votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de prendre en compte tout ce qui est actuellement dans le texte de loi pour l’intégrer dans les maquettes des ESPE dès la rentrée prochaine.

Un autre point nous tient particulièrement à cœur : la formation continue des enseignants. À cet égard, nous nous étions interrogés ici même, au Sénat, et sommes très contents que les députés aient, à l'unanimité, via un amendement, adopté une nouvelle rédaction indiquant, d'une part, que chaque enseignant est encouragé à se former régulièrement, et, d'autre part, qu’une offre de formation continue adaptée aux besoins des personnels d’enseignement est proposée, notamment par le biais des écoles supérieures du professorat et de l’éducation.

C’est là un sujet qui nous tient particulièrement à cœur, même si nous ne méconnaissons pas les problèmes de remplacement et d'organisation qu’un tel dispositif peut poser. Son importance est majeure dans tous les départements et tous les territoires.

Ensuite, il nous paraît nécessaire de dispenser une formation continue de qualité pour les enseignants tout au long de leur carrière. Nous estimons que les échanges de pratiques entre enseignants expérimentés, enseignants débutants et formateurs aguerris sont extrêmement fructueux.

Enfin, il nous semble particulièrement important que les enseignants en exercice puissent bénéficier de formations sur la gestion non violente des conflits, ainsi que, notamment, sur le travail de groupe et l'interdisciplinarité – trois impératifs qui nous tiennent très à cœur.

Parmi les nouveaux apports à ce texte, l’Assemblée nationale a adopté un amendement écologiste tendant à inscrire la formation et la scolarisation d'élèves handicapés dans les missions des ESPE, les écoles supérieures du professorat et de l’éducation. Nous nous en réjouissons, car il s'agit là d'un signal fort adressé à ces élèves en situation de handicap, à leurs familles et aux enseignants qui vont les accompagner.

À ce titre, nous ne pouvons que saluer l'annonce de la création de 8 000 postes à la rentrée pour accompagner ces enfants en situation de handicap. Ils permettront, selon nous, d'aller vers une école plus inclusive.

Malheureusement, notre modèle reste très éloigné des pratiques nordiques et, vous le savez comme moi, mes chers collègues, nombre de parents ont du mal à trouver une place dans l'école publique pour leurs enfants en situation de handicap, dont beaucoup restent déscolarisés. Selon nous, il s'agit ici d'un des problèmes à régler prochainement.

Quoi qu'il en soit, nous voulons préserver, en deuxième lecture au Sénat, l'équilibre acquis par ce texte et nous espérons que la loi qui s'ensuivra donnera un nouveau souffle, pour une école de la réussite, de la coopération et de la bienveillance.

Enfin, pour en venir à la lecture que vous avez faite, monsieur Legendre, du rapport de la Cour des comptes, il se trouve que nous n’avons pas tout à fait la même interprétation de ce document. Nous insistons sur un point particulièrement important : la question des jeunes enseignants, qui sont envoyés dans les postes les plus difficiles, alors que l’on affecte les plus expérimentés, déjà solides, dans des zones a priori moins difficiles.

Se pose alors une question primordiale, à laquelle il faudra réfléchir : comment concilier, à l'avenir, les statuts des personnels et les évolutions qui apporteraient plus de justice pour tous les élèves ?

Malgré les imperfections que nous avons signalées, malgré ses lacunes et même s'il ne s'agit pas d'une loi écologiste à 100 %, nous voterons ce texte, qui va dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.

M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la première lecture du projet de loi d’orientation et de programmation de l’école a donné lieu à près de 32 heures de débat en séance au Sénat. Deux motions ont été déposées par l'UMP – question préalable et renvoi en commission –, qui, heureusement, n’ont pas été adoptées, sans quoi nous ne débattrions pas aujourd'hui.

M. Gérard Longuet. Nous débattrions d’autre chose !

M. Jacques-Bernard Magner. Avec plus de 1 000 amendements déposés en commission ou en séance, tous groupes confondus, ce sont à des discussions très approfondies que se sont livrés les sénateurs durant quatre jours et quatre nuits. Plus de 260 amendements ont été adoptés, parmi lesquels un grand nombre ont été portés par l'opposition.

Pourtant, les débats ont mis en évidence deux conceptions très divergentes, voire opposées, de l’école, en particulier sur le rôle de la maternelle et la préscolarisation, sur le collège unique, sur l’âge d’entrée en apprentissage et l’étendue de la scolarité obligatoire ou encore, tout simplement, sur la pédagogie.

Grâce au travail d’enrichissement du texte et de dialogue approfondi engagé par Mme la rapporteur Françoise Cartron, la majorité de gauche a su s’unir pour porter une réforme phare du quinquennat de François Hollande, concrétisant ainsi la priorité accordée à la jeunesse par le Gouvernement.

Françoise Cartron l’a encore souligné aujourd'hui : le Sénat a pleinement joué son rôle « en apportant sa pierre, ou, plutôt, ses multiples petites pierres, en vue d’améliorer le projet de loi qui était porté par le Gouvernement ».

Les principes fondamentaux de l’éducation ont été réaffirmés par la création d’un article 3 A, qui fixe de grands objectifs, tels que la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de réussite, la mixité sociale et l’égale dignité des êtres humains. Cette disposition met également l’accent sur la participation des parents, en vertu du principe de coéducation. La notion d’éducabilité de tous a été ajoutée. Par ailleurs, il a été mentionné que le système éducatif favorise la coopération entre élèves.

La commission a rétabli le principe de l’accord des parents pour la mise en œuvre de dispositifs d’aide en faveur des élèves en difficulté.

Pour lutter contre l’orientation subie, Mme la rapporteur a inscrit dans la loi la possibilité d’expérimenter l'attribution aux parents, ou à l’élève majeur, de la décision d’orientation en fin de troisième. Un bilan annuel des actions menées dans les collèges et les lycées à destination des parents d’élèves a également été prévu, tandis qu’un espace sera dédié aux parents au sein des établissements, pour qu’ils s’approprient les locaux scolaires. L’information des parents et l’aide au suivi de la scolarité de leur enfant font désormais partie intégrante des missions des enseignants.

Toujours sur l’initiative de Mme la rapporteur, un même secteur de recrutement pourra être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains, afin de favoriser la mixité sociale.

Avec les articles 5 et 30, les enfants de moins de trois ans seront comptabilisés pour les prévisions d'effectifs d'enseignants des écoles qui les scolarisent, ce qui était réclamé depuis longtemps.

Par ailleurs, avant toute affectation à l'école maternelle, les enseignants, y compris ceux qui sont déjà en poste, devront bénéficier d’éléments spécifiques de formation, afin de mieux s’adapter aux besoins des plus jeunes enfants et de favoriser leur mobilité entre les niveaux d’enseignement. Ainsi, il a été précisé que la formation dispensée en maternelle s’attache à développer l’envie et le plaisir d’apprendre pour devenir un élève.

Mme la rapporteur pour avis des affaires sociales, Claire-Lise Campion, a été, pour sa part, à l’origine de plusieurs amendements tendant à donner corps au principe de l’école inclusive porté par le projet de loi.

Un amendement a été voté afin de prendre en compte les projets linguistiques des élèves sourds et de leurs familles et de favoriser leur parcours scolaire selon le mode de communication que ces dernières auront choisi.

L’un des apports majeurs de notre groupe a été l’enrichissement des dispositions du projet de loi concernant la santé scolaire.

La notion de parcours de santé autour des visites médicales et de dépistage obligatoires a été introduite. La périodicité et le contenu des bilans de santé obligatoires seront désormais fixés conjointement par les ministères de l’éducation nationale et de la santé, pour plus de cohérence et d’effectivité.

Les missions de la promotion de la santé ont par ailleurs été complétées par la détection précoce des problèmes de santé ou de carences de soins, par l’accueil, l’écoute et le suivi individualisé des élèves, ainsi que par la participation à la veille épidémiologique.

Le Sénat a également renforcé le rôle et l’identité des ESPE, notamment en permettant aux acteurs de l’éducation populaire et aux associations agréées par l’éducation nationale de participer à la formation des futurs enseignants, mais aussi en intégrant des représentants de collectivités locales aux conseils des écoles.

Il a, en outre, renforcé la formation continue des enseignants, ainsi que celle, initiale et continue, des personnels d’inspection et de direction.

La place du sport a été affirmée dans le projet de loi : ont été inscrits dans le code de l’éducation la contribution apportée par le sport aux apprentissages, la complémentarité entre les pratiques sportives scolaires, périscolaires et extrascolaires, ainsi que les partenariats avec le mouvement sportif lui-même.

Le code de l’éducation mentionne désormais explicitement les associations éducatives complémentaires de l’enseignement public en tant que membres de la communauté éducative.

Le nombre des parlementaires membres du Conseil supérieur des programmes est passé de quatre à six. Ils seront désignés, à l’Assemblée nationale et au Sénat, par les commissions compétentes en matière d’éducation. Par ailleurs, il a été précisé que les membres du Conseil supérieur des programmes ne peuvent être simultanément membres du Conseil national d’évaluation du système scolaire. Il s'agit là d'ailleurs d’un apport de l'opposition.

Toujours sur proposition de Mme la rapporteur, le rapport annuel du Conseil national d’évaluation du système éducatif sera transmis aux commissions compétentes du Parlement et pourra donner lieu à un débat en séance publique. Les huit personnalités qualifiées que comprend cette instance seront nommées après avis des commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ; cette disposition résulte, là encore, d'un amendement porté par l'opposition. Le conseil pourra être saisi par ces mêmes commissions, au lieu des présidents des deux chambres.

Outre l’apprentissage d’une langue vivante étrangère dès le cours préparatoire, prévue par le texte, les sénateurs socialistes ont promu la notion de diversité linguistique, que ce soit par le biais des langues parlées au sein des familles ou au travers des langues régionales. Le recours à des pratiques pédagogiques spécifiques pour les élèves issus de milieux principalement créolophones a été étendu à ceux qui sont issus de milieux amérindiens.

Il a en outre été précisé que l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger assurait ses missions de service public de l’éducation en tenant compte des capacités d’accueil de ces établissements. Des amendements visant à favoriser le développement de filières technologiques et professionnelles sein du réseau de l’enseignement français à l’étranger, ainsi que les partenariats avec les pays tiers, ou bien encore une association plus étroite du ministère de l’éducation nationale aux missions de l’enseignement du français à l’étranger, ont été également adoptés.

Ce projet de loi a donc été approuvé, en première lecture, par tous les groupes de la gauche sénatoriale, qui se sont rassemblés pour porter, unis, la refondation de l’école de la République.

En deuxième lecture, à l’Assemblée nationale, l’équilibre général du texte issu du Sénat a été maintenu : si quelques modifications ont été apportées, elles ne changent pas le fond du texte. Il convient désormais de conclure nos débats et de voter conforme ce projet de loi afin que sa promulgation intervienne dans les plus brefs délais, de telle sorte que ce texte puisse être mis en œuvre très rapidement, dans la perspective de la rentrée 2013.

Je tenais enfin à vous féliciter, monsieur le ministre, et surtout à vous remercier d’avoir donné à notre école de la République cette loi fondatrice et porteuse d’un avenir pour la jeunesse de notre pays. Bien sûr, le groupe socialiste votera ce texte avec conviction et enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Colette Giudicelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux revenir sur la question de l’échec scolaire, qui est un problème récurrent. Nous n’avons jamais vu autant d’études ou de rapports émanant de l’OCDE ou de l'éducation nationale elle-même qui nous expliquent que nos enfants ont de graves lacunes.

On a le sentiment que chaque nouveau ministre de l'éducation nationale vient dresser le même diagnostic sur la situation scolaire dans notre pays, en présentant des solutions qui permettront de régler toutes les difficultés.

Or, année après année, nous nous rendons compte que notre système scolaire, en particulier l'enseignement primaire, est de moins en moins performant. Plus on parle d’égalité des chances, plus l’école s’enfonce dans un système incapable d’apprendre à nos enfants à lire, écrire et compter correctement !

Au cours de nos débats, nous avons tous rappelé que la France a l’un des plus importants taux d’échec des pays de l’OCDE en matière d’apprentissage de la lecture et de l’écriture. En effet, quatre élèves sur dix arrivent en sixième avec de graves lacunes en la matière.

Toutefois, cela fait bien plus de dix ans, monsieur le ministre, que l’OCDE nous alerte sur la chute du niveau scolaire. Cette tendance est confirmée par le rapport du programme international de recherche en lecture scolaire. Dans ce document, que j’ai consulté, il est écrit que « les élèves français sont toujours les plus nombreux à s’abstenir de répondre lorsque les réponses doivent être rédigées. Ils sont aussi les plus nombreux à ne pas terminer les épreuves ».

Monsieur le ministre, j’ai du mal à croire que la dégradation du niveau des élèves date seulement des dix dernières années, comme vous l'écrivez précisément dans l’annexe de votre projet de loi. Le mal dont souffre notre système éducatif est bien plus ancien, bien plus profond, et vouloir attribuer la responsabilité de cette situation aux majorités des dix dernières années n’est pas vraiment équitable.

La dernière enquête PISA de 2009 a porté sur des élèves nés en 1993. Or, de mai 1988 à mars 2002, qui étaient nos ministres de l’éducation nationale ? Lionel Jospin, puis Jack Lang, puis François Bayrou, puis Claude Allègre, puis, de nouveau, Jack Lang.

Or, avant la période des dix dernières années dont vous parlez, le niveau général des élèves en fin d’école primaire était déjà en chute libre, comme le constatait d'ailleurs une note d’alerte émanant des services statistiques du ministère de l’éducation nationale. La dégradation du niveau général n’est donc pas récente et, dans tous les cas, chaque Gouvernement a sa part de responsabilité dans ce diagnostic.

Vous avez donc raison, monsieur le ministre, de vouloir donner la priorité au primaire. En revanche, la solution réside-t-elle uniquement dans davantage de moyens humains ? Je ne crois pas que la réponse à toutes nos difficultés se limite à la question du nombre de professeurs. D’ailleurs, la Cour des comptes l'affirme, et l’OCDE le confirme.

Ce sont les questions de formation, de statut et de rémunération des maîtres qui sont déterminantes. Votre réforme aurait pu améliorer la qualité de l’encadrement et de la formation des professeurs, plutôt qu’accroître leur nombre.

Dans de nombreux pays, ce sont les étudiants les plus compétents qui sont incités à devenir enseignants, car ce rôle est essentiel. Or la vocation ne peut s’accomplir sans une reconnaissance forte, y compris d’un point de vue financier.

Je rappellerai simplement que, sous la précédente législature, une partie des économies qui ont été réalisées par le non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux a été réaffectée à l’augmentation du salaire des jeunes professeurs.

M. Vincent Peillon, ministre. Chère madame, ce n’est pas ce que dit l’OCDE.

Mme Colette Giudicelli. De plus, depuis la première lecture de ce projet de loi, la Cour des comptes a publié un rapport dans lequel elle rappelle que les enseignants appartiennent aux cadres de la fonction publique de l’État, c’est-à-dire aux catégories A et A+. Dans ce contexte, vous en conviendrez, leur rémunération paraît faible à plusieurs égards.

Certes, les enseignants du premier degré pourront bientôt recevoir une prime, qui devrait s’élever à 400 euros. Plusieurs chiffres ayant circulé à cet égard, pouvez-vous nous en préciser le montant définitif, monsieur le ministre ?

Je regrette en outre que le projet de loi n’évoque pas suffisamment la formation des maîtres, actant la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, dont on ignore complètement le contenu. On peut former le souhait qu’elles soient plus efficaces que les instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM.

La navette parlementaire a permis quelques avancées, qui doivent être évoquées : l’apprentissage précoce des langues vivantes étrangères, la promotion des langues régionales, la création d’un service numérique éducatif, la promotion de la santé comme droit à l’éducation ; c’est tout à fait positif.

Au moment même où le Parlement renforce le contenu des programmes, vous décidez malheureusement de supprimer le socle commun de compétences. Pourquoi la définition des compétences minimales est-elle reportée à un décret ?

Enfin, votre projet de loi fait l’impasse sur de trop nombreux sujets. Je regrette que des questions comme celles de l’autonomie des écoles ou des missions de leurs directeurs n’y figurent pas. Je déplore également que nombre de sujets relèvent du domaine réglementaire : la modification des programmes, la réforme du secondaire, l’évolution du métier d’enseignant…

Il en est ainsi des rythmes scolaires. Sur ce sujet, il faut reconnaître que cette réforme ne donne vraiment satisfaction ni aux élus locaux ni aux familles. En réalité, elle ne devrait concerner qu’environ 20 % des élèves à la rentrée prochaine. À cet égard, il y a un risque de voir se creuser un peu plus les inégalités entre les communes qui ont les moyens financiers et les autres.

Monsieur le ministre, si ce texte ne manque pas d’ambition, je crains qu’il ne soit pas en mesure de régler les vrais problèmes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

(M. Thierry Foucaud remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.

Mme Maryvonne Blondin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les efforts budgétaires engagés au travers de ce projet de loi sont très importants, avec pour objectif de bâtir une école qui place l’élève et sa réussite au cœur de ses préoccupations en faisant en sorte que chacun puisse accéder au niveau de qualification le plus élevé possible.

Porteur d’une ambition d’égalité et de justice, ce projet de loi d’orientation et de programmation est un premier acte fort, qui affirme l’éducation comme moteur de l’égalité des chances, comme fabrique des citoyens. Car c’est bien en classe et dans la cour d’école que prend forme le vivre-ensemble, la fraternité. Le chantier qu’a engagé le Gouvernement est un défi majeur qu’il faudra poursuivre, une feuille de route à respecter, car, comme le disait Aragon, « Rien n’est jamais acquis à l’homme ».

Ce projet de loi innovant marquera de son empreinte plusieurs sujets : l’augmentation des moyens, l’adaptation des rythmes scolaires, l’augmentation du nombre de professeurs, la refonte des objectifs du socle commun, la priorité au primaire, le service public, la scolarisation des élèves en situation de handicap. Pour ma part, j’insisterai sur quelques points.

Tout d’abord, l’école se dote de personnels plus nombreux et, surtout, mieux formés. « Sans technique, le talent n’est rien qu’une sale manie » affirmait Georges Brassens. En effet, si enseigner est parfois un don, une envie, transmettre des savoirs, donner à l’élève le goût et le plaisir – j’y insiste – d’apprendre, développer chez lui l’esprit critique est un véritable métier, qui, lui aussi, s’apprend.

L’école s’ouvre sur de nouveaux contenus – artistiques, citoyens – mais aussi sur les familles. Ce projet de loi associe systématiquement les parents à la scolarité de leurs enfants, en encourageant les actions autour de la parentalité dans les établissements. Une vraie ouverture, avec de véritables lieux d’accueil, et pourquoi pas, monsieur le ministre, comme le demande l’Assemblée des départements de France, l’ADF, que je soutiens, ouvrir ces lieux aux services publics, acteurs de la cohésion sociale, en complémentarité du service de l’éducation nationale, pour construire et mener à bien des projets avec les parents et les enfants ?

Avec le principe « plus de maîtres que de classes », nos enfants seront davantage encadrés, encouragés. Il y va de leur réussite, de leur épanouissement. Participent également de ce mouvement les emplois d’avenir professeur, qui permettent aux jeunes issus de milieux modestes de devenir enseignants.

Ce texte favorise également l’accueil des enfants de moins de trois ans dans les meilleures conditions. Dans notre République, l’école maternelle demeure le premier maillon de l’intégration et de la réussite de tous les enfants. Elle permet la socialisation, la tolérance, l’égalité et le respect entre filles et garçons. Elle favorise les apprentissages qui permettront une entrée sereine dans l’école élémentaire.

Dans mon département, le Finistère, la scolarisation des enfants âgés de deux à trois ans est une question importante. Elle répond à un réel choix des familles, qui y sont attachées. Or le taux de scolarisation de cette tranche d’âge n’a cessé de baisser.

Je voudrais également rappeler que ce projet de loi a permis d’avancer sur l’enseignement des langues régionales, auxquelles vous savez mon attachement et celui de nombre de mes collègues.

Selon vos propos, monsieur le ministre, « jamais [la France] n’est allée aussi loin dans la reconnaissance des langues régionales », notamment avec l’inscription, pour la première fois dans le code de l’éducation, de l’enseignement bilingue. L’usage des langues régionales favorisera ainsi l’habileté linguistique dès les premières années de la vie scolaire. De plus, ce texte reconnaît, outre les langues régionales, l’apport des cultures régionales dans l’enseignement dispensé par les professeurs, en permettant leur utilisation pour favoriser l’acquisition des programmes scolaires.

Je me réjouis également de la clarification et de l’extension des missions de la médecine scolaire. Le renforcement de cette dernière, pour la santé des élèves, donc pour leur bien-être, est une contribution supplémentaire à la réussite éducative.

Les ministères de l’éducation nationale et de la santé travailleront ensemble sur le contenu et la périodicité des bilans de santé. Cette cohérence sera complétée par une meilleure coordination de tous les acteurs, y compris des collectivités locales concernées et de l’Agence régionale de santé, l’ARS. La santé scolaire, spécificité française et formidable outil d’éducation à la santé, contribuera ainsi à l’amélioration de la politique globale de la prévention.

Ce texte n’est qu’une étape dans une refondation qui prendra du temps, mais la dynamique est enclenchée pour bâtir une école efficace au cœur de la promesse républicaine. Grâce à de nombreux échanges et aux amendements déposés par l’ensemble des sénateurs, il est le fruit d’une réelle collaboration, autour de l’intérêt général et de celui de l’enfant.

Pour conclure, je dirai que cette ambition de réussite pour l’école est bien l’affaire de tous : celle du Gouvernement, du Parlement, des collectivités locales, des enseignants, mais surtout des élèves et de leurs parents.

Monsieur le ministre, c’est avec émotion et fierté que nous soutenons ce texte. Comptez sur nous pour porter cette refondation de l’école, cette ambition de réussite pour tous qui fait honneur à la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite me limiter dans cette intervention à la question de la politique des cycles et à ses corollaires.

En préalable, je dois avouer, monsieur le ministre, que votre volonté de faire glisser la question des cycles du domaine du législatif au domaine réglementaire m’est apparue quelque peu curieuse. Je ne vois pas en quoi l’application des cycles sera plus effective si elle est traitée par le pouvoir réglementaire, dès lors que ses corollaires ne sont pas acceptés par tous.

Il y a au moins trois corollaires à l’effectivité de la politique des cycles : l’individualisation des enseignements, la multiplication des évaluations diagnostique – dont je dirai peu de mots car je crois que votre travail va en ce sens, monsieur le ministre – et l’interdiction du redoublement en milieu de cycle. Je précise que c’est particulièrement vrai pour les petites classes, durant lesquelles s’effectue l’apprentissage de la lecture, qui doit être une priorité nationale.

S'agissant tout d’abord de l’individualisation des enseignements, nous partageons tous, sur l’ensemble de ces travées, l’idée que chaque élève n’a pas le même rythme d’apprentissage. En conséquence, l’enseignement doit prendre en compte le rythme d’apprentissage de l’élève.

L’idée du cycle, dans les petites classes, c’est exactement cela. Le cycle doit permettre à chaque élève de progresser à son rythme, afin que, à terme, chaque élève sache lire, écrire et compter.

Cependant, mes chers collègues, comment voulez-vous prendre en compte les différences de rythme d’apprentissage des élèves si vous ne distinguez pas les enseignements qui leur sont proposés ? Autrement dit, pensez-vous qu’un cours d’apprentissage de la lecture dispensé de façon magistrale à l’ensemble des élèves réponde à la fois aux besoins des élèves les plus forts et à ceux des élèves les plus faibles ? La réponse est négative, et de cette situation découle en partie le taux d’illettrisme que nous connaissons.

Au fur et à mesure que l’année avance, l’enseignant va lui-même avancer dans le programme. Dès lors, les élèves qui ne savent pas déchiffrer un texte au mois de janvier seront condamnés au redoublement. Ils sont même condamnés à bien plus que cela, les études de cohortes l’ont montré : ils sont voués au décrochage scolaire. Le déterminisme est total.

La différenciation ou l’individualisation des enseignements est l’un des instruments de la lutte contre l’illettrisme et l’échec scolaire.

Cette individualisation des enseignements doit prendre la forme du travail en petits groupes de niveau. Cela n’exige pas de moyens supplémentaires, mais des redéploiements. En revanche, une telle méthode de gestion de la classe est très exigeante et suppose une formation adéquate des enseignants.

Nombreuses sont aujourd’hui les expérimentations ayant démontré les bienfaits de cette organisation de l’enseignement : le programme PARLER mené à Grenoble, auquel il est souvent fait référence ; le projet mené par Torgesen en Floride, qui a permis de diviser par huit l’échec scolaire en lecture en cinq ans ; enfin, le projet Lecture, actuellement mené en France et dont les résultats sont publiés depuis peu.

Tel est le premier corollaire de l’effectivité de la politique des cycles dans les petites classes. Je pensais qu’il devait être inscrit dans la loi. C’est pourquoi j’avais déposé un amendement en ce sens en première lecture.

Le deuxième corollaire de l’effectivité de la politique des cycles est la multiplication des évaluations diagnostiques.

L’apprentissage de la lecture est un sujet extrêmement technique. Voilà pourquoi nos enseignants doivent être bien formés pour préparer au mieux tous les élèves à cet apprentissage. Cela me permet au passage, monsieur le ministre, de saluer la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation. À cet égard, je le répète, ce qui m’importe, ce sont les enseignements qui y seront dispensés.

L’enseignant doit réaliser des évaluations diagnostiques pour savoir où en est exactement l’élève qu’il a en face de lui. Ce n’est que grâce à ces évaluations précises et répétées qu’il pourra ajuster sa pratique pédagogique, afin de répondre au mieux aux besoins de l’élève.

Le troisième corollaire de l’effectivité de la politique des cycles est l’interdiction du redoublement en milieu de cycle.

Bien que l’idée même de la politique des cycles soit de mesurer les acquis des élèves à l’issue du cycle et alors, éventuellement, de sanctionner l’élève qui n’aurait pas les acquis suffisants, nous le sanctionnons, aujourd’hui, en milieu de cycle.

La logique des cycles voudrait qu’un élève qui a du retard à l’issue du cours préparatoire se voie octroyer un renfort d’enseignement durant l’année de CE1 pour rattraper son retard, et ce afin qu’à l’issue du CE1 il maîtrise les fondamentaux. Or, aujourd’hui, un élève qui a du retard en CP est condamné au redoublement.

À dire vrai, tolérer le redoublement en CP revient à nier l’idée même de la politique des cycles. Je crois, là encore, monsieur le ministre, que votre appréciation de l’efficacité pédagogique du redoublement dans les petites classes n’est pas divergente de la mienne. En revanche, j’aurais préféré que l’on interdise strictement le redoublement, quitte à l’assortir de dérogations, plutôt que de le rendre « exceptionnel ».

Que veut dire « exceptionnel » ? Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous donniez un caractère concret à cet adjectif, en prenant une circulaire disposant, par exemple, que le redoublement ne pourra être admis pour plus d’un élève par classe. Sinon, nous n’avancerons pas sur cette question et nous en reparlerons encore dans dix ans !

J’avais d’ailleurs déposé en première lecture un amendement visant, là aussi, à instaurer l’interdiction stricte du redoublement en CP. Vous m’aviez alors objecté, madame le rapporteur, que, dans certains cas, tels que l’aléa familial – la perte d’un parent, par exemple – l’enfant pouvait être déstabilisé et que le redoublement était alors légitime. Une interdiction stricte du redoublement en CP était donc impossible.

Je ne partage pas cette vision. En réalité, ce que vous allez infliger à cet élève, si vous me permettez l’expression, c’est la double peine : alors qu’il souffre déjà de l’aléa familial en question, vous allez lui faire subir un redoublement, lequel aura des conséquences déterminantes sur la réussite de son parcours scolaire.

De cette argumentation, comment ne pas extrapoler que, à partir du moment où vous prenez en compte le fait familial pour expliquer une décision de redoublement, ou une absence de réussite scolaire, vous niez l’idée même d’école républicaine, selon laquelle chaque élève, indépendamment de son contexte économique, culturel ou social doit pouvoir réussir ?

Tant que nous continuerons de croire que les mauvais résultats d’un élève en lecture, par exemple, peuvent s’expliquer par son contexte familial, par exemple parce que ses parents ne parlent pas français ou sont illettrés, nous n’arriverons pas à endiguer l’illettrisme, ni à lutter contre l’échec scolaire.

La difficulté scolaire est trop souvent perçue comme indissociable du milieu familial, donc insurmontable. Il s’agit de l’une des causes essentielles de la constitution de l’échec scolaire dans notre pays. Revenir sur cette croyance collective n’est pas aisé, mais parvenir à montrer que tous les élèves peuvent réussir serait un pas important dans la résolution du problème de l’échec scolaire.

C’est la raison pour laquelle le premier module d’enseignement qui devrait être dispensé dans les écoles de professorat est celui de l’explication de « l’effet maître » et de l’importance de ce dernier sur les acquis des élèves. Ce module devrait rappeler que pèse sur les enseignants une certaine obligation de résultat concernant l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul.

Cela signifie également que nous avons, parlementaires et pouvoir exécutif, notre part de responsabilité. Nous ne pouvons entretenir un système qui conduit chaque année en cours préparatoire des milliers d’enfants ne maîtrisant pas les sons du langage oral.

Voilà pourquoi il est de notre responsabilité de réformer profondément les apprentissages en maternelle et de mettre l’accent sur les apprentissages cognitifs. Notre divergence profonde sur une question aussi importante pour l’avenir de milliers d’enfants de ce pays me conduira à ne pas voter ce texte.

En conclusion, monsieur le ministre, je souhaite vous demander de saisir, dès qu’il sera créé, le Conseil national d’évaluation du système scolaire, sur la question des enseignements dispensés aux élèves de maternelle. Quels enseignements permettent de lutter le plus efficacement possible contre les inégalités scolaires et l’illettrisme ?

Vous appelez à la transparence, aux évaluations scientifiques, et je vous crois sincère, comme je crois à la pertinence de cette instance. Dès lors, monsieur le ministre, saisissez-la de cette question si importante ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.

M. Robert Laufoaulu. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec un intérêt tout particulier que l’enseignant que j’étais suit ce débat sur la refondation de l’école, tout en s’interrogeant sur son application outre-mer, en particulier dans le territoire que je représente, à savoir Wallis-et-Futuna.

Qu’il me soit permis ici de rappeler la spécificité de ces deux îles du Pacifique, du fait de leur situation géographique et de leur histoire. Territoires français depuis 1961, elles ne bénéficient d’un véritable système d’enseignement que depuis une cinquantaine d’années.

Le premier degré est, par convention, totalement délégué par l’État à la direction de l’enseignement catholique ; le secondaire est assuré par l’État lui-même.

Le projet de loi, dans son article 59, prévoit que sa transposition se fera par ordonnances. J’espère que ces dernières, monsieur le ministre, seront préparées en concertation avec les élus et l’ensemble des acteurs locaux de l’institution scolaire. Le Gouvernement envisage-t-il de faire appliquer la loi dans sa quasi-intégralité ?

Un des points clefs de ce texte concerne la réforme de la formation des enseignants. Il s’agit d’un domaine assez complexe de par l’histoire, la géographie et la compétence des collectivités française du Pacifique, à savoir la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna. La formation des enseignants y a été assurée par l’IUFM du Pacifique, dont une antenne avait été implantée à Wallis. Par la suite, les universités de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie ont chacune absorbé cette ancienne structure, l’antenne de Wallis-et-Futuna étant intégrée à l’université de Nouvelle-Calédonie.

Monsieur le ministre, pour des questions de disponibilité de places et de compétences en matière d’enseignement, il serait souhaitable que la formation des enseignants de Wallis-et-Futuna puisse relever officiellement des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, qui seront mises en place au sein des universités de Polynésie Française et de Nouvelle-Calédonie, dont les conseils d’administration comportent tous deux des représentants de Wallis-et-Futuna.

Sur notre territoire, le recrutement des maîtres est actuellement ouvert aux bacheliers qui, à l’issue d’une formation de trois ans, passent un diplôme d’instituteur. Il serait désormais souhaitable d’instaurer le grade de professeur des écoles à Wallis-et-Futuna, lequel pourrait être attribué à celles et ceux qui iront en ESPE.

L’obtention d’un master 1 constitue une perspective intéressante pour nos jeunes se destinant à l’enseignement. Les carrières de l’éducation nationale doivent leur être ouvertes, avec toutes les possibilités et les grades existants.

Cet aspect est également important pour le secondaire, où les professeurs Wallisiens-et-Futuniens de collège et lycée sont très peu nombreux par rapport aux enseignants métropolitains mutés pour quelques années seulement.

La loi prévoit également la création d’un fonds d’aide aux communes pour la mise en place d’activités périscolaires dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires. Or, à Wallis-et-Futuna, il n’existe pas de communes. Dès lors, comment pourrait-on bénéficier de ce fonds ?

Monsieur le ministre, la fracture numérique, ou plutôt la quasi-inexistence du numérique, est très pénalisante pour nos élèves, et je me réjouis des engagements pris dans ce projet de loi en matière d’enseignement au numérique.

Nos établissements scolaires ne bénéficient pas d’un équipement informatique suffisant, ni de connexions internet satisfaisantes. Cela représente un sérieux handicap dans le cursus scolaire de nos élèves. Sur un territoire exigu, enclavé et éloigné de tout, Internet est pourtant primordial pour s’ouvrir au monde et le découvrir.

Cette déficience est aussi particulièrement problématique en raison du retard pris par les jeunes dans la maîtrise de l’outil informatique, ce qui les pénalise par rapport à leurs condisciples métropolitains lors de la poursuite de leurs études supérieures. Dans ce contexte, quelles mesures pratiques pourrez-vous prévoir pour le territoire dans les futures ordonnances?

J’aimerais maintenant souligner les avancées du présent projet de loi en matière de langues régionales, un sujet auquel je m’intéresse tout particulièrement.

Parmi les 200 000, et plus, jeunes Français en métropole ou en outre-mer concernés par l’enseignement des langues régionales, ou en langue régionale, dans les écoles, les collèges et les lycées, on compte une grande partie des jeunes de nos îles. Ces derniers utilisent au quotidien et dans tous les domaines leur langue maternelle locale, à côté du français qu’ils maîtrisent tous. Cela fait plusieurs années que l’enseignement en wallisien-et-futunien a été mis en place en maternelle et au primaire, mais il reste des aspects à améliorer.

Trop souvent, ces langues locales ne sont envisagées que comme des marchepieds vers le français. L’objectif ultime est donc de former des élèves « monoglottes » en français, alors que la persistance des langues vernaculaires permet de viser un véritable bilinguisme pour l’ensemble des élèves.

Monsieur le ministre, je me félicite que la loi étende la possibilité d’enseignement en langues locales à l’école. Cela offre une légitimité accrue et une reconnaissance culturelle à ces idiomes autrefois bannis des salles de classe.

Cependant, il n’existe toujours pas d’épreuve de wallisien-et-futunien au baccalauréat, alors qu’une telle mesure a été rendue possible pour le tahitien en 1981 et pour les langues kanak en 1992, au travers de l’extension de la loi Deixonne. De plus, il n’existe toujours pas non plus de diplôme universitaire de wallisien-et-futunien, ce qui pénalise fortement les élèves de notre territoire souhaitant devenir professeurs et enseigner les langues locales.

Les jeunes du territoire seraient pourtant nombreux à vouloir enseigner le wallisien-et-futunien, aussi bien à Wallis qu’en Nouvelle-Calédonie, mais le sort réservé à cette matière les décourage.

Je souhaiterais également aborder l’obligation, prévue par la loi, d’effectuer au moins un voyage à l’étranger durant la scolarité de chaque élève. Il s’agit d’une excellente idée, qui commence d’ailleurs à entrer dans les pratiques et qu’il serait donc tout à fait bénéfique de généraliser.

Une telle mesure représente un outil formidable au service de l’intégration régionale, dont la France et l’Union européenne ne cessent de répéter l’importance pour les régions ultrapériphériques, les RUP, et les pays et territoire d’outre-mer, les PTOM. Ce séjour de découverte, dans un milieu insulaire comme celui de nos îles, est plus que nécessaire. Cependant, notre isolement est tel que sortir du territoire pour rendre visite à nos voisins anglophones du Pacifique implique nécessairement de prendre l’avion.

Dès lors, comment le Gouvernement voit-il cette situation, et quels sont les moyens qu’il pourrait mettre en œuvre ?

L’éducation à la santé est une nécessité pour nos îles, confrontées à la présence de maladies spécifiques – dengue, paludisme, chikungunya et autres – qui représentent des menaces sérieuses pour la population.

De même, les règles d’hygiène et la modification de certaines habitudes alimentaires nécessiteraient un enseignement spécifique. Cette éducation à la santé dans le cadre scolaire est d’autant plus indispensable que l’agence de santé de nos îles ne dispose, faute de moyens financiers, d’aucun service consacré à la prévention.

Voilà, monsieur le ministre, les points que je souhaitais vous soumettre dans la perspective des ordonnances que le Gouvernement devra préparer pour rendre ce texte applicable à nos territoires, où les spécificités n’empêchent pas l’aspiration au progrès et à la modernité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

(M. Jean-Claude Carle remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Carle

vice-président

M. le président. La parole est à Mme Françoise Laurent-Perrigot.

Mme Françoise Laurent-Perrigot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que d’espoirs aujourd’hui et quel plaisir d’être si près du vote d’une loi qui va donner à l’école un nouveau souffle, en lui permettant de remplir ses missions essentielles de réussite et d’égalité des chances pour tous !

Il était grand temps d’agir en faveur de l’école, pilier de la République, pour la rendre plus juste et plus exigeante, dans l’intérêt de chacun.

Cette loi sur la refondation nous le prouve, en lançant pour les années à venir un vaste et beau chantier en faveur de l’école et de la jeunesse et en considérant les enfants à partir de la maternelle, sans oublier aucun territoire, des zones rurales et des petits villages jusqu’aux zones urbaines et aux quartiers difficiles.

Miser sur la jeunesse, c’est miser sur l’avenir de la France. Ce nouvel élan rendra aux enseignants l’envie d’enseigner, aux élèves le plaisir d’apprendre dès la maternelle et aux parents la possibilité de s’investir dans l’école de leurs enfants.

La mobilisation et l’implication de l’ensemble des partenaires sont une force au service de l’enfant, étant entendu que le fait de replacer l’école au cœur de notre République est un objectif essentiel.

La scolarisation des enfants âgés de moins de trois ans est une chance pour le jeune et sa famille. C’est la toute première étape du parcours scolaire, le moment où l’enfant se construit, où il s’approprie le langage et découvre la vie en collectivité. Cette formation, désormais dispensée dans les écoles maternelles, va faciliter le passage à l’école élémentaire, a fortiori avec la création d’un cycle unique.

Ce vrai projet éducatif et pédagogique, adapté à l’âge de l’élève, assuré par des maîtres qualifiés et formés, fera partie intégrante de cet enseignement qui permettra à l’enfant d’être accueilli dans de bonnes conditions.

Dans le cadre de cette refondation, les moyens sont prévus – rappelons le recrutement de 60 000 personnes sur cinq ans – pour améliorer significativement les conditions d’encadrement des élèves, lesquelles se sont considérablement dégradées au cours de ces dernières années.

Ces points forts, associés au principe « plus de maîtres que de classes », seront le point de départ de la réussite pour tous.

La priorité donnée au primaire est une évidence. N’attendons plus de constater l’échec scolaire ! Agissons dès le départ, avant que le mal ne s’installe et que les inégalités ne se creusent, en appliquant le principe de prévention.

L’école maternelle va jouer pleinement son rôle. Ce qui était demandé depuis fort longtemps est pris en considération : les enfants âgés de moins de trois ans seront désormais comptabilisés lorsque seront établies les prévisions des effectifs des écoles concernées.

Monsieur le ministre, le présent projet de loi montre votre volonté d’ouvrir à chacun tout le champ des possibles. Il donne à l’école les moyens et les ressources nécessaires pour que chacun ait la même possibilité d’accéder à une vie meilleure.

Les dispositifs proposés vont permettre d’aider et de mieux accompagner les élèves, de mieux répondre à leurs besoins.

Mais vous voulez plus qu’une réussite éducative traditionnelle, car vous intégrez dans votre réforme des cours d’enseignement moral et civique, afin que les enfants soient sensibilisés dès le plus jeune âge par leurs enseignants aux valeurs de liberté, de solidarité, de laïcité, et d’esprit de justice.

Au fur et à mesure des discussions parlementaires, le présent texte s’est enrichi. Des avancées importantes ont été apportées par le Sénat. Au final, une convergence a été trouvée entre les deux assemblées, qui se sont mobilisées autour de l’école pour redresser notre système éducatif.

Ces avancées ont permis, entre autres, d’intégrer la reconnaissance des langues régionales, qui auront désormais toute leur place dans la refondation de l’école ; dorénavant, un enseignement bilingue sera assuré en français et en langue régionale. De surcroît, un élève pourra s’inscrire en dehors de sa commune de résidence dans une école dispensant cet enseignement.

Ce texte, qui ne néglige aucun domaine, a toute sa place parmi les priorités du Gouvernement. Il va donner aux générations futures, quel que soit leur milieu social, les mêmes chances d’accéder aux connaissances.

Monsieur le ministre, cette loi de refondation de l’école de la République sera demain la « loi Peillon ». Cette dénomination sera légitime, car vous avez défendu avec ardeur et conviction cette réforme particulièrement ambitieuse.

Lorsque nous admirerons, demain, le drapeau tricolore et le drapeau européen flottant sur les façades des établissements scolaires,…

M. Jean-Claude Lenoir. Le drapeau français y flotte déjà !

Mme Françoise Laurent-Perrigot. … lorsque nous lirons la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui sera désormais affichée dans les écoles et lorsque nous retrouverons sur les frontons de tous les bâtiments scolaires les mots symboliques « Liberté, Égalité, Fraternité », c’est avec bonheur, émotion et fierté que nous nous souviendrons d’avoir soutenu et voté une telle loi, qui va redonner espoir à tous les jeunes et permettre la reconstruction de l’école de la République…

M. Jean-Claude Lenoir. Vous croyez au Père Noël !

Mme Françoise Laurent-Perrigot. … dans la fidélité à ses valeurs, cette école si chère à nos cœurs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. Jean-Claude Lenoir mime le geste du violoniste.)

M. René-Paul Savary. Un joli morceau de violon, en effet !

M. Alain Dufaut. C’était même tout un orchestre ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de la diversité et de la richesse de vos interventions.

Ce qu’a dit Mme Gonthier-Maurin concerne en fait chacun d’entre nous. Je ne fais pas partie de ceux qui pensent qu’une loi permettra de résoudre tous les problèmes. Je suis bien conscient que nous devons être, collectivement, à la fois exigeants et vigilants – vous, particulièrement, puisque vous devez contrôler le travail de l’exécutif – quant à la réalisation des objectifs que nous nous sommes fixés et à la réussite des réformes que nous avons pu entreprendre.

J’imagine que certains d’entre vous ont dû se trouver dans une curieuse position lorsqu’ils ont eu à justifier leur opposition aux mesures proposées, alors que nous répondons aux attentes qui étaient déjà celles d’un certain nombre de mes prédécesseurs, aujourd'hui dans l’opposition : la priorité donnée à l’enseignement primaire, la formation des enseignants, notamment.

Il y a les faux débats et il y a les vrais débats, ainsi que cela est encore une fois apparu cet après-midi.

Les faux débats sont posés par ceux qui sont prêts à voir les choses continuer d’aller comme elles vont.

Qu’on appartienne à l’opposition ou à la majorité – je me suis moi-même trouvé dans les deux situations –, on peut bien sûr considérer que c’est l’ampleur des moyens qui est primordiale ou, au contraire, que c’est leur qualité. Pour ma part, je ne pense pas que le problème se pose en ces termes. En fait, la refondation de l’école de la République se veut d’abord axée sur la pédagogie, et cela a d’ailleurs été affirmé très tôt.

Je dis depuis de très nombreuses années que, s’il suffisait d’augmenter les moyens, cela se saurait ! Du reste, cela a été fait à certaines périodes, mais sans produire les résultats escomptés.

M. Jean-Claude Lenoir. La Cour des comptes a répondu !

M. Vincent Peillon, ministre. Je crois qu’il faut être un peu plus nuancé à l’égard des conclusions des différentes études qui sont menées, monsieur le sénateur.

La Cour des comptes a demandé un certain nombre de réformes de structures, dont la remise en place d’une formation des enseignants, qui ne constituait pas une priorité au cours des dernières années. C’en est désormais une.

Fait nouveau, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, vous appelez à une rupture. Eh bien, la réforme introduira une rupture en termes de pédagogie, grâce à l’enseignement dispensé aux plus jeunes, au principe « plus de maîtres que de classes », au service public du numérique éducatif, aux écoles supérieures du professorat et de l’éducation.

La réforme des concours a déjà eu lieu cette année. Je suis étonné que vous n’en soyez pas informés, car elle est publique. Les cadres communs et les exigences que nous avons fixés aux ESPE sont publics. Les réponses des ESPE, qui s’insèrent dans le cadre de l’autonomie des universités – et je sais combien celle-ci vous est chère –, sont publiques. Mes demandes relatives au nombre d’heures d’enseignement en licence, en master 1 et 2, ainsi qu’au contenu des apprentissages, sont publiques.

Donc, il y a les faux débats, qui sont éternels. Dans le fond, pour certains, il ne s’agit pas d’améliorer le niveau des élèves ou de permettre enfin la réussite d’une réforme de l’éducation dans notre pays. Au reste, chez nous, cela fait longtemps qu’une telle réforme n’a pas été à l’ordre du jour, mais je vous fais observer que certains de nos voisins ont d’ores et déjà réussi la leur.

À côté, il y a les vrais débats : ceux qui partent de l’idée selon laquelle il nous faut à la fois changer qualitativement notre enseignement et nous donner les moyens d’y parvenir.

Un certain nombre d’organismes, dont l’OCDE, ont été évoqués à plusieurs reprises, et à juste titre. Aujourd’hui même, monsieur Legendre, cette organisation indiquait que l’opposition entre qualité et quantité n’était pas pertinente. Les chiffres qu’elle a publiés à onze heures ce matin montrent que, à l’inverse de toutes vos allégations, entre 2000 et 2012, le niveau de rémunération des enseignants a baissé dans notre pays.

J’irai même plus loin : l’investissement dans l’éducation, c’est-à-dire la contribution de la richesse nationale au système d’éducation, a diminué. Seuls deux des pays avancés de l’OCDE ont abaissé leurs dépenses consacrées à l’enseignement global au cours des quinze dernières années. J’ajoute que les enseignants du primaire français travaillent beaucoup plus que ceux d’autres pays. Peut-être devriez-vous donc vous poser quelques questions…

Cependant, chacun en convient, s’il faut des moyens pour assurer les remplacements, pour permettre une entrée professionnalisante dans le métier d’enseignant, cela ne suffit pas. Il faut aussi faire des réformes de structures. C’est la synthèse de ces deux exigences que nous essayons de faire. Est-ce que ce sera facile ? Certainement pas !

Sur la réforme des rythmes scolaires, j’ai entendu des remarques étonnantes. Pour ma part, je n’invoque pas les rapports uniquement lorsqu’ils me sont utiles, mais je me dois d’indiquer que, toujours selon le même rapport de l’OCDE, le seul pays au monde pratiquant la semaine de quatre jours, c’est le nôtre ! Revenir à un enseignement sur quatre jours et demi : c’est bien ; mais il faudra aller plus loin, car la moyenne européenne est de cinq jours. Diminuer la durée des cours dispensés sur la journée, actuellement de six heures : c’est bien ; or c’est ce qu’il est le plus difficile de réaliser dans cette réforme.

Voilà ce que je retiens notamment dans le rapport de l’OCDE rendu public ce matin.

Vous dites : c’est difficile. Bien sûr ! Vouloir faire de la jeunesse une priorité, vouloir être exigeants et vigilants, c’est difficile ! Surtout dans un pays où, par le passé, avec la suppression de la formation des enseignants, avec la mise en cause des moyens accordés à l’éducation, avec la gestion du temps scolaire, on a organisé l’abandon du système éducatif.

Nous sommes donc dans une période de redressement, ce qui nécessite évidemment un effort, et un effort sur le long terme.

Madame Férat, oui, je prends l’engagement que tout jeune qui aura quinze ans avant la fin de l’année civile pourra accéder à l’apprentissage après avoir acquis le socle commun. Des instructions en ce sens ont déjà été données. Il n’y a là aucun choix idéologique ! Simplement, tous les systèmes éducatifs qui réussissent sont ceux qui sont capables d’accompagner les élèves le plus loin possible dans l’acquisition de connaissances communes.

Si l’on veut développer l’apprentissage en France, il faut lui donner une nature d’excellence. C’est bien pourquoi Xavier Bertrand et Nicolas Sarkozy ne sont pas parvenus à atteindre l’objectif des 800 000 apprentis. Je vous l’ai indiqué : en cinq ans, il n’y a pas eu un apprenti de plus ! Pour ce qui me concerne, j’ai d’ores et déjà fixé un objectif de 20 000 apprentis supplémentaires sous statut scolaire, et nous avançons.

Ne soyons pas toujours dans cette opposition entre statut scolaire et apprentissage, socle commun et orientation, pour ceux qui ne pourraient pas faire autrement.

Lorsque les dispositifs existants étaient bons, je les ai conservés et même salués. Je citerai les plateformes de suivi et d’appui aux décrocheurs, la lutte contre le harcèlement.

Je le répète, la question n’est pas d’ordre idéologique : il faut être efficace pour notre jeunesse.

Je rends hommage à ceux qui ont souligné que la pédagogie était un enjeu majeur. Nous savons bien que la question ne porte pas uniquement sur les moyens. Les cycles, les programmes, les évaluations, le parcours d’éducation artistique et culturelle, le parcours d’orientation, que nous allons instituer et qui constitue l’un des éléments les plus importants – Jean-Michel Baylet a d’ailleurs salué le lien entre la laïcité, et par conséquent l’émancipation, et la possibilité de se construire une orientation choisie – sont des sujets fondamentaux.

Les rapports entre les entreprises et la formation, l’orientation subie des décrocheurs – l’une des graves faiblesses du système français – sont aussi des questions déterminantes.

Je veux remercier Corinne Bouchoux et les membres du groupe écologiste de leur contribution et notamment de l’accent qu’ils ont mis sur la place centrale de la pédagogie.

J’ai d’ailleurs été frappé, monsieur Carle, des convergences qui peuvent se dégager lorsque, au-delà des postures, nous évoquons les contenus. Vous avez raison : il faut que, dans les ESPE, l’« effet maître » fasse d’emblée l’objet d’un enseignement. Nous le savons depuis des années, c’est bien la formation des enseignants qui permet, à terme, la réussite des élèves. Or, très souvent, dans notre pays, nous n’en avons pas été assez convaincus.

Dans cette formation, nous devons donc introduire aussi ces modules qui permettront aux futurs enseignants d’apprendre à leurs élèves la lecture, de les observer et de pratiquer cette pédagogie différenciée que vous appelez de vos vœux et qui, fort heureusement, est déjà adoptée par un certain nombre d’enseignants. C’est ce que nous faisons et que nous dénommons « professionnalisation du métier d’enseignant ».

Je voudrais répondre précisément aux questions de Jean-Michel Baylet sur le fonds destiné à aider les communes qui mettent en œuvre la réforme des rythmes scolaires.

Les recteurs et les directeurs académiques des services de l’éducation nationale, les DASEN, sont en train d’interroger l’ensemble des maires afin de connaître la situation de leurs écoles. Ce dialogue s’achèvera début juillet et des instructions seront données pour que la première partie des sommes soit versée en octobre, la deuxième partie devant l’être au premier trimestre de l’année 2014. Il n’y aura donc pas d’attente.

Comme vous l’avez sans doute noté, la Caisse nationale des allocations familiales a indiqué qu’elle donnerait 53 euros par enfant aux communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine-cible ou à la dotation de solidarité rurale-cible. Cela signifie que ces communes recevront en tout 143 euros par élève – la dotation forfaitaire de 50 euros, plus les 40 euros supplémentaires, plus ces 53 euros –, qui seront disponibles dès la rentrée.

Nous avons adopté une conception large de l’éligibilité : nous prendrons en compte l’éligibilité de l’année 2012, afin d’avoir la plus grande amplitude en cas de modifications. L’application du dispositif se poursuivra l’année prochaine.

Certains élus ont signalé des difficultés concernant les paiements aux établissements privés ; selon l’expression que nous avons employée tout à l'heure, ces difficultés relèvent de leur liberté de conscience. Sur ce sujet comme sur les autres, j’ai souhaité que l’équité s’applique à tous les enfants. Par conséquent, les maires auront à définir les modalités d’attribution directe ou indirecte aux établissements concernés.

Tout cela sera mis en œuvre de telle sorte que les communes qui s’engagent dès à présent dans la semaine de quatre jours et demi ne soient pas obligées d’attendre.

Dans les départements et territoires d’outre-mer, nous avons six mois pour réaliser les adaptations nécessaires. M. Laufoaulu a décrit les nombreuses spécificités de son territoire, en matière de primaire, de formation des maîtres, etc. Nous procéderons aux adaptations en liaison avec l’ensemble des élus locaux, en tenant compte des situations particulières.

J’en viens aux demandes du président Carle. L’école maternelle est l’un de nos principaux sujets de préoccupation. Vous connaissez l’histoire exemplaire de notre école maternelle. Vous savez à quel point on nous l’envie. Vous savez également qu’elle explique certaines particularités de nos dépenses éducatives et de l’organisation de notre système éducatif. Depuis l’origine, avec les premières salles d’asile, il y a toujours eu – de très beaux travaux l’ont montré – des alternances entre une vision de l’école maternelle repliée sur elle-même et une vision de l’école maternelle apprenant et préparant aux apprentissages ultérieurs.

Une analyse a été effectuée par l’inspection générale et un certain nombre de praticiens. La conclusion est que, en grande section, nous avons trop développé les apprentissages cognitifs, au détriment des activités préparatoires aux apprentissages cognitifs, et qu’il serait utile de revenir là-dessus. Nous sommes là au cœur de ce qu’est la pédagogie. Nous allons demander des évaluations extrêmement précises pour nous permettre d’estimer la situation de ces apprentissages dans les premiers cycles de l’enseignement.

Comme je l’ai déjà souligné, sur ces sujets, il ne faut modifier ce qui existe que d’une main tremblante. Nous ne le ferons que si nous avons la certitude que nous sommes capables de progresser à partir des évaluations dont nous disposons. Il n’y a, de ma part, sur ce point, aucune ambivalence ni aucune position a priori.

Avec le directeur général de l’enseignement scolaire, ici présent, les inspections générales, que j’ai réunies, la direction de l’enseignement primaire, qui est très concernée, et notre conseil de l’évaluation, nous sommes déjà au travail.

Ce sujet sera au cœur de ma prochaine saisine du Conseil supérieur des programmes. Il s'agit d’articuler les cycles, les programmes – dont il faudra d'ailleurs changer la conception – et l’évaluation. C’est du reste ce qui justifie mon refus d’intégrer la question du socle commun – qui n’est pas supprimé, contrairement à ce que j’ai entendu : je souhaite le renforcer et le rendre efficace – aux discussions parlementaires, car celles-ci n’ont pas toujours permis de consolider les choses et de mener toutes ces réflexions en même temps. Or, si l’on ne procède pas ainsi, le socle doit être redéfini au bout d’un an parce qu’il n’a rien à voir avec les programmes et que ceux-ci n’ont rien à voir avec les évaluations. Cela finit par poser quelques problèmes au regard du livret personnel de compétences et du diplôme national du brevet.

Il s'agit donc de garantir la cohérence de l’ensemble, et cette méthode n’a rien à voir avec un refus d’associer les parlementaires : la preuve en est que, pour la première fois, ceux-ci seront représentés au Conseil supérieur des programmes et au Conseil national d’évaluation du système scolaire. Il me semble utile que des parlementaires travaillent avec les meilleurs spécialistes, qui auront leurs propres préoccupations, et les praticiens.

Je souhaite également aborder la question essentielle des redoublements. Je crois que, sur ce point, nous avons la même philosophie, monsieur Carle. En revanche, tous les membres de votre famille politique ne partagent pas vos positions : beaucoup considèrent que le redoublement doit être maintenu. Si j’avais décidé d’interdire le redoublement, vous savez très bien quelles auraient été les conséquences. Cela aurait aussi concerné le secondaire, dont la situation est plus complexe. Nous préciserons dans une circulaire comment il faut interpréter le terme « exceptionnel » s’agissant du redoublement, de façon qu’il n’y ait pas cette double peine que vous voulez à juste titre éviter.

Je m’inscris dans la continuité de la politique des cycles voulue par Lionel Jospin ; vous connaissez d'ailleurs mon amitié pour sa personne et ma fidélité à ses orientations. Je regrette que cette politique ait été insuffisamment mise en œuvre depuis 1989, comme je regrette que le socle ait été insuffisamment mis en œuvre depuis la loi Fillon. Nous nous assurerons que les rédactions précisent les choses pour les uns et les autres.

La question des rapports entre l’école et l’entreprise a également été soulevée. Je vous demande de ne pas rester bloqués sur des postures. Je ne fais grief à personne d’avoir davantage énoncé des objectifs que réalisé les réformes qui auraient permis des les atteindre. Pour favoriser la réussite éducative – je salue Mme la ministre déléguée à la réussite éducative, qui nous a rejoints –, nous avons le souci d’ajuster au mieux les formations, les diplômes et les métiers. C'est la raison pour laquelle, à la rentrée, nous installerons, sous la responsabilité du Premier ministre, un conseil éducation-économie, qui permettra un travail plus étroit – au demeurant, nous l’avons déjà engagé – pour adapter nos formations aux demandes de l’économie de demain.

Ce n’est pas de l’« adéquationnisme » : c’est la volonté d’assurer les trois fonctions de l’éducation nationale.

La première est de permettre l’émancipation et l’épanouissement des individus. C’est essentiel ; c’est même un des axes de la refondation : il faut que nos élèves aient plus de plaisir à apprendre et à aller à l’école. C’est une condition du succès de tous.

Pour ce qui est la deuxième mission de l’école, qui est de faire accéder les enfants à la citoyenneté, je ne vois pas pourquoi elle susciterait une opposition entre nous puisque nous nous sommes souvent accordés sur les articles qui y avaient trait, qu’il s’agisse de l’enseignement moral et civique ou de la place donnée à la devise républicaine. Tout cela a vocation à être abordé au sein de l’école parce que la République doit défendre et enseigner ses valeurs. Notre République est une république enseignante, qui croit aux vertus de l’enseignement.

Je précise toutefois, puisque des inquiétudes se sont exprimées, qu’il ne s’agira pas d’enseigner une morale d’État. Conformément au principe de laïcité, nous enseignerons le contraire d’une morale d’État : nous apprendrons aux citoyens à être des contre-pouvoirs, en offrant à chacun d’entre eux la possibilité de former et d’étayer son propre jugement.

Quant à la troisième mission de l’école, elle est d’assurer l’insertion professionnelle des jeunes. Qu’il s’agisse de l’apprentissage, du rapport au monde économique ou du parcours d’orientation, nous irons – et nous allons déjà – très au-delà de ce qui a été fait jusqu’à présent.

Monsieur Legendre, il n’y a aucun problème au sujet des internats d’excellence. Je suis en train de travailler sur la question des internats, car je crois beaucoup à la valeur de l’internat, y compris pour les familles qui ont des problèmes de mobilité. Mais combien d’études convergentes sur les internats d’excellence ! La Cour des comptes, que vous avez citée, va bientôt en publier une à son tour. Toutes les études – de celle de l’École d’économie de Paris à celle de l’inspection générale en passant par celle de la Cour des comptes – sont unanimes : les internats d’excellence coûtent trop cher au regard de leurs résultats. Cela aurait certes pu valoir le coup de montrer que l’on peut arriver à disjoindre l’origine sociale et la réussite scolaire, mais, à part en mathématiques, les internats d’excellence n’ont pas apporté de plus-value, on n’a pas constaté de progrès significatifs des élèves.

En revanche, je suis entièrement favorable à la mise en place d’une politique visant à améliorer l’offre d’internats dans tout le pays, en lien avec les régions, pour les lycées, et avec les départements, pour les collèges. Là encore, nous nous livrons à des polémiques qui ne sont pas des polémiques de spécialistes. Mon prédécesseur avait déjà amorcé ce changement de politique, car il avait pris en compte les évaluations. Nous devons poursuivre la politique de généralisation de l’excellence avec ceux qui contribuent largement à la financer. Ce n’est pas une posture idéologique, c’est une posture d’efficacité, pour la réussite de tous les élèves.

Madame Giudicelli, s’il s’était agi de choisir entre la création de postes et l’amélioration du traitement, le choix aurait été d’une extrême simplicité. La réalité, c’est qu’il n’y avait auparavant ni l’une ni l’autre, alors qu’il faut les deux.

Le rapport de l’OCDE publié ce matin nous dit que le premier problème dans ce pays est l’écart trop important entre les professeurs du primaire et les professeurs du secondaire. Que réclame-t-on depuis longtemps ? Que l’on réduise cet écart, par exemple en ouvrant de nouvelles possibilités de passage à la hors classe ou en créant une indemnité spécifique. Nous le faisons. Nous ne disons pas : « Il faut le faire », nous le faisons.

Nicolas Sarkozy lui-même avait fini par renoncer, dans l’optique d’un second quinquennat, au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Quand on regarde l’action du précédent gouvernement, on se rend compte que seulement 70 millions d'euros ont été affectés à la revalorisation des débuts de carrière, qui est un vrai sujet. Or la réforme de la formation que nous conduisons cette année coûte – mais elle rapportera tellement plus à terme ! – 800 millions d'euros à la collectivité nationale. C’est plus de dix fois ce qui a été accordé par le précédent gouvernement.

Nous ne devons pas nous opposer sur ce thème. Nos enseignants doivent avoir le soutien de la Nation. Ce soutien doit se traduire par la reconnaissance de la dignité de leur métier et le respect de leurs valeurs, mais aussi par un accompagnement matériel. Je n’oppose pas cet accompagnement à la création d’emplois. Dans un contexte budgétaire dont vous avouerez qu’il n’est pas simple, nous assumons cette double priorité.

La question des directeurs d’école est également abordée ; je l’ai dit sur un ton un peu fâché en réponse à une question d’actualité au Gouvernement. Regardons les chiffres de l’accompagnement des directeurs d’école, question qui est loin d’être accessoire, d’autant que nous leur demandons un travail important dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires. Comme pour l’accompagnement des enfants en situation de handicap, les choses allaient à peu près jusqu’en 2010, mais, entre 2010 et 2012, on est passé, si ma mémoire est bonne, de 23 000 à 10 000 postes d’accompagnement des directeurs d’école dans leurs tâches administratives : ce sont 13 000 postes qui ont été ainsi supprimés en deux ans !

Pour notre part, nous avons décidé de recréer 10 000 postes à la rentrée, c'est-à-dire que, en un an seulement, nous aurons presque rétabli la situation. Un groupe de travail constitué au sein de la direction générale de l’enseignement scolaire travaille avec l’ensemble des représentants des associations et des syndicats – ce ne sont pas toujours les mêmes – pour que cette question soit résolue. Nous y sommes particulièrement attentifs, ce qui n’était pas le cas, je suis au regret de vous le dire, ces dernières années.

Une question fondamentale va nous occuper dans la suite du débat : les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE. Beaucoup d’entre vous, sur différentes travées, ont affirmé que c’était l’essentiel. Vous avez raison. Nous sommes obligés de convenir que nous avons rencontré ces dernières années de très nombreuses difficultés concernant la formation des enseignants.

Ces ESPE, nous les avons conçues avec une formidable ambition et avec une méthode. Les principes, vous les connaissez : il s'agit de faire en sorte que les enseignants, qu’ils se destinent à enseigner en maternelle ou dans le supérieur, puissent passer du temps ensemble, et que ceux qui se destinent à être professeurs puissent travailler avec des éducateurs et des professionnels travaillant dans d’autres milieux. C’est l’école de demain ! Au vrai, c’est déjà l’école d’aujourd'hui.

Nous devons aussi faire en sorte que l’école du xxie siècle, c'est-à-dire celle que nous sommes en train de construire, intègre dans la formation des enseignants à la fois les disciplines et didactiques qui sont absolument indispensables et tous les éléments constituant aujourd'hui l’acte d’enseignement.

Il faut, par exemple, préparer les enseignants à l’école inclusive en leur fournissant, dans le cadre des enseignements de tronc commun, des informations sur le sujet. On peut également envisager la mise en place de modules sur l’égalité entre filles et garçons, les difficultés de la France dans ce domaine étant avérées. Il serait dans l’intérêt du pays que nous puissions garantir une réelle égalité entre filles et garçons, notamment que nous fassions en sorte qu’une bachelière de section S puisse aisément poursuivre un cursus dans les filières d’ingénieurs, et il faut préparer les enseignants à cela.

À plusieurs reprises, madame Blondin, vous avez évoqué les questions de santé. Elles sont tout à fait fondamentales.

La pédagogie n’est pas une science ; c’est un art. Il est donc nécessaire d’éduquer le regard des inspecteurs, comme celui des professeurs. Avoir à sa disposition une multitude de théories permet d’appréhender l’individu dans sa complétude. Il ne s’agit pas de se faire, ici, le promoteur de la psychanalyse, là, celui des théories de Jean Piaget ou d’Henri Wallon. Il faut simplement permettre à chacun, comme cela a pu se faire autrefois dans l’enseignement primaire, de développer une vision lui octroyant la capacité d’intervenir dans le domaine tout à la fois de la prévention, de la remédiation et des pédagogies différenciées précédemment évoquées par Jean-Claude Carle.

Ces écoles supérieures sont en train de sortir de terre, grâce à la bonne volonté de tous, et seront pleinement intégrées aux universités.

Toujours dans un souci de transparence, je présenterai lundi prochain, à Lyon, en liaison avec ma collègue Geneviève Fioraso, les résultats que nous avons obtenus à ce jour. Faut-il s’étonner, dès lors qu’on a souhaité l’autonomie des universités, que ces résultats diffèrent d’un endroit à l’autre du territoire, comme c’est d’ailleurs le cas pour la réforme des rythmes scolaires ? Non !

N’étant pas favorables aux « évaluations-sanctions », nous allons accompagner les différents acteurs pour améliorer cette situation et réaliser les objectifs que nous avons fixés. Mais nous sommes déjà très au-delà, non pas de ce qui existait voilà un ou deux ans – le dispositif avait été supprimé –, mais de ce que certains peuvent encore imaginer quant à la formation des enseignants aujourd’hui.

À cet égard, je lisais hier que nous aurions maintenu un système dans lequel il fallait faire du disciplinaire d’abord et du pédagogique ensuite. C’est le contraire ! Dès la licence, il y aura des modules professionnalisants ! Je lisais que la formation continue était abandonnée. Alors qu’elle n’entrait pas dans les prérogatives des IUFM, nous l’avons réintégrée dans celles des ESPE !

Il faut donc tout de même que les professeurs, qui ont leur pleine indépendance, mais qui doivent marquer, dans le pays, l’exigence de précision et de rigueur, aient cette même préoccupation lorsqu’ils examinent le cas des ESPE.

Cela étant dit, Madame Gonthier-Maurin, il y aura à nouveau 6 000 postes, dans le cadre du dispositif d’emploi d’avenir professeur, à la prochaine rentrée. J’y tiens beaucoup, car c’est un exemple de promotion républicaine en même temps qu’un moyen de résoudre, dans la durée, la crise du recrutement. Il nous faudra, bien entendu, être vigilants sur ce sujet.

Je n’ai absolument pas le sentiment que tous les problèmes vont être réglés. Nous en sommes loin ! Je crois toutefois que, après avoir marché dans la mauvaise direction, perdu du temps et provoqué beaucoup de découragement – un découragement que je perçois même trop souvent dans vos discours, alors même que l’école est le cœur battant de la République et que c’est d’abord à l’école qu’il faut croire –, nous nous sommes remis en mouvement et progressons désormais sur le bon chemin.

Au-delà des votes qui seront émis cet après-midi, et bien que je souhaite du fond du cœur, comme je l’ai déjà vu sur l’école, que nous puissions très largement rassembler autour de ce projet de loi, j’ai conscience que nous ne sommes qu’au début de ce chemin et qu’il faudra le poursuivre. Nous avons devant nous de grands débats ! On me reproche d’aller trop vite, et puis on me suggère d’ouvrir le collège, le lycée, l’éducation prioritaire… Eh bien, rassurez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, le reste arrive ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Discussion générale (suite)

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Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. Au cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République actuellement en cours d’examen, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

En qualité de titulaires, Mme Marie-Christine Blandin, Mme Dominique Gillot, M. David Assouline, Mme Françoise Cartron, M. Jacques Legendre, Mme Colette Mélot et Mme Françoise Férat.

En qualité de suppléants, M. Ambroise Dupont, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, Mme Françoise Laborde, Mme Françoise Laurent-Perrigot, Mme Claudine Lepage, Mme Catherine Morin-Desailly et Mme Sophie Primas.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le Président du Sénat en aura été informé.

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 1er et rapport annexé

Refondation de l’école de la République

Suite de la discussion et adoption en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.

La discussion générale ayant été close, nous passons à la discussion des articles dans le texte de la commission.

Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.

En conséquence, sont irrecevables les amendements remettant en cause les articles adoptés conformes ou les articles additionnels qui sont sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 3 A

Article 1er

Le rapport définissant la programmation des moyens et les orientations de la refondation de l’école de la République, annexé à la présente loi, est approuvé.

ANNEXE

La programmation des moyens et les orientations de la refondation de l’école de la République

La loi d’orientation et de programmation constitue une étape majeure de la refondation de l’école, qui a été érigée en priorité par la Nation. Elle doit être complétée par de nombreuses autres actions qui relèvent de réformes et de dispositions non législatives.

Le rapport annexé à la présente loi vise à présenter l’ensemble des orientations et des chantiers engagés au service de la réussite de ce grand dessein éducatif.

LA REFONDATION DE L’ÉCOLE DE LA RÉPUBLIQUE : OBJECTIFS ET MOYENS

L’avenir de la jeunesse, le redressement de notre pays, son développement culturel, social et économique dépendent largement de notre capacité collective à refonder l’école de la République.

Améliorer les résultats et renforcer l’équité de notre système éducatif pour les élèves et pour le pays

Le système éducatif français ne manque pas d’atouts et a montré, dans le passé, sa grande capacité de mobilisation et d’évolution mais, depuis près de vingt ans, notre école ne progresse plus. Le niveau global des compétences des élèves formés en France doit être amélioré pour parvenir à davantage de justice dans la réussite scolaire et pour pouvoir inscrire le pays sur une trajectoire de croissance structurelle forte dans une économie de la connaissance internationale.

Depuis une dizaine d’années, le pourcentage d’élèves en difficulté face à l’écrit a augmenté de manière significative et près d’un élève sur cinq est aujourd’hui concerné en début de sixième. Si le niveau des élèves moyens a peu évolué, les évaluations témoignent d’une aggravation des difficultés parmi les élèves les plus faibles.

Près de 20 % des élèves de quinze ans connaissent de grandes difficultés de maîtrise de la langue écrite. Entre 2000 et 2009, cette proportion a augmenté d’environ 30 %, passant de 15 % à 20 %. En mathématiques et en sciences, si les résultats des élèves français en fin de scolarité obligatoire sont proches de la moyenne de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), entre 2000 et 2009, la France s’est de plus en plus éloignée de la tête du classement aux tests internationaux et le niveau a baissé en mathématiques.

Aujourd’hui, 72 % des élèves d’une génération obtiennent le baccalauréat et 36 % le baccalauréat général. Les objectifs reformulés en 2005 étaient d’assurer que 80 % d’une classe d’âge accèdent au niveau du baccalauréat et de conduire 50 % de l’ensemble d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur.

Trop de jeunes sortent du système scolaire sans qualification. En 2011, 12 % des jeunes âgés de dix-huit à vingt-quatre ans ont quitté le système scolaire sans diplôme ou uniquement avec le diplôme national du brevet. Or, ce sont ces jeunes que le chômage touche en priorité, avec un taux de chômage plus de deux fois supérieur pour les non-diplômés.

Si les problèmes les plus évidents se manifestent dans le second degré avec des élèves sortant précocement du système scolaire ou avec des élèves qui subissent leurs orientations, les difficultés scolaires se forment dès le premier degré.

À l’issue de leur scolarité à l’école primaire, on constate que 25 % des élèves ont des acquis fragiles et 15 % d’entre eux connaissent des difficultés sévères ou très sévères. De plus, les écarts se creusent entre les groupes d’élèves ayant les meilleurs résultats et les groupes de ceux qui obtiennent les résultats les plus faibles, qui sont de plus en plus nombreux.

De fait, le système éducatif français ne parvient pas à lutter suffisamment contre les déterminismes sociaux et territoriaux qui engendrent des inégalités sociales et géographiques et entraînent déclassement et crise de confiance pour une partie de la population. La France se classe dans les derniers rangs des pays de l’OCDE (vingt-septième sur trente-quatre pays) du point de vue de l’équité scolaire, ce qui signifie que l’incidence de l’appartenance sociale sur les résultats scolaires y est plus forte que dans d’autres pays de l’OCDE. Les données statistiques nationales montrent l’importance et la persistance des écarts entre résultats scolaires selon les lieux de scolarisation et donc la difficulté de lutter contre les inégalités sociales et territoriales : le pourcentage des élèves n’ayant pas atteint des acquis suffisants en français en CE1 est deux fois plus élevé dans certaines académies que dans d’autres. De même, le taux de réussite au baccalauréat général peut varier de près de dix points entre académies de la métropole, l’écart étant encore plus fort avec les académies d’outre-mer. Enfin, la maîtrise des compétences de base en troisième s’est dégradée significativement entre 2007 et 2011 pour les élèves de l’éducation prioritaire.

Ces inégalités mettent à mal la promesse républicaine, qui est de permettre la réussite de tous. La refondation doit conduire à une réduction de l’impact des déterminismes sociaux et de toutes les inégalités et discriminations.

Les objectifs fixés par la Nation à son école : une école à la fois juste pour tous et exigeante pour chacun

La refondation de l’école doit en priorité permettre une élévation générale du niveau de tous les élèves. Les objectifs sont d’abord de nature pédagogique :

– faire en sorte que tous les élèves maîtrisent les compétences de base en français (lecture, écriture, compréhension et vocabulaire) et les compétences en mathématiques (nombre, calcul et géométrie) en fin de CE1 (suivi de l’indicateur relatif à la proportion d’élèves maîtrisant en fin de CE1 les compétences du palier 1 du socle commun) et que tous les élèves maîtrisent les instruments fondamentaux de la connaissance en fin d’école élémentaire (suivi de l’indicateur relatif à la proportion d’élèves maîtrisant en fin de CM2 les compétences du palier 2 du socle commun) ;

– réduire à moins de 10 % l’écart de maîtrise des compétences en fin de CM2 entre les élèves de l’éducation prioritaire et les élèves hors éducation prioritaire (suivi des indicateurs relatifs à l’écart des pourcentages d’élèves maîtrisant en fin de CM2 les compétences 1 et 3 du palier 2 du socle commun entre les établissements de l’éducation prioritaire et les établissements hors éducation prioritaire) ;

– diviser par deux la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification et amener tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture à l’issue de la scolarité obligatoire ;

– réaffirmer les objectifs de conduire plus de 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat et 50 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur.

Ces objectifs s’inscrivent dans le cadre de nos engagements européens et justifient la priorité accordée à l’école primaire pour réduire la difficulté scolaire et pour élever le niveau global de qualification de tous les élèves au terme de leur formation initiale.

L’ensemble de la communauté éducative (enseignants, personnels d’éducation, d’encadrement, administratifs, médico-sociaux et de service, conseillers d’orientation-psychologues, psychologues de l’éducation nationale, élèves, parents, responsables d’associations, représentants des collectivités territoriales...) et l’ensemble des composantes du système éducatif (enseignement du premier degré, du second degré et du supérieur, enseignement général, technologique et professionnel, enseignement technique agricole, enseignement public et privé, universités et écoles supérieures du professorat et de l’éducation, administrations centrales et académiques...) doivent se mobiliser pour la réalisation de ces objectifs. Ils accompagnent les mesures de refondation de l’école.

La refondation a pour objet de faire de l’école un lieu de réussite, d’autonomie et d’épanouissement pour tous ; un lieu d’éveil à l’envie et au plaisir d’apprendre, à la curiosité intellectuelle, à l’ouverture d’esprit, à l’éducation au sensible ; un lieu où il soit possible d’apprendre et d’enseigner dans de bonnes conditions ; un lieu de sociabilisation permettant de former des citoyens et des jeunes qui pourront s’insérer dans la société et sur le marché du travail au terme d’une orientation choisie ; un lieu sachant transmettre et faire partager les valeurs de la République.

La refondation de l’école de la République nécessite de définir des orientations selon une stratégie d’ensemble qui porte sur les différentes composantes du système éducatif. Les différentes orientations concourent aux objectifs pédagogiques assignés par la Nation à son école :

– réinvestir dans les moyens humains à la fois de façon quantitative (volet programmation) et qualitative (notamment par la mise en place d’une formation initiale professionnalisante pour les personnels avec les écoles supérieures du professorat et de l’éducation) ;

– donner la priorité à l’école primaire, qui est le moment de la scolarité où se construisent les apprentissages fondamentaux, afin de prévenir les échecs scolaires ;

– développer une grande ambition numérique pour enseigner par le numérique et enseigner le numérique. La maîtrise des technologies de l’information et de la communication et le bon usage des ressources numériques, notamment pédagogiques, constituent un enjeu et une opportunité majeurs en matière éducative ;

– faire évoluer les politiques de réussite éducative comme l’éducation prioritaire, l’aide aux enfants en difficulté et les dispositifs de lutte contre le décrochage pour lutter contre les inégalités sociales et territoriales. L’égalité des territoires passe par une affectation prioritaire des moyens attribués en faveur des territoires en difficulté pour permettre un rééquilibrage ;

– engager fortement l’éducation nationale dans l’accompagnement des évolutions professionnelles grâce à une formation professionnelle initiale et continue de qualité ;

– rénover le système d’orientation et d’insertion professionnelle et développer son évaluation ;

– permettre et améliorer l’accès des élèves en situation de handicap à une scolarité ordinaire ;

– améliorer le climat scolaire pour refonder une école sereine et citoyenne en redynamisant la vie scolaire et en prévenant et en traitant les problèmes de violence et d’insécurité ;

– modifier en profondeur l’organisation et le contenu des enseignements et leur évaluation (mise en place d’un Conseil national d’évaluation, d’un Conseil supérieur des programmes et renforcement de certains enseignements) ainsi que les pratiques pédagogiques, dont le rôle est déterminant pour la réussite de tous les élèves.

Affecter des moyens humains au service des priorités de la refondation sur la durée de la législature

Après des années de réduction des emplois, la refondation de l’école consiste d’abord à réinvestir dans les moyens humains qui sont mis à son service. Il est ainsi programmé la création de 60 000 emplois dans l’enseignement sur la durée de la législature.

Sur ce total, 54 000 emplois seront créés au ministère de l’éducation nationale, 5 000 au ministère de l’enseignement supérieur et 1 000 au ministère de l’agriculture.

Pour le ministère de l’éducation nationale, un premier investissement est nécessaire pour mener à bien la refondation de l’école, au travers de la formation initiale des enseignants. 26 000 postes seront donc consacrés au rétablissement d’une véritable formation initiale pour nos enseignants. Cela correspond, dans un premier temps, au remplacement de tous les départs en retraite d’enseignants prévus chaque année, ainsi qu’aux postes de stagiaires nécessaires pour créer des emplois d’enseignant, dans un second temps.

À ces emplois s’ajoute la création de 1 000 postes d’enseignants chargés d’assurer la formation initiale et continue des enseignants dans les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) en complément des moyens qui seront dégagés dans les universités. Les enseignants qui occupent ces postes seront encouragés à continuer à exercer à temps partiel une activité directe d’enseignement dans le premier ou le second degré.

Par ailleurs, 21 000 postes d’enseignants titulaires seront créés pendant le quinquennat, en plus des postes nécessaires à la réforme de la formation initiale. Ces nouveaux moyens constituent un élément essentiel de la priorité donnée au premier degré puisque les deux tiers de ces emplois nouveaux seront destinés aux écoles.

Dans le premier degré, ces moyens permettront, tout d’abord, un développement de l’accueil des enfants de moins de trois ans, en particulier dans les zones d’éducation prioritaire ou dans les territoires ruraux isolés les moins bien pourvus, ainsi que dans les départements et régions d’outre-mer. Cela nécessite un total de 3 000 postes sur la totalité du quinquennat.

Par ailleurs, 7 000 postes nouveaux permettront, dans les secteurs les plus fragiles, de favoriser l’évolution des pratiques pédagogiques, notamment via le dispositif du « plus de maîtres que de classes », de renforcer l’encadrement, d’accompagner les organisations pédagogiques innovantes et de renforcer l’action des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) et celle des autres dispositifs de remédiation scolaire au service d’une amélioration significative des résultats scolaires.

Enfin, les évolutions démographiques attendues nécessitent de mobiliser 4 000 postes supplémentaires dans le premier degré, qui serviront également à procéder à des rééquilibrages territoriaux et à améliorer le remplacement dans les zones ayant le plus souffert des suppressions d’emplois décidées ces cinq dernières années.

Au total, 14 000 postes d’enseignants titulaires seront donc créés dans le premier degré.

Dans le second degré, les moyens nouveaux seront en priorité consacrés à la mise en place, dans les collèges comptant une forte proportion d’élèves en difficulté et les lycées professionnels, de dispositifs pédagogiques adaptés à l’hétérogénéité des publics et de parcours favorisant la réussite de tous les élèves. L’objectif est notamment de lutter contre le phénomène du décrochage des élèves du second degré. Cela nécessite la création de 4 000 postes.

Comme dans le premier degré, des moyens sont également prévus pour tenir compte des évolutions démographiques et procéder à un rééquilibrage de la répartition de moyens humains dans les collèges et lycées : 3 000 postes sont ainsi mobilisés d’ici à 2017. Ils serviront également à améliorer le remplacement dans les zones ayant le plus souffert des suppressions d’emplois entre 2007 et 2012.

Au total, 7 000 postes d’enseignants titulaires seront donc créés dans le second degré.

À ces 21 000 postes d’enseignants titulaires s’ajoutent les moyens d’enseignement dégagés par les postes créés au titre de la formation initiale. En effet, les 26 000 stagiaires effectueront un demi-service d’enseignement, ce qui représente un apport de 13 000 moyens nouveaux devant élèves.

D’ici la fin du quinquennat, ce sont plus de 150 000 recrutements qui auront été réalisés par la voie des concours externes d’enseignants publics et privés. À partir de la rentrée 2014, tous les étudiants recrutés par cette voie bénéficieront d’une formation initiale au métier d’enseignant. Ce chiffre constitue une prévision fondée sur l’estimation des départs en retraite sur la période. Le chiffre exact des ouvertures de postes prévues chaque année sera fixé en tenant compte de l’actualisation des départs en retraite constatés.

Des moyens sont par ailleurs prévus pour répondre aux besoins du système éducatif : la scolarisation des élèves en situation de handicap, de même que les moyens humains dédiés à la prévention et à la sécurité, l’accompagnement des élèves, le suivi médical et social et l’amélioration du pilotage des établissements et des services académiques seront fortement soutenus, avec la création de 6 000 emplois supplémentaires.

Les lois de finances votées chaque année définiront précisément la programmation annuelle de ces emplois supplémentaires.

 

Réforme de la formation initiale

27000

Enseignants stagiaires

Enseignants titulaires formateurs

26000

1000

Enseignants titulaires

21000

dont premier degré (public et privé)

Scolarisation des enfants de moins de 3 ans

Renforcement de l’encadrement pédagogique dans les zones difficiles

Amélioration de l’équité territoriale interacadémique

14000

3000

7000

4000

dont second degré (public et privé)

Collèges en difficulté et lycées professionnels : lutte contre le décrochage

Amélioration de l’équité territoriale interacadémique

7000

4000

3000

Accompagnement des élèves en situation de handicap, CPE, personnels

administratifs, médico-sociaux, vie scolaire

6000

Total

54000

 

Dans l’enseignement agricole, les postes créés durant la législature seront dans leur grande majorité des postes d’enseignants pour renforcer les établissements d’enseignement agricole. De façon complémentaire, seront créés des postes d’agents administratifs, de techniciens, de personnels de santé et des emplois d’auxiliaires de vie scolaire pour améliorer la scolarisation des élèves en situation de handicap.

LA REFONDATION DE L’ÉCOLE DE LA RÉPUBLIQUE : ORIENTATIONS

I. – Une refondation pédagogique

Refonder la formation initiale et continue aux métiers du professorat et de l’éducation

Le premier enjeu de la refondation est essentiellement qualitatif. La qualité d’un système éducatif tient d’abord à la qualité de ses enseignants. Les élèves ont non seulement besoin de professeurs, mais surtout de professeurs bien formés. La formation des enseignants est un levier majeur pour améliorer notre système éducatif et pour permettre son adaptation aux enjeux du XXIe siècle. De nombreuses études attestent l’effet déterminant des pratiques pédagogiques des enseignants dans la réussite des élèves. Enseigner est un métier exigeant qui s’apprend.

L’adjonction de moyens supplémentaires sans modification des pratiques n’aurait que peu d’effet sur les résultats de notre système éducatif. Pour transformer les pratiques professionnelles des enseignants et leur donner les outils nécessaires à l’accomplissement de leur mission, la formation initiale et continue est le meilleur levier d’action : actualisation des connaissances, préparation des activités pédagogiques, attitude en classe, utilisation et intégration dans la pratique pédagogique des ressources numériques, prise en compte des besoins éducatifs particuliers et aide au repérage des difficultés, notamment d’apprentissage, scolarisation des élèves en situation de handicap, spécificité de l’enseignement de l’expression écrite ou orale et de la lecture en français dans les départements, les collectivités et les territoires ultra-marins, problématiques liées à l’orientation, à l’insertion professionnelle et à la connaissance du marché du travail, prévention des situations de tension et de violence, formation aux thématiques sociétales (lutte contre tous les stéréotypes comme ceux liés au genre ; éducation à l’environnement et au développement durable ; économie solidaire...).

La réforme de la formation initiale des enseignants est fondée sur une entrée progressive dans le métier.

Le Parlement a adopté le dispositif des emplois d’avenir professeur. Ce dispositif permettra à des étudiants modestes d’envisager les études longues nécessaires à l’exercice du métier d’enseignant ; il permettra aussi de redynamiser des viviers de candidats sur les territoires et dans les disciplines qui en ont le plus besoin. Pour les trois prochaines années, il est prévu une montée en charge du dispositif des emplois d’avenir professeur : 6 000 emplois en 2013, 12 000 en 2014 et 18 000 en 2015.

Pour restaurer le vivier de recrutement tout en accroissant la diversité d’origine sociale du corps enseignant, il est également impératif d’étudier les modalités de mise en œuvre d’un système de prérecrutement des personnels enseignants dès la licence.

La formation est un continuum qui se déroulera en plusieurs temps : la formation initiale, avec une préprofessionnalisation, qui débute en licence et qui se conclut avec l’acquisition d’un master professionnel ; la formation continue enfin, qui est indispensable pour permettre aux enseignants de rester au contact de la recherche, des avancées dans leur discipline ainsi que des évolutions qui traversent les métiers de l’éducation et la société.

Pour organiser cette formation professionnalisante au métier d’enseignant, la loi prévoit la création des ESPE, qui accueilleront leurs premiers étudiants en septembre 2013 et qui formeront les enseignants, de l’école maternelle à l’université.

Les ESPE seront des écoles internes aux universités. Elles seront des écoles ouvertes sur les autres composantes de l’université et développeront une démarche partenariale interuniversitaire. De même, elles seront ouvertes sur le milieu scolaire et fonctionneront en associant l’ensemble des praticiens intervenant dans le milieu scolaire.

Le développement d’une culture commune à tous les enseignants et à l’ensemble de la communauté éducative doit permettre d’encourager le développement de projets transversaux et interdisciplinaires. La recherche sera au cœur des enseignements qui seront dispensés au sein des ESPE.

Afin d’assurer au mieux leurs missions de formation initiale et continue, les écoles assureront des enseignements transversaux, formeront les futurs enseignants aux nouveaux outils numériques, et, par la mise en pratique, sensibiliseront au travail en équipe, aux approches multidisciplinaires et au travail avec d’autres acteurs que ceux de l’éducation nationale, notamment issus des milieux culturels, artistiques, sportifs ou citoyens.

Le cadre national des formations dispensées et la maquette des concours de recrutement, élaborés conjointement par les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche, seront fondés sur une plus grande prise en compte des qualités professionnelles des candidats et sur le développement des savoir-faire professionnels.

Les ESPE seront dirigées par un directeur nommé conjointement par les ministres de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

Si la formation des enseignants constitue un levier majeur pour améliorer la réussite des élèves, la formation initiale et continue des personnels d’encadrement (personnels de direction, d’inspection et administratifs) est indispensable au bon pilotage du système éducatif. Le renforcement de cette formation doit s’appuyer sur la mise en cohérence des plans académiques de formation et des contenus de formation proposés par l’école supérieure de l’éducation nationale.

Placer le contenu des enseignements au cœur de la refondation

– Créer un Conseil supérieur des programmes

Un Conseil supérieur des programmes est placé auprès du ministre de l’éducation nationale. Cette instance consultative offre les garanties scientifiques, pédagogiques et de transparence nécessaires à l’élaboration des programmes d’enseignement.

Ce conseil formule des propositions sur la conception générale des enseignements dispensés aux élèves des écoles, collèges et lycées. Il fait des propositions sur le contenu du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, ainsi que sur les programmes scolaires et leur articulation avec les cycles d’enseignement.

Afin d’avoir une vision globale des programmes et de leur articulation avec le socle commun, le conseil devra organiser ses réflexions, non seulement par grand domaine disciplinaire mais aussi par cycle, afin de garantir une cohérence interne forte en termes de connaissances, de compétences et d’apprentissages à chaque cycle.

Le Conseil supérieur des programmes fait également des propositions sur la nature des épreuves des examens conduisant aux diplômes de l’enseignement du second degré. Il se prononce notamment sur l’évolution du diplôme national du brevet et son articulation avec la validation du socle commun de connaissances, de compétences et de culture ainsi que sur l’évolution des différents baccalauréats, généraux, technologiques et professionnels.

Enfin, pour assurer une cohérence entre les enseignements dispensés et la formation des enseignants, le Conseil supérieur des programmes donne un avis sur la nature et le contenu des épreuves de recrutement d’enseignants du premier et du second degrés et sur la conception générale de leur formation au sein des ESPE.

– Repenser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture et mieux l’articuler avec les programmes d’enseignement

La scolarité obligatoire doit garantir les moyens nécessaires à l’acquisition de ce socle constituant la culture commune de tous les jeunes et favorisant la poursuite d’études secondaires, quelles qu’elles soient. Le socle commun actuel, introduit par la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, est cependant trop complexe et sa mise en œuvre n’a pas été satisfaisante. La conception et les composantes du socle commun seront donc réexaminées par le Conseil supérieur des programmes, afin qu’il devienne le principe organisateur de l’enseignement obligatoire dont l’acquisition doit être garantie à tous.

– Faire évoluer les modalités d’évaluation et de notation des élèves

Les modalités de la notation des élèves doivent évoluer pour éviter une « notation-sanction » à faible valeur pédagogique et privilégier une évaluation positive, simple et lisible, valorisant les progrès, encourageant les initiatives et compréhensible par les familles. En tout état de cause, l’évaluation doit permettre de mesurer le degré d’acquisition des connaissances et des compétences ainsi que la progression de l’élève.

Il faut aussi remédier à la difficulté pour les enseignants d’évaluer les élèves avec des dispositifs lourds et peu coordonnés entre eux. Ainsi, l’évolution des modalités de notation passe notamment par une réforme du livret personnel de compétences actuel, qui est trop complexe, et une diversification des modalités de l’évaluation.

– Mettre en place de nouveaux contenus d’enseignement pour la scolarité obligatoire

Plusieurs enseignements particuliers seront développés et leurs contenus feront l’objet de propositions du Conseil supérieur des programmes.

. Un enseignement moral et civique

Enseigner et faire partager les valeurs de la République est une des missions qui incombent à l’école. L’ensemble des disciplines d’enseignement et des actions éducatives participe à l’accomplissement de cette mission. Aujourd’hui, l’instruction civique à l’école primaire, l’éducation civique au collège et l’éducation civique, juridique et sociale au lycée, notamment, y concourent. Pour donner davantage de continuité et de lisibilité à cet ensemble, les principes, les modalités d’évaluation de ces enseignements ainsi que les modalités de formation des enseignants et des autres personnels seront précisés pour une mise en œuvre à la rentrée 2015.

L’enseignement de la morale laïque, tout comme l’instruction et l’éducation civiques, participe de la construction d’un mieux-vivre ensemble au sein de notre société. Ces enseignements visent notamment à permettre aux élèves d’acquérir et comprendre l’exigence du respect de la personne, de ses origines et de ses différences, mais aussi l’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi que les fondements et le sens de la laïcité, qui est l’une des valeurs républicaines fondamentales. Ils contribuent à former des esprits libres et responsables, aptes à se forger un sens critique et à adopter un comportement réfléchi et empreint de tolérance.

La devise de la République, le drapeau tricolore et le drapeau européen doivent figurer à la façade de tout établissement scolaire public ou privé sous contrat. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 doit être apposée au sein de tous ces établissements.

. Un parcours d’éducation artistique et culturelle

L’éducation artistique et culturelle est un puissant levier d’émancipation et d’intégration sociale. Les initiatives ont été multiples ces dix dernières années, mais sans cohérence d’ensemble et de façon souvent contradictoire entre les objectifs affichés en matière de réduction des inégalités d’accès à la culture et de pratiques artistiques et les réalisations en termes d’atteinte des publics d’élèves défavorisés.

Afin de réduire les inégalités et de favoriser un égal accès de tous les jeunes à l’art et à la culture, il est mis en place un parcours d’éducation artistique et culturelle personnalisé tout au long de la scolarité des élèves.

Ce parcours doit permettre d’acquérir des savoirs artistiques et culturels, de pratiquer les arts, de découvrir des œuvres, des artistes, des monuments et des lieux à caractère artistique et culturel. Ce parcours doit s’appuyer sur les apports conjugués de l’institution scolaire et de ses partenaires : collectivités locales, institutions culturelles, associations. Il doit être l’occasion de mettre en place des pratiques pédagogiques coconstruites innovantes et actives, envisageant aussi l’art comme vecteur de connaissances.

À cette fin, il faut mieux structurer ce partenariat et travailler à une complémentarité entre les interventions sur des temps éducatifs articulés entre eux : temps scolaire, périscolaire et extrascolaire.

. Une langue vivante dès le cours préparatoire

Les résultats des élèves français en langues vivantes sont particulièrement alarmants. Les enquêtes internationales montrent qu’ils sont non seulement loin de maîtriser les compétences attendues en fin de troisième, mais surtout qu’ils arrivent en dernière position de l’ensemble des élèves européens évalués pour la maîtrise de ces compétences.

La précocité de l’exposition et de l’apprentissage en langue vivante, étrangère et régionale, est un facteur avéré de progrès en la matière.

Il sera instauré un enseignement en langues vivantes dès le début de la scolarité obligatoire. Dans les académies concernées, l’apprentissage complémentaire d’une langue régionale sera favorisé et le bilinguisme français-langue régionale sera encouragé dès la maternelle.

La fréquentation d’œuvres et de ressources pédagogiques en langue étrangère ou régionale dans les activités éducatives durant le temps scolaire et les temps périscolaires et extrascolaires sera encouragée.

Dans les territoires où les langues régionales sont en usage, leur apprentissage, pour les familles qui le souhaitent, sera favorisé. Ainsi, outre l’enseignement de langues et cultures régionales qui peut être dispensé tout au long de la scolarité par voie de convention entre l’État et les collectivités territoriales où ces langues sont en usage, les activités éducatives et culturelles complémentaires qui peuvent être organisées par les collectivités territoriales pourront porter sur la connaissance des langues et des cultures régionales.

Pour favoriser l’accès aux écoles dispensant un enseignement de langue régionale, les élèves résidant dans une commune dont les écoles ne proposent pas un tel enseignement auront la possibilité d’être inscrits dans une école d’une autre commune dispensant cet enseignement, sous réserve de l’existence de places disponibles.

. L’éducation à l’environnement

Face aux défis environnementaux du XXIe siècle, il est indispensable de fournir aux élèves une éducation à l’environnement sur l’ensemble de leur cursus scolaire. Cette éducation doit, d’une part, viser à nourrir la réflexion des élèves sur les grands enjeux environnementaux comme la qualité de l’air, les changements climatiques, la gestion des ressources et de l’énergie ou la préservation de la biodiversité. Elle doit aussi, d’autre part, sensibiliser aux comportements écoresponsables et aux savoir-faire qui permettront de préserver notre planète en faisant évoluer notre manière de vivre et de consommer. Cette éducation, de nature pluridisciplinaire, ne se restreint pas à un enseignement magistral et peut inclure des expériences concrètes.

. La promotion de la culture scientifique et technologique

La culture scientifique et technologique prépare le futur citoyen à comprendre le monde qui l’entoure et à appréhender les défis sociétaux et environnementaux.

Sa diffusion doit également permettre à la France de conforter son avance scientifique, son tissu industriel, son potentiel économique, sa capacité d’innovation et sa compétitivité en formant les techniciens, chercheurs, ingénieurs, entrepreneurs de demain.

Il importe donc de développer à l’école, pendant le temps scolaire et périscolaire, une politique de promotion de la science et de la technologie.

Tout au long de la scolarité, seront développées les relations entre le milieu scolaire et les acteurs du monde scientifique et technologique (laboratoires de recherche, ingénieurs, entreprises, musées, monde associatif...).

L’un des objectifs est que de plus en plus d’élèves, notamment de filles, au cours et à l’issue de leur parcours, souhaitent s’engager dans les carrières scientifiques et techniques. Par l’évolution des pratiques pédagogiques, une attention particulière sera portée au renforcement de l’attractivité des enseignements scientifiques et technologiques pour susciter un plaisir d’apprendre et de pratiquer ces disciplines.

– Assurer la progressivité des apprentissages de la maternelle au collège

La scolarité est organisée en cycles pour lesquels sont définis des objectifs et des programmes nationaux de formation, qui suivent une progression régulière et comportent des critères d’évaluation.

La mise en place des cycles, effective en principe depuis plus de vingt ans, a été peu mise en œuvre et n’a pas conduit à la progressivité nécessaire des apprentissages. La politique des cycles doit être relancée. Tout est fait pour éviter les transitions brutales d’un cycle à l’autre. Le passage de l’école primaire au collège doit être appréhendé de manière progressive. Le nombre et la durée des cycles doivent être réexaminés tout au long de la scolarité obligatoire à partir de deux objectifs principaux : l’unité retrouvée de l’école maternelle, qui constituera un cycle à elle seule, et une meilleure continuité pédagogique entre l’école et le collège, qui sera assurée avec la création d’un cycle associant le CM2 et la classe de sixième.

Au-delà de la création de ce cycle et afin de contribuer à l’acquisition par tous les élèves du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, chaque collège et les écoles relevant de son secteur déterminent conjointement des modalités de coopérations et d’échanges qui devront désormais être inscrites dans le projet des écoles concernées et le projet d’établissement du collège. À cet effet, un conseil école-collège est institué. Il sera chargé de proposer les actions de coopérations et d’échanges.

Enfin, il convient de poursuivre la réduction progressive du nombre de redoublements car il s’agit d’une pratique coûteuse, plus développée en France que dans les autres pays et dont l’efficacité pédagogique n’est pas probante.

Dans le cadre de l’acquisition des connaissances, compétences et méthodes attendues en fin de cycle et non plus en fin d’année scolaire, le redoublement d’une année scolaire doit être exceptionnel.

Tout au long de leur parcours, de la maternelle à la fin du collège, les élèves doivent recevoir les aides nécessaires à la réussite de leur scolarité et à la validation du socle, notamment dans le cadre des projets personnalisés de réussite éducative.

Les séjours de découverte sont pour les élèves, le groupe classe et leurs enseignants une expérience éducative et pédagogique unique, qui participe directement à l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. C’est pourquoi il est souhaitable que l’école permette que chaque élève ait l’occasion de bénéficier d’un séjour de découverte au moins une fois au cours de la scolarité obligatoire, dans le cadre de l’apprentissage de la vie commune et dans un objectif pédagogique.

Donner la priorité à l’école primaire

– Redéfinir les missions de l’école maternelle

Les missions de l’école maternelle seront redéfinies en lui donnant une unité par la création d’un cycle unique (petite section, moyenne section et grande section). Cette redéfinition prendra effet à la rentrée 2014. Il ne s’agit pas de refermer l’école maternelle sur elle-même, mais de lui permettre de préparer progressivement les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l’école élémentaire.

Les enseignants de grande section de maternelle et de cours préparatoire d’un même secteur de recrutement continueront à se rencontrer de manière régulière afin d’échanger sur les acquis des élèves à l’issue de l’école maternelle et sur les besoins spécifiques des élèves bénéficiant d’aménagements particuliers de scolarité.

En développant chez chacun la confiance en soi et l’envie d’apprendre, l’école maternelle doit conforter et stimuler le développement affectif, social, sensoriel, moteur et cognitif des enfants et les initier aux différents moyens d’expression. Elle assure une première acquisition des principes de la vie en société et de l’égalité entre les filles et les garçons. La prévention des difficultés scolaires y est assurée par la stimulation et la structuration du langage oral et l’initiation à la culture écrite.

– Augmenter l’accueil des enfants de moins de trois ans à l’école maternelle

La scolarisation précoce d’un enfant de moins de trois ans est une chance pour lui et sa famille lorsqu’elle est organisée dans des conditions adaptées à ses besoins. C’est en particulier un levier essentiel pour la réussite scolaire des enfants de milieux défavorisés.

La scolarisation des moins de trois ans est très inégale selon les territoires et elle a fortement diminué ces dernières années. La cible prioritaire des élèves défavorisés n’est pas atteinte.

Pour faire de l’école maternelle un atout dans la lutte contre la difficulté scolaire, l’accueil des enfants de moins de trois ans sera privilégié dans les secteurs de l’éducation prioritaire, dans les secteurs ruraux isolés et dans les départements et régions d’outre-mer.

Des moyens en enseignants seront mobilisés en priorité à cette fin dès la rentrée 2013 et tout au long de la législature.

Une meilleure formation des enseignants et un partenariat avec les collectivités compétentes permettra d’améliorer l’accueil matériel, éducatif et pédagogique de ces très jeunes enfants.

– Faire évoluer les pratiques pédagogiques par la mise en place du dispositif « plus de maîtres que de classes »

L’affectation dans une école d’un maître supplémentaire sera un dispositif qui participera pleinement de la refondation de l’école. Des moyens en enseignants seront mobilisés à cette fin dès la rentrée 2013 et tout au long de la législature.

Il s’agit, par cette dotation, de mieux répondre aux difficultés rencontrées par les élèves et de les aider dans l’acquisition des apprentissages indispensables à une scolarité réussie, en intervenant principalement et prioritairement dans la classe. La détermination des modalités d’intervention est à définir en équipe, selon des contextes que les maîtres connaissent précisément, en fonction des besoins des élèves.

Afin de prévenir et de réduire sensiblement les difficultés scolaires, et sans exclure l’utilisation de ce dispositif dans les autres niveaux d’enseignement, il convient de concentrer les moyens sur les premières années de l’enseignement et dans les zones scolaires les plus en difficulté. Dans ces écoles, un renforcement significatif et ciblé de l’encadrement dans les premières classes de l’école primaire devrait permettre de mettre en œuvre des pratiques pédagogiques renouvelées et d’accroître la performance d’acquisition de la lecture et de l’écriture. Les élèves recevront ainsi les aides nécessaires pour leur permettre de réussir leur scolarité.

Une attention particulière sera également portée aux territoires ruraux et de montagne. Lors de l’élaboration de la carte scolaire, les autorités académiques auront un devoir d’information et de concertation avec les exécutifs locaux des collectivités territoriales concernées. Les enfants de moins de trois ans devront être comptabilisés dans les effectifs des écoles situées dans un environnement social défavorisé.

Les spécificités des missions et du fonctionnement des RASED seront réexaminées et s’intégreront dans une logique de complémentarité avec l’ensemble des dispositifs d’aide.

L’objectif est de pouvoir parvenir à une augmentation générale du niveau des élèves à l’issue de l’école primaire ainsi qu’à une diminution sensible des redoublements.

– Réformer les rythmes scolaires

Les différents rapports d’expertise ont montré l’inadaptation des rythmes scolaires actuels dans le premier degré. L’introduction, en 2008, de la semaine de quatre jours, avec vingt-quatre heures de classe par semaine, et de deux heures d’aide personnalisée a conduit à une situation exceptionnelle, à rebours des tendances internationales : alors qu’un nombre croissant de pays tendent à étaler leur calendrier scolaire sur un plus grand nombre de jours, la France a concentré la scolarité des enfants les plus jeunes sur 144 jours annuels d’école primaire.

En revanche, le volume horaire annuel est l’un des plus importants, à l’école primaire comme dans l’enseignement secondaire. De ce fait, les écoliers, collégiens et lycéens français ont une journée plus dense et plus chargée que celle de la plupart des autres élèves dans le monde.

Les conséquences d’une telle organisation sont nettement défavorables, notamment pour les enfants rencontrant des difficultés. Pour la réussite de tous dans le premier degré, il est nécessaire de revoir l’organisation du temps à l’école primaire.

La réforme des rythmes sera engagée dès la rentrée scolaire de 2013 et achevée à la rentrée 2014 dans le premier degré. Elle consistera à revenir à neuf demi-journées de classe, pour instaurer une continuité dans la semaine scolaire et pour mieux organiser les apprentissages. La matinée d’enseignement supplémentaire prendra place le mercredi, sauf dérogation sollicitée auprès des autorités académiques. Elle permettra d’alléger les journées de classe et, en répartissant mieux le temps scolaire, d’améliorer l’efficacité des apprentissages.

Enfin, cet aménagement permettra à l’école d’assurer l’aide au travail personnel, pour tous les enfants, dans le temps scolaire et d’offrir à de petits groupes d’élèves, après le temps de classe, des activités pédagogiques complémentaires.

Cette réforme des rythmes va permettre de rendre effective l’interdiction formelle des devoirs écrits à la maison pour les élèves du premier degré.

La réforme des rythmes doit agir comme un levier pour faire évoluer le fonctionnement de l’école autour d’un projet éducatif territorial et doit conduire à mieux articuler le temps scolaire et les temps périscolaires et extrascolaires et, par conséquent, à coordonner les actions de l’État, des collectivités territoriales et des organismes œuvrant dans le champ éducatif.

La durée de l’année scolaire reste fixée à trente-six semaines à la rentrée 2013. Elle devra évoluer au cours des prochaines années, afin de correspondre au mieux aux rythmes de vie et d’apprentissage des enfants.

Afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires, l’État institue un fonds destiné aux communes et, le cas échéant, aux établissements publics de coopération intercommunale. Ce fonds vise à contribuer au développement d’une offre d’activités périscolaires. Les communes ou, le cas échéant, les établissements publics de coopération intercommunale qui mettent en place la réforme des rythmes dès la rentrée 2013 reçoivent une aide de 50 € par élève. Une majoration est réservée aux communes éligibles à la fraction « cible » de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et de la dotation de solidarité rurale, ainsi qu’aux communes d’outre-mer et à la collectivité de Saint-Martin. Cette majoration s’élève à 40 € par élève pour l’année scolaire 2013-2014 et à 45 € par élève pour l’année scolaire 2014-2015.

Repenser le collège unique

Le collège unique est un principe essentiel pour conduire tous les élèves à la maîtrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Créé en 1975, le collège unique a apporté une contribution essentielle à la réussite de la massification de l’enseignement secondaire. Mais, si le taux d’accès d’une classe d’âge en troisième est passé de 70 % à 97 %, les comparaisons internationales et européennes soulignent qu’une part trop importante d’élèves est en grande difficulté au collège, avec une corrélation marquée avec l’origine sociale.

Ces mêmes comparaisons montrent que les systèmes éducatifs les plus performants sont ceux qui sont organisés autour d’un tronc commun de formation le plus long possible pour tous les élèves. Or, depuis 1975, de multiples dispositifs de gestion des élèves en difficulté ont été mis en place, sans permettre de réduire le noyau dur de l’échec scolaire. Ces dispositifs, initialement présentés comme « provisoires » et « exceptionnels », ont le plus souvent évolué en filières ségrégatives qui ne favorisent pas l’acquisition d’une culture commune, mais conduisent souvent à exclure les élèves en difficulté au sein même du système éducatif en induisant souvent leur décrochage dans la suite de leur scolarité.

Il est donc nécessaire de réaffirmer le principe du collège unique à la fois comme élément clé de l’acquisition, par tous, du socle commun et comme creuset du vivre ensemble. Le collège unique est organisé autour d’un tronc commun qui nécessite des pratiques différenciées adaptées aux besoins des élèves. Celles-ci doivent favoriser l’épanouissement personnel et la construction de l’autonomie intellectuelle des élèves. Elles permettent la prise en charge spécifique des élèves, notamment de ceux en grande difficulté scolaire. Ces pratiques différenciées s’enrichissent de toutes les innovations et initiatives pédagogiques des équipes enseignantes, de manière à ce que le principe du collège unique ne soit pas synonyme d’uniformisation de l’enseignement et des parcours de réussite.

Il convient de remettre en cause tout dispositif ou classe d’éviction précoce qui détournerait les élèves de l’objectif de maîtrise du socle et les enfermerait trop tôt dans une filière. La loi supprime ainsi, durant les deux dernières années de collège, les dispositifs « d’apprentissage junior » et de la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi Cherpion », qui a introduit le dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA) pour les jeunes âgés de moins de quinze ans. Le fonctionnement du collège doit permettre d’organiser un tronc commun de formation pour tous au cours du premier cycle grâce à une différenciation des approches pédagogiques et à des actions de soutien pour les élèves qui éprouvent des difficultés. Pour favoriser la réussite des élèves et préparer la suite de leur scolarité, après la classe de troisième, des modules d’enseignements complémentaires au tronc commun peuvent être proposés. Les enseignements complémentaires peuvent comporter des stages contrôlés par l’État et accomplis auprès de professionnels agréés.

Les collèges doivent pouvoir disposer d’une marge de manœuvre dans la gestion de leur dotation afin que les équipes pédagogiques puissent concevoir des actions pédagogiques et des parcours scolaires favorisant la réussite de tous. Le travail en équipe et les projets de classe permettront une plus grande transversalité. Cette marge de manœuvre doit permettre, sur la base du volontariat, des expérimentations pédagogiques, des regroupements d’élèves, du travail transversal et pluridisciplinaire, des projets collectifs, etc. Ces expérimentations devront être évaluées.

Afin de favoriser le lien entre les familles et le collège, des activités autour de la parentalité sont organisées régulièrement au sein de l’établissement.

La différenciation des approches pédagogiques au sein du collège unique doit être complétée par un effort particulier pour assurer une meilleure liaison avec les autres niveaux d’enseignement. Outre la continuité pédagogique avec l’école primaire, qui sera facilitée par la mise en place d’un nouveau cycle concernant le CM2 et la sixième, une attention particulière est attendue en matière d’information et d’orientation pour permettre à tous les élèves de réussir la suite de leur parcours scolaire au moment de l’articulation entre la troisième et la seconde.

La découverte des métiers et du monde du travail ne peut plus être une option de « découverte professionnelle » réservée aux seuls élèves s’orientant vers l’enseignement professionnel. Déterminant dans la construction de l’orientation de tous les élèves, qui doivent être informés et éclairés tout au long de leurs études secondaires sur les métiers, sur les formations qui y mènent et sur les entreprises dans lesquelles ils s’exercent, un nouveau parcours de découverte du monde économique et professionnel, mis en place à partir de la rentrée 2015, s’adressera à tous et trouvera sa place dans le tronc commun de formation de la sixième à la troisième.

Mieux réussir au lycée

Les lycées doivent pouvoir disposer d’une marge de manœuvre dans la gestion de leur dotation afin que les équipes pédagogiques puissent concevoir des actions pédagogiques et des parcours scolaires favorisant la réussite de tous. Cette marge de manœuvre doit permettre, sur la base du volontariat, des expérimentations pédagogiques, des regroupements d’élèves, du travail transversal et pluridisciplinaire, des projets collectifs, etc. Ces expérimentations devront être évaluées.

– La valorisation de l’enseignement professionnel

L’enseignement professionnel représente un atout pour le redressement productif de la France et l’insertion professionnelle des jeunes. Les centaines de diplômes préparés et délivrés par les filières professionnelles contribuent à élever le niveau général de formation dans notre pays et permettent d’orienter les jeunes vers des débouchés professionnels et des emplois qualifiés.

La réforme de la voie professionnelle, qui a mis en place la préparation du baccalauréat professionnel en trois ans, a conduit à une augmentation significative du taux d’accès en terminale professionnelle des élèves issus de troisième (65 % contre 40 % dans l’ancien cursus en quatre ans) mais également à une légère baisse du taux de réussite au baccalauréat. Par ailleurs, le pourcentage des jeunes décrocheurs au cours des deux premières années (25 %) et le nombre de jeunes sortant sans diplôme demeurent trop élevés. De plus, si le taux de poursuite d’études des bacheliers professionnels dans l’enseignement supérieur a fortement augmenté, leur taux de réussite y est nettement inférieur à celui des autres bacheliers.

Tous les élèves qui s’engagent dans un cursus de baccalauréat professionnel en trois ans doivent obtenir au minimum un diplôme de niveau V, un certificat d’aptitude professionnelle (CAP) ou un brevet d’études professionnelles (BEP), quand il n’existe pas de CAP dans la branche professionnelle concernée, avant leur sortie. Pour les élèves les plus fragiles, des parcours adaptés devront être davantage proposés.

L’accès aux cycles supérieurs courts, sections de technicien supérieur (STS) et instituts universitaires de technologie (IUT), devra être facilité pour tous les bacheliers professionnels titulaires d’une mention, qui seront accompagnés dans cette scolarité.

Afin de mieux adapter l’offre de formation professionnelle aux besoins des territoires, d’anticiper et d’accompagner les mutations économiques, l’État et les régions doivent nouer un partenariat renforcé.

Au-delà de la nécessaire modernisation de la carte de formation, il conviendra de faire émerger des campus des métiers, pôles d’excellence offrant une gamme de formations professionnelles, technologiques et générales, dans un champ professionnel spécifique. Ces campus pourront accueillir différentes modalités de formation (statut scolaire, apprentissage, formation continue, validation des acquis de l’expérience) et organiser des poursuites d’études supérieures et des conditions d’hébergement et de vie sociale.

– Le lycée d’enseignement général et technologique

Le lycée d’enseignement général et technologique, de même que le lycée professionnel, sont les premiers segments de l’espace « Bac-3, Bac+3 » qui permettent d’articuler la transition entre l’enseignement secondaire et des études supérieures réussies. Il faut qu’ils intègrent les élèves issus du collège et qu’ils préparent les bacheliers à l’enseignement supérieur.

Le lycée doit assurer une continuité entre le socle commun de connaissances, de compétences et de culture et les licences universitaires, STS, IUT ou classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE).

Le lycée connaît trop d’échecs : le taux de réussite au baccalauréat est en stagnation et le taux de diplômés de l’enseignement supérieur (44 %) reste insuffisant au regard des pays comparables. L’objectif de 50 % visé par la loi d’orientation de 2005 n’est pas atteint.

Le lycée français est, en outre, un des plus coûteux et des plus denses au monde. Les séries de la voie générale sont déséquilibrées au profit de la filière scientifique. Enfin, l’accompagnement personnalisé ne donne pas tous les résultats escomptés.

La réforme du lycée d’enseignement général et technologique, entrée en application en 2010, a atteint la classe de terminale en 2012. Il est encore trop tôt pour en tirer un bilan assuré. Néanmoins, plusieurs points de vigilance apparaissent qui doivent guider les mesures à prendre à partir de la rentrée 2014.

L’objectif de faire de la classe de seconde une véritable classe de détermination n’est pas atteint. L’information des familles et des élèves dans les collèges n’est pas suffisante et l’orientation dans une série de première est fortement déterminée par le choix du lycée, notamment par son offre. La hiérarchie scolaire et sociale des séries générales et technologiques reste dominante : la plupart des élèves de collège qui peuvent choisir vont en seconde générale et technologique et, pour la moitié d’entre eux, dans la série scientifique.

À partir de 2014, des évolutions substantielles seront menées. Elles porteront notamment sur des pratiques pédagogiques innovantes (travaux personnels encadrés en terminale, projets interdisciplinaires, amélioration de l’accompagnement personnalisé...), sur l’aide à l’orientation et l’articulation avec l’enseignement supérieur et sur des parcours plus diversifiés et des séries rééquilibrées.

Développer une grande ambition pour le numérique à l’école

Nos sociétés sont profondément transformées par le numérique. La société de l’information ouvre des perspectives nouvelles en matière d’accès à la connaissance et à la formation. Le monde vit probablement une période de rupture technologique aussi importante que le fut, au XIXème siècle, la révolution industrielle. Les technologies numériques représentent une transformation radicale des modes de production et de diffusion des savoirs, mais aussi des rapports sociaux. L’école est au cœur de ces bouleversements.

Ces technologies peuvent devenir un formidable moteur d’amélioration du système éducatif et de ses méthodes pédagogiques, en permettant notamment d’adapter le travail au rythme et aux besoins de l’enfant, de développer la collaboration entre les élèves, de favoriser leur autonomie, de rapprocher les familles de l’école et de faciliter les échanges au sein de la communauté éducative. Elles offrent également des possibilités nouvelles d’apprentissage, par exemple pour l’enseignement des langues étrangères ou pour les élèves en situation de handicap.

– Créer un service public du numérique éducatif

L’école doit s’adapter et accompagner ces évolutions en créant, au sein du service public de l’éducation et afin de contribuer à l’exercice de ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance.

Ce service permet d’enrichir l’offre des enseignements qui sont dispensés dans l’établissement et de faciliter la mise en œuvre d’une pédagogie différenciée. L’offre de ressources numériques ne peut se développer au détriment des heures d’enseignement et doit être mise en service dans le respect strict des programmes scolaires, de la cohérence pédagogique des enseignements et des obligations d’accueil de tous les élèves. Dans le respect de la liberté des choix pédagogiques, le service public doit organiser à destination des élèves et des enseignants une offre de productions pédagogiques numériques à finalités éducatives, culturelles ou scientifiques.

Il met aussi à disposition des enseignants des ressources pédagogiques, des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec leurs familles, ainsi que des contenus et services destinés à leur formation initiale et continue. Ce service contribue enfin à l’instruction des enfants présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant, ou de ceux qui ne peuvent être scolarisés en établissement.

Les ressources numériques sont un formidable moyen d’enrichir le contenu des enseignements. Dans les limites fixées par la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, il est nécessaire d’élargir le champ de l’exception pédagogique afin de développer l’usage de ressources numériques dans l’éducation.

– Développer des contenus numériques pédagogiques

Des ressources et des services numériques seront mis à disposition des écoles et des établissements scolaires pour prolonger les enseignements qui y sont dispensés et leur permettre de mieux communiquer avec les familles.

Le développement de ressources et de services pédagogiques de haute qualité sera assuré notamment par la mobilisation des opérateurs de l’éducation nationale comme le Centre national de documentation pédagogique (CNDP), le Centre national d’enseignement à distance (CNED) et l’Office national d’information sur les enseignements et les professions (ONISEP).

L’incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts.

Un réseau social professionnel offrira aux enseignants une plateforme d’échange et de mutualisation.

Les ressources numériques éducatives des grands établissements éducatifs, culturels et scientifiques seront mises gratuitement à disposition des enseignants à des fins pédagogiques. Les enseignants pourront avoir accès aux ressources numériques éducatives des associations complémentaires de l’enseignement public.

Un effort important dans le domaine de la recherche et développement sera conduit, notamment par des incitations à l’investissement, pour développer des solutions innovantes en matière d’utilisation du numérique pour les apprentissages fondamentaux. Cet effort visera notamment à développer une filière d’édition numérique pédagogique française.

– Former des personnels, notamment des enseignants, au et par le numérique

Les ESPE intégreront dans la formation initiale et continue des personnels les enjeux et les usages pédagogiques du numérique.

Ces éléments devront également permettre à l’enseignant d’avoir un regard critique sur les usages pédagogiques qu’il met en œuvre dans sa classe avec le numérique.

La prise en compte du numérique sera également inscrite dans les plans académiques et nationaux de formation des enseignants et des corps d’inspection et d’encadrement.

– Apprendre à l’ère du numérique

Il est impératif de former les élèves à la maîtrise, avec un esprit critique, de ces outils qu’ils utilisent chaque jour dans leurs études et leurs loisirs et de permettre aux futurs citoyens de trouver leur place dans une société dont l’environnement technologique est amené à évoluer de plus en plus rapidement. Les professeurs-documentalistes doivent être particulièrement concernés et impliqués dans les apprentissages liés au numérique.

Cela passe notamment par l’inscription dans la loi du principe d’une éducation numérique pour tous les élèves, qui doit permettre aux enfants d’être bien formés et pleinement citoyens à l’ère de la société du numérique. La formation scolaire comprend un enseignement progressif et une pratique raisonnée des outils d’information et de communication et de l’usage des ressources numériques qui permettront aux élèves tout au long de leur vie de construire, de s’approprier et de partager les savoirs.

La formation à l’utilisation des outils et des ressources numériques comporte en outre une sensibilisation aux droits et aux devoirs liés à l’usage de l’internet et des réseaux, qu’il s’agisse de la protection de la vie privée ou du respect de la propriété intellectuelle. Elle comporte également une sensibilisation à la maîtrise de son image et au comportement responsable.

Au collège, l’éducation aux médias, notamment numériques, initie les élèves à l’usage raisonné des différents types de médias et les sensibilise aux enjeux sociétaux et de connaissance qui sont liés à cet usage.

Une option « informatique et sciences du numérique » sera ouverte en terminale de chacune des séries du baccalauréat général et technologique.

– Coordonner les actions de l’État et des collectivités territoriales en faveur du développement du numérique à l’école

Exploiter les opportunités offertes par le numérique pour la formation des élèves implique d’équiper les établissements. La répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales en la matière, notamment sur la question de la maintenance des équipements, est clarifiée par la loi.

Par ailleurs, les cofinancements prévus par les programmes gouvernementaux en faveur du déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire sont notamment mobilisés pour raccorder de façon systématique les établissements scolaires du premier et du second degrés, et principalement ceux qui sont situés en milieu rural.

L’État, les collectivités territoriales et les équipes éducatives choisissent de manière concertée les équipements matériel et logiciel acquis dans le cadre du développement du numérique dans les écoles et établissements scolaires.

Ils réfléchissent ensemble aux solutions d’infrastructures réseau mises en place dans les établissements de façon à favoriser le développement des usages. Les inquiétudes développées ces dernières années au sein de la société civile en matière de santé publique, notamment à l’égard des enfants les plus jeunes, doivent pousser l’État et les collectivités territoriales à privilégier les connexions filaires lorsque cela est compatible avec les usages pédagogiques et les contraintes locales.

Par ailleurs, une démarche d’information doit permettre de diffuser au sein de la communauté éducative les informations rigoureuses et actualisées mises à disposition par les autorités compétentes en la matière.

Enfin, pour faciliter l’action des collectivités territoriales et lutter contre les inégalités territoriales, la constitution d’une offre attractive d’équipements matériel et logiciel performants pour les établissements scolaires, et des procédures administratives simplifiées pour leur acquisition et l’achat de prestations de maintenance seront mises en place.

Favoriser des parcours choisis et construits

La réussite du parcours scolaire et de l’insertion dans la vie professionnelle dépend notamment d’une orientation choisie par les élèves et leurs parents et de leur bonne information en la matière.

La question de l’orientation ne concerne pas uniquement en fin de collège les élèves considérés comme n’ayant pas le niveau nécessaire à la poursuite des études générales : ce type d’orientation est dans la plupart des cas subi. Cet état de fait contribue à dévaloriser les filières professionnelles et technologiques, en les faisant paraître comme des voies destinées aux élèves les plus faibles.

Il est nécessaire de donner à tous les élèves, dès le collège, les éléments qui leur permettront de faire un choix éclairé pour la poursuite de leurs études au terme de leur scolarité obligatoire. Il s’agit de faire de l’orientation – que ce soit vers l’apprentissage ou vers une filière professionnelle, technologique ou générale – un choix réfléchi et positif et non une étape où l’élève est passif, déterminée uniquement par ses résultats au collège et les stéréotypes de genre. L’information délivrée en matière d’orientation s’attache donc particulièrement à lutter contre les représentations préconçues et sexuées des métiers.

Afin d’élaborer son projet d’orientation scolaire et professionnelle et d’éclairer ses choix d’orientation, un parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel est proposé à chaque élève aux différentes étapes de sa scolarité du second degré. Il lui permet de se familiariser progressivement avec le monde économique et professionnel, notamment par une première connaissance du marché du travail, des professions et des métiers, du rôle et du fonctionnement des entreprises ainsi que des modalités et des perspectives d’insertion professionnelle. Il lui ouvre ainsi un éventail large de possibilités d’orientation et contribue ainsi à la lutte contre les inégalités sociales et territoriales.

Ce parcours ne se limite plus à une option de « découverte professionnelle » proposée uniquement aux élèves destinés à l’enseignement professionnel, mais il s’adresse à tous et trouve sa place dans le tronc commun de formation de la sixième à la troisième. Au-delà, ce parcours se prolonge au lycée.

En associant les parents, ces parcours sont organisés sous la responsabilité des chefs d’établissement, avec le concours des équipes éducatives et des conseillers d’orientation-psychologues.

L’école doit également s’ouvrir à tous ceux qui peuvent contribuer à cette information : témoignages de professionnels aux parcours éclairants, initiatives organisées avec les régions, avec des associations et des représentants d’entreprises, visites, stages et découverte des métiers et de l’entreprise, et projets pour développer l’esprit d’initiative et la compétence à entreprendre.

Afin d’en améliorer l’efficacité, le service public de l’orientation mis en place par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie sera renforcé par une collaboration accrue entre l’État et les régions. Sa mission est de rendre effectif le droit de toute personne d’accéder à un service gratuit et d’améliorer la qualité d’information sur les formations, les métiers et l’insertion professionnelle et de développer un conseil et un accompagnement personnalisé de proximité pour construire son parcours de formation et d’insertion professionnelle.

Le ministère chargé de l’éducation nationale encourage, en association avec le ministère des affaires étrangères, ministère de tutelle de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, les filières technologiques et professionnelles au sein du réseau de l’enseignement français à l’étranger.

Piloter le système scolaire

– Responsabiliser et accompagner

À chaque étape de la scolarité, l’action publique, qu’elle soit ministérielle ou académique, doit être au service de la pédagogie. Elle doit être définie en fonction de ses effets attendus dans la classe et apporter l’aide nécessaire aux personnels dans l’accomplissement de leurs missions. Malgré les évolutions récentes, le système éducatif reste sous-encadré et le pilotage pédagogique aux différents niveaux du système demeure insuffisant.

La politique de réussite éducative pour tous les élèves doit s’accompagner de marges de manœuvre en matière de pédagogie afin de donner aux équipes locales la possibilité de choisir et de diversifier les démarches. Pour une utilisation raisonnée de cette autonomie, il faut que, sous l’autorité des personnels de direction, la concertation et la collégialité soient au cœur de la vie des établissements.

– Innover

L’innovation pédagogique renforce l’efficacité des apprentissages. Le ministère de l’éducation nationale prendra des initiatives, s’appuyant sur les milieux associatifs, souvent à l’origine de la mise en place d’actions innovantes, afin de repérer et de diffuser les innovations les plus pertinentes.

Conformément aux missions du service public du numérique éducatif telles que définies à l’article 10 de la présente loi, une attention particulière est accordée aux innovations dans le domaine du développement du numérique à l’école. En effet, les constants progrès techniques en la matière obligent à un renouvellement des pratiques pour en assurer la pertinence et l’efficacité.

Un Institut des hautes études de l’éducation nationale sera créé. Il sera un lieu de réflexion sur les problématiques de l’école et il contribuera à promouvoir et à diffuser toutes les connaissances utiles dans le domaine de l’éducation. Les formations proposées reposeront sur un partage d’expériences entre les hauts responsables issus du service public de l’éducation, notamment des représentants issus des collectivités territoriales, du milieu universitaire et de la recherche ou du monde de l’entreprise ;

– Évaluer

Le pilotage des politiques éducatives nécessite d’avoir une vision globale du fonctionnement et de l’efficacité du système éducatif. L’évaluation doit être scientifique, indépendante et apporter une aide à la décision politique et à la mise en œuvre de réformes.

Un Conseil national d’évaluation du système scolaire est créé. Cette instance indépendante doit contribuer à rendre transparent l’ensemble du processus d’évaluation. Ses champs d’investigation couvrent toutes les composantes de l’enseignement scolaire, l’organisation du système éducatif et ses résultats. Il réalise ou fait réaliser des évaluations, il se prononce sur les méthodologies et les outils utilisés et donne un avis sur les résultats des évaluations externes, notamment internationales. Ce conseil peut être saisi par les commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat ou par le ministre chargé de l’éducation nationale ou d’autres ministères disposant de compétences en matière d’éducation ou conduisant des politiques éducatives. Il peut également s’autosaisir.

II. – Une refondation pour la réussite éducative de tous

Promouvoir une plus grande ouverture sur l’Europe et le monde

L’école doit favoriser l’intégration des futurs citoyens français dans l’espace politique de l’Union européenne et rendre possible la mobilité professionnelle dans l’espace économique européen. C’est pourquoi la France promouvra les initiatives visant à développer un esprit européen et un sentiment d’appartenance partagé à la communauté politique que constitue l’Union européenne.

Le ministère de l’éducation nationale participera ainsi à l’atteinte des objectifs de la stratégie « Éducation et formation 2020 ».

L’apprentissage des langues vivantes constitue un moyen privilégié de cette ouverture.

La création de partenariats avec des acteurs scolaires dans des pays tiers est activement encouragée aux différents niveaux du système éducatif : classe, établissement et académie. Ces partenariats, qui peuvent prendre plusieurs formes, programmes européens, accords bilatéraux, appariements, jumelages..., doivent permettre la mise en œuvre de projets pédagogiques partagés qui donnent l’occasion aux élèves de développer des liens concrets avec des partenaires étrangers.

La mobilité, qui contribue plus fortement encore au développement de compétences linguistiques, personnelles et interculturelles sera également développée pour les élèves, individuellement et collectivement, comme pour les enseignants. La mobilité des enseignants pourra se réaliser tant dans le réseau d’enseignement français à l’étranger que dans les établissements étrangers. Il est souhaitable que l’école permette que chaque élève ait l’occasion de partir en voyage scolaire à l’étranger au moins une fois au cours de la scolarité obligatoire.

Le ministère de l’éducation nationale développera une coopération éducative destinée à promouvoir à l’étranger son système de formation et les valeurs républicaines qui lui sont attachées, à encourager l’apprentissage de la langue française, à partager son expertise, à développer des réflexions conjointes sur des problématiques communes et à ouvrir le système éducatif national sur le monde, notamment à travers le réseau de l’enseignement français à l’étranger.

Le ministère chargé de l’éducation nationale participera, en association avec le ministère des affaires étrangères, à l’enseignement français, au sein de l’Union européenne et dans les pays tiers à l’Union européenne, en développant notamment des filières bilingues, des sections binationales et des sections internationales avec les pays partenaires.

Cette coopération sera intensifiée avec des pays et des régions présentant un intérêt particulier pour la France.

Refonder l’éducation prioritaire pour une école plus juste

L’éducation prioritaire concerne 17,9 % des écoliers et 19,8 % des collégiens. La situation actuelle n’est pas satisfaisante lors de l’entrée en sixième : le pourcentage d’élèves en difficulté de lecture dans le secteur de l’éducation prioritaire est passé de 20,9 % en 1997 à 31,3 % en 2007.

La réussite des élèves dans tous les territoires est un devoir pour la République.

L’organisation en zonage devra évoluer et être mieux coordonnée au niveau interministériel, notamment avec la réforme de la géographie prioritaire de la politique de la ville. La question de la labellisation sera réexaminée car elle est source de rigidité et n’a pas su éviter le piège de la stigmatisation. L’allocation des moyens devra donc être revue au profit d’une autre approche tout en poursuivant un effort budgétaire spécifique pour les établissements de l’éducation prioritaire : il s’agira de différencier, dans le cadre de leur contrat d’objectifs, les moyens en fonction des spécificités territoriales, sociales et scolaires de chacun des établissements ainsi que selon le projet d’école ou le contrat d’objectifs...

Pour stabiliser davantage les équipes pédagogiques, il convient d’améliorer les conditions de travail des enseignants.

S’agissant de la carte scolaire, les études montrent que les assouplissements de la sectorisation ont accru les difficultés des établissements les plus fragiles. Le retour à une sectorisation ou à d’autres modalités de régulation favorisant la mixité scolaire et sociale devra être examiné, expérimenté et mis en œuvre.

L’internat scolaire est un mode d’accueil et de scolarisation qui favorise la réussite scolaire et l’apprentissage des règles de vie collective pour les familles et les élèves qui le souhaitent.

Les internats d’excellence constituent une réponse partielle et coûteuse à un besoin plus large. Tous les internats, dans leur diversité, doivent proposer l’excellence scolaire et éducative aux élèves accueillis.

Scolariser les élèves en situation de handicap et promouvoir une école inclusive

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a favorisé le développement rapide de la scolarisation en milieu ordinaire des enfants et des adolescents en situation de handicap. Ce progrès a été facilité par l’effort fourni pour accompagner et aider ces jeunes handicapés dans leur parcours scolaire.

Cet accompagnement humain répond principalement à deux besoins. Il est d’abord une réponse à la situation de jeunes handicapés qui, sans la présence continue d’un adulte, ne pourraient pas accéder à l’école : lourds handicaps moteurs et enfants très fragiles ou porteurs de maladies graves. Il consiste ensuite à apporter à l’élève une assistance plus pédagogique et lui faciliter l’accès à l’apprentissage et au savoir : explications ou reformulations de consignes, recentrage de l’élève sur sa tâche, aide ponctuelle et prise de notes ou réalisation d’un exercice sous la dictée de l’élève. Les ressources et les innovations numériques constituent également des accélérateurs d’intégration pour les élèves en situation de handicap.

Il convient aussi de promouvoir une école inclusive pour scolariser les enfants en situation de handicap et à besoins éducatifs particuliers en milieu ordinaire. Le fait d’être dans la classe n’exclut pas de bénéficier d’enseignements adaptés et est, pédagogiquement, particulièrement bénéfique. Cette scolarisation au sein de l’école ou de l’établissement permet aussi aux autres élèves d’acquérir un regard positif sur la différence.

Face à l’augmentation rapide et continue des demandes et des prescriptions, il convient de mettre en place une approche plus qualitative et notamment de partager des outils de gestion, de suivi et de prospective pour ajuster les réponses apportées à la situation des élèves.

Il convient, en outre, d’améliorer la formation de ces personnels en lien avec les conseils généraux.

Des moyens d’accompagnement seront mobilisés en priorité au cours de la législature pour scolariser les élèves en situation de handicap. Cet accompagnement s’appuiera sur des coopérations renforcées et facilitées avec les services médico-sociaux.

Les projets linguistiques des élèves sourds et de leurs familles seront pris en compte. Les élèves sourds auront accès à un parcours scolaire en communication bilingue (enseignement en langue des signes et langue française) ou en communication en langue française (enseignement en français oral avec langage parlé complété et français écrit). Pour cela, des dispositifs adaptés à cette scolarisation seront développés par le regroupement des élèves dans une même classe ou la mutualisation des moyens nécessaires dans un même établissement à l’échelle académique.

Enfin, le ministère de l’éducation nationale financera des matériels pédagogiques adaptés répondant aux besoins particuliers et identifiés d’élèves en situation de handicap pour faciliter leur inclusion en milieu ordinaire.

Promouvoir la santé

L’école a pour responsabilité l’éducation à la santé et aux comportements responsables. Elle contribue au suivi de la santé des élèves. La politique de santé à l’école se définit selon trois axes : l’éducation, la prévention et la protection.

Elle s’appuie pour cela sur des équipes pluri-professionnelles comportant les médecins, les personnels infirmiers et les psychologues de l’éducation nationale, mais également sur l’ensemble des personnels, afin de dépister et de diagnostiquer les troubles susceptibles d’entraver les apprentissages, de scolariser les élèves atteints de maladies chroniques et en situation de handicap et de faciliter l’accès aux soins et à la prévention pour les élèves. L’action des personnels sociaux et de santé de l’éducation nationale constitue un outil majeur de lutte contre les inégalités sociales de santé et de prévention précoce des difficultés des élèves et du décrochage scolaire. Cette action s’exerce en collaboration avec l’ensemble des personnels de la communauté éducative et les partenaires de l’école.

La promotion de la santé favorise le bien-être et la réussite de tous les élèves. Elle contribue à réduire les inégalités de santé par le développement des démarches de prévention.

Il convient notamment de sensibiliser les élèves, en fonction de leur âge, à la responsabilité face aux risques sanitaires (notamment pour prévenir et réduire les conduites addictives et la souffrance psychique), aux risques des dérives thérapeutiques et sectaires, à l’éducation nutritionnelle (notamment pour lutter contre l’obésité) et à l’éducation à la sexualité.

L’éducation à la sexualité fait l’objet d’au moins trois séances annuelles d’information dans les écoles, les collèges et les lycées, qui peuvent être assurées par les personnels contribuant à la mission de santé scolaire, par des personnels des établissements ainsi que par d’autres intervenants extérieurs. Ces personnels sont spécifiquement formés dans ce domaine.

Afin de sensibiliser les élèves du premier et du second degrés à la dangerosité des pratiques dites de « jeux dangereux », les équipes pédagogiques et éducatives sont sensibilisées et formées à la prévention et à la lutte contre ces pratiques.

Il convient également d’encourager l’introduction et la généralisation de l’alimentation biologique et locale dans la restauration collective, conformément aux objectifs fixés par le Grenelle de l’environnement.

Il convient aussi de sensibiliser les élèves ainsi que leurs parents à l’importance du rythme veille/sommeil.

Développer la place du sport à l’école

Le sport scolaire joue un rôle fondamental dans l’accès des jeunes aux sports, aux pratiques physiques artistiques et à la vie associative, créant une dynamique et une cohésion au sein des communautés éducatives et entre les écoles et les établissements. Il contribue à l’éducation à la santé et à la citoyenneté.

L’éducation physique et sportive contribue également à promouvoir le respect de l’éthique et des valeurs éducatives et humanistes du sport. Elle favorise l’égalité des chances des jeunes.

Des activités sportives sont proposées à tous les élèves volontaires, notamment dans les territoires prioritaires, tout au long de l’année, en complément des heures d’éducation physique et sportive. Ces activités doivent avoir un sens pédagogique autour des valeurs transmises par le sport comme le sens de l’effort et du dépassement de soi, le respect de l’adversaire et des règles du jeu ainsi que l’esprit d’équipe.

Au-delà de l’éducation physique et sportive, dans un objectif d’éducation par le sport, le recours au sport, analysé de manière raisonnée et avec un esprit critique, comme vecteur d’apprentissage pour les autres matières, est favorisé.

Lutter contre le décrochage scolaire

La proportion des 18-24 ans qui n’ont pas terminé avec succès l’enseignement secondaire du second cycle était en moyenne de 13,5 % dans l’Union européenne en 2011. Avec 12 %, la France se situe dans une position intermédiaire au niveau européen mais reste au-dessus du niveau souhaitable et des pays les plus efficaces en la matière.

L’objectif est de diviser par deux le nombre des sortants sans qualification.

Dans le second degré, les projets d’établissement doivent mobiliser les équipes éducatives autour d’objectifs précis de réduction de l’absentéisme, premier signe du décrochage. Dans les collèges et les lycées professionnels à taux de décrochage particulièrement élevé, un référent aura en charge la prévention du décrochage, le suivi des élèves décrocheurs en liaison avec les plates-formes, la relation avec les parents, le suivi de l’aide au retour en formation des jeunes décrocheurs de l’établissement, en vue de l’obtention d’un diplôme national ou d’un titre professionnel de niveau V.

Tout jeune sortant du système éducatif sans diplôme doit pouvoir disposer d’une durée complémentaire de formation qualifiante, qu’il pourra utiliser dans des conditions fixées par décret, et d’une attestation de son parcours et des compétences acquises.

Des partenariats seront noués entre l’État et les régions pour établir des objectifs conjoints de réduction du nombre de jeunes sortant de formation initiale ou présents sur le marché du travail sans qualification et pour définir les modalités d’atteinte de ces objectifs. Ces partenariats seront élaborés avec les comités de coordination régionaux de l’emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) et signés par le président de région, le recteur et le préfet.

Lutter contre l’illettrisme

3,1 millions de personnes sont en situation d’illettrisme en France. Ce sont 3,1 millions de personnes qui ne maîtrisent plus la lecture, l’écriture, le calcul ni les compétences de base pour être autonomes dans des situations simples de la vie quotidienne, alors même qu’elles ont été scolarisées en France. Les conséquences pour celles qui sont concernées sont souvent dramatiques : licenciement, éloignement durable du marché du travail, désocialisation.

C’est pourtant un phénomène qu’il est possible de prévenir, à condition de donner une cohérence aux actions de tous les acteurs qui agissent dans le domaine. L’éducation nationale, les familles, les associations, les collectivités, chacun a un rôle dans la prévention de l’illettrisme. Il convient désormais de donner une impulsion nationale et d’accompagner la mise en cohérence du travail de tous les acteurs.

L’illettrisme demeure une réalité relativement méconnue, que les pouvoirs publics ont tardé à appréhender. Le Premier ministre a fait de la lutte contre l’illettrisme la grande cause nationale de l’année 2013. Le Gouvernement entend ainsi prendre la mesure d’un sujet qui suppose un engagement fort et une action concertée des ministères concernés.

Offrir un cadre protecteur aux élèves, aux enseignants ainsi qu’à tous les acteurs intervenant dans l’école

L’école doit offrir aux élèves un cadre protecteur dont l’un des éléments fondamentaux est la présence d’une équipe éducative pluri-professionnelle travaillant en partenariat.

L’apprentissage de la citoyenneté et de la vie commune et le respect des droits et des devoirs au sein de la communauté éducative sont des objectifs pédagogiques tout aussi importants que la maîtrise des connaissances disciplinaires.

Pour devenir de jeunes citoyens, les élèves doivent apprendre les principes de la vie démocratique et acquérir des compétences civiques grâce aux enseignements dispensés et par la participation aux instances représentatives et/ou à la vie associative des écoles et des établissements. L’action éducative contribue également à sensibiliser les élèves à la solidarité intergénérationnelle et aux apports réciproques entre les générations, notamment par leur engagement dans la vie associative et par les échanges de savoirs et de compétences. 

L’école doit assurer, conjointement avec la famille, l’enseignement moral et civique, qui comprend l’apprentissage des valeurs et symboles de la République et de l’Union européenne, des institutions, de l’hymne national et de son histoire, et prépare à l’exercice de la citoyenneté.

Pour instituer un lien civique entre tous les membres de la communauté éducative, il convient de prévenir au sein de l’école toutes les formes de discrimination et de favoriser la mixité sociale et l’égalité entre les femmes et les hommes.

Quelles que soient les origines de l’absentéisme, il appartient à l’institution scolaire de mettre en œuvre tous les moyens pédagogiques et éducatifs à sa disposition pour favoriser l’assiduité de l’élève.

La sécurité et, de façon plus précise, les conditions d’un climat scolaire serein doivent être instaurées dans les écoles et les établissements scolaires pour favoriser les apprentissages, le bien-être et l’épanouissement des élèves et de bonnes conditions de travail pour tous. Les violences en milieu scolaire, dont les origines sont plurielles, requièrent en effet un traitement global et une action de long terme et non une approche uniquement sécuritaire qui n’est pas suffisamment efficace.

La lutte contre toutes les formes de harcèlement sera une priorité pour chaque établissement d’enseignement scolaire. Elle fera l’objet d’un programme d’actions élaboré avec l’ensemble de la communauté éducative, adopté par le conseil d’école pour le premier degré et par le conseil d’administration dans les établissements publics locaux d’enseignement (EPLE). Ce programme d’actions sera régulièrement évalué, pour être amendé si nécessaire.

Au niveau des établissements scolaires, l’action sera fondée sur le renforcement des équipes pédagogiques et l’augmentation du nombre d’adultes présents dans les établissements en difficulté. La mise en place d’assistants de prévention et de sécurité à la rentrée 2012 constitue une première étape en la matière. Ces personnels formés participent à l’action éducative, en complémentarité avec les autres personnels et en articulation avec les équipes mobiles de sécurité et les partenaires extérieurs.

La formation initiale et continue des enseignants revêt une importance cruciale pour leur permettre de gérer les situations de tension ou de réagir face aux élèves en difficulté avec l’institution scolaire. Cette politique de formation sera amorcée dans les ESPE à partir de la rentrée 2013.

Redynamiser le dialogue entre l’école et les parents, les collectivités territoriales et le secteur associatif

La promotion de la « co-éducation » est un des principaux leviers de la refondation de l’école. Elle doit trouver une expression claire dans le système éducatif et se concrétiser par une participation accrue des parents à l’action éducative dans l’intérêt de la réussite de tous les enfants. Il convient de reconnaître aux parents la place qui leur revient au sein de la communauté éducative.

Il s’agit de veiller à ce que tous les parents soient véritablement associés aux projets éducatifs d’école ou d’établissement. Des actions seront conduites au niveau des établissements pour renforcer les partenariats avec les parents et leurs associations. Il s’agit aussi d’accorder une attention particulière aux parents les plus éloignés de l’institution scolaire, par des dispositifs innovants et adaptés.

Si l’éducation revêt un caractère national, les collectivités territoriales, qui financent 25 % de la dépense intérieure d’éducation, jouent un rôle déterminant dans le bon fonctionnement du système éducatif, notamment sur des questions centrales : les bâtiments, le numérique, les activités durant les temps périscolaires et extrascolaires, l’orientation, l’insertion professionnelle...

Ainsi, les contrats d’objectifs des EPLE doivent devenir tripartites, en renforçant le rôle de la collectivité territoriale de rattachement. La représentation des collectivités territoriales est rééquilibrée au sein des conseils d’administration des EPLE.

Le département, dans l’exercice des compétences qui lui sont dévolues par l’article L. 213-1 du code de l’éducation pour établir le schéma prévisionnel des investissements relatifs aux collèges, veille à recenser les communes de plus de 10 000 habitants qui ne sont pas dotées d’un collège public. Il élabore, en concertation avec les communes concernées qui le demandent, un plan d’action prioritaire pour garantir l’égalité d’accès à l’enseignement public. Ce plan d’action est rendu public et annexé au schéma prévisionnel.

Enfin, au niveau régional et par convention, l’utilisation des locaux et équipements scolaires hors temps de formation doit être favorisée afin de développer des activités à caractère culturel, sportif, social ou socio-éducatif ou de permettre à des entreprises ou à des organismes de formation d’utiliser ces espaces et, le cas échéant, le matériel.

Le secteur associatif, ainsi que les mouvements d’éducation populaire, sont des partenaires essentiels de l’école. Ils font partie intégrante de la communauté éducative dont les actions sont déterminantes pour l’enrichissement de l’environnement éducatif des élèves. Ces acteurs méritent amplement d’être reconnus dans leur diversité et pour la qualité de leurs interventions. Le partenariat qui les associe à l’école doit être développé dans le respect et en fonction des capacités et des compétences ainsi que de l’objet défendu par les partenaires qui le constituent. Seront associées à toutes les instances de concertation des différents acteurs participant à l’encadrement des élèves à la fois les associations de parents et celles relatives à l’éducation populaire.

Ces orientations de réforme tracent la stratégie de refondation de l’école et prévoient les moyens humains qui lui seront nécessaires. Elles seront mises en œuvre au cours de la législature.

La refondation de l’école de la République suppose le rassemblement autour de ces orientations, qui portent non seulement un projet éducatif, mais également un projet de société.

La France, avec la refondation de son école, se donne les moyens de répondre aux grands défis auxquels elle est confrontée : améliorer la formation de l’ensemble de la population, accroître sa compétitivité, lutter contre le chômage des jeunes, réduire les inégalités sociales et territoriales, favoriser la scolarisation des élèves en situation de handicap et recréer une cohésion nationale et un lien civique autour de la promesse républicaine.

L’ensemble de ces mesures représente un effort financier et humain important, mais cet effort constitue un investissement pour l’avenir de notre pays. Il s’agit d’un des leviers les plus puissants pour améliorer le potentiel de croissance, à moyen et long termes, du pays et pour former les personnels qualifiés dont son économie et les secteurs d’avenir ont besoin.

La refondation de l’école s’appuie sur une conception du citoyen et de la République. L’école de la République est une école de l’exigence et de l’ambition qui doit permettre à chaque élève de trouver et de prendre le chemin de sa réussite. C’est un lieu d’enseignement laïque, d’émancipation et d’intégration de tous les enfants. C’est notre maison commune, vecteur de promotion et de justice sociales, lieu de transmission des valeurs de la République, des valeurs fortes que l’on doit enseigner et pratiquer.

Cette refondation appelle la mobilisation de tous pour l’accomplissement au quotidien de cette ambition, dans un esprit d’unité, de confiance et d’action, dans l’intérêt des élèves et dans celui du pays.

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 7, première phrase

Remplacer le mot :

dizaine

par le mot :

vingtaine

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. La plus récente enquête PISA remonte à 2009 et concerne des enfants entrés en cours préparatoire en 1999 et 2000. Autrement dit, ces évaluations portent sur le parcours d’enfants qui s’est déroulé, non pas au cours de la décennie qui vient de s’écouler, mais au cours de celle qui l’a précédée.

Si ce rapport annexé prétend réaliser un bilan objectif de notre système éducatif, il est préférable de ne pas stigmatiser des périodes politiques, comme on tente de le faire. Cet amendement vise donc à faire remonter ce bilan à vingt ans, et non à dix.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Cet amendement a déjà été examiné en première lecture. Nous maintenons que les rapports de l’OCDE font état d’une dégradation au cours de ces dix dernières années. Par conséquent, la commission maintient une position constante et émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)

M. le président. L'amendement n° 22, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 22, première phrase

Après le mot :

académiques

insérer les mots :

, centres de loisirs éducatifs, structures socio-éducatives, sportives et culturelles

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Certes de nature rédactionnelle, cet amendement n’en est pas moins important. Les centres de loisirs éducatifs et les structures socio-éducatives, sportives et culturelles accomplissent un travail qu’il convient de saluer particulièrement et, surtout, elles feront partie intégrante du projet d’éducation territoriale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La mention proposée par Mme Laborde est intéressante sur le fond, mais nous ne pouvons pas la prendre en compte dans la mesure où les structures concernées dépendent du ministère en charge de la jeunesse et ne sont pas régies par le code de l’éducation. Nous demandons donc le retrait de cet amendement.

Mme Françoise Laborde. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 22 est retiré.

L'amendement n° 21, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 23

Après les mots :

bonnes conditions ;

insérer le membre de phrase :

un lieu permettant le développement de nouvelles pratiques pédagogiques, à l’initiative de la liberté pédagogique des enseignants ;

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Il est question ici de la liberté pédagogique des enseignants en lien avec le service public du numérique éducatif, qui, bien sûr, contribuera au développement d’expérimentations pédagogiques. Nous avons déjà abordé ce sujet en première lecture, lors de l’examen de l’article 52 bis, mais mes collègues du RDSE ont tenu à ce que je présente à nouveau cet amendement : nous connaissons tous la grande vertu pédagogique de la répétition. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Dans un même souci de pédagogie, je réitérerai à mon tour ma demande de retrait de cet amendement. (Nouveaux sourires.) L’argument de la commission est en effet identique : le développement de nouvelles pratiques pédagogiques, comme vous le savez, ma chère collègue, ne dépend pas uniquement de la liberté pédagogique des enseignants.

Mme Françoise Laborde. Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 21 est retiré.

M. Jacques Legendre. Quel dommage !

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 31

Remplacer les mots :

permettre et améliorer

par les mots :

rendre effectif

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Dans le cadre des différentes orientations définies pour l’école, l’intégration des élèves en situation de handicap est un objectif majeur qui, je crois, est partagé par tous les membres de cette assemblée. L'accès à une scolarité ordinaire pour ces élèves doit être une priorité forte. L’école doit avoir une fonction inclusive pour tous les enfants.

Aussi cet amendement tend-il à fixer des objectifs plus volontaristes en termes d'accessibilité. On va certainement me répondre, comme en première lecture, que ce n’est pas réaliste. Mais il s’agit simplement pour nous d’afficher une ambition dans un rapport ayant vocation à fixer des orientations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Les termes « permettre et améliorer » supposent que l’accès existe, alors que l’expression « rendre effectif » pourrait laisser penser qu’il n’existe pas. J’ai donc le sentiment que la rédaction figurant dans le texte est plus forte et la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Le Gouvernement, qui partage l’analyse de Mme la rapporteur, émet également un avis défavorable.

Le rapport du groupe de travail présidé par Mme Komitès ayant été rendu aujourd’hui, sur un sujet qui a fait l’objet d’un travail empreint d’une grande sagesse au sein de votre assemblée – je pense au rapport tout à fait remarquable de Mmes Claire-Lise Campion et Isabelle Debré –, j’ajoute que notre objectif est bien d’améliorer ce qui existe actuellement.

Cette loi sera la première où l’école sera reconnue comme inclusive, même si le mouvement d’intégration des enfants en situation de handicap était engagé depuis la loi Fillon, laquelle a permis d’accomplir des progrès qui ont été salués tout à l’heure.

Dès lors que nous avons pris l’engagement de traiter cette question complètement, il faut le faire sans démagogie, et la représentation nationale doit nous soutenir lorsque nous demandons des moyens.

Je vous rappelle que vont être créés 10 000 postes supplémentaires pour l’accueil et l’accompagnement des enfants en situation de handicap. Mais il va aussi falloir engager des procédures de mutualisation, de formation et de « CDIsation » des personnels accompagnants. Sans cela, la précarité restera trop importante et nous ne disposerons pas des garanties dont nous avons besoin.

Mme Pau-Langevin et Mme Carlotti se sont donc vu remettre ce matin le rapport Komitès. Le travail est engagé et, au niveau de l’éducation nationale, dès maintenant, nous travaillons à une véritable formation des personnels concernés par ces 10 000 contrats.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 36, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéas 34 à 52

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Nous contestons la création de 60 000 postes au sein de l’éducation nationale. Cela nous semble tout à fait irréaliste.

Nous avons déjà eu ce débat, mais je tiens à apporter une précision. Entre 2007 et 2012, 1 milliard d’euros ont été consacrés à la revalorisation des salaires des enseignants : la moitié des économies réalisées grâce au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans l’éducation était reversée en salaires, jusqu’à l’équivalent d’un treizième mois pour les jeunes enseignants.

Nous répétons donc que le Gouvernement, avec ces créations de postes, ne se laisse aucune marge de manœuvre pour améliorer la rémunération des enseignants.

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 40, première phrase

Supprimer le mot :

isolés

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Vous allez sans doute me trouver obstinée, têtue, voire un peu pénible, monsieur le ministre, mais je reviens en deuxième lecture pour vous présenter cet amendement visant à supprimer le mot « isolés » accolé à l’expression « territoires ruraux ».

Trois raisons justifient mon opiniâtreté.

Tout d’abord, une raison politique : ce qualificatif pour les territoires ruraux me semble particulièrement péjoratif ; je ne pense pas qu’il soit de nature à rassurer et à valoriser les 16 millions d’habitants qui vivent dans nos campagnes.

Ensuite, une raison de cohérence rédactionnelle : à l’article 5 de ce projet de loi, qui traite du même sujet, à savoir la scolarisation des enfants de moins de trois ans, on parle de « zones urbaines, rurales ou de montagne », mais jamais de « territoires ruraux isolés ».

Enfin, et ce n’est pas l’argument le moins important, il n’existe pas de définition juridique de cette notion. En première lecture, monsieur le ministre, vous avez déclaré : « La formule “territoire rural isolé”, que nous avons modestement reprise, est employée depuis de nombreuses années par la DATAR et par l’INSEE. Elle vise un territoire rural qui rencontre des difficultés particulières, notamment en matière démographique. »

Je ne remets pas en cause votre bonne foi, mais je me suis permis d’aller vérifier auprès de ces deux organismes quelle était la définition précise d’un territoire rural isolé et… je n’ai rien trouvé.

Du côté de l’INSEE, on trouve une définition de l’espace rural comme un espace regroupant l’ensemble des petites unités urbaines et communes rurales n’appartenant pas à l’espace à dominante urbaine, mais la notion d’isolement est, en l’occurrence, totalement absente.

Du côté de la DATAR, trois types de campagnes sont définis : les campagnes des villes, du littoral et des vallées urbanisées ; les campagnes agricoles et industrielles ; les campagnes vieillies, à très faible densité.

Monsieur le ministre, pouvez-vous me dire précisément ce que sont les territoires ruraux isolés ? À défaut, je pense que cet amendement devrait être adopté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Legendre, vous nous avez expliqué précédemment que les arguments que vous avanciez pour défendre votre amendement visant à revenir sur les créations de postes vous étaient inspirés par ce qui vous revenait de la part de nombreux enseignants et syndicats d’enseignants. Permettez-moi d’en douter, après les coupes claires opérées ces dernières années à tous les niveaux de l’enseignement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur Legendre, vous voulez déclencher des grèves dans l’éducation nationale ? (Sourires sur les travées du groupe CRC.)

Mme Françoise Cartron, rapporteur. À l’occasion d’auditions effectuées par notre commission, nous avions même entendu un certain nombre de grands responsables de l’éducation nationale avouer qu’ils n’étaient plus en mesure de continuer à ce rythme de suppressions, car ils étaient « à l’os ». (M. Jacques Legendre en convient.)

J’ai la conviction que ces créations de postes sont les bienvenues, d’autant qu’elles sont ciblées sur les territoires les plus défavorisés.

Monsieur Legendre, vous ne serez donc pas étonné que la commission ait émis un avis défavorable sur l’amendement n° 36.

Madame Férat, vous demandez à M. le ministre des éclaircissements sur la notion de territoire rural isolé, et il va certainement vous fournir une explication littéraire et géographique. Cela étant, si vous supprimez le qualificatif « isolé », le texte visera alors les territoires ruraux dans leur globalité, ce qui signifie que le développement de l’accueil des enfants de moins de trois ans, dont il est ici question, s’en trouvera nécessairement et singulièrement amoindri dans les territoires que l’on entend cibler alors qu’ils sont déjà les moins bien pourvus. Pour cette raison, la commission est défavorable à l’amendement n° 11.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. C’est sans doute pour des raisons de pure procédure que ces deux amendements sont en discussion commune, car ils me semblent contradictoires sur le fond.

Si nous créons des postes, monsieur Legendre, c’est évidemment pour permettre de soulager les enseignants.

Par ailleurs, depuis le temps que j’ai le bonheur de vous connaître et de vous entendre en commission comme en séance publique, une des préoccupations que vous manifestez avec constance porte sur les territoires ruraux. Or répondre à cette préoccupation, comme nous nous y employons, suppose quelques moyens.

Monsieur Legendre, vous le savez, j’ai beaucoup de respect pour vous, pour les fonctions qui ont été les vôtres et pour la responsabilité que votre groupe vous a confiée.

Lorsque le précédent gouvernement a réalisé cette réforme si réussie de la mastérisation, il a fait en sorte que les professeurs des écoles, qui étaient auparavant recrutés à bac+3 le soient désormais à bac+5. En même temps, ce gouvernement s’est dit qu’il allait supprimer l’année de stage, pendant laquelle on est rémunéré à plein-temps pour enseigner à mi-temps.

Monsieur Legendre, si vous multipliez 200 millions d’euros de mesures catégorielles par cinq, les cinq années d’application, vous arrivez à un total de 1 milliard d’euros pour tout le monde. Mais la suppression de la formation et de l’année de stage vous a fait économiser 800 millions d’euros. La différence est donc de 200 millions d’euros : c’est la somme qui a ainsi été réellement consacrée à la revalorisation des traitements des enseignants par le précédent gouvernement.

Lorsque, nous, nous organisons le concours en fin de master 1, avec une année de stage rémunéré aussitôt après la réussite au concours, cela revient à remettre en place plus tôt un traitement pour les enseignants, lesquels bénéficient ainsi de 800 millions d’euros supplémentaires.

Je continue donc de considérer que la prétendue revalorisation du métier d’enseignant des années passées n’est qu’un « mistigri » ; du reste, personne ne l’a vue concrètement puisque, selon l’OCDE, le pouvoir d’achat des enseignants a baissé depuis dix ans. Il y a bien eu quelques augmentations extrêmement parcellaires accordées par Luc Chatel en fin de parcours, mais elles n’ont absolument pas compensé tout ce qui avait été retiré précédemment.

En revanche, chacun comprendra que le fait d’être embauché un an plus tôt, avec un traitement à plein-temps pour occuper un poste à mi-temps représente une amélioration substantielle du début de carrière. Je fais partie de ceux qui souhaiteraient qu’on puisse faire encore mieux, mais j’estime qu’il s’agit d’un bon début.

Dans ces conditions, je suis évidemment défavorable à l’amendement n° 36, dont je conteste profondément l’argumentation.

Madame Férat, l’expression de « zone rurale isolée » correspond à une définition de l’INSEE qui date de 1996. Elle a alors remplacé celle de « zone rurale profonde », et l’on comprend bien ce qui a pu conduire à une telle substitution… (Sourires.)

L’INSEE distinguait alors deux grands types d’espaces : les espaces à dominante urbaine et les espaces à dominante rurale. Il faut quand même avoir en tête que ces derniers comptaient 22,8 millions d’habitants au début des années 2000. L’espace rural est lui-même différencié pour tenir compte de sa propre complexité et l’expression « zone rurale isolée » correspond aux territoires ruraux ayant une faible activité économique et ne bénéficiant pas de l’influence urbaine de proximité, fût-elle relativement faible.

Dès lors, pour l’INSEE, selon ces critères, le « rural isolé » concerne moins de 11 000 communes et regroupe 36 % des élèves de la ruralité. Cela nous permet donc de cibler plus directement nos efforts sur cette zone, qui a d’ailleurs enregistré une baisse continue du nombre d’élèves, de classes et d’écoles ces dernières années.

En 2010, l’INSEE a modifié sa nomenclature en substituant à « zone rural isolée » la nouvelle appellation de « commune isolée hors influence des pôles », correspondant au même échantillonnage.

Cependant, dans le projet de loi, nous avons souhaité conserver l’expression utilisée jusqu’en 2010, plus établie et correspondant davantage à nos problématiques scolaires. Comme vous le savez, l’isolement est souvent facteur d’absence d’accès à des dispositifs pédagogiques et culturels. Il constitue donc une fragilité sociale, source de difficultés scolaires.

Madame Férat, je tiens à vous dire – mais peut-être devriez-vous en parler avec M. Legendre – qu’il y aura des créations de postes dans le primaire cette année au profit de votre département, qui perd pourtant des élèves. Je ne comprends pas que vous vous en plaigniez !

Mme Françoise Férat. Je ne m’en plains pas !

M. Vincent Peillon, ministre. Vous l’aurez compris, je suis défavorable à votre amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Vall, Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano et Vendasi, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 64

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

En vue de contribuer à la formation continue des professeurs, le développement des maisons régionales pour la science et la technologie sera favorisé.

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. Cet amendement a pour objet de pérenniser le dispositif innovant que constituent les maisons régionales pour la science et la technologie.

Ces structures contribuent de manière efficace à la formation continue des professeurs en sciences et technologie qui enseignent de la classe maternelle à la classe de troisième. Présentes en Alsace, Auvergne, Lorraine, Midi-Pyrénées en Île-de-France, elles mériteraient d’être développées dans les autres régions, car elles participent à la promotion de la culture scientifique et technique, désormais consacrée par le projet de loi.

J’ajoute que ces maisons régionales ont pour mission de développer des satellites dans chaque département afin de constituer un maillage, y compris en milieu rural, permettant non seulement d’apporter des compléments d’information aux professeurs des écoles dans les domaines scientifiques, notamment s’agissant de l’avenir de la planète et du développement durable, mais aussi de sensibiliser les enfants des écoles primaires, des collèges, voire des lycées, aux filières scientifiques. En effet, pour prendre le cas particulier de la région Midi-Pyrénées, il faut savoir qu’il y a un décalage énorme entre le nombre de jeunes ingénieurs ou techniciens supérieurs formés et les besoins de cette filière : ce déficit est de l’ordre de 3 000 à 6 000 jeunes tous les ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Vall, vous avez raison, ces maisons jouent un rôle tout à fait particulier dans les régions que vous avez mentionnées. Nous partageons leur ambition et saluons la qualité des actions qui y sont menées.

Néanmoins, la rédaction de votre amendement est trop restrictive et pourrait laisser penser que seules les maisons régionales peuvent contribuer à la formation des professeurs. Pour cette raison, nous ne pouvons accepter votre amendement. Nous vous demandons de le retirer, même si nous partageons votre analyse sur le fond.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Vall, maintenez-vous votre amendement ?

M. Raymond Vall. Avec regret, mais aussi plein d’espoir, compte tenu de ce que vous avez dit, madame la rapporteur, je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 24 est retiré.

L'amendement n° 12, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 72, seconde phrase

Supprimer les mots :

sur le contenu du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, ainsi que

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Il s’agit simplement de rappeler, mais avec un souci d’efficacité, que le socle commun de connaissances, de compétences et de culture doit être défini non par le Conseil supérieur des programmes, mais par le législateur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 37, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéas 76 et 77

Supprimer ces alinéas.

L'amendement n° 41, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 77, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jacques Legendre, pour présenter ces deux amendements.

M. Jacques Legendre. L’amendement n° 37 tend à rappeler que la conception et les composantes du socle commun doivent relever non pas du Conseil supérieur des programmes, mais du Parlement.

Je le répète, à nos yeux, il est nécessaire que le socle commun donne lieu à débat et soit inscrit dans la loi. Le Parlement ne doit pas se dessaisir de cette responsabilité.

L’amendement n° 41 a le même objet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission est défavorable aux deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 89

Supprimer le mot :

personnalisé

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Cet amendement, dont ma collègue Catherine Morin-Desailly a pris l’initiative, vise à supprimer le mot « personnalisé » pour qualifier le parcours d’éducation artistique et culturelle.

La mise en œuvre de ce parcours tout au long de la scolarité mérite d’être encouragée. Néanmoins, il paraît irréalisable que ce parcours soit totalement personnalisé. La notion d’enseignement artistique et culturel est forcément collective et surtout liée à la classe à laquelle appartient l’élève.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je ne partage pas votre analyse, madame Férat, parce que je pense que ce parcours ne peut être que personnalisé en raison même du caractère individuel des choix d’options. La commission est défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 90

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il doit encourager et faciliter, pour les élèves qui le souhaitent, la poursuite d'une formation plus spécifique au sein d'un établissement d'enseignement spécialisé.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Il appartient aux établissements d’enseignement artistique, avec l’aide des acteurs de l’école, de prendre en compte l’enjeu fondamental de l’épanouissement des élèves en offrant à chacun le choix de pratiquer une discipline artistique en fonction de son projet personnel : cela s’entend de l’éveil jusqu’aux différentes formes d’excellence, qu’elles aient pour finalité une pratique amateur ou une activité professionnelle.

Le fait d’inciter assez vite l’élève à participer à des pratiques collectives, notamment durant le temps scolaire, peut permettre d’ancrer sa motivation, car le partage peut être un moteur, en raison de son caractère à la fois ludique et stimulant.

Mettre la formation des amateurs, qui sont aussi les plus nombreux, au même niveau que celle de futurs professionnels suppose une évolution de la pédagogie des enseignants, formés à l’excellence. Ce changement de pédagogie est fondamental en vue d’un meilleur épanouissement des élèves.

C’est tout l’objet de cet amendement : encourager les élèves à fréquenter des établissements spécialisés dans l’enseignement artistique, tels que les conservatoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous nous en sommes déjà expliqués : avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 15, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC, est ainsi libellé :

Alinéa 91

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le parcours d’éducation artistique et culturel est mis en œuvre en cohérence avec la mise en place progressive de la réforme des rythmes scolaires.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. La réforme des rythmes scolaires aura des implications allant bien au-delà des temps de présence des enfants. Par ailleurs, elle doit intégrer toutes les dimensions de l’éducation : pour nous, elle doit permettre un meilleur accès, dans le temps scolaire, à l’éducation artistique et culturelle. Cet amendement vise donc à mettre en œuvre ce parcours d’éducation en cohérence avec la mise en place progressive de la réforme des rythmes scolaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 38, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 116

Supprimer cet alinéa.

II. - Alinéa 117

Rédiger ainsi cet alinéa :

Un cycle est créé, associant la dernière année de maternelle et le cours préparatoire. Cette unité se justifie par la nécessité de mieux préparer les enfants à l’acquisition de la lecture et de l’écriture.

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. La mise en place de nouveaux cycles dans ce projet de loi risque de s’effectuer à partir de deux objectifs contradictoires.

D’un côté, le texte assure une meilleure continuité pédagogique entre l’école et le collège avec la création d’un cycle « à cheval » entre les deux ; nous adhérons totalement à cette vision. Cependant, de l’autre côté, il rétablit une coupure pédagogique entre l’école maternelle et l’école élémentaire, en supprimant le cycle « à cheval » qui permettait de passer sans rupture de l’une à l’autre.

« L’unité de la maternelle », que l’on semble ainsi vouloir affirmer, vient contredire l’idée d’une progressivité des apprentissages. On ne peut pas laisser subsister ce paradoxe dans une loi d’orientation.

Il s’agit pour nous d’une question de fond, monsieur le ministre, et non d’une question idéologique. Cette contradiction nous étonne et nous avons voulu y mettre un terme avec cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission, tenant à réaffirmer la spécificité de l’école maternelle, émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Vos arguments, monsieur Legendre font écho à ceux que M. Carle a développés lors de la discussion générale. Ce n’est pas, à mes yeux, une question secondaire.

Nous avons pris le parti de corriger certaines dérives récentes en nous appuyant sur la réaffirmation de la spécificité de l’école maternelle, mais nous serons très attentifs à ce que l’on ne tombe pas dans l’erreur inverse. En cela, nous faisons application d’un précepte très ancien : la recherche de la médiété, du « rien de trop », du juste milieu en toute chose. Cet argument me permet de répondre également à ceux qui veulent universaliser le parcours d’éducation artistique contre ceux qui veulent le personnaliser.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 38.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 16, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC, est ainsi libellé :

Alinéa 123

Supprimer le mot :

isolés

J’ai le sentiment, madame Férat, que cet amendement n’a plus d’objet, mais je vous donne la parole si vous entendez néanmoins le défendre.

Mme Françoise Férat. En effet, monsieur le président, je veux dire à M. le ministre qu’il aurait été intéressant qu’il sous-amende mon amendement n° 11, qui avait le même objet et qui a été rejeté, de manière à y intégrer toutes les informations qu’il nous a données tout à l’heure concernant la définition des « secteurs ruraux isolés ». Mais enfin, elles figureront au moins dans le compte rendu !

Cela dit, monsieur le président, je partage votre analyse sur cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 16 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 23, présenté par M. Mézard, Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 125

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Des mesures de gel du nombre d’enseignants seront prises, pour une durée de trois ans, dans les départements en déprise démographique.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Cet amendement vise à geler, pour une durée de trois ans, le nombre d’enseignants dans les départements en déprise démographique, afin de favoriser une véritable concertation entre le ministère de l’éducation nationale et les collectivités territoriales concernées.

Les communes rurales ont souffert de la baisse des effectifs du personnel éducatif, qui a été opérée au mépris du principe d’égal accès au service public et du principe de continuité. Ces communes doivent notamment pouvoir bénéficier d’une certaine visibilité pour conserver, autant que possible, un enseignement de qualité et préserver cet élément indispensable à la vie locale.

C’est la raison pour laquelle, considérant que l’égalité des territoires devant le service public de l’éducation mérite une explication, nous avons redéposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Ma chère collègue, la commission souhaite, là encore, le retrait de votre amendement, qui nous paraît difficilement défendable. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Au-delà des paroles, je crois que l’on a pu constater, dès la précédente rentrée, la prise en compte des territoires ruraux, dont le caractère prioritaire est à nouveau inscrit dans la loi. Il me semble que nous répondons ainsi à votre préoccupation, madame la sénatrice, sans figer pour autant les situations.

Le gel que vous proposez d’instaurer peut poser des problèmes par rapport à d’autres territoires, d’autant que des évolutions seront nécessaires dans certains endroits. Nous essayons de disposer d’une capacité de prévision, dans un dialogue permanent entre les élus locaux et les directeurs académiques des services de l’éducation nationale, afin que le couperet ne tombe pas à chaque rentrée et que l’on puisse accompagner les évolutions des territoires sur plusieurs années. Je vous demande donc, à mon tour, de bien vouloir retirer votre amendement, madame la sénatrice.

M. le président. Madame Laborde, l’amendement n° 23 est-il maintenu ?

Mme Françoise Laborde. La vigilance sera de mise, mais je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 23 est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 17, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC, est ainsi libellé :

Alinéas 134 à 142

Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :

Avant toute décision, la réforme des rythmes scolaires devra :

- faire l’objet d’une concertation préalable ;

- prendre en compte l’ensemble des problématiques liées aux temps scolaires, c’est-à-dire les rythmes quotidien, hebdomadaire et annuel, mais aussi liées à l’âge et au cycle de l’enseignement ;

- prévoir des délais indispensables à la réorganisation des activités et des services concernés ;

- mesurer les implications financières de la réforme envisagée, notamment pour les collectivités territoriales.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai simultanément les amendements nos 17 et 18, qui concernent tous deux la réforme des rythmes scolaires.

M. le président. J’appelle donc d’ores et déjà l’amendement n° 18, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC et ainsi libellé :

Alinéa 137

I. - Première phrase

Supprimer les mots :

et achevée à la rentrée 2014

II. - Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Elle devra faire l’objet d’un bilan, afin d’en mesurer l’opportunité de la poursuivre et ses éventuelles adaptations, avant, le cas échéant, un élargissement à tous les territoires.

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Françoise Férat. Sur le fond, nous sommes favorables au retour à la semaine de quatre jours et demi, qui correspond mieux aux rythmes de l’enfant et qui répartit mieux ses efforts d’apprentissage au cours de la semaine.

Je regrette néanmoins qu’un seul aspect des temps scolaires ait été abordé. En effet, les rythmes scolaires nécessitent une réflexion sur l’année, la semaine et la journée.

Monsieur le ministre, vous avez fait des annonces déconnectées dans le temps, sans véritable logique apparente, quitte à ce qu’elles ne soient pas comprises.

De plus, j’aimerais que la réflexion amène à plus de subtilité dans l’application de cette mesure. Doit-on infliger le même rythme aux petits de maternelle et aux enfants du primaire ? Il conviendrait d’aborder les rythmes de façon différenciée en fonction de l’âge des élèves. Il importe également de se poser la question d’une application correspondant mieux aux réalités géographiques de notre pays : les horaires d’enseignement peuvent être affinés suivant que l’on est dans le nord ou dans le sud de la France.

En outre, cette réforme a été généralisée directement à toutes les communes, et cela quelle que soit leur taille. Dans les grosses communes, cette modification peut être absorbée plus ou moins facilement. Dans les plus petites, le problème est quasi insoluble. Tel est le cas de la commune dont je suis maire et que j’ai déjà évoquée à maintes reprises dans cet hémicycle. Je réitère d’ailleurs, monsieur le ministre, mon invitation à venir m’aider à y mettre en place cette réforme !

La question des transports scolaires est éludée.

Par ailleurs, les horaires de la journée ne diminuent pas. Au contraire, on assistera à un surcroît de travail sur la semaine, puisque le mercredi matin sera travaillé.

Malgré la réelle bonne volonté des élus, il semble difficile, voire impossible, de mettre en œuvre cette réforme dans les conditions prévues. Bien sûr, la réforme sera appliquée, mais elle risque de s’avérer inefficace, sinon contre-productive.

Enfin, en ce qui concerne le financement, je voudrais faire état d’une inquiétude que partagent tous les élus. Le fonds spécifique d’aide aux communes sera moindre en 2014, alors que près des trois quarts des communes n’appliqueront la réforme qu’à partir de cette année-là. Oserai-je rappeler que, de surcroît, les dotations de l’État aux collectivités locales vont terriblement diminuer à partir de cette même année ? Les budgets locaux vont souffrir de cet effet de ciseaux supplémentaire.

En conséquence, l’amendement n° 17 vise à suspendre la réforme, non pas pour l’enterrer, mais pour mieux la préparer et la faire accepter par tous les acteurs concernés.

L’amendement n° 18, quant à lui, renvoie à notre amendement à l’article 47 du projet de loi et vise à instaurer une pause dans la réforme après la prochaine rentrée, de manière à en tirer d’emblée un large bilan auprès des établissements qui l’auront expérimentée, afin de décider de sa poursuite ou non dans les termes que vous avez fixés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. L’amendement n° 39, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

Alinéas 134 à 141

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

Avant toute décision, la réforme des rythmes scolaires devra :

– faire l’objet d’une concertation préalable ;

– prévoir des délais indispensables à la réorganisation des activités et des services concernés ;

– mesurer les implications financières de la réforme envisagée, notamment pour les collectivités territoriales.

L’amendement n° 40, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 137, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La réforme des rythmes pourra être engagée à la rentrée scolaire 2014 dans le premier degré, sur le territoire des collectivités ayant donné leur accord.

La parole est à M. Jacques Legendre, pour présenter ces deux amendements.

M. Jacques Legendre. Je formulerai d’abord quelques observations.

Premièrement, je regrette d’avoir entendu dénaturer mes propos sur les positions que peuvent être amenés à prendre actuellement quelques syndicats d’enseignants : je ne parlais pas du débat sur les moyens, mais de la perception, par ces mêmes organisations, de la réforme des rythmes scolaires. Il me semble que l’on voit parfois, à Paris, des enseignants protester vigoureusement contre cette réforme, ce qui montre bien que parents et enseignants ne sont pas toujours d’accord sur le sujet.

Deuxièmement, je voudrais vous féliciter, monsieur le ministre, de ne pas avoir demandé que ce projet de loi soit examiné selon la procédure accélérée. Il est bon qu’une deuxième lecture ait lieu, mais je me demande à quoi elle peut servir si tous les orateurs de la majorité sont priés de retirer leurs amendements…

M. Jean-Claude Lenoir. Ils sont dociles !

M. Jacques Legendre. Ce débat de deuxième lecture perd ainsi l’essentiel de son intérêt. Je le dis sans polémique, car c’est un problème de fond.

Troisièmement, il s’agit du dernier débat au Parlement portant sur cette réforme avant son entrée en vigueur. Monsieur le ministre, nous pensons que vous avez raison de vouloir revoir les rythmes scolaires, mais nous sommes également persuadés que, sans concertation préalable avec les collectivités territoriales, qui auront à subir une bonne partie de la dépense, et sans la certitude de disposer des personnels capables d’assurer que cette réforme soit une réforme de qualité, vous risquez de ne pas atteindre les objectifs que vous lui assignez.

Il serait plus raisonnable – c’est notre ultime occasion de le demander ! – de retarder l’application de cette réforme partout où elle ne peut être appliquée dans de bonnes conditions.

L’amendement n° 39 tend donc à introduire dans la loi la mention des trois précautions suivantes : cette réforme doit faire l’objet d’une concertation préalable approfondie ; elle doit prévoir des délais indispensables à la réorganisation des activités et des services concernés ; enfin, elle doit permettre de mesurer ses implications financières, lourdes pour les collectivités territoriales.

L’amendement n° 40 vise à préciser que la réforme des rythmes scolaires pourra être engagée à la rentrée scolaire de 2014 dans le premier degré sur le territoire des collectivités ayant donné leur accord.

Monsieur le ministre, ces amendements n’ont pas été déposés pour vous mettre en difficulté : ils l’ont été pour permettre à cette réforme, que nous appelons également de nos vœux, d’être une réussite ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Françoise Férat applaudit également.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je tiens tout d’abord à rétablir un certain nombre de vérités, en me fondant sur l’expérience vécue dans mon département, mais aussi sur celle de plusieurs collègues.

Il n’est pas vrai que les communes qui ont choisi d’appliquer cette réforme dès 2013 soient plutôt de grosses communes. Dans mon département, ce choix a été fait par de grosses communes, mais pas par toutes – certaines grandes communes de gauche préfèrent attendre 2014 –, et certaines petites communes de droite ont également décidé de se lancer dès la rentrée prochaine. Il ne s’agit donc pas d’une question de taille de commune ou d’opposition entre communes rurales et urbaines. Il me semble que ces décisions s’expliquent par l’histoire du fonctionnement de ces communes. Celles d’entre elles qui disposent d’un tissu associatif riche, avec lequel elles ont l’habitude de travailler, où les parents d’élèves prennent leur part de la réforme, se sont lancées dès 2013 dans des projets éducatifs territoriaux de qualité. (Mme Maryvonne Blondin approuve.) Cette décision ne dépend donc pas de la taille des communes ni de leur niveau de richesse, mais de l’histoire de ce partenariat.

Par ailleurs, M. Legendre a évoqué la possibilité de reporter la mise en œuvre de la réforme. Mais c’est ce qui est prévu ! Les communes ne se voient pas imposer d’obligation pour la rentrée de 2013. Le Président de la République, lors du congrès des maires, a rappelé que les deux possibilités étaient ouvertes : 2013 pour les communes prêtes, 2014 pour celles qui ont besoin de plus de temps pour mettre en place cette réforme. Aujourd’hui, la réflexion a abouti dans certaines communes qui vont appliquer les nouveaux rythmes dès la rentrée de 2013 et d’autres lancent la concertation et se préparent pour la rentrée de 2014.

Cette réforme va donc se mettre en place progressivement, entre 2013 et 2014. C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur ces quatre amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Le Gouvernement émet le même avis que la commission. Mais j’ajouterai quelques commentaires en réponse à ce que j’ai entendu.

Monsieur Legendre, dans ce que j’ai pu observer au cours des six derniers mois, rien ne me permet de douter une seconde que tout le monde a bien l’intention de faire en sorte que cette réforme réussisse. D’ailleurs, comment pourrais-je en douter après avoir vu comment on était passé, sans aucune concertation, de la semaine de quatre jours et demi à la semaine de quatre jours ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Je sens donc une très grande volonté politique, qui s’inscrit dans une continuité historique et qui donne beaucoup de crédibilité à vos propos !

Je souhaite toutefois préciser que nous avons mis en place un comité de suivi et que nous avons réservé la possibilité d’une mise en œuvre décalée de la réforme en 2014 – ce qui représentera un délai de mise en œuvre de cette mesure de plus d’un an et demi depuis qu’elle a été annoncée.

Des moyens sans précédent ont été mis en place, y compris pour aider les communes qui ont le moins de moyens financiers, le fonds permettant de procéder en outre à une péréquation.

De plus, nous réunissons régulièrement au ministère tous les présidents d’associations en vue d’évaluer l’application du décret pour les communes qui changent de rythme scolaire dès 2013. J’imagine que les uns et les autres tireront avant Noël les conséquences de cette application pour l’améliorer. Bien sûr, s’il faut l’améliorer, nous le ferons : il n’y a pas de raison de ne pas le faire !

Donc, le temps de mettre en place la réforme est d’ores et déjà ménagé et le comité de suivi associe tout le monde, de la même façon que tout le monde a été convié à la concertation préalable. Celle que mon prédécesseur avait lancée avait tout de même pris plus d’un an. La nôtre a duré six mois. Lorsqu’on veut le progrès, il vient un moment où il faut s’y mettre !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, nous n’avons pas les mêmes échos du terrain !

Vous avez la chance d’avoir une opposition constructive. (M. Jean-Vincent Placé s’esclaffe.) Nous pourrions, en effet, vous remercier d’aller dans cette voie étant donné les répercussions qu’a votre proposition de réforme sur le terrain, où, s’il faut en croire ce que l’on entend, tous les éléments laissent plutôt présager son échec ! Je peux vous dire que les élus locaux ne vous font pas de publicité !

À un an des élections municipales, nous pourrions très bien vous encourager à continuer dans cette voie ! Mais il se trouve que nous sommes constructifs. Nous vous proposons donc, à travers ces amendements, une voie de sortie tout à fait honorable : il s’agit de tirer les leçons de l’expérience des quelques communes qui seront entrées dans la réforme dès 2013.

Le cas du département de la Marne recoupe celui dont a fait état Françoise Ferrat : 9,8 % des communes ont choisi d’appliquer le dispositif dès 2013. Il s’agit de communes petites et moyennes. Les grandes ne se sont pas lancées dans la réforme, pas même la ville de Reims, pourtant tenue par vos amis politiques, compte tenu du coût et des complications qu’elle engendre ! Quant aux plus petites communes, après s’être un petit peu gratté la tête pour voir comment elles allaient mettre sur pied le système, toutes ont fait marche arrière. Et les quelques communes qui se sont inscrites dans le dispositif pour 2013 commencent à le regretter.

Car il y a, derrière tout cela, un problème d’organisation. Les associations sont vent debout quand elles voient le nombre de minutes qu’il faudra consacrer chaque jour à l’organisation de ces rythmes scolaires, et qui seront autant de minutes en moins pour le travail effectif.

Ceux qui financent voient aussi les difficultés importantes auxquelles ils vont devoir faire face, d’autant que le coût de la réforme a été sous-estimé. Et tout cela se passe au moment où les collectivités locales savent qu’elles vont voir leurs ressources diminuer en 2014. Or c’est l’année où ces rythmes scolaires vont entrer en application sur l’ensemble des territoires. Elles ne pourront donc pas faire face à toutes ces difficultés financières !

Pour les départements, qui organisent les transports scolaires, c’est un véritable casse-tête ! Dans mon département, j’ai déjà organisé la concertation pour voir comment on allait modifier les horaires afin d’essayer de rationaliser le coût du transport scolaire. Nous avons envisagé de prendre les enfants qui sortiront des écoles primaires ou maternelles en même temps que les collégiens ou les lycéens, de manière à obtenir un coût raisonnable sur cinq jours au lieu d’un coût sur quatre jours. Cette organisation, qui va complètement déstabiliser l’existant, représentera, selon l’estimation de l’Assemblée des départements de France, un coût supplémentaire de 3 % à 6 %. Mon département devra consacrer près de 700 000 euros de plus aux transports scolaires dans le cadre de cette nouvelle organisation !

À l’évidence, les départements qui ont cette responsabilité sont soumis à une contrainte financière telle qu’ils vont être amenés à faire payer demain le transport scolaire par l’usager ! En effet, nous pourrons d’autant moins continuer à faire face à toutes ces dépenses que les droits de mutation sont en pleine dégringolade – de 30 % selon les propres chiffres du ministère ! La diminution des recettes départementales devrait représenter globalement 1,2 milliard d’euros dès 2014. À l’inverse, les allocations de solidarité, elles, continuent d’augmenter : le RSA, c’est 2 % de plus par mois dans certains départements, 3 % dans le mien ; 200 bénéficiaires de RSA en plus, ce sont 1 million d’euros supplémentaires à débourser !

Demain, nous ne pourrons pas boucler nos budgets. Nous ne pourrons donc pas mobiliser les financements nécessaires pour venir consolider ce que vous proposez aujourd’hui.

Je crois donc qu’il faut faire le bilan de l’expérimentation pratiquée par ceux qui seront déjà entrés dans le processus en 2013. Vous aurez ainsi une possibilité de sortie et pourrez prendre le temps nécessaire pour une meilleure organisation et un meilleur financement de cette réforme des rythmes scolaires ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Françoise Férat applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. Au détour de cette deuxième lecture, nous abordons ici un débat sur les rythmes scolaires qui avait été ouvert par la voie réglementaire.

Mon collègue et ami René-Paul Savary a très bien décrit la situation qui va être faite aux départements à travers le problème des transports scolaires. À la rentrée prochaine, ce sera vraiment la bouteille à l’encre !

Je voudrais m’exprimer en tant qu’élu local, monsieur le ministre. Vous êtes ministre de l’éducation nationale et je ne vous fais pas grief de ne pas connaître la situation des territoires. Mais vous en avez, j’en suis certain, de multiples échos.

Cela dit, je n’oublie pas que votre premier propos public, dès le lendemain de votre nomination au ministère de l’éducation nationale, a été consacré aux rythmes scolaires. J’ai l’impression que c’est une idée à laquelle vous tenez d’autant plus que vous l’avez lancée dès le début, ce qui avait d’ailleurs suscité quelques remous dans la sphère gouvernementale !

Je vous le dis en toute franchise : je n’ai pas approuvé le changement de rythme scolaire quand on est passé à quatre jours. Sur le fond, les choses sont donc claires ! En revanche, là où je ne suis pas d’accord, c’est lorsque vous demandez à la collectivité locale de supporter une partie des quatre jours et demi puisque nous devons mettre à la disposition de l’école de la République des moyens qui ne nous étaient pas demandés jadis quand la semaine était déjà de quatre jours et demi. Est-ce que, alors, la commune participait à certaines des séquences de la vie scolaire ? Non ! (MM. Daniel Raoul et Claude Bérit-Débat s’exclament.)

M. Jacques Chiron. Ah bon ? Et qu’est-ce que nous faisions le mercredi matin ?

M. Jean-Claude Lenoir. Alors, que nous revenions aux quatre jours et demi, soit ! Ce qui me gêne, c’est que vous êtes en train, mes chers collègues, d’expliquer qu’il appartient à la commune de participer au financement de ce retour aux quatre jours et demi. Vous en porterez la responsabilité !

D’ailleurs, ce matin, je lisais dans un grand quotidien qui est plutôt parisien, mais qui porte un autre nom dans les provinces, que, s’agissant des rythmes scolaires, « à quelques mois des municipales la moindre rature dans leur copie pourrait faire l’objet de sanctions dans les urnes ». Bien entendu, c’est des candidats de la majorité qu’il était question. (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Vous n’imaginez pas le ressentiment qu’éprouvent aujourd’hui des élus qui n’ont pas été consultés. Ils estiment avec beaucoup de bon sens que, sur cette question, monsieur le ministre, le mieux eût été de fixer la même date pour revenir à la semaine des quatre jours et demi.

Au nom du même bon sens, vous auriez dû, à l’issue d’une concertation, définir la part que l’État prendrait dans l’organisation de la vie scolaire sur quatre jours et demi.

Sur ce sujet comme sur d’autres, vous avez cédé à la facilité : c’est à la collectivité locale de payer ! Aujourd’hui, nous sommes dans une situation extrêmement difficile, surtout à la veille d’une année budgétaire où, nous le savons déjà, les dotations de l’État vont baisser et les charges vont augmenter du fait de décisions dont vous assumez la responsabilité.

Chers collègues de la majorité, j’ai entendu ce que vous en disiez. Eh bien, allez expliquer cela aux maires, et je vous donne rendez-vous l’année prochaine !

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Je voudrais simplement vous faire part de mes remarques à la suite des propos de Mme le rapporteur. Elle renvoie la balle aux communes et au tissu associatif. Ce n’est pas aussi simple, madame Carton, et vous le savez bien !

Pour être tous des élus locaux, nous savons que, dans nos communes, le tissu associatif est souvent très riche, très actif, très volontaire. Il repose sur un certain nombre de bénévoles qui donnent beaucoup de leur temps, voire, parfois, beaucoup de leurs moyens personnels pour animer le cœur de nos villes. Il ne s’agit pas seulement de bonne volonté !

Je prends le cas de la ville où j’habite et dans laquelle je suis adjointe au maire. À la rentrée de l’automne dernier, nous sommes allés voir très rapidement les associations pour leur demander si elles voulaient participer à la mise en place des rythmes scolaires en 2014. Les représentants des associations de toutes sortes, qu’elles soient culturelles, sportives, ou qu’elles réunissent des joueurs d’échecs, ont, sans exception, levé la main.

Puis, nous en sommes venus à l’organisation. Comment trouver des bénévoles, alors que ceux-ci sont souvent des actifs. Ce sont quelquefois des retraités, mais ils partent en vacances en avril ou en juin. Comment trouver des bénévoles, quels qu’ils soient, disponibles de 15 heures 30 ou 15 heures 45 à 16 heures 30 pour intervenir dans les classes, où leur présence n’est pas souhaitée par des professeurs, parce qu’ils ne veulent pas voir des étrangers venir dans leur salle de classe, craignant qu’ils ne dérangent leurs affaires ? Bref, c’est très compliqué !

Mme Sophie Primas. Sans doute cela vous fait-il sourire, monsieur le ministre ! Vous, vous avez de grandes réformes à mener au niveau de l’État. Pour notre part, nous avons, plus modestement, à les appliquer dans la vie quotidienne, au fil des jours, avec ces associations. Croyez-le bien, ce n’est pas si simple !

Dans ma ville, nous avons la chance d’avoir un théâtre en résidence, avec des acteurs qui sont là pour accueillir les enfants. Mais comment amène-t-on ces enfants des quatre coins de la ville ? Comment prend-on le quart d’heure supplémentaire sur les trois quarts d’heure de rythme scolaire dégagés par ces quatre jours et demi ? Tout cela n’est pas simple, tout cela ne porte pas à sourire quand vous êtes les mains dans le cambouis et qu’il faut l’organiser !

Située à côté de chez moi, la ville des Mureaux, qui n’est pas spécialement de mon bord politique, a mis en place la réforme des rythmes scolaires. Eh bien, je tiens à vous le dire, cette réforme a des effets collatéraux difficiles à gérer. Puisque les enfants vont à l’école le mercredi matin, les mamans qui travaillaient les quatre cinquièmes de la semaine en reviennent aux cinq cinquièmes. Et les centres de loisirs de l’après-midi sont en train d’exploser ! Ils n’ont ni la place ni les moyens d’accueillir les enfants l’après-midi.

Tous ces problèmes ne sont pas si faciles à résoudre. À côté des effets sur les finances des communes, dont il a été fait largement état, et à juste titre, il y a des problèmes d’organisation qui ne peuvent pas être résolus grâce à la seule bonne volonté des associations et des élus ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.

.M. Jean-Pierre Leleux. Je suis maire d’une ville de 52 000 habitants, qui compte 25 écoles et 200 classes. J’ai approuvé votre idée de modifier les rythmes scolaires, monsieur le ministre. Très vite, je me suis exprimé en ce sens devant mes concitoyens et les responsables de l’éducation nationale, avec lesquels je suis d’ailleurs en excellents termes, car nous travaillons régulièrement ensemble pour le bien des enfants de la ville. Je leur ai annoncé que, aussi paradoxal que cela puisse leur paraître, je serais favorable à l’initiative d’un ministre de gauche pour améliorer les rythmes scolaires.

Cette réforme des rythmes scolaires m’apparaît en effet comme une bonne chose. D’ailleurs, Jacques Legendre vous le disait tout à l’heure.

J’ai immédiatement mis en place, dans chaque école, un système de concertation associant les parents, les directeurs d’école et le monde associatif local.

Depuis des années, nous avons la chance, dans notre ville, d’avoir une vie culturelle extrêmement dynamique, avec musée, cinéma, théâtre, bibliothèque, médiathèque, conservatoire… Depuis des années, déjà, nous intervenons dans le périscolaire à l’école. Nous intervenons également dans le secteur sportif avec des animateurs municipaux qui initient les élèves, par exemple, au judo ou au rugby. Notre municipalité est donc déjà très fortement engagée en matière d’activités pour les jeunes.

J’ai déjà réuni deux fois le comité de pilotage et d’accompagnement de votre réforme. Inutile de vous dire que c’est encore la foire d’empoigne et que, pour l’instant, le point d’équilibre n’a pas été trouvé entre les directeurs, les enseignants, les parents d’élèves, les centres de loisirs et les gestionnaires d’équipements… Mais nous ne renonçons pas pour autant !

Par prudence, j’ai choisi 2014 pour la mise en place de la réforme. J’ai réuni quelques maires. Et je suis arrivé à une conclusion qui m’inquiète beaucoup : nous sommes en train de créer, me semble-t-il, une école à deux vitesses. Il y aura, d’un côté, les communes qui auront déjà un peu d’avance, car elles ont des moyens et, de l’autre côté, des communes qui n’auront pas les moyens de financer cet accompagnement du périscolaire.

Je vois donc se profiler une situation où nous aurons des écoles qui vont faire du gardiennage de qualité médiocre : bien sûr, on va garder les enfants parce qu’il le faudra bien, mais en leur offrant un programme d’activité qui sera très maigre. Et puis, il y aura des écoles qui auront la chance, parce qu’elles seront dans telle ou telle commune, de pouvoir proposer de l’initiation à un instrument de musique, à la culture scientifique et technique ou d’autres activités auxquelles le monde associatif et municipal est tout à fait prêt à contribuer.

Une telle partition m’inquiète, et je m’étonne que vous, monsieur le ministre, puissiez la laisser se dessiner ! En effet, vous avez toujours été attentif à l’égalité d’accès à la culture et à l’éducation. Or je sens très bien, au fil des différentes concertations, poindre le risque que je viens d’évoquer. Et, croyez-moi, je suis les choses avec beaucoup de sérieux, aidé par mon adjoint en charge de la vie scolaire.

C’est pourquoi je soutiendrai les amendements de Jacques Legendre. Il s’agit non pas de permettre à chaque commune d’assurer un service de qualité médiocre, mais de permettre à toutes de bien faire. Il nous faudra certes un peu plus de temps, quitte à réduire les moyens, mais, j’y insiste, nous devons prévenir cette évolution vers une école à deux vitesses. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Jean Boyer applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je souhaite témoigner, en tant qu’élu d’une ville qui expérimente depuis quatre ans les nouveaux rythmes scolaires, de la valeur du retour d’expérience, comme on dit dans l’industrie.

Je ne peux pas vous suivre, monsieur Legendre, quand vous demandez de repousser l’ensemble de la réforme à 2014. Sans doute vous faites-vous « une montagne » de cette nouvelle organisation... Or nous qui l’expérimentons pourrions vous livrer, clef en main, un certain nombre de recettes pour optimiser l’organisation des activités périscolaires et l’intervention des animateurs !

Sur le plan financier, il est vrai que les activités périscolaires et les garderies sont entièrement prises en charge par ma collectivité. Le coût des centres de loisirs vient donc en déduction du coût apparent des activités périscolaires. Il ne reste plus qu’à régler le problème des mercredis après-midi.

Je peux vous assurer que tout se passe sans aucune difficulté, y compris avec les écoles privées, alors même que celles-ci n’adopteront le nouveau système qu’en 20104. Elles avaient pourtant commencé à l’expérimenter, mais, apparemment, un problème de recrutement les a empêchées de poursuivre. Du reste, on peut se demander pourquoi les écoles privées auraient du mal à recruter quand les écoles publiques n’en ont pas. Il y faut de la volonté ! Vous le savez, là où il y a une volonté, il y a un chemin...

M. Jean-Claude Lenoir. J’ai déjà entendu ça ! (Sourires.)

M. Daniel Raoul. On attribue souvent cette phrase de manière erronée... Il faut revenir aux sources ! (Nouveaux sourires.)

Vous avez dit que la majorité était silencieuse, monsieur Lenoir...

M. Jean-Claude Lenoir. J’ai dit qu’elle était docile !

M. Daniel Raoul. C’est donc uniquement pour vous faire plaisir que j’ai pris la parole ! (Nouveaux sourires.)

Je ne comprends pas ! Vous êtes d’accord sur le fait qu’il est urgent d’aménager les rythmes scolaires, vous convenez du bien-fondé de cette réforme, notamment au vu du classement PISA, et vous n’êtes pas capables de donner un coup de collier pour préparer la rentrée de 2014 ! Vous avez pourtant neuf mois pour le faire tranquillement.

Je peux vous donner les recettes, monsieur Legendre ! Nous les expérimentons depuis quatre ans...

M. Jacques Legendre. Ce n’est pas à vous de les donner...

M. Daniel Raoul. Je peux en tout cas les verser au débat !

Au début de l’expérimentation, c’est vrai, nous avons tâtonné. Mais nous sommes désormais opérationnels. Et, à la rentrée de 2013, avec les animateurs, avec le monde associatif et sportif, nous serons tout à fait au point ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 39.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 18.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe de l’UDI-UC, l’autre, du groupe UMP.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 281 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 347
Pour l’adoption 171
Contre 176

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 19, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 147

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. L’alinéa 147, que nous proposons de supprimer, vise à remettre en cause le dispositif de la loi Cherpion.

Selon moi, ce dispositif répondait à un besoin spécifique des jeunes de moins de seize ans ayant terminé leur parcours au collège et ayant déjà une idée claire de leur projet professionnel. Il convient donc de le maintenir.

Je ne peux pas laisser dire que l’apprentissage ou la formation professionnelle enferment précocement dans une filière. Pour les élèves qui en font le choix, c’est une chance et c’est une voie qui les conduira à l’emploi.

L’apprentissage est une voie d’excellence qui permet à huit jeunes sur dix de trouver un emploi à l’issue de leur formation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. En première lecture, nous avions abordé avec Mme Pau-Langevin, présente aujourd’hui parmi nous, le problème des élèves de quatorze ans et demi qui risquaient de se trouver en difficulté. Vous vous étiez engagée à l’époque, madame la ministre, à régler ce problème. Pouvez-vous nous confirmer qu’une solution sera trouvée pour ces jeunes, et qu’ils ne seront en rien pénalisés ? Dans plusieurs départements, en effet, des inquiétudes se sont exprimées à ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Je réitère les propos que j’avais tenus ici même : je vous confirme, en accord avec M. le ministre, que le cas de ces élèves sera examiné avec attention.

M. Roland Courteau. C’est clair et net !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 25, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 183

Compléter cet alinéa par les mots :

, dans le respect des principes édictés au premier alinéa de l’article L. 912-1-1 du code de l’éducation

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Le présent amendement vise à préciser que les enseignants sont formés au numérique et qu’ils peuvent choisir en toute liberté les ressources pédagogiques numériques qu’ils estiment nécessaires à leur enseignement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cette précision est superflue dans la mesure où le principe de la liberté pédagogique des enseignants est d’ores et déjà inscrit dans le code de l’éducation. Cette liberté s’exercera pleinement.

Je vous demande donc, madame Laborde, de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Jacques Legendre. Ben voyons...

M. le président. Madame Laborde, l’amendement n° 25 est-il maintenu ?

Mme Françoise Laborde. Cela va mieux en le disant ; je retire donc mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 25 est retiré.

L’amendement n° 20, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC, est ainsi libellé :

Alinéa 270

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

L'illettrisme constitue ainsi la cause principale de l'échec scolaire. La lutte contre celui-ci doit être une priorité absolue des pouvoirs publics et de l'école.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. La phrase que nous proposons d’introduire semble relever d’une évidence ! Or, si le Premier ministre a fait de la lutte contre l’illettrisme la grande cause nationale de l’année 2013, force est de constater qu’aucune mesure concrète n’a été prise à cet égard.

Les pouvoirs publics doivent non seulement prendre la mesure du problème, mais aussi et surtout mettre tout en œuvre pour le faire reculer. La mission première de l’école, c’est d’apprendre à lire et à écrire !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 20.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er et le rapport annexé.

(L'article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

TITRE IER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

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Chapitre Ier

Les principes et missions de l’éducation

Section 1

Les principes de l’éducation

Article 1er et rapport annexé
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 3 ter

Article 3 A

I. – L’article L. 111-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) La dernière phrase est complétée par les mots : « et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative » ;

b) Sont ajoutées cinq phrases ainsi rédigées :

« Il reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser. Il veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. Il veille également à la mixité sociale des publics scolarisés au sein des établissements d’enseignement. Pour garantir la réussite de tous, l’école se construit avec la participation des parents, quelle que soit leur origine sociale. Elle s’enrichit et se conforte par le dialogue et la coopération entre tous les acteurs de la communauté éducative. » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité. Par son organisation et ses méthodes, comme par la formation des maîtres qui y enseignent, il favorise la coopération entre les élèves. » ;

3° Le troisième alinéa devient l’avant-dernier alinéa.

II (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 161-1, à l’article L. 163-1 et au premier alinéa de L. 164-1 du même code, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « sixième ». – (Adopté.)

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Article 3 A
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 4 bis

Article 3 ter

Après l’article L. 111-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 111-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-1-1. – La devise de la République, le drapeau tricolore et le drapeau européen sont apposés sur la façade des écoles et des établissements d’enseignement du second degré publics et privés sous contrat. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 est affichée de manière visible dans les locaux des mêmes écoles et établissements. »

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l’article.

M. Roland Courteau. À l’occasion de la première lecture du présent projet de loi, j’avais souhaité intervenir sur sa philosophie générale, sur l’importance que j’accorde à notre école laïque et républicaine, à l’accueil des enfants de moins de trois ans et à l’enseignement des langues régionales. J’avais d’ailleurs cosigné plusieurs amendements qui ont ensuite été adoptés.

Je tiens à redire aujourd’hui qu’il s’agit à mon sens d’un texte fondateur pour notre système éducatif, qui prend la mesure des changements à opérer et se donne les moyens d’y parvenir.

Si j’ai souhaité intervenir à nouveau, c’est parce qu’en relisant le projet de loi à l’occasion de cette nouvelle lecture j’y ai trouvé plus qu’un texte sur l’école et sur l’éducation.

Bien sûr, l’école sert à former les esprits. Elle apprend à réfléchir, à se forger une opinion, à élargir sa vision sur le monde, et elle le fait bien. Au travers de l’article 3 ter, il apparaît évident qu’elle prépare aussi les enfants et les adolescents d’aujourd’hui à devenir les citoyens de demain.

Évoquant la philosophie et les citoyens, je parle de ces valeurs et symboles que nous partageons tous, qui participent de notre vivre-ensemble et bâtissent notre communauté nationale en liant notre futur à notre passé. C’est aussi cela que notre école républicaine a la charge de transmettre et de faire vivre.

Parce que ces futurs citoyens doivent être préparés à affronter le monde, parfois hostile, qui les entoure, ces valeurs et ces symboles sont en quelque sorte des repères leur signifiant qu’ils sont liés les uns aux autres et qu’ils appartiennent à quelque chose de plus grand qu’eux, la Nation et l’Union européenne.

En prévoyant d’apposer sur la façade des établissements la devise de notre République, notre drapeau tricolore et celui de l’Union européenne, cet article 3 ter peut paraître superflu. Il n’en est rien ! Ces symboles, nous en sommes fiers, nous les avons faits nôtres au fil de notre histoire, parfois au prix du sang et des larmes, dans des combats que certains ont payé de leur vie.

Par cet article, nous montrons que l’école est dans la République et que la République est dans l’école. Avec cet article, ce sont nos valeurs, nos symboles que nous affichons fièrement et que nous transmettons aux jeunes générations, afin qu’elles sachent, qu’elles se souviennent, qu’elles n’oublient pas.

Le drapeau français d’abord ; le drapeau européen ensuite, représentant la solidarité et l’union entre les peuples d’Europe, symbole de la volonté de bâtir une paix durable et d’en finir avec les guerres incessantes qui ont jalonné l’histoire de notre continent ; notre devise, enfin, « Liberté, Égalité, Fraternité », issue de la Révolution française, définitivement adoptée par la IIIRépublique, et qui confère les mêmes droits et les mêmes devoirs aux citoyens, indépendamment de toute considération sociale et matérielle.

Je voudrais conclure mon propos sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, texte fondamental, s’il en est, de la Révolution française, qui se situe désormais au sommet de notre hiérarchie des normes dans notre droit positif. Un préambule et dix-sept articles classés par l’UNESCO sur le registre international de la Mémoire du monde, qui recense les collections du patrimoine documentaire d’intérêt universel, pour en assurer la préservation. Un préambule et dix-sept articles que nous sommes fiers de revendiquer et de porter à travers le monde.

C’est pour toutes ces raisons, et probablement bien d’autres, que cet article me semble nécessaire.

Je souhaite que chaque enfant s’approprie ces symboles, qui lui en apprennent plus sur lui, sur ce pays, sur son histoire, sur notre histoire ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

M. le président. L'amendement n° 42 rectifié bis, présenté par MM. Gilles, Cardoux et Revet, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

et le drapeau européen

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Il s’agit, par cet amendement, de revenir au texte initial du Gouvernement.

Afin de réaffirmer l’attachement de la République à son école et de contribuer à l’appropriation par les élèves des fondements de la Constitution, ce texte avait prévu que le drapeau et la devise de la République soient apposés au fronton de toutes les écoles et établissements d’enseignement du second degré publics ou privés sous contrat.

À l’Assemblée nationale, il a été ajouté qu’il devait en être de même pour le drapeau européen.

Connaître les emblèmes de notre République, apprendre l’hymne national, notre devise républicaine et l’histoire de ces symboles permettra aux élèves de découvrir les valeurs qui fondent l’identité de notre République. C’est effectivement à travers l’histoire de nos emblèmes et de notre devise que les élèves s’approprieront la spécificité de la France et tireront fierté de leur appartenance à ce pays.

Or afficher le drapeau européen au fronton de nos écoles ne se justifie pas encore aujourd’hui. La citoyenneté européenne n’a pas les mêmes implications puisque l’Europe ne constitue ni un État, ni un peuple, ni une nation. En fait, cette citoyenneté est en devenir. La juxtaposition du drapeau français et du drapeau européen risquerait donc de provoquer une ambiguïté chez nos jeunes élèves et de brouiller ainsi leur esprit sur la citoyenneté dans notre République.

Ce drapeau n’a pas encore sa place sur les bâtiments des écoles de la République ; tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 42 rectifié bis.

M. Daniel Raoul. M. Gilles est bien seul !

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3 ter.

(L'article 3 ter est adopté.)

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Article 3 ter
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Article 5

Article 4 bis

I. – L’article L. 541-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les actions de promotion de la santé des élèves font partie des missions de l’éducation nationale. Elles sont en priorité assurées par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale. À ce titre, les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistage obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. » ;

1° bis Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les visites médicales et de dépistage obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. » ;

2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Les mots : « que le bilan mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « qu’un bilan de leur état de santé physique et psychologique » ;

b) (Supprimé)

2° bis A (nouveau) La première phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée :

« Au cours de la sixième année, une visite comprenant un dépistage des troubles spécifiques du langage et de l’apprentissage est organisée. » ;

2° bis Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour les visites médicales et les dépistages obligatoires, la périodicité et le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage. » ;

3° Après le mot : « concours », la fin de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « de l’infirmier et, dans les établissements du second degré, d’un assistant de service social. » ;

4° Le dernier alinéa est supprimé.

II. – L’article L. 2325-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les actions de promotion de la santé des élèves font partie des missions de l’éducation nationale. Elles sont en priorité assurées par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale. À ce titre, les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistage obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. » ;

1° bis Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Les visites médicales et de dépistage obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :

a) Les mots : « que le bilan mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « qu’un bilan de leur état de santé physique et psychologique » ;

b) (Supprimé)

2° bis A (nouveau) La première phrase du quatrième alinéa est ainsi rédigée :

« Au cours de la sixième année, une visite comprenant un dépistage des troubles spécifiques du langage et de l’apprentissage est organisée. » ;

2° bis Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :

« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour les visites médicales et les dépistages obligatoires, la périodicité, le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage, ainsi que les éventuelles populations prioritaires. » ;

3° Après le mot : « concours », la fin de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « de l’infirmier et, dans les établissements du second degré, d’un assistant de service social. » ;

4° Le dernier alinéa est supprimé.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, sur l’article.

M. Jean-Claude Lenoir. À l’occasion de l’examen de cet article qui provient des travaux de l’Assemblée nationale, je souhaiterais appeler l’attention de M. le ministre sur les moyens alloués à la médecine scolaire, qui fait un peu office de parent pauvre de l’éducation nationale.

On manque de médecins et ce sont les collectivités locales – toujours elles ! – qui participent à l’accueil de la médecine scolaire.

Les médecins scolaires, quand ils existent, trouvent un gîte dans des communes qui acceptent de rendre un service indispensable – et apprécié – à un groupe de communes particulièrement important.

Nous qui sommes très attachés aux actions de prévention – Dieu sait qu’il y a beaucoup à faire dans ce domaine ! –, nous devons réfléchir aux moyens de conforter la place de la médecine scolaire dans l’éducation nationale, de sorte que le plus grand nombre possible d’enfants puisse être examiné par un médecin durant leur passage à l’école élémentaire.

Je me suis abstenu de déposer quelque amendement que ce soit sur cet article, car il aurait évidemment été frappé par l’article 40. J’espère toutefois que mes propos auront été entendus et que nous pourrons un jour participer de façon collective à une action qui mérite certainement beaucoup plus d’intérêt que celui qui peut être porté à mon intervention de ce jour. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4 bis.

(L'article 4 bis est adopté.)

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Article 4 bis
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Article 6 bis

Article 5

I. – L’article L. 113-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Dans les classes enfantines ou les écoles maternelles, les enfants peuvent être accueillis dès l’âge de deux ans révolus dans des conditions éducatives et pédagogiques adaptées à leur âge visant leur développement moteur, sensoriel et cognitif, précisées par le ministre chargé de l’éducation nationale. Cet accueil donne lieu à un dialogue avec les familles. Il est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d’outre-mer. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Dans ces classes et ces écoles, les enfants de moins de trois ans sont comptabilisés dans les prévisions d’effectifs d’élèves pour la rentrée. »

II. – Au début de l’article L. 162-2-1 du même code, les mots : « Le dernier » sont remplacés par les mots : « L’avant-dernier ».

M. le président. L'amendement n° 26, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La scolarisation à partir de l’âge de deux ans révolus fait l’objet d’une étude nationale approfondie soumise au Parlement pour débat. »

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Lorsque nous avons réfléchi à l’école maternelle et à son rôle, nous nous sommes interrogés sur la situation des enfants scolarisés à l’âge de deux ans.

Une partie de la socialisation et, surtout, un début d’apprentissage des connaissances fondamentales par les élèves se jouent-ils entre deux et trois ans ? Les spécialistes répondent de façon divergente à cette question.

Au moment où l’on envisage de consacrer à nouveau des moyens importants à l’extension de la scolarisation entre deux et trois ans – autant de moyens qui ne seront pas consacrés à la scolarisation entre quatre et six ans –, il nous paraît utile qu’un grand débat puisse, une bonne fois pour toutes, nous éclairer et nous permettre de nous forger une opinion en toute connaissance de cause.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, pour des raisons que nous avons déjà exposées en première lecture.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

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Section 2

L’éducation artistique, culturelle et sportive

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Article 5
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Article 10

Article 6 bis

L’article L. 121-5 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° (Supprimé)

2° Après les mots : « l’échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l’éducation à la santé et à la citoyenneté » ;

3° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

« Les contenus et l’enseignement de l’éducation physique et sportive sont de la responsabilité de l’éducation nationale. Le sport scolaire participe de la nécessaire complémentarité avec les pratiques périscolaires et extrascolaires en lien avec les projets éducatifs territoriaux et les partenariats avec le mouvement sportif associatif. » – (Adopté.)

Section 2 bis

L’éducation à la santé et à la citoyenneté

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Section 3

Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture

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Section 4

Le service public du numérique éducatif

Article 6 bis
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Article 12

Article 10

Le second alinéa de l’article L. 131-2 du code de l’éducation est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« Dans le cadre du service public de l’enseignement et afin de contribuer à ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance est organisé pour, notamment :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements scolaires une offre diversifiée de services numériques permettant de prolonger l’offre des enseignements qui y sont dispensés, d’enrichir les modalités d’enseignement et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques, des contenus et des services, contribuant à leur formation, ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

« 3° Assurer l’instruction des enfants qui ne peuvent être scolarisés dans une école ou dans un établissement scolaire, notamment ceux à besoins éducatifs particuliers. Des supports numériques adaptés peuvent être fournis en fonction des besoins spécifiques de l’élève ;

« 4° Contribuer au développement de projets innovants et à des expérimentations pédagogiques favorisant les usages du numérique à l’école et la coopération.

« Dans le cadre de ce service public, la détermination du choix des ressources utilisées tient compte de l’offre de logiciels libres et de documents au format ouvert, si elle existe. »

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

Proposer aux enseignants

par les mots :

Inciter les enseignants à avoir recours à

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Cet amendement a pour objet de montrer notre volontarisme sur les missions confiées à l’école. Il concerne le numérique à l’école, plus particulièrement l’utilisation des outils en question par les enseignants.

Nous proposons d’inciter réellement les enseignants à avoir recours à ces moyens de communication, tant pour leur enseignement que dans le cadre de leur communication avec les familles.

Il faut les inciter fortement à mettre en place, sinon un site internet de l’école, au moins un carnet de correspondance numérique se substituant, pour les familles qui le souhaitent, au traditionnel carnet de correspondance sur papier. Ce n’est pas contraignant puisque, très concrètement, les informations inscrites dans ces carnets sont rédigées numériquement, imprimées, puis collées dans les cahiers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10.

(L'article 10 est adopté.)

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Chapitre II

L’administration de l’éducation

Section 1

Les relations avec les collectivités territoriales

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Article 10
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Article 14

Article 12

I. – Le 5° de l’article L. 211-8 du code de l’éducation est ainsi rédigé :

« 5° Des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique dans les collèges, les lycées et les établissements d’éducation spéciale dont celles afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique, ainsi que de la fourniture des manuels scolaires dans les collèges, les établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole mentionnés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime et les établissements d’éducation spéciale et des documents à caractère pédagogique à usage collectif dans les lycées professionnels ; ».

II. – Au dernier alinéa de l’article L. 442-9 du même code, les mots : « dépenses pédagogiques » sont remplacés par les mots : « dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique ». – (Adopté.)

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Article 12
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Article 14 bis

Article 14

Le premier alinéa de l’article L. 214-6 du code de l’éducation est ainsi rédigé :

« La région a la charge des lycées, des établissements d’éducation spéciale et des lycées professionnels maritimes. Elle en assure la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement. À ce titre, l’acquisition et la maintenance des infrastructures et des équipements, dont les matériels informatiques et les logiciels prévus pour leur mise en service, nécessaires à l’enseignement et aux échanges entre les membres de la communauté éducative sont à la charge de la région. Pour le fonctionnement des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole mentionnés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime, la région a la charge du transport pédagogique des élèves assuré dans le cadre des enseignements réguliers. » – (Adopté.)

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Article 14
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Article 15

Article 14 bis

Après l’article L. 213-2-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 213-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 213-2-2. – Sous sa responsabilité, après avis du conseil d’administration et, le cas échéant, accord de la collectivité propriétaire des bâtiments, le président du conseil général ou le président du conseil exécutif de Corse peut autoriser l’utilisation de locaux et d’équipements scolaires des collèges, pendant les heures ou les périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, par des entreprises, par des organismes de formation et, pour les besoins de l’éducation populaire, de la vie citoyenne et des pratiques culturelles et artistiques, par des associations. Ces activités doivent être compatibles avec la nature des installations, l’aménagement des locaux et le fonctionnement normal du service. Elles doivent également respecter les principes de neutralité et de laïcité.

« Cette autorisation est subordonnée à la passation d’une convention entre le représentant du département ou de la collectivité territoriale de Corse, celui de l’établissement et la personne physique ou morale qui désire organiser ces activités, précisant notamment les obligations pesant sur l’organisateur en ce qui concerne l’application des règles de sécurité, la prise en charge des responsabilités et de la réparation des dommages éventuels, ainsi que les conditions financières de l’utilisation des locaux et équipements dans le respect du code général de la propriété des personnes publiques. »

M. le président. L’amendement n° 27, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 2, deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et ne peuvent notamment permettre l'organisation de réunions à caractère politique, sauf période électorale

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Daniel Raoul. M. Legendre redouble ! (Sourires.)

M. Jacques Legendre. Non, mon cher collègue, je ne redouble pas, je persiste ! (Nouveaux sourires.)

L’article 14 bis prévoit l'utilisation de locaux et d'équipements scolaires par des entreprises, des organismes de formation ou des associations. Concernant les associations, il précise que celles-ci pourront utiliser les locaux pour les besoins « de la vie citoyenne », expression particulièrement floue.

Par cet amendement, il s’agit d’éviter une interprétation de cette disposition qui pourrait ouvrir la voie à la présence de réunions à caractère politique dans des établissements de l'éducation nationale.

Nous avons tous, depuis toujours, souhaité que les établissements constituent des lieux où les élèves seraient à l’abri du monde extérieur et de ses débats. Il nous semble donc important de préciser que, sauf en période électorale, où s’applique la vieille tradition républicaine des réunions sous les préaux d’école, les établissements scolaires ne peuvent pas accueillir des réunions à caractère politique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cet amendement est déjà satisfait par un amendement que j’avais moi-même déposé, qui a été voté et qui impose à ces associations de respecter les principes de neutralité et de laïcité.

En conséquence, je formule une demande de retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. Jacques Legendre. Je retire l’amendement, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 27 est retiré.

M. René-Paul Savary. Je le reprends, monsieur le président ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Il est satisfait !

M. Jean-Claude Lenoir. Vous voulez bâillonner l’opposition ? (Sourires.)

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Savary et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 27.

Vous avez la parole pour le défendre, mon cher collègue.

M. René-Paul Savary. Je souhaite surtout obtenir une précision.

Il est bien indiqué que, pour les collèges, c’est le président du conseil général qui donne l’autorisation à des associations de tenir un certain nombre de réunions de nature extrascolaire.

Il serait donc surprenant que les services sociaux des départements, par exemple, ne puissent pas organiser des réunions dans les collèges, notamment pour rencontrer les parents d’élèves et faire en sorte d’assurer la cohésion sociale, de façon officielle, dans un lieu ô combien symbolique.

J’aurais donc souhaité, en cela parfaitement en phase avec l’Assemblée des départements de France, que soit introduite la possibilité pour les services publics de tenir des réunions dans les collèges, sur autorisation du président du conseil général. Malheureusement, un tel amendement n’a pu être déposé.

Monsieur le ministre, accepteriez-vous cette ouverture pour des services qui jouent un rôle important en matière de cohésion sociale ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote sur l’amendement n° 27 rectifié.

M. Jean-Claude Lenoir. Je profite de cet amendement pour interroger M. le ministre.

L’idée d’utiliser les locaux scolaires en dehors du temps consacré à l’école est extrêmement intéressante. Elle me semble aller dans le bon sens, car les collectivités manquent souvent de salles de réunion.

Néanmoins, en l’état actuel du texte, seuls peuvent bénéficier de cette possibilité des organismes de formation ou des associations. Il n’est pas fait mention des communes.

Or j’aimerais que le maire de Mortagne-au-Perche, par exemple (Sourires.), puisse utiliser, bien entendu avec l’accord de la collectivité propriétaire, une ou plusieurs salles scolaires sans passer par une association, ce que ne permet pas la rédaction actuelle. À moins que vous ne me disiez, monsieur le ministre – votre parole ferait autorité, surtout dans cet hémicycle –, que les collectivités locales vont évidemment pouvoir bénéficier de ce droit.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Jean-Claude Lenoir. Je constate votre absence de réponse, monsieur le ministre… Je vous remercie de votre courtoisie !

M. le président. Je mets aux voix l'article 14 bis.

(L'article 14 bis est adopté.)

Article 14 bis
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Article 20

Article 15

Après l’article L. 214-6-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 214-6-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 214-6-2. – Sous sa responsabilité, après avis du conseil d’administration de l’établissement et, le cas échéant, accord de la collectivité propriétaire des bâtiments, le président du conseil régional ou le président du conseil exécutif de Corse peut autoriser l’utilisation de locaux et d’équipements scolaires des lycées et établissements régionaux d’enseignement adapté, pendant les heures ou les périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, par des entreprises ou des organismes de formation et, pour les besoins de l’éducation populaire, de la vie citoyenne et des pratiques culturelles et artistiques, par des associations. Ces activités doivent être compatibles avec la nature des installations, l’aménagement des locaux et le fonctionnement normal du service. Elles doivent également respecter les principes de neutralité et de laïcité.

« Cette autorisation est subordonnée à la passation d’une convention entre le représentant de la région ou de la collectivité territoriale de Corse, celui de l’établissement et la personne physique ou morale qui désire organiser ces activités, précisant notamment les obligations pesant sur l’organisateur en ce qui concerne l’application des règles de sécurité, la prise en charge des responsabilités et de la réparation des dommages éventuels, ainsi que les conditions financières de l’utilisation des locaux et équipements dans le respect du code général de la propriété des personnes publiques. » – (Adopté.)

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Section 2

Le Conseil supérieur des programmes

Article 15
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 21

Article 20

I. – (Non modifié)

II. – Après le chapitre Ier du titre III du livre II de la première partie du code de l’éducation, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

« Chapitre Ier bis

« Le Conseil supérieur des programmes

« Art. L. 231-14. – Le Conseil supérieur des programmes est placé auprès du ministre chargé de l’éducation nationale. Il travaille en toute indépendance.

« Il est composé, à parité de femmes et d’hommes, de dix-huit membres désignés pour cinq ans. Il comprend trois députés, trois sénateurs, désignés, respectivement, par les commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat, deux membres du Conseil économique, social et environnemental, désignés par son président, et dix personnalités qualifiées nommées par le ministre chargé de l’éducation nationale. Les membres du Conseil supérieur des programmes ne peuvent pas simultanément appartenir au Conseil national d’évaluation du système scolaire. Le décret prévu à l’article L. 231-17 précise la répartition par sexe des personnes désignées par chacune des instances et autorités compétentes.

« Art. L. 231-15. – Le Conseil supérieur des programmes émet des avis et formule des propositions sur :

« 1° La conception générale des enseignements dispensés aux élèves des écoles, des collèges et des lycées et l’introduction du numérique dans les méthodes pédagogiques et la construction des savoirs ;

« 2° Le contenu du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et des programmes scolaires, en veillant à leur cohérence et à leur articulation en cycles, ainsi que les modalités de validation de l’acquisition de ce socle ;

« 3° La nature et le contenu des épreuves des examens conduisant aux diplômes nationaux de l’enseignement du second degré et du baccalauréat, ainsi que les possibilités d’adaptation et d’aménagement de ces épreuves pour les élèves présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant ;

« 4° La nature et le contenu des épreuves des concours de recrutement d’enseignants du premier et du second degrés, les possibilités d’adaptation et d’aménagement de ces épreuves pour les candidats présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant, ainsi que les objectifs et la conception générale de la formation initiale et continue des enseignants.

« Art. L. 231-16. – Le Conseil supérieur des programmes remet chaque année aux ministres chargés de l’éducation nationale et de l’agriculture un rapport sur ses travaux et les suites qui leur ont été données. Ce rapport est transmis au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental. Les avis et propositions du Conseil supérieur des programmes sont rendus publics.

« Art. L. 231-17. – Un décret précise l’organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur des programmes. »

M. le président. L’amendement n° 28, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 6, deuxième phrase

Remplacer le mot :

dix

par le mot :

huit

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, je voudrais tout d’abord me faire le porte-parole d’un certain nombre de mes collègues, qui regrettent de n’avoir pas obtenu de réponse à la question, pourtant très simple, qui vous était posée.

M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’était franchement pas poli !

M. Jacques Legendre. Cela n’améliore pas la qualité de notre dialogue. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Legendre. J’en viens maintenant à un autre sujet. Avec cet amendement relatif à la composition du Conseil supérieur des programmes, dont a été soulignée, à juste titre, la nécessité de garantir l’indépendance, nous allons pouvoir vérifier si les propos que l’on tient quand on est minoritaire et les pratiques que l’on a quand on est majoritaire concordent.

La nomination des membres du Conseil supérieur des programmes assure une représentation bien moins équilibrée que celle de feu le Haut Conseil de l’éducation, que vous avez fait disparaître, monsieur le ministre. En effet, outre trois députés, trois sénateurs et deux membres du Conseil économique, social et environnemental – soit huit personnes –, les dix personnalités qualifiées qui le composent sont toutes nommées par le ministre de l’éducation nationale, c’est-à-dire par vous-même, monsieur le ministre.

Indiquer en début d’article que le Conseil supérieur des programmes « travaille en toute indépendance » tout en s’assurant une large majorité au sein de ce dernier semble, à tout le moins, contradictoire.

Que n’avons-nous entendu, en d’autres temps, sur des organismes chargés de s’occuper, par exemple, de l’audiovisuel ? Il semble que les propos tenus alors sont aujourd’hui oubliés.

La prédominance des personnalités choisies par le ministre était déjà rendue possible par le texte initial. Le Sénat ayant, dans sa sagesse, décidé que deux parlementaires supplémentaires seraient désignés chacun par son assemblée respective, ce qui réglait le problème, le Gouvernement a augmenté de deux personnalités extérieures supplémentaires la composition du Conseil supérieur des programmes, afin d’y conserver, à tout coût, une majorité.

La composition du Conseil supérieur des programmes est ainsi portée à dix-huit personnes, ce qui semble excessif et tend à renforcer encore l’emprise du Gouvernement sur cet organisme. N’oublions pas non plus que, en toute logique, la majorité des six parlementaires qui en seront membres seront issus de la majorité politique.

Afin de mieux garantir l’indépendance du Conseil supérieur des programmes, il faut respecter une parité entre les membres désignés par le Gouvernement et ceux qui ne le sont pas. Il est donc nécessaire de prévoir huit membres issus du Parlement et du Conseil économique, social et environnemental et huit personnalités qualifiées nommées par le ministre chargé de l’éducation nationale.

Monsieur le ministre, vous avez l’occasion de montrer votre volonté de respecter l’indépendance de l’organisme que vous avez créé. Nous apprécierions beaucoup de vous voir confirmer vos engagements dans les faits.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Sur ce sujet, qui a déjà été évoqué en première lecture, la commission émet une nouvelle fois un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Je reviendrai brièvement sur les propos de M. Lenoir.

Monsieur le sénateur, si je ne vous ai pas répondu, c’est d’abord parce que vous n’avez pas déposé d’amendement. C’est ensuite parce que, comme vous l’avez assez répété depuis six mois, je n’exerce aucune responsabilité au sein d’une collectivité territoriale. C’est enfin parce que l’on sait que l’article L. 212-15 du code de l’éducation prévoit depuis longtemps que les maires peuvent avoir recours aux locaux et équipements scolaires.

M. Jean-Claude Lenoir. C’est ce que je vous demandais de me dire !

M. Vincent Peillon, ministre. Cela n’a rien à voir avec notre débat ! Pour être de qualité, ce dernier doit être mené avec courtoisie !

M. Jean-Claude Lenoir. Elle est de mise de notre côté !

M. Vincent Peillon, ministre. Dès lors, monsieur le sénateur, restez dans le cadre des amendements que vous déposez et ne m’interpellez pas, comme vous l’avez fait, sur des dispositions qui figurent déjà dans le code et qui n’ont rien à voir avec notre discussion. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. On a le droit de poser des questions, tout de même ! C’est incroyable !

M. Vincent Peillon, ministre. J’en viens à l’amendement n° 28. Monsieur Legendre, je vous remercie de remarquer que le Conseil national des programmes ne comptait aucun parlementaire. En ce sens, le Conseil supérieur des programmes constitue un progrès. Je signale, en outre, que nous remettons en place un organisme qui avait été supprimé.

Vous devez accepter l’idée – et je suis sûr qu’elle ne vous heurte pas, monsieur le sénateur – qu’il nous faut trouver quelques praticiens et spécialistes des mathématiques et de la lecture pour composer le Conseil supérieur des programmes. Les équilibres trouvés permettent donc une indépendance plus grande que jamais. C’est également valable pour la représentation parlementaire en son sein.

Je propose que l’on en reste là. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. La courtoisie doit être aussi le fait des membres du Gouvernement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Chacun en est témoin : j’ai posé une question qui nous intéresse tous.

M. Daniel Raoul. Mais non, on connaît la réponse !

M. Jean-Claude Lenoir. Le ministre n’a pas voulu répondre tout de suite. Il a fini par le faire à la demande pressante de Jacques Legendre, en assortissant son propos de commentaires franchement déplacés. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Est-il encore possible d’interroger le Gouvernement dans cet hémicycle ?

Vous avez utilisé le mot « interpeller », monsieur le ministre. Ai-je eu des mots qui pouvaient vous blesser ? Est-ce qu’il faut dorénavant mettre des formes telles que vous ne vous sentiez pas agressé par la moindre question, fût-elle d’intérêt général ?

M. Jacques-Bernard Magner. On peut interpeller gentiment !

M. Jean-Claude Lenoir. Cela étant, je vous ai posé une question, monsieur le ministre, et nous avons réussi à avoir une réponse. Je tire une conclusion positive de cette séquence et me permets de vous dire, avec courtoisie, que je vous remercie de vos éclaircissements ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. David Assouline. Quelle intervention !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 20.

(L’article 20 est adopté.)

(M. Thierry Foucaud remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

vice-président

Section 3

Le Conseil national d’évaluation du système scolaire

Article 20
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Article 25

Article 21

I. – Après le chapitre Ier du titre IV du livre II de la première partie du code de l’éducation, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :

« Chapitre Ier bis

« Le Conseil national d’évaluation du système scolaire

« Art. L. 241-12. – Le Conseil national d’évaluation du système scolaire, placé auprès du ministre chargé de l’éducation nationale, est chargé d’évaluer en toute indépendance l’organisation et les résultats de l’enseignement scolaire. À ce titre :

« 1° À son initiative ou à la demande du ministre chargé de l’éducation nationale, du ministre chargé de l’enseignement agricole, d’autres ministres disposant de compétences en matière d’éducation, du ministre chargé de la ville ou des commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat, il réalise ou fait réaliser des évaluations ;

« 2° Il se prononce sur les méthodologies et les outils des évaluations conduites par le ministère chargé de l’éducation nationale ainsi que sur les résultats de ces évaluations ;

« 3° Il donne un avis sur les méthodologies, sur les outils et sur les résultats des évaluations des systèmes éducatifs conduites dans le cadre de programmes de coopération européens ou internationaux.

« Il formule toute recommandation utile au regard des résultats des évaluations mentionnées au présent article.

« Art. L. 241-13. – Le Conseil national d’évaluation du système scolaire est composé, à parité de femmes et d’hommes, de quatorze membres désignés pour six ans. Ses membres ne peuvent pas simultanément appartenir au Conseil supérieur des programmes. Il comprend :

« 1° Deux députés et deux sénateurs, désignés, respectivement, par les commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat ;

« 2° Deux membres du Conseil économique, social et environnemental, désignés par le président de ce conseil ;

« 3° Huit personnalités, choisies pour leur compétence en matière d’évaluation ou dans le domaine éducatif.

« Le décret prévu à l’article L. 241-15 précise la répartition par sexe des personnes désignées par chacune des instances et autorités compétentes.

« Art. L. 241-14. – Le Conseil national d’évaluation du système scolaire remet chaque année un rapport sur ses travaux aux ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement agricole. Il évalue notamment les politiques publiques mises en œuvre pour scolariser en milieu ordinaire les élèves présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. Ce rapport est transmis et présenté aux commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat ; il peut donner lieu à un débat en séance.

« Le rapport, les évaluations, les recommandations et les avis du conseil sont rendus publics.

« Art. L. 241-15. – Un décret précise les modalités d’application du présent chapitre. »

II. – L’article L. 401-1 du même code est ainsi modifié :

1° (Supprimé)

2° Au dernier alinéa, les mots : « Haut Conseil de l’éducation » sont remplacés par les mots : « Conseil national d’évaluation du système scolaire ».

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Il doit pouvoir recueillir la synthèse des évaluations pédagogiques réalisées dans les établissements du premier et du second degrés ;

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. L’article 21 crée le Conseil national d’évaluation du système scolaire, le CNE. Il définit les missions qui lui sont confiées ainsi que les modalités de sa saisine.

Selon nous, cette nouvelle instance d’évaluation doit avoir pour objet d’évaluer non seulement des outils, mais aussi des pratiques concrètes.

Son utilité réelle dépend donc de la capacité du ministère de l’éducation nationale à faire remonter vers lui les évaluations réalisées au sein même des établissements, notamment dans le premier degré, en fin de CE1 et en fin de CM1. C’est pourquoi cet amendement tend à prévoir que le CNE puisse recueillir ces évaluations.

Forts des remarques formulées en commission en première lecture, nous avons réécrit cet amendement de manière à ne pas encombrer le CNE avec toutes les évaluations pédagogiques, mais en lui permettant d’en recueillir uniquement la synthèse.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cette mission nous semble irréalisable : elle pourrait entraîner, à terme, la paralysie du CNE.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 29, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Après le mot :

désignés

insérer les mots :

à parité entre la majorité et l’opposition

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Le Conseil national d’évaluation du système scolaire comprendra deux députés et deux sénateurs désignés par les commissions compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat. Nous nous en réjouissons.

Nous pensons toutefois légitime que ces parlementaires soient désignés à parité entre la majorité et l’opposition. Nous avons déjà formulé cette demande, mais, jusqu’à présent, nous n’avons pas été entendus. On nous oppose la pratique parlementaire. Pour notre part, nous préférerons que cela soit inscrit dans le texte.

Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission s’est déjà prononcée sur ce point en première lecture et émet par conséquent un nouvel avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 29.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 30, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 11

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« … Trois représentants des collectivités territoriales :

« - un représentant de l’association des régions de France,

« - un représentant de l’association des départements de France,

« - un représentant de l’association des maires de France.

II. – En conséquence, alinéa 12

Remplacer le mot :

Huit

par le mot :

Cinq

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Je ne sais pas si le vote sur l’amendement précédent doit être compris comme un refus de voir des parlementaires issus de l’opposition devenir membres du CNE ou comme celui d’en inscrire le principe dans la loi. Décidément, il nous semble qu’il faut être prudents quand nous traitons de la question de la représentation au sein de cette instance !

La nomination des membres du Conseil national d’évaluation du système scolaire assure une représentation bien moins équilibrée que celle du Haut Conseil de l’éducation, que vous avez dissous, monsieur le ministre. En effet, outre deux députés, deux sénateurs et deux membres du Conseil économique, social et environnemental, les huit personnalités qualifiées qu’il comprend sont nommées par le ministre de l’éducation nationale.

Indiquer en début d’article que le Conseil national d’évaluation du système scolaire travaille « en toute indépendance » nous paraît une affirmation gratuite.

Qui plus est, l’éducation étant une priorité nationale, le Conseil national d’évaluation du système scolaire doit associer à ses travaux les représentants des collectivités territoriales. Parce qu’ils sont au plus proche du terrain, ces représentants pourront utilement l’assister dans son évaluation des résultats des réformes sur l’ensemble du territoire.

M. Charles Revet. Très bien ! Bonne idée !

M. Jacques Legendre. C’est pourquoi nous demandons qu’y figurent un représentant de l’Association des régions de France, un représentant de l’Assemblée des départements de France et un représentant de l’Association des maires de France, ce qui a pour conséquence de faire passer le nombre de personnalités qualifiées de huit à cinq.

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 12

1° Remplacer le mot :

Huit

par le mot :

Dix

2° Compléter cet alinéa par les mots :

, dont trois d’entre elles représentent les différents niveaux de collectivités territoriales

II. - En conséquence, alinéa 9

Remplacer le mot :

quatorze

par le mot :

seize

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. L’article 21 crée le Conseil national d’évaluation du système scolaire, définit les missions qui lui sont confiées et les modalités de sa saisine, ainsi que sa composition.

Nous avons constaté que les élus sont particulièrement absents de ce projet de loi. Or, étant donné l’importance qu’elles ont dans l’organisation de l’école et des temps scolaires, nous souhaitons que les collectivités territoriales soient mieux représentées au sein du Conseil national d’évaluation du système scolaire.

Certes, deux députés et deux sénateurs en sont membres. Dans quelques mois, pourtant, avec le non-cumul des mandats, ces parlementaires ne seront plus des élus locaux.

C’est pourquoi nous avons déposé un amendement tendant à imposer la présence de représentants des collectivités territoriales au sein du CNE. Chaque échelon de collectivités est impliqué dans le système éducatif, tant sur le fonctionnement des établissements que dans l’organisation de la vie scolaire. Leur avis est donc nécessaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements en discussion commune.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Le Conseil national d’évaluation du système scolaire permettra la mise en place d’une évaluation de niveau universitaire, qui nous a manqué pendant des années et qui existe déjà dans d’autres pays.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le verrez dans le décret d’application, un conseil consultatif permettra aux associations d’usagers, aux parents et, bien entendu, aux collectivités territoriales d’être adossés au CNE. Tous ces acteurs pourront ainsi avoir des échanges avec lui et bénéficier de ses travaux.

Pour le reste, si nous voulons une grande intégrité des travaux scientifiques, le mieux est de laisser aux scientifiques une place prépondérante au sein du CNE, aux côtés des parlementaires.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 30.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 21.

(L’article 21 est adopté.)

Chapitre III

Le contenu des enseignements scolaires

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Section 1

Dispositions communes

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Article 21
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Article 27

Article 25

L’article L. 311-3-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Les mots : « propose aux parents ou au responsable légal de l’élève de mettre conjointement en place un » sont remplacés par les mots : « met en place, dans des conditions fixées par le ministre chargé de l’éducation nationale, des dispositifs d’aide qui peuvent prendre la forme d’un » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Le directeur d’école ou le chef d’établissement associe les parents ou le responsable légal de l’élève à la mise en place de ce dispositif. » – (Adopté.)

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Section 2

La formation à l’utilisation des outils numériques

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Section 3

L’enseignement des langues vivantes étrangères et régionales

Article 25
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 31

Article 27

I. – La section 3 ter du chapitre II du titre Ier du livre III de la deuxième partie du code de l’éducation est ainsi rétablie :

« Section 3 ter

« L’enseignement des langues vivantes étrangères

« Art. L. 312-9-2. – Tout élève bénéficie, dès le début de sa scolarité obligatoire, de l’enseignement d’une langue vivante étrangère. 

« Dans chaque académie, peut être favorisé l’apprentissage des langues étrangères parlées dans les pays avec lesquels des accords de coopération régionale sont en vigueur.

« Une continuité des apprentissages de langues vivantes étrangères doit être assurée entre le primaire et le collège.

« Outre les enseignements de langues qui leur sont dispensés, les élèves peuvent bénéficier d’une initiation à la diversité linguistique. Les langues parlées au sein des familles peuvent être utilisées à cette fin. »

II. – (Non modifié)

M. le président. L’amendement n° 43 rectifié ter, présenté par M. Gilles, Mme Cayeux et MM. Cointat, Fouché, Cardoux et Revet, est ainsi libellé :

Alinéa 4

I. - Remplacer le mot :

enseignement

par le mot :

apprentissage 

II. - Compléter cet alinéa par les mots :

, en favorisant notamment l’apprentissage oral avec un locuteur dont la langue proposée est la langue maternelle

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. L’enseignement des langues étrangères est catastrophique en France. La méthode d’apprentissage est inefficace puisque les élèves, après des années de l’enseignement proposé, essentiellement livresque, sont incapables de comprendre leurs interlocuteurs étrangers et de formuler des phrases correctes.

M. Charles Revet. C’est vrai !

M. Bruno Gilles. Dans l’Europe en construction, il semble que des échanges linguistiques entre locuteurs des diverses langues de l’Union européenne constituent un projet indispensable et prioritaire pour favoriser un bon apprentissage de langues étrangères. Ces échanges amélioreront la pratique des langues en tant que matières vivantes par l’acquisition de leur expression actuelle et de leur prononciation, qui favoriseront la bonne compréhension et la bonne utilisation des langues étrangères par les élèves.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous considérons que l’enseignement des langues doit être assuré par des enseignants bien formés. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

par des personnels spécifiquement formés pour cela

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. L’ambition du texte du Gouvernement est la « refondation » de l’école. Pourtant, monsieur le ministre, une réelle refondation aurait notamment nécessité une réflexion sur la formation continue des enseignants, qui n’existe pas en pratique aujourd'hui.

Une telle exigence est encore plus importante lorsqu’il s’agit d’enseigner une langue étrangère à des élèves. Si l’on ne peut pas avoir des locuteurs natifs dans chaque classe, une maîtrise élémentaire de la phonétique et de la grammaire, un vocabulaire nourri et l’acquisition des méthodes pédagogiques doivent être exigés des personnels enseignant une langue vivante.

C’est l’objet de cet amendement. Il s’agit de s’assurer que les personnels de l’éducation nationale dispensant l’enseignement d’une langue vivante étrangère auront bien été formés pour cela et maîtriseront la discipline. C’est la condition sine qua non pour que les élèves aient toutes les chances de maîtriser des langues vivantes.

L’enjeu de la formation des enseignants et, de ce fait, de l’apprentissage de leurs élèves est majeur, tant pour leur insertion professionnelle dans un monde globalisé que pour favoriser l’émergence d’une identité européenne, portée par une nouvelle génération polyglotte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je suis un peu étonnée, madame Férat. Après avoir voté en faveur de l’amendement précédent, qui faisait la part belle aux locuteurs, vous nous proposez un amendement qui va en sens exactement contraire…

Je pense que le point d’équilibre se situe entre les deux : nous avons besoin d’enseignants doués et informés, ainsi que de locuteurs susceptibles d’intervenir ponctuellement.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 27.

(L'article 27 est adopté.)

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Section 4

L’enseignement moral et civique

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Section 5

L’enseignement du premier degré

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Article 27
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Article 32 A

Article 31

L’article L. 321-3 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « primaire » est supprimé et la référence : « L. 321-1 » est remplacée par la référence : « L. 311-1 » ;

2° Le second alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « ou » est remplacé par le mot : « et » et, après le mot : « calcul », sont insérés les mots : « et résolution de problèmes » ;

b) Les deux dernières phrases sont remplacées par sept phrases ainsi rédigées :

« Elle dispense les éléments d’une culture historique, géographique, scientifique et technique. Elle offre une éducation aux arts visuels et aux arts musicaux. Elle assure l’enseignement d’une langue vivante étrangère et elle peut comporter une initiation à la diversité linguistique. Elle contribue également à la compréhension et à un usage autonome et responsable des médias, notamment numériques. Elle assure l’acquisition et la compréhension de l’exigence du respect de la personne, de ses origines et de ses différences. Elle transmet également l’exigence du respect des droits de l’enfant et de l’égalité entre les femmes et les hommes. Elle assure conjointement avec la famille l’éducation morale et civique, qui comprend, pour permettre l’exercice de la citoyenneté, l’apprentissage des valeurs et symboles de la République et de l’Union européenne, notamment de l’hymne national et de son histoire. »

M. le président. L'amendement n° 44 rectifié bis, présenté par MM. Gilles, Cardoux et Revet, est ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Supprimer les mots :

scientifique et technique

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Cet article redéfinit les missions de l’école élémentaire. Or, il apparaît compte tenu du jeune âge des élèves que les éléments d’une culture scientifique et technique ne sont pas appropriés. Il faut plutôt privilégier l’histoire, notamment la chronologie historique, et la géographie qui constituent un manque dommageable dans ces classes.

Aussi, mettre l’accent sur ces éléments est important. Il sera toujours temps plus tard de diversifier leur éducation par une initiation aux découvertes scientifiques et techniques.

En classes élémentaires, il est parfois difficile de parler de culture. C’est à partir de bases solides de l’éducation reçue à l’école, que les écoliers se forgeront une culture, dans les années qui suivront.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Supprimer l’enseignement des sciences à l’école primaire serait pour nous une terrible régression. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Je trouve Mme la rapporteur très raisonnable. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 45 rectifié bis, présenté par M. Gilles, Mme Cayeux et MM. Cointat, Fouché, Cardoux et Revet, est ainsi libellé :

Alinéa 6, troisième phrase

Remplacer les mots :

et elle

par les mots :

en favorisant l’expression orale avec des locuteurs dont cette langue est la langue maternelle. Elle

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 46 rectifié bis, présenté par MM. Gilles, Cardoux et Revet, est ainsi libellé :

Alinéa 6, dernière phrase

Supprimer les mots :

et de l’Union européenne

La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Dans la ligne droite d’un de mes amendements précédents, l’instruction morale et civique doit se fonder d’abord sur les valeurs de la République qui constituent le fondement de l’identité française, avant de passer à l’instruction morale et civique de l’Union européenne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 31.

(L'article 31 est adopté.)

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Section 6

Les enseignements du collège

Article 31
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Article 32 B

Article 32 A

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 331-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 331-7. – L’orientation et les formations proposées aux élèves tiennent compte du développement de leurs aspirations et de leurs aptitudes et des perspectives professionnelles liées aux besoins prévisibles de la société, de l’économie et de l’aménagement du territoire. Elles favorisent la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les filières de formation.

« Afin d’élaborer son projet d’orientation scolaire et professionnelle et d’éclairer ses choix d’orientation, un parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel est proposé à chaque élève, aux différentes étapes de sa scolarité du second degré.

« Il est défini, sous la responsabilité du chef d’établissement et avec l’élève, ses parents ou son responsable légal, par les conseillers d’orientation-psychologues, les enseignants et les autres professionnels compétents. Les administrations concernées, les collectivités territoriales, les organisations professionnelles, les entreprises et les associations contribuent à la mise en œuvre de ce parcours. » ;

2° Les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 313-1 sont supprimés.

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 3, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. La rédaction de cet article laisse entendre que l’orientation sera un outil permettant d’assurer l’égale représentation des hommes et des femmes dans les filières de formation.

Certes, et nous en sommes tout à fait d'accord, il faut lutter contre les idées qui lieraient un métier et un genre. Mais il nous paraît à tout le moins surprenant de retenir une approche statistique. Comment avoir l’assurance que l’objectif de garantir la parité des présents n’aboutira pas à des autolimitations dans certaines filières, ce qui serait tout de même peu raisonnable ?

Nous proposons donc de supprimer la seconde phrase de l’alinéa 3.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 32 A.

(L'article 32 A est adopté.)

Article 32 A
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Article 42

Article 32 B

À titre expérimental, pour une durée maximale de trois ans, dans des académies et des conditions déterminées par le ministre chargé de l’éducation nationale, la procédure d’orientation prévue à l’article L. 331-8 du code de l’éducation peut être modifiée afin que, après avoir fait l’objet d’une proposition du conseil de classe et au terme d’une concertation approfondie avec l’équipe éducative, la décision d’orientation revienne aux responsables légaux de l’élève ou à celui-ci lorsqu’il est majeur. Cette expérimentation fait l’objet d’un rapport d’évaluation transmis aux commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat. – (Adopté.)

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Section 7

Le baccalauréat

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Section 8

La formation en alternance

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Chapitre IV

Dispositions relatives aux écoles et établissements d’enseignement scolaire

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Section 1

Les relations entre l’école et le collège

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Section 2

Les écoles

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Section 3

Les établissements publics locaux d’enseignement

Article 32 B
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Article 44 bis

Article 42

Le dernier alinéa de l’article L. 421-2 du code de l’éducation est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Les représentants des collectivités territoriales sont au nombre de trois ou de quatre, selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt-quatre ou de trente membres.

« Lorsque les représentants des collectivités territoriales sont au nombre de trois, ils comprennent deux représentants de la collectivité de rattachement et un représentant de la commune siège de l’établissement et, lorsqu’il existe un établissement public de coopération intercommunale, un représentant de cet établissement public siège sans voix délibérative.

« Lorsque les représentants des collectivités territoriales sont au nombre de quatre, ils comprennent deux représentants de la collectivité de rattachement et deux représentants de la commune siège de l’établissement ou, lorsqu’il existe un établissement public de coopération intercommunale, deux représentants de la collectivité de rattachement, un représentant de cet établissement public de coopération intercommunale et un représentant de la commune siège.

« Lorsque les représentants d’une même collectivité territoriale sont au nombre de deux, l’un d’entre eux peut ne pas être membre de l’assemblée délibérante.

« Toutefois, lorsque, en application du b du 2 du II ou du a du 2 du III de l’article L. 5217-4 du code général des collectivités territoriales, les compétences d’une région ou d’un département en matière de construction, d’aménagement, d’entretien et de fonctionnement des lycées ou des collèges sont exercées par une métropole, un représentant de la métropole siège au conseil d’administration des établissements publics locaux d’enseignement concernés en lieu et place de l’un des représentants de la collectivité territoriale de rattachement. » – (Adopté.)

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Section 4

Les groupements d’établissements

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Article 42
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Article 45 bis

Article 44 bis

Le Gouvernement remet un rapport évaluant l’impact des dispositions tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d’association lorsqu’elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, introduites dans la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Ce rapport est remis aux commissions permanentes compétentes du Sénat et de l’Assemblée nationale avant le 31 décembre 2014. – (Adopté.)

Section 5

Dispositions applicables aux établissements d’enseignement privés sous contrat

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Section 6

Architecture scolaire

Article 44 bis
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Article 47

Article 45 bis

L’article L. 521-4 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Après le mot : « pédagogie », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « , contribue à la transmission des connaissances et à la découverte des cultures et favorise le développement de l’autonomie et de la sensibilité artistique des élèves. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Il est prévu, dans tous les établissements d’enseignement, un espace à l’usage des parents d’élèves et de leurs délégués. » – (Adopté.)

Chapitre V

Les activités périscolaires

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Article 45 bis
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Article 51

Article 47

Il est institué, pour les années scolaires 2013-2014 et 2014-2015, un fonds en faveur des communes et, lorsque les dépenses de fonctionnement des écoles leur ont été transférées, des établissements publics de coopération intercommunale, afin de contribuer au développement d’une offre d’activités périscolaires au bénéfice des élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ou privées sous contrat dont les enseignements sont répartis sur neuf demi-journées par semaine.

Les aides apportées par le fonds sont calculées en fonction du nombre d’élèves éligibles scolarisés dans la commune et comportent :

1° Un montant forfaitaire par élève, versé aux communes dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à la rentrée scolaire 2013-2014. Le versement de ce montant forfaitaire ne peut être renouvelé au titre de l’année 2014-2015 ;

2° Une majoration forfaitaire par élève, réservée aux communes mentionnées aux articles L. 2334-18-4 et L. 2334-22-1 du code général des collectivités territoriales ainsi qu’aux communes des départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficiant de la quote-part de la dotation d’aménagement prévue au quatrième alinéa de l’article L. 2334-13 du même code et à la collectivité de Saint-Martin. Pour les communes dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à la rentrée scolaire 2013-2014, le versement de cette majoration forfaitaire est reconduit au titre de l’année 2014-2015. Les communes dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à compter de la rentrée 2014-2015 bénéficient de la majoration au titre de cette année.

Les communes qui ont transféré la compétence en matière de dépenses de fonctionnement des écoles à un établissement public de coopération intercommunale reversent à cet établissement les aides qu’elles ont perçues au titre des 1° et 2°.

Les aides sont versées aux communes, à charge pour ces dernières de reverser, le cas échéant, la part calculée au titre des élèves scolarisés dans les écoles privées sous contrat aux organismes de gestion de ces écoles privées. Toutefois, lorsque la commune le demande aux autorités académiques, cette part est versée directement aux organismes de gestion de ces écoles.

Les aides versées au titre du présent fonds pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ne sont pas prises en compte dans le calcul des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat mentionnées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 442-5 du code de l’éducation.

La gestion du fonds est confiée, pour le compte de l’État, à l’Agence de services et de paiement.

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

M. le président. L'amendement n° 5, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les sommes non utilisées par le fonds en faveur des communes pour l'année scolaire 2013-1014 sont conservées en vue de leur utilisation pour l'année scolaire 2014-2015.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Avec l’article 47, nous abordons la réforme des rythmes scolaires et son financement, sujet que nous avons déjà évoqué.

Cet amendement vise à reporter les sommes du fonds d’aide aux communes pour l’année scolaire 2014-2015, afin de les accompagner au mieux dans cette réforme, dont les conséquences en termes d’organisation et de financement sont lourdes.

La réforme des rythmes scolaires hebdomadaires ne sera appliquée que pour 20 % à 25 % des élèves à la rentrée 2013. Le nombre des communes ayant choisi la semaine de quatre jours et demi pour la prochaine rentrée est nettement inférieur aux prévisions annoncées par le ministre de l’éducation nationale. En conséquence, les sommes prévues par le ministère pour alimenter le fonds en faveur des communes pour l’année scolaire 2013-2014 ne seront pas totalement épuisées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous l’expliquer, ma chère collègue, vous faites une confusion : il s’agit non pas d’un fonds, mais d’une aide. Je vous suggère donc de retirer cet amendement.

Mme Françoise Férat. Je le maintiens !

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Dans ce cas, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Je voterai en faveur de cet amendement.

Il me paraît normal d’aider les communes dans la difficile mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires. Au demeurant, sur ce sujet, nous en apprenons chaque jour davantage et nous venons de découvrir que la réforme coûterait finalement plus cher que prévu, le projet de décret du Gouvernement visant à assouplir le taux d’encadrement des activités périscolaires étant sur le point d’être retoqué. D’ailleurs, les associations d’élus avaient dès l’origine souligné que le Gouvernement sous-estimait le coût de la réforme. (M. Jean-Claude Lenoir acquiesce.)

Aujourd'hui, les dotations aux collectivités locales diminuent. Je vous rappelle que, pour la première fois de notre histoire, les dotations aux communes baisseront l’année prochaine. Nos collègues de l’actuelle majorité, qui hurlaient quand on gelait les dotations, trouvent à présent parfaitement normal qu’on les réduise… Et, dans le même temps, les charges augmentent. Je puis vous assurer que, sur le terrain, c’est de plus en plus difficile !

Si vous veniez un peu plus souvent sur le terrain, vous verriez à quel point la réforme des rythmes scolaires préoccupe l’ensemble de nos collègues. (M. Charles Revet s’exclame.) Dans mon département, je ne peux pas faire une réunion ou rencontrer un maire sans qu’on m’en parle.

Non seulement la réforme est très coûteuse – c’est pourquoi Mme Férat et les membres de mon groupe demandons que les maigres crédits alloués puissent au moins être utilisés l’année prochaine –, mais, en plus, elle a été décidée sans aucune concertation, qu’il s’agisse des associations d’élus ou des enseignants. Et voilà comment une mesure, qui pourrait sembler positive sur le fond, fait aujourd'hui l’unanimité contre elle ! La vieille méthode de l’État jacobin – « Je décide et les collectivités paieront ! » – fonctionnait peut-être lorsque les dotations augmentaient, mais ce n’est plus viable aujourd'hui.

D’ailleurs, je prends les paris : les collectivités locales qui ont décidé le report de la réforme, c'est-à-dire 80 % des communes, ne pourront pas la mettre en œuvre en 2014. En effet, il n’y a pas que la question du coût ; il faut aussi songer aux difficultés de recrutement de personnels d’encadrement ou d’obtention de locaux. Je pense que le Gouvernement sera obligé de revoir son dispositif en 2014.

Dans ces conditions, et j’en reviens à l’objet de cet amendement, pouvoir utiliser l’année prochaine les maigres crédits prévus pour cette année est, à mon avis, la moindre des choses ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Nous partageons le diagnostic de nos collègues centristes et nous en tirons les mêmes conclusions.

D’ailleurs, l’amendement que j’ai déposé sur l’article 47 vise à demander à l’État d’adresser un rapport au Parlement pour tirer les conséquences de la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires sur les collectivités territoriales et mesurer le niveau de consommation du fonds d’aide. Cela nous paraît tout de même un minimum !

Monsieur le ministre, je souhaite formuler une observation sur les deuxièmes lectures. Vous avez eu la bonne idée de ne pas recourir aux facilités de la procédure accélérée. Mais, dans ce cas, n’ayez pas, vous et votre majorité, l’obsession du vote conforme ! Acceptez que le Sénat puisse adopter quelques amendements ou voter certains articles avec des modifications ! Comme cela a été rappelé tout à l’heure, des sénateurs ont été désignés pour représenter la Haute Assemblée au sein d’une éventuelle commission mixte paritaire ; si certaines dispositions du texte sont toujours en discussion à l’issue de ce débat, ce ne sera pas une catastrophe !

Une telle demande nous semble parfaitement justifiée. J’espère que vous y ferez droit, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 6 est présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° 32 rectifié est présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L’État remet un rapport au Parlement en fin d’année scolaire 2013-2014, puis en fin d’année scolaire 2014-2015 sur l’impact de la réforme des rythmes scolaires sur les collectivités territoriales, précisant notamment le niveau de consommation des crédits du fonds d’aide prévu au présent article, le coût de la réforme pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale compétents, notamment pour les activités périscolaires induites ainsi que les difficultés constatées en termes d’organisation et de financement du nouveau temps périscolaire.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement n° 6.

Mme Françoise Férat. Avec cet amendement, nous voulons dénoncer encore une fois la précipitation avec laquelle la réforme des rythmes scolaires a été imposée aux enfants, à leur famille, aux enseignants et aux élus locaux.

L’alinéa supplémentaire que nous proposons d’insérer dans le texte prévoit que l’État adressera un rapport au Parlement pour tirer les conséquences de la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires sur les collectivités territoriales et mesurer le niveau de consommation du fonds d’aide prévu à l’article 47.

Il faudra être capable de mesurer très rapidement les effets d’une telle réforme, avant sa généralisation, ne serait-ce que pour propager les bonnes pratiques auprès des communes ayant fait le choix du report.

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour présenter l'amendement n° 32 rectifié.

M. Jacques Legendre. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Legendre, si nous émettons des avis défavorables, c’est tout simplement parce que vous proposez les mêmes amendements qu’en première lecture !

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Et nous n’avons, hélas pour vous ! pas changé d’avis…

M. Jean-Claude Lenoir. C’est dommage !

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous maintenons nos positions de fond sur un certain nombre de sujets.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Je veux dire à notre excellente collègue Mme Cartron que la pédagogie est l’art de la répétition ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 32 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 47.

(L'article 47 est adopté.)

Chapitre VI

Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation

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Article 47
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 52 ter

Article 51

I. – (Non modifié)

II. – Le chapitre Ier du titre II du livre VII de la troisième partie du code de l’éducation est ainsi rédigé :

« Chapitre Ier

« Missions et organisation des écoles supérieures du professorat et de l’éducation

« Art. L. 721-1. – Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation sont constituées soit au sein d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, soit au sein d’un établissement public de coopération scientifique.

« Ces écoles sont créées sur proposition du conseil d’administration de l’établissement public et accréditées par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale, après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche.

« L’école est accréditée pour la durée du contrat pluriannuel liant l’État à l’établissement public.

« L’accréditation est renouvelée pour la même durée, après une évaluation nationale, par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale, après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche.

« L’accréditation de l’école emporte l’habilitation de l’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ou de l’établissement public de coopération scientifique ou des établissements publics d’enseignement supérieur partenaires, mentionnés à l’article L. 721-2, à délivrer le diplôme national de master dans les domaines des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation.

« Les modalités d’accréditation sont définies par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale.

« Art. L. 721-2. – Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation exercent les missions suivantes :

« 1° Elles organisent et, avec les composantes, établissements et autres partenaires mentionnés à la première phrase du dernier alinéa du présent article, assurent les actions de formation initiale des étudiants se destinant aux métiers du professorat et de l’éducation et des personnels enseignants et d’éducation stagiaires, dans le cadre des orientations définies par l’État. Ces actions comportent des enseignements communs permettant l’acquisition d’une culture professionnelle partagée et des enseignements spécifiques en fonction des métiers, des disciplines et des niveaux d’enseignement. Elles fournissent des enseignements disciplinaires et didactiques mais aussi en pédagogie et en sciences de l’éducation. Les écoles organisent des formations de préparation aux concours de recrutement dans les métiers du professorat et de l’éducation ;

« 2° Elles organisent des actions de formation continue des personnels enseignants du premier et du second degrés et des personnels d’éducation ;

« 3° Elles participent à la formation initiale et continue des personnels enseignants-chercheurs et enseignants de l’enseignement supérieur ;

« 3° bis et 3° ter (Supprimés)

« 4° Elles peuvent conduire des actions de formation aux autres métiers de la formation et de l’éducation ;

« 5° Elles participent à la recherche disciplinaire et pédagogique ;

« 6° Elles participent à des actions de coopération internationale.

« Dans le cadre de leurs missions, elles assurent le développement et la promotion de méthodes pédagogiques innovantes. Elles prennent en compte, pour délivrer leurs enseignements, les technologies de l’information et de la communication et forment les étudiants et les enseignants à l’usage pédagogique des outils et ressources numériques.

« Elles préparent les futurs enseignants et personnels d’éducation aux enjeux du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et à ceux de la formation tout au long de la vie. Elles organisent des formations de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la lutte contre les discriminations, à la scolarisation des élèves en situation de handicap, ainsi que des formations à la prévention et à la résolution non violente des conflits. Elles préparent les enseignants aux enjeux de l’entrée dans les apprentissages et à la prise en compte de la difficulté scolaire dans le contenu des enseignements et la démarche d’apprentissage.

« Elles assurent leurs missions avec les autres composantes de l’établissement public, les établissements publics d’enseignement supérieur partenaires et d’autres organismes, les services académiques et les établissements scolaires, le cas échéant dans le cadre de conventions conclues avec eux. Leurs équipes pédagogiques intègrent des professionnels intervenant dans le milieu scolaire, comprenant notamment des personnels enseignants, d’inspection et de direction en exercice dans le premier et le second degrés, ainsi que des acteurs de l’éducation populaire, de l’éducation culturelle et artistique et de l’éducation à la citoyenneté.

« Art. L. 721-3. – I. – Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation sont administrées, à parité de femmes et d’hommes, par un conseil de l’école et dirigées par un directeur. Elles comprennent également un conseil d’orientation scientifique et pédagogique.

« Les membres du conseil de l’école et du conseil d’orientation scientifique et pédagogique sont désignés, à parité de femmes et d’hommes, pour un mandat de cinq ans, à l’exception des représentants des usagers qui sont désignés, à parité de femmes et d’hommes, pour une durée moindre fixée par décret. Ce décret fixe les règles relatives à la composition et au fonctionnement de ces conseils, dont les modalités de représentation des personnels, des personnes participant à des actions de formation organisées par l’école ainsi que de celles qui en bénéficient.

« Le conseil de l’école, dont l’effectif ne peut dépasser trente membres, comprend des représentants des enseignants, qui sont en nombre au moins égal à celui des représentants des autres personnels et des usagers, un ou plusieurs représentants de l’établissement public mentionné au premier alinéa de l’article L. 721-1 et au moins 30 % de personnalités extérieures, dont au moins un représentant des collectivités territoriales. Au moins la moitié des représentants des enseignants sont des représentants des enseignants-chercheurs ; le recteur de l’académie désigne une partie des personnalités extérieures.

« Le président du conseil est élu parmi les personnalités extérieures désignées par le recteur.

« Le directeur de l’école est nommé pour un mandat de cinq ans par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale, sur proposition du conseil de l’école.

« II. – Le conseil de l’école adopte les règles relatives aux examens et les modalités de contrôle des connaissances. Il adopte le budget de l’école et approuve les contrats pour les affaires intéressant l’école. Il soumet au conseil d’administration de l’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ou de l’établissement public de coopération scientifique la répartition des emplois. Il est consulté sur les recrutements de l’école.

« III. – Le directeur de l’école prépare les délibérations du conseil de l’école et en assure l’exécution. Il a autorité sur l’ensemble des personnels.

« Il a qualité pour signer, au nom de l’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ou de l’établissement public de coopération scientifique, les conventions relatives à l’organisation des enseignements. Ces conventions ne peuvent être exécutées qu’après avoir été approuvées par le président de l’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ou de l’établissement public de coopération scientifique et votées par le conseil d’administration de l’établissement public.

« Le directeur de l’école prépare un document d’orientation politique et budgétaire. Ce rapport est présenté aux instances délibératives des établissements publics d’enseignement supérieur partenaires de l’école supérieure du professorat et de l’éducation au cours du troisième trimestre de l’année civile.

« Le directeur propose une liste de membres des jurys d’examen au président de l’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ou de l’établissement public de coopération scientifique pour les formations soumises à examen dispensées dans l’école supérieure du professorat et de l’éducation et, le cas échéant, aux présidents des établissements partenaires mentionnés à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 721-1.

« IV. – Le conseil d’orientation scientifique et pédagogique contribue à la réflexion sur les grandes orientations relatives à la politique partenariale et aux activités de formation et de recherche de l’école.

« V. – Chaque école supérieure du professorat et de l’éducation dispose, pour tenir compte des exigences de son développement, d’un budget propre intégré au budget de l’établissement public dont elle fait partie. Les ministres compétents peuvent lui affecter directement des crédits et des emplois attribués à l’établissement public. Le directeur de l’école supérieure du professorat et de l’éducation est ordonnateur des recettes et des dépenses. Le budget de l’école est approuvé par le conseil d’administration de l’établissement public, qui peut l’arrêter lorsqu’il n’est pas adopté par le conseil de l’école ou n’est pas voté en équilibre réel. »

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Elles organisent des actions de sensibilisation et de formation permettant aux enseignants d’améliorer leurs connaissances du monde économique et professionnel, du marché du travail, des professions et des métiers, du rôle et du fonctionnement, des entreprises ainsi que des modalités et des perspectives d’insertion professionnelle et ainsi les préparer à exercer leur mission d’orientation auprès des élèves ;

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Cet amendement tend à sensibiliser les enseignants au monde économique et professionnel dans le cadre de leur mission d’orientation.

En effet, le projet d’orientation scolaire et professionnelle de l’élève doit permettre à ce dernier de découvrir progressivement – c’est le parcours dont vous nous parliez, monsieur le ministre – le monde économique et professionnel, notamment par une première connaissance du marché du travail, des professions et des métiers, du rôle et du fonctionnement des entreprises, ainsi que des modalités et des perspectives d’insertion professionnelle.

Il est donc indispensable que les enseignants qui interviennent dans le processus d’orientation soient préparés, dès leur formation initiale, à cette mission d’orientation et bénéficient eux-mêmes d’actions de sensibilisation et de formation dans ce domaine.

Pour que les enseignants préparent bien leurs élèves au monde extérieur, ils doivent rencontrer celui-ci dans sa diversité. Telle est la philosophie de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je partage cette philosophie, monsieur Legendre.

Néanmoins, la précision que vous souhaitez introduire dans le texte relève du cahier des charges, donc de l’accréditation des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, et non de la loi.

M. Charles Revet. C’est tout de même mieux de l’inscrire dans la loi ! C’est un très bon amendement !

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 21

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elles permettent également une sensibilisation des futurs enseignants et personnels d'éducation aux différentes sphères du monde professionnel.

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. L’article 51 crée les écoles supérieures du professorat et de l’éducation. Elles auront pour mission de former les futurs professeurs. Nous souhaitons que, au-delà de la matière enseignée et de la pédagogie utilisée, les enseignants soient des vecteurs d’intégration pour l’élève dans la société, ainsi que dans leur futur travail.

Pour nous, les futurs enseignants et personnels d’éducation représentent pour les élèves leur premier contact avec le monde professionnel. Il est donc important que les enseignants et personnels soient sensibilisés aux différentes sphères du monde professionnel, notamment au monde de l’entreprise. Au-delà de leurs enseignements, ils peuvent être amenés à parler d’orientation avec les élèves ; ils ont également pour mission de leur fournir des méthodes de travail qui seront utiles dans leur vie professionnelle à venir.

Les futures écoles supérieures du professorat et de l’éducation doivent assurer cette sensibilisation. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Comme sur l’amendement précédent, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 35, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 24, première phrase

Remplacer les mots :

un représentant

par les mots :

trois représentants

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. Dans la rédaction actuelle du projet de loi, le conseil d'école pourrait ne comprendre qu'un représentant des collectivités territoriales. Cette représentation est bien faible au regard de l'importance du rôle joué par ces dernières.

Par ailleurs, il faut pouvoir assurer au moins la représentation de la commune, du département et de la région pour que les collectivités se sentent véritablement concernées par cette école supérieure du professorat et de l’éducation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Le projet de loi prévoit « au moins un représentant des collectivités territoriales ». Rien n’interdit aux ESPE de faire mieux !

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. Jacques Legendre. Si vous acceptez de recommander la présence de trois représentants, je suis prêt à retirer mon amendement !

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous préférons laisser la liberté aux ESPE, monsieur Legendre !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 24, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et un représentant du monde professionnel

La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Cet amendement s’inscrit dans le même esprit que mon amendement précédent sur la formation des enseignants. Il tend à permettre à des représentants du monde professionnel, notamment des chefs d’entreprise et des artisans, de siéger au sein des instances de direction des écoles supérieures du professorat et de l’éducation afin d’éclairer les enseignants sur les réalités du marché du travail.

Nous ne souhaitons pas mettre l’entreprise partout, mais nous espérons qu’une meilleure imbrication de deux mondes qui s’ignorent parfois pourra favoriser une plus grande compréhension mutuelle. Cette dernière bénéficiera aux élèves et, surtout, à leur avenir professionnel.

Les enseignants doivent notamment avoir une connaissance de l’entreprise pour transmettre au mieux les réalités du monde économique aux élèves qui leur sont confiés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 34, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 24, seconde phrase

Supprimer les mots :

Au moins la moitié des représentants des enseignants sont des représentants des enseignants chercheurs ;

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. L’article 51 prévoit que les représentants des enseignants au sein des conseils d’école sont au moins pour moitié des représentants des enseignants-chercheurs. Voilà qui est pour le moins étonnant. Il serait donc bon de supprimer cette disposition.

Mme la rapporteur a insisté à l’instant sur la nécessité de laisser aux ESPE la liberté d’organiser leur conseil d’administration. À ce titre, elle a refusé de leur imposer éventuellement trois représentants des collectivités territoriales. Pourtant, ici, la commission ne s’oppose pas à ce qu’il y ait un verrou.

Nous pensons qu’il faut éviter les règles trop strictes ; c’était aussi votre avis précédemment. Cet amendement vise donc à introduire plus de souplesse dans la composition du conseil de l’école.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous avons voulu rapprocher la composition du conseil de l’ESPE de ce qui est prévu pour les IUT, qui font aussi partie des universités.

Dans un souci de similitude de composition, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 51.

(L'article 51 est adopté.)

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Article 51
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Article 54 bis A

Article 52 ter

L’article L. 912-1-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° (Supprimé)

2° Au début, sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

« Chaque enseignant est encouragé à se former régulièrement. Une offre de formation continue adaptée aux besoins des personnels d’enseignement est proposée, notamment par le biais des écoles supérieures du professorat et de l’éducation. » – (Adopté.)

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Article 52 ter
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Article 61

Article 54 bis A

I. – (Non modifié)

II. – (Supprimé)

M. le président. Je mets aux voix l’article 54 bis A.

(L’article 54 bis A est adopté.)

Chapitre VII

Les personnels de direction et d’inspection

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TITRE II

DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES

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Article 54 bis A
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 61

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures législatives nécessaires à la création d’un établissement public local d’enseignement, dénommé « école européenne de Strasbourg », constitué de classes maternelles, élémentaires et du second degré et dispensant un enseignement qui prend en compte les principes de l’organisation pédagogique figurant à l’article 4 de la convention portant statut des écoles européennes, faite à Luxembourg le 21 juin 1994.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement au plus tard six mois après la publication de cette ordonnance – (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

Article 61
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette deuxième lecture n’aura servi à rien, puisque aucun amendement n’a été accepté.

Vous avez souhaité, mes chers collègues de la majorité, un vote conforme, quel que soit l’intérêt des amendements qui ont été présentés. Est-ce bien raisonnable ? Nous avions pourtant le temps ! Si le Sénat avait modifié quelques articles du projet de loi en deuxième lecture, cela n’aurait pas empêché l’application du texte. Au pire, son adoption définitive aurait été retardée de vingt-quatre heures, le temps de réunir une commission mixte paritaire.

Ce refus du débat et cette volonté de passer en force sont tout à fait regrettables.

M. Jean-Claude Lenoir. Tout à fait !

M. Jacques Legendre. Cette deuxième lecture est sans doute une occasion manquée d’épargner à de nombreuses communes de France de sérieux soucis dans les mois à venir. Nous avons débattu des problèmes que posera la mise en application de cette nouvelle organisation de la vie scolaire.

Nous avons demandé, parce que c’était raisonnable, de reprendre la concertation, de vous accorder davantage de temps. Pour vous, ça n’aurait en rien été une reculade ou un signe de renoncement que d’affirmer que cette réforme est tellement importante qu’il faut en faire le tour, en ce qui concerne aussi bien son coût que sa mise en application.

Vous avez voulu, au contraire, accélérer le rythme. Ce sont les communes, les écoles et donc les enfants qui risquent de faire les frais de cette méthode à la hussarde. Je le regrette.

Quelle nécessité absolue y avait-il à vouloir que cette réforme entre en vigueur aussi rapidement, d’autant que beaucoup de communes, de droite comme de gauche, urbaines comme rurales, ont décidé de reporter son application à la prochaine rentrée scolaire ? Pour toutes, les conséquences financières seront importantes.

M. Jean-Claude Lenoir. Tout à fait, les conséquences seront énormes !

M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, nous avions des raisons objectives d’être inquiets sur ce texte. Nous avons débattu en première lecture des problèmes de fond. Nous les avons de nouveau évoqués aujourd’hui.

Ce soir, nous éprouvons une certaine amertume et du regret à constater que vous n’avez pas voulu vous saisir de l’occasion offerte par cette deuxième lecture pour que nous réalisions, ensemble, des progrès au service de cette réforme.

Dans ces conditions, vous n’en serez pas surpris, le groupe UMP votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par remercier la rapporteur et la présidente de la commission de la culture, qui ont su animer les débats de manière que chacun d’entre nous puisse s’exprimer. Hélas ! nous n’avons pas été entendus.

Je souhaite remercier également l’ensemble des services du Sénat qui nous ont accompagnés parfois pendant de longues heures et sur un rythme frénétique, notamment lors de la dernière séance de la première lecture.

J’en viens au projet de loi lui-même.

Je l’ai souligné dans la discussion générale, en moins d’une semaine, le Sénat a examiné deux projets de loi qui ont pour ambition de réformer tout notre système éducatif, de la maternelle au doctorat. Un parcours scolaire peut débuter à deux ans, lors de l’entrée à la maternelle, et se terminer entre vingt-six et vingt-huit ans, avec l’obtention d’un doctorat, soit un quart de siècle, le quart d’une vie réformé en une semaine !

Comme nous l’avions pensé, mais n’osions le dire, et comme vous nous l’annonciez, monsieur le ministre, en guise d’introduction, si le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République est voté dans quelques instants, la loi pourra être promulguée et nos débats seront terminés.

Je le regrette pour deux raisons : la première est relative à la forme de nos débats en deuxième lecture ; la seconde porte sur le fond même du texte.

En ce qui concerne la forme de nos débats, nous avons remarqué la volonté forte de Mme la rapporteur et du Gouvernement d’obtenir un vote conforme du Sénat sur l’ensemble du texte. Notre discussion d’aujourd’hui est toute théâtrale et n’a rien de constructif.

Les deux assemblées ont trouvé petit à petit des points d’accord. Néanmoins, je regrette qu’ait été fixé a priori un objectif de vote conforme, qui a transformé cette dernière lecture au Sénat en un simple enregistrement du texte voté par les députés.

J’estime, pour ma part, qu’il était encore possible d’améliorer le texte. Je pense, naturellement, au fond même des sujets abordés.

Avec Catherine Morin-Desailly, que j’associe à cette explication de vote et avec qui j’ai travaillé, j’ai déposé des amendements sur les quatre thèmes suivants : défense des principes fondamentaux de l’école et de son organisation, renforcement du rôle des collectivités territoriales, amélioration du contenu des enseignements scolaires, meilleure prise en compte du handicap.

Le résultat nous donne plutôt des regrets.

Tout d’abord, je ne peux absolument pas me satisfaire de l’article 7 sur le socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Notre vision est diamétralement opposée à la vôtre. Pour nous, ce socle est une base commune qui permet de progresser, de continuer et de s’insérer dans la société et dans la vie professionnelle. Il est une telle priorité que nous estimons qu’il doit être défini par le législateur. En outre, il doit avoir une certaine intangibilité, concourant à lui donner toute sa force.

Ce projet de loi laisse de côté les collectivités territoriales. Acteurs majeurs de l’éducation, les élus ne sont pas seulement des payeurs, ils doivent aussi être des codécideurs. Une meilleure implication des élus assurera une véritable intégration des élèves dans la vie de la cité.

En guise d’illustration – vous n’y échapperez pas, mes chers collègues – de la mauvaise considération dont font l’objet les élus, comment ne pas, une fois encore, citer la réforme des rythmes scolaires ? Et ce n’est pas, monsieur le ministre, une posture politicienne.

Nous dénonçons la mauvaise préparation, le coût mal évalué pour les collectivités ainsi qu’une mise en place qui sera inefficace et aboutira souvent à une garderie. Ce n’est certainement pas l’esprit initial de cette réforme, monsieur le ministre.

Sur l’apprentissage, vous nous proposez d’abroger les textes en vigueur, alors qu’ils permettent aux élèves qui empruntent cette voie de choisir leur orientation et non de la subir.

Concernant la lutte contre l’illettrisme, je le répète, ce projet de loi n’est pas assez ambitieux et nous ne voyons aucune mesure d’ampleur, malgré la volonté du Premier ministre d’en faire une grande cause nationale pour 2013. Alors que vous nous présentez un texte d’orientation et de programmation, et il n’y a, désespérément, aucune proposition concrète de votre part.

Je regrette le manque d’avancées en deuxième lecture, car j’aurais aimé saluer les progrès apportés sur l’enseignement scolaire agricole par un vote global plus positif. J’aurais aimé aussi saluer la priorité accordée au primaire. C’est, en effet, la période d’apprentissage la plus importante pour les enfants ; elle détermine les bases intangibles à acquérir en vue de continuer sa formation et de s’intégrer dans la société.

Par conséquent, pour toutes les raisons que je viens d’évoquer et comme en première lecture, les membres du groupe UDI-UC voteront contre l’ensemble de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.

Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, à l’heure où nous allons adopter définitivement le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, il convient, même rapidement, de revenir à ses fondamentaux.

Je pense à la pédagogie bien sûr, car, monsieur le ministre, c’est l’entrée par laquelle vous vous êtes, à juste titre, engagé dans cette refondation de l’école. Il s’agit bien de la pédagogie, et non des structures, n’en déplaise à nos collègues de l’UMP, car la qualité des systèmes scolaires dépend très largement des enseignants et de leur formation. Enseigner s’apprend : il ne suffit pas de maîtriser un savoir ou une discipline, pour être capable de les transmettre. Cette assertion, nous l’avons entendue à plusieurs reprises au long de nos débats, mais nous ne le dirons jamais assez tant celle-ci, pourtant de l’ordre de l’évidence, a été perdue de vue ces dernières années.

Nous portons, sur toutes les travées de notre assemblée, de fortes exigences pour les ESPE, car nous avons pleinement conscience de l’enjeu qu’elles représentent.

Nous savons ces exigences partagées et portées à la fois par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et par le vôtre, monsieur le ministre. Les procédures d’accréditation en cours le prouvent.

Priorité au primaire, réaffirmation du collège unique mais non uniforme, plus de maîtres que de classes, parcours d’éducation artistique et culturelle, service public du numérique éducatif : ce nouveau souffle pour l’école, notre travail parlementaire l’a complété avec pour objectif une école bienveillante et inclusive, au service de la réussite de tous.

Je ne détaillerai pas les apports de notre assemblée, notre rapporteur s’y est employée, ni ceux de notre groupe, notre collègue Jacques-Bernard Magner nous les a rappelés lors de la discussion générale. Je me contenterai de mentionner une thématique qui me tient à cœur, l’enseignement français à l’étranger.

L’examen parlementaire achevé, l’essentiel reste à venir : faire vivre dans nos établissements, dans les classes, pour tous les élèves, les orientations et les chantiers engagés, afin que, dès le mois de septembre prochain, la rentrée scolaire soit celle de la refondation.

Enfin – est-ce utile de le préciser ? –, le groupe socialiste votera avec conviction et enthousiasme le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, avant la mise aux voix de ce texte, je veux insister sur la vigilance qui accompagne notre vote.

Nous serons vigilants sur les moyens qui ont été annoncés et qui devront se concrétiser dans les prochaines lois de finances, sur les conditions de la rentrée prochaine, sur les ESPE, leur fonctionnement et leurs missions. Eh oui, nous serons vigilants sur la réforme des rythmes scolaires qui, nous le savons, sera difficilement applicable dans bien des communes.

Cependant, monsieur Legendre, je ne pense pas que nous puissions, à propos de ce texte, parler de travail « à la hussarde ». Ce serait, par comparaison, oublier bien rapidement la multitude des injonctions, des réformes qui ont été imposées sous la précédente majorité, et même la généralisation brutale de certaines expérimentations. J’ai encore en tête la mise en place du bac professionnel en trois ans, qui a créé beaucoup d’émois et de soucis dans le corps enseignant (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste),…

Mme Françoise Laborde. C’est vrai !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … auquel il a fallu, je vous l’assure, une constance sans faille pour assumer ce passage en force.

Cependant, le travail n’est pas terminé. Il doit se poursuivre, car nous ne sommes pas quittes par rapport aux enjeux qui nous sont posés. Nous continuerons donc pour notre part le débat d’idées sur ce que doit être un véritable service public national de l’éducation.

Il faut travailler à davantage s’émanciper de la notion de socle, travailler à construire une ambition de culture commune de haut niveau pour toutes et tous, travailler sur ce qui doit relever du temps scolaire. Pour ce qui nous concerne, nous voulons « plus » et « mieux » d’école, nous l’avons dit, et non pas « moins » d’école.

Il faut encore se préoccuper de la qualité de la formation initiale et continue des personnels. Elle est indispensable pour donner sens et corps au « tous capables ».

Loin de la logique du tri des élèves, c’est au contraire une logique d’émancipation par l’accès au savoir pour toutes et tous qu’il faut viser.

Telles sont les remarques que je souhaitais formuler au terme de l’examen de ce texte. Notre vote sera positif, mais il est assorti d’une grande exigence et d’une grande vigilance. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, à travers ces deux lectures, l’attention que le Parlement accorde à la refondation de l’école de la République s’est exprimée très largement.

Je pense notamment au principe selon lequel tous les élèves disposent de la capacité d’apprendre et de progresser, au droit à la formation, à toutes les mesures qui visent l’inclusion de tous les enfants, en particulier les enfants en situation de handicap ou souffrant de troubles invalidants.

Le message est clair pour ces enfants et leurs familles : il n’existe pas de fatalité et le devoir de l’école est de leur donner confiance en l’avenir.

En matière d’orientation, je tiens à saluer l’ajout, par l’Assemblée nationale, de l’association des élèves et de ses parents – ou de son responsable légal – à l’élaboration du parcours individuel d’information et de découverte du monde professionnel. (M. le ministre acquiesce.) L’amendement que nous avions déposé en première lecture n’avait pu être adopté, alors que l’implication de l’élève et de ses parents est indispensable pour une orientation réussie.

En outre, le développement de la scolarisation des enfants de deux à trois ans, la reconnaissance de la spécificité de l’accueil des enfants en maternelle, la priorité accordée au primaire ou la création du service public du numérique éducatif constituent autant d’avancées qui méritent d’être soulignées.

Enfin, avec la consécration du respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité parmi les missions du service public de l’éducation, la transmission des valeurs de la République est assurée et le nouvel enseignement moral et civique sera le véhicule approprié pour évoluer vers une société plus inclusive.

Seize amendements du RDSE adoptés en première lecture ont été conservés dans le texte final.

M. Jean-Claude Lenoir. Quelle chance !

Mme Françoise Laborde. C’est parce qu’il s’agissait de très bons amendements, monsieur Lenoir ! (Sourires.)

On peut citer, parmi les mesures retenues, la consécration législative de la lutte contre les inégalités territoriales dans les missions du service public de l’éducation, le renforcement de la place des parlementaires au sein du Conseil supérieur des programmes ou les précisions apportées sur la composition du futur institut des hautes études de l’éducation nationale.

Je mentionnerai également l’encadrement de l’extension de l’exception pédagogique permettant d’établir un équilibre entre la préservation des œuvres de l’esprit et la démocratisation du savoir, l’accès des enseignants aux ressources numériques des associations complémentaires ou encore le développement de la promotion de la culture scientifique et technologique.

Le bilan est donc très positif : le texte né d’une large concertation s’est enrichi et a atteint un degré de maturité nous permettant de l’accueillir avec une profonde satisfaction.

Toutefois, la traduction en actes de ces objectifs constitue de nouveaux défis qu’il faudra relever avec succès. Je pense notamment au fonds de soutien en faveur des communes qui accompagne la réforme des rythmes scolaires, sur laquelle les élus seront bien sûr très vigilants afin qu’elle ne se réalise pas au mépris de l’égalité des territoires ; il importe que tous les élèves puissent profiter d’activités périscolaires bénéfiques pour l’apprentissage, avec un personnel formé et compétent.

La pérennisation de ces aides doit être évoquée pour les communes en difficulté et un encadrement efficace des élèves doit être garanti.

Je pense aussi à la formation des professeurs qui constitue la mesure phare de ce projet de loi et dont le contenu doit peut-être encore évoluer.

Ainsi, ce texte confirme incontestablement l’engagement de la nation pour son école, l’orientation qu’elle lui offre pour que la réussite et la réduction des inégalités reprennent place au cœur d’une institution longtemps fragilisée. Il devra être accompagné des moyens nécessaires représentant l’effort le plus pertinent qu’un État peut consentir : l’investissement dans la jeunesse de notre pays.

C’est pourquoi la majorité des membres du RDSE apportera son soutien à ce projet de loi. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, nos travaux touchent à leur fin. Le groupe écologiste votera sans réserve ce texte. Certes, il ne satisfait pas toutes les attentes au regard de l’école que nous appelons de nos vœux en tant qu’écologistes. Néanmoins, sur un grand nombre de valeurs, nous nous retrouvons.

L’école de la bienveillance, l’école inclusive, l’école quel que soit le milieu social, une école où le redoublement est non plus une sanction mais un événement exceptionnel voué à disparaître, une école qui permet d’initier au parcours artistique, une école où l’éducation à la non-violence doit se diffuser, une école de l’écoute, une école avec les parents, avec les enseignants : pour nous, cela va dans le bon sens.

Mme Corinne Bouchoux. Fidèle au principe de laïcité, ce n’est pas une expression que j’utiliserais !

La prise en compte de l’éducation à l’environnement durable va également, selon nous, dans le bon sens.

Pour toutes ces raisons – qui montrent en outre qu’une commission présidée par une écologiste, c’est possible !(Sourires) –, nous voterons en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à faire part de la déception que m’inspire cette deuxième lecture, qui était pourtant l’occasion d’apporter, très modestement, quelques améliorations au texte initial.

J’ai le sentiment que les collectivités territoriales n’ont pas bénéficié du traitement qu’elles méritaient.

Un amendement fort pertinent du groupe UMP visant à renforcer la représentation des collectivités locales dans le conseil de l’école n’a pas été adopté. En revanche, lorsqu’il est question de financement, là, on n’hésite pas à se tourner vers les collectivités locales !

Il est dommage également, s’agissant de la réforme des rythmes scolaires, que vous n’ayez pas donné suite à l’amendement consistant à reporter en 2014 les sommes non utilisées pour l’année scolaire 2013-2014 par le fonds en faveur des communes. C’était une avancée et vous auriez adressé un signe fort aux élus, qui font remonter les préoccupations financières de terrain qu’ils connaissent.

À l'article 14 bis, monsieur le ministre, je vous ai interpellé sur la possibilité pour les départements de pratiquer la cohésion sociale au sein même des établissements scolaires dont ils ont la responsabilité. Vous n'avez pas souhaité répondre.

M. Jean-Claude Lenoir. Vous n’êtes pas le seul !

M. René-Paul Savary. Sur la décentralisation, des avancées pratiques étaient possibles. Je pense à l'interpellation fort judicieuse de M. Lenoir,…

M. Jean-Claude Lenoir. Ne parlez pas d’interpellation, c'est un gros mot !

M. René-Paul Savary. Je corrige : à la question très intéressante de M. Lenoir (Sourires) sur la médecine scolaire, laquelle aurait pu, en matière de prévention, compléter la protection maternelle et infantile assurée par les départements.

Nous avons l’expérience de la décentralisation. Même si le personnel TOS relève de la compétence des départements pour les collèges et de celle des régions pour les lycées et que la pédagogie relève, elle, de l'État, il aurait été possible, en faisant évoluer les responsabilités des gestionnaires, d’harmoniser le dispositif et de trouver des complémentarités entre les différents domaines. Telle n'a pas été votre volonté.

Pour les élèves en situation de handicap, l’intervention des auxiliaires de vie scolaire individualisée, les AVSI, constitue un progrès intéressant. Nous vous avions également proposé d’avancer sur la question du temps périscolaire pour ces élèves, en mutualisant les moyens de prise en charge entre le scolaire et le périscolaire. Il est décevant que vous n'ayez pas saisi la balle au bond.

Au final, lorsqu’on regarde le rapport qualité-prix de cette réforme, le compte n'y est pas ! C'est la raison pour laquelle, personnellement, je ne voterai pas ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame le rapporteur, mes chers collègues, je serai extrêmement bref, n’ayant rien à ajouter aux propos de ma collègue Françoise Laborde, si ce n’est vous adresser, monsieur le ministre, de chaleureuses félicitations. Vous avez en effet su donner à ce projet de loi le souffle de la laïcité, qui est le socle de la République, et en faire la ligne directrice de ce texte. La restauration de l'école de la République est la tâche la plus noble qui puisse exister pour un gouvernement, quel qu'il soit. C'est peut-être là que se trouve le léger clivage entre la droite et la gauche dans notre République. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier très chaleureusement de ce débat dont j’aimerais tirer quelques conclusions.

D’abord, vous l’avez relevé, par respect pour le Parlement, je n’ai pas demandé l’engagement de la procédure accélérée. Les débats en première lecture et le respect dont l'Assemblée nationale a fait preuve à l’égard du travail approfondi du Sénat ont permis de grandes avancées. Il est assez rare qu’un tel travail en commun avec la représentation parlementaire soit mené sur des projets de loi d'orientation et de programmation.

Le respect du Parlement passe également par le respect de l’accord entre l'Assemblée nationale et le Sénat pour ne pas modifier de nouveau ce texte. Je remercie les différents groupes qui soutiennent la majorité d'avoir su se rassembler, car ce n'est pas toujours le cas, dans le respect de leur diversité. Cela n’était pas évident pour le groupe CRC.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, si vous aviez défendu des propositions permettant de construire le texte autour de l’idée qui aurait dû tous nous rassembler – la réussite de tous les élèves, sur l'ensemble du territoire, quelle que soit leur classe sociale –, alors il n'y aurait eu aucune difficulté.

Aujourd'hui, la majorité, qui a déjà fourni un travail considérable et qui tenait à respecter l’accord que je viens d’évoquer, vous a largement laissé faire.

Dans les amendements que vous avez proposés, quels sont ceux qui auraient permis d’obtenir des avancées par rapport à la première lecture sur les axes forts suivis par notre pays pour redresser son système éducatif ? Étaient-ce ceux qui concernaient les écoles supérieures du professorat et de l’éducation ? Vous y êtes tous favorables ; parfois vous vous plaignez d'être mal informés, mais vous n’avez jamais cherché à enrichir les dispositions de ce texte.

S’agit-il de la priorité au primaire dont vous regrettez qu’elle ne soit pas mise en œuvre ? Je ne l'ai vu ni sur les postes, ni sur la pédagogie, ni sur la formation des enseignants.

Est-ce vos interventions, même positives, sur la réforme des rythmes scolaires qui vous a tellement occupé cet après-midi et qui ne figure pas dans le texte ? Sur ce sujet, j'ai entendu une nouvelle fois bien des choses très éloignées de la réalité et toujours fondées sur les mêmes arguments.

Vous le savez, en matière d’activités périscolaires, les inégalités sont grandes : le rapport est de un à dix. Pour la première fois, cette réforme permettra de financer les activités périscolaires par des subventions qui intègrent la péréquation ; je pense aux communes les plus pauvres comme Denain ou Mende, qui appliqueront dès la rentrée prochaine la réforme des rythmes scolaires.

Notre objectif, dont ce projet de loi témoigne, est bien d’améliorer la réussite de tous les élèves. Il faut du temps : nous en donnons. Il faut des moyens : nous en donnons aussi.

Je suis prêt à entendre toutes les critiques – et j’ai écouté toutes celles qui m’ont été adressées –, mais non à m’entendre reprocher, comme cela a été fait, de mettre en jeu la réussite des élèves. Je le redis, cette réussite est notre seul but, y compris lorsque nous mettons en œuvre la réforme des rythmes scolaires.

Monsieur le président du conseil général, cher René-Paul Savary, lorsque l’on est passé à la semaine de quatre jours et qu’il a fallu réorganiser les transports scolaires entre le primaire et le collège, il ne m’a pas semblé que l’argent a été redirigé vers la réussite des élèves. (M. René-Paul Savary s’exclame.)

J'ai vu ce qui s’est passé : la disparition de la formation et la suppression de 80 000 postes n’ont été un progrès ni pour les élèves ni pour les enseignants.

Ce que je retiens de notre débat, c'est que la gauche a, comme toujours, porté très haut l’exigence éducative, et je pense à mes grands prédécesseurs. Si vous étiez restés aux responsabilités, l'école de la République serait aujourd'hui encore plus abîmée qu'elle ne l'était il y a un an lorsque je suis devenu ministre de l’éducation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Je souhaite que notre travail de refondation se poursuive, et ce dans l'intérêt non pas d'un camp, mais des élèves. Une fois de plus, la droite n'a pas été présente au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jean-Pierre Leleux. On verra les résultats !

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 282 :

Nombre de votants 347
Nombre de suffrages exprimés 347
Pour l’adoption 176
Contre 171

Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
 

11

Modification de l'ordre du jour

M. le président. Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé d’avancer la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable à neuf heures trente, le jeudi 27 juin 2013.

Par ailleurs, il a demandé l’inscription à l’ordre du jour du mardi 2 juillet 2013, le soir, de la proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales, présentée par M. Jean-Pierre Sueur.

En conséquence, l’ordre du jour des séances des jeudi 27 juin et mardi 2 juillet 2013 s’établit comme suit :

Jeudi 27 juin 2013 (jour supplémentaire de séance)

À 9 heures 30 :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

1°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable (n° 662, 2012-2013)

(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, avant le mercredi 26 juin, à dix-sept heures.)

2°) Suite éventuelle de la deuxième lecture du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires

De 15 heures à 15 heures 45 :

3°) Questions cribles thématiques sur la situation des caisses d’allocations familiales

(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)

À 16 heures et le soir :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

4°) Suite éventuelle de l’ordre du jour du matin

5°) Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la représentation des Français établis hors de France (n° 684, 2012-2013)

(La conférence des présidents a fixé :

- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 26 juin, à dix-sept heures ;

- au mercredi 26 juin, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.

La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le jeudi 27 juin, à neuf heures trente.)

SESSION EXTRAORDINAIRE 2012-2013

Mardi 2 juillet 2013

À 14 heures 30 :

1°) Ouverture de la session extraordinaire 2012-2013

2°) Discours de M. le Président du Sénat

3°) Débat sur la réforme de la politique agricole commune (PAC)

(La conférence des présidents a décidé d’attribuer, à la suite de l’intervention liminaire du Gouvernement de quinze minutes, un temps d’intervention d’une heure aux orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe et de quinze minutes aux représentants du groupe de travail sur la réforme de la politique agricole commune ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 1er juillet, à dix-sept heures.

À la suite de la réponse du Gouvernement, les sénateurs pourront, pendant une heure, prendre la parole (deux minutes maximum) dans le cadre d’un débat spontané et interactif comprenant la possibilité d’une réponse du Gouvernement.)

4°) Projet de loi portant application du protocole additionnel à l’accord entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique relatif à l’application de garanties en France, signé à Vienne le 22 septembre 1998 (texte de la commission, n° 622 rectifié, 2012-2013)

(La conférence des présidents a fixé :

- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 1er juillet, à dix-sept heures.

La commission des affaires étrangères se réunira pour examiner les amendements le mercredi 26 juin, à quinze heures trente.)

5°) Projet de loi autorisant l’approbation des amendements des annexes II et III à la convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est relatifs au stockage des flux de dioxyde de carbone dans des structures géologiques (texte de la commission n° 471, 2012-2013)

(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 1er juillet, à dix-sept heures.)

Le soir :

6°) Suite éventuelle de l’ordre du jour de l’après-midi

7°) Proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales, présentée par M. Jean-Pierre Sueur (texte de la commission n° 631, 2012-2013)

(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 1er juillet, à dix-sept heures.)

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel

M. le président. La séance est reprise.

12

Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur le bilan annuel de l’application des lois, organisé à la demande de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

Mes chers collègues, au moment d’entamer ce débat, je voudrais me réjouir avec vous de ce rendez-vous annuel, désormais bien inscrit dans notre paysage institutionnel.

Je rappellerai que le Sénat fut précurseur en la matière puisque c’est lui qui a institué, dès 1972, un dispositif permettant aux commissions de suivre la publication des textes d’application des lois, possibilité ensuite élargie à l’ensemble des citoyens grâce au site Internet du Sénat.

Ce dispositif a depuis été profondément modernisé et dynamisé avec la mise en place, début 2012, de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

Sous la présidence active de notre collègue David Assouline et en association étroite avec les commissions permanentes, la commission a déjà présenté dix rapports d’information, tous de très grande qualité, qui trouvent leur point d’orgue avec le rapport annuel sur l’application des lois.

Au-delà des clivages politiques, les binômes formés de sénateurs de la majorité et de l’opposition ont travaillé avec le souci de développer une évaluation qualitative de l’application des lois, application indispensable à la mise en œuvre concrète des textes que nous votons.

Je ne doute pas que le débat qui s’ouvre sera rempli d’enseignements, pour nous comme pour le Gouvernement, et je remercie par avance M. le ministre chargé des relations avec le Parlement des réponses qu’il apportera à nos observations sur des sujets qui préoccupent légitimement nos concitoyens.

La parole est à M. le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les présidentes, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, nous sommes réunis ce soir pour la discussion du bilan annuel de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

Cet exercice n’a rien de formel. Au contraire, je le considère comme l'un des temps forts de l’activité de contrôle du Sénat.

En effet, en présence du Gouvernement et des présidents des sept commissions permanentes du Sénat, ce débat nous donne l’occasion d’une réflexion d’ensemble sur l’application des lois, thème auquel le Sénat accorde une grande attention depuis plus de quarante ans, comme vient de le rappeler M. le président.

Aujourd’hui, le Parlement ne peut plus se contenter de voter des lois. Chacun en est conscient, nous devons aussi contrôler la manière dont ces lois s’appliquent et vérifier si elles répondent vraiment aux attentes de nos concitoyens. C’est un enjeu de démocratie, c'est une question de crédibilité de l’action publique et de confiance dans l’institution parlementaire et, comme vous le savez tous, c'est une œuvre particulièrement indispensable dans la période que nous traversons.

En outre – je l’ai souvent souligné à cette tribune –, je vois une forte logique de continuité entre la fonction de contrôle et la fonction législative. En faisant le bilan des régimes existants, nous sommes conduits à identifier leurs faiblesses ou leurs lacunes et à envisager les améliorations nécessaires pour tendre vers ce que j’appellerai un travail législatif efficace – d'autres parlent de « rendement législatif ».

Contrôler plus pour légiférer mieux : voilà, en quelque sorte, la maxime qui pourrait résumer la philosophie de cette commission depuis sa mise en place, en 2012.

À ce propos, je tiens à souligner le précieux concours que nous apportent, depuis le début, les commissions permanentes, le Gouvernement – en particulier le ministre chargé des relations avec le Parlement, qui anime la procédure législative et l’écriture des décrets d’application – et le secrétariat général du Gouvernement, dont il est en quelque sorte le bras armé pour ces questions d’application des lois.

J’en viens au bilan annuel. Mes chers collègues, vous avez pu constater que le rapport ne ressemble pas tout à fait à celui des années précédentes. Bien entendu, vous y retrouvez les grands indicateurs habituels de l’application des lois. J’ai toutefois jugé important d’y évoquer aussi plusieurs perspectives nouvelles qui, à terme, devraient faciliter l’exercice de cette mission de contrôle et rendre l’environnement normatif plus performant, plus simple et plus accessible à tous.

Je commencerai par les statistiques. Je vous indique d’abord que, cette année, nous avons méthodiquement recoupé nos chiffres avec ceux du secrétariat général du Gouvernement, pour constater que nos décomptes respectifs aboutissaient à des résultats d’ensemble convergents. C’était une précaution indispensable pour prévenir toute controverse inutile sur les statistiques, comme cela a pu avoir lieu par le passé.

Je précise ensuite que le rapport couvre une période allant du 14 juillet 2011 au 30 septembre 2012. Nous avons retenu ces bornes en coordination avec le secrétariat général du Gouvernement pour mesurer correctement l’incidence du changement de gouvernement et de législature survenu à la suite des élections de mai et juin 2012.

Toute polémique mise à part, nous ne pouvions faire abstraction de la chronologie des mandatures depuis 2007. En effet, à partir de l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République, le gouvernement de François Fillon n’a eu à mettre en application que des lois issues de lui-même ou héritées des gouvernements Raffarin et Villepin, c'est-à-dire des textes issus tous de la droite.

En 2012, au contraire, la situation a été moins confortable, car l’actuel Gouvernement a dû mettre en application les lois de l’ancienne majorité et ses propres textes.

Sous le bénéfice de ce double rappel, il est possible d’examiner la mise en application des lois cette année.

Mon premier constat est que les chiffres de 2011-2012 marquent une amélioration par rapport aux exercices précédents, aussi bien en valeur absolue qu’en termes de délais de parution des décrets d’application.

L’application des lois a été une priorité forte du Gouvernement : dès son entrée en fonction, il a confirmé l’objectif énoncé en 2008 – mais rarement respecté jusque-là – de faire paraître dans un délai maximum de six mois les décrets d’application de toute loi nouvelle.

Vous trouverez le détail des chiffres dans mon rapport ; retenons simplement que le taux global de mise en application des mesures législatives adoptées durant la session 2011-2012 atteint 66 %, pourcentage supérieur de deux points à celui de la session précédente, qui, avec 64 %, était déjà un bon résultat. Certes, avec seulement deux points de différence, d’aucuns voudront conclure à une stagnation, mais ne nous y trompons pas : sans être artificiel, le taux de l’an dernier s'explique en réalité par un effet de calendrier.

Depuis de nombreuses années, le taux d'application avait plafonné entre 30 % et 40 %, si bien que, en 2010-2011, il n’a pu enregistrer un brutal gonflement – pour atteindre 64 % – au seul motif que de vrais efforts avaient été engagés par le secrétariat général du Gouvernement et par le ministre des relations avec le Parlement. Ce ressaut s'explique surtout par le fait que, dans les derniers mois avant les élections, le gouvernement Fillon a redoublé d'effort pour que toutes les lois de la mandature soient mises en application. Ce gonflement ne reflète donc pas une tendance de fond qui caractériserait la précédente législature.

Dès la première année de son action, le Gouvernement actuel a dépassé le meilleur taux atteint par le précédent gouvernement. Cela mérite d'être souligné et nous espérons que ce nouveau rythme sera tenu.

En tout cas, nous constatons actuellement que la pression a été maintenue et que presque 90 % des lois de la session 2011-2012 sont aujourd’hui partiellement ou totalement appliquées.

Pour les textes de la XIVe législature, c’est-à-dire ceux de l’actuelle majorité, les premières statistiques confirment la tendance : plus de 80 % des lois sont déjà partiellement ou totalement en application, alors même que le délai de six mois n’est pas encore expiré.

Un autre élément positif se dégage : le taux et les délais de mise en application des textes d’initiative parlementaire – propositions de loi et amendements – sont à peu près du même ordre que pour les lois d’origine gouvernementale. Cela n’a pas toujours été le cas : le gouvernement précédent était moins diligent à faire appliquer les textes qui venaient du Parlement.

Je regrette simplement que le Gouvernement ait montré plus d’empressement pour les textes de l’Assemblée nationale que pour ceux du Sénat. Si le taux est le même pour les textes issus du Gouvernement et ceux dont le Parlement est à l'origine, un déséquilibre demeure entre les lois issues de l’Assemblée nationale et celles qui émanent du Sénat. Il se trouve que nous sommes au Sénat ; nous insisterons donc sur cette situation jusqu'à l'obtention d'une parfaite égalité de traitement.

En revanche, l’application des lois votées après engagement de la procédure accélérée révèle un paradoxe. Si une telle décision est prise par le Gouvernement, c’est qu’il faut aller vite. Mais pourquoi imposer au Parlement un examen en urgence pour un si grand nombre de projets, s’il faut souvent attendre plusieurs mois la publication des décrets d’application ? Le taux d'application des lois votées selon cette procédure n’est en effet pas meilleur que pour les autres lois. C’est un problème que nous soulevons.

Cette urgence à deux vitesses peut paraître choquante, même si je peux comprendre que les procédures d’élaboration des décrets imposent des cadences et des consultations impossibles à court-circuiter. Néanmoins, si l'on trouve le moyen d'accélérer le travail parlementaire, on doit pouvoir accélérer aussi le travail de l'administration.

Pour conclure sur les chiffres de l’année, la situation marque une amélioration réelle par rapport aux années précédentes. Je crois légitime d’en donner acte au Gouvernement, même si nous sommes encore loin d’atteindre le taux de 100 %. On me rétorquera que 100 %, c'est la perfection… Mais il s’agit ici des lois et toutes doivent trouver application ! Nous continuerons donc à nous battre pour cet objectif.

Le deuxième constat concerne le rattrapage des retards antérieurs. Sur ce point, je serai plus nuancé. L’objectivité force à reconnaître que l’on avance à un rythme plus médiocre et que l'on se trouve même, parfois, totalement bloqué… Il est difficile de demander à un gouvernement d’établir des priorités, d'accélérer et de mettre son énergie dans la publication de décrets de lois votées sous une précédente législature. Même en 2007, on ne s’est pas empressé d'appliquer les lois précédentes, alors qu’il s'agissait globalement de la même majorité ; il est vrai que le nouveau Président de la République avait d'autres priorités…

Pour les lois héritées de la précédente majorité parlementaire, entre les mois de juin 2007 et de juin 2012, l’actuel Gouvernement a publié cinquante règlements ou rapports, soit la moitié des textes attendus. Sans chercher aucunement à polémiquer, je précise que c'était pire après 2007 pour les lois antérieures à 2007…

Aujourd'hui, l’apurement des lois antérieures à 2007 ne marque aucun progrès significatif par rapport aux sessions précédentes. Devons-nous nous résigner à ce qu’une loi qui n’est pas mise en application rapidement après son adoption soit, à la longue, condamnée à ne jamais l’être ?

Je n’engagerai pas ce débat ce soir. Il n’en demeure pas moins que cela reste un sujet de préoccupation pour la commission que je préside, comme en témoigne mon rapport.

Le troisième constat porte sur les rapports que le Gouvernement est tenu de remettre au Parlement. Sur ce point également, la situation n’est guère satisfaisante, même si elle n’est pas nouvelle.

Comme chaque année, nous observons moins de diligence dans la production des rapports que dans la publication des décrets, malgré les rappels quasi incantatoires du Parlement.

Une statistique annuelle n’aurait pas grand sens, mais, si l’on considère la totalité des lois adoptées depuis 1980, le Parlement aurait dû se voir remettre plus de 500 rapports. Or il n’en a reçu que 245, soit un taux global inférieur à 50 %.

Cependant, comme l’ont souligné à juste titre plusieurs membres de la commission, n’avons-nous pas une part de responsabilité, en tant que parlementaires, dans cette situation ? Le Parlement ne demande-t-il pas trop de rapports ?

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. C’est sûr !

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois. Par ailleurs, sommes-nous certains que ceux qui nous sont remis chaque année sont lus et exploités de manière optimale ? Puisque nous ne les exploitons pas, le Gouvernement ne se sent pas obligé de les remettre : c’est un cercle vicieux.

Quittant maintenant le terrain des statistiques, j’en viens à des réflexions plus générales sur le contrôle de l’application des lois, dont j’ai rappelé l’importance au début de mon propos.

Je suis tenté de dire que le contrôle parlementaire est aujourd’hui à un tournant majeur et s’oriente de plus en plus vers l’évaluation, avec en ligne de mire une simplification du droit, une modernisation de l’action publique et une amélioration qualitative de notre environnement normatif.

Pour accompagner cette évolution, nous devons engager une démarche ambitieuse consistant à nous interroger sur le « bon rendement législatif » des textes que nous votons. L’enjeu est de taille. Chaque avancée que nous pourrons favoriser dans cette voie renforcera la confiance de nos concitoyens dans l’institution parlementaire, en particulier dans le Sénat qui, moins tenu par la logique majoritaire que l’Assemblée nationale, a toujours été un précurseur en matière de contrôle.

La création de cette commission pour le contrôle de l’application des lois s’inscrit dans cette logique. Hormis la veille réglementaire, elle est en effet avant tout en charge d’évaluer les législations existantes pour faciliter le travail des commissions permanentes et celui du Sénat quand la Haute Assemblée est saisie de projets modifiant le droit en vigueur.

C’est dans cet esprit que nous nous efforçons de « coller » au mieux aux rendez-vous législatifs en cours, en évaluant telle ou telle législation dont la refonte s’annonce imminente.

Ainsi, au mois de mars 2013, nous avons présenté un bilan de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU », avant de légiférer à nouveau sur l’enseignement supérieur. Ce travail d’évaluation réalisé par un binôme gauche-droite qui s’est accordé sur un certain nombre de constats a permis des rassemblements inattendus au cours de l’examen du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche adopté par le Sénat dans la nuit de vendredi à samedi dernier.

De même, nous présenterons dans quelques jours le bilan du régime de l’auto-entreprise, ce qui devrait nous permettre de travailler de façon beaucoup plus efficace sur ce dispositif et d’alimenter le débat public, au-delà des idées reçues, en nous appuyant sur des diagnostics très précis établis par Mme Dini.

Au total, nos travaux, généralement confiés à des binômes de rapporteurs de sensibilité politique différente, ont déjà permis de produire dix rapports d’information depuis 2012 ; trois ou quatre autres seront remis dans les semaines qui viennent. Ils ont porté sur le fond, au-delà des statistiques, sur les conséquences de l’application de la loi, les effets pervers que le législateur n’avait pas prévus, les moyens qui ont manqué… Tout cela nous a beaucoup appris.

J’observe que de nombreuses études d’impact se présentent encore comme une sorte d’exposé des motifs bis, dont l’utilité réelle est, de ce fait, assez limitée. Pourtant, l’étude d’impact est une avancée très importante. Elle est peu utilisée, mal produite, alors qu’il s’agit d’un élément majeur pour élaborer la loi en toute connaissance de cause en mesurant les effets qu’elle aura concrètement une fois adoptée.

Dans le même temps, après le vote de la loi, les travaux d’évaluation font peu référence à ce document, sans doute parce que ses auteurs n’y avaient pas intégré, dès le départ, des critères d’évaluation quantitatifs et qualitatifs, au regard desquels on pourrait déterminer si, oui ou non, la loi a bien atteint ses objectifs. J’en déduis qu’il faudrait peut-être reconsidérer le contenu des études d’impact pour pouvoir en tirer un meilleur parti.

Le Gouvernement comme le Parlement auraient intérêt à placer plus directement les études d’impact au service de cette « culture du contrôle et de l’évaluation » dont je recherche l’émergence, comme vous l’avez souhaité, monsieur le président du Sénat, en proposant la création de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

Pour conclure, je remercie chacune des sept commissions permanentes du travail considérable de contrôle de parution des décrets d’application qu’elles effectuent tout au long de l’année. Sans elles, l’élaboration de ce rapport annuel dont je vous présente les conclusions serait impossible, puisqu’il est la synthèse de leurs rapports respectifs.

Je tiens également à saluer le climat de confiance établi avec les autorités gouvernementales concernées ; je pense, en particulier, au ministre chargé des relations avec le Parlement et au secrétariat général du Gouvernement. Loin de moi l’idée d’être tendancieux, je dois à cet égard souligner que, au cours des derniers mois du gouvernement Fillon, M. Ollier a établi avec la commission que je préside un dialogue ouvert et une collaboration particulièrement fructueuse.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. C’est vrai !

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois. Comme nous le savons tous, le droit est depuis des années l’objet de critiques récurrentes, parfois excessives mais pas toujours infondées. Simplifier les normes et les rendre plus performantes est donc à mes yeux une démarche salutaire pour restaurer la confiance dans l’État et dans ses institutions.

Ce chantier est désormais ouvert ; à tous les niveaux, du plus haut sommet de l’État aux élus locaux, cette nécessité commence à s’imposer. Cela répond aux attentes de nos concitoyens et, si beaucoup de chemin reste à parcourir, je reste optimiste : la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, capitalisant l’expérience acquise par la Haute Assemblée, est fière d’y apporter sa contribution. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président du Sénat, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mesdames, messieurs les présidents de commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre invitation à cette séance consacrée à l’examen du rapport d’activité de la commission pour le contrôle de l’application des lois qui est, je le souligne, une heureuse particularité de votre Haute Assemblée.

Ce deuxième débat, après un premier débat tenu ici même le 7 février 2012, illustre une considération que je sais largement partagée sur vos travées : le contrôle parlementaire moderne implique l’évaluation des lois adoptées comme des choix de politiques publiques. Contrôler l’application des lois est ainsi devenu une des modalités à part entière de la mission de contrôle de l’action du Gouvernement telle qu’elle est désormais explicitement énoncée dans les compétences du Parlement depuis la révision constitutionnelle de 2008.

En ce domaine, le Sénat avait été précurseur en créant dès 1971 la base informatique « APLEG » qui permet de suivre la parution des décrets d’application par les commissions permanentes compétentes. La création de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, en 2011, répondit au même objectif : contribuer à une culture de l’évaluation et du contrôle, en amont comme en aval du travail législatif. C’est là un changement de culture pour le Parlement et ce mouvement ne peut plus s’arrêter désormais.

Il faut bien constater, avec le recul, que cette création fut une excellente initiative, puisque cette jeune commission a déjà présenté dix rapports d’information qui ont souvent fait l’objet de débats en séance publique.

Cette initiative du bureau du Sénat a en outre entraîné la mobilisation du Gouvernement, afin que celui-ci soit en mesure de vous répondre de façon utile et pertinente. Élément central du suivi des réformes comme de la réalisation effective du programme du Président de la République, l’application de la loi tout autant que son élaboration retiennent désormais l’attention personnelle des membres du Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, faire en sorte que la loi s’applique sans délai est en effet une exigence démocratique. Afin de garantir aux sujets de droit une légitime sécurité juridique – il peut s’agir de nos concitoyens, mais aussi de nos entreprises comme de nos collectivités locales –, il est indispensable que la période qui sépare la publication de la loi de l’intervention des mesures réglementaires d’application soit limitée.

Une circulaire interministérielle du précédent gouvernement a fixé l’objectif consistant à prendre toutes les mesures réglementaires nécessaires dans un délai de six mois suivant la publication de la loi. La continuité de l’État nous a amenés à considérer et à rappeler que cet objectif devait être maintenu et respecté.

Afin de mobiliser au niveau politique adéquat les membres du Gouvernement, je préside le comité interministériel de l’application des lois, le CIAL, qui est l’interlocuteur naturel de la commission.

Au plan politique, notre travail consiste à vérifier, puis à décider, texte après texte, soit d’abroger les dispositifs législatifs non entrés en vigueur, soit d’assumer l’héritage et de prendre les mesures d’application qui s’imposent. Beaucoup a déjà été fait en une année, mais nombre de chantiers restent encore à achever.

Cette année, notre échange ne se focalisera pas sur la comptabilisation et les taux, puisque nous avons déjà corrigé l’an dernier un décalage de dates. Cette année, grâce aux propositions d’harmonisation de méthodologie, les bases du Sénat et du secrétariat général du Gouvernement ont pu converger. Je tiens d’ailleurs à remercier l’ensemble des services de leur implication.

Le rapport dont nous examinons les conclusions couvre donc la période du 14 juillet 2011 au 30 septembre 2012. J’apprécie particulièrement que, tout en restant fondé sur une approche précise des principaux indicateurs de la mise en application des lois, ce document s’attache à mettre en exergue les principales tendances qui se dégagent en leur conférant une lecture institutionnelle indispensable.

Monsieur le président, je partage les analyses de votre commission. Il est bien sûr beaucoup trop tôt pour établir des statistiques significatives concernant l’application des lois votées depuis le début de la XIVe législature, c’est-à-dire à compter du 20 juin 2012, mais la tendance est plutôt favorable, alors même que le délai de six mois assigné au Gouvernement pour publier ses textes d’application n’est même pas encore expiré pour la plupart des lois adoptées depuis le début de la présente session ordinaire.

À cet égard, trente-sept lois ont été promulguées à ce jour, parmi lesquelles quatorze sont d’application directe et vingt-trois appellent des décrets d’application.

Relevons d’ores et déjà que 100 % des décrets ont été pris pour la loi du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière ou pour la loi portant création du contrat de génération.

S’agissant de la fin de la XIIIe législature, période de référence de notre débat de ce soir, le Gouvernement a, via le comité interministériel, maintenu une pression toute l’année, au point que 90 % des lois de la session 2011-2012 sont aujourd’hui en application partielle ou totale.

Je sais que le Sénat accorde une attention particulière au suivi des dispositions législatives issues de propositions de lois et d’amendements parlementaires, pour s’assurer que le Gouvernement manifeste à leur endroit la même considération réglementaire et la même diligence qu’il témoigne à ses propres textes.

Je vous prie de croire que le ministre chargé des relations avec le Parlement que je suis, qui fut lui-même parlementaire pendant plus de vingt ans, se montre particulièrement attentif à votre préoccupation.

D’après les informations dont je dispose et qui concordent avec celles qui viennent d’être exposées, les textes issus de l’initiative parlementaire ne sont pas plus mal traités que les lois d’origine gouvernementale, même si je dois admettre que les textes de l’Assemblée nationale ont une légère avance sur ceux du Sénat. Nous essaierons d’y remédier, mais cela tient pour une part essentielle aux prérogatives dont dispose l’Assemblée nationale sur certains textes, notamment ceux qui sont de nature financière.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bien entendu vos remarques – vos critiques ! – concernant le recours à la procédure accélérée. Chacun reconnaîtra qu’il s’agit d’une adresse récurrente, quelle que soit la majorité.

Cette interrogation prend toutefois ici une dimension particulière si l’on met en corrélation le fait que le Gouvernement demande au Parlement d’examiner des projets ou propositions de loi selon la procédure accélérée, alors que les décrets d’application de ces mêmes lois attendent plusieurs mois avant d’être publiés. On pourrait trouver là une contradiction manifeste.

Je peux toutefois vous apporter une précision : sur les 259 lois votées au cours de la XIII législature, 87 étaient d’application directe et 172 appelaient des décrets d’application.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Eh oui !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Sur ces 172 lois, le taux voté selon la procédure accélérée s’élève à 41 %, le taux d’application des lois votées selon cette même procédure étant légèrement supérieur à celui des textes adoptés selon le droit commun : 91 % contre 90 %.

Il s’agit d’ailleurs d’un point que le rapport évoque, si l’on veut bien comparer les taux d’application des lois votées après engagement de la procédure accélérée et les lois de ces dernières années.

Jusqu’à une période relativement récente, les commissions permanentes avaient toujours déploré que la cadence rapide imposée dans la phase d’examen parlementaire n’ait pas été maintenue en aval, les ministères concernés ne faisant pas toujours preuve de la même célérité dans la publication des textes. Il existe donc bien un effet de rattrapage qui n’est pas négligeable.

Lors du premier comité interministériel d’application des lois qui s’est tenu au mois de juillet 2012, instruction a été donnée aux ministères de recenser les mesures de la XIIIe législature en attente de décret qui ne pourraient aboutir techniquement ou pour toute autre raison et d’identifier un vecteur législatif d’abrogation.

Cette ligne de conduite s’inscrit dans un souci de qualité du droit, de sécurité juridique et de transparence, mais se révèle plus difficile à mettre en œuvre pour les lois antérieures à 2007.

J’ai bien entendu la suggestion consistant à adopter une loi d’abrogation des lois. Un tel dispositif nécessiterait clairement un consensus politique. Je pense en effet que l’expérience que nous partageons des véhicules de M. Warsmann, ancien président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, a été différemment appréciée : il ne serait pas souhaitable de créer à nouveau des textes fourre-tout qui deviennent ingérables pour le Parlement comme pour le Gouvernement.

Toutefois, la question de l’abrogation devra être envisagée si les différents départements ministériels ne parviennent pas à identifier des véhicules idoines d’abrogation, car, s’agissant des lois récentes - je ne parle pas ici, par exemple, de la fameuse législation sur le port du pantalon féminin ! (Sourires) -, il n’est pas possible de laisser les sujets de droit dans une incertitude juridique.

À cet instant de notre débat, je ne poursuivrai pas plus loin sur le sujet de la stricte question de l’application des lois afin d’apporter précisément aux prochains orateurs des éléments d’appréciation sur les lois relevant de leurs commissions.

Je tiens toutefois à revenir sur l’obligation de dépôt des rapports, point soulevé dans le rapport de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois.

Le président de cette commission a, fort judicieusement, décrit une situation dans laquelle les rapports sont bien remis, mais souvent en retard, pour n’être guère exploités par la suite.

Jean-Jacques Hyest s’est interrogé en commission : « Faut-il vraiment demander un rapport à chaque article de loi, à défaut de pouvoir proposer une mesure à laquelle on opposerait l’article 40 ? » Il a conclu en se demandant s’il ne vaudrait pas mieux se contenter des rapports qui sont vraiment utiles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, le premier alinéa de l’article 67 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit prévoit la présentation d’un rapport du Gouvernement au Parlement, à l’issue d’un délai de six mois suivant la date d’entrée en vigueur d’une loi.

De même, sur le fondement de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, tout projet de loi de financement de la sécurité sociale est accompagné d’un rapport rendant compte de la mise en œuvre des dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année en cours. Convenons-en, ce dernier rapport, dont le délai de dépôt est en phase avec les spécificités liées à la loi de financement de la sécurité sociale, fait double emploi avec l’obligation de dépôt de rapport de l’article 67 de la loi du 9 décembre 2004.

Au titre de la XIIIe législature, 164 rapports étaient attendus ; 131 ont été déposés, soit 80 % du total escompté. Restent 33 rapports, dont certains ont perdu beaucoup de leur pertinence politique : il n’est que de songer, par exemple, à la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris.

En dehors des rapports dits « de l’article 67 », un très grand nombre de dispositions législatives imposent au Gouvernement de présenter au Parlement, soit en annexe du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit séparément de manière ponctuelle ou périodique, différents rapports d’information ou d’application.

Il faut ainsi avoir conscience que les lois de la XIIIe législature ont généré l’obligation de déposer plus de 400 rapports, hors article 67.

Il faut convenir que ce n’est pas spécifique à la XIIIe législature. Ainsi, la loi relative à la sécurisation de l’emploi, publiée dernièrement, comprend vingt-sept articles et prévoit la transmission de seize rapports au Parlement ; en d’autres termes, plus d’un article sur deux tend à la remise d’un rapport ! Mesdames, messieurs les sénateurs, je me permets de vous demander de partager mes interrogations.

Je sais que, cette année, les commissions permanentes s’accordent à déplorer le retard de transmission. Il est vrai que deux maux frappent ces rapports.

En premier lieu, ces rapports sont remis avec retard au Parlement.

Ainsi, au cours de la session 2011-2012 proprement dite, c’est-à-dire entre le 1er octobre 2011 et le 30 septembre 2012, le Sénat a reçu quarante-quatre rapports « de l’article 67 », soit exactement le double des rapports enregistrés au cours du précédent exercice 2010-2011. Le délai légal de six mois n’a été respecté que trois fois cette année, situation malgré tout en légère amélioration par rapport à l’année précédente lors de laquelle le délai légal n’avait jamais été respecté !

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Vous avez une bonne marge de progression ! (Sourires.)

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Ainsi peut-on citer le rapport sur la loi du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, publié plus de cinq ans après la promulgation.

Dès lors, il convient de s’interroger sur la pertinence de l’objectif de six mois fixé par le législateur de 2004. Il s’agit, je crois, d’une réflexion que nous devons conduire ensemble afin de faire concorder la norme avec la réalité de son application, près de dix ans après son instauration.

En second lieu, les rapports de l’article 67 ont un contenu hétérogène : certains fournissent un ensemble d’informations assez détaillées et directement exploitables, notamment la liste des textes réglementaires d’application restant à prendre et, s’il y a lieu, les motifs pouvant justifier le retard pris ; d’autres se contentent d’un simple catalogue de mesures sans commentaires explicatifs.

Là encore, notre réflexion doit cheminer de concert afin de calibrer obligation de rapport, délai de dépôt et contenu des informations transmises.

Si l’on souhaite que le Parlement puisse bien contrôler, il doit être bien informé et non englouti par des informations, certes nombreuses, mais obsolètes ou inadaptées.

Je conclurai en abordant la synchronisation de nos travaux pour accompagner les actions du Gouvernement en vue d’une simplification et d’une modernisation de notre environnement normatif.

Depuis une vingtaine d’années, la construction du droit est l’objet de critiques récurrentes, parfois excessives, mais pas toujours infondées.

Il faut bien admettre que, au fil des textes, notre droit tend à devenir de plus en plus complexe, voire instable pour ses usagers.

À cette fin, le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, le CIMAP, présidé par le Premier ministre, a pris plusieurs décisions qui me semblent entrer dans le champ des préoccupations de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois. Il s’agit en particulier des mesures très exigeantes pour endiguer l’inflation normative sur la base du principe « un pour un » - une norme créée, une norme supprimée – retenu dans la décision n° 16, mais également pour renforcer l’efficacité des études d’impact, comme le précise la décision n° 17.

Mesdames, messieurs les sénateurs, en créant des égaux, la loi cimente et justifie notre société. Dès lors, sa fabrique doit être exigeante, sûre, vérifiée et vérifiable.

La première condition de notre égalité républicaine est l’effectivité de la loi. Notre premier dessein doit donc être la recherche de l’infaillibilité de cette effectivité.

Je forme le vœu que les travaux de votre commission nous permettent collectivement d’accomplir l’objectif posé par le philosophe anglais John Locke qui, dans son Traité du gouvernement civil, estimait « qu’il n’est pas toujours nécessaire de faire des lois, mais qu’il l’est toujours de faire exécuter celles qui ont été faites. » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, pour la deuxième année, un débat est organisé en séance publique sur le bilan de l’application des lois, ce dont je me félicite.

Je suis en effet convaincu que, à travers des coopérations fructueuses entre les commissions permanentes et la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, nous pouvons enrichir de façon significative la fonction de contrôle des assemblées parlementaires. J’aurai l’occasion d’y revenir dans la suite de mon propos.

Cette année, deux modifications importantes ont eu une incidence sur le contexte dans lequel a été établi le bilan d’application que je vous présente.

La première modification concerne la période prise en compte, dont les bornes ont été ajustées pour établir un nouveau calendrier, comme cela a été développé tout à l'heure par David Assouline.

La seconde modification porte sur le périmètre des lois suivies par la commission que je préside. En effet, la partition de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, décidée par l’adoption de la résolution du 19 décembre 2011 portant modification du règlement du Sénat, a entraîné une redistribution entre les deux nouvelles commissions - affaires économiques et développement durable - du stock des lois dont l’ancienne commission de l’économie assurait jusqu’à présent le suivi réglementaire.

Ces deux modifications substantielles rendent très difficile toute comparaison avec les bilans dressés précédemment. Pour autant, en m’appuyant sur l’analyse des textes d’application des vingt-quatre lois dont le suivi a été confié à la commission des affaires économiques en fonction de ses champs de compétences nouvellement définis, je présenterai un bilan qualitatif et formulerai quelques préconisations.

Sur ces vingt-quatre lois, quatre ont été adoptées au cours de l’année parlementaire de référence. Il s’agit d’un chiffre relativement faible, imputable, comme vous le savez, mes chers collègues, à l’interruption prolongée des travaux parlementaires en raison des élections présidentielle, puis législatives ; toutefois, compte tenu du rythme auquel nous examinons les projets de loi, peut-être rattraperons-nous ce retard ! (Sourires.) Il s’agit de la loi relative aux certificats d’obtention végétale, de la loi portant diverses dispositions d’ordre cynégétique, de la loi relative à la majoration des droits à construire et de celle qui vise précisément à abroger cette dernière.

Les deux textes relatifs à la majoration des droits à construire étaient d’application directe. On peut cependant regretter que la loi portant diverses dispositions d’ordre cynégétique soit encore aujourd’hui, quinze mois après sa promulgation, totalement inapplicable, alors qu’un seul décret en Conseil d’État est attendu.

Je ne peux que rappeler qu’il s’agit d’une loi d’origine parlementaire, provenant, cette fois-ci de l’Assemblée nationale, mais un texte quasiment identique avait été déposé par notre collègue Ladislas Poniatowski. Malgré ce consensus parlementaire, l’administration ne semble pas se précipiter pour chausser ses bottes et rédiger les textes d’application...

Je regrette également que la loi relative aux certificats d’obtention végétale ne soit, à ce jour, toujours applicable qu’à hauteur de 12 %. On peut d’autant plus dénoncer cette lenteur qu’il s’agit, là encore, d’un texte d’initiative sénatoriale, déposé par notre collègue Christian Demuynck. Certes, ce texte n’a pas fait l’objet du même consensus politique que la loi portant diverses dispositions d’ordre cynégétique, comme en témoigne le débat qui a eu lieu dans cet hémicycle le 27 mars dernier, mais, a priori, le ministre de l’agriculture s’est engagé à publier prochainement les décrets à l’issue d’une concertation avec les parties prenantes, et je sais qu’elle a lieu. Je souhaite, monsieur le ministre, avoir confirmation de cet engagement.

Je souhaite également insister sur le fait qu’une majorité de nos lois en stock n’est que partiellement applicable, ce qui est loin d’être satisfaisant. Dans certains cas, d’importants retards sont à déplorer. Il en est ainsi de la loi de 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, qui n’est applicable qu’à hauteur de 88 %, et de la loi, également de 2005, relative à la régulation des activités postales – la durée des débats sur ce texte nous laisse à tous un souvenir particulier –, applicable à seulement 80 %.

La loi de 2010 portant réforme du crédit à la consommation n’est, quant à elle, applicable à ce jour qu’à hauteur de 89 %. Même si les mesures restant à prendre ne portent pas sur les aspects fondamentaux du texte, il faut déplorer que les modalités de procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires des mutuelles et des institutions de prévoyance ne puissent, faute de mesures réglementaires, être concrètement envisagées.

Dans quelques jours, nous commencerons l’examen du projet de loi relatif à la consommation, dans lequel un amendement du Gouvernement a introduit le registre national des crédits aux particuliers. Il eut été peut-être pertinent de pouvoir évaluer auparavant l’efficacité de tous les dispositifs précédents, plus simplement de la loi dite « Lagarde ».

Comme l’année dernière, je tiens également à déplorer les « défaillances » de l’administration s’agissant du dépôt des rapports au Parlement prévus par les différents textes de loi. Et la remise de tels rapports n’est pas plus effective lorsqu’il s’agit d’une disposition initiale du Gouvernement. Tout le monde est donc logé à la même enseigne, monsieur le ministre, mais cela donne à réfléchir : il faut absolument combattre cette solution de facilité qui consiste à prévoir un rapport sur un dispositif qui ne peut être adopté dans la loi. Je ne reviendrai pas sur le débat relatif au nombre de rapports demandés : vous connaissez ma position. Il me semble regrettable de réclamer la remise d’un rapport sur un texte relativement important dans les six mois suivant son entrée en vigueur, car on sera incapable non seulement de le produire, mais aussi d’évaluer les effets proprement dits de la loi.

Je constate encore que le projet de loi relatif à la consommation tel qu’adopté ces jours-ci par la commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale n’échappe pas à ce travers.

Pour notre bilan 2011-2012, les chiffres sont éloquents : sur les 52 rapports prévus par les 24 lois suivies par notre commission des affaires économiques, seuls 20 avaient été déposés au 31 mars dernier ! Certains rapports attendus sont prévus par des lois datant de 2004... Or 7 rapports prévus par la loi de 2008 de modernisation de l’économie n’ont, par exemple, toujours pas été déposés.

Cette remarque m’amène, comme la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, à m’interroger sur le devenir de mesures législatives anciennes, qui, au bout de sept ou huit ans, ne sont toujours pas applicables. À titre d’exemple, je citerai, dans le secteur de l’énergie, la loi du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique : a priori, trois décrets en Conseil d’État sont encore attendus pour appliquer les articles 60, 94 et 100 et l’administration a fait part de ses interrogations sur le bien-fondé même de ces dispositifs et sur les risques d’effets contre-productifs, liés à l’évolution du contexte économique, des technologies, que je peux comprendre. Mais dans un tel cas de figure, il faut supprimer les mesures en cause ! Le statu quo au bout de huit ans n’est plus acceptable et il faut éventuellement que le Gouvernement propose une modification de la loi elle-même si la nécessité d’adapter ces dispositifs s’impose. À propos également du domaine de l’énergie, lors de la discussion de la future loi sur la transition énergétique, ne pourrait-on pas faire le ménage sur les lois antérieures ?

Bien plus, lorsque de tels retards sont constatés, ne faudrait-il pas engager une réflexion sur « l’obsolescence » de telle ou telle mesure législative en déshérence ? C’est pourquoi j’ai déjà proposé à maintes reprises dans cette enceinte que les textes soient « biodégradables » au bout de cinq ans si l’ensemble des décrets ne sont pas parus et appliqués. Je le reconnais, mon propos est quelque peu provocateur, mais il faut fixer un délai raisonnable de parution des décrets, faute de quoi plus personne ne saura quelles dispositions de la loi en question sont réellement applicables. Bien sûr, je connais l’adage selon lequel nul n’est censé ignorer la loi, mais comment comprendre celle-ci lorsque les décrets d’application ne sont pas parus ?

En conclusion, je souhaite insister sur la coopération très intéressante qui s’établit en matière de contrôle de l’application des lois, à travers les rapports d’information thématiques confiés à des binômes, voire des trinômes, de sénateurs.

Notre collègue Jean-Jacques Lasserre participe ainsi actuellement, aux côtés de nos collègues Luc Carvounas et Louis Nègre, à la rédaction du rapport sur l’application de la loi de 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, que nous devrions examiner au début du mois prochain.

Au-delà de l’examen strictement quantitatif du bilan des textes d’application, ces rapports permettent d’apprécier l’effectivité de l’application d’une loi au regard des objectifs fixés par le législateur. C’est comme cela que doit s’entendre la fonction de contrôle du Parlement reconnue par la réforme constitutionnelle de 2008. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer les conditions dans lesquelles intervient, pour la deuxième fois au Sénat, ce débat en séance publique consacré au bilan annuel de l’application des lois. Il permet, en effet, de donner un débouché plus concret au suivi des mesures réglementaires d’application effectué de longue date – depuis plus de quarante ans, comme vous le rappeliez tout à l’heure, monsieur le président Jean-Pierre Bel – par les commissions permanentes, ainsi qu’à leurs remarques sur les retards ou les défauts de mise en œuvre.

Le rapport, très complet, publié par la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois dresse la synthèse de ces observations et les met en perspective.

Cette année, – le président de cette commission, David Assouline, l’a souligné – ce document est accompagné de réflexions plus larges, qui appellent à développer l’évaluation de la législation, à laquelle le Sénat contribue en menant des travaux de contrôle ciblés et approfondis sur des textes ou des problématiques spécifiques. Ces réflexions soulignent également la nécessité de travailler afin que la loi soit de meilleure qualité. Comme vous, monsieur le ministre, je considère qu’il ne faut plus de loi fourre-tout. À cette fin, je suis convaincue de l’utilité des échanges réguliers qui se sont établis entre la commission sénatoriale et l’exécutif, notamment avec le ministre chargé des relations avec le Parlement et le Secrétaire général du Gouvernement.

J’en viens maintenant aux aspects – c’est ce qui justifie ma présence ce soir parmi vous, mes chers collègues – relevant plus particulièrement du champ de compétence de la commission des affaires sociales, que j’ai l’honneur et le grand plaisir de présider.

Au cours de la période de référence retenue pour ce bilan, le Parlement a adopté douze lois examinées au fond par notre commission, soit un niveau inégalé depuis la session 2007-2008.

On constate, tout d’abord, que les efforts réalisés ces dernières années par le pouvoir exécutif pour assurer la mise en œuvre effective des dispositions législatives se sont poursuivis, ce qui se traduit par des niveaux d’application plus élevés qu’il y a sept ou huit ans.

Sur les douze lois que j’ai mentionnées, cinq sont applicables en totalité. Cette proportion de textes applicables dans l’année qui suit leur adoption est parmi les plus élevées enregistrées ces dernières années, même s’il faut souligner qu’une loi, qui revêt à nos yeux une grande importance, à savoir celle qui est relative au suivi des enfants en danger par la transmission des informations, n’est toujours pas applicable, alors qu’elle a été votée par notre assemblée à l’unanimité.

Au total, sur les 152 mesures d’application prévues par ces textes législatifs, près d’une centaine est intervenue entre le 1er janvier 2012 et le 31 mars 2013, soit un taux de 64 %, qui s’inscrit, lui aussi, dans la fourchette haute des résultats constatés lors des dernières sessions.

Autre motif de satisfaction, déjà souligné par le président Assouline, alors que neuf des douze lois étudiées étaient d’origine parlementaire, elles sont sensiblement appliquées au même niveau que les lois d’origine gouvernementale : le taux d’application des textes s’établit respectivement à 60 % pour les propositions de loi et à 66 % pour les projets de loi. Monsieur le ministre, j’ai bien pris note de l’inégalité qui persiste entre les deux assemblées, et je vous fais confiance pour essayer de la pallier.

En revanche, moins de la moitié des mesures d’application relatives aux textes relevant de notre commission sont intervenues dans le délai de six mois suivant la promulgation de la loi qui avait été fixé par le précédent gouvernement et que vous avez confirmé, monsieur le ministre. Cet objectif paraît donc toujours assez ambitieux au regard des pratiques constatées.

Pour que ce bilan soit le plus complet possible, il faut ajouter que, durant la période de référence, sont également intervenues cinquante-quatre mesures réglementaires se rapportant à des lois promulguées antérieurement et relevant du champ de compétence de notre commission des affaires sociales. Les lois de financement de la sécurité sociale figurent ainsi parmi les textes bénéficiant des meilleurs taux d’application. C’est le cas aussi de deux textes majeurs adoptés sur l’initiative du précédent gouvernement : la loi portant réforme des retraites et la loi HPST, « hôpital, patients, santé, territoires », dont les taux d’application se situent autour de 90 %.

Ce bilan porte sur des textes adoptés sous la précédente législature. Je rejoins, à ce sujet, l’analyse figurant dans le rapport du président Assouline sur l’incidence de l’alternance politique en matière de parution des textes d’application.

On constate, en premier lieu, que le gouvernement précédent s’est logiquement attaché à édicter de nombreux textes d’application avant l’échéance du mois de mai 2012, ce qui a joué positivement sur les statistiques que je viens d’évoquer.

Le rythme de parution s’est ensuite ralenti, mais il a repris à partir de septembre 2012, permettant l’application de dispositions votées sous la précédente législature, comme celles qui sont relatives au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, ou à la sécurité sanitaire du médicament.

Quelques dispositions antérieures au mois de mai 2012 qui étaient en attente d’application ont été abrogées ou modifiées depuis lors par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ou par d’autres textes. Leur nombre est toutefois assez limité.

Finalement, sur un plan strictement quantitatif, le changement de Gouvernement ne semble pas avoir eu d’impact majeur sur le niveau de publication des textes d’application.

Dans certains cas, les changements de priorité ou la préparation de futures réformes peuvent conduire à suspendre le processus de mise en œuvre des mesures réglementaires. Je pense à des dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 qui concernaient l’aide à la complémentaire santé ou l’attribution par les agences régionales de santé de « primes » aux établissements de santé ayant atteint leurs objectifs. Les réflexions lancées sur l’hôpital ou sur la couverture complémentaire santé pourraient justifier que la mise en œuvre de ces dispositions soit mise en suspens.

Mais ces considérations politiques légitimes n’expliquent pas, loin de là, l’essentiel des défauts de parution.

Comme les années précédentes, la commission des affaires sociales a constaté une distorsion assez sensible, en matière d’application, entre les dispositions qui figuraient dans le texte d’origine et celles qui ont été introduites par amendement parlementaire.

On peut donc relever une plus grande difficulté, ou, peut-être, un moindre empressement, à mettre en œuvre les mesures introduites par voie d’amendement au cours de la discussion des textes par les parlementaires.

Ce constat vaut plus encore pour les demandes de rapports inscrites dans nombre de textes législatifs. Sur un total de vingt-deux demandes de rapports figurant dans les douze lois concernées, trois seulement, c’est-à-dire moins de une sur sept, ont été concrétisées à la date du 31 mars, ce qui illustre les limites de ce type de disposition. Ce chiffre est bien inférieur à ceux qui avaient été annoncés. Vous parliez de quelque 50 %, monsieur Assouline. Or les résultats enregistrés par la commission des affaires sociales sont bien en deçà.

Je partage votre réflexion sur l’utilité de ces rapports et de l’application de l’article 40 de la Constitution. Peut-être faudrait-il mener une réflexion plus large sur ces deux questions, qui se recoupent.

Pour terminer, je voudrais mentionner quelques points particuliers. S’agissant de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, qui faisait suite à l’affaire du Mediator, environ 70 % des mesures d’application attendues étaient intervenues au 31 mars. Depuis lors sont parus deux décrets qui touchent à la question sensible de la transparence. C’est ainsi qu’a été instituée une charte de l’expertise sanitaire et qu’ont été précisées les règles relatives aux avantages consentis par les entreprises. Cette loi importante bénéficie donc d’un taux d’application satisfaisant, même si certaines mesures réglementaires sont toujours en attente.

La loi du 28 juillet 2011 sur les MDPH est quant à elle appliquée à 60 %. Néanmoins, l’essentiel des mesures d’application ont été prises assez tardivement, par un décret du 18 décembre 2012. Parmi les mesures en attente figure l’arrêté ministériel qui doit définir le contenu des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens entre les MDPH, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, le conseil général et l’État.

Je voulais dire un mot de la loi Fourcade du 10 août 2011, modifiant certaines dispositions de la loi HPST, mais je m’en abstiendrai faute de temps ; je le regrette.

Le taux d’application est moins satisfaisant encore pour la loi du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine : seules deux mesures sur neuf ont été prises. Il est regrettable que ce texte d’initiative parlementaire, adopté définitivement trois ans après sa première lecture à l’Assemblée nationale, soit en grande partie privé d’effet.

Enfin, j’ai mentionné au début de mon propos l’inapplicabilité de la loi du 5 mars 2012 relative au suivi des enfants en danger par la transmission des informations ; je conclurai sur ce point. Monsieur le ministre, le ministère des affaires sociales nous avait fait savoir que la parution du décret était en bonne voie, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, ayant rendu un avis favorable en février. Cependant, cette parution n’est toujours pas intervenue. Je rappelle qu’il s’agit de faciliter la transmission des informations en possession des départements sur les déménagements des familles, ce qui devrait lever un obstacle à la protection de l’enfance en danger. Peut-être pourrez-vous, monsieur le ministre, nous donner des assurances quant à la parution prochaine de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur plusieurs travées du groupe socialiste. – Mme Corinne Bouchoux et M. François Trucy applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, le bilan 2011-2012 se caractérise par un nombre de textes en hausse, des lois principalement d’origine parlementaire et des délais de mise en application raccourcis.

Cinq lois relevant de la compétence de notre commission ont été promulguées : la loi du 20 juillet 2011 relative à la régulation du système de distribution de la presse ; la loi du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée ; la loi du 1er février 2012 visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs ; la loi du 1er mars 2012 relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle ; la loi du 12 mars 2012 tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles.

Une proposition de loi relative au patrimoine monumental de l’État, adoptée en première lecture au Sénat le 26 janvier 2011, puis en deuxième lecture le 3 novembre 2011, n’a pas eu de suite à l’Assemblée nationale. La proposition de loi visant à instaurer la scolarité obligatoire à trois ans a été presque entièrement frappée par l’article 40 de la Constitution, sur demande du ministre. Ainsi amputée, elle a été retirée par son auteur lors de sa discussion en séance publique.

Sur les cinq lois promulguées, quatre étaient issues de propositions de loi déposées par des sénateurs ou des députés, dont deux par Jacques Legendre. Cela représente un taux d’initiative parlementaire de 80 %. Un seul projet de loi a été soumis à la commission de la culture : il s’agit du projet de loi relatif à la rémunération pour copie privée. Le gouvernement précédent avait mis en débat des projets sensibles dès le début du quinquennat : universités, audiovisuel, Hadopi. De même, le gouvernement actuel a programmé rapidement l’examen du projet de loi pour la refondation de l’école de la République et du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.

Par ailleurs, la commission de la culture a rendu deux avis sur des textes législatifs : la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, toujours en cours de discussion, et la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives.

J’en viens maintenant aux modalités d’application des lois. Aucune des lois promulguées dans les secteurs de compétence de la commission au cours de la session ordinaire 2011-2012 n’était d’application directe. Deux lois sont devenues applicables. La loi relative à la régulation du système de distribution de la presse, qui vise à moderniser les mécanismes de régulation du secteur de la distribution de la presse institués par la loi du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite « loi Bichet », est devenue totalement applicable.

La commission de la culture a eu l’occasion de compléter ce bilan chiffré en organisant, en mars dernier, des auditions sur la situation du groupe Presstalis. Tous nos interlocuteurs se sont félicités des avancées apportées par la loi relative à la régulation du système de distribution de la presse, dont l’initiative revenait à nos collègues Jacques Legendre et David Assouline. Le dur conflit social qui affectait cette entreprise est en voie de règlement, et je crois que nous avons contribué à l’expression de chacune des parties.

La loi relative à l’exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle est également devenue applicable. Son décret d’application a été pris le 27 février 2013.

Deux autres lois sont partiellement applicables : s'agissant de la loi visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs, trois articles requièrent des mesures d’application, et un seul est devenu applicable ; pour ce qui est de la loi tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles, la mise en place du passeport biologique demande des mesures d’application. Une seule des deux mesures prévues a été publiée.

Enfin, la loi relative à la rémunération pour copie privée n’est toujours pas mise en application. Un décret en Conseil d’État est prévu mais n’a pas encore été pris ; le Gouvernement avait pourtant engagé la procédure accélérée sur le projet de loi. À ce jour, seul un projet de décret existe. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions quant au calendrier ?

Après avoir dressé ce bilan de la session écoulée, je dirai quelques mots de la précédente législature. Les grandes observations de l’année dernière, en particulier la diminution du délai moyen de mise en application, restent d’actualité. La loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, adoptée juste avant la fin de la période analysée l’année passée, est désormais entrée en application.

S’agissant des lois plus anciennes, je n’ai qu’un élément nouveau à vous apporter : les retards s’accumulent d’autant plus que les textes ont été initiés par des gouvernements précédents. Les priorités politiques ont évolué, les données technologiques aussi, notamment dans le secteur des médias. Pour ne prendre qu’un exemple, il est un peu illusoire de continuer à comptabiliser les textes réglementaires d’application de lois dont la plus ancienne remonte à 1995. Alors que nous avons examiné aujourd’hui même en deuxième lecture le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, les mesures attendues pour l’application de la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école n’ont pas toutes été prises. Mais sont-elles toujours d’actualité ?

En revanche, je crois que nous pouvons nous préoccuper du nombre de rapports en attente de parution, qui s’élève à trente et un depuis 2000. Cette absence de publication concerne pour l’essentiel le secteur très sensible de la communication audiovisuelle. À ce bilan quantitatif, qui porte uniquement sur l’activité législative, il faudrait ajouter les neuf rapports publiés dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances et les rapports d’information.

Les conclusions de nos deux missions d’information, l’une sur la carte scolaire et l’autre sur le métier d’enseignant, ont eu des suites. La circulaire sur la rentrée 2013 a modifié les critères de dérogation à l’affectation dans le collège du secteur, et notre collègue Françoise Cartron a rappelé les conclusions de la mission quant à l’utilisation des options rares comme moyen de contournement de la carte scolaire. C’est un bel exemple des suites qui peuvent être données à nos travaux.

L’inscription dans le projet de loi pour la refondation de l’école de la République, sur l’initiative du Sénat, de la possibilité de créer des secteurs de recrutement communs à plusieurs collèges publics résulte directement d’une proposition que nous avions formulée.

La discussion, la semaine dernière, du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche a fait l’objet de nombreuses références, sur toutes les travées, à nos travaux, et notamment au bilan de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU », réalisé au titre du contrôle de l’application des lois, et au rapport sur le financement des universités rédigé par Dominique Gillot et Philippe Adnot au nom, respectivement, de la commission de la culture et de la commission des finances.

Le texte a également été enrichi par les travaux de différentes commissions et missions : l’obligation de publication des diplômes préparés par les établissements d’enseignement, destinée à prévenir la création de formations qui ne correspondent à aucune réalité, a été insérée dans le projet de loi sous la forme d’un article additionnel traduction d’une proposition de la mission commune d’information sur les interventions à visée esthétique et de la commission d’enquête sur les dérives sectaires. C’est également dans la droite ligne de ses conclusions que nous avons adopté un amendement présenté par Jacques Mézard et Alain Milon, respectivement rapporteur et président de cette commission d’enquête, qui visait à interdire aux professionnels radiés de faire état de leurs titres de docteur. Je citerai un dernier exemple : le renforcement des missions du service de santé aux étudiants, qui fait suite aux travaux de Catherine Procaccia et Ronan Kerdraon.

C’est dire l’importance du véritable outil de suivi des recommandations formulées par les différentes instances de travail et de contrôle permanentes ou temporaires dont nous disposons désormais.

Je tiens à mentionner également notre souci constant de rester vigilants au sujet des discriminations de genre, que nous traquons dans chacun des textes que nous étudions, en collaboration avec la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Adoption, évaluation, définition de perspectives d’évolution, révision éventuelle. Mes chers collègues, sans utiliser une langue qui vous froisserait, je pense que nous aurions tous intérêt à trouver des modalités d’exposé écrit des faits – tableaux, rapports, nombres – et à nous contenter de développer nos commentaires à cette tribune, afin de rendre une telle soirée plus vivante l’année prochaine. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission du développement durable.

M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, je voudrais saluer à mon tour le travail réalisé par la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois sous l’impulsion énergique de son président, David Assouline.

Votre rapport, cher collègue, effectue une synthèse très instructive des observations de nos différentes commissions. Il met en évidence la nécessité d’un suivi attentif de l’application des lois : cette application doit être à la fois effective et conforme à la volonté du législateur.

Cette procédure de contrôle, spécifique à notre assemblée, traduit bien l’intérêt qu’attache, à juste titre, le Sénat à la mise en œuvre des textes votés par le Parlement. Malheureusement, nous connaissons tous des lois qui, faute de décrets, ne peuvent être appliquées, ou, à l’inverse, des décrets qui s’éloignent manifestement de l’intention du législateur. Il est important que nous nous saisissions de ces dysfonctionnements et que nous demandions des explications au Gouvernement. En effet, ce « service après-vote » fait partie de nos missions.

C’est la première fois que la commission du développement durable, âgée d’à peine plus d’un an, dresse un tel bilan. Notre travail de suivi ne s’est pas limité aux seuls textes législatifs dont notre commission a été saisie. Lors de la scission de l’ancienne commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, nous avons, avec M. Daniel Raoul, réalisé un travail très précis de répartition des textes entre nos deux commissions selon nos domaines de compétences respectifs.

Au total, la commission du développement durable a procédé cette année à une veille sur dix-sept lois. Trois d’entre elles ont été adoptées depuis la publication du précédent rapport sur l’application des lois.

Sur un plan quantitatif d’abord, voici quelques chiffres.

Sur les 17 lois examinées, 2 sont totalement applicables. Ainsi, toutes les mesures réglementaires d’application ont été prises pour la loi du 5 décembre 2011 relative au plan d’aménagement et de développement durable de Corse et la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques.

Par ailleurs, 15 lois sont partiellement applicables, dont 11 à plus de 75 %. Deux lois méritent en particulier d’être mentionnées. La première est la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 ». Pour cette loi, applicable à 87 %, de nombreux textes d’application ont été publiés cette année sur les quelque 200 mesures réglementaires attendues. La seconde est la loi du 24 janvier 2012 relative à Voies navigables de France, dont les principaux textes d’application ont été très rapidement publiés, traduisant ainsi la préoccupation largement consensuelle d’une nécessaire relance de la voie d’eau dans notre pays.

Enfin, aucune loi n’est totalement inapplicable, ce qui est naturellement satisfaisant, mais surtout bien normal.

D’une manière générale, nous avons observé une tendance à l’amélioration du taux d’application des lois votées.

Il est impossible d’établir des comparaisons chiffrées cette année, car la période de référence du rapport a été modifiée. Mais cette tendance, qui avait déjà été observée dans les deux ou trois précédents rapports, semble se poursuivre, et c’est une très bonne chose.

Une véritable prise de conscience de cette nécessité s’opère à Matignon et dans les ministères – vous nous le confirmerez, monsieur le ministre. Cette amélioration reste toutefois fragile. Les efforts accomplis par les services ministériels doivent donc se maintenir et le nouvel élan donné au suivi de ces mesures par la commission pour le contrôle de l’application des lois doit les inciter à continuer.

Trois motifs d’insatisfaction ont néanmoins été soulignés par notre commission.

Le premier, hélas récurrent, est celui du taux d’application des lois votées après engagement de la procédure accélérée. Une fois de plus, on ne constate aucune différence entre ce taux et celui qui est enregistré pour les lois pour lesquelles la procédure parlementaire normale a été suivie.

Je prendrai pour exemple une loi récente, la loi du 22 février 2012 portant réforme des ports d’outre-mer relevant de l’État et diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports. En treize mois, seules cinq des dix mesures réglementaires prévues ont été prises, aboutissant ainsi à un taux d’application de 50 % seulement. Or cette loi, qui était attendue, revêt une importance réelle pour les ports et l’économie des territoires ultramarins.

Un deuxième sujet de préoccupation est l’insuffisance du nombre de rapports publiés sur le total de ceux que le Gouvernement doit remettre au Parlement, en application de dispositions législatives. Ainsi, sur les 40 rapports prévus par les lois dont nous avons assuré le suivi, seuls 23 avaient été publiés au 31 mars 2013. Nous attendons encore, notamment, 8 rapports dont l’élaboration est prévue dans la loi Grenelle 2 et 3 rapports issus de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris.

Le troisième point problématique, sans doute le plus important, est le nombre encore trop élevé de lois partiellement applicables. Il y en a 15 parmi les 17 lois dont nous avons assuré la veille.

Je ne peux pas toutes les mentionner ici, mais je voudrais évoquer quelques exemples qui me paraissent emblématiques de ce non-respect de la volonté du législateur. Nous attendons, depuis 2001, le décret permettant la création d’un fichier des bateaux de navigation intérieure. Nous attendons, depuis 2002, le décret en Conseil d’État sur la sécurité des ouvrages d’infrastructures de navigation intérieure. Plusieurs décrets d’application de la loi de 2006 concernant le transport maritime ne sont toujours pas pris. La loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique est en panne.

Certes, plusieurs textes législatifs annoncés devraient permettre d’avancer sur ces sujets, par exemple dans le domaine du numérique ou dans le cadre de la réforme ferroviaire. Mais la mise en œuvre de ce que nous avons décidé voilà déjà plusieurs années n’a que trop tardé.

Comme vous le constatez, monsieur le ministre, mes chers collègues, il existe encore une vraie marge de progrès, notamment pour respecter la circulaire de 2008 relative à l’application des lois, dans laquelle le Gouvernement s’était engagé à respecter l’objectif consistant à prendre toutes les mesures réglementaires nécessaires dans un délai de six mois suivant la publication de chaque loi.

Il me semble aussi qu’il nous revient d’être plus attentifs à ce que nous demandons lorsque nous votons la loi. En effet, il nous faut non seulement éviter d’avoir systématiquement recours aux mesures réglementaires lorsque nous ne parvenons pas à nous mettre d’accord, mais aussi veiller à ne pas déterminer des normes toujours plus nombreuses et contraignantes pour nos collectivités, nos entreprises et nos concitoyens.

C’est au prix de cette exigence envers nous-mêmes que nous pourrons renforcer notre contrôle sur le Gouvernement. (Mmes Corinne Bouchoux et Mme la présidente de la commission des affaires sociales ainsi que M. Yves Rome applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le contrôle de l’application des lois est bien entendu une tradition de notre assemblée, et la commission des finances s’efforce d’y participer.

Nous assurons, comme vous le savez, le suivi d’un grand nombre de textes réglementaires, parallèlement à notre activité de contrôle budgétaire.

Au cours de la période sous revue, soit de juillet 2011 à septembre 2012, la commission des finances a été concernée par 9 lois nouvelles, qui, cette fois-ci, ont toutes été des lois de finances et auxquelles correspondaient 118 mesures d’application. En ajoutant les textes prescrits par des lois antérieures, et non encore publiés, on constate que notre contrôle a porté sur 197 mesures attendues, issues de 21 lois.

Il convient de mettre en avant, à partir de ces premiers éléments, quelques données quantitatives, qui rejoignent les constats globaux formulés par le président de la commission pour le contrôle de l’application des lois.

En premier lieu, le taux de publication des mesures prévues par les textes examinés au fond par notre commission s’améliore : il s’établit à 76 % pour les lois nouvelles et à 68 % pour l’ensemble des textes dont nous assurons le suivi.

En second lieu, il semble que les textes « sortent » plus vite que ce n’était le cas auparavant. Concernant les lois adoptées pendant la période sous revue, 2011-2012, 62 % des textes réglementaires ont été pris dans le délai de six mois prévu par la circulaire du Premier ministre du 1er juillet 2004.

Néanmoins, ces chiffres doivent être interprétés avec quelques précautions car, bien sûr, toutes les mesures ne se valent pas en importance et tous les retards ne présentent pas les mêmes inconvénients.

Certaines lois peuvent aussi être considérées comme étant en attente de mesures d’application alors que les textes non pris sont simplement devenus sans objet. La question qui se pose est donc celle du délai dans lequel les mesures sans objet devraient être abrogées.

En outre, certains décrets peuvent ne pas sortir parce que le législateur, lui-même, tergiverse. Il en est allé ainsi des décrets devant préciser les modalités de mise en œuvre des fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE. Prévus par la loi de finances pour 2011, ces décrets ont été publiés seulement deux ans et demi plus tard, en avril 2013 ! Entre-temps, le Parlement avait décidé de repousser la création de ces fonds.

Dans d’autres cas, le législateur peut avoir exprimé une volonté claire, mais les mesures ne sont pas mises en œuvre. Il convient bien évidemment de s’interroger sur ce type de situations.

Je relève par exemple l’absence d’application de l’article 242 septies du code général des impôts, issu de l’article 101 de la loi de finances pour 2011 et de l’article 85 de la loi de finances pour 2012, dont l’objet était de renforcer la transparence de la défiscalisation des investissements réalisés outre-mer en prévoyant de réglementer les cabinets de défiscalisation.

L’exercice de cette profession devait être soumis à la signature d’une charte de déontologie. De plus, l’article de la loi disposait que les cabinets déclarent annuellement à l’administration fiscale les opérations réalisées, de façon à améliorer le suivi de cette dépense fiscale, notamment s’agissant des investissements hors agrément. Enfin, l’article prévoyait une mise en concurrence des cabinets de défiscalisation dans le cas de certains investissements exploités par des sociétés majoritairement détenues par une personne publique.

Il y a unanimité, mes chers collègues, sur la nécessité de mieux encadrer et de rendre transparente l’activité de ces cabinets de défiscalisation. Pourtant, deux ans et demi plus tard, l’exigence de signer une charte de déontologie comme la mise en concurrence de ces cabinets pour certains investissements ne sont toujours pas appliquées. Certains interlocuteurs me disent que le décret n’est plus nécessaire, d’autres le réclament. Quoi qu’il en soit, il faut que ces mesures s’appliquent ! C’est pourquoi, monsieur le ministre, je me permets de vous signaler tout particulièrement ce cas de figure.

Inversement, nous pouvons parfois nous réjouir de constater que les textes les plus politiques reçoivent une mise en œuvre rapide. Ainsi, les deux premiers collectifs budgétaires de 2012, adoptés juste avant et juste après les élections présidentielle et législatives, ont tous deux reçu une application rapide et pratiquement intégrale.

Au-delà de ces aspects quantitatifs, je me réjouis que le contrôle de l’application des lois devienne aussi plus qualitatif.

À cet égard, j’ai le souvenir d’avoir élaboré, en 2004, un rapport intitulé La loi de sécurité financière : un an après, rapport dans lequel je me livrais à un bilan de l’application de cette loi. C’était une initiative quelque peu isolée, du fait du temps disponible au sein de la commission, mais, aujourd’hui, cette démarche se développe, voire se généralise et c’est une excellente chose.

C’est pourquoi il est utile, chacun s’en rend compte, de disposer d’une commission chargée du contrôle de l’application des lois et, me rapprochant de ma conclusion, je me permettrai de m’arrêter un instant sur le caractère exemplaire, à mes yeux, des suites données au rapport que cette commission a réalisé sur la suggestion de notre commission des finances : il s’agit du rapport de Muguette Dini et Anne-Marie Escoffier sur la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite « loi Lagarde », qui comprenait notamment vingt propositions pour approfondir la réforme de 2010.

Dix de ces propositions concernaient les procédures de surendettement et, pour la plupart, elles ont été traduites dans des amendements adoptés, à l’Assemblée et au Sénat, dans le cadre de l’examen du projet de loi bancaire.

Dix autres propositions étaient relatives au secteur du crédit à la consommation. Plusieurs ont déjà été intégrées dans le projet de loi relatif à la consommation actuellement en débat à l’Assemblée nationale, notamment concernant la déliaison des cartes de fidélité et des cartes de crédit, la rémunération des vendeurs, ou encore la poursuite des travaux du Comité de suivi de la réforme de l’usure.

J’espère donc que le deuxième rapport suggéré par notre commission des finances, consacré au régime de l’auto-entrepreneur, connaîtra le même succès…

Pour conclure, je mentionnerai le fait que les rapports demandés au Gouvernement dans les différentes lois ne sont pas toujours rendus dans les temps, voire pas rendus du tout.

Il faut convenir qu’il est souvent pratique, pour trouver une issue à une discussion, de prescrire un rapport. Mais c’est une potion, si j’ose ainsi m’exprimer, monsieur le ministre, dont il ne faut certainement pas abuser. Il faut tâcher de résister à la tentation de demander l’établissement de rapports pour des effets de séance, lorsqu’on recherche une sortie qui contente tout le monde au détour d’un débat difficile. Mais les rapports sont plus légitimes lorsque notre assemblée, par exemple, pense qu’ils permettront de faire progresser la réflexion sur un sujet et d’initier de nouvelles mesures.

Plusieurs rapports significatifs sont actuellement en souffrance.

L’exemple de l’article 79 de la loi de finances pour 2013 est assez caricatural. Cet article dispose que « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er mai 2013, le rapport mentionné à l’article 110 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 étudiant l’opportunité et la possibilité de transformer en dotations budgétaires tout ou partie des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission " Outre-mer " ». C’est une idée ancienne des commissions des finances des deux assemblées et il est regrettable que nous n’ayons pas de données pour entrer véritablement dans ce débat.

Il y a aussi le sujet difficile du Crédit immobilier de France, l’article 108 de la loi de finances pour 2013 demandant la remise, avant le 30 mars 2013, d’un rapport sur les résultats de l’examen de la situation de cet établissement.

Je compte donc sur vous, monsieur le ministre, pour relayer ces attentes. Je remercie vivement la commission compétente pour l’organisation de ce débat et, surtout, je vous remercie, mes chers collègues, de votre patience et votre indulgence à l’égard de propos qui, j’en ai conscience, sont quelque peu arides. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mes chers collègues, je vais à mon tour vous servir quelques statistiques. (Sourires.)

Mme Isabelle Debré. Oh là ! Pas trop ! (Nouveaux sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Dans la période de référence, dont chacun sait maintenant qu’elle va de juillet 2011 à septembre 2012, notre commission des lois a eu le bonheur de participer à l’examen de 12 projets de loi, tous en procédure accélérée, monsieur le ministre. Il y a là une déviance, qui concerne d’ailleurs plusieurs gouvernements, surtout l’un plutôt que les autres, mais qui est fâcheuse, et cela a eu tendance à se répéter. Vous le savez, la procédure dite accélérée doit être l’exception (M. Jean-Claude Lenoir s’entretient avec plusieurs de ses collègues de l'UMP.), et la procédure normale, monsieur Lenoir, la norme.

Par ailleurs, dans la même période, beaucoup de lois ont été votées, mais seulement 36 % des textes d’application sont parus à ce jour, ce qui est un peu décevant. Une fois de plus, je veux donc m’élever contre ce droit, absurde, dont disposent tous les ministres de tous les gouvernements de ne pas appliquer la loi. (M. François Trucy sourit.) Il leur suffit simplement de ne pas publier les décrets. Cela valait hier ; cela vaut aujourd’hui, mais j’espère que cela vaudra moins demain. C’est pourquoi nous avons un devoir de vigilance, que j’illustrerai par trois exemples.

Premier exemple, en 2008 – cela date un peu –, nous avons, ici, adopté une loi portant sur diverses dispositions ayant trait au droit funéraire, notamment sur les contrats obsèques.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Il s’agit d’un sujet sérieux,…

M. Jean-Claude Lenoir. Que vous connaissez bien !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. … mes chers collègues, chaque année, des millions de Français étant floués, parce que les sommes versées au titre des contrats obsèques ne sont pas revalorisées.

En 2008, le Parlement, à l’unanimité, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, madame Debré,…

Mme Isabelle Debré. Je n’ai rien dit ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. … a adopté des dispositions tendant à imposer la revalorisation au taux légal des sommes versées au titre de ces contrats.

Mme Cécile Cukierman. Sans intérêt !

M. Jean-Claude Lenoir. Autrement dit, on a enterré la loi !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Ces dispositions ayant été votées par le Parlement, elles devraient normalement s’appliquer. Mais la loi était à peine promulguée qu’à la direction de Bercy qui s’occupe des assurances on s’avisa qu’il n’était vraiment pas raisonnable de la mettre en œuvre. On nous expliqua longuement qu’elle était contraire à des règles européennes. Nous avons discuté, négocié, fait d’innombrables réunions pour réécrire le texte, de manière qu’il soit compatible avec lesdites règles. Pourtant, la discussion législative s’était déroulée normalement, en présence du Gouvernement, et la volonté était unanime.

Mes chers collègues, sachez que ces dispositions ne sont toujours pas applicables. En effet, je les ai reprises par amendements au projet de loi Lefebvre, lequel n’a pas prospéré, pour les raisons que chacun sait. Je les représente de nouveau dans la loi bancaire et j’espère qu’elles seront adoptées demain. Elles l’ont déjà été en première lecture par le Sénat, mais elles n’ont pas eu de succès à l’Assemblée nationale. Monsieur le ministre, soyez assuré que je me battrai toujours : si elles ne passent pas dans la loi bancaire, ce que je n’ose croire, ce sera pour le projet de loi sur la consommation. (Sourires sur plusieurs travées.) Voyez, monsieur le ministre, la ténacité qu’il faut pour simplement obtenir l’application d’un article de loi et mettre fin à une disposition qui porte préjudice à des millions de Français.

Deuxième exemple, il existe une loi de programmation relative à l’exécution des peines, sur laquelle notre commission des lois a beaucoup travaillé. Ce texte prévoit qu’un décret fixera les conditions dans lesquelles les personnels hospitaliers peuvent consacrer une partie de leur temps de service à la réalisation d’expertises ordonnées par l’autorité judiciaire. Cela n’est pas appliqué.

Les administrateurs de la commission des lois, que je salue, se sont tournés vers le ministère de la santé pour avoir des explications. Il leur a été répondu que cette mesure soulevait des réserves de la part des intersyndicales de praticiens hospitaliers. Mais c’est la loi ! Je le dis clairement : le ministère de la santé ne doit pas s’interroger pour savoir si la loi soulève des réticences de telle ou telle organisation professionnelle, par ailleurs hautement estimable. Elle doit simplement affirmer : nous devons appliquer la loi.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Ou l’abroger !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Très souvent, on ne considère pas comme naturel d’appliquer la loi. C’est tout de même étrange.

Troisième exemple, dont je dirai quelques mots puisqu’il me reste un peu de temps et qui va vous intéresser, monsieur le président du Sénat, les célèbres lois dites « Warsmann ». Notre collègue député des Ardennes s’était spécialisé dans les lois de simplification, qui, en général, démarraient avec une bonne centaine d’articles pour terminer à 250 articles au terme du parcours législatif.

Monsieur le ministre, vous avez été, comme moi-même, sensible au discours de M. le Président de la République sur le « choc de simplification ». Ces textes de simplification du droit, notamment la loi du 22 mars 2012, sont donc dans notre cœur de cible. Néanmoins, il faut savoir que la loi précitée prévoit 34 mesures d’application, dont 17 ne sont toujours pas parues.

Donc, simplifions, simplifions, mais publions les décrets !

D’ailleurs, j’attire votre attention sur une étrangeté que l’on peut relever sur le site internet Legifrance : il est fait état d’une publication des mesures d’application prévues aux articles L. 232-21, L. 232-22 et L. 232-23 du code de commerce envisagée pour le mois de juin… de l’année dernière ! (Sourires.) Vous pouvez vérifier, c’est toujours sur le site !

Mes chers collègues, la conclusion de mon propos est simple et va dans le sens des conclusions de tous les collègues qui m’ont précédé à cette tribune : il faut naturellement appliquer les lois. Je ne suis pas sans savoir que cela demande beaucoup de travail au Gouvernement, mais il s’agit d’un travail nécessaire eu égard au respect que nous devons tous à notre loi commune, qui nous permet de vivre ensemble. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – Mmes Corinne Bouchoux, Mme la présidente de la commission des affaires sociales ainsi que M. Pierre Hérisson applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mes chers collègues, le 6 décembre 2011, notre commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois se constituait.

Contrairement au travail que nous faisons aujourd’hui, son rôle ne se limite pas à lister les textes d’application publiés pour chaque loi promulguée. Il consiste également à contrôler, avec les acteurs de terrain, l’application concrète d’une loi, d’en apprécier les avancées mais aussi d’identifier ses dysfonctionnements et ses limites.

En tout cas, telle fut la démarche qu’Anne-Marie Escoffier et moi-même avons adoptée dans le cadre de notre rapport d’information sur la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dite « loi Lagarde ». Avec un taux de plus de 90 %, la mise en application de cette loi a été bien maîtrisée par le Gouvernement.

Lors de nos auditions et déplacements, nous avons constaté les avancées importantes permises par la loi en matière de crédit à la consommation et de traitement du surendettement des particuliers. Malgré tout, nous avons relevé quelques insuffisances, d’où nos 20 recommandations visant à compléter et améliorer la loi Lagarde.

J’ai eu le plaisir de voir plusieurs d’entre elles intégrées au titre VI du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, par le Gouvernement et par voie d’amendement, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. D’autres de ces recommandations pourront améliorer – je travaille en ce sens – le projet de loi relatif à la consommation. Nous avons donc le sentiment d’avoir été utiles dans notre contrôle.

Je souhaite souligner un autre exemple positif en matière d’application des lois, même s’il a été long à se mettre en place : je veux parler du dépistage précoce des troubles de l’audition.

Cette disposition a été adoptée, après de longs et vifs débats, dans le cadre du PLFSS pour 2012. Il convient de noter qu’elle n’est pas soumise à la publication d’un texte réglementaire. En effet, conformément aux termes du texte de loi, chaque agence régionale de santé, ARS, doit élaborer, en concertation avec les associations et les professionnels de santé concernés par les troubles de l’audition, un programme de dépistage. Après des débuts très laborieux, voire anarchiques, ce travail de concertation est lancé. Il porte sur l’élaboration d’un cahier des charges national, qui comportera des informations méthodologiques, et sur les dispositifs d’appareillage.

Les ARS auront, elles, le choix entre deux tests.

Quant au financement, il a été affecté dans le cadre du forfait périnatalité, dont un peu plus de 18 euros par naissance, qui permettront aux maternités d’acquérir le matériel nécessaire au dépistage.

Les professionnels de santé concernés estiment que, dans trois ans, ce dépistage sera effectif sur tout le territoire. Il aura quand même fallu quatre ans pour l’application totale de cette loi.

Je poursuivrai mon propos par deux exemples négatifs, dont l’un a été évoqué par Mme Annie David, présidente de notre commission des affaires sociales.

Le premier a trait aux lois votées qui restent inappliquées faute de textes d’application publiés par le Gouvernement. C’est le cas de loi du 5 mars 2012 relative au suivi des enfants en danger par la transmission des informations.

Ce texte est venu corriger une insuffisance de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, qui consacre le rôle de chef de file du président du conseil général. La cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes, placée sous son autorité, analyse les informations qui lui parviennent et diligente les enquêtes sociales afin de déterminer si les enfants sont en danger ou risquent de l’être.

Or cette cellule se heurte à des difficultés lorsqu’une famille titulaire d’une prestation d’aide sociale à l’enfance déménage dans un autre département. Aussi surprenant que cela puisse paraître, aucune coordination interdépartementale n’a été prévue, d’où des ruptures, soit dans la prise en charge de l’enfant, soit dans l’évaluation des informations préoccupantes.

La loi du 5 mars 2012 comble ce vide juridique et organise la transmission des informations entre départements. Un décret en Conseil d’État doit définir les modalités de cette transmission interdépartementale, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Cette loi, adoptée à l’unanimité dans les deux assemblées parlementaires, comporte un article unique, mais, bien que parue au Journal officiel du 6 mars 2012, elle reste à ce jour lettre morte !

Nous sommes plusieurs parlementaires à avoir interpellé sur ce point, au travers de questions écrites, Mme la ministre chargée de la famille. En réponse, le 17 janvier 2013, voilà donc bientôt six mois, elle a indiqué que « le projet de décret d’application de cette loi [était] actuellement soumis à la procédure consultative ».

Dois-je rappeler que la loi du 5 mars 2007 prévoyait déjà un tel texte, mais que celui-ci n’a jamais vu le jour ? La protection de l’enfance a-t-elle si peu d’importance ? Au moment où de nombreux cas de dysfonctionnement sont évoqués dans la presse, ne pourrait-on pas, au moins, apporter une réponse à celui-là ?

Le second exemple de dysfonctionnement dans l’application des lois que je souhaite pointer du doigt est celui d’une application qui ne correspond pas à la volonté du législateur, en particulier lorsque le texte résulte d’une proposition de loi.

L’application de la loi du 9 juin 2010 relative à la création des maisons d’assistantes maternelles, ou MAM, en est une parfaite illustration. Dans l’esprit de la loi, les MAM sont le prolongement du domicile des assistantes maternelles. Toutefois, cette volonté se trouve bafouée par une administration tatillonne, éloignée des réalités que vivent nos concitoyens.

Dans un premier temps, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’intérieur a classé les MAM en « établissements recevant du public de quatrième catégorie ». Jean Arthuis et moi-même avons vivement réagi à cette décision, qui condamnait les MAM existantes à fermer et interdisait l’ouverture de toute nouvelle structure. Nous avons ainsi obtenu que les MAM bénéficient d’un cadre plus souple grâce à un classement en cinquième catégorie.

Si les normes de protection contre l’incendie doivent impérativement être appliquées, il en va autrement des normes d’accessibilité aux personnes handicapées. En effet, aux termes de l’article R. 111–19–1 du code de la construction et de l’habitation, les MAM doivent être accessibles aux personnes handicapées, « quel que soit leur handicap ». Or, je le rappelle, les MAM accueillent des assistantes maternelles et des enfants !

Là encore, une telle exigence réglementaire est inapplicable à l’aménagement intérieur des MAM et ignore totalement la réalité de l’activité d’une assistante maternelle. Il est aberrant d’imposer que l’aménagement intérieur des MAM soit accessible aux adultes handicapés : en effet, c’est inutile pour les assistantes maternelles, car aucune personne en fauteuil roulant ne recevra jamais l’agrément de services chargés de la protection maternelle et infantile, la PMI, pour garder des enfants ; s’il s’agit des parents, il suffit simplement d’aménager le lieu d’accueil de la MAM, pour qu’un parent handicapé puisse y amener son enfant.

Les MAM sont un dispositif de garde des jeunes enfants innovant et souple. Leur coût est raisonnable pour les parents et nul pour les collectivités locales, mais les mesures d’application de cette loi freinent le développement de ces structures, au moment même où le Gouvernement dit vouloir créer de nouvelles places d’accueil.

En conclusion, mes chers collègues, je dresserai un bilan en demi-teinte : je reconnais des progrès dans le cadre de l’application des lois que nous votons, mais beaucoup reste à faire pour que ces mesures deviennent des réalités dans la vie de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP. – Mme Corinne Bouchoux et M. le président de la commission sénatoriale applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Rome.

M. Yves Rome. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’étendue des compétences de notre commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, chargée de veiller à la bonne application des textes votés par le Parlement dans leur mise en œuvre concrète sur le terrain, nous appelle à une grande responsabilité et à beaucoup de minutie pour mener à bien cette mission.

C’est dans cet esprit que j’ai souhaité, en tant que membre de cette nouvelle commission sénatoriale présidée par notre excellent collègue David Assouline, établir un état des lieux de la législation en matière d’aménagement numérique du territoire, en dressant un bilan de l’application des dispositions organisant l’action des collectivités territoriales dans les domaines du haut et du très haut débit. Mon collègue Pierre Hérisson et moi-même avons auditionné les principaux acteurs de la filière et rendu en mars dernier notre rapport intitulé État, opérateurs, collectivités territoriales : le triple play gagnant du très haut débit.

Ce contrôle, à mon sens, ne doit pas se cantonner à considérer les effets de la législation existante, mais doit nous amener, lorsque cela est nécessaire, à proposer des cadres législatifs plus adaptés. Telle est la conclusion à laquelle nous sommes parvenus dans notre rapport : l’impérieuse nécessité de redéfinir le paradigme normatif pour la couverture du territoire français en très haut débit.

Plus largement, ce rapport témoigne de l’importance pour le Parlement – et, partant, pour le Sénat – de veiller de manière soutenue à l’application de la législation, mais aussi de porter un œil attentif à la régulation du secteur des communications électroniques. Tout le monde comprendra que je veux évoquer ici l’importance du rôle joué par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP.

En effet, l’évaluation de la loi de 2004, de la loi de modernisation de l’économie puis de la loi Pintat, nous amène à constater un décalage entre le modèle économique du déploiement du très haut débit et les objectifs visés par lesdites dispositions. Le programme national en faveur du très haut débit de l’ancien gouvernement, reprenant des décisions antérieures de l’ARCEP et de l’Autorité de la concurrence, a provoqué une importante fracture territoriale, en laissant aux opérateurs le soin d’équiper en fibre optique les zones les plus denses et les plus attractives commercialement et en renvoyant 80 % du territoire au financement des collectivités territoriales.

Les évolutions récentes vont dans le sens des préconisations de notre rapport, qui appelait au retour de l’État stratège. Des signaux positifs ont depuis été envoyés, sans pour autant bouleverser le dispositif antérieur afin de ne pas retarder l’atteinte de l’objectif. Le rôle majeur des collectivités locales a été confirmé et mieux pris en compte dans le nouveau dispositif mis en place par le Gouvernement. Je tiens, en particulier, à me féliciter du choix d’avenir clairement exprimé par le Président de la République, le Premier ministre et la ministre déléguée à l’économie numérique, celui de la fibre optique.

La mission sur le très haut débit, confiée à Antoine Darodes, préfigurant la création d’un futur établissement public pour répondre plus efficacement aux engagements du Président de la République, à savoir l’équipement de tout le territoire en fibre optique en dix ans, témoigne encore de cette mobilisation de la puissance publique.

De plus, le choix technologique de la fibre a été conforté par l’installation de la mission présidée par M. Champsaur, ancien président de l’ARCEP, reconnu pour son expertise en la matière, réunissant parlementaires, dont Pierre Hérisson, et spécialistes sur le sujet déterminant pour l’avenir du dispositif : l’extinction du fil de cuivre de France Télécom.

Pour autant, un long chemin reste à parcourir pour que l’État retrouve toute sa place dans le nouveau dispositif : quelques dizaines de spécialistes seulement peuplent à ce jour l’administration centrale, alors que, au même moment, en vertu de je ne sais quelle indépendance, plusieurs agences ou autorités captent l’essentiel des moyens et de l’expertise : 168 agents à l’ARCEP, plus de 300 à l’Agence nationale des fréquences et autant au CSA ! Aussi, le risque est que l’État, dépourvu de moyens, confie indirectement le pilotage du déploiement du très haut débit à ces autorités qui n’obéissent à personne, sinon à elles-mêmes.

Les moyens existent : ne serait-il donc pas judicieux de les regrouper dans un établissement public pour le déploiement de la fibre ? Sur une matière aussi déterminante pour l’avenir de notre société, j’en appelle au renforcement de l’État stratège et je réclame que, dans l’esprit qui a présidé à la création de notre commission, ces sujets fassent l’objet d’une évaluation permanente par le Parlement.

Alors même que le numérique envahit tous les moments de la vie par l’augmentation exponentielle de ses usages, il est grand temps que la représentation nationale redonne de la cohérence à tous ces savoir-faire que je viens de rappeler.

C’est pour toutes ces raisons que je souhaite ardemment qu’une grande loi sur le numérique voie le jour le plus rapidement possible, pour traiter des infrastructures, de la fiscalité et, bien sûr, des usages numériques. Leur inscription dans le marbre de la loi confortera ainsi les dispositifs destinés à accompagner l’effort des collectivités territoriales, sécurisées qu’elles seront grâce aux possibilités d’emprunt à long terme à des conditions avantageuses.

Fort de ces avancées et clarifications, le conseil général de l’Oise, que je préside, a fait sien, avec l’esprit pionnier qui le caractérise, les objectifs du législateur en termes d’accès au très haut débit pour tous, afin de renforcer l’attractivité du territoire et lutter contre les fractures territoriales. Nous avons fait le choix de la clarté technologique, celui de la fibre optique. Notre schéma directeur territorial d’aménagement numérique, ou SDTAN, a été adopté à l’unanimité et le syndicat mixte « Oise très haut débit », créé dernièrement, a reçu la même approbation unanime.

Notre ambition pour la France doit s’insérer dans un cadre beaucoup plus large, celui de l’Europe, comme l’ont exprimé avec force Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin, pas plus tard qu’hier, dans une tribune des Échos, intitulée « Pour une Europe des télécoms tournée vers l’investissement ». Cela me laisse penser que le travail que nous avons mené au Sénat n’a pas été inutile ! Je cite nos ministres : « nouveau souffle », « changement de paradigme », « créer les conditions favorables à l’investissement en privilégiant le co-investissement », « nouvelles règles […] simples, stables et visibles » pour « investir dans les réseaux de nouvelle génération à très haut débit » parce que, je cite une fois encore, « le numérique constitue l’un des principaux leviers pour le retour à la croissance de l’Europe ».

Je crois avoir prononcé ces mêmes mots à plusieurs reprises, dans cet hémicycle, devant vous, mes chers collègues ! Je me réjouis de constater que nous nourrissons tous la même ambition d’une économie numérique innovante, porteuse de croissance, d’emplois, et donc d’un avenir meilleur.

Si le numérique est la marque de l’esprit pionnier qui anime les territoires, il en va de même de bien d’autres sujets, sur lesquels les collectivités expérimentent et se rassemblent pour rendre le meilleur service au public. Dans l’Oise, c’est sur ce modèle que fonctionnent le huitième aéroport de France, celui de Beauvais-Tillé, qui voit passer près de 4 millions de voyageurs par an, ou l’établissement public foncier local pour le logement, et je pourrais citer bien d’autres exemples de partenariats fructueux entre les divers échelons territoriaux qui rassemblent leurs moyens financiers, leurs expertises et leurs forces vives au service d’un territoire et de ses habitants.

Comment, dans ces circonstances peut-on encore stigmatiser un prétendu « millefeuille » territorial et appeler à une répartition plus stricte des compétences ? Où est le manque de clarté lorsque les projets avancent grâce aux partenariats féconds que les collectivités savent nouer entre elles ? La clause de compétence générale a fort heureusement été préservée pour les collectivités et je m’en félicite, car c’est bien cette clause qui nous permet d’agir, de corriger des défauts de la législation ou de la réglementation existantes et de pallier également les défaillances de l’État qui n’a plus aujourd’hui les moyens d’embrasser tous les champs de l’action publique.

Enfin, l’application de la loi portant création des emplois d’avenir votée en octobre 2012, engagement fort du Président de la République, doit fournir l’occasion, une fois de plus, de prouver l’inventivité et l’utilité des collectivités locales. Le département de l’Oise s’est engagé avec détermination dans la mise en œuvre de ce dispositif, convaincu qu’il constituait une piste d’avenir. À nos côtés, les communes et le tissu associatif se mobilisent, mais également la région, que nous allons par ailleurs accompagner dans la mise en place du volet « formation » de la loi.

Ce que j’avais appelé il y a quelques mois « le sel des territoires » est plus que jamais d’actualité : les collectivités locales sont des atouts majeurs pour notre pays, nos investissements et notre croissance, dans le cadre de la mise en œuvre du très haut débit, de la mobilité, mais aussi de la lutte pour l’emploi.

C’est la raison pour laquelle, cher président Assouline, j’appelle de mes vœux la constitution, au sein de la commission pour le contrôle de l’application des lois, d’une mission d’évaluation des nombreuses innovations soutenues par les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Pierre Hérisson applaudit également.)

M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, mesdames, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, les différents présidentes et présidents de commission s’étant longuement exprimés et ayant cité de nombreux exemples et statistiques, je concentrerai mon propos sur une partie des questions que nous entendons soulever à l’occasion de ce débat.

Le contrôle de l’application des lois nous amène à nous poser des questions importantes, qui doivent nous aider à réfléchir plus précisément aux textes que nous votons. Il ne fait pas de doute qu’une telle réflexion aura des conséquences positives sur la suite de nos travaux.

Pour cela, il ne faut pas simplement se préoccuper de savoir si les mesures réglementaires nécessaires à la mise en œuvre des lois votées ont été prises par le Gouvernement. Cette approche est sans nul doute indispensable, mais elle n’est évidemment pas suffisante. L’application des lois pose des questions de fond et nous ne devons pas en rester à une conception purement quantitative.

Je commencerai donc, si vous me le permettez, par un petit aparté sur les conditions nécessaires à l’élaboration des lois, car il me semble que la question de l’effectivité réelle des lois a beaucoup à voir avec les conditions dans lesquelles celles-ci sont présentées et adoptées, Jean-Pierre Sueur y a fait allusion dans son intervention.

Les éléments chiffrés du rapport, notamment pour ce qui concerne la commission des lois, mettent en exergue le rythme législatif particulièrement soutenu que nous subissons. Je vous rappellerai, par ailleurs, notre opposition à la multiplication des procédures accélérées, qui, de fait, dessaisissent le Parlement et nuisent à la qualité des textes législatifs. Le rapport souligne des données statistiques inquiétantes sur ce point.

J’en viens à présent au sujet principal du rapport, à savoir la mise en application des lois. Sur ce point, les problèmes sont loin d’être réglés dans leur ensemble, les différents orateurs en ont témoigné, malgré les efforts du Gouvernement pour adopter les mesures réglementaires plus rapidement et plus efficacement.

La situation encore trop peu satisfaisante de l’application des lois est le reflet de la frénésie législative du gouvernement précédent que nous avons suffisamment dénoncée auparavant : trop de textes, souvent en matière pénale, ont été détournés de leur objet, trop de lois de circonstance ou d’affichage ont été adoptées. Que dire aussi des lois fourre-tout dites « de simplification du droit » ou « d’allégement des procédures », entre autres appellations, qui ont largement contribué à l’inflation normative et à la complexification du droit, quitte à le rendre parfois inapplicable, se détournant d’ailleurs de leur objectif premier ?

De plus, mes chers collègues, si l’application effective d’une loi dépend pour une grande partie de la volonté politique d’appliquer concrètement un texte, elle dépend aussi des moyens financiers qui lui sont alloués. Nous avons tous en tête la loi instituant le droit au logement opposable, dite « loi DALO », ou encore la loi sur l’accessibilité des personnes en situation de handicap. Pour diversifier les champs, je pense aussi, plus récemment, à la loi pénitentiaire. Autant de lois dont l’application est encore trop peu effective mais, pourtant, tellement urgente ! Autant de lois qui demandent, en effet, plus de moyens pour être pleinement appliquées.

La disposition adoptée dans la proposition de loi de nos collègues Jean-Pierre Sueur et Jacqueline Gourault, qui reprend en substance, et pour partie seulement, le principe de proportionnalité des normes prôné par notre collègue Éric Doligé, à l’initiative d’une proposition de loi sur le sujet, est, du point de vue de l’application des lois, inquiétante, notamment pour ce qui concerne l’application de la loi sur l’accessibilité des personnes en situation de handicap, à laquelle j’ai fait référence.

Je ne reviendrai pas ici, mes chers collègues, sur le débat de la semaine passée et, donc, sur l’accessibilité aux aides sociales dans les petites communes de notre pays. Je ne mets pas en doute la volonté de nos collègues de continuer à appliquer la loi sur le handicap que j’évoquais précédemment. Avouez toutefois que cette disposition accroît, en tout cas, le sentiment d’insécurité et d’abandon de populations déjà fragilisées dès lors que l’on admet des dérogations qui, le temps avançant, peuvent être de plus en plus importantes et concerner de plus en plus de personnes.

Je finirai cette intervention par une note positive, en soulignant le fait que la création par le bureau du Sénat de la commission pour le contrôle de l’application des lois me paraît être source de progrès. Ces progrès, nous les devons, cela a été dit, aux différents rapports. Peut-être nous faut-il prendre encore plus le temps, dans le cadre de nos semaines de débat, d’approfondir les choses en séance publique et de travailler aussi en lien avec le Gouvernement pour rendre effective cette volonté d’application.

Mme Blandin nous invitait tout à l’heure à réfléchir à un nouveau mode de présentation l’an prochain. Sans que nous soyons assurés qu’elle rassemblera plus de collègues, cette présentation pourrait, en tout cas, être plus vivante et mieux donner à voir le travail fait par la commission tout au long de l’année. Je pense aussi au travail, que vous avez mentionné, monsieur le ministre, dans vos propos introductifs, fait par le Gouvernement pour essayer de toujours mieux répondre à cette exigence que nous partageons et qui est, bien évidemment, gage de démocratie.

Je ne développerai pas plus longuement, car les autres thèmes ont déjà été évoqués. Sachez, en tout cas, et je m’adresse plus particulièrement à M. le président de la commission pour le contrôle de l’application des lois, que nous resterons à vos côtés pour défendre l’objectif assigné à cette commission, qui consiste à rendre les lois plus effectives pour les femmes et les hommes de notre pays. (Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Mme la présidente de la commission de la culture, Mme Corinne Bouchoux ainsi que M. le président de la commission des lois applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission pour le contrôle de l’application des lois, mes chers collègues, au nom des membres du RDSE, je me réjouis bien sûr de la tenue de ce débat sur le bilan de l’application des lois.

Je rappellerai que, sur mon initiative et celle de mon groupe, le Sénat avait débattu, début 2011, de l’édiction des mesures réglementaires d’application des lois.

À cette occasion, nous avions déjà constaté – hélas ! – un vrai décalage entre l’objectif de rééquilibrage des institutions en faveur du Parlement et la mise en application par le Gouvernement de la volonté exprimée par les deux assemblées parlementaires au travers du vote de la loi.

Nous avions également relevé qu’il n’existait pas de véritable contrainte pour obliger le pouvoir réglementaire à s’acquitter de sa mission dans des délais raisonnables.

Il existe bien la circulaire du 29 février 2008 sur « le délai des six mois », qui précise en préambule que « Veiller à la rapide et complète application des lois répond à une triple exigence de démocratie, de sécurité juridique et de responsabilité politique ».

Il y a aussi le fameux article 67 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit, qui fait obligation au Gouvernement de publier des rapports sur la mise en application de chaque loi six mois après l’entrée en vigueur de celle-ci.

Toutefois, ces deux instruments ne peuvent en aucun cas conduire le Parlement à enjoindre le Gouvernement de respecter un délai.

Si l’on souscrit naturellement au principe intangible de séparation des pouvoirs et de l’architecture institutionnelle qui en découle, on peut, en revanche, regretter que le Parlement, qui vote souverainement la loi et exprime ainsi la volonté générale, voie ses actes législatifs contrariés par les retards du pouvoir réglementaire.

C’est ce constat qui avait conduit le RDSE à déposer une proposition de loi tendant à reconnaître la présomption d’intérêt à agir des membres de l’Assemblée nationale et du Sénat en matière d’excès de pouvoir.

Ce texte, débattu en séance publique, le 17 février 2011, a pu apparaître comme trop avant-gardiste au gouvernement de l’époque qui en avait tout simplement demandé et obtenu le rejet. Toutefois, son examen a eu le mérite de rappeler, dans un relatif consensus, la nécessité d’améliorer encore les moyens de contrôle du Parlement sur l’exécutif. C’est donc sous les fleurs que ce texte avait été enterré !

Depuis, – je le concède – on observe une nette amélioration du rythme d’application des lois. Du côté gouvernemental, les ministères s’évertuent, depuis quelques années, à redresser le taux d’applicabilité des lois. La notion d’obligation de résultat a, enfin, pris sens. Notre collègue rapporteur David Assouline l’a bien exposé. Je dois dire, d’ailleurs, que l’excellent travail de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois contribue à la prise de conscience générale, et je félicite la commission, ainsi que son président.

Elle a émis de nombreux rapports, générant une forme de pression – si j’ose dire. Les résultats de tous ces efforts, vous les connaissez, mes chers collègues. D’une seule phrase, je rappellerai que le pourcentage global de mise en application des mesures législatives adoptées durant la session 2011-2012 a atteint 66 %, un chiffre à mettre en rapport avec la moyenne des années précédentes qui oscillait entre 30 % et 40 %.

C’est un progrès incontestable, monsieur le ministre. Au regard des données concernant l’actuelle législature, il semblerait que l’on s’oriente vers encore plus de célérité pour l’application des lois. C’est une bonne chose, et je vous en félicite.

Je m’en félicite aussi, même si, à titre personnel, je déplore que quelques-unes de mes attentes ne soient toujours pas satisfaites. Je pense, en particulier, à deux textes que j’ai fait adopter, avec le soutien de mon groupe, et dont tous les décrets d’application ne sont pas encore parus. Il s’agit de la loi du 1er février 2012 visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs ainsi que celle, plus ancienne, du 10 mars 2010 relative au service civique.

Comme l’a rappelé notre collègue rapporteur, la mise en application des mesures issues d’initiatives parlementaires ne souffre plus d’un traitement discriminatoire. On peut, là aussi, s’en féliciter.

C’est pourquoi je compte sur vous, monsieur le ministre, pour faire le nécessaire, car je suis très attaché à ces deux textes importants, qui touchent la jeunesse, grande priorité de M. le Président de la République et du Gouvernement.

Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, un autre volet du contrôle, celui de l’évaluation. Le processus normatif doit être en effet apprécié jusqu’à son aval. Au bout de la chaîne, c’est, bien entendu, la qualité ou la pertinence de la loi qui sont visées. Là aussi, il faut bien le reconnaître, des démarches ont été conduites pour obliger à la production d’une loi à la fois utile et intelligible.

Comme vous le savez, mes chers collègues, le Gouvernement a mis en place plusieurs instruments destinés à rationaliser la production normative. Dans cette perspective, le Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, le CIMAP, a lancé quarante évaluations de politiques publiques. J’appartiens moi-même au comité de pilotage pour l’évaluation de la politique de développement agricole. Des premières réunions auxquelles j’ai pu assister, il ressort que les acteurs visés par cette politique, en l’occurrence, les agriculteurs, se plaignent surtout de la multiplication des normes ; ce n’est pas le seul domaine – nous le savons –, et cela a été dit. Je pense que cette remarque vaut, d’ailleurs, pour tous les secteurs de l’action publique. Je citerai ainsi les collectivités locales, soumises à 400 000 normes de toutes natures, excusez du peu !

Nous le savons, cet emballement normatif est, avant tout, le fruit de l’inflation législative. Si celle-ci connaît un certain tassement depuis deux ans, les lois contiennent de plus en plus d’articles – 20 articles en moyenne dans les années 1990, contre près de 40 articles depuis une décennie –, donc autant de textes réglementaires en plus. Sur ce point, l’exécutif tout autant que le pouvoir législatif doivent faire preuve de responsabilité. En effet, comme le relevait déjà le Conseil d’État en 1991 : « Quand le droit est bavard, le citoyen ne lui prête qu’une oreille distraite ». (M. Yves Rome opine.)

Mes chers collègues, il est certain que nous avons bien progressé s’agissant du contrôle et de l’évaluation des lois. Parallèlement, un équilibre doit être recherché entre la volonté réformatrice du Gouvernement, les prérogatives du Parlement et l’attente légitime de nos concitoyens en faveur d’un droit quantitativement raisonnable (Applaudissements au banc des commissions. – Mme la présidente de la commission de la culture et M. Yves Rome applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les présidents de commissions, mes chers collègues, à cette heure tardive, on va essayer de faire ni de l’autosatisfaction ni de l’autoflagellation !

Le travail de cette commission est nécessaire, car il permet un certain recul sur la façon dont les lois s’appliquent. Il permet, plus largement, de vérifier si les objectifs que nous poursuivons sont bien atteints ou si d’autres voies plus efficientes pourraient être recherchées.

Un mérite, qui n’est pas des moindres de cette commission, est qu’il nous oblige à porter nous-mêmes un regard critique et autocritique sur notre travail un temps bref après le vote d’une loi. Un zoom, une focale sur le sens de notre travail.

Même si ce n’est pas toujours agréable, on découvre, lors de ce travail de déconstruction d’un texte et de son application, les lacunes initiales, les « pas entendus » ou les « mal entendus » qui, mis bout à bout, peuvent parfois rendre notre travail imparfait malgré les regards bienveillants et experts de nos collaborateurs et la haute qualité des équipes administratives de la Haute Assemblée, que je souhaite saluer ici. Enfin, nos textes sont quelquefois de subtils équilibres qui, à force d’acrobaties, à force de vouloir concilier des injonctions très contradictoires, peuvent parfois confiner à des choses difficilement applicables.

L’autre éclairage précieux de ce travail collectif, associant, comme cela a été dit, des duos hautement improbables aux sensibilités différentes, et l’acquis des tables rondes fort intéressantes, dont on pourra lire le compte rendu dans la publication, est que l’on y découvre, par exemple, les treize étapes qui vont de la loi à son application via un décret en Conseil d’État. Et on peut ainsi identifier les divers blocages potentiels dont l’un des moindres n’est pas, à nos yeux, l’interministériel qui doit faire travailler en commun des cultures administratives très variées et, parfois, contraires. C’est souvent, selon nous, le nœud du problème.

Indépendamment de la grande qualité des personnes, indépendamment de la qualité des formations, la conjonction du nœud interministériel et de certains lobbies, je citerai, à tout hasard, l’Association des énarques ou certains grands corps de l’État, rend parfois extrêmement difficile l’application de certains textes qu’ils sont censés faciliter. Cela reste selon nous un tabou que notre commission gagnerait à explorer utilement.

Tel des Sherlock Holmes, nous, les membres de la commission, traquons les « pertes en ligne ». Nous recherchons, en quelque sorte, les symptômes et causes des limites de notre action, un exercice salutaire mais peut-être périlleux.

Nous votons trop de lois bavardes qui restent parfois caduques, que nous ne savons pas abroger.

Je reprendrai ici, même si elle n’est plus là, l’exemple cité par notre collègue la sénatrice Isabelle Debré lors de notre dernière réunion en commission. Elle évoquait l’exemple d’un texte archaïque, le serpent de mer qui interdit le port du pantalon aux femmes. Le texte en question est une ordonnance, contrairement à ce qui a pu être dit et répété, celle du 16 brumaire an IX, 7 novembre 1800, qui dispose que « toute femme désirant s’habiller en homme doit se présenter à la préfecture de police pour en obtenir l’autorisation et que celle-ci ne peut être donnée qu’au vu d’un certificat d’un officier de santé ».

Le 31 janvier 2013 le ministère des droits des femmes a fait savoir, par un communiqué, que l’ordonnance est « implicitement abrogée ».

Il s’agit, selon nous, d’un commentaire, d’un avis, mais le ministère n’a pas le pouvoir d’abroger ce texte. L’avis rendu s’est borné à constater que l’ordonnance était incompatible avec le préambule de la Constitution de 1946 et qu’elle ne pouvait plus recevoir application. L’abrogation a été implicite, mais elle n’est pas de fait. Car, en droit administratif, l’abrogation explicite devrait être décidée par l’auteur de l’acte, à savoir le préfet de police. Or ce dernier n’a pas encore jugé bon, en 2010, de le faire, arguant, ce qui peut s’entendre, qu’il n’était pas là pour faire de l’archéologie législative.

Dans un registre moins symbolique mais tout aussi important, nous attirons votre attention sur les demandes sans cesse croissantes de nos concitoyens en direction de la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, sur les causes de la non-application de lois à travers la demande de documents ponctuels. À cette occasion, j’aimerais nous interroger collectivement sur l’application de la loi de 1978, qui mériterait sans doute d’être revisitée.

Grâce aux nouvelles technologies et à une meilleure information, nos concitoyens connaissent de mieux en mieux les textes, les lois, et leur intolérance est grande face aux lois inappliquées ou inapplicables.

Un autre point à améliorer, qui apparaît en filigrane dans les rapports, est, selon nous, la consultation en amont du travail législatif. Il y a une profusion de consultations ça et là, dans tous les sens, mais il y manque une mise en perspective et, surtout, une lisibilité et une visibilité de toutes ces consultations.

Enfin, – il faudrait vérifier ce chiffre – il se dit que les préfets devraient prendre en compte 80 000 pages de circulaires par an. Comme on a pu l’entendre lors d’une table ronde, on comprendrait presque qu’ils n’en lisent aucune !

Nous ne pouvons, au bout du compte, que saluer le travail de cette commission qui oblige au retour d’expérience, ou « retex », pour reprendre le terme employé dans un ministère, et à plus de transversalité, notamment à travers un travail en commun, « intercommissions ».

La tentation est grande pour le législateur de faire des lois pour montrer qu’il existe. Toute la question, et elle est complexe, est de ne voter que des lois utiles et strictement nécessaires.

Enfin, et en conclusion, il nous semble que l’inégale application des lois sur notre territoire, et donc l’inégalité géographique, est un sujet que nous pourrions creuser. La cartographie permettrait sans doute de dire autrement ce que la mise en mots exprime difficilement. L’étude de cette inégalité territoriale est, selon nous, un enjeu majeur, car il s’agit d’un mal peut-être plus dommageable que la non-application des lois. (Mme la présidente de la commission de la culture, Mme Cécile Cukierman ainsi que M. Luc Carvounas applaudissent.)

(M. Thierry Foucaud remplace M. Jean-Pierre Bel au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

vice-président

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission pour le contrôle de l’application des lois, messieurs les présidents de commission que je vois nombreux dans cet hémicycle, mes chers collègues, la fonction de contrôle confiée au Parlement s’est affirmée dans le temps. Depuis plusieurs dizaines d’années en effet, nous, parlementaires, sommes conduits à mieux contrôler l’action de l’exécutif et, aujourd’hui, nous nous appliquons à contrôler l’application des lois que nous votons.

Je porterai ici la voix du groupe UMP – c’est la première partie de mon exposé. Je tiens à vous rassurer, monsieur le président : avec votre autorisation, je n’utiliserai pas complètement le temps de parole qui m’est imparti, puisqu’un de mes collègues m’a chargé d’exprimer son point de vue. Je ferai part, dans la seconde partie, d’un certain nombre d’observations personnelles sur le sujet qui nous réunit.

D’abord, je rappelle que, s’il existe une commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, c’est parce qu’il y a eu une réforme constitutionnelle en 2008 et que le gouvernement de François Fillon a fait qu’une exigence est apparue, celle de rendre les lois applicables dans un délai de six mois.

J’entends bien – cela a d’ailleurs été exprimé à cette tribune – que ce délai paraît un peu court, et sans doute aussi trop formel. Mais puisqu’il n’est pas forcément respecté, nous pouvons toujours nous en tenir au principe ; l’application suivra...

On peut aborder la question sous l’angle quantitatif. Les statistiques démontrent qu’un effort a été fait depuis plusieurs années par les gouvernements précédents, et par le gouvernement actuel ; encore faudra-il juger l’action de ce dernier dans la durée...

Vous l’avez dit, monsieur le président Assouline, il s’est produit au cours des derniers mois du gouvernement Fillon ce que vous avez appelé un « gonflement » du nombre de décrets d’application, comme si le gouvernement était attaché – selon moi, il l’était fondamentalement – à ce que les lois qui avaient été votées fussent applicables dans des délais compatibles avec l’exercice du mandat dont il disposait.

Vous avez également dit qu’il y avait des lois qui étaient applicables totalement ou partiellement. Je dirai que toutes les lois sont dans ce cas de figure : il suffit de quelques décrets d’application pour qu’elles soient rangées dans la catégorie des lois partiellement applicables.

Sortons à présent de l’analyse quantitative.

Lors d’une réunion que vous avez présidée voilà quelques mois, le Secrétaire général du Gouvernement s’était attaché, afin de répondre à une critique formulée lors d’une précédente séance, un an auparavant, à donner une analyse qualitative des textes réglementaires pris ainsi que des lois votées.

Aujourd’hui, nous devons répondre à un certain nombre de questions touchant, finalement, à l’applicabilité des lois.

Pour qu’une loi soit applicable, il faut d’abord qu’elle soit bonne.

Je siège depuis trop peu de temps dans cette assemblée pour me permettre de porter le moindre jugement sur la qualité des lois que nous votons. On peut toujours s’améliorer et, à cet égard, je formulerai quelques propositions.

Pour rendre les lois plus applicables, nous pouvons tout d’abord faire en sorte qu’elles soient simples. Sur ce point, nos marges de progrès sont considérables.

Bien qu’elle ne concerne pas directement le sujet, vous avez évoqué la question, reprise par plusieurs orateurs, de la simplification des lois existantes et des « coups de balai » qui peuvent être donnés dans le code.

Vous avez jugé avec un peu de sévérité, les uns et les autres, les initiatives prises par Jean-Luc Warsmann, le précédent président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, qui appartenait à l’ancienne majorité.

Je crois pourtant que son initiative était intéressante. Il proposait un certain nombre de suppressions et de modifications, auxquelles d’autres se sont ajoutées, ce qui est le jeu normal de la discussion parlementaire.

Cet exercice était malgré tout utile. Au final, les quatre lois de simplification votées lors de la précédente législature ont permis de supprimer plusieurs centaines de dispositions complètement obsolètes.

Je me souviens de la première de ces dispositions, qui obligeait les couples désireux de se marier devant M. le maire à présenter un certificat prénuptial. Elle a été ôtée de notre législation, comme tant d’autres devenues parfaitement inutiles.

Certains ont considéré que cette initiative était superflue, qu’elle avait été dévoyée, comme l’avait relevé M. Vidalies lors d’une réunion de la commission. Force est de reconnaître que tout n’était pas forcément rédigé dans les meilleures conditions. Néanmoins c’était utile. D’ailleurs, aucun gouvernement ne s’est privé de présenter des textes portant « diverses dispositions » d’ordre économique, financier, social, ou que sais-je encore, qui sont des fourre-tout nécessaires puisqu’ils permettent de régler un certain nombre de situations.

S’il convient de rendre les lois plus simples, il faut également faire en sorte que le Parlement soit éclairé dans les meilleures conditions.

À cet égard, il existe deux types de rapports : ceux, dont je parlerai dans un instant, qui sont inscrits dans la loi que nous votons, et ceux qui nous sont utiles pour édifier nos convictions et pour, éventuellement, constituer le point de départ d’un projet ou d’une proposition de loi.

Maints exemples montrent qu’un travail mûri par des parlementaires appartenant, l’un, à la majorité et, l’autre, à l’opposition sur des sujets dont nous avons à débattre est une excellente initiative, car cela consolide du point de vue politique une conviction qui peut être partagée, et permet d’avancer sur un terrain qui a été parfaitement balisé.

J’en viens aux rapports qui viennent encombrer les textes. Nous en sommes les responsables ! Nous ne nous privons pas en effet, car tel est notre bon plaisir – et le président Marini a fustigé ces comportements ! –, d’inscrire dans la loi qu’un rapport devra être présenté, qui plus est dans un délai extrêmement court.

Or il s’agit, permettez-moi de vous le dire, d’un travail supplémentaire qui devrait tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution.

Lorsque j’appartenais à l’administration centrale, dans une vie déjà ancienne, je voyais arriver, avec mes collègues, des textes de loi sur lesquels nous devions rédiger des rapports. Pour le fonctionnaire chargé de cette tâche, c’était un travail supplémentaire. Cela entraînait par ailleurs des frais, notamment de publication.

Nous devrions nous raisonner collectivement afin de ne pas tomber dans le piège consistant à se faire plaisir en demandant des rapports à l’administration.

Voilà pour les améliorations à apporter.

J’en arrive à la partie de mon exposé plus personnelle, qui concerne le contrôle de l’application des lois.

On a évoqué les décrets et les arrêtés. Je voudrais, quant à moi, parler des circulaires.

La circulaire, nous le savons, n’a aucune portée juridique. Pour autant, dans les territoires, les régions et les départements, l’administration éclaire ses fonctionnaires et les organismes publics chargés de mettre en œuvre la loi en leur envoyant non pas le texte de la loi, mais une circulaire. Les exemples en sont très nombreux. Vous me permettrez d’en donner quelques-uns, sans retarder l’issue de cette séance et vous ennuyer.

Par souci d’équité, je citerai certains exemples, plus nombreux, qui relèvent de votre responsabilité et d’autres, moins nombreux – en fait, un seul –, qui relèvent de la nôtre.

Lorsque la loi relative à la solidarité et de renouvellement urbain, dite « loi SRU », a été votée, sous le gouvernement Jospin, je siégeais à l’Assemblée nationale. Nous avions alors été nombreux, et le Sénat nous avait soutenu sur ce point, à réclamer davantage de souplesse pour la délivrance des certificats d’urbanisme et des permis de construire en milieu rural. Cette disposition ne correspondait absolument pas au projet de loi. Or nous avons observé, à l’époque, que les services de l’urbanisme avaient commenté non pas la loi qui avait été votée, mais le projet de loi qui avait été présenté, et finalement avaient « pondu » une circulaire disant exactement le contraire de la loi.

Pour corriger cette situation, il a fallu voter une nouvelle loi pour rédiger un texte qui valait suppression de la circulaire, ce qui fut fait après les élections, sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Il s’agissait de la loi « urbanisme et habitat », dont l’article 33 corrigeait la fameuse circulaire. C’est un premier exemple.

Je prendrai un deuxième exemple, parfaitement scandaleux, cette fois dans notre camp, allais-je dire.

La loi de modernisation de l’économie, dite « loi LME », contenait des dispositions concernant l’urbanisme commercial. Les parlementaires avaient ainsi souhaité, de façon constante, limiter le développement des grandes surfaces à la périphérie des villes.

Au mois d’août suivant, en 2009, le directeur d’une administration centrale a cru pouvoir rédiger une circulaire précisant que, si l’on interprète l’esprit dans lequel la loi a été votée, on peut considérer que les grandes surfaces peuvent augmenter de 1 000 mètres carrés en une seule fois les surfaces dont elles disposent. En l’espace de quelques semaines, 500 000 mètres carrés ont ainsi été construits, sur la base d’un texte qui disait exactement le contraire de la loi !

J’ajoute, pour votre information, que ce directeur a été convoqué devant la commission compétente de l’Assemblée nationale et sans doute aussi devant celle du Sénat, et libéré de ses obligations professionnelles à la fin de cette année-là. Il aurait d’ailleurs pu être traduit devant la Cour de discipline budgétaire et financière, voire devant les tribunaux dans le cadre d’une procédure pénale.

Après qu’un décret eut bloqué le développement sauvage des mètres carrés de grandes surfaces, il a fallu une proposition de loi de Patrick Ollier pour arrêter définitivement le flux créé par cette interprétation non seulement erronée, mais particulièrement déplacée, de la part de l’administration.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Le mal était fait !

M. Jean-Claude Lenoir. Je prendrai un troisième exemple, bien plus récent.

Le Parlement a voté le 13 juillet 2011 une loi qui interdit la fracturation hydraulique pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels. Soit. Je n’épiloguerai pas sur ce point... Il y avait eu à l’époque un large consensus – je ne suis pas certain qu’il demeure – entre la droite et la gauche pour adopter ce texte.

La ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Mme Delphine Batho, a signé le 21 septembre 2012, en se référant à la loi du 13 juillet 2011, une circulaire qui interdit l’étude sismique des sols par un procédé bien connu, proche de l’échographie, permettant d’ausculter le sous-sol grâce au phénomène de résonance. Cette circulaire est naturellement contraire aux dispositions de la loi.

Le député Christian Bataille et moi-même avons été chargés d’une mission par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Dans ce cadre, nous entendons que cette circulaire totalement illégale soit rapidement retirée.

Je prendrai enfin un dernier exemple, anecdotique mais révélateur.

Certains d’entre vous ont voté tout à l’heure le projet de loi sur la refondation de l’école de la République.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Une superbe loi !

M. Luc Carvounas. Fondatrice !

M. Jean-Claude Lenoir. Lors de la discussion de ce texte en première lecture, le Gouvernement a déposé un amendement dont l’exposé des motifs avait pour le moins fait sourire. Il s’agissait d’une modification plutôt formelle, rédactionnelle du texte, afin que la loi soit formulée dans les mêmes termes qu’une circulaire rédigée par le ministre. Franchement, sommes-nous là pour conforter une circulaire rédigée par un ministre ?

Je voudrais donc – j’ai déjà exprimé à plusieurs reprises cette idée devant la commission, monsieur le président Assouline – insister pour que nos investigations portent également sur les circulaires. Je sais qu’il en existe des centaines et des milliers, mais il me semble malgré tout que nous ferions œuvre utile en empêchant parfois l’administration d’aller à l’encontre de ce que nous avons voté, sur la forme comme dans l’esprit, de façon que les lois soient celles qui ont été votées par ceux qui ont la légitimité pour les écrire, c’est-à-dire les parlementaires.

M. le président. La parole est à M. Luc Carvounas.

M. Luc Carvounas. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission pour le contrôle de l’application des lois, mes chers collègues, la création, par le bureau du Sénat, le 16 novembre 2011, d’une commission entièrement consacrée au contrôle de l’application des lois répond avant tout à une obligation démocratique qui nous incombe.

S’assurer de l’effectivité de la loi, au-delà des questions de sécurité juridique, est la première des exigences républicaines, car la loi, c’est l’égalité de tous, pour tous.

Comme le mentionnait l’éminent et regretté Guy Carcassonne lors du récent forum sur l’application des lois au Sénat, les « parlements européens qui fonctionnent de façon moderne consacrent infiniment plus de temps au contrôle qu’à la législation ».

En effet, le rôle de notre commission ne se résume pas à une « police des décrets », pour reprendre l’expression du président Assouline, et ses membres ne sont pas de simples « contrôleurs des travaux finis ».

Notre mission s’amplifie davantage avec l’évaluation législative. Et c’est d’ailleurs avec une réelle satisfaction que j’observe l’évolution très positive de l’activité de notre commission.

Je tiens à ce titre à saluer l’ensemble des rapports qui ont d’ores et déjà été produits par notre commission, sur des sujets aussi importants que l’audiovisuel public, le droit au logement, ou encore l’autonomie des universités et le Grenelle de l’environnement.

Ils démontrent d’ailleurs tout l’intérêt que notre fonctionnement démocratique trouvera à développer davantage cette activité.

Chacun pouvant constater le maquis buissonneux des lois et règlements de toutes natures, spécifique à la surproduction législative française, la nécessité de transformer le processus législatif s’impose au regard des travaux du bilan annuel de notre commission.

Car s’il est un domaine où la France est à l’abri du redressement productif, c’est bien celui de la production de normes ! Pourtant, comme le rappelait Montesquieu, « les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires ».

Pour lutter contre ce phénomène, le Président de la République a récemment annoncé sa détermination à procéder à un « choc de simplification ».

Le Parlement, en lien avec le Gouvernement, a donc tout intérêt à réfléchir à de nouvelles façons de construire la législation. Elle pourrait être alors plus efficace, mieux calibrée et davantage préparée à être appliquée.

Aussi, monsieur le ministre, faisant suite à la présentation du rapport annuel par le président Assouline, je constate avec satisfaction que la mise en application des lois votées est une priorité forte du gouvernement auquel vous appartenez.

Observant que 80 % des textes adoptés sous l’actuelle législature ont été appliqués par le Gouvernement, de manière partielle ou totale, devançant parfois même le délai de six mois pour publier les textes d’application, je constate que nous sommes dans une dynamique très positive qu’il faut encourager.

En revanche, dans un esprit d’équilibre parlementaire entre les chambres, la Haute Assemblée peut regretter que seules 25 % de ses initiatives aient été appliquées sur la période 2010-2011, quand 50 % des initiatives de l’Assemblée l’étaient dans le même intervalle. Je voulais, monsieur le ministre, attirer votre attention sur ce point.

De plus, toujours dans un souci de donner du sens à l’action politique et de la lisibilité à nos réformes, nous devons rester vigilants sur ce que l’on peut nommer l’« urgence à deux vitesses ».

Cela se produit lorsque le Parlement adopte des lois en procédure accélérée, mais que leur application ne se traduit pas par cette même célérité. Les parlementaires sont tout à fait en mesure de comprendre l’urgence de légiférer, mais les administrations doivent également partager ce mouvement.

Je tiens par ailleurs à saluer la grande qualité du travail méthodologique entrepris par notre commission dans son rapport annuel, ainsi que les recommandations techniques proposées pour faire évoluer positivement le contrôle et l’évaluation normative.

Je me retrouve tout à fait dans le souhait du président et des membres de notre commission de développer une véritable « culture parlementaire du contrôle et de l’évaluation ».

Ayant l’honneur de conduire un rapport sur l’application de la loi de 2009 relative au développement et à la modernisation des services touristiques, j’ai pu en faire l’expérience concrète.

J’ai pu y observer toutes les perspectives futures qui s’ouvrent à cette partie de l’activité parlementaire.

Et, en effet, ce processus tient à renforcer la qualité de la fabrique législative.

Quel est-il ? Constater l’état du droit antérieur ; vérifier son application ; définir les manquements normatifs et les insuffisances de l’action de la puissance publique ; réfléchir ensuite à des pistes d’évolution législative et réglementaire, le tout en prenant le temps de consulter et d’analyser les phénomènes que l’on étudie.

Fort de cette expérience, j’en suis convaincu, la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois est précurseur de ce que sera le Parlement de demain. Elle exercera son activité au cœur du processus législatif.

Il sera donc impératif de doter les sénateurs, comme les députés, de moyens supplémentaires, humains et matériels, afin que ce contrôle puisse s’effectuer aussi efficacement que possible. C’est un enjeu démocratique, car c’est la condition du bon fonctionnement de nos institutions.

Contrairement au « parlementaire bashing » que nous pouvons constater, ici ou là, la modernisation de la vie politique passera aussi par un renforcement de nos moyens d’action.

Dans le Parlement de demain, avec un processus législatif rénové, l’activité de contrôle et d’évaluation doit être la porte d’entrée parlementaire à toute grande réforme.

La place des études d’impact devra évoluer vers le renforcement de leur rôle dans le processus législatif, en amont, pour évaluer les répercussions futures d’une loi, comme en aval, pour contrôler son application réelle.

À ce titre, je souhaiterais que nous puissions envisager sereinement la proposition de Guy Carcassonne, lorsqu’il nous invitait à ouvrir la première étape de la discussion législative sur les études d’impact des lois. L’analyse coût-bénéfice d’une réforme et l’étude des alternatives à la loi sont une nécessité pour renforcer la performance normative et lutter contre l’inflation législative.

Enfin, nous aurons certainement à nous rapprocher davantage des membres de la Cour des comptes ainsi que de ceux du Conseil d’État. Sans leur conférer un pouvoir qu’ils n’ont pas, nous devons profiter davantage de leurs analyses pour converger ensemble vers la qualité normative.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’issue de ce débat annuel sur l’application des lois, je suis convaincu que nous sommes en train de transformer ensemble le processus de fabrique législative pour le rendre encore plus efficace. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et sur les travées du groupe écologiste. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois.

M. David Assouline, président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Je voudrais tout d’abord saluer la richesse des rapports et des autres interventions, qui n’est pas sans lien avec les différents forums ou colloques que nous avons organisés sur la question. Ceux qui ont participé à ce débat se sont emparés du sujet avec force.

L’application des lois est incontestablement un problème fondamental qu’il nous faut résoudre pour asseoir la crédibilité de notre démocratie parlementaire, laquelle, pour des raisons diverses, plus ou moins pertinentes – la situation économique et sociale joue évidemment un rôle, mais aussi les discours des démagogues de toutes sortes –, est souvent critiquée, voire mise en doute par nos concitoyens.

Plus on travaille dans les enceintes du Parlement à la qualité de la loi et à son effectivité, plus on renforce la crédibilité de notre démocratie.

Au regard de cet objectif de crédibilité, je ne peux que souscrire aux propos de Mme Blandin : nous devons en effet revoir notre façon d’organiser ce débat annuel.

Il doit, bien sûr, être l’occasion pour le président de la commission d’exposer le bilan de l’année, mais je vous suggère aussi qu’il permette, mieux qu’aujourd’hui, à chaque commission de suivre la trace des décrets essentiels dans son champ de compétence et de garder un œil sur le stock et les délais d’application. Le Gouvernement serait prévenu quinze jours au moins avant le débat, qui serait pour lui l’occasion d’apporter des réponses aux interpellations des sénateurs – tel décret sera publié tel jour ; tel autre est actuellement bloqué dans telle administration ou tel ministère.

Le débat serait ainsi plus vivant et nous aurions vraiment le sentiment d’être utiles, en mettant un petit coup de « pression », comme vous le disiez, monsieur Collin, sur le Gouvernement, et même parfois en l’aidant à retrouver la trace de certains décrets…

Nous pourrions aussi faire en sorte que, tout au long de l’année, au-delà de nos travaux – rapports sur le fond en binômes, travail de contrôle effectué tout au long de l’année par chaque commission permanente –, il soit possible d’interpeller le Gouvernement sur un certain nombre de décrets que l’on souhaiterait voir paraître, à l’occasion de séances dédiées ou simplement par la voie d’un échange entre le Gouvernement et la commission sénatoriale, qui autoriserait une approche moins formelle mais plus dynamique de notre mission.

Bien sûr, il nous faudra pour cela encore plus de moyens – je ne vous l’apprends pas, mes chers collègues : il faut des moyens pour travailler ! Lorsque cette commission s’est installée, on m’a dit : « Commence avec très peu, trace le chemin et les moyens viendront… » C’est précisément ce que nous avons fait : nous avons travaillé avec les moyens du bord, sans pleurnicher.

Aujourd’hui, nous constatons avec satisfaction que cette culture du contrôle et de l’évaluation est en train de gagner du terrain. Les parlementaires et les pouvoirs publics dans leur ensemble sont de plus en plus convaincus de l’utilité de cette démarche.

Je réitère donc mon optimisme. Mais nous ne devons pas lâcher prise, car la fonction de contrôle parlementaire, si elle aide bien sûr la démocratie, est aussi dérangeante. C’est un surcroît de travail pour les parlementaires, mais aussi, souvent, une épine dans le pied de ceux qui gouvernent, parce qu’on vient leur demander des comptes. Il se trouve toutefois que, aujourd’hui, Gouvernement et parlementaires sont disposés à s’engager dans cette démarche.

Je voulais enfin vous remercier, monsieur le ministre, et remercier aussi les administrateurs de ma petite commission, ou plutôt les quelques administrateurs qui travaillent pour cette grande commission ! C’est en effet sur eux que repose en grande partie ce travail gigantesque. Vous avez salué ce rapport, mes chers collègues ; il est avant tout le fruit du travail très approfondi qu’ils ont accompli. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je commencerai par répondre à la proposition du président Assouline, ce qui excusera peut-être mon absence de réponse à certaines questions ou l’inconsistance de certains de mes propos.

Il faut dire que l’exercice auquel je me livre ce soir est particulier. Je pourrais me contenter de propos généraux et m’appuyer sur vos interventions de qualité, mesdames, messieurs les sénateurs, mais ce n’est évidemment pas la réponse que vous attendez, puisque vous avez tous ou presque cité des exemples précis qui vous tiennent à cœur.

Même si le ministre chargé des relations avec le Parlement est, par définition, capable d’un regard d’ensemble sur les textes en discussion, vous comprendrez que je me trouve dans une situation singulière et qu’il me faudrait probablement plusieurs heures pour reprendre la genèse de l’ensemble des textes réglementaires dont vous vous préoccupez de la parution.

Pour que cette rencontre annuelle ne soit pas marquée du sceau de l’insatisfaction, le Gouvernement accepte la suggestion du président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois : nous pourrions ainsi recevoir, dans un délai de quinze jours, non pas le recueil exhaustif des textes relevant de la commission – je ne vois pas quelle serait alors la différence avec le rapport –, mais une sorte de catalogue de préoccupations, hiérarchisées. Cela permettrait au Gouvernement de savoir ce qui paraît urgent à la commission, et de vous faire ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, des réponses plus utiles.

Pour ce soir, j’ai sélectionné un certain nombre de questions et vais tenter de leur apporter une réponse.

Monsieur le président de la commission des affaires économiques, vous avez marqué votre préoccupation pour la loi du 7 mars 2012 portant diverses dispositions d’ordre cynégétique. Le projet de décret, dont je ne rappelle pas le contenu par souci de concision, a obtenu un avis favorable du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage le 11 avril 2013 ; il a été transmis au Conseil d’État le 11 juin dernier. Ces informations devraient vous satisfaire, monsieur Raoul.

Vous m’avez aussi interrogé sur l’application d’un texte plus complexe, la loi du 8 décembre 2011 relative aux certificats d’obtention végétale. Sur les dix-huit articles de ce texte qui comportent des dispositions de fond, quatre ne sont pas encore entièrement entrés en vigueur, faute de décret d’application.

Pour ce qui est du premier décret en Conseil d’État, qui doit toiletter le code de la propriété intellectuelle pour tenir compte de la création, par l’article 1er de la loi, d’une instance nationale des obtentions végétales, le projet sera transmis au Conseil d’État au mois de juillet, à l’issue des consultations des parties intéressées, qui sont toujours en cours.

Les dispositions du deuxième décret, qui concerne l’application de l’article 16 de la même loi, ont été intégrées dans le projet de décret à l’instant évoqué. Elles seront donc aussi transmises au Conseil d’État au mois de juillet.

Le troisième projet de décret, qui concerne les dispositions de l’article 2 créant une procédure d’agrément des laboratoires, est en cours de rédaction, après une première phase de consultations bilatérales. Il fera l’objet, au mois de septembre, d’une consultation plus large de l’ensemble des parties prenantes, puis sera transmis au Conseil d’État pour publication avant la fin de l’année 2013.

Enfin, le quatrième projet de décret concerne l’article 18 de la loi. Le Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux a présenté des propositions à cet effet le 18 juin. Les options proposées vont être présentées aux parties prenantes pour identifier les mesures adaptées, qui figureront dans le décret. Ce dernier devrait être publié au premier trimestre 2014.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Tout arrive !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Mme la présidente de la commission des affaires sociales a posé, quant à elle, une question, reprise par Mme Dini, portant sur la loi du 5 mars 2012 relative au suivi des enfants en danger par la transmission des informations.

La Commission consultative d’évaluation des normes a rendu, le 4 avril 2013, un avis favorable sur le décret. Celui-ci est actuellement soumis à l’avis du Conseil d’État. Celui-ci, saisi le 6 juin 2013, devrait se prononcer dès réception de l’accord écrit du ministère de l’intérieur, cosignataire du décret. Dans ce but, des travaux techniques avec le ministère de l’intérieur sont en cours de finalisation. Vous avez eu raison d’attirer notre attention sur l’importance de ce décret. La réponse que je vous apporte aujourd’hui est un peu plus précise que celles que le Gouvernement avait pu donner aux questions écrites que vous avez mentionnées.

En ce qui concerne le texte relatif aux recherches impliquant la personne humaine, que vous avez évoqué, madame la présidente, la question est plus complexe.

Plusieurs sources laissent à penser que le projet de règlement européen sur les essais cliniques de médicaments pourrait être publié avant la fin de l’année 2013. Bien que la loi soit, sur le fond, en cohérence avec l’esprit du projet de règlement, le texte établi à l’échelle européenne s’étant largement inspiré des contributions de la France dans les groupes de travail ad hoc, les deux textes s’écartent sur certaines modalités de mise en œuvre, qui font que des dispositions du projet de décret seraient incompatibles avec le futur règlement européen. Ce dernier fait déjà l’objet d’une phase pilote mise en place par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, à laquelle bon nombre de promoteurs adhèrent.

En conclusion, il pourrait se révéler préférable de surseoir temporairement à l’adoption du décret, dans l’attente de la publication du règlement européen, faute de quoi, et compte tenu de la hiérarchie des normes, le décret risquerait d’être supplanté par le règlement.

J’en viens aux questions posées par Mme la présidente de la commission de la culture, relatives, notamment, à la rémunération pour copie privée. Seul l’article 3 de la loi du 20 décembre 2011 n’a pas encore été mis en œuvre. Le décret d’application relatif à l’information des acquéreurs de supports d’enregistrement soumis à la rémunération pour copie privée a été soumis à la consultation des professionnels. Le projet de décret a été notifié le 25 mars 2013 à la Commission européenne, qui peut donc demander des modifications jusqu’au 26 juin 2013, c’est-à-dire demain !

La saisine du Conseil d’État devrait être opérée dans les plus brefs délais. Le commissaire à la simplification a également été saisi. Un arrêté fixant le contenu de la notice affichée dans les points de vente a été élaboré et sera publié de manière concomitante. Le décret devrait sortir le 1er janvier 2014.

Les questions que vous avez posées sur la loi du 1er février 2012 visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs m’amènent à formuler deux remarques.

D’une part, après le vote de cette loi et afin d’en respecter l’article 1er, le Comité national olympique et sportif a adopté sa charte éthique. La mesure réglementaire est donc devenue sans objet. La base sera abrogée par un prochain texte.

D’autre part, en ce qui concerne l’article 8, le projet de décret a fait l’objet d’une saisine pour avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés au mois de mai 2012. L’avis de l’Autorité de régulation des jeux en ligne et du Comité national olympique et sportif a été formellement sollicité. Le Conseil d’État sera saisi du projet dès que l’ensemble des avis auront été rendus, a priori d’ici à la fin du mois de juillet.

Je ferai parvenir à M. le président de la commission du développement durable ainsi qu’à M. le président de la commission des finances le texte des réponses qu’il m’est possible de leur faire.

M. le président de la commission des lois a posé des questions sur la loi du 27 mars 2012 de programmation relative à l’exécution des peines. Le projet de décret a été rédigé et sera prochainement soumis aux intersyndicales des praticiens hospitaliers.

Un élément de contexte explique le temps pris pour préparer ce projet de décret. Les intersyndicales des praticiens hospitaliers ont exprimé de vives oppositions à l’égard de ce texte, cela a été rappelé, et sont intervenues avec beaucoup d’efficacité pour que le principe qui y est inscrit ne soit pas traduit de manière réglementaire. Un moratoire a été décidé. Le risque est que le projet de décret, qui vient d’être rédigé, rouvre le débat sur les autres expertises. Vous le savez, en la matière, il est toujours compliqué de savoir dans quelles conditions les expertises judiciaires sont possibles.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est dans la loi !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. J’ai répondu à Mme Dini, qui avait posé la même question que Mme David, sur l’enfance en danger.

L’expertise dont a fait montre Yves Rome dans son intervention fait que je ne me sens pas capable d’entrer en concurrence avec lui, surtout sur un sujet qui lui tient si particulièrement à cœur. Il voulait, je pense, éclairer le Sénat sur un autre aspect du contrôle de l’application des lois. J’en profite pour souligner le travail remarquable qu’il a effectué sur le programme national en faveur du très haut débit.

M. Collin a posé des questions relatives au service civique. Le dispositif applicable dans les territoires d’outre-mer a fait l’objet de dispositions spécifiques, prises par voie réglementaire. Ce texte a été complété par un arrêté de janvier 2011 et explicité par une circulaire des outre-mer du 22 mars 2011. En Nouvelle-Calédonie, et dans les autres collectivités d’outre-mer, les discussions au plan local sont toujours en cours. Toutefois, le dispositif du service civique a pu se développer grâce à des mesures transitoires et locales, fondées sur des dispositifs applicables à l’ex-volontariat civil à l’aide technique, aussi bien en matière d’exonération de taxes que de régime local de sécurité sociale et de couverture complémentaire, ou encore de régime de retraite.

Monsieur Lenoir, les exemples que vous avez cités relèvent d’expériences partagées. Vous êtes revenu sur le sujet des lois de simplification pour nuancer ce qui en avait été dit, relevant à juste titre qu’elles avaient pu être dévoyées. Je le crois profondément, mais, monsieur le sénateur, la responsabilité de cette situation est largement partagée.

Je puis dire, pour avoir assisté aux débats sur la quatrième loi dite « de simplification », présentée par M. Warsmann, que l’on avait atteint là les limites du raisonnable. Son examen prenait place en fin de législature. Je pense ne pas être caricatural en disant que ce texte a fini par n’être plus qu’une compilation de toutes les initiatives qui n’avaient pu trouver place auparavant, faute de vecteur adéquat.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’était une voiture-balai !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je me souviens avoir vu arriver en discussion, en pleine nuit, toute une partie du code du tourisme relatif au tourisme de plein air, soit cinq pages représentant une quinzaine d’articles ! Le texte n’avait jamais pu être inscrit à l’ordre du jour et l’on avait ainsi voulu l’agréger à celui qui était alors en discussion. Et je pourrais multiplier les exemples.

Je l’ai dit, nous avons un problème global, celui du bon véhicule législatif, par exemple pour abroger des lois. La précaution prise par le Gouvernement, ou l’exécutif en général, de ne plus mettre dans le circuit législatif des textes de ce type s’explique par le fait que, puisque l’on peut y traiter de tout, il est difficile de prétendre qu’ils sont des cavaliers législatifs ! Et c’est effectivement ce qui se passe ! La finalité est donc dévoyée ou détournée. Voilà pourquoi nous sommes privés de véhicules législatifs de ce type,…

M. Jean-Claude Lenoir. Malheureusement !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. … qui seraient pourtant nécessaires pour traiter les questions dont nous discutons.

L’exécutif et le législatif devraient donc se doter d’un « code de bonne conduite », pour qu’un texte d’abrogation de lois ne serve pas à tout autre chose.

J’ai connu, autrefois – c’est le privilège de mon ancienneté au Parlement –, ces fameux textes portant diverses dispositions…

M. Jean-Claude Lenoir. Ah, les DDOS !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. … d’ordre social, en effet, ou d’ordre économique et financier qui, au fond, étaient très utiles. Aujourd’hui, ils ne font plus partie de la pratique parlementaire. Je constate cependant qu’ils nous permettaient de compléter heureusement notre arsenal législatif de dispositions qui n’exigeaient pas un texte législatif spécifique.

Dans tous les cas, le Gouvernement est, bien sûr, disposé à améliorer encore les conditions du travail qui trouve son aboutissement en séance publique, comme ce soir, mais il est aussi décidé à être au rendez-vous du contrôle de l’application des lois.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le contrôle de l’application des lois est, il est vrai, tout à la fois l’objectif et la responsabilité des parlementaires, mais convenez que, si la démarche a pour résultat que les lois sont mieux appliquées, c’est parce que ce n’est pas moins l’objectif et la responsabilité du Gouvernement. Or permettre à l’exécutif et au législatif de mieux travailler ensemble, c’est les aider à atteindre leur objectif commun : mieux travailler pour les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le bilan annuel de l’application des lois.

13

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 26 juin 2013, à quinze heures et le soir :

Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, de séparation et de régulation des activités bancaires (n° 643, 2012-2013).

Rapport de M. Richard Yung, fait au nom de la commission des finances (n° 681, 2012-2013).

Texte de la commission (n° 682, 2012-2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 26 juin 2013, à zéro heure quarante-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART