M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Madame la ministre, je vous remercie de votre propos.
Je le répète, le maintien du poste de Diego Suarez est une bonne nouvelle.
Peut-être est-il trop tôt pour répondre à la question des douze ETPT, mais j’y reviendrai, car je souhaite savoir combien d’entre eux seront affectés à Tananarive et combien permettront à Bercy de réaliser des économies.
À cet égard, je pense que l’on pourrait simplifier un certain nombre d’actes d’état civil. Il est vrai qu’il y a des problèmes concernant l’état civil tenu par la partie malgache, mais, pour notre part, nous avons mis en place de véritables usines à gaz à Tananarive et nous nous compliquons beaucoup la vie.
Enfin, je suggère – et je pense que vous avez d’ailleurs donné des instructions en ce sens – que l’on profite du renforcement des effectifs du consulat de Tananarive pour mettre en place des tournées consulaires chargées de préparer les cartes d’identité, les passeports, ce qui éviterait aux gens de devoir aller de Majunga ou de Tamatave jusqu’à Tananarive.
réception de la télévision numérique terrestre dans le département de la manche
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, auteur de la question n° 374, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
M. Jean Bizet. Madame la ministre, j’ai porté à la connaissance de Mme Filippetti les difficultés de réception de la télévision numérique terrestre rencontrées par plus de quatre-vingts communes dans le nord du département de la Manche, le Cotentin. Ces difficultés de réception sont amplifiées dans certaines conditions météorologiques bien précises et concernent les zones couvertes par l’émetteur de Cherbourg-Digosville.
Depuis lors, j’ai eu la satisfaction de recevoir le 16 mai dernier un courrier cosigné par M. le ministre chargé du budget, M. Bernard Cazeneuve, et par Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, Mme Fleur Pellerin, dans lequel ils m’informent que l’Agence nationale des fréquences assurera de nouveau son dispositif d’aide pour faciliter la couverture de cette zone.
Je remercie le Gouvernement de sa réponse. Toutefois, ma question n’a rien perdu de sa pertinence.
Je souhaiterais aujourd'hui savoir précisément quelles mesures techniques particulières et quels moyens seront mis en œuvre pour régler ce problème. Il est question d’implanter des réémetteurs tout le long de la côte sur de près de 80 kilomètres. Qu’en est-il ? Il est également question qu’un décret ministériel soit promulgué. Où en est-on ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Tout d’abord, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de la culture et de la communication, qui est actuellement à Marseille.
Le Gouvernement est particulièrement attaché, comme vous l’avez rappelé, à ce que les Français puissent recevoir dans de bonnes conditions les services de la télévision numérique terrestre, qui demeure l’offre de télévision de référence pour nos concitoyens, à l’accès universel et gratuit, et qui constitue le socle du financement de la création audiovisuelle.
Le ministère de la culture et de la communication porte une attention toute particulière aux difficultés de réception de la TNT qui subsistent encore aujourd’hui dans certaines localités et souhaite que ces problèmes trouvent rapidement une solution, sous l’égide concertée du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de l’Agence nationale des fréquences.
Depuis le passage au tout numérique de la région Basse-Normandie en 2010, une partie de la population de la presqu’île du Cotentin, dans le département de la Manche, est en effet confrontée à des dysfonctionnements récurrents.
Le relief du littoral et la proximité des côtes anglaises et des îles anglo-normandes rendent la planification des fréquences hertziennes dans la région particulièrement contrainte. Dans ce contexte, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, en charge de la planification des fréquences de diffusion audiovisuelle, a été amené à devoir utiliser les mêmes fréquences pour la diffusion de certaines chaînes de la TNT à partir des émetteurs principaux de Cherbourg et de Brest.
Selon le Conseil, l’effet cumulé de cette contrainte aux frontières et de phénomènes importants de propagation atmosphérique sur le littoral serait à l’origine des dysfonctionnements qui ont été constatés.
La première solution que vous évoquez, monsieur le sénateur, qui consisterait à modifier le plan de fréquences actuel, obtenu après de nombreuses réunions de négociation avec la Grande-Bretagne, semble difficilement envisageable en raison de la pénurie de ressources spectrales disponibles à l’échelle nationale – et particulièrement dans cette zone – pour la diffusion audiovisuelle.
Il existe toutefois d’autres solutions, qui peuvent être mises en œuvre rapidement, dont celle que vous indiquez, monsieur le sénateur, à savoir l’installation de réémetteurs locaux par les collectivités territoriales et la réorientation des antennes des téléspectateurs vers ces émetteurs. Le législateur a en effet prévu, dans l’article 30-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la possibilité pour les collectivités territoriales qui en font la demande d’obtenir du CSA une autorisation d’usage de la ressource radioélectrique nécessaire à la diffusion de services de TNT dans des zones limitées.
Permettez-moi cependant de rappeler que, dans le cas où l’installation de réémetteurs locaux serait décidée par les collectivités territoriales, celles-ci devraient ultérieurement supporter les frais liés à la maintenance de ces réémetteurs et aux opérations techniques ponctuelles requises par le régulateur.
Je vous rappelle également que le législateur a prévu la mise à disposition d’offres satellitaires numériques sur tout le territoire, qui permettent à tous les foyers, à partir d’une antenne parabolique et d’un décodeur satellitaire, de recevoir gratuitement les chaînes nationales de la TNT ainsi que les décrochages régionaux de France 3.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Madame la ministre, tout doucement, nous arrivons à obtenir quelques précisions supplémentaires, mais je suis toujours en attente du décret ministériel, qui n’est apparemment pas prêt puisque vous ne m’avez pas annoncé de date de publication.
Sur un plan purement technique, vous confirmez l’impossibilité de modifier le plan de fréquences par rapport aux gammes obtenues ou prises par les Anglais.
Je note également que le soin d’assurer financièrement la maintenance de ces réémetteurs reviendrait aux collectivités locales. J’en prends acte, mais j’avoue que j’en suis quelque peu surpris, car cela créera une distorsion de concurrence entre les Français en matière de réception de la TNT, les habitants de la presqu’île du Cotentin, dans le département de la Manche, devant supporter des coûts supplémentaires pour obtenir des conditions de réception correctes.
Ma première joie est donc tempérée par vos réponses, madame la ministre. Pour ma part, je continuerai à demander que les habitants de ce territoire puissent être convenablement traités en la matière.
dispositions fiscales en faveur de la construction de logements sociaux
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, auteur de la question n° 396, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Jean-Paul Amoudry. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au moment où le Parlement autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures d’ordre essentiellement administratif, urbanistique et procédural propres à relancer la construction du logement et de logements sociaux, nous devons nous interroger sur l’abandon d’un dispositif financier qui pourrait apporter une aide décisive à cette politique : je veux parler du régime spécifique d’imposition des plus-values immobilières réalisées lors de la cession de biens pour la construction de logements sociaux.
Entrées en vigueur avec la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, ces dispositions, codifiées sous les 7° et 8° du II de l’article 150 U du code général des impôts, ont permis aux particuliers de bénéficier d’une exonération des plus-values immobilières qu’ils réalisent lors de la cession de biens à un organisme en charge du logement social ou à une collectivité territoriale en vue de leur cession à un tel organisme. Surtout, ces dispositions ont contribué à favoriser la construction de logements sociaux et avaient donné des résultats significatifs.
Ce régime d’exonération, qui devait prendre fin au 31 décembre 2011, a été opportunément rétabli jusqu’en décembre 2014 par le Parlement dans le cadre de la loi de finances pour 2013. Or, par une décision du 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel a estimé que ce choix du législateur avait pour conséquence de porter atteinte à l’égalité devant l’impôt du fait que l’exonération n’était pas étendue aux bailleurs privés, et il a censuré cette disposition.
Ainsi a été supprimée une mesure qui, en complément de la mobilisation du foncier public en faveur du logement, avait un caractère fortement incitatif pour la mise en marché de réserves foncières privées. Or, une telle mise en marché se révèle extrêmement utile pour faire face à la crise du logement qui, rappelons-le, frappe directement plus de 10 millions de Français, parmi lesquels plus de 3 millions de mal-logés ou de sans logement ; elle contribuerait ainsi à la relance du secteur de l’artisanat du bâtiment, qui traverse actuellement une période particulièrement difficile.
Aussi je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir me faire connaître si le Gouvernement projette, dans le respect du cadre constitutionnel, de proposer à nouveau une mesure d’exonération de droits ciblée exclusivement sur la réalisation de logements sociaux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur Amoudry, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. Pierre Moscovici, qui est retenu ce matin.
Comme vous l’indiquez, les plus-values réalisées jusqu’au 31 décembre 2011 par les particuliers lors de la cession d’immeubles au profit d’organismes en charge du logement social ou, notamment, d’une collectivité territoriale en vue de la rétrocession des immeubles concernés à de tels organismes étaient exonérées d’impôt sur le revenu, et par suite de prélèvements sociaux.
Vous souhaitez que ces exonérations soient rétablies, en prévoyant toutefois d’en élargir le champ d’application, au-delà des cessions directes ou indirectes réalisées au profit d’organismes en charge du logement social, à celles qui sont réalisées au profit de tous les opérateurs susceptibles de construire des logements sociaux.
L’article 15 de la loi de finances pour 2013, qui, à titre principal, aménageait le régime d’imposition des plus-values de cession de terrains à bâtir afin de lutter contre la rétention des ressources foncières par les propriétaires et d’accroître ainsi l’offre de logements, prévoyait également de reconduire jusqu’au 31 décembre 2014 les exonérations attachées à la cession, directe ou indirecte, d’immeubles aux bailleurs sociaux.
Toutefois, dans une appréciation globale des impositions qui auraient pesé sur les plus-values de cessions de terrains à bâtir à l’issue de la réforme, le Conseil constitutionnel a censuré l’ensemble des dispositions de l’article 15 de la loi de finances pour 2013 par sa décision du 29 décembre 2012, y compris donc la reconduction jusqu’au 31 décembre 2014 des exonérations attachées aux plus-values de cessions d’immeubles à des bailleurs sociaux.
C’est pour ce seul motif, tenant au risque d’une imposition excessive au titre des plus-values de cessions de terrains à bâtir, que le Conseil constitutionnel a annulé l’ensemble de l’article 15 de la loi de finances, sans se prononcer sur les autres griefs des auteurs de la saisine contre cet article, notamment sur celui selon lequel l’exonération des plus-values immobilières prévue lorsque la cession est réalisée au profit d’un bailleur social pour réaliser des logements sociaux, alors qu’une telle exonération n’est pas applicable aux bailleurs privés, porterait atteinte à l’égalité devant l’impôt.
À cet égard, contrairement aux opérateurs privés qui n’ont pas l’obligation de construire exclusivement des logements sociaux, la qualité même de ces organismes cessionnaires écarte toute possibilité d’utilisation des biens cédés à d’autres fins que la construction de ce type de logements. Elle constitue ainsi un gage d’utilisation des biens cédés conforme à l’objectif recherché, qui rend inutile l’introduction de mécanismes de contrôle nécessairement complexes destinés à garantir cette utilisation spécifique.
En tout état de cause, compte tenu de l’intensité de la crise du logement, le Gouvernement entend engager une nouvelle réflexion, dans le respect des exigences formulées par le Conseil constitutionnel, en vue de la mise en place d’une fiscalité plus juste, propre à améliorer l’offre de logement en incitant à la mise sur le marché des ressources immobilières, notamment non bâties, dont notre pays a besoin.
C’est dans le cadre de cette réflexion d’ensemble, monsieur le sénateur, que la mise en place d’un dispositif particulier d’incitation fiscale à la cession de biens immobiliers en faveur des organismes en charge du logement social a vocation à s’intégrer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse ; je me réjouis en particulier de la réflexion que le Gouvernement compte engager, dans le cadre du respect des principes constitutionnels.
Je comprends l’extrême complexité qu’il y a à étendre la mesure à des bailleurs privés dont le métier n’est pas exclusivement le logement social. Cependant, pour réduire le déficit de logement, qui est un enjeu national, il me semble indispensable d’aller au-delà des mesures d’ordre administratif et procédural qui sont envisagées. Compte tenu de l’urgence, il me semble qu’un levier financier, tel que le régime fiscal que j’ai évoqué, devrait s’imposer.
J’ajoute que le coût pour les finances publiques serait, à mon sens, avantageusement compensé : sur le plan humain, d’abord, par la mise à disposition de logements à ceux qui en sont privés, sur le plan économique, ensuite, puisqu’une vigoureuse reprise de la construction s’ensuivrait, sans compter les innombrables retombées positives sur le plan social, par la baisse du chômage, mais aussi sur le plan financier, par la diminution des indemnités aux personnes privées d’emploi.
Pour toutes ces raisons, nous devrions rapidement nous orienter vers des mesures de caractère fiscal sans lesquelles je crains que nous ne parvenions pas à résorber le déficit dans le domaine du logement social.
exploitation des gaz et huiles de schiste
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, en remplacement de M. Michel Houel, auteur de la question n° 57, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
M. Antoine Lefèvre. Madame la ministre, mon collègue Michel Houel, qui regrette de ne pouvoir être présent, m’a demandé de vous faire part de sa question.
Madame la ministre, quel gouvernement responsable serait opposé à dynamiser l’industrie française, à créer des emplois, à améliorer le pouvoir d’achat et à réduire le réchauffement climatique, à l’heure où l’Europe est confrontée au coût croissant de l’énergie ?
Le sous-sol français regorge de richesses qui permettraient à notre pays de s’engager dans cette voie ; je veux bien sûr parler des gaz et des huiles de schiste. Depuis des mois, la polémique fait rage et, à force d’agiter le chiffon rouge, l’inquiétude est désormais ancrée dans les esprits de nos concitoyens sur un sujet qui mérite à la fois une étude sérieuse et l’audition de scientifiques reconnus pour évaluer sereinement les problèmes soulevés.
Concrètement, le gaz aux États-Unis est quatre fois moins cher qu’en Europe, à tel point que les Américains pourraient bientôt nous en fournir. Ces tarifs sont le résultat de l’exploitation depuis cinq ans des gaz de schiste.
En France, nous pouvons avoir la même réussite, car lancer cette exploitation nous offrirait non seulement une indépendance énergétique, mais également une baisse importante du prix du gaz, sans compter la création de milliers d’emplois. En effet, nous le savons, le prix de l’énergie influe directement sur le coût de la vie et sur le succès des entreprises sur les marchés mondiaux.
Alors, cela ne vaut-il pas la peine de s’intéresser très sérieusement à la question ?
Être responsable, aujourd’hui, c’est choisir d’exploiter une richesse indispensable à l’avenir de notre pays tout en protégeant l’environnement. Pour y parvenir, des mesures s’imposent : réformer le code minier qui remonte à Napoléon, profiter de l’expérience américaine pour évaluer la réalité des risques, donner de réels moyens à la recherche pour trouver des solutions d’exploitation propres et sans danger. Autant de conditions qui permettront de choisir la voie de la responsabilité en toute connaissance de cause.
Je vous demande donc, madame la ministre, si le Gouvernement est prêt à s’engager sur cette voie, qui est celle de la raison. Car enfin, que voulons-nous faire de notre pays : un musée ou une puissance économique compétitive qui assurera à nos concitoyens une énergie sûre et peu coûteuse ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, les hydrocarbures dits « non conventionnels » sont exploités par la technique de la fracturation hydraulique, qui consiste à injecter de l’eau en grande quantité et sous très haute pression, accompagnée de nombreux adjuvants chimiques, en particulier des biocides, des lubrifiants, des détergents, des propactants. Les impacts environnementaux de cette technique sont incontestables.
Le taux de récupération des gaz obtenu par ce procédé étant médiocre, l’exploitation doit être opérée à grande échelle pour être rentable économiquement, ce qui multiplie les risques sanitaires et environnementaux.
La consommation d’eau nécessaire à cette technique, eau qui ne peut être réutilisée par la suite, entraîne des conflits d’usage.
Un risque majeur réside dans la pollution des nappes souterraines et des sols en cas de fuite ou de remontée à la surface de divers métaux lourds et éléments radioactifs contenus dans les profondeurs.
L’impact est également climatique : les fuites de méthane, en plus du bilan carbone, entraînent une empreinte carbone négative, très supérieure à celle de l’exploitation des hydrocarbures conventionnels.
Nos paysages sont aussi concernés, puisque de vastes étendues devraient être utilisées pour l’extraction. À cela s’ajoute un risque de phénomènes sismiques, comme en Grande-Bretagne et aux États-Unis.
Le Parlement a donc adopté la loi du 13 juillet 2011 qui interdit le recours à la fracturation hydraulique pour l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels.
À plusieurs reprises, le Gouvernement a confirmé fermement cette interdiction et, au mois de septembre dernier, j’ai rejeté sept demandes de permis de recherches impliquant la fracturation hydraulique.
D’un point de vue environnemental, aujourd’hui, rien ne conduit à remettre en cause cette position. Il n’existe pas de technique alternative à la fracturation hydraulique qui soit sûre ou mature industriellement. Experts et industriels sont unanimes sur ce point.
De surcroît, il n’existe pas d’exploitation propre des gaz de schiste. Une exploitation intensive, à l’instar de celle qui a été mise en œuvre outre-Atlantique, n’est pas envisageable en France, à moins de porter des atteintes irréversibles à nos paysages et à nos terroirs. Ces derniers constituent la matière première des secteurs du tourisme et de l’agriculture qui représentent une part importante de notre balance commerciale, ainsi qu’une source d’emplois non délocalisables.
S’agissant des enjeux de compétitivité en matière de prix de l’énergie que vous avez abordés, monsieur le sénateur, je rappelle que nous sommes actuellement engagés dans un débat national sur la transition énergétique ; et, en l’espèce, les priorités sont fortes.
Il s’agit, notamment, de la réduction de notre facture énergétique à travers les économies d’énergie, le développement industriel des énergies renouvelables et les réponses aux questions posées par les industries « électro-énergético-intensives ».
Il est toutefois certain que la bonne réponse ne consiste absolument pas à autoriser en France la fracturation hydraulique, qui est interdite par la loi.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse et des données techniques que vous nous avez fournies. Je transmettrai ces éléments à mon collègue Michel Houel.
Toutefois, je tiens à signaler la mitoyenneté de mon département, l’Aisne, avec celui de la Seine-et-Marne de Michel Houel, où la problématique de l’exploitation et, à tout le moins, de l’exploration des capacités de notre sous-sol nous tient en alerte.
Une semaine après le dépôt du rapport commun aux syndicats et au patronat visant à « réinventer la croissance » et précisant que « les réflexions en cours sur la politique énergétique ne sauraient exclure les gaz de schiste », la prudence du Gouvernement nous laisse perplexe.
En effet, même les partenaires sociaux prennent position en faveur d’une poursuite de la recherche sur l’exploitation des gaz de schiste, invitant aussi la France à lancer un programme européen dans ce domaine et à renforcer les investissements de recherche dans les technologies d’avenir, l’exploitation propre des gaz et huiles de schiste, le stockage, les réseaux intelligents…
Cela est d’autant plus important que la politique européenne de l’énergie, qui était à l’ordre du jour du Conseil européen du 22 mai à Bruxelles, est aujourd’hui au point mort. À terme, l’Europe risque de devenir le seul continent à dépendre d’énergie importée. C’est bien dommage !
déstockage des déchets du site de stocamine
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 434, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Mme Patricia Schillinger. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la fermeture du site de l’entreprise Stocamine situé à Wittelsheim et, plus précisément, sur le devenir des déchets qui y sont stockés sous terre.
En 1997, la société Stocamine a été autorisée à exploiter un stockage souterrain de déchets industriels. Depuis le fameux incendie du bloc 15, en 2002, elle n’accepte plus de déchets.
Cela fait près de quinze ans que gisent, à 500 mètres sous la surface, 44 000 tonnes de déchets, notamment des déchets cyanurés, arséniés, chromiques, mercuriels, ou encore amiantés présentant un haut degré de toxicité.
Très préoccupée par cette question, j’avais déjà interpellé votre prédécesseur sur ce problème, voilà plus de deux ans, et souligné le risque que représentait, pour la nappe phréatique, l’éventualité d’un confinement définitif des déchets.
À l’époque, rien n’avait été fait. J’ai donc tout naturellement salué la décision, que vous avez prise au mois de décembre dernier, de débloquer la somme non négligeable de 100 millions d’euros pour le déstockage partiel du site.
Si cette décision a le mérite de contraster avec l’immobilisme dont a fait preuve la précédente majorité sur le sujet durant des années, je n’ai pu que constater, sur le terrain, qu’elle n’emportait l’adhésion ni des élus concernés ni des associations.
En effet, tous craignent que l’extraction sélective de seulement 4 700 tonnes de déchets, sur les 44 000 tonnes que compte le site, ne présente pas les garanties nécessaires à la préservation de l’intégrité de la nappe phréatique. Élus et associations mettent en doute l’usage de bentonite pour confiner sous terre 90 % des déchets.
Par ailleurs, alors que l’extraction de ces 4 700 tonnes nécessitera d’en manipuler au moins le double, pourquoi ne pas tout simplement procéder à l’extraction définitive de tous les déchets manipulés ?
Madame la ministre, je vous ai signalé ces différents points, lors d’une réunion avec une délégation d’élus. Vous m’avez alors indiqué souhaiter relancer « un processus de concertation locale qui permettrait de débattre des différentes solutions techniques, y compris le déstockage total ».
Depuis, élus et acteurs associatifs s’inquiètent de voir poursuivre les opérations accréditant l’hypothèse d’un confinement au fond de plus de 30 000 tonnes de déchets et attendent des précisions quant au calendrier que mettra en œuvre le ministère afin de procéder à un déstockage, qui, s’il n’est pas total, doit être maximal.
Par conséquent, je souhaiterais connaître votre position sur cette question et, plus précisément, le calendrier d’intervention que vous entendez fixer afin d’assurer un déstockage maximal du site et de garantir ainsi l’intégrité de la nappe phréatique.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Comme vous l’avez rappelé, madame la sénatrice, en 1997, la société Stocamine a été autorisée à exploiter un stockage souterrain de déchets industriels dans des galeries creusées dans les couches de sel, voisines des mines de potasse d’Alsace, à 500 mètres sous terre.
Environ 44 000 tonnes de déchets dangereux, contenant notamment du cyanure, de l’arsenic, du mercure ou de l’amiante, ainsi que des résidus de traitement de fumées d’incinération, y ont été stockées.
À la suite d’un incendie survenu en 2002, ce site ne reçoit plus de déchets et doit être définitivement fermé.
Depuis dix ans, de nombreuses études ont été réalisées pour préparer cette fermeture, mais il est vrai qu’aucune décision n’a été prise par le précédent gouvernement.
Il existe pourtant d’importants risques de remontée d’eau dans les galeries et, à terme, de pollution de la nappe phréatique d’Alsace, qui constitue une ressource essentielle pour la région.
La majorité des experts a préconisé le retrait de la moitié des déchets mercuriels les plus dangereux et le confinement sur place des autres déchets, scénario qui permettrait de garantir la maîtrise des risques pesant sur la nappe phréatique.
Selon ces mêmes experts, un déstockage total présenterait des risques importants non seulement pour les travailleurs amenés à intervenir sur le site, mais aussi pour les autres installations devant recevoir les déchets retirés.
J’ai demandé à la société Stocamine d’engager sans plus attendre le déstockage partiel recommandé. Je vous remercie, madame la sénatrice, d’avoir relevé que, dans un contexte budgétaire contraint, j’ai fait inscrire les financements nécessaires sur la période 2013-2015 dans la loi de finances pour 2013, faisant ainsi de la mise en sécurité du site de Stocamine une priorité.
Consciente, toutefois, que le retrait partiel des déchets demandé par l’exploitant et validé par les experts fait l’objet d’importants débats locaux et a souffert d’un déficit de concertation – nous avons d’ailleurs eu l’occasion d’échanger sur ce dossier lors d’une réunion avec une délégation d’élus alsaciens, le 2 avril dernier –, je souhaite relancer une concertation locale, qui permettra d’examiner les différentes solutions techniques, y compris le déstockage total.
Menée rapidement, elle se déroulera parallèlement au commencement du processus de déstockage partiel. Je veux être claire : aucune décision définitive ne sera prise avant le terme de cette concertation locale, au cours de laquelle seront envisagées toutes les solutions.
La consultation des entreprises pour le déstockage partiel est en cours ; celui-ci devrait pouvoir commencer au dernier trimestre de cette année et durer un an.
Pour ce qui est du calendrier, j’ai demandé au président de la Commission nationale du débat public de désigner un garant indépendant chargé de la bonne tenue de la concertation locale. Le dossier de saisine de cette instance est en cours de finalisation afin qu’elle puisse nommer un garant lors de sa prochaine réunion, au début du mois de juillet. La concertation pourra alors commencer selon les modalités fixées par ce garant.
Je vous le confirme, le début du retrait partiel n’empêche pas de poursuivre ensuite le retrait des déchets au-delà de ce qui est déjà prévu, si cette option est retenue lors de l’instruction technique du dossier et de la concertation.
Je veux donc vous rassurer et, à travers vous, tranquilliser l’ensemble des élus locaux alsaciens attachés, comme moi, à la préservation de la nappe phréatique d’Alsace : l’urgence de la situation est bien prise en compte ; la concertation aura bien lieu et les conclusions qui en résulteront pourront être mises en œuvre, le cas échéant, dans le cadre des procédures en cours qui n’ont aucun caractère irréversible.