M. Philippe Bas. Tout à fait !
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Nous connaissons d’ailleurs les difficultés rencontrées par les États-Unis pour mettre en œuvre la règle de Volcker, comme M. le rapporteur le rappelait à l’instant.
La solution retenue par le texte français semble pragmatique et opératoire. Peut-être aurait-on pu aller plus loin dans la filialisation en cantonnant aussi les opérations de tenue de marché ? Toutefois, si la loi ne le permet pas précisément, elle ne l’interdit pas non plus, puisque, à la suite d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale, le ministre aura ensuite le pouvoir de le faire par simple arrêté. La frontière réglementaire entre le spéculatif et le non-spéculatif pourra donc, à l’avenir, être rendue plus restrictive en fonction des conditions rencontrées.
Pour en terminer avec ce volet, je voudrais souligner qu’une bonne partie de son efficacité dépendra de la diligence et de la compétence du régulateur.
En effet, les banques sont influentes et les phénomènes de capture du régulateur n’existent pas que dans la littérature économique. Il est donc essentiel de prévenir les phénomènes de conflits d’intérêts ou, plus simplement, de lutter contre une forme de proximité existant entre le secteur bancaire et la haute administration et pouvant conduire à influer sur l’analyse des situations elles-mêmes. Nous devons être particulièrement vigilants sur ce point. Sans doute devrons-nous, à l’avenir, réfléchir à des mécanismes plus stricts, garants d’une supervision sans concession.
Le second volet du projet de loi n’a pas la même unité que le précédent, mais il est tout aussi essentiel.
Vous l’avez rappelé tout à l’heure, monsieur le ministre, les Français ont eu parfois le sentiment que l’on se préoccupait davantage, au cours de la résolution de la crise financière de 2008, de la santé des banques que de celle de leurs clients.
M. Roland Courteau. En effet !
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Sans doute faut-il reconnaître que les deux étaient quelque peu liées !
S’en est suivie une défiance durable et profonde des consommateurs, particuliers et entreprises, à l’encontre de nos établissements de crédit. Il est donc juste que les consommateurs perçoivent aujourd’hui les dividendes du soutien public aux banques par des mesures concrètes, tangibles et susceptibles d’améliorer leur information et de réduire leurs frais, notamment en ce qui concerne les publics fragilisés.
Si le projet de loi comporte des avancées significatives pour améliorer l’existant, en matière de protection du consommateur, donc du client bancaire, nous ne partons cependant pas de rien.
En effet, le droit au compte a été instauré par la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, en 1998. De plus, les principes de la convention de compte, de la médiation et de la transparence des tarifs ont été acquis en 2001. Plus récemment, à la suite de la remise, en 2010, d’un rapport sur la tarification des services bancaires, une dénomination commune unique des principaux frais et services bancaires a été élaborée au sein du comité consultatif des services financiers : les banques affichent désormais leurs dix principaux tarifs en tête de leurs plaquettes. Enfin, toujours en 2010, la loi Lagarde a réformé le crédit à la consommation et les dispositifs de lutte contre le surendettement.
De nombreuses mesures de ce projet de loi visent donc à améliorer ces dispositifs déjà en place. Je pense en particulier au droit au compte et aux procédures de surendettement. Dans ce domaine, les dispositions du texte s’inscrivent dans la droite ligne des propositions de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois visant à accélérer les procédures.
Au titre des améliorations apportées à la loi Lagarde, un article de ce projet de loi vise à rendre beaucoup plus effectif le libre choix de l’assurance emprunteur en vue de la souscription d’un emprunt immobilier et donc de mieux faire jouer la concurrence.
La principale mesure en faveur des particuliers est le plafonnement des commissions d’intervention. Le coût de ce service, détachable du découvert en lui-même, ainsi que l’importance du montant des commissions au sein du produit net bancaire des établissements, sont tout à fait révélateurs des déséquilibres profonds de l’économie de la banque de détail.
Un rapport de 2010 établit que le coût global de la banque de détail en France, si l’on inclut l’activité de prêt, et surtout les prêts immobiliers, n’est pas excessif par rapport à d’autres pays étrangers, en dépit de fortes variations. Notre produit net bancaire par habitant bancarisé serait ainsi inférieur de 52 % à celui du Royaume-Uni, de 46 % à celui de l’Italie et de 6 % à celui de l’Allemagne.
En revanche, le même rapport montre que la tarification de la banque au quotidien – c’est-à-dire la gestion du compte, les moyens de paiement et la gestion des incidents – est élevée dans notre pays, notamment en raison du développement des forfaits. Un consommateur français ayant un profil européen moyen de consommation dépenserait chaque année 14,5 % de plus que la moyenne des consommateurs de nos six principaux partenaires.
L’économie de la banque de détail en France est ainsi caractérisée, d’un côté, par des approches commerciales agressives, avec des emprunts immobiliers particulièrement compétitifs pour gagner une clientèle solvable et, de l’autre, par des frais sans rapport avec leur coût réel, notamment pour ce qui est des commissions d’intervention, touchant les populations les plus fragiles financièrement. Il convient de réparer cette injustice.
Le coût moyen de ces commissions s’élevait à 8,24 euros en 2012, avec un maximum atteignant parfois 16 euros. En cas d’incidents répétés, leur montant peut atteindre plusieurs centaines d’euros par mois, nous l’avons constaté. Les plafonds mensuels peuvent s’établir à plus de 160 euros, le maximum constaté étant de 350 euros.
La part des commissions dans le produit net bancaire représenterait – les estimations varient : plus l’on avance dans le temps et plus, semble-t-il, elles sont importantes – plusieurs centaines de millions d’euros. Elles s’élevaient, il y a trois semaines, à 1,8 milliard d’euros ; il y une semaine, nous en étions à 3 milliards d’euros !
Les députés ont souhaité aller plus loin que le texte initial du projet de loi et poser le principe d’un plafond des commissions d’intervention, par opération et par mois, pour l’ensemble des clients et non pour les seules personnes en situation de fragilité.
En dépit des pressions du secteur bancaire – et elles ont été importantes –, il m’apparaît indispensable de préserver, voire de consolider, l’acquis obtenu à l’Assemblée nationale. Les banques ont d’abord fait valoir que la mesure fragiliserait les banques de réseau, tout particulièrement les plus denses d’entre elles, au profit des banques en ligne. Or il n’y a pas de corrélation entre la taille du réseau bancaire et le montant des commissions pratiquées. La Banque Postale, qui se situe dans la moyenne de tarification des frais bancaires, est ainsi moins chère, par exemple, que BNP-Paribas.
Les banques mettent désormais en avant le risque d’une automatisation du traitement des incidents bancaires, qui entraînerait des effets négatifs non seulement sur l’emploi, mais aussi sur leurs clients qui pourraient se voir opposer des rejets de paiement. Ce risque d’automatisation existe, il est réel. Cependant, les interventions des banques sur les paiements par carte bancaire sans autorisation préalable sont déjà totalement automatisées, à hauteur de 85 % des cartes, sans que les frais en tiennent aujourd’hui réellement compte.
En réalité, mes chers collègues, il s’agit pour nous de limiter les abus constatés dans la tarification du service bancaire. Nous ne pouvons tolérer que les commissions d’intervention soient éloignées de manière abusive du coût réel du service proposé et que les plus fragiles assument une fraction aussi importante du produit net bancaire, comme c’est le cas aujourd’hui en France.
Je vous proposerai donc, au nom de la commission des affaires économiques, un amendement tendant à préciser et conforter ce dispositif.
Si le projet de loi contient des avancées substantielles en faveur des particuliers, il n’en va pas de même pour les entreprises. Les avancées sont moins nettes dans ce secteur, où l’on constate un raidissement des banques, alors même qu’un soutien financier plus important, nous le constatons tous, serait nécessaire en temps de crise.
Certes, les banques mettent en avant une progression du volume des crédits accordés aux entreprises en général. Cependant, une partie croissante des prêts aux entrepreneurs individuels, aux petites et moyennes entreprises, fait l’objet d’exigences également croissantes, notamment en matière de garanties.
Selon une enquête d’opinion réalisée en décembre 2012 auprès de dirigeants de PME, 43 % d’entre eux considéraient que leurs frais de financement étaient trop élevés ou que le montant des crédits accordés était plus faible que souhaité ; de plus, 42 % de ces dirigeants soulignaient que leur banque exigeait des garanties supplémentaires, soit un taux en hausse par rapport aux précédentes enquêtes.
Peu d’éléments, dans ce projet de loi, permettent de répondre à ces inquiétudes. Cela est assez logique, car le Gouvernement a déjà pris des mesures d’ampleur dans d’autres textes, notamment avec la constitution de la banque publique d’investissement et l’instauration du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
Je me félicite toutefois des progrès sensibles apportés par ce projet de loi en matière de contractualisation des relations entre les banques et les plus petites entreprises. Le principe d’une convention de compte pour les personnes physiques agissant à titre professionnel sera ainsi introduit, de même que pour les financements permanents.
Les banques se plaignent du manque de souplesse que pourraient engendrer ces conventions. Je pense, quant à moi, qu’elles rassureront plutôt les entrepreneurs, qui en ont bien besoin dans la période difficile que nous connaissons aujourd’hui.
Pour conclure, je tiens à rappeler que cette réforme bancaire s’inscrit dans un ensemble complexe d’initiatives multiples. L’Europe travaille sur la transposition des accords de Bâle III. Elle s’emploie à la création d’un mécanisme européen de résolution bancaire et à la mise en place d’outils destinés à encadrer les rémunérations au sein de la finance. Bref, les lignes bougent et ce contexte évolutif oblige à être à la fois audacieux et prudent.
Audacieux, parce que les initiatives prises par tel ou tel pays peuvent rapidement faire tâche d’huile. On a pu le vérifier récemment : l’amendement tendant à obliger les banques à plus de transparence pour ce qui concerne leurs filiales installées à l’étranger a été immédiatement repris à l’échelon européen. De la même manière, la spectaculaire initiative suisse relative aux rémunérations bancaires doit nous inciter à faire preuve d’une certaine ambition.
Mais l’audace peut également se payer cher, car, dans un monde où les capitaux sont parfaitement mobiles, il est aisé de contourner les réglementations les plus sévères. C’est pourquoi il faut aussi être prudent.
Les amendements que j’ai soumis à la commission des affaires économiques et que cette dernière a adoptés à l’unanimité respectent cette double exigence.
Par le biais de l’un de ces amendements est posée la question de l’implication des mandataires sociaux et des traders dans les procédures de résolution bancaire. En effet, il est essentiel que les plans de résolution soient étoffés et comportent des éléments garantissant que les principaux preneurs de risques subiront directement les conséquences de la procédure de résolution. Sans cela, l’effet dissuasif de la résolution risquerait d’être fortement diminué.
Un autre des amendements que j’ai présentés à la commission des affaires économiques reprend simplement une préconisation formulée par la Cour des comptes dans son rapport de cette année : il vise à introduire dans le secteur bancaire le principe du say on pay qui consiste à soumettre aux actionnaires l’ensemble des rémunérations octroyées aux hauts dirigeants, mandataires sociaux et traders.
Mes autres amendements tendent à améliorer encore le volet du texte que nous examinons relatif à la consommation.
Mes chers collègues, nous reviendrons sur tous ces points au cours de la discussion des articles. En attendant, j’ai le plaisir de vous indiquer que la commission des affaires économiques a émis un avis très favorable à l’adoption du présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Muguette Dini applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, si la commission des lois s’est saisie pour avis du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, c’est non pas pour apporter une contribution dans un domaine qui ne ressort pas de sa compétence – les enjeux de la séparation des activités bancaires utiles au financement de l’économie et des activités spéculatives, ainsi que l’organisation de la supervision et du contrôle des activités bancaires –, mais pour examiner quelques articles relevant de son champ d’intervention et concernant le droit des assurances, le droit de la consommation et le droit funéraire, ainsi que les commissions d’enquête parlementaires. En effet, dans son projet de loi initial, le Gouvernement a introduit plusieurs dispositions relevant de ces domaines.
Monsieur le ministre, la plupart des dispositions qui ont attiré l’attention de la commission des lois figuraient déjà dans le projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, examiné par notre assemblée au mois de décembre 2011 et dont notre commission s’était déjà saisie pour avis, étudiant par délégation au fond de la commission des affaires économiques certaines de ses mesures. Je pense, en particulier, au régime de l’assurance-emprunteur et aux questions relatives à la législation funéraire. Toutefois, la navette de ce projet de loi s’est interrompue en raison de la fin de la précédente législature à l’Assemblée nationale.
Je tiens néanmoins à saluer en cet instant le travail de notre collègue Nicole Bonnefoy, qui avait été rapporteur de ce texte au nom de la commission des lois : le travail réalisé en 2011 m’a évidemment guidé aujourd’hui.
Revenons au projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, dont la commission des lois a examiné l’article 18, destiné à rendre plus effectif l’exercice par l’emprunteur de sa liberté de choix en matière d’assurance-crédit, l’article 23, permettant aux héritiers d’accéder dans certaines conditions au compte bancaire d’un défunt, et l’article 25, tendant à mettre notre droit en conformité avec un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui rappelle que le principe de l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes s’applique en matière d’assurance.
L’article 18 vise à renforcer l’information de l’emprunteur sur le coût de l’assurance destinée à garantir le remboursement du crédit. En outre, concernant les crédits immobiliers, il encadre davantage les conditions dans lesquelles peut s’organiser la souscription d’un contrat d’assurance-crédit autre que le contrat de groupe proposé par le prêteur, de façon à permettre à l’emprunteur d’exercer véritablement la liberté de choix de l’assurance-crédit qui lui a été accordée par la loi Lagarde du mois de juillet 2010. Instaurée au nom de la concurrence, cette liberté de choix a pour objet de diminuer le coût de l’assurance-crédit pour l’emprunteur d’un montant pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros sur la totalité de la durée du crédit.
Je vous propose une série d’amendements destinés à clarifier ces dispositions dont la rédaction peut, en l’état, prêter à des interprétations ambiguës.
Demeure notamment la question de la liberté de choix pour les contrats de crédit souscrits antérieurement à la loi Lagarde, c’est-à-dire la possibilité pour les emprunteurs de renégocier des contrats d’assurance de groupe. Cette question est évidemment importante pour les associations de consommateurs. La réflexion doit se prolonger sur ce sujet : à ce jour, il n’y a pas de réponse évidente.
L’article 23 concerne les facilités d’accès au compte bancaire du défunt. Il s’agit d’autoriser les héritiers à accéder à ce compte afin de régler les frais des funérailles. En principe, les banques devraient le permettre – d’ailleurs, elles le font parfois –, puisque le paiement des obsèques est considéré comme un acte conservatoire de la succession, mais elles peuvent le refuser, craignant de voir leur responsabilité engagée. Le présent dispositif devrait apporter une réponse adaptée en termes de sécurité juridique. La commission des finances a clarifié un point, en cohérence avec le droit civil, dans le sens souhaité par la commission des lois.
À l’article 23, il est proposé d’ajouter deux nouvelles facilités d’accès au compte bancaire du défunt. Il s’agirait d’autoriser un successible en ligne directe, c’est-à-dire un enfant ou un parent, mais pas le conjoint survivant, à payer certaines dettes de la succession, voire à clôturer le compte et à prélever la totalité des fonds. Pour cela, il suffirait qu’il fasse valoir sa qualité en produisant un acte de naissance, qu’il déclare, sans qu’aucune vérification ne soit effectuée, que, à sa connaissance, il n’y a pas d’autres héritiers, pas de testament ni de contrat de mariage. Pour la clôture du compte, il devrait en outre produire une attestation des autres héritiers l’autorisant à percevoir les fonds. Ces procédures ne seraient possibles que pour des comptes bancaires d’un montant inférieur à quelques milliers d’euros.
Les auditions auxquelles j’ai procédé m’amènent à faire preuve de la plus grande réserve à l’égard de ces deux nouveaux dispositifs.
Tout d’abord, ils ne sont pas demandés par les associations de consommateurs. La Fédération bancaire française m’a indiqué ne pas avoir connaissance de difficultés particulières qui justifieraient des dispositifs aussi dérogatoires au droit commun. Quant au Conseil supérieur du notariat, il juge que la sécurité juridique de ces mesures est loin d’être assurée ; en outre, elles risqueraient d’exacerber certains conflits successoraux.
Ainsi, tout repose sur les déclarations d’un héritier qui n’a pas à apporter de véritable preuve de ce qu’il avance et n’est soumis à aucune procédure de vérification par l’établissement bancaire. Que se passera-t-il lorsque les enfants souhaiteront clôturer le compte et que la compagne du défunt détiendra un testament olographe non enregistré ? Verra-t-on les successibles en conflit engager une course contre la montre pour vider les comptes bancaires du défunt à leur profit, en procédant, le cas échéant à de fausses déclarations ? Comment l’intérêt des créanciers du défunt sera-t-il garanti, une fois les fonds dispersés, sans trace, entre les héritiers ?
La commission des lois vous proposera donc de supprimer ces deux dispositifs pour ne conserver que celui qui permettrait le paiement des funérailles.
Enfin, l’article 25 vise à tirer les conséquences, dans le code des assurances, de l’arrêt Test-Achats rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 1er mars 2011, lequel a invalidé l’article 5 de la directive de 2004 mettant en œuvre le principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès aux biens et services et la fourniture de biens et services, qui prévoyait une dérogation au principe d’égalité de traitement en matière de primes et contrats d’assurance. La Cour ayant considéré cette dérogation discriminatoire, elle l’a invalidée pour l’avenir et a fixé une date d’effet de sa décision au 21 décembre 2012. Désormais, le montant des primes d’assurance, notamment automobile, doit être le même pour les hommes et les femmes.
J’y insiste, nous sommes au mois de mars 2013, or depuis cette décision de mars 2011, rien n’a été fait pour mettre en conformité la législation française. La commission des lois l’a vivement déploré.
Même si cela suscite une controverse avec les assureurs, qui se fondent sur le texte d’un arrêté ministériel pris dans l’attente de la modification du code des assurances, la commission des finances a utilement clarifié la rédaction de l’article 25 sur un point d’interprétation difficile, de sorte que la commission des lois a approuvé cet article ainsi modifié.
Par ailleurs, mes chers collègues, la commission des lois vous proposera d’introduire des dispositions additionnelles concernant les contrats d’assurance-vie non réclamés et la législation funéraire qui trouvent pleinement leur place dans le présent projet de loi. Ces mesures ont déjà été adoptées par le Sénat, et certaines d’entre elles à plusieurs reprises, notamment en 2011 à l’occasion de l’examen du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, sans jamais aboutir à ce jour.
Un premier amendement concernera la revalorisation des « contrats obsèques », car, sur ce point, la loi n’est toujours pas appliquée, en raison d’une incompatibilité supposée avec les règles prudentielles européennes en matière d’assurance-vie. Il s’agit d’effectuer quelques ajustements pour rendre enfin effective la revalorisation prévue par le législateur.
Un deuxième amendement portera sur la dénomination et le contenu des contrats obsèques pour prévenir les mauvaises pratiques de certains professionnels ; il visera à garantir l’affectation des sommes au financement des obsèques et la personnalisation des prestations d’obsèques.
Un dernier amendement tendra à préciser les obligations des assureurs en matière de recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance-vie non réclamés, en vue d’améliorer la résorption du stock de ces contrats, de limiter leur multiplication, de systématiser les bonnes pratiques de certains établissements et de renforcer la transparence des démarches effectuées par les assureurs.
Avant de conclure, j’ajoute que la commission des lois, au titre de sa compétence particulière à l’égard du règlement du Sénat et du fonctionnement des assemblées parlementaires, a également examiné les articles 11 et 11 bis, dans la mesure où, dans certains cas, ils modifient les règles de levée du secret professionnel devant les commissions d’enquête parlementaires.
Actuellement, l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoit qu’une personne entendue par une commission d’enquête peut lui opposer le secret professionnel. La loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques a apporté une dérogation à ce principe dans le domaine de la régulation financière : les personnes participant ou ayant participé aux travaux de l’Autorité de contrôle prudentiel ou de l’Autorité des marchés financiers sont déliées du secret professionnel lorsque la commission d’enquête applique le secret à leur audition. Le projet de loi étend cette dérogation non seulement aux personnes participant ou ayant participé aux missions du Haut Conseil de stabilité financière, appelé à se substituer à l’actuel Conseil de la régulation financière et du risque systémique, mais aussi aux dirigeants et salariés des établissements de crédit.
Sans doute avons-nous matière à nous interroger sur la cohérence des dérogations à la règle du secret professionnel devant les commissions d’enquête, qui s’ajoutent les unes aux autres, même si le présent projet de loi ne se prête évidemment pas à une réflexion d’ensemble. Toujours est-il, mes chers collègues, que je vous proposerai deux amendements destinés, à tout le moins, à regrouper les dispositions concernées du projet de loi là où elles doivent figurer, c’est-à-dire au sein de l’article 6 de l’ordonnance de 1958, sans en modifier le fond.
Pour conclure, je vous indique que, sous réserve de l’adoption des amendements que je présenterai lors de la discussion des articles, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des articles dont elle s’est saisie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. le rapporteur applaudit également.)
(M. Charles Guené remplace Mme Bariza Khiari au fauteuil de la présidence.)