M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu de la dimension à la fois scientifique et éthique de ce texte, j’étais quelque peu dans le doute en tant que médecin. Pour me faire une opinion, j’ai donc assisté aux auditions.
J’ai entendu des positions divergentes, mais j’ai compris que, dans ce domaine, les chercheurs avaient besoin d’un signe pour aller de l’avant et que, en fait, avec les arguments que nous avancions à travers la loi de 2011, nous avions une attitude que Mme Muguette Dini a qualifiée d’hypocrite. Je souscris à ce qualificatif, car ces recherches sont autorisées. Soit on les légalise en assortissant cette autorisation de précautions qui figurent dans la loi, soit on les interdit ! Il fallait donc, selon moi, donner un signe aux chercheurs.
Quant à la finalité médicale, évoquée par Philippe Bas, l’expérience montre que l’on obtient parfois des résultats surprenants lors d’une recherche dont la finalité médicale majeure n’était pas évidente au départ...
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’est cela, la science !
M. René-Paul Savary. ... et que l’accumulation de finalités médicales mineures peut conduire à des progrès majeurs.
Mon expérience trentenaire de médecin m’a montré que l’on est parfois bien démuni pour répondre à des maladies très particulières, heureusement fort rares, parce que les progrès de la thérapie cellulaire, notamment, ne sont pas suffisants. Selon moi, on n’a pas le droit de se priver de la recherche, qu’elle soit fondamentale ou appliquée, à partir d’embryons qui sont détruits et qui échappent donc aux chercheurs. Il y a là une injustice qui peut avoir des répercussions graves en matière de progrès médical.
C’est la raison pour laquelle, avec une profonde conviction, je soutiens cette proposition de loi. (Applaudissements sur certaines travées de l’UMP, ainsi que sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne vais pas reprendre ce qui a été excellemment dit par la plupart de mes collègues.
Je veux juste faire remarquer à M. Philippe Bas que le qualificatif « majeur » est des plus relatifs et ambigus ! Aussi suis-je vraiment satisfait qu’il soit retiré du texte. En effet, ce que vous considérez être majeur ne l’est pas pour moi et sera encore différent pour une tierce personne. Chacun interprète ce qualificatif comme il veut.
De plus, comme vient de l’expliquer à l’instant mon collègue, une recherche considérée comme majeure peut ne déboucher sur rien, alors qu’une recherche mineure aura des résultats magnifiques. Par conséquent, on a bien raison de supprimer ce terme.
Ensuite, sans revenir sur le fond, qui a déjà fait l’objet de développements, cette proposition de loi, telle qu’elle a été amendée, permet de lever les ambiguïtés de la loi de 2011. Elle se fonde sur une expérience forte, fixe un cadre légal à la recherche et envoie un signal à nos chercheurs, qui pourront aller de l’avant, et c’est cela qui est important.
Enfin, après avoir écouté les uns et les autres, je suis sincèrement convaincu que, avec les autres membres du groupe RDSE, je vais voter une proposition de loi qui permettra de faire avancer le bien, la science et la vie. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste. – Mme Muguette Dini applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne pensais pas prendre la parole pour une nouvelle explication de vote, mais je me dois de répondre à notre collègue Yves Pozzo di Borgo, qui nous a dit que ce texte n’était pas à l’honneur du RDSE. Je pense qu’il aurait pu s’éviter cette formulation. (Marques d’approbations sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.) En effet, outre qu’elle est parfaitement désagréable, elle est tout à fait inappropriée.
Je considère au contraire que ce texte est de ceux qui sont à l’honneur de notre groupe. Je considère aussi qu’il ne nous appartient pas, même si nous le portons. Il appartient à tous ceux qui, depuis de longues années, se battent pour favoriser la recherche.
Je remercie M. Alain Milon de ses propos, du combat qu’il a mené, ainsi que M. Gilbert Barbier et tant d’autres qui considèrent comme nécessaire, et même indispensable, de permettre à nos chercheurs d’avancer, dans le respect d’un certain nombre de règles auxquelles nous sommes tous profondément attachés.
Il a d’ailleurs été remarqué, et nous nous en réjouissons, que ce débat a été transpartisan ; c’est la réalité et c’est une excellente chose. Ce doit être le cas sur ce type de textes. La discussion que nous avons eue ce soir a permis de respecter les idées des uns et des autres.
Chers collègues qui vous opposez à ce texte, nous vous avons fait grâce du communiqué publié aujourd'hui par M. Copé ! Quand vous le lirez demain, vous comprendrez que notre objectif n’était pas, et n’est pas, de faire une opération politicienne. Il est de revenir sur ce que nous estimons être, dans la loi de 2011, une erreur, qui est à l’origine de problèmes, car, si elle n’interdisait pas totalement la recherche, elle plaçait les chercheurs dans une situation extrêmement difficile.
Il est nécessaire de sortir de cette situation, d’autant que vous savez où finissent les 150 000 embryons, donc ces cellules embryonnaires. Il est inutile d’y revenir : plusieurs d’entre vous l’ont rappelé et vous avez bien entendu.
Selon moi, il est bon de permettre que certaines de ces cellules soient utilisées par nos chercheurs pour faire avancer la science et la recherche, avec un objectif positif, celui d’apporter une amélioration, en particulier à nombre de malades. De plus, cette mesure est assortie d’un encadrement fort, strict, et il n’y aura aucune marchandisation.
Nous avons entendu et nous respectons le discours qui a été le vôtre. Vous voulez protéger la vie, mais dans des conditions qui, nous, nous paraissent contraires à l’essence même de la vie.
Pour toutes ces raisons, notre groupe, de manière unanime – et je pense que c’est à notre honneur – votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite à mon tour, comme Mme Deroche avant moi, me féliciter de la qualité des débats qui se sont tenus ce soir, à une heure tardive, dont le Parlement est pourtant familier.
Mme Cécile Cukierman. Malheureusement !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que nous siégeons encore à minuit dix !
Je me réjouis également de la présence nombreuse de sénateurs de toutes les commissions, et pas seulement de celle des affaires sociales. Lorsqu’un texte touche un grand nombre de parlementaires, aucun d’entre eux n’hésite à participer au débat, quelle que soit l’heure de la séance. Il le fait avec talent, pour exprimer une opinion que je respecte, quelle qu’elle soit.
Cela a été dit également, ce débat a été transpartisan. À cet égard, je voudrais, une fois n’est pas coutume, remercier M. le rapporteur, Gilbert Barbier, qui a su fédérer autour de ce texte, au-delà de sa seule famille politique et de ses seules opinions. Il nous a permis de nous retrouver sur cette proposition de loi, qui permettra selon moi une avancée de la science.
M. Philippe Bas affirmait tout à l’heure que ce texte, loin de constituer une avancée, n’apportait pas grand-chose. Si tel est le cas, pourquoi ne le vote-t-il pas, dans la mesure où la faculté de faire de la recherche sur l’embryon ne sera pas fondamentalement reconnue ?
Pour ma part, j’estime au contraire que ce texte représente non seulement une véritable avancée pour les scientifiques, mais aussi, Mme Deroche le rappelait, beaucoup d’espoir pour les patients. Nous ne devons pas décevoir toutes celles et ceux qui attendent que la recherche apporte une réponse à leurs problèmes de santé.
Il a beaucoup été question de l’article 46 de la loi de juillet 2011 relative à la bioéthique et des fameux états généraux qu’il prévoit. Je ne reviens pas sur tous ces points, M. Barbier ayant très bien résumé la situation : c’est en effet vouloir se cacher que d’invoquer un tel argument, qui ne tient pas s'agissant des travaux que nous avons menés ce soir.
Par ailleurs, monsieur de Legge, vous vous êtes réjoui, comme nous tous, du débat que nous avons eu. Pour ma part, je me félicite que la motion que vous avez défendue n’ait pas été adoptée. Sinon, nous n’aurions pas pu débattre !
M. Jean Desessard. Bravo !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Quoi qu’il en soit, je vous remercie tous, mes chers collègues, de la qualité de ce débat. Et je salue plus particulièrement M. Barbier, pour le travail qu’il a mené au nom de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique, modifié, constituant l'ensemble de la proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 58 :
Nombre de votants | 305 |
Nombre de suffrages exprimés | 277 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 139 |
Pour l’adoption | 203 |
Contre | 74 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur plusieurs travées de l'UDI-UC et sur certaines travées de l’UMP.)
14
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 5 décembre 2012, à seize heures trente :
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement ;
Rapport de Mme Laurence Rossignol, rapporteur pour le Sénat (n° 177, 2012-2013) ;
Texte de la commission (n° 178, 2012-2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 5 décembre 2012, à zéro heure vingt.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART