M. Alain Néri. Et la surface des toits !
M. Ronan Dantec. Absolument !
Porter un coup d’arrêt à l’étalement urbain et à l’artificialisation des sols constitue selon les écologistes une autre mesure essentielle de prévention.
Or, actuellement, seuls les maires, dans l’exercice de leurs compétences d’urbanisme, gèrent la pression sur le foncier. Ils sont en première ligne, mais ils manquent de moyens. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous demandons le transfert des compétences d’urbanisme au niveau intercommunal, ainsi que le renforcement du rôle des SCOT, les schémas de cohérence territoriale. De même, à l’instar de la mission d’information, nous considérons que les documents d’urbanisme devraient obligatoirement être en conformité avec les PPRI.
Concernant l’urbanisme encore, et en lien direct avec les préconisations du rapport, je tiens à dire que l’aménagement des zones inondables doit faire l’objet de toute notre vigilance. La mission d’information estime que la question de l’aménagement des zones inondables devrait être inscrite dans les SRADDT, les schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire. En effet, intégrer le niveau régional dans notre réflexion nous semble absolument essentiel.
L’aléa inondation peut être réduit par diverses mesures – bassins de rétention, bassins écrêteurs de crues, digues, réseaux d’évacuation des eaux –, mais aussi, probablement, par une autre gestion de l’espace public. Les zones permettant d’écrêter les crues peuvent ainsi devenir des espaces récréatifs, où s’installent théâtres et animations culturelles.
En guise de conclusion, je reprendrai l’une des préconisations, que je juge centrale, de la mission d’information, selon laquelle il convient de clarifier les compétences entre l’État et les collectivités locales et d’assurer à chaque niveau les ressources nécessaires à l’exercice de ces compétences. Je crois, mes chers collègues, que cette question nous occupera beaucoup au cours des prochains mois.
Nous souscrivons donc globalement aux propositions défendues par la mission commune d’information et serons attentifs à ce que la prochaine loi de réforme territoriale participe de cet objectif. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma contribution sera brève. En effet, je ne me livrerai pas à des considérations techniques ou politiques, celles-ci ayant été parfaitement évoquées par le président de la mission commune d’information et le rapporteur. Au reste, quand j’entends dire mission commune d’« information », je réponds « enquête », tant les événements étaient graves et la situation compliquée. Il a donc fallu s’atteler à les débroussailler, à les décortiquer.
Cette initiative parlementaire particulièrement bien menée, je la rapprocherai du principe de la création de la commission pour le contrôle de l’application des lois, qui possède ce même type d’utilité. Il est important de le souligner, car, même si ces contrôles préexistent au sein des commissions, leur formalisation a été en l’occurrence particulièrement opportune. Il faut dire que les prérogatives qui sont attachées aux investigations des commissaires sont d’une telle importance qu’elles donnent à leurs travaux beaucoup de force et d’efficacité. Cette force, il eût été extrêmement regrettable de ne pas l’utiliser dans cette affaire.
L’exercice auquel vous vous êtes astreints, monsieur le président de la mission, monsieur le rapporteur, a été extrêmement difficile. À mon avis, vos convictions concernant l’importance du contrôle de l’application des lois en sont sorties affermies. Faut-il également rappeler que cette partie de notre travail est assez mal connue du public, qui ne voit que le vote de la loi et jamais les opérations de contrôle de l’exécutif ?
De la mission qui s’achève et dont nous débattons ici ce soir, je dirai juste un mot : cette enquête était indispensable, car les catastrophes que nous avons décrites ont eu des conséquences dramatiques. C’est pourquoi je remercie, en tant que Varois, Louis Nègre et mon ami Pierre-Yves Collombat de l’excellence de leur travail. Je salue également l’équipe tout à fait remarquable d’administrateurs qui leur a été affectée.
J’ai eu plusieurs fois l’occasion de voir de près et d’admirer ce travail d’enquête particulièrement ardu. J’ai pu également savourer les échanges musclés de Pierre-Yves Collombat avec des personnages très haut placés, chargés de missions considérables, mais enfermés dans leur routine et leurs certitudes, au point que le style inquisitorial de Pierre-Yves Collombat et de Louis Nègre s’est révélé particulièrement efficace.
Madame la ministre, vous assistez ici à la conclusion d’un très bon travail. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les inondations survenues dans le sud-est de la France en juin 2010 et en novembre 2011 nous rappellent malheureusement que personne n’est à l’abri d’une catastrophe naturelle.
Les habitants de ce territoire frappé durement par des précipitations intenses ont perdu leurs maisons, leurs biens, leurs lieux de vie. La vie locale – maisons, commerces, arbres, automobiles, routes, équipements – a été balayée d’un revers de main.
En dépit de la rapidité des secours, de la présence des autorités de l’État, des élus locaux et des bénévoles, qui ont permis de sauver des vies et dont le travail doit être salué, les inondations ont causé des dégâts importants et de nombreux drames.
Cette mission commune d’information, soutenue par le groupe du RDSE, et l’excellent travail du rapporteur Pierre-Yves Collombat permettent de revenir sur ces tragédies, mais plus encore de mieux prévenir de tels risques et de mieux gérer pareilles situations de crise.
Comme cela a été souligné, nous pouvons nous étonner de l’amnésie collective qui joue dans ces circonstances, et ce quelques mois seulement après la catastrophe. Oublier ces inondations revient à effacer le risque qui pèse sur nos concitoyens et sur nos territoires et à retarder la mise en place d’une politique de prévention efficace.
À l’instar du Var et de nombreux autres départements, ma commune de Saint-Chinian, dans l’Hérault, a connu une terrible inondation dans la nuit du 12 au 13 septembre 1875. Cette nuit-là, on a compté quatre-vingt-dix-sept victimes, cent quarante-neuf maisons détruites et trois cents habitations à détruire à la suite des dégâts qu’elles avaient subis. De plus, deux cents familles furent condamnées à vivre dans la misère à la suite de la destruction du tissu industriel de la commune.
Ainsi que nous le conseille le présent rapport, le fait d’indiquer simplement le niveau de la crue sur certains bâtiments des communes permet de garder en mémoire ces terribles événements. De nombreuses communes ont gravé ces traits, à l’image de ce qui avait été réalisé sur un pilier intérieur de l’église de Saint-Chinian. Il est bien dommage que, plus d’un siècle plus tard, nous constations que les inondations provoquent encore des disparitions humaines. Seule la culture du risque pourra nous épargner la reproduction des mêmes erreurs.
En juin 2010, vingt-trois morts et deux disparus sont à déplorer à la suite d’inondations présentant un caractère exceptionnel. En novembre 2011, quatre victimes étaient encore à déplorer pour un événement dont les caractéristiques étaient pourtant plus classiques.
Il nous faudra maintenant tirer les leçons de la politique des inondations dans notre pays. Tel est précisément l’objet de ce rapport.
L’action préventive vise à limiter les dommages causés par les catastrophes naturelles comme les coûts financiers qui en résultent. Les dégâts provoqués par les inondations de 2010 s’élèvent à 1,2 milliard d’euros. Ces dégâts se sont élevés entre 500 millions d’euros et 800 millions d’euros en 2011.
Or la prévention n’est pas à la hauteur des enjeux, qu’il s’agisse de la prévention et de l’alerte, de l’organisation des secours, de la définition et de l’urbanisation de zones inondables, de la gestion des cours d’eau, de la construction et de l’entretien d’ouvrages de protection des crues. Aucun de ces éléments n’est au point alors que les inondations deviennent plus fréquentes avec l’aggravation du changement climatique.
Le rapport de la Cour des comptes sur les enseignements des inondations sur le littoral atlantique et dans le Var, publié en juillet 2012, démontre que la politique des inondations n’est pas non plus au point dans le sud-ouest de la France. Ainsi, la réflexion sur les pistes d’amélioration doit être menée sur le plan national.
Bien que nous ayons conscience des effets aggravants de l’artificialisation des sols par l’excessive urbanisation des zones inondables, la pression démographique a toutefois conduit les communes à autoriser la construction de nombreux bâtiments. Je rejoins les conclusions du rapport, qui préconisent le renforcement du contrôle de légalité du préfet avec une réelle instruction des dossiers sur le fond.
Les plans de prévention des risques d’inondation, les PPRI, adoptés par le préfet après enquête publique et avis des conseils municipaux, déterminent les zones du territoire exposées au risque d’inondation et s’imposent théoriquement aux documents d’urbanisme présents et futurs. Cependant, les pressions locales liées à l’évolution démographique et au développement de l’activité locale ignorent ces outils de prévention indispensables. Pour preuve, dans ma commune, j’ai refusé dernièrement un permis de construire pour une habitation située en zone inondable. Je viens d’apprendre que le propriétaire sollicitant le permis avait déposé un recours devant le tribunal administratif.
En outre, de nombreux PPRI n’ont pas été adoptés dans leur totalité, ce qui pénalise doublement les victimes des inondations, car les assurances procèdent à l’augmentation des franchises en l’absence de PPRI sur une commune.
Par ailleurs, les documents d’urbanisme devront être actualisés pour tenir compte des évolutions rapides de l’urbanisation dans ces territoires. La Cour des comptes recommande ainsi de rendre contraignante leur actualisation.
La mission d’information a pu également constater l’implantation de services de secours en zone inondable. Aussi est-il urgent de les recenser et de les transférer dans d’autres zones, dans la mesure du possible.
D’autres mesures telles que l’entretien des ouvrages de protection – digues, bassins de rétention, réseaux d’évacuation des eaux – sont urgentes, mais cela coûte très cher. Cela étant, malgré les cofinancements que les collectivités peuvent obtenir, le reste à charge est souvent démesuré au regard du budget des communes.
En ce qui concerne l’entretien des cours d’eau, un partage équilibré des responsabilités doit également être établi. Si la police de l’eau est essentielle à la protection de la ressource, elle ne doit pas constituer un obstacle à l’entretien des cours d’eau non domaniaux en interdisant leur curage. Les propriétaires riverains sont tenus de les entretenir en application du code de l’environnement, mais la tâche s’avère difficile avec la nécessité d’obtenir une autorisation préalable. En conséquence, les collectivités locales se substituent au rôle des propriétaires riverains alors qu’elles ne disposent pas des moyens financiers, qui sont de plus en plus difficiles à obtenir.
Le risque « inondation » engendre un coût élevé pour les finances publiques. Cependant, ce coût restera moins élevé si les dépenses sont consacrées en amont au financement d’une politique efficace de la prévention au bénéfice de la sécurité des biens et des personnes. C’est pourquoi nous espérons que la prochaine loi de décentralisation rétablira un équilibre des rôles et des responsabilités de chacun des acteurs, à savoir l’État, les collectivités territoriales et les compagnies d’assurance. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaiterais avant tout féliciter et remercier à mon tour le président et le rapporteur de la mission d’information, à savoir Louis Nègre et Pierre-Yves Collombat, qui ont fait un excellent travail, se déplaçant sur le terrain et ne bornant pas leurs interrogations au seul département du Var. J’ai personnellement participé à leurs côtés à des auditions et à des déplacements dans le Vaucluse et dans le Gard et je peux témoigner du sérieux de cette mission et du travail constructif qu’elle a accompli, pour reprendre les mots de Louis Nègre.
Les inondations sont toujours un terrible traumatisme pour les populations sinistrées, qui, préparées ou non, voient leurs maisons, leurs véhicules, leur patrimoine, leurs souvenirs et, malheureusement, parfois leurs proches disparaître dans les flots.
Il est exact que les épisodes cévenols ne sont pas une exception varoise ; ils touchent pratiquement toute la Provence et tous les départements : le Gard, la Drôme, le Vaucluse,…
M. Robert Tropeano. Et l’Hérault !
M. Alain Dufaut. … et l’Hérault.
Pour ma part, j’ai eu le triste privilège de vivre les dramatiques inondations de l’Ouvèze à Vaison-la-Romaine, en 1992, lesquelles, je le rappelle, ont fait plus de quarante victimes.
Mes chers collègues, je suis aussi conseiller général de Vaucluse depuis 1982. Sur le territoire de mon canton se trouve l’île de la Barthelasse, sur le Rhône, sur laquelle s’est rendue la mission. Cette île, en plus d’être la plus grande île fluviale d’Europe, avec 650 hectares, est également extrêmement soumise au risque d’inondations – un risque décennal –, puisqu’elle se situe dans une zone d’expansion de crues, une ZEC.
De même, la ville d’Avignon, en raison de sa situation à l’embouchure de la Durance et du Rhône, est évidemment victime des crues du Rhône, les dernières ayant eu lieu en 2003, avec 2,5 mètres d’eau sur l’île de la Barthelasse.
Vous comprendrez donc que, en trente ans de mandat local, j’ai pu constater les effets dévastateurs des crues. J’ai aussi pu voir parfois les évolutions positives en matière de protection contre les inondations ainsi, malheureusement, que les espoirs déçus de certains de nos concitoyens et de nombreux élus.
À ce sujet, je voudrais revenir un bref instant sur le fameux plan Rhône, dont la finalité était bien d’aboutir à une meilleure protection des terres situées au bord du Rhône, bien souvent victimes de ces inondations.
Plusieurs réunions et comités ont été organisés au cours des cinq dernières années pour préparer ce plan Rhône, créant chez les riverains et leurs élus une attente de mesures concrètes seules à même d’améliorer leur protection.
Personnellement, j’ai participé à ces comités, comme tous les parlementaires riverains, les maires, de nombreux autres élus et les syndicats. Or les conclusions finales ont abouti à l’annonce subite, le 24 janvier dernier, par le préfet coordonnateur du bassin Rhône-Méditerranée-Corse, Jean-François Carenco, de la non-mise en œuvre de « l’ensemble du projet d’optimisation de la gestion des zones d’expansion de crues entre Viviers et Beaucaire tel qu’initialement envisagé ».
Au final, après cinq années de réunionnite, alors que plusieurs demandes techniquement réalisables et de nature à accroître la protection de certaines zones contre les inondations avaient été formulées par les différents intervenants, celles-ci ont été tout bonnement abandonnées et seul le confortement des digues de Camargue a été acté et réalisé. Autrement dit, rien en amont de la ville d’Arles !
Des mesures techniques préventives étaient possibles. Je pense non seulement au dragage du Rhône plus largement que le seul chenal de navigation tel qu’il est réalisé actuellement, mais aussi aux vidanges préventives des barrages de la Compagnie nationale du Rhône, qui pourraient atténuer la fréquence des crues du Rhône, à la suppression des embâcles au droit des ouvrages d’art, qui constituent des bouchons naturels pour la fluidité de l’eau, et bien sûr aux transferts de ZEC.
Je veux maintenant dire quelques mots des PPRI, sujet que je connais bien pour avoir travaillé dans le passé avec Nelly Ollin, alors ministre, à leur mise en place.
À l’origine, ils avaient été conçus comme évolutifs. Or, comme l’a justement dit M. le rapporteur, il est désormais quasiment impossible de les amender. Cette situation, contraire à l’aspiration originelle du législateur, empêche toute amélioration de la situation pour certaines zones peuplées, par exemple l’île de la Barthelasse, qui compte 1 000 habitants, et toute reconquête de champs d’expansion de crues sur des terrains quasi vierges.
En clair, nous organisons des débats publics, nous lançons des réflexions, nous faisons espérer certains territoires, des populations, des élus, pour, au final, ne rien faire. Dans ces conditions, autant dire clairement que nous figeons les territoires et que les riverains des zones potentiellement inondables, les ZEC, n’ont qu’à déménager ou assumer leur choix de rester sur ces territoires, avec les risques que cela comporte.
Si la protection des zones densément peuplées est évidemment logique, le fait de laisser d’autres territoires peuplés et économiquement importants être fréquemment inondés sans jamais rien faire pour améliorer leur situation, pour limiter la fréquence des crues, me paraît, en tant qu’élu, proprement inconcevable, surtout lorsque des zones inhabitées et agricoles sont, elles, protégées, à proximité de ces mêmes ZEC.
Aussi, j’invite la représentation nationale à favoriser la mise en eau de zones protégées, mais sans enjeu, car peu peuplées ou faiblement dotées économiquement, et, dans le même temps, à diminuer la vulnérabilité aux inondations de certaines ZEC, plus densément peuplées ou portant une activité économique très importante. C’était l’un des objectifs principaux du plan Rhône, et il n’y a pas été donné suite.
Pour cela, il faudra bien sûr légiférer sur la base de certaines préconisations de la mission commune d’information.
Soyez assurés, monsieur le président de la mission, monsieur le rapporteur, que nous sommes prêts, au Sénat, à poursuivre ce travail législatif à vos côtés. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission commune d’information sur les inondations qui se sont produites dans le Var et, plus largement, dans le sud-est de la France au mois de novembre 2011 a remis un rapport dense et précis, que le Gouvernement a analysé en détail.
Je remercie le Sénat, au nom du Gouvernement, en y associant mon collègue Manuel Valls, qui n’a pu être présent ce soir, d’avoir réalisé ce travail important et utile à un moment où l’État est en train d’élaborer une stratégie nationale de prévention du risque d’inondation.
Je tiens tout particulièrement à rendre hommage au rapporteur, Pierre-Yves Collombat, pour la qualité de son travail. Sa réflexion a été nourrie d’informations extrêmement précises, riches et denses. Je remercie également le président de la mission commune d’information.
Au terme de ce débat, le premier mot qui me vient à l’esprit, c’est celui de responsabilité. En effet, cette discussion a mis l’accent sur une fonction éminente et capitale du ministère de l’écologie : le rôle de prévention des risques naturels et, notamment, des risques majeurs. Cette mission a trait à la sécurité des biens et des personnes dans notre pays.
Comme vous, je songe avant tout aux victimes, notamment à celles des événements dramatiques de juin 2010, qui ont coûté la vie à vingt-trois personnes et ont engendré 1,2 milliard d’euros de dégâts matériels ; je pense également aux victimes des inondations de novembre 2011, lesquelles ont entraîné quatre décès. Et comment ne pas évoquer le drame encore récent qui a coûté la vie à deux étudiants à la fin du mois d’octobre à la suite de la montée rapide des eaux de ruissellement ? Les circonstances de ce drame doivent d’ailleurs encore être éclaircies.
Nul ne peut se résigner à ces pertes humaines. Ce soir, je m’associe naturellement à la douleur des familles et à celle de tous nos concitoyens qui ont subi les conséquences dramatiques de ces catastrophes naturelles. Je tiens également à vous assurer que le Gouvernement travaille à ce que les mêmes causes n’entraînent pas les mêmes effets. C’est un chantier de longue haleine, j’en conviens ; c’est une tâche complexe et difficile. Les élus locaux le savent. Toutefois, l’État est déterminé à améliorer la prévention du risque d’inondation.
À cet égard, monsieur le rapporteur, vous notez que ces différentes crises ne se ressemblent pas. Vous le soulignez, le fonctionnement du dispositif de vigilance et d’alerte et la mise en œuvre des procédures de secours ont permis de limiter, en 2011, l’ampleur des conséquences des inondations.
À l’occasion de ce débat, je tiens à rendre hommage à tous ceux qui œuvrent pour la sécurité des personnes et des biens, lors de la gestion des crises comme en dehors des crises, au titre de la prévention des risques. Je songe bien sûr aux services de secours, aux agents de la sécurité civile, aux pompiers, aux agents de l’État chargés de la prévention des risques dans l’administration centrale ou déconcentrée, sans oublier les personnels des collectivités territoriales qui, au quotidien, s’emploient à réduire l’exposition des populations aux risques naturels.
Je n’oublie pas non plus les élus locaux, qui montent au front dès qu’il s’agit de faire face à des situations d’urgence.
M. Robert Tropeano. Ça, c’est sûr !
Mme Delphine Batho, ministre. De nombreux orateurs ont évoqué la culture du risque. Les événements du Var, comme ceux qui se sont produits il y a tout juste quelques semaines dans le Pas-de-Calais, nous rappellent que la France est un pays soumis à un important risque d’inondation. De fait, si seulement 5 % de la superficie de notre territoire est inondable, plus de 17 millions de Français sont exposés à ce danger. Pis, cette vulnérabilité tend à s’accentuer. Ainsi, le nombre de logements construits en zone inondable a augmenté de 8 % entre 1999 et 2006.
Soit dit par parenthèse, on ne peut pas comparer la situation de la France avec celle des Pays-Bas, dont 60 % du territoire est composé de zones inondables, même si notre pays présente une exposition notable à ce risque.
Au surplus, la France compte 9 millions d’emplois situés en zone inondable ; ce sont autant d’activités et d’entreprises qui peuvent être paralysées en cas d’inondation.
En moyenne, le coût des dégâts causés par les inondations au cours des trente dernières années est de l’ordre 650 à 800 millions d’euros par an. Or, je le rappelle, pour l’État, le budget de la prévention des risques d’inondation s’élève à 250 millions d’euros.
Évidemment – ce constat a déjà été dressé –, ce risque peut être aggravé par les changements climatiques. Au reste, comme le souligne le rapport, les incertitudes persistent quant à l’impact de ces derniers sur les inondations. À ce stade, les études scientifiques ne permettent pas d’identifier par cours d’eau ou par grandes régions géographiques comment le changement climatique va affecter les inondations extrêmes. Sur le littoral, l’élévation du niveau de la mer est un risque quantifiable ; ce travail est bien plus complexe concernant les risques de crue.
Monsieur le rapporteur, je souscris donc à votre conclusion : ces incertitudes ne doivent pas nous conduire à l’inaction. Il est au contraire urgent de redéfinir une politique de prévention des risques à la fois ambitieuse et responsable. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai choisi de faire de la prévention des risques une priorité, dans un contexte budgétaire contraint, en préservant les moyens financiers de l’État consacrés à la politique de prévention du risque d’inondation. Les crédits du Fonds de prévention des risques naturels majeurs enregistrent même une légère augmentation.
Je rappelle que la politique de prévention des risques de l’État repose sur sept piliers.
Premier pilier : la connaissance du risque ; c’est l’enjeu des études menées par les services de l’État.
Deuxième pilier : la prise en compte des risques dans l’aménagement du territoire ; c’est le rôle des PPR, créés par la loi de 1995, qui elle-même faisait suite au drame survenu à Vaison-la-Romaine en 1992. La loi Barnier a ainsi modernisé des outils qui dataient du XIXe siècle et réformé un décret-loi de 1935 relatif aux plans d’exposition aux risques.
Troisième pilier : la vigilance, la prévision et l’alerte. Les services de prévision des crues, les SPC, ont été réformés en 2002 ; en 2007, a été créée une vigilance « pluie-inondations », puis, en 2011, une vigilance « vagues-submersions ».
Quatrième pilier : la réduction de la vulnérabilité non seulement collectivement, c’est le rôle des digues ou des zones d’expansion de crues – pour cela, nous avons un outil, les PAPI, lancés dans les années quatre-vingt-dix –, mais aussi individuellement, via les prescriptions des PPR et les aides du fonds Barnier.
Cinquième pilier : l’information des populations.
Sixième pilier : la gestion de crise.
Septième pilier : les retours d’expérience. Comme de nombreux orateurs l’ont rappelé, l’histoire de la politique de prévention des risques menée par l’État, en particulier sur le plan législatif, a été marquée par les leçons qui ont été tirées d’un certain nombre de catastrophes.
Je souscris largement aux analyses que ce rapport consacre à certaines imperfections de la politique de prévention des inondations. J’ai entendu les interpellations qui sont adressées à l’État, et j’ai la volonté d’y répondre, du moins au titre des domaines relevant de ses attributions. En effet, je le souligne à mon tour, en la matière, les compétences sont étroitement partagées entre l’État et les collectivités territoriales.
Si je ne prétends pas répondre ce soir à toutes les recommandations de votre mission commune d’information, il me semble important de vous soumettre quelques réflexions.
Pour commencer, j’aborderai un thème qui structure une large partie du rapport : la nécessité de définir une stratégie, des objectifs, des moyens adaptés non seulement financiers mais aussi organisationnels, via un suivi de la mise en œuvre de la politique. Il est en effet fondamental que le chantier de prévention des risques fasse l’objet d’une approche transversale et stratégique, en lien avec les autres politiques publiques, notamment celles qui concernent l’aménagement du territoire.
Cette stratégie de gestion du risque d’inondation doit se décliner aussi bien sur le plan national qu’au sein des territoires. Dans ce contexte, il me semble important de nous appuyer sur l’outil que nous donnent la directive européenne relative à la gestion des inondations et sa transposition nationale.
Ainsi, nous devons élaborer collectivement une stratégie nationale de gestion du risque d’inondation. Il convient donc de mettre en œuvre un plan de gestion des risques d’inondation, structurant l’action dans les grands bassins, et des stratégies locales doivent être définies dans les territoires prioritaires identifiés, c’est-à-dire dans les zones soumises à un risque important au sens de la directive.
Ces dispositions sont peu mentionnées dans le rapport. C’est peut-être le signe du caractère encore récent de cette démarche, qui n’est pas encore suffisamment identifiée dans les territoires. Malgré l’importante phase de concertation engagée par l’administration, tant au niveau central que par les préfets coordonnateurs de bassin, nous devons encore mieux communiquer sur cet outil. J’en suis consciente.
Le choix des territoires à risque important est désormais arrêté à l’échelle des bassins. Ensuite, les parties prenantes devront élaborer les plans et stratégies locaux. C’est une démarche capitale, qui doit nous permettre de progresser collectivement.
La Commission mixte inondation, pluripartite, dans laquelle les élus et les territoires sont largement représentés, est chargée d’élaborer la stratégie nationale en la matière. Lors de sa séance du 17 octobre, un débat sur le contenu et la méthode d’élaboration de la stratégie a été conduit sur la base des grands principes et objectifs arrêtés au printemps, en vue de lancer l’élaboration concrète du document final.
Les membres de la commission ont plus particulièrement décidé d’approfondir cinq axes prioritaires : réduire la vulnérabilité lors du renouvellement urbain ; améliorer la connaissance ; se préparer à la crise via une planification ; clarifier la maîtrise d’ouvrage des actions ; et enfin, analyser plus en profondeur les rapports entre l’économie et les risques.
Par ailleurs, j’ai demandé aux services de la Direction générale de la prévention des risques de veiller au bon déroulement des travaux de la commission, d’y associer tous les élus concernés, et que soit menée la plus large consultation permettant d’aboutir à l’adoption de cette stratégie nationale d’ici au mois de juin prochain. De même j’ai demandé aux préfets d’intensifier encore davantage les échanges territoriaux consacrés à l’élaboration des plans de gestion des risques d’inondation et des stratégies locales. Nous devons tous être présents au rendez-vous.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le rapport trace de nombreux axes de travail concrets. J’en retiendrai quelques-uns, pour illustrer la volonté du Gouvernement.
Tout d’abord, j’évoquerai le dispositif de vigilance.
Lorsque survient une crue rapide, l’alerte repose en premier lieu sur le dispositif de prévision des inondations, via la vigilance météorologique et la vigilance « crues ». Grâce à une étroite collaboration entre le réseau du Service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision des inondations, le SCHAPI, et le Service de prévision des crues, le SPC, l’État surveille un linéaire d’environ 20 000 kilomètres de cours d’eau. Ce sont les dispositifs éprouvés des niveaux de vigilance, que le grand public commence à bien connaître.
Néanmoins, votre rapport le souligne, les limites de « l’état de l’art » en matière de prévision – c’est-à-dire des ressources scientifiques et technologiques disponibles – n’ont pas permis à Météo-France, en juin 2010, d’être suffisamment précis pour cibler la zone qui allait être touchée, ni le volume de pluie ou encore la durée précise du phénomène.
Il est donc nécessaire de consacrer un outil complémentaire aux pluies intenses très localisées. En partenariat avec le ministère de l’intérieur, Météo-France a développé un service qui envoie automatiquement un avertissement aux communes qui le désirent, dès que des pluies intenses, voire exceptionnelles sont constatées sur un territoire.
Concernant les dispositifs de prévision, je compte également poursuivre l’équipement du territoire en radars et stations hydrométriques. Dans ce cadre, j’ai proposé au Parlement que les moyens financiers dédiés à la prévision des inondations soient intégralement préservés en 2013.
En matière d’alerte, vous préconisez de mettre en œuvre des procédures de remontée de l’information du terrain vers les centres opérationnels départementaux et les services de protection civile.
C’est le devoir des sapeurs-pompiers que de rendre compte, en toutes circonstances, de leur activité opérationnelle au préfet. Les maires des communes, premiers acteurs de terrain lors de la gestion de crise, informent également l’autorité préfectorale et communiquent avec elle. Ils sont pleinement inclus dans ce dispositif décisionnel de la gestion de crise.
Vous l’avez souligné, au-delà de la connaissance technique des phénomènes, l’essentiel réside dans la pleine maîtrise de l’historique des événements. C’est pour cette raison qu’a été décidée la création de « référents départementaux inondation ». Ces derniers ont pour mission d’être la mémoire des précédents événements, d’être la personne ressource des autorités et le conseiller du préfet en situation de crise.
Enfin, je tiens à vous confirmer que le système d’alerte et d’information des populations, le SAIP, reste une priorité du Gouvernement en matière de sécurité civile. Je le souligne, 44,7 millions d’euros seront inscrits au budget de la mission « Sécurité civile » en vue de la réalisation de ce système, qui a vocation à couvrir l’ensemble des 1 743 bassins de risques identifiés sur le territoire métropolitain.
Ce système de sirènes, totalement rénové, doit être complété par la possibilité d’envoyer des messages vers les téléphones portables, dispositif que vous avez mentionné ; ce système permettra d’accomplir un saut qualitatif évident dans l’alerte et l’information de la population.
Le déploiement du SAIP fait appel aux nouvelles technologies. Il nécessite surtout un partenariat très large et très fort entre les préfectures, les mairies et les exploitants, afin de disposer d’un état des lieux et d’une expression des besoins de bonne qualité, tenant notamment compte des dispositifs existants.
Ce nouveau système sera réellement à la disposition des maires. Ces derniers auront la possibilité de le déclencher dans leur zone de compétence. Ainsi, ils seront pleinement acteurs de la gestion de crise. S’agissant du département du Var, soixante-quatre sirènes seront installées dans le cadre de la première phase de mise en œuvre.
Concernant l’organisation des secours, vous soulignez en particulier que la direction des opérations de secours est « une compétence illusoirement partagée entre le maire et le préfet ».
La compétence accordée au maire par la loi a tout son sens pour les opérations de secours qui concernent une seule commune. Elle va de pair avec sa compétence en matière de police générale et couvre la quasi-totalité des événements survenant à l’échelle d’une commune.
Face à un événement exceptionnel, l’association étroite des maires à la gestion de crise est une nécessité et même un impératif. Elle est constamment rappelée par le ministère de l’intérieur, qui préconise au demeurant la participation systématique des communes aux exercices organisés dans le cadre de ses formations. Les officiers de sapeurs-pompiers qui assument les fonctions de commandant des opérations de secours ont également la charge d’impliquer et d’informer les maires lors des différents événements.
Toutefois, en situation de crise, il faut éviter toute rupture dans la direction des opérations de secours. Le maire conserve une place déterminante dans le dispositif opérationnel. Le rôle du sous-préfet d’arrondissement doit également être renforcé en situation de crise. Premier échelon de la représentation de l’État sur le terrain, les sous-préfets incarnent la proximité et permettent à l’État de conserver une relation permanente avec les élus.
En cas d’événement grave, l’unicité du commandement est le gage de l’efficacité de l’organisation de la réponse. Elle permet aussi d’affecter les moyens au regard d’une situation évaluée à l’échelle départementale.
Le rapport évoque également la question de la planification, et plus particulièrement des plans communaux de sauvegarde et du dispositif ORSEC. Toutes les préfectures de département poursuivent des actions d’incitation et d’accompagnement à la mise en place des plans communaux de sauvegarde. L’accent est mis sur la dimension opérationnelle de ce plan, la nécessité de le tester et de le tenir régulièrement à jour.
Dans le Var, comme vous l’avez relevé, monsieur le rapporteur, les plans communaux de sauvegarde sont plus souvent centrés sur le risque de feu de forêt que sur celui d’inondation ; il convient de corriger cette situation.
Je sais que, dans les plus petites communes, comme dans les villes plus importantes, les citoyens s’engagent pour aider les populations sinistrées en se mettant à la disposition du maire. Cette culture de l’implication des populations, qui était empirique dans chacune des communes, a trouvé un cadre légal en 2004, avec la loi de modernisation de la sécurité civile. Dans le Var, une force de plus de 4 000 citoyens, engagés au sein des comités communaux feux de forêts, a ainsi pu être constituée. Le ministre de l’intérieur souhaite que les associations de sécurité civile, et notamment les réserves communales de sécurité civile, soient mieux reconnues par l’administration centrale. L’implication du citoyen conduira à construire une société plus résiliente, c’est-à-dire mieux adaptée aux changements climatiques et aux risques naturels.
Le rapport évoque par ailleurs la question de l’articulation entre aménagement et urbanisme, en particulier au travers des plans de prévention des risques.
Élaborer des règles nationales, comme le préconise le rapport, est une nécessité. La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « loi Grenelle II », a ouvert la possibilité d’élaborer par décret les règles régissant les plans de prévention des risques. Force est de constater que cette possibilité n’a pas, à ce jour, été utilisée par les précédents gouvernements. Les services de mon ministère ont commencé un travail en ce sens, dont je souhaite qu’il puisse déboucher sur une concertation approfondie avec les parties prenantes, les collectivités territoriales en particulier, au premier semestre de 2013.
Je partage pleinement l’avis du rapporteur, souhaitant que nous passions d’une logique de protection à une logique d’aménagement durable du territoire, intégrant la présence du risque d’inondation non pas comme une contrainte, mais comme un élément de contexte. Le plan de prévention des risques est un outil que l’on peut mobiliser au service de cet objectif, mais il doit s’inscrire dans une approche plus large, dans le cadre d’un projet de territoire. Ainsi, pour prendre un exemple, l’artificialisation des sols et ses conséquences sur le ruissellement doivent être davantage prises en considération aujourd’hui.
En matière de réalisation de plans de prévention des risques d’inondation, la couverture territoriale progresse, avec une stratégie de plans prioritaires. Le bilan des plans est, à bien des égards, intéressant : plus de 8 000 communes sont couvertes par un PPRI approuvé ; récemment, des plans ont été approuvés dans des grandes agglomérations, comme Toulouse, Nîmes, Nancy, sur des territoires qui concentrent à la fois risques d’inondations lourds, enjeux urbains et demande foncière.
Je souscris à l’objectif d’une meilleure appropriation de ces plans, aussi bien par les élus que par les habitants. Cette appropriation passe sûrement par une concertation plus sereine. L’approbation d’un plan de prévention des risques est souvent perçue comme une contrainte par les collectivités. Il ne faut pas nier que les mesures prévues par un plan de prévention des risques sont effectivement contraignantes, mais justifiées par la présence d’un risque et proportionnées à l’importance de ce risque. Nous devons envisager lucidement ce risque et, si la phase de concertation est fondamentale, il appartient également à l’État de prendre ses responsabilités lorsque la concertation n’aboutit pas.
Le rapport souligne également la nécessité de renforcer et de clarifier les compétences en matière de prévention des risques, notamment sur le volet « gestion et entretien des cours d’eau et des digues de protection ». Je m’associe à cette analyse, monsieur le rapporteur : il s’agit, là encore, d’un enjeu clé que d’autres sénateurs ont évoqué dans la discussion. Depuis des années, les problèmes sont identifiés : l’organisation de la gestion des digues, le financement de l’entretien de celles-ci, la définition des responsabilités de leurs gestionnaires, l’organisation et le financement de la gestion de l’entretien des cours d’eau. Il faut à présent y apporter des réponses.
Un premier projet de décret sur l’encadrement des responsabilités des gestionnaires de digues, pris en application de la loi « Grenelle II », a déjà fait l’objet de nombreuses discussions. Celles-ci n’ont pas encore abouti, notamment en raison de craintes légitimes relatives aux financements nécessaires, en particulier pour l’entretien. Nous savons tous que l’état de nos digues est très hétérogène ; il me paraît donc important de ne pas éluder davantage la question de la responsabilité des gestionnaires d’ouvrages. Mais il est également évident qu’on ne pourra pas traiter cette question de façon satisfaisante, sans avoir trouvé des solutions pour le financement pérenne de l’entretien.
Une piste pourrait consister à ouvrir la possibilité aux collectivités locales qui se porteraient gestionnaires de créer une ressource en levant, par exemple, une taxe additionnelle dans les zones protégées par la digue – une telle solution existe historiquement en Savoie. Quoi qu’il en soit, cette solution doit faire l’objet d’une étude préalable. Je souhaite donc pouvoir proposer aux collectivités locales une réflexion sur les compétences et les financements en matière de protection contre les inondations, qui s’appuiera sur le rapport sénatorial, puisque celui-ci propose des pistes intéressantes.
Comme vous, je pense que nous devons plus globalement nous pencher sur la question de la gestion des cours d’eau en général et non de la seule protection contre les inondations. Le Comité national de l’eau, à la demande des élus, a souhaité lancer une réflexion sur ce sujet, y compris sur ses aspects financiers. La proposition de généraliser les établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux et les établissements publics territoriaux de bassin mérite d’être versée à ce débat.
Il n’y aura pas forcément de solution uniforme, compte tenu de la diversité de la nature des risques – submersion marine, débordement de cours d’eau, ruissellement –, des enjeux, de l’histoire et de l’organisation des territoires. Mais il nous appartient de définir un cadre pour que chaque territoire puisse trouver l’organisation qui lui convienne.
Pour conclure, je tiens à réaffirmer l’importance et la constance de l’engagement de l’État pour soutenir les projets des territoires. Au-delà des seuls aspects budgétaires, je maintiendrai le soutien de l’État aux actions contractuelles globales conduites dans les territoires, via les programmes d’action de prévention des inondations et les plans de soutien au renforcement des digues, sans attendre que les stratégies locales prévues par la directive « inondation » soient établies.
Le rythme d’élaboration des projets par les collectivités territoriales et d’instruction par l’État est soutenu : les commissions de sélection de juillet et d’octobre ont validé plus de quinze projets et huit autres sont prêts à être examinés lors des sessions de décembre et de janvier ; le premier projet de PAPI dans le département du Var sera présenté à cette occasion. Depuis 2011, trente-trois nouveaux projets ont été labellisés sur le plan national, pour un coût total de 460 millions d’euros, dont 170 millions d’euros d’aides de l’État.
Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés, en tout état de cause, de la volonté du Gouvernement de travailler avec détermination sur ce sujet prioritaire. Je pense que le rapport d’information du Sénat sera une contribution précieuse et utile aux travaux conduits actuellement dans la perspective de l’élaboration de la stratégie nationale de gestion des risques d’inondation qui doit être établie d’ici au mois de juin prochain. Je souhaite que celle-ci puisse être présentée avant son adoption, dans le cadre des commissions compétentes, à l’ensemble des sénateurs et, en particulier, au président et au rapporteur de la mission commune d’information afin qu’ils puissent vérifier qu’un certain nombre de leurs propositions sont directement retenues. (Applaudissements.)