Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Le sujet est un peu technique, mais il faut comprendre que, là encore, le but de la proposition est d’éviter de pénaliser les PME en difficulté, ce soutien financier constituant la première des demandes des banques pour contribuer à un plan de redressement.
Le présent amendement cible davantage la mesure afin d’atteindre l’objectif anti-abus visé par l’article 14, tout en évitant les conséquences économiques désastreuses pour les PME.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 188 rectifié bis.
M. Philippe Dominati. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, car leur adoption reviendrait à priver d’effet l’article 14. En pratique, l’aide consentie à « la mère » est toujours incorporée aux résultats imposables de « la fille ».
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Je serais beaucoup moins affirmative.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement considère également que l’adoption de ces amendements risquerait de priver la mesure des effets recherchés.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je ne suis pas du tout d’accord avec vous. Les exemples visés par ces amendements existent réellement et ne sont pas des cas d’école. D’ailleurs, s’il n’en était ainsi, nous n’aurions pas pris la peine de présenter cet amendement.
Je ne vois vraiment pas ce qui peut vous gêner dans notre proposition. Vous voulez éviter les abus, mais, en l’espèce, les aides étant intégrées à un résultat imposable, on ne peut pas considérer qu’il y a abus. Votre position n’est vraiment pas logique !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 50 et 188 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié quater, présenté par Mmes Lamure et Procaccia, MM. Milon et Cardoux, Mme Cayeux, M. Gilles, Mmes Bruguière, Deroche et Des Esgaulx, MM. Pierre, Buffet et P. Leroy et Mme Hummel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions précitées ne s’appliquent pas aux petites et moyennes entreprises, au sens européen, c’est-à-dire employant moins de 250 personnes et réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 40 millions d’euros. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. L’article 14 prévoit de rendre non déductibles du bénéfice imposable des entreprises, à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés les aides à caractère financier qu’elles accordent à d’autres entreprises, le plus souvent à leurs filiales.
À l’origine, deux options ont été envisagées. L’une visait à interdire la déduction des seules aides à caractère financier consenties à des filiales étrangères. L’autre conduisait à interdire ces déductions, que les aides soient consenties à des filiales françaises ou étrangères. Dans ce dernier cas, la précision sur les abandons de créances était prévue dans l’article 1586 sexies du code général des impôts ; il conviendrait alors de la supprimer.
Au final, le second choix a été privilégié au motif que la première option exposait la France à un risque d’incompatibilité communautaire sur le fondement de la liberté d’établissement.
Toutefois, si l’objectif anti-abus est louable, ce système pénalisera les PME et notamment celles en difficulté.
Aussi, cet amendement vise à exclure du dispositif prévu par l’article 14 les PME au sens européen, c’est-à-dire celles de moins de 250 salariés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’article 14 s’applique à des groupes d’entreprises, à savoir au moins une « mère » et une « fille ».
Les auteurs de l’amendement entendent exclure les PME, mais ils ne précisent pas s’il s’agit de la « mère », de la « fille » ou des deux.
Cette imprécision rédactionnelle me semble donc être de nature à le disqualifier, mais la commission des finances a néanmoins souhaité connaître l’avis du Gouvernement. M. le ministre sera peut-être en mesure de donner quelques précisions susceptibles de rassurer Mme Procaccia.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement puisque son adoption risque de priver en grande partie l’article 14 de son effet. Vous avez déjà proposé, à l’occasion de la discussion d’un article précédent, cette exclusion du champ d’application de la loi des PME, dont la définition communautaire est très large. Elles pourraient donc continuer leurs pratiques d’optimisation, notamment en faisant remonter en France les pertes subies à l’étranger.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié quater.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 198 rectifié bis, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le I s’applique aux opérations engagées à compter du 1er août 2012.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Le dispositif proposé par l’article 14 tend à prévoir l’interdiction de la déduction des aides pour la société donatrice pour les exercices clos à compter du 4 juillet. Or une entreprise donatrice peut avoir déjà engagé des opérations avant cette date, dans un exercice courant encore. De fait, alors qu’elle comptait sur cette aide déductible pour se maintenir, le texte envisage de mettre à mal sa trésorerie interne.
Par exemple, sur un exercice qui sera clôturé le 31 août 2012, la société A a accordé, le 4 avril 2012, une subvention de 100 000 euros à une société B, visant le comblement du net négatif de cette dernière. La société A devait donc bénéficier d’une déduction de 100 000 euros de son résultat imposable. Or l’opération engagée antérieurement, non seulement au 4 juillet, mais également à l’élection présidentielle et aux annonces du nouveau gouvernement, n’est plus déductible, du fait que l’exercice est clos après le 4 juillet.
Afin de ne pas remettre en cause la déductibilité des aides, il convient de modifier l’entrée en application en prévoyant que la disposition s’appliquera à compter des opérations engagées à partir du 4 juillet, sans tenir compte de la clôture de l’exercice.
Monsieur le ministre délégué, j’ai présenté cet exemple détaillé pour vous prouver que, au travers tant de l’article 12 que de l’article 14, vous imposez aux PME un véritable carcan, et ce au nom de la clause que vous appelez désormais anti-abus, mais qui vise en l’occurrence un dispositif qui n’était que le simple respect de la loi. Plus grave, c’est à vous-même que vous imposez ces contraintes dogmatiques.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est vrai !
M. Philippe Dominati. En effet, en application de l’article 12, vous vous privez pratiquement des moyens de donner un agrément, nonobstant une vague référence à l’emploi et vous manifestez le même état d’esprit à l’égard des amendements proposés à l’article 14.
Je vous ai donc fait la démonstration technique de ce qu’allait entraîner l’application de ces dispositions, à savoir, in fine, la destruction d’emplois. Je m’attends, certes, aux mêmes réponses que précédemment, mais nous tenions, Mme Des Esgaulx et moi-même, à attirer votre attention sur des cas concrets, qui auraient mérité une écoute pragmatique.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. - Le I s’applique aux opérations engagées à compter du 4 juillet 2012.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Cet amendement a été excellemment défendu par M. Dominati, mais je souhaite insister de nouveau sur les méfaits de la rétroactivité, laquelle me choque d’une manière générale. Je souhaiterais donc que nous soyons très attentifs aux problèmes qu’elle pose.
En l'occurrence, il me paraît essentiel de ne pas remettre en cause la déductibilité des abandons de créances antérieurs au 4 juillet 2012. Nous n’avons pas le droit d’en décider autrement. Des engagements ont été pris, il faut les respecter. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement n° 51.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le problème est simple et je ferai le même type de réponse que celle que j’ai faite aux amendements portant sur l’article 12.
Il s’agit cette fois-ci de supprimer une rétroactivité. J’estime qu’il n’y a pas lieu de le faire, car nous risquerions d’atténuer la portée de l’article 14. Dans ces conditions, la commission n’a pu qu’émettre un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Conseil d’État a considéré que cet article ne posait pas de problème de rétroactivité. Il est assez fréquent que le fait générateur de l’impôt soit fixé à la clôture de l’exercice social, donc par forcément au moment de la promulgation de la loi. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. Tous les amendements déposés sur l’article 14 visent à vider celui-ci de sa substance et à faciliter en fait les montages financiers qui existent entre sociétés mères et sociétés filles.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Manifestement, vous ne les connaissez pas !
M. Richard Yung. C’est aussi vrai d’ailleurs pour les transferts de bénéfices et autres manœuvres. Tel est le but que vous visez. Vous avez dû recevoir des liasses toutes préparées puisque vous présentez des amendements identiques, mis à part la date sur laquelle vous ne semblez pas d’accord.
En tout cas, nous ne pouvons pas accepter de voir l’article 14 vidé ainsi de son contenu. Nous voterons donc contre tous ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. N’étant pas une grande spécialiste du droit fiscal, je vais simplement m’exprimer sur la rétroactivité.
Jean Arthuis et moi-même avons voté tout à l’heure un amendement qui portait déjà sur ce problème, amendement qui n’a pas été adopté. Nous comprenons bien la position du Conseil d’État, mais, dans nos territoires, nos permanences, nous entendons les préoccupations de tous ceux qui souhaitent un minimum de stabilité juridique en matière budgétaire et fiscale.
M. Albéric de Montgolfier. Ils ont raison !
Mme Nathalie Goulet. Le fait d’imposer des mesures rétroactives dans une loi de finances rectificative, même si elles sont juridiquement correctes, provoque l’incompréhension, tout le monde n’étant pas conseiller d’État…
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 198 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° 189 est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Compléter cet article par un III ainsi rédigé :
III. - À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 216 A, après les mots : « en numéraire », sont insérés les mots : « en nature ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 52.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Cet amendement vise à permettre aux sociétés mères de bénéficier des dispositions de l’article 216 A du code général des impôts pour ce qui concerne les apports en nature. Au demeurant, je suis sans illusion sur le sort qui lui sera réservé.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On ne sait jamais ! Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 189.
M. Philippe Dominati. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le dispositif de l’article 216 A du code général des impôts est vertueux, puisqu’il conditionne un avantage fiscal à une recapitalisation de la filiale. Je n’ai pas eu le loisir de retrouver les raisons pour lesquelles le législateur a souhaité que la recapitalisation intervienne en numéraire ou par conversion de créances, et non en nature.
Nous pouvons néanmoins les deviner, car l’apport en nature, même placé sous le contrôle d’un commissaire aux apports, présente un caractère de solidité moins affirmé que l’apport en numéraire. Une entreprise peut-elle être sauvée uniquement par des apports en nature ? J’en doute ! Néanmoins, la commission, dont l’avis est plutôt négatif, a souhaité entendre sur ce point le Gouvernement, qui pourra peut-être confirmer son impression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. En effet, monsieur le rapporteur général, les entreprises en difficulté ont moins besoin d’apports en nature que d’apports en numéraire ou en abondement de créances. Le Gouvernement n’est donc pas favorable à une extension du dispositif de l’article 216 A du code général des impôts aux apports en nature.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur général, je dirai que des stocks qui n’appartiennent pas à l’entreprise peuvent constituer un apport en nature susceptible d’aider celle-ci.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 52 et 189.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Article 15
I. – Après le 2 de l’article 39 quaterdecies du code général des impôts, il est inséré un 2 bis ainsi rédigé :
« 2 bis. La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d’un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d’inscription en comptabilité n’est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission. »
II. – Le I s’applique aux cessions de titres reçus en contrepartie d’apports réalisés à compter du 19 juillet 2012.
M. le président. L'amendement n° 219, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
apport
insérer les mots :
, autre que de créances commerciales,
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Il s’agit d’un amendement purement technique.
Lorsqu’une entreprise est en difficulté, elle essaie souvent de reconstituer des fonds propres. L’Assemblée nationale a pris en compte un certain nombre d’apports, mais s’est efforcée d’écarter les valeurs d’apports contestables, notamment sur des participations qui ont moins de deux ans et dont on sait tous ici qu’elles peuvent éventuellement faire l’objet d’acrobaties fiscales.
Si nous pouvons tous nous retrouver sur l’esprit qui préside à cet article, le fait de ne pas avoir distingué les créances commerciales a créé une difficulté.
Il serait tout de même souhaitable de faire en sorte que les vraies créances commerciales, parfaitement établies, puissent être réintégrées dans la valeur réelle, pour conforter la capitalisation d’une entreprise en difficulté. C’est souvent ainsi que procèdent les entreprises mères et les filiales.
Il semblerait que cet amendement, dont M. le rapporteur général a reconnu qu’il était non seulement d’une très grande complexité technique, mais aussi très utile, ait reçu un avis favorable de la commission, ce dont je me réjouis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à exempter du dispositif les recapitalisations par incorporation de créances commerciales. Il est de nature très technique, nous en avions convenu en commission.
Vous le savez, monsieur Delattre, nous avons manqué du temps nécessaire pour l’expertiser dans le détail. C’est la raison pour laquelle j’avais souhaité connaître l’avis du Gouvernement. Dans ces conditions, monsieur le ministre, pouvez-vous préciser votre position ?
M. Francis Delattre. Ce n’est pas du tout l’avis qui a été donné en commission !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Tout d’abord, une telle disposition, si elle était adoptée, reviendrait à accentuer les différences de traitement entre les apports et les abandons de créance. Or celles-ci, on le sait, sont certainement l’une des causes, sinon la plus importante, des maux que nous tentons précisément de traiter.
Par ailleurs, la disposition est parfaitement contraire à l’objectif anti-abus visé au présent article : il s’agit précisément de limiter l’optimisation fiscale liée à la cession de sociétés en difficulté. En tant qu’élus, nous avons probablement tous rencontré ce cas de figure. Des sociétés en difficulté sont reprises dans des conditions telles que le repreneur, en réalité, réalise plus une opération fiscale qu’un projet industriel. En matière d’emploi, ce sont de véritables mirages, qui finissent par se dissiper. Restent l’optimisation fiscale, puis les licenciements et la disparition des entreprises.
Je ne crois vraiment pas que cet amendement s’inscrive dans la philosophie du projet gouvernemental.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. J’ai bien compris que le dispositif anti-abus pouvait être affaibli par cette modalité particulière. Dans la mesure où la portée de l’article ne doit pas être atténuée par ses modalités de mise en œuvre, je ne peux que recommander le rejet de cet amendement. Nous avons, par le passé, observé de trop nombreux abus en la matière. Il convient donc de rester fermes.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. J’ai le regret de dire, sous le contrôle de M. le président de la commission des finances, que vous aviez donné, monsieur le rapporteur général, un avis favorable sur cet amendement, que nous avions adopté. Tous les membres de la commission des finances sont là pour en témoigner.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. La commission souhaitait demander l’avis du Gouvernement, mon cher collègue !
M. Francis Delattre. Cela étant, les discussions avec le Gouvernement ont dû faire évoluer votre position, monsieur le rapporteur général !
Mme Marie-France Beaufils. La commission a demandé à connaître l’avis du Gouvernement, mon cher collègue !
M. Francis Delattre. Quoi qu’il en soit, on sait très bien que les entreprises en difficulté ont du mal à faire rentrer les créances. Soit celles-ci sont valables et peuvent contribuer au renforcement des capitaux propres dont l’entreprise en difficulté a besoin pour être relancée, soit elles ne le sont pas. Or je ne vois pas pourquoi les créances valables seraient frappées plus particulièrement d’un interdit. C’est totalement contraire au droit du commerce !
À mon sens, l’adoption de cet amendement ouvrirait des possibilités plus grandes dans certains cas. Au demeurant, si vous pensez que les créances commerciales doivent être écartées, c’est votre responsabilité !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cher collègue Delattre, la majorité de la commission avait souhaité s’en remettre à l’avis du Gouvernement, que nous venons d’entendre.
Sur le fond, monsieur le ministre délégué au budget, nous aurions besoin de quelques explications complémentaires. Je redoute en effet que ce dispositif ne nous conduise, dans certains cas, à jeter le bébé avec l’eau du bain.
Cet article a dû être réécrit par notre collègue Christian Eckert, rapporteur général à l’Assemblée nationale, ce qui a permis, me semble-t-il, d’apporter une clarification particulièrement utile. Si on allait trop loin, le risque serait de taxer comme un bénéfice dans une filiale un coup d’accordéon classique sur le capital de l’entreprise, décidé pour compenser des pertes ayant rendu les capitaux propres de la filiale négatifs.
Compte tenu de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, si je comprends bien, la moins-value constatée par la maison mère lors d’une cession ultérieure à un repreneur pour un euro symbolique n’est plus déductible.
Je me pose dès lors une question.
En effet, en vertu de l’article 14, qui prévoit la non-déductibilité des abandons de comptes courants, et du présent article 15, une société mère désireuse de combler les pertes de sa filiale en difficulté pour faciliter sa reprise fait une perte non déductible, alors que, si la filiale dépose son bilan, la perte des créances sur la filiale est, me semble-t-il, déductible.
Il est à craindre qu’avec ce type de mesure certains actionnaires ne soient conduits à accélérer le dépôt de bilan et le règlement de la question sous l’égide du tribunal de commerce. Je ne sais pas si c’est une bonne ou une mauvaise chose, cela dépendra des circonstances et des cas particuliers, mais, en tout état de cause, en cas de dépôt de bilan, de procédure collective, la perte des créances sur la filiale deviendra déductible.
Je me demande tout naturellement si ce ne sont pas les emplois qui risqueront d’en pâtir et finalement d’être victimes de l’évolution de l’entreprise.
Dans ce contexte, l'amendement de Francis Delattre mériterait d'être considéré car, à moins que je n’en aie pas fait une lecture correcte tant le sujet est complexe, il me semble être en phase avec l'article 14, qui prévoit la non-déductibilité des « aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l’exception des aides à caractère commercial ». En effet, notre collègue, me semble-t-il, par souci de clarification, a fait le choix de transposer à l'article 15 un dispositif frère, en quelque sorte, de celui qui est prévu à l'article 14.
Monsieur le ministre, nous aurions besoin que vous nous apportiez des éclaircissements afin d’être bien certains que ce dispositif, dont on ne saurait contester le principe et la finalité du point de vue du contrôle fiscal et de la lutte anti-abus, ne soit pas de nature, dans certains cas, à aggraver les difficultés que rencontre actuellement le tissu économique.
M. le président. La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.
Mme Michèle André. Notre collègue Francis Delattre a affirmé à l’instant que le rapporteur général avait émis hier, lors de l’examen des amendements en commission, un avis favorable sur celui qu’il vient de nous présenter. Or, comme l’a également fait remarquer Marie-France Beaufils, le compte rendu de commission atteste bien du fait que le rapporteur général s’en est remis à l’avis du Gouvernement. Je tenais à le préciser.
M. le président. Je mets aux voix l'article 15.
(L'article 15 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 15
M. le président. L'amendement n° 220, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le c du 2 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« c) L'excédent correspondant à des rachats de cotisations ou de primes à l'un des régimes mentionnés au c du 1 du présent I effectués par les personnes affiliées à ces régimes au 31 décembre 2004 ou ayant la qualité de fonctionnaire ou d'agent public en activité et affiliées à ces régimes après le 31 décembre 2004 n'est pas réintégré dans la limite de deux années de cotisations, lorsque ce montant des cotisations ou primes excède la limite définie au a du présent 2 ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
… - La perte de recettes résultant pour l'État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Le présent amendement vise à modifier l’article 163 quatervicies du code général des impôts afin de pérenniser la possibilité de déduction fiscale supplémentaire de deux années de cotisations de rachat.
On dénombrait, en 2009, 37 532 personnes relevant du régime Préfon et des régimes assimilés – Corem et CGOS – ayant procédé à des cotisations de rachat en 2008. Ce nombre est à comparer aux 375 000 affiliés au régime Préfon.
Puisqu’il est question de la Préfon, je ne doute pas que cet amendement bénéficiera d’un soutien unanime de la part des membres de cette assemblée ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement appelle plusieurs observations.
Premièrement, cette dérogation a été conçue comme transitoire dès l’origine, couvrant une période de huit années.
Deuxièmement, il apparaît que le montant global de l’enveloppe de déductions, soit 28 281 euros en 2012, permet de couvrir tant les versements annuels que les rachats.
Troisièmement, la cible visée est restreinte ; moins de 38 000 personnes, affiliées à la Préfon et aux régimes assimilés, ont versé des cotisations de rachat en 2008. Ce nombre est à comparer aux 375 000 affiliés à la Préfon, soit 10 % environ.
S’agissant du nombre de personnes ayant bénéficié de l’enveloppe supplémentaire de déduction, je n’en ai malheureusement pas eu communication.
Quatrièmement, concernant le coût de la dérogation, la seule donnée disponible est le montant de la dépense fiscale correspondant à la déduction des cotisations pour l’ensemble des dispositifs relevant de l’article 163 quatervicies – Préfon, Corem, CGOS et PERP. Il s’élevait en 2011 à 390 millions d’euros.
Pour toutes ces raisons, je ne suis pas certain que cette mesure soit nécessaire. C’est pourquoi la commission serait tentée d’émettre un avis défavorable. Toujours est-il qu’elle s’en remettra à l’avis du Gouvernement.